LAA et AI : Couverture des coûts des prestations pendant la pandémie COVID-19

LAA et AI : Couverture des coûts des prestations pendant la pandémie COVID-19

 

Information du Service central des tarifs médicaux SCTM consultable ici

 

La CTM et le SCTM ont reçu des demandes relatives à la prise en charge des coûts par l’assurance accident obligatoire pour les prestations ambulatoires et hospitalières. Afin de clarifier le plus rapidement possible les questions ouvertes, la SCTM participe à des groupes de travail hebdomadaires avec l’OFSP et les deux associations d’assureurs-maladie (santésuisse et curafutura).

Les fiches d’information ci-jointes contiennent une liste des options de facturation des consultations téléphoniques qui s’appliquent actuellement aux groupes de fournisseurs de prestations concernés.

Les recommandations de l’OFSP et du CTM décrivent également des solutions temporaires pour la facturation des consultations à distance au lieu des consultations au cabinet ou au domicile du patient.

La fiche d’information de l’OFSP « Prise en charge des coûts des traitements stationnaires dans le cadre de la pandémie COVID-19 » réglemente le remboursement des prestations stationnaires pour les cas COVID-19 fournies dans les hôpitaux de soins aigus, les cliniques de réadaptation et les maisons de repos. Les cas de COVID-19 dans les hôpitaux de soins aigus sont facturés selon SwissDRG. Les cliniques de réadaptation et les maisons de repos sont soumises à une taxe spécifique.

En coordination avec l’OFAS et l’AI, une fiche d’information pour le remboursement des moyens auxiliaires a été élaborée.

Les recommandations de l’OFSP et de la CTM ont pour but de garantir une pratique uniforme dans toute la Suisse.

Les écarts tarifaires spécifiques par rapport aux tarifs de la CTM sont indiqués séparément.

 

 

Information du Service central des tarifs médicaux SCTM consultable ici

Fiche d’information du SCTM pour les prestations médicales ambulatoires pendant la pandémie COVID-19 (uniquement en allemand) disponible ici

Fiche d’information pour les prestations paramédicales ambulatoires pendant la pandémie COVID-19 (uniquement en allemand) disponible ici

Fiche d’information pour les moyens auxiliaires pendant la pandémie COVID-19 (uniquement en allemand) disponible ici

Fiche d’information de l’OFSP « Prise en charge des coûts des traitements stationnaires dans le cadre de la pandémie COVID-19 » (en français) disponible ici

 

 

9C_537/2019 (f) du 25.02.2020 – Revenu d’invalide selon ESS – 16 LPGA / Abattement de 15% pour une atteinte au membre supérieur droit et une capacité de travail de 60% (baisse de rendement de 40% sur un 100%)

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_537/2019 (f) du 25.02.2020

 

Consultable ici

 

Revenu d’invalide selon ESS / 16 LPGA

Abattement de 15% pour une atteinte au membre supérieur droit et une capacité de travail de 60% (baisse de rendement de 40% sur un 100%)

 

Assurée, née en 1960, a travaillé en dernier lieu en qualité de tenancière d’une épicerie tea-room.

Dans le contexte d’une demande de prestations de l’assurance-invalidité (déposée le 28.02.2012), l’office AI a été enjoint de se prononcer à nouveau sur le droit à la rente en fonction d’une capacité résiduelle de travail de 60% dans une activité adaptée, fondée sur les conclusions du professeur B.__ et de la doctoresse C.__ (arrêt du Tribunal fédéral du 23 janvier 2017 [9C_422/2016]). Les deux spécialistes en neurologie avaient posé le diagnostic de tremblement psychogène et de trouble moteur dissociatif, concluant à une limitation du rendement en raison de l’impotence fonctionnelle du membre supérieur droit. Par décision, l’office AI a alloué à l’assurée un quart de rente d’invalidité à partir du 01.01.2013, fondé sur un taux d’invalidité de 47%. En bref, il a notamment pris en considération dans la comparaison des revenus déterminants un abattement de 10% sur le revenu d’invalide en raison de l’âge de l’assurée et du fait que seules des activités légères restaient possibles.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/556/2019 – consultable ici)

En ce qui concerne l’abattement sur le salaire statistique, les juges cantonaux se sont référés à la casuistique du Tribunal fédéral relative aux déductions pratiquées pour des assurés qui ont une main partiellement ou complètement non fonctionnelle. Ils ont admis que la déduction de 10% retenue par l’office AI était inférieure à la quotité généralement admise pour ce motif, de sorte qu’elle s’avérait problématique pour des questions d’égalité de traitement entre assurés. A cela, il fallait tenir compte de l’âge de l’assurée, également susceptible de réduire son revenu d’invalide. Compte tenu de l’ensemble des circonstances, la déduction de 10% apparaissait insuffisante, tandis qu’un abattement de 15% était plus approprié.

Par jugement du 06.06.2019, admission du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant le droit de l’assurée à une demi-rente d’invalidité dès le 01.01.2013. La cour cantonale a considéré que l’abattement sur le salaire statistique devait être fixé à 15%, ce qui entraînait un taux d’invalidité de 50%.

 

TF

En ce qui concerne la fixation du revenu d’invalide (cf. art. 16 LPGA) sur la base des statistiques salariales, il est notoire, selon la jurisprudence, que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d’une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb p. 323). La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent par conséquent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité, autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79).

Le point de savoir s’il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d’autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral; en revanche, l’étendue de l’abattement du salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit, soit si celle-ci a commis un excès positif (« Ermessensüberschreitung ») ou négatif (« Ermessensunterschreitung ») de son pouvoir d’appréciation ou a abusé (« Ermessensmissbrauch ») de celui-ci, notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 72; 132 V 393 consid. 3.3 p. 399; 130 III 176 consid. 1.2 p. 180).

 

L’assurée présente une capacité de travail de 60% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles du membre supérieur droit. Le professeur B.__ a indiqué que la main droite, malgré le tremblement, était encore utilisable en appui à la gauche, que les travaux de précision et les gestes fins étaient impossibles, que le port d’objets de plus de 5 kg était à proscrire, et que l’écriture restait possible, bien que difficile. Or ce sont précisément ces limitations qui ont justifié aux yeux des experts la diminution de la capacité de travail à 60%, la baisse de rendement de 40% étant due aux stratégies que l’assurée devait mettre en place pour fonctionner en utilisant « ce qu’il reste de son bras et sa main droite » dans un milieu professionnel.

Il n’y a pas lieu dans le cadre de l’abattement sur le revenu d’invalide de tenir compte une seconde fois de limitations qui ont été prises en considération lors de l’évaluation de la capacité de l’assurée sous l’angle médical (voir par ex. arrêts 9C_273/2019 du 18 juillet 2019 consid. 6.1 et 9C_847/2018 du 2 avril 2019 consid. 6.2.3).

Ce nonobstant, la juridiction cantonale n’a pas violé le droit ni abusé ou excédé de son pouvoir d’appréciation en fixant à 15% l’abattement sur le revenu d’invalide. En effet, au regard des activités citées par les experts neurologues puis l’office AI, il apparaît que le spectre des activités légères adaptées pouvant entrer en considération dans le cas d’espèce est fortement réduit. On ne voit ainsi pas que les activités de « patrouilleuse » scolaire ou surveillante scolaire soient exigibles d’une assurée dont le bras droit est atteint de tremblements pratiquement constants, au regard de la responsabilité inhérente aux postes cités. A l’inverse par ailleurs de ce que prétend l’office AI, l’égalité de traitement fait partie des principes de droit constitutionnel qui régissent l’activité de l’administration et des autorités judiciaires, de sorte qu’on ne saurait reprocher aux juges cantonaux d’avoir pris en considération la pratique du Tribunal fédéral concernant la déduction sur le salaire statistique dans le cas de personnes assurées privées partiellement ou complètement de l’usage d’un membre supérieur (cf. arrêt 8C_58/2018 du 7 août 2018 consid. 5.3 et les arrêts cités).

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_537/2019 consultable ici

 

 

9C_546/2019 (f) du 13.01.2020 – Responsabilité de l’employeur – Comportement fautif de l’employeur – Négligence grave / 52 LAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_546/2019 (f) du 13.01.2020

 

Consultable ici

 

Responsabilité de l’employeur – Comportement fautif de l’employeur – Négligence grave / 52 LAVS

 

B.__ Sàrl (ci-après : la société), inscrite au registre du commerce de Genève en novembre 2008, a été dissoute par suite de faillite prononcée par jugement du 24.08.2017 et radiée du registre du commerce en janvier 2018. A.__ en était l’associée gérante, avec signature individuelle.

Par décision, confirmée sur opposition, la caisse de compensation a réclamé à A.__, en sa qualité d’associée gérante de la société, la somme de 107’882 fr. 96 à titre de réparation pour le dommage subi à la suite du non-paiement de cotisations sociales entre le 01.01.2016 et le 30.11.2016.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/570/2019 – consultable ici)

Par jugement du 25.06.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon la jurisprudence, commet notamment une faute ou une négligence grave au sens de l’art. 52 al. 1 LAVS, l’employeur qui verse des salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlent de par la loi ne sont pas couvertes (cf. arrêts 9C_848/2018 du 21 janvier 2019 consid. 4.2; 9C_713/2013 du 30 mai 2014 consid. 4.2.3 et les références). En conséquence, si les ressources financières de la société ne lui permettaient pas de payer les cotisations paritaires dans leur intégralité, il eût appartenu à l’employeur – soit à A.__ en sa qualité d’associée gérante de la société – de ne verser que les salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlaient de par la loi pouvaient être couvertes.

 

Selon la jurisprudence, il existe certains motifs de nature à justifier ou à excuser le comportement fautif de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS (ATF 108 V 183 consid. 1b p. 186; arrêts H 28/88 du 21 août 1985 consid. 2, in RCC 1985 p. 603 et H 8/85 du 30 mai 1985 consid. 3a, in RCC 1985 p. 647). Cependant, s’il peut arriver qu’un employeur parvienne à maintenir son entreprise en vie, par exemple lors d’une passe délicate dans la trésorerie, en retardant le paiement de cotisations, il faut encore, pour qu’un tel comportement ne tombe pas ultérieurement sous le coup de l’art. 52 LAVS, que l’on puisse admettre que celui-ci avait, au moment où il a pris sa décision, des raisons sérieuses et objectives de penser qu’il pourrait s’acquitter des cotisations dues dans un délai raisonnable (ATF 108 V 183 consid. 2 p. 188, confirmé dans ATF 121 V 243; cf. aussi arrêt 9C_338/2007 du 21 avril 2008 consid. 3.1). En l’occurrence, ces conditions ne sont pas remplies.

Le fait d’avoir procédé à des restructurations, en réduisant le nombre d’employés de 31 en début 2015 à 19 en 2016, ne constitue pas un motif d’exculpation suffisant. Si ces démarches étaient susceptibles de conduire à l’assainissement de la société, il n’en demeure pas moins, au vu de l’importance du retard accumulé par la société dans le versement des cotisations sociales, qu’elles ne constituent pas des éléments suffisamment concrets et objectifs pour admettre que la situation économique de la société allait se stabiliser dans un laps de temps déterminé. L’associée gérante ne prétend par ailleurs pas qu’au moment où elle a pris la décision de retarder le paiement des cotisations sociales dues, elle avait des raisons sérieuses et objectives de penser qu’elle pourrait s’acquitter de celles-ci dans un délai raisonnable. Les difficultés financières rencontrées par la société n’étaient du reste pas passagères, dès lors qu’il ressort des constatations cantonales que B.__ Sàrl a fait l’objet de divers rappels, sommations et poursuites s’agissant du paiement des cotisations sociales depuis 2012.

En conséquence, il n’y a pas lieu de s’écarter des conclusions des juges cantonaux selon lesquelles, en laissant en souffrance, pendant plus d’une année, les créances de la caisse de compensation, A.__ a commis une négligence qui doit, sous l’angle de l’art. 52 LAVS, être qualifiée de grave.

 

Le TF rejette le recours de l’employeur.

 

 

Arrêt 9C_546/2019 consultable ici

 

 

1C_470/2019 (f) du 31.01.2020 – Retrait du permis de conduire – Faute moyennement grave – 16b LCR / Méconnaissance de la langue allemande (alléguée lors du recours au TF) non retenue

Arrêt du Tribunal fédéral 1C_470/2019 (f) du 31.01.2020

 

Consultable ici

 

Retrait du permis de conduire – Faute moyennement grave / 16b LCR

Méconnaissance de la langue allemande (alléguée lors du recours au TF) non retenue

 

Le 14.05.2018, à Berne, non loin du centre commercial Westside, A.__ a été impliqué dans un accident de la circulation, la voiture qu’il conduisait étant entrée en collision, après qu’il avait tenté une manœuvre de dépassement, avec la voiture qui le précédait.

Par ordonnance pénale du 01.06.2018, le ministère public l’a condamné pour violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR), en relation avec les art. 34 al. 3 et 4 et 35 al. 2 et 3 LCR et l’art. 10 al. 1 OCR, à une amende de 300 francs. Aucune opposition n’a été formée contre cette ordonnance pénale.

Le 13.06.2018, l’Office de la circulation routière et de la navigation (OCRN) a informé A.__ de l’ouverture d’une procédure administrative à la suite de l’infraction commise le 14.05.2018. L’intéressé a pris position le 25.06.2018.

Par décision, l’OCRN a ordonné le retrait du permis de conduire de A.__ pour une durée d’un mois en raison d’une infraction moyennement grave aux règles de la circulation routière.

 

Procédure cantonale

Par arrêt du 21.11.2018, la Commission de recours du canton de Berne contre les mesures LCR a rejeté le recours formé par A.__ contre la décision.

 

TF

A ses art. 16a à 16c, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves. Selon l’art. 16a al. 1 LCR, commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation routière, met légèrement en danger la sécurité d’autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée. Commet en revanche une infraction grave selon l’art. 16c al. 1 let. a LCR la personne qui, en violant gravement les règles de la circulation routière, met sérieusement en danger la sécurité d’autrui ou en prend le risque. Entre ces deux extrêmes, se trouve l’infraction moyennement grave, soit celle que commet la personne qui, en violant les règles de la circulation routière, crée un danger pour la sécurité d’autrui ou en prend le risque (art. 16b al. 1 let. a LCR). Le législateur conçoit cette dernière disposition comme l’élément dit de regroupement: elle n’est ainsi pas applicable aux infractions qui tombent sous le coup des art. 16a al. 1 let. a et 16c al. 1 let. a LCR. Dès lors, l’infraction est toujours considérée comme moyennement grave lorsque tous les éléments constitutifs qui permettent de la privilégier comme légère ou au contraire de la qualifier de grave ne sont pas réunis. Tel est par exemple le cas lorsque la faute est grave et la mise en danger bénigne ou, inversement, si la faute est légère et la mise en danger grave (ATF 136 II 447 consid. 3.2 p. 452).

En principe, l’autorité administrative statuant sur un retrait du permis de conduire ne peut pas s’écarter des constatations de fait d’un jugement pénal entré en force. La sécurité du droit commande en effet d’éviter que l’indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits (ATF 137 I 363 consid. 2.3.2 p. 368 et les références). L’autorité administrative ne peut s’écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n’ont pas été prises en considération par celui-ci, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 p. 101 s. et les références). Cela vaut non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d’une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également, à certaines conditions, lorsque la décision a été rendue à l’issue d’une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police. Il en va notamment ainsi lorsque la personne impliquée savait ou aurait dû prévoir, en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés, qu’il y aurait également une procédure de retrait de permis. Dans cette situation, la personne impliquée est tenue, en vertu des règles de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale, le cas échéant en épuisant les voies de recours à sa disposition. Elle ne peut pas attendre la procédure administrative pour exposer ses arguments (ATF 123 II 97 consid. 3c/aa p. 104; 121 II 214 consid. 3a p. 217 s.).

 

Se référant à l’ordonnance pénale du 01.06.2018, rédigée en allemand, la cour cantonale a retenu qu’en date du 14.05.2018, vers 19h35, A.__ avait alors entamé une manœuvre de dépassement du véhicule qui le précédait et avait déboité à gauche. Alors qu’il s’était aperçu qu’un véhicule arrivait en sens inverse, il s’était rabattu à droite et, ce faisant, était entré en collision avec le véhicule circulant devant lui.

A.__ ne démontre pas avoir invoqué un grief tiré d’une méconnaissance de la langue allemande lors de la procédure cantonale de recours. Il ne soutient pas, du reste, que l’autorité précédente aurait commis un déni de justice en ne l’examinant pas. En procédant de la sorte, A.__ agit d’une manière contraire à la bonne foi en procédure qui interdit de saisir les juridictions supérieures d’un éventuel vice qui aurait pu être invoqué dans une phase antérieure du procès (cf. ATF 143 IV 397 consid. 3.4.2 p. 406; ATF 143 V 66 consid. 4.3 p. 69; ATF 135 III 334 consid. 2.2 p. 336).

A.__ s’est abstenu, durant la procédure pénale, de toute critique quant à des difficultés liées à la langue utilisée par les policiers qui l’ont interrogé à la suite des faits du 14.05.2018, aucun élément ne permettant par ailleurs de déduire que le rapport de police puisse constituer une preuve absolument inexploitable. Il ressort ainsi de ce rapport, rédigé certes en allemand, que le recourant avait été interrogé en français (cf. page de garde: « Verhandlungssprache: Französisch ») et qu’il avait été informé de ses droits de prévenu (cf. procès-verbal du recourant, « Aussagen der befragten Person nach Belehrung gem. BBK für BP [Beschuldigte] »), alors que le rapport ne faisait pas état de réserves quant à des problèmes de compréhension, que ce soit de la part de A.__ ou des policiers. Du reste, il apparaît que les déclarations consignées lors de l’interrogatoire de A.__, qui avait duré plus de 30 minutes, correspondaient à la version présentée ultérieurement par A.__ dans sa prise de position du 25.06.2018 adressée à l’OCRN, à savoir que sa manœuvre de dépassement avait dû être avortée en raison d’un véhicule venant en sens inverse, qui roulait à une vitesse inadaptée.

D’autres éléments sont par ailleurs propres à illustrer que A.__, qui a allégué exercer la profession de juriste, avait bien compris les termes contenus dans l’ordonnance pénale et les conséquences sur la procédure administrative d’une absence d’opposition dans le délai légal. Il ressort en effet du dossier cantonal, en particulier de la prise de position précitée du 25.06.2018, qu’il avait été informé, en français, de l’ouverture d’une procédure administrative en date du 15.06.2018. Dans ses déterminations, alors qu’il avait allégué que l’ordonnance pénale du 01.06.2018 lui avait été notifiée le 13.06.2018 et que le délai d’opposition courait partant jusqu’au 25.06.2018, il avait indiqué ne pas s’être opposé à l’ordonnance pénale précitée « d’une part puisque les frais d’une procédure seraient exagérés en regard à l’amende, et d’autre part, parce [qu’il n’avait] aucune nouvelle de la police concernant la voiture responsable de l’accident, soit le véhicule inconnu qui roulait à une vitesse totalement inadaptée et imprévisible », de sorte « [qu’il] ne dispos[ait] pas de preuves suffisantes du déroulement de l’événement pour [se] disculper totalement ». Au reste, alors qu’il alléguait dans cette écriture « [ne pas avoir] mandaté de représentant judiciaire (avocat), ni annoncé le sinistre à l’assurance de protection juridique », A.__ – ressortissant suisse alors domicilié à Wohlen bei Bern (Hinterkappelen), soit une commune du canton de Berne dont l’allemand est la seule langue officielle – faisait référence à « une excellente contribution de Christophe A. Herzig, sous le titre Abgrenzung zwischen einfacher und grober Verkehrsregelverletzung, parue dans Strassenverkehr 2/2016 ».

Pour le surplus, on ne voit pas que la cour cantonale aurait versé dans l’arbitraire en omettant de prendre en considération une méconnaissance du recourant de la langue allemande, qui l’aurait empêché de faire valoir ses droits dans la suite de la procédure pénale. Les différents éléments évoqués ci-dessus tendent au contraire à conforter le sentiment que le grief est invoqué au mépris des règles de la bonne foi (art. 5 al. 3 Cst.).

 

Le TF rejette le recours de A.__.

 

 

Arrêt 1C_470/2019 consultable ici

 

 

8C_574/2019 (f) du 28.02.2020 – Revenu sans invalidité – 16 LPGA – Prise en compte des indemnités de pause

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_574/2019 (f) du 28.02.2020

 

Consultable ici

 

Revenu sans invalidité / 16 LPGA

Prise en compte des indemnités de pause

 

Assuré, né en 1965, maçon, a été victime le 15.01.2014 d’un accident de travail, lors duquel il s’est blessé au niveau de la jambe droite et du pied gauche.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a alloué à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur un taux d’invalidité de 11% à compter du 01.10.2016. L’assurance-accidents a déterminé le revenu sans invalidité en tenant compte d’un salaire horaire de 28 fr. 45, de 2174 heures de travail par an et du treizième salaire. Aussi a-t-elle considéré que l’assuré aurait perçu en 2016 un revenu sans invalidité de 67’003 fr., s’il avait pu continué à travailler à plein temps comme maçon.

 

Procédure cantonale

La cour cantonale a calculé le revenu sans invalidité sur la base du salaire horaire de 28 fr. 45 augmenté de 2 fr. 36 pour tenir compte du 13e salaire (8,30%) et d’une durée de travail de 42 heures hebdomadaires multipliées par 52 semaines par an, soit 2184 heures annuelles. A ce dernier propos, la cour cantonale a relevé que l’employeur avait annoncé 2174 heures lors d’une rencontre avec les parties le 19.10.2016 puis donné un autre chiffre, soit 2112 heures, lors d’un téléphone du 28.10.2016. Elle a donc considéré qu’il convenait plutôt de se reporter aux indications figurant dans la déclaration de sinistre du 29.01.2014. Enfin, les juges cantonaux ont ajouté au montant obtenu – de 67’289 fr. 04 ([28,45 + 2,36] x 42 x 52) – des indemnités de pause à hauteur de 2736 fr. Le revenu sans invalidité s’élevait ainsi à un total de 70’025 fr., de sorte que la comparaison avec un revenu d’invalide de 59’658 fr. aboutissait à un taux d’invalidité de 14,8%, arrondi à 15%.

Par jugement du 20.08.2019, la cour cantonale a très partiellement admis le recours, a annulé la décision et mis l’assuré au bénéfice d’une rente d’invalidité fondée sur un taux d’invalidité de 15% dès le 01.10.2016.

 

TF

Pour déterminer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l’assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s’il n’était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. C’est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l’assuré avant l’atteinte à la santé, en posant la présomption qu’il aurait continué d’exercer son activité sans la survenance de son invalidité (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 p. 30; 129 V 222 consid. 4.3.1 p. 224 et la référence). Le salaire réalisé en dernier lieu par l’assuré comprend tous les revenus d’une activité lucrative (y compris les gains accessoires, la rémunération des heures supplémentaires effectuées de manière régulière) soumis aux cotisations AVS (arrêt 8C_449/2015 du 6 avril 2016 consid. 3 et la référence).

Selon le Tribunal fédéral, on ne saurait en l’espèce reprocher aux juges cantonaux de s’être fondés sur le nombre d’heures hebdomadaires de travail fixé par l’employeur plutôt sur la durée annuelle de travail selon la convention collective de travail. En effet, le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible, y compris lorsque le total des heures annuelles de travail effectivement accomplies est supérieur à la durée annuelle de 2112 heures de travail prévue dans la convention collective de travail.

En outre, il ressort des décomptes de salaire figurant au dossier que les indemnités de pause étaient versées en sus de la rémunération de base, à savoir la rémunération calculée sur la base du salaire horaire, et qu’elles étaient rémunérées séparément à raison de 8 fr., puis 8 fr. 50, par jour ou unité. Dans ces conditions, il n’est pas possible de retenir que les 2736 fr. ajoutés par la cour cantonale – correspondant au montant annuel effectivement versé à l’assuré à titre d’indemnités de pause – étaient déjà inclus dans le revenu annuel calculé sur la base du salaire horaire.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_574/2019 consultable ici

 

 

Suicide et assurances sociales

Suicide et assurances sociales

 

Article paru in Jusletter, 30 mars 2020

 

En Suisse, le suicide constitue la quatrième cause de mort précoce en termes d’années de vie potentielles perdues, après le cancer, les maladies cardiovasculaires et les accidents. Des actes suicidaires existent dans toutes les classes d’âge, chez les hommes comme chez les femmes et dans toutes les catégories socio-économiques. Face à cette réalité sociétale, comment les principales branches de l’assurance sociale abordent-elles le problème du suicide ?

 

Publication : Suicide et assurances sociales – David Ionta – Jusletter 2020-03-30

 

 

8C_10/2019 (f) du 13.02.2020 – Suspension de l’indemnité chômage – Assurée ayant renoncé à faire valoir des prétentions de salaire envers son dernier employeur – 30 al. 1 lit. b LACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_10/2019 (f) du 13.02.2020

 

Consultable ici

 

Suspension de l’indemnité chômage – Assurée ayant renoncé à faire valoir des prétentions de salaire envers son dernier employeur / 30 al. 1 lit. b LACI

Licenciement immédiat pour faute grave non justifié mais non contesté par l’assurée – Obligation de réduire le dommage

 

Assurée, née en 1969, responsable « finances et administration » dès le 01.09.2015. L’employeur a résilié, le 29.02.2016, les rapports de travail avec effet immédiat au motif que l’intéressée avait gravement manqué à ses obligations contractuelles en relation avec une escroquerie commise par des tiers au préjudice de la société. En outre il indiquait lui allouer, à bien plaire, un montant de 30’000 fr. non remboursable, au titre de soutien à sa famille et afin qu’elle puisse assumer ses obligations dans l’attente de retrouver une nouvelle activité auprès d’un autre employeur.

L’intéressée a requis des prestations de l’assurance-chômage à partir du 01.03.2016 en indiquant rechercher une activité à plein temps et en exposant avoir reçu de l’employeur une somme de 30’000 fr. lors de la résiliation des rapports de travail, au titre de prestation financière supplémentaire au salaire. Selon l’attestation de l’employeur, la durée du délai de congé était de six mois et le dernier salaire mensuel perçu de 11’000 fr. Invitée par la caisse de chômage à fournir des informations complémentaires, l’assurée a notamment indiqué qu’elle avait finalement renoncé à ouvrir une action en dommages-intérêts pour non-respect du délai de congé et que le montant de 30’000 fr. versé par l’employeur consistait en une indemnité de départ.

La caisse de chômage a suspendu le droit de l’assurée à l’indemnité journalière pour une durée de quinze jours, motif pris qu’en s’abstenant de faire valoir ses droits découlant d’un licenciement avec effet immédiat injustifié, l’intéressée avait renoncé de manière fautive au paiement d’une indemnité correspondant à six mois de salaire.

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 135/18 – 202/2018 – consultable ici)

Le contrat de travail avait été résilié avec effet immédiat par l’employeur le 29.02.2016 et que l’assurée n’avait pas introduit d’action en réparation du dommage résultant du fait que le délai de résiliation de six mois n’avait pas été respecté. Quant au montant de 30’000 fr. payé par l’employeur, il consistait en un versement exceptionnel, alloué à bien plaire afin de soutenir la famille de l’intéressée, et il n’avait pas eu pour effet de modifier la nature de la résiliation des rapports de travail, soit un licenciement avec effet immédiat pour justes motifs.

L’escroquerie qui était à l’origine du licenciement était particulièrement astucieuse, de sorte que l’on ne pouvait reprocher une faute grave à l’assurée en dépit de la fonction élevée qu’elle exerçait en sa qualité de responsable des finances et de l’administration et qui impliquait un devoir de vigilance et de précaution particulière. Les qualités professionnelles de l’intéressée étaient d’ailleurs reconnues par l’employeur qui avait rédigé un certificat de travail intermédiaire élogieux le 04.12.2015. Selon la cour cantonale, il paraissait au demeurant peu probable que l’employeur eût alloué la somme de 30’000 fr. à l’occasion du licenciement s’il estimait que l’intéressée avait commis une faute grave. Les juges cantonaux infèrent de l’ensemble de ces éléments que la confiance mutuelle entre les parties n’était pas irrémédiablement rompue au point d’empêcher la continuation des rapports de travail jusqu’à l’expiration du délai de congé de six mois.

Enfin, en ce qui concerne la renonciation de l’assurée à faire valoir ses droits, la cour cantonale a rejeté l’argument de l’intéressée selon lequel elle craignait le dépôt d’une plainte pénale par son ancien employeur. Cela étant, elle a considéré que l’assurée ne pouvait pas renoncer à contester le licenciement et à faire valoir ses prétentions de salaire. Quant à la durée de la suspension (quinze jours), elle correspondait à la sanction d’une faute légère (art. 45 al. 3 let. a OACI) et n’était pas critiquable.

Par jugement du 19.11.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 30 al. 1 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu notamment lorsqu’il est établi que celui-ci est sans travail par sa propre faute (let. a) ou qu’il a renoncé à faire valoir des prétentions de salaire ou d’indemnisation envers son dernier employeur, cela au détriment de l’assurance (let. b).

Le comportement du salarié qui consiste à accepter un congé donné par un employeur en violation du délai contractuel ou légal, à consentir à la résiliation anticipée des rapports de travail ou à refuser la continuation du contrat jusqu’à son terme est susceptible de tomber sous le coup de l’art. 30 al. 1 let. a LACI (ATF 112 V 323 consid. 2b p. 325). En effet, dans le cas où, par exemple, le congé a été donné sans respecter le délai légal ou contractuel, l’employé n’est pas fondé à élever des prétentions de salaire ou en dommages-intérêts pour la période allant jusqu’au terme régulier du contrat lorsqu’il l’accepte sans opposition. Or, en l’absence de droit à un salaire, il ne peut ainsi pas y avoir renonciation à faire valoir des prétentions au sens de l’art. 30 al. 1 let. b LACI (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 76/00 du 10 mai 2001 consid. 2a; cf. BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 45 ad art. 30 LACI; THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3 e éd., n. 842 p. 2517).

Aux termes de l’art. 337 CO, l’employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs; la partie qui résilie immédiatement le contrat doit motiver sa décision par écrit si l’autre partie le demande (al. 1); sont notamment considérées comme de justes motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d’exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (al. 2). En règle générale, seul un manquement particulièrement grave peut justifier une telle mesure (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s’il a été répété malgré un avertissement (ATF 130 III 213 consid. 3.1 p. 220).

 

L’assurée allègue que, même si elle pouvait penser que le congé avec effet immédiat n’était pas justifié, elle n’a pas voulu introduire une procédure dans laquelle elle aurait eu plus à perdre qu’à gagner puisque le montant correspondant à six mois de salaire (67’500 fr.) était largement inférieur au préjudice subi par la société du fait de l’escroquerie. Aussi, l’intéressée est-elle d’avis que même si le licenciement avec effet immédiat n’était pas justifié, on ne saurait lui reprocher d’avoir renoncé, après une évaluation soigneuse des risques, à introduire une procédure judiciaire aléatoire, à l’issue de laquelle elle s’exposait à devoir réparer le préjudice subi par la société. C’est pourquoi elle soutient que la cour cantonale ne pouvait lui imputer à faute sa renonciation à agir contre son ancien employeur et la suspension de son droit à l’indemnité journalière était ainsi infondée.

En l’occurrence, il est constant qu’aucune faute grave ne pouvait être imputée à l’assurée en relation avec le préjudice subi par la société à la suite de l’escroquerie. En outre, il n’apparaît pas que la confiance mutuelle entre les parties était irrémédiablement rompue au point d’empêcher la continuation des rapports de travail jusqu’à l’expiration du délai de congé contractuel de six mois. Au demeurant, l’assurée ne conteste en rien le point de vue de la cour cantonale, selon lequel le licenciement avec effet immédiat prononcé par l’employeur était injustifié. Cela étant, en voulant, comme elle le dit, éviter le risque d’un procès éventuel portant sur des conclusions reconventionnelles de l’employeur, l’intéressée a fait en réalité supporter à l’assurance-chômage le dommage découlant de sa renonciation à faire valoir des prétentions contractuelles. Or, laisser à l’appréciation de la personne assurée le choix d’agir ou non contre l’employeur apparaît manifestement contraire à l’obligation générale de diminuer le dommage qui incombe à la personne qui requiert des prestations. C’est d’ailleurs précisément pour limiter des abus éventuels que le législateur a instauré un système de suspension du droit à l’indemnité de chômage en cas de manquement à cette obligation (cf. BORIS RUBIN, op. cit., n. 1 ad art. 30 LACI). On ne saurait dès lors partager le point de vue de l’assurée, selon lequel la cour cantonale ne pouvait lui imputer à faute sa renonciation à agir contre son ancien employeur.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_10/2019 consultable ici

 

 

Circulaire sur l’allocation pour perte de gain en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus – Corona-perte de gain (CCPG)

Circulaire sur l’allocation pour perte de gain en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus – Corona-perte de gain (CCPG)

 

L’OFAS a mis en ligne la Circulaire sur l’allocation pour perte de gain en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus – Corona-perte de gain (CCPG), valable dès le 17.03.2020.

La CCPG est disponible ici.

 

Avant-propos de la CCPG

Le 16.03.2020, le Conseil fédéral a annoncé qu’il renforçait les mesures prises pour lutter contre le coronavirus et déclaré la situation « extraordinaire » au sens de la loi sur les épidémies.

La circulaire règle l’allocation en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus, décidée le 20.03.2020 par le Conseil fédéral sur la base de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

Le champ d’application de cette allocation inclut quatre catégories de bénéficiaires :

  • les salariés et les indépendants qui doivent interrompre leur activité lucrative parce que la garde de leurs enfants jusqu’à 12 ans par des tiers ne peut plus être assurée ;
  • les personnes qui doivent interrompre leur activité lucrative parce que leur médecin ou les autorités ont ordonné leur mise en quarantaine ;
  • les indépendants qui ont subi une perte de gain en raison de la fermeture de leur entreprise en vertu de l’ 6, al. 2, de l’ordonnance 2 COVID-19;
  • les indépendants qui ont subi une perte de gain en raison de l’annulation d’une manifestation suite à l’interdiction décrétée par les autorités.

L’allocation Corona-perte de gain est versée sous forme d’une indemnité journalière équivalant à 80 % du revenu moyen réalisé avant l’interruption de l’activité lucrative. Du point de vue de l’organisation et de la procédure, elle s’inspire du régime des allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité. La circulaire porte sur les règles qui s’écartent de ce régime.

Ces dispositions concernent exclusivement le champ d’application décrit ci-dessus. Elles entrent en vigueur le 17.03.2020 et leur validité est limitée à six mois.

 

 

Stabilisation du système de prévoyance : un défi qui reste à relever

Stabilisation du système de prévoyance : un défi qui reste à relever

 

Article de Katharina Mauerhofer paru in Sécurité sociale CHSS 1/2020, disponible ici

 

La stabilisation de notre système de prévoyance sera une tâche centrale de la nouvelle légis­lature. L’évolution démographique et les mutations profondes des structures économiques et sociales n’ont pas disparu avec l’échec du projet de réforme Prévoyance vieillesse 2020. Au contraire, ces problèmes ne cessent de s’accentuer et appellent une solution bénéficiant d’un large soutien.

Le système de prévoyance est actuellement un vaste chantier. En proposant la réforme AVS 21, le Conseil fédéral a soumis à la discussion, en août dernier, des mesures visant à maintenir le niveau des prestations de l’AVS et à assurer l’équilibre financier de l’assurance jusqu’en 2030. Il espère ainsi gagner du temps pour pouvoir s’attaquer ultérieurement aux défis structurels. Il en va de même de la réforme du 2e pilier, qui a fait l’objet d’un compromis entre les partenaires sociaux en été 2019 et pour laquelle le processus de décision politique a été lancé à la fin de l’année 2019.

La réforme des prestations complémentaires (PC) a, quant à elle, déjà été votée et elle entrera en vigueur le 1er janvier 2021. Des autres optimisations lancées ces dernières années, à savoir la loi sur les fonds de compensation, l’utilisation systématique du numéro AVS par les autorités et la modernisation de la surveillance, seule la première a été votée et mise en œuvre. Les autres se trouvent encore à divers stades du processus de décision. C’est aussi le cas des propositions du Conseil fédéral visant à mieux concilier activité professionnelle et prise en charge de proches, ainsi que de son modèle de prestations transitoires pour les chômeurs âgés, qui vise à éviter que les personnes arrivant en fin de droit dans l’assurance-chômage après 60 ans soient contraintes de recourir à l’aide sociale et d’épuiser leur capital de prévoyance.

 

Prévoyance vieillesse

L’initiative populaire du 17 décembre 2013 intitulée « AVSplus : pour une AVS forte » proposait de relever toutes les rentes AVS de 10 %. Son objectif était de mieux réaliser le principe constitutionnel selon lequel le cumul des rentes du 1er et du 2e pilier doit permettre aux assurés de maintenir de manière appropriée leur niveau de vie antérieur. Une adoption de l’initiative aurait entraîné une augmentation des dépenses de l’AVS d’environ 4 milliards de francs par année, et même de 5,5 milliards de francs d’ici à fin 2030. Le peuple et les cantons ont toutefois nettement rejeté ce texte lors de la votation populaire du 25 septembre 2016.

La réforme Prévoyance vieillesse 2020 s’attaquait de manière coordonnée aux déficits annuels de l’AVS et aux problèmes de la prévoyance professionnelle. Deux textes étaient prévus : l’arrêté fédéral sur le financement additionnel de l’AVS par le biais d’un relèvement de la taxe sur la valeur ajoutée et la loi fédérale sur la réforme de la prévoyance vieillesse 2020 (Conseil fédéral 2014).

La réforme proposait de remplacer l’âge ordinaire de la retraite, qui est actuellement de 64 ans pour les femmes et de 65 ans pour les hommes, par un âge de référence unique. Ce dernier devait servir, dans l’AVS comme dans la prévoyance professionnelle, de valeur de référence pour un départ flexible à la retraite entre 62 et 70 ans. Les besoins en financement supplémentaire de l’AVS liés au départ à la retraite des personnes nées durant les années à forte natalité auraient été couverts par une réaffectation du produit de la TVA. En outre, les cotisations salariales à l’AVS auraient été relevées de 0,3 point, tandis que le taux de conversion dans la prévoyance professionnelle aurait été progressivement réduit de 6,8 à 6,0 %. Une augmentation des nouvelles rentes AVS de 840 francs par an et une compensation dans la prévoyance professionnelle devaient garantir le maintien du niveau des rentes de vieillesse (CHSS 2/2015).

Lors de la votation populaire du 24 septembre 2017, l’arrêté fédéral sur le financement additionnel de l’AVS par le biais d’un relèvement de la taxe sur la valeur ajoutée a été rejeté par la population à une courte majorité de 2357 voix et par les cantons à une majorité de 13½ cantons contre 9½. La loi sur la réforme de la prévoyance vieillesse 2020 a, quant à elle, été rejetée par 52,7 % des votants.

Après cet échec, le Conseil fédéral a décidé de dissocier les réformes de l’AVS et du 2e pilier. En décembre 2017, il a présenté les nouvelles orientations de la réforme de la prévoyance vieillesse. Après avoir analysé les résultats de la votation ratée et mené des discussions avec des représentants des partis politiques, des partenaires sociaux et de diverses organisations, il est arrivé à la conclusion que l’échec s’expliquait par une conjonction de facteurs particuliers plutôt que par des raisons fondamentales. C’est pourquoi le nouveau projet de stabilisation de l’AVS, baptisé AVS 21, reprend les éléments de base du projet précédent.

La loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA) a ensuite établi un lien entre l’AVS et la réforme fiscale. À l’avenir, toutes les entreprises seront fondamentalement soumises aux mêmes règles fiscales. Les privilèges fiscaux accordés aux entreprises actives surtout à l’échelle internationale sont supprimés (RO 2019 2395), ce qui représente pour elles une augmentation globale de la charge fiscale. Les cantons et les communes auront désormais la possibilité d’encourager fiscalement les entreprises innovatrices. Ces mesures visent à préserver la compétitivité du pôle d’innovation suisse et à garantir des emplois attrayants. En compensation de cet allégement fiscal pour les entreprises, 2 milliards de francs supplémentaires seront versés chaque année à l’AVS. Le projet a été adopté par 66,4 % des voix contre 33,6 % lors de la votation du 19 mai 2019.

En prévoyant un financement additionnel pour l’AVS, le projet RFFA apporte une contribution importante à la garantie des rentes. La Confédération y participera à hauteur de 800 millions de francs environ. Le reste sera à la charge des entreprises et des assurés : ainsi, pour la première fois depuis plus de 40 ans, les cotisations à l’AVS augmenteront légèrement. Le taux de cotisation des employeurs et des employés sera relevé de 0,15 point chacun. Grâce à ces mesures, le besoin financier de l’AVS sera certes réduit, mais il ne sera pas comblé. Une réforme structurelle de l’assurance reste donc inévitable.

Le 28 août 2019, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la réforme AVS 21 (Conseil fédéral 2019a). Cette réforme prévoit de relever progressivement de 64 à 65 ans l’âge de référence pour les femmes, dans l’AVS comme dans la prévoyance professionnelle. Le rythme de ce relèvement devrait être de trois mois par an à partir de l’année qui suit celle de l’entrée en vigueur de la réforme. Des mesures compensatoires viendront atténuer les conséquences pour les femmes qui seront sur le point de prendre leur retraite lorsque la réforme entrera en vigueur.

Les assurés devraient pouvoir choisir plus librement le moment de leur départ à la retraite : ce départ pourra se faire progressivement entre 62 et 70 ans grâce à l’anticipation ou à l’ajournement du versement d’une partie de la rente, y compris dans la prévoyance professionnelle. La poursuite d’une activité lucrative au-delà de l’âge de référence permettra, grâce aux cotisations versées, d’augmenter le montant de la rente. Les mesures d’incitation visent à encourager les personnes à travailler jusqu’à l’âge de référence ou plus longtemps. Il sera aussi possible d’ajourner jusqu’à 70 ans la perception de toutes les prestations de la prévoyance professionnelle, même en cas de réduction du taux d’occupation.

Après l’adoption du projet RFFA, 26 milliards de francs doivent encore être trouvés pour couvrir les besoins de financement de l’AVS jusqu’en 2030. Afin de garantir un financement suffisant du fonds de compensation AVS, le projet AVS 21 prévoit de relever la TVA de 0,7 point. Ce relèvement doit intervenir en une fois lors de l’entrée en vigueur de la réforme et ne doit pas être limité dans le temps.

 

Loi sur les fonds de compensation 

L’AVS, l’AI et le régime des APG sont financés par répartition. Pour contrebalancer les fluctuations des flux financiers et garantir que les caisses de compensation disposent en tout temps des fonds nécessaires au versement des prestations dues, chaque assurance doit disposer d’une réserve. Les fonds de compensation ont précisément pour tâche d’assurer ces réserves. Compenswiss, auquel la loi du 16 juin 2017 sur les fonds de compensation (RS 830.2) a conféré la forme d’établissement de droit public de la Confédération, en assure la gestion. Compenswiss doit garantir en tout temps les liquidités nécessaires à l’exécution des trois assurances. Il doit investir la fortune de manière à garantir un rapport optimal entre la sécurité et l’obtention d’un rendement conforme aux conditions du marché.

La création d’un établissement de droit public de la Confédération doté de la personnalité juridique – et la suppression simultanée de la personnalité juridique jusqu’alors reconnue aux trois fonds de compensation – était devenue nécessaire en raison de la difficulté croissante des opérations de placement sur les marchés internationaux. Lorsque Compenswiss cherchait à placer des fonds sur des marchés financiers étrangers, les partenaires commerciaux ne comprenaient généralement pas la structure atypique d’une organisation travaillant pour plusieurs fonds de compensation, et des questions de responsabilité pouvaient se poser. Il était donc difficile pour Compenswiss d’exercer ses activités de manière efficace et d’obtenir un rendement adéquat. Le transfert à un établissement autonome de droit public inscrit au registre du commerce a permis de résoudre ce problème. En outre, l’adaptation des normes organisationnelles permet de respecter les principes de transparence et d’une gestion efficace des affaires de l’État et de l’administration (bonne gouvernance). En dépit de leur nouvelle structure faîtière, les trois fonds de compensation doivent demeurer des fortunes indépendantes sur le plan comptable. Aucun financement croisé n’est admis entre les fonds de compensation ni entre les assurances.

La loi sur les fonds de compensation est entrée en vigueur de manière échelonnée à partir du 1er janvier 2018. Le 1er janvier 2019, l’établissement a démarré ses activités et a acquis sa personnalité juridique, tandis que les trois fonds de compensation ont simultanément perdu la leur. L’ordonnance concernant l’administration des fonds de compensation de l’AVS, de l’AI et des APG a été abrogée. À la fin du premier semestre 2019, le Conseil fédéral a approuvé le bilan définitif d’opération et d’ouverture établi par Compenswiss, concluant ainsi le transfert des fonds de compensation (Luck 2017).

 

Réforme des PC

La réforme de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (LPC ; RS 831.30) a été adoptée le 22 mars 2019. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2021 (Réforme des PC 2019). Les mesures les plus importantes sont l’adaptation des montants maximaux reconnus au titre du loyer à la hausse du niveau des loyers, une meilleure utilisation de la fortune propre et une réduction des effets de seuil. Parallèlement, le niveau des prestations doit être maintenu.

Pour déterminer le montant maximal reconnu au titre du loyer, on tiendra compte désormais de la taille des ménages jusqu’à quatre personnes et des différences régionales en matière de loyers. Grâce à cet ajustement des bases de calcul, les montants maximaux permettront de couvrir le loyer de 90 % des bénéficiaires de PC. La réforme permet également de mieux tenir compte de la fortune : seules les personnes dont la fortune ne dépasse pas 100 000 francs (200 000 francs pour les couples mariés ; les biens immobiliers qui servent d’habitation à leur propriétaire n’étant pas pris en compte) auront droit aux PC. Une fortune d’un montant inférieur au seuil susmentionné est compatible avec le droit aux PC, mais est prise en compte en tant que revenu après déduction d’une franchise. Une obligation de restitution pour les héritiers si la succession est supérieure à 40 000 francs a en outre été introduite. Par ailleurs, le revenu provenant de l’activité lucrative d’un conjoint dont la capacité de gain n’est pas réduite sera à l’avenir pris en compte dans le calcul de la PC à hauteur de 80 % (au lieu des deux tiers actuellement). Le montant destiné à assurer la couverture des besoins vitaux diminuera pour les ménages dans lesquels vivent des enfants de moins de 11 ans. En contrepartie, les frais de prise en charge extrafamiliale de ces enfants seront reconnus comme des dépenses dans le calcul de la PC, pour autant que cette prise en charge soit rendue nécessaire par l’état de santé des parents.

La réduction du montant minimal de la PC vise à atténuer les effets de seuil par rapport aux personnes à revenus modestes qui ne bénéficient pas de PC. Les personnes qui perdent leur emploi après avoir atteint l’âge de 58 ans pourront rester affiliées auprès de leur ancienne institution de prévoyance et conserver ainsi leurs droits à la rémunération de leur avoir de vieillesse, au taux de conversion et à la rente. Pour cela, elles seront uniquement tenues de verser des contributions aux frais administratifs et les cotisations couvrant les risques de décès et d’invalidité.

Les modifications des dispositions légales entraînent aussi des adaptations dans l’ordonnance correspondante qui concernent surtout la répartition des communes dans les trois régions déterminantes pour la prise en compte du loyer, l’adaptation des forfaits pour frais accessoires et frais de chauffage, la renonciation à des revenus et parts de fortune, la prise en compte de la prime d’assurance-maladie dans le calcul de la PC, les frais de prise en charge extrafamiliale d’enfants, l’interruption de la résidence habituelle en Suisse et la durée de traitement des demandes de PC.

 

Activité professionnelle et prise en charge de proches

L’exercice d’une activité professionnelle est difficilement conciliable avec la prise en charge de proches, que celle-ci implique de courtes absences pour s’occuper d’un membre de la famille ou d’un proche ou qu’elle amène des parents à s’occuper d’un enfant atteint gravement dans sa santé en raison d’une maladie ou d’un accident. Ces parents n’ont pas d’autre choix que de prendre des congés non payés, de se déclarer eux-mêmes malades ou d’arrêter temporairement de travailler.

Le 22 mai 2019, le Conseil fédéral a transmis au Parlement le message concernant la loi fédérale sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches (Conseil fédéral 2019b). Le projet de loi contient diverses mesures visant à faciliter la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches. L’employeur sera tenu de continuer à verser le salaire de l’employé si celui-ci est absent du travail trois jours au plus par cas, mais dix jours au plus par année, pour l’organisation de la prise en charge nécessaire d’un membre de la famille ou du partenaire atteints dans leur santé en raison d’une maladie ou d’un accident. Les parents qui prennent en charge un enfant atteint gravement dans sa santé en raison d’une maladie ou d’un accident percevront une allocation de prise en charge et bénéficieront d’un congé de prise en charge d’une durée maximale de 14 semaines à prendre dans un délai-cadre de 18 mois. Ce délai-cadre commencera à courir le jour pour lequel la première indemnité journalière est versée. Dès la naissance du droit, les parents bénéficieront d’une protection contre le licenciement pendant 6 mois et ne pourront pas voir leurs vacances réduites. Le droit à une bonification pour tâches d’assistance de l’AVS sera étendu au proche aidant pour la prise en charge d’une personne atteinte d’impotence faible, mais aussi pour la prise en charge du partenaire dans le cas des couples formant une communauté de vie. Le versement de l’allocation pour impotent et du supplément pour soins intenses de l’AI à un enfant sera interrompu uniquement après que celui-ci aura passé un mois civil entier à l’hôpital (CHSS 4/2019).

 

Prestations transitoires 

Afin d’améliorer la compétitivité des seniors sur le marché du travail et d’encourager le potentiel de main-d’œuvre indigène, le Conseil fédéral et les partenaires sociaux se sont mis d’accord sur une série de mesures concernant le marché du travail. Les chômeurs âgés qui, malgré ces mesures, arrivent en fin de droit après avoir atteint l’âge de 60 ans devraient toucher des prestations transitoires s’ils remplissent certaines conditions. Le 30 octobre 2019, le Conseil fédéral a adopté le message concernant la loi fédérale sur les prestations transitoires pour les chômeurs âgés (Conseil fédéral 2019c).

Les personnes qui arrivent en fin de droit dans l’assurance-chômage après l’âge de 60 ans ne devraient pas être contraintes de recourir à l’aide sociale et d’épuiser leur capital de prévoyance. Elles devraient toucher une prestation transitoire jusqu’à l’âge ordinaire de la retraite, à condition qu’elles aient été assurées à l’AVS pendant au moins 20 ans et qu’elles aient réalisé chaque année un revenu d’au moins 21 330 francs. Elles devront avoir réalisé ce revenu pendant au moins 10 des 15 ans précédant immédiatement leur arrivée en fin de droit. Les personnes seules ne devront pas disposer d’une fortune supérieure à 100 000 francs et les couples mariés, d’une fortune supérieure à 200 000 francs. Sur le modèle des PC, les prestations transitoires correspondront à la différence entre les dépenses reconnues et les revenus déterminants. Elles seront toutefois plafonnées à 58 350 francs pour une personne seule et à 87 525 francs pour un couple marié (Sauvain 2019).

 

Utilisation systématique du numéro AVS par les autorités

L’utilisation systématique du numéro AVS comme identifiant permettra de mettre à jour de manière automatique, précise et rapide les attributs personnels tels que le nom de famille, le prénom ou l’état civil. Le travail administratif en lien avec les banques de données s’en trouvera réduit. Un seul attribut d’identification suffira en effet pour saisir correctement les données associées à un titulaire, même si, par exemple, il porte le même nom et prénom qu’une autre personne ou que son nom est orthographié de plusieurs manières. Cela évitera des corrections coûteuses ainsi que les conséquences fâcheuses d’une confusion.

Le Conseil fédéral entend ainsi répondre aux attentes des services fédéraux, des cantons et des communes, qui souhaitent pouvoir utiliser de façon plus systématique le numéro AVS dans l’accomplissement de leurs tâches administratives. À cette fin, il a adopté le message relatif à une modification de la LAVS (Conseil fédéral 2019d). Cette modification prévoit que les autorités pourront utiliser systématiquement le numéro AVS pour leurs tâches légales. Par contre, les institutions qui, sans avoir le caractère d’une autorité, sont chargées d’un mandat public ne pourront l’utiliser que si une loi les y autorise.

Quiconque sera autorisé à utiliser le numéro AVS devra garantir la protection des données et la sécurité de l’information. L’accès aux banques de données devra être sécurisé de manière optimale (en particulier par une limitation des droits d’accès, l’authentification des personnes, la sécurisation des modes de transmission, un cryptage, des protections antivirus et des pare-feu). Les principaux processus des systèmes informatiques devront être documentés et évalués. Ces mesures visent à garantir qu’une utilisation à plus large échelle du numéro AVS ne menace pas la protection des données et la sécurité de l’information (Mauerhofer 2018).

 

Modernisation de la surveillance

Alors que la surveillance des institutions du 2e pilier a été réorganisée en 2012, celle de l’AVS, du régime des APG, des PC et des allocations familiales dans l’agriculture est restée pratiquement inchangée depuis leur introduction. Pour continuer à garantir la stabilité du système de prévoyance, il est nécessaire de moderniser la surveillance et de l’axer davantage sur les risques. Il convient aussi de renforcer la gouvernance et de veiller au pilotage approprié des systèmes d’information dans le 1er pilier. Seules quelques optimisations ciblées doivent être apportées dans le 2e pilier. Le 20 novembre 2019, le Conseil fédéral a adopté le message concernant une adaptation de la LAVS (Conseil fédéral 2019e).

Il est prévu de soumettre les organes d’exécution à l’obligation légale d’introduire des instruments modernes de gestion et de contrôle. En outre, de nouvelles bases légales sont nécessaires pour préciser les tâches et les responsabilités de l’autorité de surveillance. Les principes de bonne gouvernance doivent également être inscrits dans la loi. Afin de garantir la sécurité de l’information et la protection des données, l’autorité de surveillance doit être habilitée à édicter des exigences minimales à ce sujet. Puis, le financement du développement et de l’exploitation de systèmes d’information utilisables à l’échelle suisse sera réglementé. Enfin, le Conseil fédéral acquiert la compétence de régler l’échange électronique de données entre les assureurs suisses et entre ceux-ci et les autorités fédérales. Pour qu’elle s’applique à toutes les branches de la sécurité sociale, cette disposition sera intégrée dans la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA ; RS 830.1) (Baumann 2019).

 

Réforme de la LPP

Comme l’AVS, le 2e pilier est confronté au défi que posent l’augmentation de l’espérance de vie et l’insuffisance du rendement des placements. Un abaissement du taux de conversion minimal est indispensable dans ce contexte, même si des propositions en ce sens ont déjà été rejetées en 2010 et en 2017. Le projet actuel s’appuie sur un compromis auquel sont parvenus les partenaires sociaux (Travail Suisse, Union syndicale suisse et Union patronale suisse). Il comprend des mesures qui permettraient de maintenir le niveau des rentes dans le régime obligatoire de la prévoyance professionnelle malgré l’abaissement du taux de conversion. Le 13 décembre 2019, le Conseil fédéral a ouvert la procédure de consultation sur ce projet (DFI 2019).

 

 

Article de Katharina Mauerhofer paru in Sécurité sociale CHSS 1/2020, disponible ici

 

 

Deux semaines de congé de paternité payé : le projet en détail

Deux semaines de congé de paternité payé : le projet en détail

 

Article de Bernadette Deplazes paru in Sécurité sociale CHSS 1/2020, disponible ici

 

À l’automne 2019, les Chambres fédérales ont approuvé à de larges majorités un congé de paternité d’une durée de deux semaines pour les hommes exerçant une activité lucrative. Il s’agit d’un contre-projet indirect à une initiative pour un congé de paternité de quatre semaines. Un référendum ayant été lancé contre ce congé de paternité fédéral, le peuple devra se prononcer à ce sujet, probablement en automne 2020.

Le 1er juillet 2005, un congé de maternité de quatorze semaines pour les femmes exerçant une activité lucrative a été inscrit dans la législation suisse. Aujourd’hui, soit quinze ans plus tard, le pays se dote d’un calendrier pour instaurer un congé pour les pères également, qui sera adopté si le peuple approuve le projet de référendum. Jusqu’alors, les travailleurs bénéficiaient en principe d’un congé payé d’un ou deux jours à la naissance d’un enfant, sauf si leur employeur appliquait un règlement plus généreux. Dans la sphère politique, de nombreuses interventions ont tenté de faire naître un congé de paternité, sans succès dans un premier temps.

Le 4 juillet 2017, l’association Le congé paternité maintenant ! a déposé l’initiative populaire fédérale « Pour un congé de paternité raisonnable – en faveur de toute la famille ». Issus des associations faîtières Travail Suisse, de la Faîtière des organisations suisses d’hommes et de pères, d’alliance F et de Pro Familia Suisse, les initiateurs exigeaient l’inscription dans le droit fédéral d’un congé de paternité de quatre semaines financé par le régime des allocations pour perte de gain (APG). Si le Conseil fédéral a reconnu la pertinence d’un congé de paternité pour améliorer la conciliation entre famille et travail, il indique, dans sa prise de position, préférer accorder la priorité au développement d’une offre d’accueil extrafamilial. Il considère qu’il faut laisser aux employeurs ou aux partenaires sociaux la responsabilité d’introduire un congé de paternité et a donc invité le Parlement à rejeter cette initiative (Conseil fédéral 2018).

Le 21 août 2018, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États (CSSS-E) a décidé de déposer une initiative parlementaire (18.441) à titre de contre-projet indirect à cette initiative populaire. Ce projet d’acte prévoit un congé de paternité de deux semaines (dix jours de travail) à prendre dans les six mois suivant la naissance de l’enfant. Le congé serait financé par le régime des allocations pour perte de gain. Il suit l’exemple du congé de maternité existant, comme le souhaitaient les initiateurs ainsi qu’une initiative parlementaire déposée par le conseiller national Martin Candinas en 2014 (« Deux semaines de congé-paternité payé par le régime des APG », 14.415).

En l’espace d’un an environ, les commissions chargées de l’examen préalable et les Chambres fédérales se sont penchées aussi bien sur l’initiative populaire que sur le contre-projet indirect. Elles ont refusé l’initiative populaire, mais accepté par de larges majorités le contre-projet prévoyant un congé de paternité de deux semaines lors du vote final du 27 septembre 2019 (FF 2019 6501). Le comité d’initiative a ensuite retiré son initiative pour un congé de paternité de quatre semaines à condition que la modification de la législation instaurant un congé de paternité de deux semaines entre en vigueur (FF 2019 6509). Un référendum ayant été lancé contre le contre-projet retenu par le Parlement, le peuple devra se prononcer à ce sujet, probablement en automne 2020. S’il refuse le congé de paternité de deux semaines, l’initiative sera alors réactivée.

 

Allocation et congé de paternité selon le contre-projet

Le congé de maternité comme modèle

Le congé de paternité est conçu en grande partie selon les principes régissant le congé de maternité existant. Concrètement, la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité (LAPG, RS 834.1) règle désormais également les allocations de paternité. Les dispositions relevant du droit du travail sont intégrées au code des obligations (CO).

 

Les hommes exerçant une activité lucrative ont droit à une allocation

Pour prétendre à une allocation pour un congé de paternité de deux semaines, un homme doit exercer une activité lucrative à la naissance de son enfant, comme employé ou comme indépendant. De plus, il doit avoir été assuré à l’AVS obligatoire au cours des neuf mois précédant la naissance et avoir travaillé pendant cinq mois au moins durant cette période. En vertu de l’accord de libre-échange avec l’UE et de l’accord de l’AELE portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, les périodes d’assurance et d’activité lucrative réalisées dans un État membre de l’UE ou de l’AELE sont ici comptabilisées.

L’homme doit pouvoir prouver être le père légal de l’enfant, que ce soit par les liens du mariage ou par reconnaissance de paternité. Dans certains cas, la paternité n’est pas définie à la naissance. Si la filiation n’est établie qu’à une date ultérieure, par reconnaissance ou par décision judiciaire, le père a le droit, pour autant que cela soit encore possible, de prendre un congé de paternité dans les six mois suivant la naissance de l’enfant (délai-cadre d’octroi du congé de paternité).

Dans la mesure où le père remplit ces critères, aucune restriction n’est applicable (p. ex. en raison de son âge ou si l’enfant est né à l’étranger). En cas de naissance multiple, le père bénéficie d’une seule allocation, tout comme la mère. Il n’est cependant pas exclu qu’un homme touche plus d’une allocation par an, s’il devient père plusieurs fois au cours de la même année.

 

Droit aux allocations pour les hommes ­percevant un revenu de substitution 

Les hommes n’exerçant pas d’activité lucrative au moment de la naissance de leur enfant, par exemple parce qu’ils sont sans emploi ou en incapacité de travail pour des raisons de santé, peuvent à certaines conditions prétendre à une allocation de paternité. Le Conseil fédéral règlera les détails dans une ordonnance. Il est toutefois exclu qu’un homme perçoive à la fois une allocation de paternité et des indemnités journalières d’une autre assurance sociale. Si un père opte pour l’allocation de paternité, celle-ci est prioritaire. Cela signifie qu’aucune indemnité d’une autre assurance sociale n’est versée au cours de la période concernée.

 

Le droit à l’allocation et le délai-cadre courent à partir du jour de la naissance

Le droit à l’allocation naît le jour de la naissance de l’enfant. La durée de la grossesse ne joue aucun rôle, mais l’enfant doit être né viable. Si l’enfant est mort-né, le père ne bénéficie d’aucun droit. Le jour de la naissance commence à courir le délai-cadre de six mois au cours duquel le père peut faire valoir son droit à un congé de paternité de deux semaines. S’il ne prend qu’une partie du congé pendant cette période, l’allocation lui est versée uniquement pour les jours de congé utilisés. En accord avec son employeur, le père est libre de prendre un congé de deux semaines consécutives, de deux fois une semaine ou encore de répartir les jours sur les six mois. Cette flexibilité tient compte des modalités de planification à la fois des familles et des employeurs.

 

Fin du droit à l’allocation

Le père doit utiliser son congé de paternité dans les six mois suivant la naissance de l’enfant. Le droit à l’allocation s’éteint à la fin de cette période. Si le père ou l’enfant décède, le droit à l’allocation pour les jours précédant le décès et non utilisés s’éteint également. Il ne se transmet dès lors ni à la mère de l’enfant, ni à la personne qui en obtiendrait la garde. Des rentes de survivants (rentes d’orphelin et de veuve) sont prévues dans ce genre de cas. La fin du droit peut aussi survenir si la paternité prend fin, par exemple à la suite d’une exclusion de paternité.

 

Allocation à hauteur de 80 % du revenu de l’activité lucrative

Comme celle de maternité, l’allocation de paternité équivaut à 80 % du revenu moyen de l’activité lucrative obtenu avant le début du droit à l’allocation. De façon analogue aux allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité, les allocations de paternité sont versées sous la forme d’indemnités journalières d’un montant maximal de 196 francs par jour. Si le père prend une ou deux semaine(s) entière(s) de congé de paternité, sept respectivement quatorze indemnités journalières lui sont versées (samedi et dimanche compris). S’il opte pour des jours de congé isolés, les deux semaines de congé équivalent à dix jours de travail. Pour des raisons d’équité, deux jours d’indemnités supplémentaires sont versés pour chaque tranche de cinq jours de congé. Cette approche garantit une couverture de 80 % du revenu moyen de l’activité lucrative sur deux semaines (avec un plafond à 196 fr. par jour) si le père choisit de prendre dix journées de congé isolées.

Contrairement aux allocations de service mais similairement à celles de maternité, les allocations de paternité comprennent uniquement des allocations de base et excluent toute allocation pour enfant, pour frais de garde ou d’exploitation pour indépendants.

 

Calcul sur la base du revenu avant la naissance et versement par les caisses de compensation

Le montant de l’allocation est calculé en fonction du revenu que le père percevait directement avant la naissance de l’enfant. Il est établi sur la base des mêmes règles et principes que l’allocation accordée aux personnes faisant du service ou en congé de maternité. Les caisses de compensation sont dans ce contexte également chargées d’octroyer les indemnités journalières à l’employeur si celui-ci verse un salaire ou directement au père de l’enfant. Pour limiter la charge administrative de l’employeur, les indemnités journalières sont versées uniquement après que le père a pris l’ensemble des jours de congé de paternité auxquels il a droit.

 

Primauté de l’allocation de paternité et garantie des droits acquis

Pendant la période durant laquelle un homme exerce son droit à l’allocation de paternité, il ne reçoit en principe aucune indemnité de la part d’autres assurances sociales (par ex. indemnités de l’assurance-chômage ou de l’assurance-invalidité). Le même principe de coordination s’applique déjà à l’allocation de maternité. Si, avant la naissance de l’enfant, le père percevait une indemnité journalière qui remplaçait un revenu issu d’une activité lucrative, le montant de l’allocation de paternité s’élève au moins au montant de l’indemnité journalière versée jusqu’alors (garantie des droits acquis). Cette disposition correspond également à celle en vigueur pour l’allocation de maternité.

 

Droit au congé de paternité pour les employés 

Tandis que les dispositions régissant l’allocation pour perte de gain pour tous les pères exerçant une activité lucrative (indépendants compris) relèvent du régime des APG, le droit au congé doit être garanti par le droit du travail (inscription au code des obligations). Conformément à l’allocation de paternité définie dans le régime des APG, les mêmes prérequis que ceux liés à l’allocation s’appliquent à la paternité, à la durée du congé et aux modalités d’indemnisation. Bien que le droit à l’allocation implique des durées d’assurance et de travail minimales, tous les employés masculins peuvent prétendre à un congé de paternité, y compris ceux qui n’ont pas droit à une allocation de paternité. À noter que l’employé a le droit, mais non l’obligation, de prendre ce congé. S’il n’exerce pas ce droit au cours des six mois suivant la naissance de l’enfant, celui-ci devient caduc. L’employeur n’a pas le droit d’obliger un employé à renoncer au congé de paternité.

 

Prolongation du délai de résiliation

Contrairement à ce qui est prévu dans le cas d’une maternité, l’employeur peut mettre fin au contrat de travail d’un homme qui a droit au congé de paternité. Il peut résilier le contrat avant ou pendant le délai-cadre de six mois. Si l’homme concerné n’a pas encore exercé, en tout ou partie, son droit à un congé de paternité, il a la possibilité de bénéficier du solde de jours de congé restants avant la fin des rapports de travail. Le cas échéant, le délai de résiliation est prolongé du nombre de jours de congé restants au moment de la résiliation. La prolongation du délai de résiliation s’applique dans les deux cas suivants : premièrement, lorsque le contrat de travail est résilié avant la naissance de l’enfant, mais que les rapports de travail existent toujours au moment de la naissance (prolongation de deux semaines du délai de résiliation) ; deuxièmement, lorsque le contrat de travail est résilié durant les six mois suivant la naissance de l’enfant (prolongation équivalant au nombre de jours de congé restants au moment de la résiliation). Si les rapports de travail prennent fin avant la naissance de l’enfant, le délai de résiliation ne peut être prolongé. Si le travailleur concerné ne fait pas usage des jours de congé auxquels il a droit au cours du délai de résiliation prolongé, il perd ce droit. La prolongation du délai de résiliation doit être employée pour les jours de congé de paternité et non pour d’autres raisons telles que des jours de vacances que l’employé n’aurait pas pris.

 

Aucune réduction des vacances

Concernant le droit aux vacances, les dispositions s’appliquant aux femmes prenant un congé de maternité valent également pour les hommes : lorsqu’un travailleur prend un congé de paternité, ses vacances ne peuvent pas être diminuées.

 

Financement et réalisation

Le congé de paternité est financé de manière paritaire au moyen des cotisations salariales perçues dans le cadre du régime actuel des allocations pour perte de gain. Pour couvrir les coûts, estimés à 230 millions de francs pour 2021, il sera probablement nécessaire de faire passer le taux de cotisation APG de 0,45 à 0,5 %. Concernant le paiement des indemnités journalières, les principes en vigueur pour les autres allocations pour perte de gain (en cas de service ou de maternité) s’appliquent. Les caisses de compensation AVS sont responsables du versement des indemnités du régime des APG.

 

 

 

 

Article de Bernadette Deplazes paru in Sécurité sociale CHSS 1/2020, disponible ici