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Arrêt de la CrEDH Berisha c. Suisse – Requête n° 4723/13 du 24.01.2023 – Remboursement plafonné des frais pour les soins à domicile d’une personne handicapée vivant chez ses parents (à l’inverse de celles vivant en institution)

Arrêt de la CrEDH Berisha c. Suisse – Requête n° 4723/13 du 24.01.2023

 

Arrêt consultable ici

Résumé juridique de février 2023 de la CrEDH consultable ici

 

Remboursement plafonné des frais pour les soins à domicile d’une personne handicapée vivant chez ses parents (à l’inverse de celles vivant en institution) / 8 CEDH

 

En fait

Lourdement handicapé depuis sa naissance, le requérant, vivant chez ses parents âgés, bénéficie d’une rente d’invalidité entière et d’une allocation pour impotent de degré grave.

En novembre 2010, la caisse de compensation du canton avisa le requérant que les dépenses dont il avait sollicité la prise en charge pour l’année 2010 dépassaient le plafond annuel de remboursement des frais de maladie et d’invalidité, fixé à CHF 90’000. Un montant de CHF 1’146 restait à la charge de l’intéressé, lequel n’était par ailleurs plus fondé à solliciter de la caisse de compensation le remboursement des frais qu’il aurait encore à supporter jusqu’à la fin de l’année considérée.

Les recours du requérant contre cette décision n’aboutirent pas.

Invoquant l’article 8 de la Convention, le requérant se plaint devant la Cour que le plafonnement du remboursement des frais de maladie et d’invalidité engagés pour les soins à son domicile le place dans une situation financière susceptible de le contraindre à s’installer dans une résidence spécialisée. Notant que ce plafonnement ne s’applique pas aux personnes soignées dans une institution, il se plaint également d’une discrimination et invoque l’article 14 combiné avec l’article 8.

 

En droit

Article 14 combiné avec l’article 8 :

1) Vie familiale – Dans l’affaire Beeler c. Suisse [GC], la Grande Chambre de la Cour a récemment eu l’occasion de clarifier les principes régissant la question de savoir si et dans quelle mesure les allocations sociales ressortent au domaine de la « vie familiale » au sens de l’article 8 et peuvent, dès lors, faire entrer en jeu l’article 14.

Dans le cas d’espèce, la Cour doit dès lors examiner si la prestation litigieuse, à savoir le remboursement des frais de maladie et d’invalidité prévu par la loi, vise à favoriser la vie familiale et si elle a nécessairement une incidence sur l’organisation de celle-ci. Elle doit prendre en compte l’ensemble des éléments pertinents permettant de déterminer la nature de cette prestation.

S’agissant du but que poursuit l’administration par le versement des prestations en question et des conditions de leur octroi, à la lumière de la législation pertinente, ces prestations sont « destinées à la couverture des besoins vitaux » des personnes souffrant d’une invalidité. Peuvent en bénéficier les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse dès lors qu’elles ont droit à une rente ou à une allocation pour impotent de l’assurance-invalidité (AI) ou qu’elles perçoivent des indemnités journalières de l’AI sans interruption pendant six mois au moins. Il ressort de ces dispositions que le versement des prestations complémentaires ne vise pas à favoriser la vie familiale du requérant, non plus qu’il ne suppose l’existence de pareille vie familiale.

Quant au calcul des prestations litigieuses, le droit fédéral fixe, en matière de prestations complémentaires, les montants minimaux que les cantons doivent respecter, et le canton en l’espèce a choisi de limiter à ces montants la prise en charge des frais de santé et d’invalidité des personnes concernées. Dans le cas du requérant, qui vit à domicile, le plafond est fixé à CHF 90’000 par an, tandis que si l’intéressé vivait dans une résidence spécialisée ou un hôpital, pareille limite ne trouverait pas à s’appliquer. Cette différence de traitement confirme que les prestations complémentaires n’ont pas pour but principal de favoriser la vie familiale. À cet égard, celles-ci se distinguent sensiblement de la contribution d’assistance qui a été instaurée à partir de janvier 2012 pour permettre à une personne bénéficiant d’une allocation pour impotent qui vit ou souhaite vivre à domicile et qui a besoin d’une aide régulière d’engager une personne qui lui fournisse l’assistance nécessaire.

Concernant les incidences réelles de la limitation des prestations en question sur la vie familiale du requérant, celui-ci a vécu avec ses parents, âgés, au moment du recours devant le Tribunal fédéral, de 81 ans pour son père et de 78 ans pour sa mère, lesquels ont pris en charge – et jusqu’à ce que l’âge avancé du père ne le lui permette plus – une part considérable des soins requis par l’intéressé. Par ailleurs, une autre part importante des soins aurait été fournie par la sœur du requérant. Il n’est dès lors pas exclu que le versement des prestations complémentaires ait eu une certaine incidence sur la vie familiale du requérant dans la mesure où il lui a permis de se faire soigner par ses proches à domicile.

En revanche, le requérant ayant toujours vécu chez lui, ne s’est jamais vu contraint d’intégrer une résidence spécialisée ou un hôpital. En conséquence, les frais restés à sa charge ne correspondaient pas à des montants suffisamment élevés pour l’obliger à quitter son domicile. Ainsi le montant du plafonnement des prestations complémentaires n’a pas eu une incidence négative concrète sur la vie familiale du requérant. Par ailleurs, différentes prestations correspondant à des montants considérables lui ont été versées après l’arrêt litigieux du Tribunal fédéral, notamment au titre de la contribution d’assistance, prestations qui visaient, quant à elles, à renforcer l’autonomie du requérant et à lui permettre de vivre chez lui.

Eu égard à l’ensemble des éléments qui précèdent, c’est-à-dire compte tenu du but de la prestation litigieuse tel qu’il ressort de la législation, des conditions de son octroi, de la légalité du plafond appliqué et du fait que les effets réels de ce plafonnement sur la vie familiale de l’intéressé sont restés limités, la prestation en cause ne vise pas à favoriser la vie familiale et elle n’a pas nécessairement une incidence sur l’organisation de celle-ci. Les faits de l’espèce ne relèvent pas du champ de la « vie familiale » au sens de l’article 8 et, par conséquent, l’article 14 n’est pas applicable au cas d’espèce sous cet angle.

 

2) Vie privée – Le souhait formé par une personne lourdement handicapée, tel que le requérant, d’être soignée à domicile par ses proches pourrait a priori relever du droit au respect de la vie privée de la personne concernée, notamment sous l’angle du développement personnel et de l’autonomie. Toutefois la situation particulière du requérant doit également être prise en compte pour déterminer si sa « vie privée » était en jeu au moment pertinent, comme a été traité le volet de l’article 8 relatif à la « vie familiale » dans l’affaire Beeler. Or, le requérant n’a pas démontré que le plafonnement du remboursement des frais liés aux soins dont il avait besoin l’ait concrètement et effectivement empêché de satisfaire ce souhait. En effet, celui-ci n’a à aucun moment été contraint à intégrer une institution à la suite du plafonnement du remboursement des frais qu’il avait à engager pour ses soins. Sans nier la réalité des inconvénients subis par le requérant, ils sont de nature purement pécuniaire, aspect qui n’est pas en soi couvert par le droit au respect de la vie privée.

Ainsi, les faits de l’espèce ne relèvent pas du champ de la « vie privée » et, par conséquent, l’article 14 n’est pas applicable au cas d’espèce sous cet angle.

 

Conclusion : irrecevable (incompatible ratione materiae).

 

Arrêt de la CrEDH Berisha c. Suisse – Requête n° 4723/13 du 24.01.2023 consultable ici

Résumé juridique de février 2023 de la CrEDH consultable ici

 

8C_469/2021 (f) du 04.08.2022 – Restitution de prestations cantonales de la rente-pont – 28 al. 1 LPCFam / Subsidiarité de la rente-pont par rapport aux prestations d’assurances sociales octroyées à titre rétroactif – 28 al. 1bis LPCFam

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_469/2021 (f) du 04.08.2022

 

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Restitution de prestations cantonales de la rente-pont / 28 al. 1 LPCFam

Subsidiarité de la rente-pont par rapport aux prestations d’assurances sociales octroyées à titre rétroactif / 28 al. 1bis LPCFam

 

Feu A.__, née en 1950, était mariée à C.__, né en 1951. Les deux époux faisaient ménage commun.

Le 23.01.2013, feu A.__ a rempli un formulaire de demande de rente-pont auprès de la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS (ci-après: la CCVD). Le 05.02.2013, C.__ a signé un avis de cession en faveur de la CCVD, pour le cas où une rente AI et des prestations complémentaires AVS/AI lui seraient accordées avec effet rétroactif.

Par décision du 30.05.2013, la CCVD a reconnu à feu A.__ le droit à une rente-pont cantonale de 3039 fr. par mois à compter du 01.01.2013; cette rente, dont le montant a ensuite varié entre 2739 fr. et 3977 fr. par mois, a pris fin au 31.12.2014, l’intéressée ayant atteint l’âge de 64 ans révolus.

Le 21.05.2015, l’office de l’assurance-invalidité a rendu une décision d’octroi de rente AI en faveur de C.__ pour la période allant du 01.01.2013 au 31.12.2014; il en est résulté que ce dernier était créancier d’un montant rétroactif de 58’213 fr.

Par décision du 06.08.2015, la CCVD a réclamé à feu A.__, ensuite de la décision d’octroi de la rente AI en faveur de C.__, la restitution de la rente-pont qu’elle avait perçue entre le 01.01.2013 et le 31.12.2014 pour un montant total de 81’540 fr. Après diverses péripéties procédurales, la CCVD a rejeté, par décision du 08.01.2019, la réclamation que feu A.__ avait formée contre la décision du 06.08.2015. Dite décision a été annulée par arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du 11.12.2019.

Après que la CCVD a constaté que les époux A.__ et C.__ avaient bénéficié de prestations complémentaires AVS/AI dès le mois de janvier 2013, le Centre régional de décision rente-pont, Agence d’Assurances Sociales (qui dans l’intervalle a repris la gestion des prestations cantonales de la rente-pont), a rejeté la réclamation de feu A.__ contre la demande de restitution du 06.08.2015 (décision du 25.11.2020).

 

Procédure cantonale (arrêt PS.2021.0003 – consultable ici)

Par jugement du 25.11.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
L’arrêt entrepris repose sur la loi cantonale vaudoise du 23 novembre 2010 sur les prestations complémentaires cantonales pour familles et les prestations cantonales de la rente-pont (LPCFam; BLV 850.053), dont il sied de rappeler les dispositions appliquées par les premiers juges.

Selon l’art. 16 al. 1 de cette loi, ont droit aux prestations cantonales de la rente-pont jusqu’à l’âge d’ouverture ordinaire du droit à la rente de vieillesse prévu par la loi fédérale du 20 LAVS, sous réserve de l’al. 2, les personnes qui remplissent les conditions cumulatives suivantes: elles ont leur domicile dans le canton de Vaud depuis trois ans au moins au moment où elles déposent la demande de rente-pont (let. a); elles ont atteint l’âge ouvrant le droit à la rente anticipée au sens de la LAVS, ou elles relèvent du revenu d’insertion (RI) ou en remplissent les conditions d’accès et sont au plus à deux ans d’atteindre l’âge ouvrant le droit à la rente anticipée au sens de la LAVS (let. b); elles n’ont pas droit à des indemnités de chômage ou ont épuisé leur droit à de telles indemnités (let. c); leurs dépenses reconnues et revenus déterminants, y compris les normes de fortunes, sont inférieurs aux limites imposées par la LPC pour ouvrir le droit à des prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (let. e); elles n’ont pas fait valoir leur droit à une rente de vieillesse anticipée au sens de la LAVS ou elles ont déposé une demande de rente anticipée et sont dans l’attente de la décision d’octroi, respectivement du versement de la rente anticipée; les prestations de la rente-pont accordées à ce titre sont considérées comme avance et doivent être restituées par le bénéficiaire conformément à l’article 28 al. 1bis (let. f). L’art. 16 al. 2 LPCFam précise que le droit aux prestations cantonales de la rente-pont n’est en revanche pas ouvert aux personnes qui atteignent l’âge de la retraite anticipée au sens de la LAVS, et dont la situation financière est telle que l’autorité peut anticiper qu’elles pourront prétendre à des prestations complémentaires au sens de la LPC si elles exercent leur droit à une rente de vieillesse à l’âge ordinaire prévu par la LAVS.

Les prestations cantonales de la rente-pont sont calculées conformément aux critères de la prestation complémentaire annuelle au sens de la LPC (art. 18 al. 1, 1e phrase, LPCFam). Le règlement cantonal du 17 août 2011 d’application de la LPCFam (RLPCFam; BLV 850.053.1) prévoit que les dispositions du chapitre I, lettre A, section II de l’OPC-AVS/AI (RS 831.301) sont, sauf dispositions contraires de la LPCFam ou du règlement, applicables par analogie à la fixation des dépenses reconnues et du revenu déterminant (art. 34 al. 1 RLPCFam [dans sa teneur en vigueur avant le 1er juillet 2021]). L’art. 11 LPC est par ailleurs également applicable par analogie à la détermination du revenu déterminant (art. 35a al. 2 RLPCFam); le revenu déterminant comprend notamment les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (art. 11 al. 1 let. d LPC).

L’art. 28 al. 1 LPCFam prévoit que les prestations complémentaires cantonales pour familles et les prestations cantonales de la rente-pont perçues indûment doivent être restituées. En outre, lorsqu’une prestation d’assurance sociale est octroyée rétroactivement, les prestations complémentaires cantonales pour familles et les prestations cantonales de la rente-pont versées précédemment à titre d’avance doivent être restituées, à concurrence de l’avance perçue (art. 28 al. 1bis LPCFam). La restitution ne peut toutefois être exigée lorsque le bénéficiaire était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile (art. 28 al. 2 LPCFam).

Consid. 3.2
En l’espèce,
l’autorité cantonale a constaté que des prestations complémentaires AVS/AI avaient été versées aux époux A.__ et C.__ à compter de janvier 2013 pour un montant total, jusqu’en décembre 2014, de 20’816 fr. Avec le rétroactif des montants dus au titre de la rente AI en faveur de C.__ et des prestations AI pour enfant, des prestations d’assurance sociale et des prestations complémentaires pour un montant total de 92’680 fr. avaient été versées aux époux A.__ et C.__ durant la période précitée. Comme feu A.__ se trouvait dans un cas de figure visé par l’art. 28 al. 1bis LPCFam, la restitution de la rente-pont perçue entre janvier 2013 et décembre 2014 devait être confirmée. Les juges cantonaux ont par ailleurs rejeté l’argument de feu A.__, selon lequel les prestations de nature et de but identiques qui sont accordées à l’assuré en raison d’un événement dommageable sont prises en considération pour déterminer si l’ayant-droit est surindemnisé au sens de l’art. 69 al. 1 LPGA. Ils ont jugé que les prestations complémentaires fédérales et la rente-pont poursuivaient un but analogue et que les secondes revêtaient un caractère subsidiaire par rapport aux premières. L’octroi d’une rente-pont était d’ailleurs exclu lorsqu’un droit à une prestation complémentaire AVS/AI était reconnu (art. 16 al. 2 LPCFam). Les premiers juges ont également rappelé que les revenus déterminants des époux faisant ménage commun devaient être additionnés dans le calcul de la rente-pont (art. 4 OPC-AVS/AI; cf. en outre art. 9 al. 2 LPC) et que feu A.__ avait elle-même perçu des prestations complémentaires AVS/AI, au vu des art. 4 al. 1 let. a LPC et 37 al. 1bis LAI, ensuite de l’ouverture du droit en faveur de son époux.

 

Consid. 4.1
Dans son acte de recours, feu A.__ se plaignait d’une application arbitraire de l’art. 28 al. 1bis LPCFam. Elle faisait valoir, en se référant au principe de la concordance des droits concrétisé à l’art. 69 al. 1 LPGA, qu’elle seule était bénéficiaire de la rente-pont et que seul son époux était bénéficiaire de la rente AI. L’art. 16 al. 2 LPCFam serait ainsi « inopérant » en l’espèce parce qu’il ne réglerait que les situations dans lesquelles une seule et même personne peut prétendre, pour la même période, à une rente d’invalidité et à une rente-pont. Feu A.__ faisait valoir à cet égard que la personne dont le revenu et la fortune sont pris en compte dans le calcul d’une prestation n’est pas pour autant bénéficiaire de cette dernière. La décision entreprise reviendrait à exiger d’elle qu’elle rembourse sa rente-pont motif pris du versement d’une rente AI et de prestations complémentaires AVS/AI à son époux, alors qu’elle n’aurait pas touché ces dernières. Feu A.__ reprochait d’ailleurs à l’autorité cantonale d’avoir arbitrairement retenu qu’elle avait touché des prestations complémentaires AVS/AI, alors que seul son mari en avait perçues.

Consid. 4.2
L’argumentation est mal fondée. En effet, la rente AI versée rétroactivement à C.__ devait être pris en compte dans l’examen du droit de feu A.__ à la rente-pont, respectivement dans la fixation de cette prestation cantonale. Comme on l’a vu, la rente-pont est calculée conformément aux critères des prestations complémentaires au sens de la LPC (art. 18 al. 1 LPCFam). Or l’art. 9 al. 2 LPC prévoit le principe selon lequel les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints sont additionnés pour déterminer le montant des prestations complémentaires AVS/AI. Les revenus déterminants comprennent notamment les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (art. 11 al. 1 let. d LPC). Partant, peu importe que l’un ou l’autre des époux A.__ et C.__ fût bénéficiaire de la rente AI versée rétroactivement dans la mesure où, selon le droit cantonal pertinent, c’est l’ensemble des revenus du couple qui est déterminant. En tant que de besoin, on soulignera encore que la jurisprudence citée dans l’acte de recours (arrêt 9C_211/2009 du 26 février 2010; arrêt de la CDAP PS.2017.0101 du 16 avril 2018) n’est d’aucun secours au recourant, les situations qui y étaient traitées n’étant pas comparables à celle de feu A.__. En outre, l’allégation selon laquelle cette dernière n’aurait elle-même pas perçu de prestations complémentaires AVS/AI est dénuée de fondement. Indépendamment de la pertinence des dispositions citées par les premiers juges (art. 4 al. 1 let. a LPC et art. 37 al. 1bis LAI; consid. 3.2 supra), il ressort des décisions d’allocation de prestations complémentaires du 27.10.2015 que feu A.__ était également l’ayant droit des prestations accordées rétroactivement.

En ce qui concerne précisément les prestations complémentaires AVS/AI perçus par le couple, c’est sans arbitraire que les juges cantonaux ont considéré que la rente-pont leur était subsidiaire. L’octroi d’une prestation complémentaire AVS/AI vise à assurer la couverture des besoins vitaux non seulement de l’ayant droit mais également des membres de sa famille (MICHEL VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, 2015, n° 10 ad art. 9 LPC). Il en va de même s’agissant de la rente-pont puisque les prestations sont calculées conformément aux critères régissant les prestations complémentaires AVS/AI. Les prestations complémentaires AVS/AI et la rente-pont ont dès lors bien un but analogue (cf. Exposé de motifs sur la stratégie cantonale de lutte contre la pauvreté, in Bulletin du Grand Conseil du canton de Vaud 2007-2012, tome 17, p. 476 ss [ci-après: exposé de motifs], p. 504). Dans ce contexte, l’art. 28 al. 1bis LPCFam consacre le principe de la subsidiarité de la rente-pont par rapport aux prestations d’assurances sociales octroyées à titre rétroactif. Ce principe se retrouve également dans la LPC puisqu’il y est rappelé en particulier à l’art. 11 al. 3 LPC que les prestations d’aide sociale (let. b) ainsi que les prestations provenant de personnes et d’institutions publiques ou privées ayant un caractère d’assistance manifeste (let. c) ne sont pas prises en compte dans le calcul des revenus déterminants. En lien avec l’art. 11 al. 3 let. c LPC, les Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (DPC) de l’OFAS précisent que « sont également considérées comme prestations ayant manifestement un caractère d’assistance les prestations cantonales et communales d’aide aux personnes âgées, aux survivants, aux invalides, aux chômeurs et autres, ainsi que les prestations d’assurance-vieillesse, survivants et invalidité cantonales ayant le caractère d’assistance » (ch. 3412.06). Sans qu’il soit ici nécessaire de trancher la question de la nature de la rente-pont, on observera que cette dernière a été mise en place pour éviter aux personnes proches de l’âge de la retraite n’ayant pas ou plus droit aux indemnités de chômage de devoir recourir au revenu d’insertion, que le droit à cette prestation ne dépend pas du versement de cotisations et qu’elle fait l’objet d’une révision périodique (cf., en lien avec l’art. 11 al. 3 let. b LPC, arrêt 2C_95/2019 du 13 mai 2019 consid. 3.4.4 où la rente-pont est qualifiée d’alternative à l’aide sociale). La rente-pont relève dès lors à tout le moins de l’art. 11 al. 3 let. c LPC et ne doit donc pas être prise en considération dans le calcul des revenus déterminants au sens de la LPC (sur la coordination « extrasystémique » entre les prestations complémentaires AVS/AI, d’une part, et l’aide sociale et les prestations d’assistance, d’autre part, cf. JÖHL/USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3e éd. 2016, p. 1916, n. 217-218). Feu A.__ ne prétendait d’ailleurs pas que la rente-pont aurait été prise en compte dans le calcul des prestations complémentaires AVS/AI versées rétroactivement aux époux à compter de janvier 2013. La rente-pont apparaît dès lors clairement comme étant subsidiaire aux prestations complémentaires AVS/AI. En outre, dans le cadre de la demande de ladite prestation, la CCVD a pris soin de faire signer à C.__ un avis de cession des prestations de rente AI et des prestations complémentaires AVS/AI accordées à titre rétroactif. Ainsi, feu A.__ ne saurait se prévaloir du principe de la concordance des droits ancré à l’art. 69 LPGA, lequel présuppose que les prestations soient cumulables (FRÉSARD-FELLAY/FRÉSARD, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n° 6 ad art. 69 LPGA).

Il résulte de ce qui précède que les juges cantonaux n’ont pas fait preuve d’arbitraire en confirmant la demande de restitution des prestations de la rente-pont versées à feu A.__ entre le 01.01.2013 et le 31.12.2014.

 

Le TF rejette le recours de feu A.__.

 

Arrêt 8C_469/2021 consultable ici

 

9C_522/2021 (f) du 29.06.2022 – Révision de prestations complémentaires – 17 LPGA / Obligation de restituer des prestations (complémentaires) perçues indûment – Dies a quo du délai de péremption – 25 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_522/2021 (f) du 29.06.2022

 

Consultable ici

 

Révision de prestations complémentaires / 17 LPGA

Obligation de restituer des prestations (complémentaires) perçues indûment – Dies a quo du délai de péremption / 25 LPGA

 

Assurée, née en 1976, s’est vu octroyer un quart de rente AI depuis le 01.12.2002, puis une demi-rente depuis le 01.03.2003. Par décisions de la caisse de compensation des 13.03.2009 et 04.12.2009, confirmées sur opposition, elle a été de plus mise au bénéfice de prestations complémentaires AVS/AI depuis le 01.05.2003. La caisse de compensation a régulièrement procédé à l’adaptation des prestations. Par décision du 06.07.2018, elle a mis un terme au droit de l’assurée à des prestations complémentaires avec effet au 01.08.2018.

Lors d’un entretien téléphonique du 11.07.2018, l’assurée a mentionné à une collaboratrice de la caisse de compensation qu’elle possédait un bien immobilier à l’étranger. Par une première décision du 06.05.2019, la caisse de compensation a mis fin aux prestations complémentaires versées en faveur de l’assurée avec effet rétroactif au 01.06.2012. Le même jour, elle a réclamé à l’assurée un montant de 101’119 fr. 05, correspondant aux prestations complémentaires versées entre le 01.06.2012 et le 30.05.2019. Saisie d’une opposition, la caisse de compensation a repris l’instruction de la cause et rendu de nouvelles décisions le 18.10.2019, par lesquelles elle a confirmé la fin du droit aux prestations complémentaires avec effet rétroactif dès le 01.06.2012. Par décisions du 29.01.2020, la caisse de compensation a partiellement admis la nouvelle opposition formée par l’assurée et réduit le montant soumis à restitution à 77’096 fr. 85, correspondant aux prestations versées entre le 01.06.2012 et le 31.12.2019.

 

Procédure cantonale (arrêt PC 8/20 – 21/2021 – consultable ici)

Par jugement du 26.08.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 2.2
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral dans le domaine du droit privé, il incombe à celui qui fait valoir un droit soumis à un délai de péremption de prouver qu’il a observé celui-ci, l’observation du délai ayant un caractère constitutif de droit et étant une condition de l’exercice de l’action. Lorsque le délai de péremption commence à courir au moment où celui qui intente l’action a connaissance de certains faits, il appartient au demandeur d’établir quand et comment il a eu connaissance de ces faits. Le défendeur, de son côté, peut apporter la contre-preuve que le demandeur a connu les faits pertinents déjà à une date antérieure à celle qu’il invoque et qu’il s’est écoulé, entre cette date antérieure et l’introduction de l’action, un laps de temps dépassant le délai de péremption, de sorte que l’action serait périmée. Ainsi, lorsque le début du délai de péremption dépend de la connaissance de certains faits, il incombe au défendeur d’établir que le délai de péremption n’est pas respecté (arrêt 9C_632/2012 du 10 janvier 2013 consid. 6.2.3 et la référence).

Consid. 3.1
La juridiction cantonale a, en se fondant sur la procédure de révision quadriennale de l’année 2018, retenu que la décision de restitution de la caisse de compensation du 06.05.2019 se fondait sur la découverte d’éléments de fortune mobilière et immobilière nouveaux. L’assurée avait en effet sciemment dissimulé qu’elle possédait un bien immobilier à l’étranger jusqu’en 2018. Elle avait de plus omis de signaler l’existence de comptes bancaires à l’étranger et l’activité accessoire de son époux. En présence de tels faits nouveaux importants, découverts en 2018, la caisse avait à juste titre recalculé à nouveau le droit de l’assurée à des prestations complémentaires. Dès lors que l’assurée avait violé son obligation de renseigner, la caisse de compensation avait par ailleurs étendu correctement la restitution des prestations indues aux sept années antérieures à la décision du 06.05.2019 (art. 25 al. 2 LPGA).

Consid. 4.1
Les prestations complémentaires accordées en vertu de décisions qui ont formellement passé en force doivent être restituées si les conditions d’une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) ou d’une révision (art. 53 al. 1 LPGA) sont remplies (ATF 130 V 318 consid. 5.2 et les références). S’agissant plus particulièrement de cette dernière, l’administration procède à la révision d’une décision entrée en force formelle lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve, susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 122 V 134 consid. 2b et la référence). L’obligation de restituer les prestations complémentaires indûment perçues vise à rétablir l’ordre légal, après la découverte d’un fait nouveau (arrêt 8C_120/2008 du 4 septembre 2008 consid. 3.1).

Consid. 4.2
A l’inverse de ce que soutient l’assurée, le délai (relatif) d’un an de l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut commencer à courir qu’à partir du moment où la caisse de compensation aurait dû connaître les faits fondant l’obligation de restituer, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle. Admettre que les prétentions de la caisse de compensation puissent commencer à se prescrire avant la découverte des faits nouveaux à l’origine de la reconsidération ou de la révision reviendrait à considérer que des prétentions non encore nées, puisque fondées sur des faits que l’administration n’était pas en mesure de connaître, pourraient se périmer.

La caisse de compensation a demandé la restitution des prestations en raison de l’existence de biens à l’étranger. A cet égard, l’assurée ne prétend pas que la caisse de compensation disposait avant l’entretien téléphonique du 11.07.2018, à tout le moins, d’un faisceau d’indices laissant supposer l’existence de son bien immobilier à l’étranger, de ses avoirs bancaires à l’étranger et de l’activité accessoire de son époux. En procédant à la révision du droit de l’assurée à des prestations complémentaires AVS/AI le 06.05.2019 et en demandant la restitution des prestions perçues indûment le même jour, la caisse de compensation a par conséquent agi dans le délai (relatif) d’une année de l’art. 25 al. 2 LPGA, dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020. Dans ce contexte, la référence, dont se prévaut l’assurée, au salaire erroné de l’époux, qui aurait pu justifier également la restitution des prestations, n’a pas d’influence sur l’issue de la cause. La juridiction cantonale a par conséquent retenu à juste titre que l’assurée est tenue de restituer le montant intégral de toutes les prestations de l’assurance touchées indûment du 01.06.2012 au 31.07.2018.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

Arrêt 9C_522/2021 consultable ici

 

Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

 

  1. Contexte

Dans son arrêt du 11.10.2022, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé l’arrêt du 20.10.2020 de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) concernant l’affaire B. contre Suisse (Requête n° 78630/12). La Cour avait conclu que le requérant avait subi une inégalité de traitement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) du fait de l’extinction du droit à la rente de veuf à la majorité du dernier enfant, alors qu’une telle extinction n’est pas prévue pour une veuve se trouvant dans la même situation.

La Suisse doit dès lors se conformer à l’arrêt de la CrEDH qui est désormais définitif et cesser la violation constatée et ce dès l’entrée en force de l’arrêt, soit dès le 11.10.2022. Une adaptation des bases légales est nécessaire et devra être entreprise dans le respect du processus législatif. Celui-ci peut être relativement long et ne pourra de ce fait intervenir qu’ultérieurement. C’est pourquoi, un régime transitoire doit être mis en place pour enrayer la violation constatée par la CrEDH dans de plus brefs délais.

 

  1. Régime transitoire pour les rentes de veuf en cours et futures

Dans la mesure où l’arrêt de la Grande Chambre porte sur un cas individuel, celui-ci ne déploiera d’effets que dans les situations identiques à celle qui a été jugée. Concrètement, cela implique que seuls les veufs qui ont des enfants percevront la rente de veuf aux mêmes conditions que les veuves dans la même situation. Ainsi, la rente de veuf octroyée sur la base de l’art. 23 LAVS ne prendra plus fin lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans et continuera à être versée. Ce régime transitoire ne remet pas en cause l’application des art. 24 al. 1 et 24a LAVS de sorte que les veufs sans enfant ne sauraient prétendre à une rente de veuf sur la base de cet arrêt. S’agissant des hommes divorcés, le droit à la rente de veuf s’éteint dans tous les cas aux 18 ans de l’enfant cadet. En outre, l’arrêt susmentionné n’a aucune influence sur les rentes de veuve.

Le régime transitoire déploie ses effets à compter du 11.10.2022, moment de l’entrée en force de l’arrêt définitif de la Grande Chambre, et s’étendra jusqu’à l’entrée en vigueur d’une prochaine révision de la LAVS en matière de rentes de survivants. Les directives et autres documents seront adaptés dans un deuxième temps.

Les catégories de veufs suivantes sont concernées par le régime transitoire. Sont également concernés les partenaires enregistrés survivants qui sont assimilés à des veufs :

  • Les veufs avec enfants mineurs dont la rente de veuf est en cours de versement au moment de l’arrêt définitif (11.10.2022). Les cas pour lesquels une demande est déposée après le 11.10.2022 sont également concernés. Pour reconnaître un droit à la rente de veuf au-delà des 18 ans de l’enfant, le fait que l’enfant n’ait pas atteint l’âge de 18 ans au 11.10.2022 est déterminant.
  • Les hommes non divorcés avec enfants, qui deviennent veufs après le 11.10.2022, c’est-à-dire dont le droit aux prestations naît suite à un décès intervenu après cette date. La présence d’un ou plusieurs enfants au moment du décès suffit, l’âge de celui-ci est sans importance (comme pour les veuves).
  • Les veufs avec enfants qui ont contesté la décision de suppression de leur rente de veuf et dont l’affaire est pendante au 11.10.2022.
  • Les hommes dont le droit à la rente de veuf renaît sur la base de l’art. 23 al. 5 LAVS, pour autant que l’enfant cadet donnant droit à la rente n’ait pas encore atteint l’âge de 18 ans en date du 11.10.2022.

 

Pour ces personnes, les rentes de veufs seront octroyées selon l’art. 23 LAVS et versées au-delà des 18 ans de l’enfant. Les prestations ne seront donc plus limitées dans le temps et ne s’éteindront qu’en cas de décès, de remariage ou de naissance du droit à une rente de vieillesse de l’AVS, respectivement d’une rente de l’AI, plus élevée. Pour le remplacement de la rente de veuf par sa propre rente de vieillesse ou de l’AI, les conditions sont analogues que pour les rentes de veuve (ch. 5620ss DR).

Les veufs dont les rentes ont cessé d’être versées suite à une décision devenue définitive avant le 11.10.2022 ne sont donc pas concernés par ce régime transitoire. En effet, un changement de loi ou de jurisprudence ne constitue pas un motif de reconsidération. Les demandes visant à faire renaître une rente de veuf éteinte avant le 11.10.2022 en raison de la majorité de l’enfant et dont la décision est passée en force seront rejetées.

Le régime transitoire, comme l’arrêt de la Grande Chambre, déploie ses effets à partir du 11.10.2022. Les éventuelles décisions de suppression de rente intervenues après le 11.10.2022 doivent être annulées. Les décisions de suppression de rente, qui ne sont pas encore entrées en force doivent être annulées. De nouvelles décisions doivent être rendues et le versement de la rente de veuf doit continuer au-delà de la majorité de l’enfant. Si des paiements rétroactifs doivent être effectués, et qu’ils remontent à plus de 2 ans, des intérêts moratoires sont dûs (ch. 10503ss DR).

La mise en place du régime transitoire auprès des organes d’exécution prendra toutefois un certain temps. En effet, il est nécessaire d’adapter le logiciel de calcul de rente, les systèmes informatiques ainsi que les diverses procédures et les registres des rentes. Les droits seront toutefois accordés avec effet rétroactif au 11.10.2022.

  1. Aperçu des constellations possibles et des conséquences qui en découlent

 

Situation au 11.10.2022 Droit à la rente de veuf Mesure à prendre par la caisse de compensation
Rente de veuf en cours (veuf avec un enfant de moins de 18 ans au moment du veuvage)

 

Droit illimité Information et nouvelle décision au bénéficiaire de la prestation. Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu avant le 11.10.2022 (ex. demande tardive) Droit illimité, pour autant que le veuf ait au moins un enfant mineur en date du 11.10.2022 Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu après le 11.10.2022 Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant au moment du veuvage (l’âge de l’enfant n’est pas déterminant) Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Renaissance du droit à la rente de veuf selon l’art. 23 al. 5 LAVS Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant de moins de 18 ans en date du 11.10.2022 Décision réouvrant le droit à la rente et octroi d’une rente illimitée.
Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Décision de suppression du droit à la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant non entrée en force Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision d’office.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant et versement illimité dans le temps.
Procédure d’opposition en cours suite à la suppression de la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision sur opposition.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant, le cas échéant avec des intérêts moratoires en raison du paiement rétroactif, et versement illimité dans le temps
Procédure de recours pendante au tribunal   Attente de la décision du tribunal
Décision de suppression du droit à la rente de veuf entrée en force, en raison de la majorité de l’enfant atteinte avant le 11.10.2022. Pas de droit à la rente de veuf Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.
Conjoints divorcés au sens de l’art. 24a LAVS Pas de changement, application du droit en vigueur. Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.

 

  1. Régime transitoire pour les prestations complémentaires en cours et futures

Droit aux PC en cas de perception d’une rente de veuf

Les personnes concernées par le régime transitoire décrit au point 2 qui se voient octroyer et verser une rente de veuf selon l’art. 23 LAVS aux mêmes conditions que les veuves ayant des enfants peuvent faire valoir leur droit à des PC pendant toute la durée de la perception de la rente, pour autant qu’elles remplissent les autres conditions d’octroi. Si un droit échu à une rente de veuf renaît en vertu de ce régime transitoire, l’éventuel droit à des PC renaît également.

 

Droit aux PC sans perception d’une rente de veuf

Pour autant que les autres conditions d’octroi soient remplies, un veuf ou une veuve peut aussi faire valoir un droit à des PC s’il ou elle ne perçoit pas de rente de survivant de l’AVS. La condition est que l’individu aurait eu droit à une rente de survivant si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29 al. 1 LAVS (art. 4 al. 1 let. b, ch. 2, LPC).

Pendant la durée d’application du régime transitoire, les hommes mariés ou en partenariat enregistré qui se retrouvent veufs peuvent faire valoir leur droit à des PC même si leur enfant le plus jeune a déjà au moins 18 ans. Cette règle ne s’applique toutefois que si l’une des conditions suivantes est remplie :

  • l’individu concerné touchait déjà des PC le 11.10.2022, car il était veuf et avait des enfants mineurs ;
  • l’individu concerné est devenu veuf avant le 11.10.2022 et son enfant le plus jeune n’avait pas encore 18 ans à cette date (la date de la demande de PC et celle de la naissance du droit aux PC ne jouent aucun rôle) ;
  • l’individu concerné est devenu veuf après le 11.10.2022 et avait des enfants à ce moment-là (leur âge ne joue aucun rôle) ;
  • le versement des PC a été interrompu lorsque l’enfant le plus jeune a atteint l’âge de 18 ans, l’individu concerné a contesté cette décision et le cas était encore en suspens au 11.10.2022 ;
  • le droit à une rente de veuf qu’aurait eu l’individu concerné si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29, al. 1, LAVS renaît sur la base de l’art. 23, al. 5, LAVS, et l’enfant le plus jeune y donnant droit n’a pas encore 18 ans au 11.10.2022.

Les veufs divorcés ou sans enfants n’ont toujours pas droit à des PC.

 

Calcul des PC annuelles

Pendant la durée du régime transitoire, l’art. 14b OPC-AVS/AI s’applique par analogie aux veufs qui n’ont pas d’enfants mineurs. À partir du mois suivant le 18ᵉ anniversaire de l’enfant le plus jeune, le revenu de l’activité lucrative à prendre en compte pour les veufs non invalides correspond donc au moins au revenu applicable en vertu de l’art. 14b, let. a à c, OPC-AVS/AI. Les dispositions correspondantes des directives (chap. 3.4.2.5 et 3.4.2.6 DPC) s’appliquent également par analogie.

 

Validité du régime transitoire

Le régime transitoire déploie ses effets de manière rétroactive à compter du 11.10.2022. Pour les hommes mariés ou en partenariat enregistré, les droits aux PC échus avant cette date en raison de la majorité de l’enfant le plus jeune ne renaissent pas.

Cependant, si la décision n’était pas encore entrée en force au 11.10.2022, le droit aux PC renaît d’office. Il en va de même pour les PC dont la suspension a déjà été décidée pour une date postérieure au 11.10.2022. Dans ces cas, les décisions d’office correspondantes doivent être reconsidérées et le versement des PC doit reprendre à partir du moment auquel il a été suspendu en raison de la majorité de l’enfant. Pour les éventuels intérêts moratoires, voir le chap. 4.5 DPC.

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

Übergangsregelung für Witwerrenten der AHV in Folge Urteil des Europäischen Gerichtshofs für Menschenrechte (EGMR), Mitteilungen an die AHV-Ausgleichskassen und EL-Durchführungsstellen Nr. 460, 21.10.2022, hier verfügbar

NB : Pas de version en italien du Bulletin.

 

9C_126/2021 (f) du 29.03.2022 – Conditions d’assurance – Condition de la durée minimale de cotisations – 36 al. 1 LAI / Pas d’intérêt digne de protection de l’assurée à faire constater son (éventuel) degré d’invalidité, en relation avec une hypothétique demande de prestations complémentaires au sens de l’art. 4 al. 1 let. d LPC

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_126/2021 (f) du 29.03.2022

 

Consultable ici

 

Conditions d’assurance – Condition de la durée minimale de cotisations / 36 al. 1 LAI

Pas d’intérêt digne de protection de l’assurée à faire constater son (éventuel) degré d’invalidité, en relation avec une hypothétique demande de prestations complémentaires au sens de l’art. 4 al. 1 let. d LPC

 

Assurée, née en 1968, ressortissante du Kosovo, mariée et mère de trois enfants nés en 1995, 1997 et 1999, est arrivée en Suisse en juillet 2008. Elle a travaillé en tant que couturière jusqu’en 1995 et n’a plus exercé d’activité professionnelle depuis lors.

Demande AI déposée le 18.08.2016. Dans un rapport du 30.03.2017, le médecin du SMR a attesté une incapacité totale de travail depuis le mois de mars 2010 en raison de son état de santé. L’office AI a mis en œuvre une enquête économique sur le ménage, réalisée le 24.08.2017. A la lumière de celle-ci et en application de la méthode spécifique d’évaluation de l’invalidité, l’office AI a nié le droit à la rente par décision du 19.10.2017, car le total des empêchements rencontrés dans la tenue du ménage était inférieur à 40% (38,7%).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1280/2020 – consultable ici)

Bien que la juridiction cantonale ait admis que la condition de la durée de cotisations au sens de l’art. 36 LAI n’était pas remplie, elle a néanmoins jugé que la question du taux d’invalidité revêtait une importance pratique sous l’angle d’un éventuel droit aux prestations complémentaires en vertu de l’art. 4 al. 1 let. d LPC. Confirmant le taux des empêchements dans les travaux habituels (38,7%), elle a renvoyé la cause à l’office AI afin qu’il constate le degré d’invalidité de l’assurée en application de la méthode mixte.

Par jugement du 22.12.2020, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, renvoyant la cause à l’office AI pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

 

TF

Préjudice irréparable – 93 LTF

Consid. 2.2
Puisqu’il renvoie la cause à l’office AI pour qu’il réexamine le taux d’invalidité de l’assurée en application de la méthode mixte d’évaluation de l’invalidité, en lieu et place de la méthode spécifique, et rende une nouvelle décision, l’arrêt attaqué tranche de manière définitive une question de droit matériel portant sur le statut de l’assurée.

En obligeant l’office AI à appliquer la méthode mixte, cet arrêt contient des instructions impératives qui ne lui laissent plus aucune latitude de jugement pour la suite de la procédure, de sorte que l’office AI sera tenu de rendre une décision qui, selon lui, est contraire au droit fédéral. En cela, il subit un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF, si bien qu’il y a lieu d’entrer en matière sur son recours (cf. arrêt 9C_36/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.3).

 

Condition de la durée minimale de cotisations – 36 al. 1 LAI

Consid. 3
Selon l’art. 36 al. 1 LAI, a droit à une rente ordinaire l’assuré qui, lors de la survenance de l’invalidité, compte trois années au moins de cotisations. D’après l’art. 4 al. 1 let. d LPC, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à des prestations complémentaires dès lors qu’elles auraient droit à une rente de l’AI si elles justifiaient de la durée de cotisation minimale requise à l’art. 36 al. 1 LAI.

Consid. 5.1
La condition de la durée minimale de cotisations (cf. art. 36 al. 1 LAI) fait défaut, ce qui n’est pas contesté. Il convient dès lors d’examiner si l’assurée dispose d’un intérêt digne de protection à faire néanmoins constater son (éventuel) degré d’invalidité, en relation avec une hypothétique demande de prestations complémentaires au sens de l’art. 4 al. 1 let. d LPC.

Consid. 5.2
Sur le principe, la jurisprudence a reconnu l’existence d’un tel intérêt digne de protection (cf. art. 59 LPGA en liaison avec l’art. 28 al. 2 LAI), lorsque le taux d’invalidité est déterminant pour savoir si et, le cas échéant, dans quelle mesure il convient de prendre en compte un revenu hypothétique pour fixer les prestations complémentaires (par analogie arrêt 9C_822/2011 du 3 février 2012 consid. 3.2.3).

Dans le cas d’espèce, – et contrairement à la situation exposée dans l’arrêt 9C_822/2011 cité ci-dessus – il ne ressort toutefois ni de l’arrêt attaqué ni des pièces du dossier que l’assurée aurait saisi le Service des prestations complémentaires du canton de Genève (SPC) d’une demande de telles prestations, indépendamment du sort de sa demande de rente d’invalidité. Si cela devait être le cas, les questions préliminaires telles que le statut de l’assurée et le revenu hypothétique à prendre en considération, notamment, pourraient de toute façon être librement tranchées par le SPC dans le cadre d’une décision relative au droit de l’assurée à des prestations complémentaires. En effet, il appartiendrait aux organes désignés par les cantons pour fixer et verser les prestations complémentaires (cf. art. 21 al. 1 LPC) – et non pas à l’office AI – de se prononcer sur le droit éventuel de l’assurée à des prestations complémentaires prévues par la LPC, singulièrement à des prestations indépendantes d’une rente de l’AVS ou de l’AI (« rentenlose Ergänzungsleistung »). L’examen des conditions matérielles du droit à une telle prestation ne dépend pas alors d’une décision (de refus) préalable des organes d’exécution de l’assurance-invalidité, sinon un office de l’assurance-invalidité ou une caisse de compensation devrait toujours examiner la demande de prestations complémentaires avant l’organe compétent selon la LPC (Ralph Jöhl / Patricia Usinger-Egger, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in Soziale Sicherheit [SBVR], 3ème éd., n° 25 p. 1723).

En d’autres termes, de manière générale, aussi longtemps que l’autorité compétente pour se prononcer à titre principal sur certaines questions n’a pas rendu de décision à leur sujet, une autre autorité peut examiner ces questions à titre préliminaire et rendre une décision, de sorte qu’il n’y a pas de place pour une décision de constatation sur les questions préliminaires (cf. arrêt 9C_528/2010 du 17 novembre 2011 consid. 4.2.2 avec les références).

Consid. 5.3
Il s’ensuit que l’office AI n’aurait pas dû nier le droit à la rente en raison du degré d’invalidité inférieur à 40% qu’il avait établi, mais uniquement parce que la condition de la durée minimale de cotisations de trois ans (cf. art. 36 al. 1 LAI) n’était pas remplie. Par conséquent, l’instance précédente aurait dû confirmer la décision en son dispositif par substitution de motifs, d’autant qu’en l’absence d’une demande de prestations complémentaires au sens de l’art. 4 al. 1 let. d LPC, il n’existe aucun intérêt actuel à faire constater le taux d’invalidité de l’assurée, en particulier dans le cadre du complément d’instruction que les premiers juges ont ordonné. En ce sens, le recours est bien fondé.

Consid. 5.4
Dans sa décision, l’office AI a fixé le statut de l’assurée (ménagère sans activité lucrative) ainsi que son taux d’invalidité (38,7%). Comme ces éléments font partie de la motivation de cette décision et qu’ils ne sont pas définitivement tranchés par le présent arrêt, ils ne lient pas le SPC (cf. arrêt 9C_528/2010 précité, consid. 4.2.3).

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annule le jugement cantonal et confirme par substitution de motifs la décision AI.

 

 

Arrêt 9C_126/2021 consultable ici

 

9C_422/2021 (f) du 23.03.2022 – Prestations complémentaires – Dessaisissement de fortune – 17 OPC-AVS/AI (dans sa teneur jusqu’au 31.12.2020) / Détermination de la part de l’assurée sur les immeubles cédé aux enfants

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_422/2021 (f) du 23.03.2022

 

Consultable ici

 

Prestations complémentaires – Dessaisissement de fortune – 17 OPC-AVS/AI (dans sa teneur jusqu’au 31.12.2020)

Détermination de la part de l’assurée sur les immeubles cédé aux enfants

 

Assurée, née en 1938, a présenté une demande de prestations complémentaires à sa rente AVS, en novembre 2018. Par décisions du 01.03.2019, la caisse de compensation (ci-après: la caisse) a rejeté la demande. En bref, elle a considéré que pour la période courant dès le 01.11.2018, les revenus déterminants étaient supérieurs aux dépenses reconnues, en prenant notamment en considération que l’assurée s’était dessaisie sans contrepartie de biens immobiliers au profit de ses deux fils.

Le 26.09.2019, la caisse a rejeté l’opposition de l’assurée. Dans ses calculs, elle a fixé respectivement à 117’260 fr. (pour 2018) et 107’260 fr. (pour 2019) les montants de la fortune dessaisie, après déduction des dettes hypothécaires, en fonction des informations données par la commission de taxation de la commune, qui avait estimé la valeur des biens cédés en mars et septembre 2007 à 323’120 fr. et 433’400 fr. Selon la caisse, les immeubles cédés constituaient des acquêts, de sorte que la part de dessaisissement de l’assurée correspondait à la moitié de la valeur des biens.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 14.07.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.2
Il y a dessaisissement lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (ATF 140 V 267 consid. 2.2; 134 I 65 consid. 3.2; 131 V 329 consid. 4.4). Aux termes de l’art. 17 OPC-AVS/AI (RS 831.301), dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31.12.2020, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque des immeubles ne servent pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (al. 4).

Consid. 4.1
L’assurée ne conteste pas les constatations de la juridiction cantonale selon lesquelles feu son époux était inscrit au registre foncier comme propriétaire des deux parcelles objets des libéralités et qu’elle avait cédé sa part dans l’hoirie de son conjoint à ses deux fils, singulièrement à B.__ selon l’acte notarié du 03.03.1997 et à D.__ selon l’acte notarié du 05.09.2007. Elle ne s’en prend pas non plus aux considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles pour déterminer le montant de la fortune nette dont elle s’était dessaisie, il convenait de fixer non seulement la quote-part découlant de sa participation à l’hoirie, mais également sa participation à la liquidation du régime matrimonial, laquelle précédait celle de la succession. L’assurée s’en prend uniquement à la quotité de la part sur les biens cédés à ses fils, que la juridiction cantonale a fixée à deux tiers au lieu de la moitié retenue par la caisse. Elle se limite cependant à contester la modification de la répartition effectuée par le Tribunal cantonal et retenir dans ses propres calculs la « répartition validée par la caisse (…), soit 1/2 », sans faire valoir d’élément concret à l’encontre du raisonnement de la juridiction cantonale.

Toutefois, les considérations cantonales, fondées sur les règles du code civil relatives à la liquidation du régime matrimonial en vigueur jusqu’au 31.121987 (soit avant l’entrée en vigueur de la modification du Code civil suisse du 05.10.1984 [Effets généraux du mariage, régime matrimonial et successions; RO 1986 122]), en fonction de la date du décès de l’époux de l’assurée (en 1984), ainsi que sur les règles sur le partage successoral (dont en particulier l’art. 462 ch. 1 CC), reposent sur une application erronée du droit. Les premiers juges ont d’abord correctement tenu compte des (anciennes) règles sur l’union des biens, applicables à défaut de contrat de mariage ou de situation soumise au régime matrimonial extraordinaire (art. 178 aCC, en relation avec l’art. 9a al. 2 des dispositions transitoires du CC). Conformément aux art. 213 et 214 al. 1 aCC, au décès du mari, le bénéfice restant après le prélèvement de ses apports par la femme appartient pour un tiers à celle-ci ou à ses descendants et, pour le surplus, au mari ou à ses héritiers. En revanche, la juridiction cantonale a perdu de vue que selon l’art. 462 al. 1 aCC, qui a été modifié au 01.01.1988 (RO 1986 122, p. 143), le conjoint survivant peut réclamer à son choix, si le défunt laisse des descendants, l’usufruit de la moitié ou la propriété du quart de la succession. La part de l’assurée à la succession de son époux s’élevait dès lors à un quart au décès de celui-ci, moment de l’ouverture de la succession (art. 537 al. 1 CC; cf. STEINAUER, Le droit des successions, 2e éd. 2015, N 62, 104 et 852 ss). La part de l’assurée sur les immeubles cédés à ses fils s’élevait dès lors à 1/2 (1/3 [résultant de la dissolution du régime matrimonial] + [1/4 x 2/3 résultant du partage de la succession]). Par conséquent, c’est bien la quotité d’une demie prise en considération par la caisse qui se révèle conforme au droit. Ce résultat ne modifie cependant pas l’issue de la cause, comme il ressort des considérations suivantes.

Consid. 4.3
L’assurée invoque finalement en vain une violation de l’art. 17c OPC-AVS/AI, selon lequel le montant du dessaisissement en cas d’aliénation correspond à la différence entre la valeur de la prestation et la valeur de la contre-prestation. Cette disposition est entrée en vigueur au 01.01.2021 (RO 2020 599) et n’est par conséquent pas applicable en l’occurrence. Au demeurant, contrairement à ce que soutient l’assurée, les dettes hypothécaires « en vigueur en mars 1997 » ne constituent pas une contre-prestation au sens de la règle d’exécution.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_422/2021 consultable ici

 

Motion Graf 22.3359 «Prendre en compte l’augmentation exceptionnelle des frais de chauffage dans le calcul des PC» – Avis du Conseil fédéral

Motion Graf 22.3359 «Prendre en compte l’augmentation exceptionnelle des frais de chauffage dans le calcul des PC» – Avis du Conseil fédéral

 

Motion consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé d’examiner l’opportunité de modifier la loi sur les prestations complémentaires (LPC ; RS 831.30) et l’ordonnance correspondante (RS 831.301) – si nécessaire en ayant recours au droit d’urgence – pour que les prestations complémentaires prennent en charge les coûts supplémentaires en cas de hausse exceptionnelle des frais de chauffage.

 

Développement

Selon l’art. 2 de la LPC, les prestations complémentaires (PC) doivent couvrir les besoins vitaux. Le conflit entre la Russie et l’Ukraine provoquera vraisemblablement une augmentation significative des frais de chauffage. Cette situation ne devrait pas se détendre à court ou à moyen terme. Les paiements complémentaires pour les frais de chauffage pourraient s’élever à plusieurs milliers de francs. Or, les bénéficiaires des PC ne pourront pas assumer ces frais supplémentaires par leurs propres moyens, étant donné qu’ils vivent déjà avec le minimum vital.

La législation actuelle prévoit que les acomptes pour les frais accessoires de chauffage sont pris en compte dans le calcul des PC. En revanche, si un décompte final est établi pour les frais accessoires, le paiement complémentaire n’est pas pris en compte dans le calcul de la PC annuelle.

La réglementation en vigueur prévoit un forfait de 1260 par an pour les locataires – qu’il s’agisse de personnes seules ou en couple – qui chauffent elles-mêmes leur appartement, sans verser de frais accessoires à leur bailleur. Il faut également revoir ce montant pour tenir compte de l’augmentation des frais de chauffage et trouver une solution simple et pragmatique pour les situations extraordinaires, comme celle qui prévaut actuellement.

 

Avis du Conseil fédéral du 18.05.2022

Selon l’art. 19 de la loi fédérale sur les prestations complémentaires (LPC ; RS 831.30), le Conseil fédéral peut, dans le cadre de l’adaptation régulière des rentes à l’évolution des salaires et des prix, corriger le montant des dépenses reconnues, des revenus déterminants et des frais de maladie et d’invalidité pour les prestations complémentaires (PC) en cas de hausse ou de baisse importante et durable des prix. A l’heure actuelle, il n’est toutefois pas encore clair dans quels secteurs (mazout, essence, denrées alimentaires, etc.) la guerre en Ukraine fera durablement augmenter les prix ; une adaptation des PC n’est donc pas indiquée pour le moment. Par ailleurs, les loyers maximaux et les forfaits pour frais de chauffage accordés aux bénéficiaires de PC louant un appartement qu’ils doivent chauffer eux-mêmes ont déjà été relevés au 1er janvier 2021 dans le cadre de la réforme des PC.

Actuellement, seul le loyer brut est compté comme frais de logement dans le calcul de la PC annuelle. L’éventuel décompte final des frais accessoires au loyer n’est pas pris en considération et n’a donc pas d’influence sur le montant de la prestation versée. Une réglementation différente aurait notamment pour conséquence que les bénéficiaires devraient restituer les prestations touchées s’ils obtiennent un remboursement de leur bailleur lors du décompte final. De plus, ils peuvent, s’ils le souhaitent, faire adapter à la réalité les frais accessoires payés sous forme d’acompte jusqu’à concurrence du montant maximal reconnu.

Par ailleurs, il n’y a pas d’urgence concernant le décompte des frais accessoires 2021/2022, car les citernes à mazout ont été remplies avant l’hiver, c’est-à-dire avant le début de la guerre.

 

Proposition du Conseil fédéral du 18.05.2022

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Graf 22.3359 «Prendre en compte l’augmentation exceptionnelle des frais de chauffage dans le calcul des PC» consultable ici

Voir également la motion Weichelt 22.3304 «Intégrer la hausse extraordinaire des frais de chauffage dans le calcul des prestations complémentaires», consultable ici, où le Conseil fédéral propose également le rejet de la motion.

 

 

 

Hébergement de personnes en provenance d’Ukraine bénéficiant d’un statut de protection S par des bénéficiaires de prestations complémentaires

Hébergement de personnes en provenance d’Ukraine bénéficiant d’un statut de protection S par des bénéficiaires de prestations complémentaires

 

Bulletin no 451 de l’OFAS du 01.04.2022 consultable ici

 

Calcul PC des bénéficiaires qui hébergent chez eux des personnes en provenance d’Ukraine bénéficiant du statut de protection S

Lorsqu’une personne ou une famille bénéficiaire de PC héberge d’autres personnes dans son logement, cela a en général des répercussions sur le calcul PC. En effet, si un logement est également occupé par des personnes qui ne sont pas incluses dans le calcul PC, le loyer doit être réparti à parts égales entre chacune des personnes. Les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul PC ne sont pas prises en compte dans le calcul PC (art. 16c OPC, n° 3231.03 DPC).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il est possible de déroger à la répartition du loyer à parts égales si la personne bénéficiaire de PC assume seule le loyer pour un motif valable (ATF 105 V 271). Au moins durant les premiers mois de leur séjour, les personnes qui ont fui la guerre en Ukraine pour se réfugier en Suisse ne disposent d’aucun revenu courant. L’accès à la fortune est également souvent difficile, voire impossible. Ces personnes ne peuvent souvent pas financer leurs frais de logement par leurs propres moyens. Dans les cas où les bénéficiaires de PC hébergent gratuitement des personnes en provenance d’Ukraine bénéficiant d’un statut de protection S, il convient donc de ne pas tenir compte de ces personnes lors de la répartition du loyer. Le montant du loyer pris en compte dans le calcul PC reste donc inchangé.

Dans les cas où le loyer (ou la part de loyer) du bénéficiaire de PC n’est pas couvert par le loyer maximal, les règles suivantes s’appliquent :

  • Dans les cas relevant de l’ancien droit, le loyer maximal pour le bénéficiaire de PC ou la famille reste inchangé à 13’200 respectivement 15’000 francs.
  • Dans les cas relevant du nouveau droit, qui sont déjà calculés selon les dispositions de la réforme des PC, la taille du ménage déterminante pour le loyer maximal correspond toujours au nombre de personnes prises en compte dans le calcul PC (cf. n° 3232.07 DPC). En dérogation au n° 3232.08 DPC, pour les personnes qui vivaient seules avant l’arrivée des personnes en provenance d’Ukraine, c’est toujours le loyer maximal pour personnes seules – et non celui pour personnes vivant en colocation – qui est appliqué.

Dans de nombreux cantons, les personnes qui ont fui la guerre en Ukraine reçoivent rapidement un soutien de l’aide sociale ou d’organisations d’aide. Si l’un de ces services prend en charge les frais de logement, le motif valable pour renoncer à un partage du loyer disparaît. Il en va de même lorsque la personne hébergée commence à exercer une activité professionnelle en Suisse et obtient un revenu suffisant pour vivre. Dans tous les autres cas, il faut renoncer au partage du loyer jusqu’à ce que la personne concernée perde son statut de protection S, mais au maximum pour une année.

Les cantons ont la possibilité de soutenir financièrement les personnes et les familles qui accueillent des personnes ayant fui la guerre en Ukraine. Les cas où les bénéficiaires de PC reçoivent de telles prestations d’assistance peuvent être soumis à l’OFAS.

 

 

Bulletin no 451 de l’OFAS du 01.04.2022 consultable ici

Mitteilungen Nr. 451 des BSV, 01.04.2022, «Beherbergung von Personen aus der Ukraine mit Schutzstatus S durch Bezügerinnen und Bezüger von Ergänzungsleistungen »

 

 

9C_455/2021 (f) du 01.12.2021 – Remise de l’obligation de l’assuré de restituer des prestations complémentaires – Négligence grave dans le devoir d’annoncer – Bonne foi niée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_455/2021 (f) du 01.12.2021

 

Consultable ici

 

Remise de l’obligation de l’assuré de restituer des prestations complémentaires / 25 LPGA – 4 OPGA – 5 OPGA

Négligence grave dans le devoir d’annoncer / 31 al. 1 LPGA – 24 OPC-AVS/AI

Bonne foi niée

 

Assuré, titulaire d’une rente AVS, au bénéfice de prestations complémentaires allouées par la Caisse cantonale de compensation (ci-après: la caisse) depuis le 01.02.2008. En raison de la naissance du droit à la rente AVS de l’épouse de l’ayant droit au 01.05.2018, la caisse a procédé à une révision dès avril 2018. Dans ce cadre, elle a appris que les époux avaient emménagé dans un appartement dont leur fils était propriétaire, depuis le 15.05.2014 et avaient mis en location leur propre bien immobilier dès le 01.06.2014. La caisse a dès lors réexaminé le droit de l’assuré aux prestations complémentaires à partir du 01.06.2014 et fixé à nouveau les prestations dès cette date; elle lui a demandé de restituer le montant de 43’878 francs perçu en trop pour la période du 01.06.2014 au 30.04.2018, par décision du 12.10.2018, confirmée sur opposition, laquelle est entrée en force. Le 04.06.2019, l’assuré a requis la remise de l’obligation de restitution. La caisse a rejeté cette demande.

 

Procédure cantonale

Le Tribunal cantonal a constaté pour l’essentiel que depuis 2014, l’assuré n’avait nullement jugé utile de signaler à la caisse qu’il avait déménagé chez son fils dès le 15.05.2014, qu’il percevait des loyers pour la location de son propre logement depuis juin 2014 et que sa belle-fille était ensuite venue vivre dans le logement commun, alors qu’il s’agissait de faits influençant la pondération de la participation au logement et donc les dépenses de l’assuré et de son épouse. Or vu ces importants changements, dont l’importance ne pouvait pas être ignorée de l’assuré, les calculs de prestations complémentaires qui lui avaient été notifiés étaient manifestement erronés. L’assuré avait donc fait preuve de négligence grave en omettant de les communiquer.

Par jugement du 07.07.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Dans le contexte de calculs erronés de prestations complémentaires, la personne assurée ne peut pas se prévaloir de sa bonne foi si elle a omis de contrôler ou a contrôlé de manière peu soigneuse la feuille de calcul et ne constate pas, de ce fait, une erreur facilement décelable (cf. par exemple arrêt 9C_318/2021 du 21 septembre 2021 consid. 3.2 et les arrêts cités). Constitue une question de fait celle de savoir si la personne assurée avait effectivement connaissance de l’erreur. En revanche, l’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (art. 3 al. 2 CC; ATF 122 V 221 consid. 3; arrêt 9C_318/2021 précité consid. 3.3 et les références).

En l’espèce, l’assuré ne pouvait pas ignorer l’influence de sa situation locative sur le calcul des prestations complémentaires, en faisant preuve de l’attention requise de sa part, examinée à l’aune de ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d; SYLVIE PÉTREMAND, Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, ch. 63 ss ad art. 25). En effet, tant la demande initiale qu’il avait remplie que le formulaire qui lui avait été adressé dans le cadre d’une révision périodique en début de l’année 2014 comprenaient une rubrique relative au logement.

Par ailleurs, l’assuré n’a pas non plus réagi pendant plusieurs années consécutives à réception des feuilles de calcul respectives, alors que celles-ci étaient manifestement et de façon reconnaissable fondées sur un état de fait qui ne correspondait plus à la réalité depuis le mois de juin 2014. En particulier, l’assuré aurait, même s’il n’avait qu’une faible connaissance du français et un niveau de formation peu élevé, dû s’apercevoir du fait que les loyers perçus depuis le mois de juin 2014 pour la location de son propre appartement n’y figuraient pas sous la rubrique des revenus. La négligence dont il a fait preuve dans le contrôle des feuilles de calcul ne saurait dès lors être qualifiée de légère. A cet égard, il ne saurait invoquer avec succès « la mauvaise administration de la caisse » parce que celle-ci aurait dû réagir notamment lorsqu’un courrier adressé à l’ancienne adresse le 27.07.2015 lui était revenu avec la mention d’un déménagement. Nonobstant le moment à partir duquel la caisse a eu connaissance du changement d’adresse, cet élément ne libérait pas l’assuré de son obligation d’annoncer les nouveaux revenus résultant de la location de son appartement – soit un changement de sa situation économique – voire de vérifier les feuilles de calcul régulièrement reçues.

En conséquence, la juridiction cantonale n’a pas violé l’art. 25 LPGA en retenant une négligence grave de l’assuré et en confirmant que les conditions d’une remise n’étaient pas réalisées.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_455/2021 consultable ici

 

9C_28/2021 (f) du 04.11.2021 – Droit aux prestations complémentaires à l’AVS / Dessaisissement de fortune – Pas de preuve d’une incapacité de discernement lors du dessaisissement d’éléments de fortune

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_28/2021 (f) du 04.11.2021

 

Consultable ici

 

Droit aux prestations complémentaires à l’AVS

Dessaisissement de fortune / 11 al. 1 let. g LPC – 17a OPC-AVS/AI (dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31.12.2020)

Pas de preuve d’une incapacité de discernement lors du dessaisissement d’éléments de fortune / 16 CC

 

Assuré, né en 1950, a pris sa retraite le 01.03.2012. Cette année-là, la caisse de pensions B.__ lui a versé deux prestations en capital de la prévoyance professionnelle pour un montant total de 517’256 fr.

Le 14.02.2018, l’assuré a déposé une demande de prestations complémentaires à l’AVS. La caisse cantonale de compensation a nié le droit de l’assuré à des prestations complémentaires en raison d’un excédent net de revenus résultant notamment de la prise en compte d’un dessaisissement de fortune de 280’000 fr.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a retenu que l’assuré avait perçu en 2012 des prestations en capital de la prévoyance professionnelle en lien avec son départ à la retraite. Afin d’expliquer la diminution de la fortune importante, l’assuré avait exposé qu’il s’était départi de son capital LPP en réglant diverses dettes et en procédant à d’importantes libéralités en faveur de ses ex-épouses, sans obligation ou contreprestations équivalentes. Pour les juges cantonaux, les explications étaient restées vagues et inconsistantes. On ignorait ainsi tout des dettes prétendument réglées et des donations effectuées en faveur des ex-épouses, le dossier ne contenant aucun élément de preuve à ce sujet.

L’instance cantonale a par ailleurs constaté que l’assuré avait été hospitalisé cinq ans après son départ à la retraite, en septembre 2017. Les médecins de l’Hôpital C.__ avaient établi qu’il souffrait notamment de troubles psychiques chroniques à l’origine d’une désorganisation du comportement avec une négligence de ses affaires et de sa personne ainsi que d’angoisses interpersonnelles invalidantes. Ces renseignements ne permettaient toutefois pas d’établir que l’assuré avait été privé de sa capacité de discernement lorsqu’il avait procédé aux prétendues donations, d’autant moins que le jugement de divorce de juillet 2013 ne mentionnait pas de tels troubles et que l’assuré avait obtenu la garde de son fils alors âgé de 14 ans compte tenu de ses capacités parentales qualifiées d’adéquates. Il n’était donc pas possible de retenir qu’il avait été privé de sa capacité de discernement lorsqu’il s’était dessaisi d’éléments de fortune.

Par jugement du 23.11.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5

L’assuré ne conteste pas les constatations de la juridiction cantonale sur le dessaisissement de fortune de 280’000 fr., en tant que telles, mais celles sur la capacité de discernement dont il disposait au moment où sa fortune a diminué.

La capacité de discernement doit être présumée et celui qui prétend qu’elle fait défaut doit le prouver (cf. art. 16 CC; ATF 124 III 5 consid. 1b; arrêt 5A_914/2019 du 15 avril 2021 consid. 3.2). L’assuré ne démontre toutefois pas en quoi les constatations de fait des juges cantonaux relatives à son état de santé psychique et à sa capacité de discernement en 2012, soit à l’époque du dessaisissement de fortune, seraient inexactes, ni en quoi elles résulteraient d’une violation du principe de l’instruction d’office et de son droit d’être entendu.

En effet, en plus du jugement de divorce de l’assuré rendu en juillet 2013, d’un rapport de l’Hôpital C.__ du 14 mai 2019, l’instance cantonale disposait de la décision de l’Autorité de protection de l’enfant et de l’adulte du 27 mars 2019. Or il ne ressort pas de cette décision que l’assuré avait besoin d’une assistance avant son hospitalisation en septembre 2017, ni d’éléments dont on pourrait inférer l’existence d’une incapacité de discernement antérieurement à 2017. Il en va de même du rapport médical du 14 mai 2019. Les médecins de l’Hôpital C.__, qui ont diagnostiqué notamment des troubles exécutifs précoces au moment de l’hospitalisation de l’assuré en août 2018, ont indiqué que les troubles psychiques et les difficultés d’autonomie du patient étaient plus manifestes depuis sa retraite. Toutefois ces éléments ne suffisent pas à admettre une incapacité de discernement en 2012, ni un état durable d’altération mentale lié à l’âge ou à la maladie, en présence duquel la personne en cause est en principe présumée dépourvue de la capacité d’agir raisonnablement (cf. arrêt 5A_951/2016 du 14 septembre 2017 consid. 3.1.3.1).

En d’autres termes, l’appréciation anticipée des preuves à laquelle a procédé la juridiction cantonale n’était pas arbitraire. Elle a à juste titre qualifié de superfétatoires les mesures probatoires complémentaires portant sur l’état de santé psychique de l’assuré au moment du dessaisissement (interrogatoire des deux médecins de l’Hôpital C.__, de la fille de l’assuré et de lui-même). La « perception directe de l’état mental » de l’assuré par les médecins, dont l’assuré se prévaut ne peut porter que sur « les défaillances observées » à partir de son hospitalisation et non sur la période de plus de cinq ans antérieure, ici déterminante.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_28/2021 consultable ici