Archives de catégorie : Assurance-vieillesse AVS

Télétravail des frontaliers : accord multilatéral en vigueur

Télétravail des frontaliers : accord multilatéral en vigueur

 

Article de Lionel Tauxe du 31.08.2023 paru in Sécurité Sociale CHSS, disponible ici

 

Les frontaliers dont le taux de télétravail est inférieur à 50% resteront désormais affiliés aux assurances sociales suisses. L’accord correspondant, signé par la Suisse et ses voisins membres de l’UE (à l’exception de l’Italie) ainsi que par d’autres États européens, est entré en vigueur le 1er juillet 2023.

 

En un coup d’œil

  • Pendant la pandémie, l’impact du télétravail transfrontalier sur la sécurité sociale avait été neutralisé grâce à une flexibilité provisoire jusqu’au 30 juin 2023.
  • Un brusque retour aux règles habituelles n’aurait pas été dans l’intérêt des travailleurs et de leurs employeurs.
  • Depuis le 1er juillet 2023, un nouvel accord permet d’exercer jusqu’à 50% de télétravail transfrontalier dans certains États sans incidence sur les assurances sociales.

 

Depuis 2002, la Suisse applique les règles européennes de coordination en matière de sécurité sociale auxquelles font référence l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) conclu avec l’Union européenne (UE) et la Convention instituant l’Association Européenne de Libre-Échange (AELE). Elles prévoient que les personnes qui travaillent en Suisse et dans un État de l’UE ou de l’AELE, y compris en télétravail, sont assujetties aux assurances sociales de leur État de résidence lorsqu’elles y exercent au moins 25% de leurs activités. Dans la pratique, étant donné qu’à l’étranger les cotisations sociales sont souvent plus élevées et les procédures moins familières, beaucoup d’employeurs suisses étaient réticents à ce que leurs employés frontaliers travaillent à domicile plus d’un jour par semaine.

Pendant la pandémie, cas de force majeure, l’application de cette règle a été suspendue par tous les États appliquant les dispositions européennes de coordination. Les travailleurs frontaliers sont donc restés assurés en Suisse, peu importe la part d’activité exercée dans leur État de résidence. Plusieurs fois prolongée, cette flexibilité a duré jusqu’à la fin du mois de juin 2023. Un retour abrupt au cadre légal en vigueur n’aurait cependant pas été dans l’intérêt des travailleurs et de leurs employeurs. Dès lors, pendant une dernière phase transitoire débutée à l’été 2022, les États ont réfléchi à la manière dont ce retour pourrait être aménagé. Comme une modification des règles européennes n’était pas réalisable à si court terme, d’autres pistes, innovantes, ont dû être explorées. Mais le temps était compté.

 

Une stratégie suisse à deux niveaux

Dans le cadre de la commission administrative de l’UE pour la coordination des systèmes de sécurité sociale, un groupe d’experts, mis à disposition par vingt États, a été créé à l’automne 2022 pour chercher une solution multilatérale. L’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a activement pris part aux travaux du groupe, qui s’est réuni une trentaine de fois. Ces efforts ont payé puisqu’une proposition a pu être faite aux États en mars 2023.

En outre, dans l’éventualité où une issue adéquate n’aurait pas pu être trouvée à temps au niveau européen, la Suisse avait, comme d’autres États, pris contact avec ses États voisins pour chercher en parallèle des solutions bilatérales subsidiaires.

 

Un accord multilatéral très attendu

L’accord multilatéral prévoit que les personnes travaillant dans un État pour un employeur qui y a son siège peuvent effectuer jusqu’à 50% de télétravail transfrontalier depuis leur État de résidence tout en maintenant la compétence de l’État du siège de l’employeur pour les assurances sociales. Concrètement, les frontaliers qui télétravaillent au maximum à 49,9% de leur temps de travail depuis certains États peuvent rester assurés en Suisse.

La Suisse a signé cet accord multilatéral le 31 mai 2023. Au moment de son entrée en vigueur, le 1er juillet 2023, 18 États de l’UE et de l’AELE l’avaient paraphé, dont tous les États limitrophes à l’exception de l’Italie. Les États non signataires conservent toutefois la possibilité d’y adhérer ultérieurement. Conclu pour cinq ans, l’accord est automatiquement renouvelable pour la même période.

Afin que les employeurs puissent demander l’application de cette flexibilité à un de leurs salariés et la délivrance d’une attestation («document portable A1») par l’État compétent, tant ce dernier que l’État de résidence doivent avoir adhéré au dispositif multilatéral. Les règles ordinaires d’assujettissement continuent à s’appliquer aux travailleurs qui ne sont pas concernés par l’accord, par exemple les indépendants, ou lorsqu’un État non partie comme l’Italie est impliqué. Ainsi les frontaliers en provenance de l’Italie peuvent seulement effectuer jusqu’à 25% de télétravail sans incidence sur les assurances sociales. Aucune dérogation individuelle n’est acceptée par la Suisse dans les situations qui ne sont pas couvertes par l’accord.

Indépendamment de la sécurité sociale, d’autres aspects peuvent cependant limiter le télétravail transfrontalier, tels que la fiscalité ou le droit du travail.

 

Renseignements supplémentaires sur l’accord multilatéral

État dépositaire de l’accord, la Belgique tient à jour la liste des États signataires (avec le texte de l’accord et un mémorandum explicatif en anglais).

Le site internet de l’OFAS fournit des informations détaillées (ainsi que les traductions de l’accord et du mémorandum explicatif dans les langues officielles).

 

 

L’autre défi : la mise en œuvre

L’accord prescrit que l’échange d’information entre organismes des États parties concernant les demandes individuelles doit se faire par voie électronique, au moyen du système EESSI (Electronic Exchange of Social Security Information).

Compte tenu de la volumétrie considérable, il est apparu, dès cet accord finalisé fin mars 2023, que son implémentation en Suisse n’était possible que dans le cadre de la plateforme informatique ALPS (Applicable Legislation Portal Switzerland), reliée à EESSI, que l’OFAS met à disposition des caisses de compensation AVS et des employeurs (voir Numérisation des assurances sociales : l’échange de données au sein de l’Europe passe la vitesse supérieure).

Les équipes en charge du développement de la plateforme ALPS ont dû la mettre à jour, en un court délai, pour qu’elle soit prête au 1er juillet 2023 et permette une large automatisation des processus.

 

Les chiffres du travail transfrontalier en Europe et en Suisse

En 2021, environ 1,7 million de ressortissants de l’UE ou de l’AELE étaient des « travailleurs transfrontaliers » (frontaliers, saisonniers et certains détachés) vivant dans un État de l’UE ou de l’AELE et travaillant dans un autre (y compris en Suisse).

La Suisse était leur deuxième pays de destination (345 000 travailleurs accueillis), derrière l’Allemagne (378 000) et devant le Luxembourg (212 000) ; ces trois pays ayant attiré à eux seuls près de 60% de l’ensemble des travailleurs transfrontaliers (source : European Commission, Annual report on intra-EU labour mobility 2022).

Début 2023, la Suisse accueillait 386 000 travailleurs frontaliers étrangers, dont 218 000 résidaient en France, 91 500 en Italie, 65 000 en Allemagne et 9000 en Autriche (source : OFS).

Fin 2021, près de 14 000 personnes domiciliées en Suisse travaillaient au Liechtenstein (source : Liechtensteinisches Amt für Statistik, Statistisches Jahrbuch Liechtensteins 2023).

 

 

Quelles perspectives ?

L’accord multilatéral constitue une solution pragmatique et transitoire, élaborée sous une intense pression temporelle. Le groupe d’experts s’est focalisé, à dessein, sur le règlement de la constellation la plus fréquente et la moins complexe. Ses travaux ne sont toutefois pas terminés, puisqu’il est prévu qu’il évalue l’impact de l’accord et prépare le terrain pour une modification des règles européennes de coordination.

Les États sont en effet unanimement convaincus qu’il convient que le législateur européen modifie, à plus long terme, les bases légales afin que l’uniformité dans l’application du droit et la légitimité politique soient garanties. Une éventuelle reprise par la Suisse ne serait pas automatique et nécessiterait une modification de l’ALCP respectivement de la Convention AELE.

 

 

Article de Lionel Tauxe du 31.08.2023 paru in Sécurité Sociale CHSS, disponible ici

Articolo non disponibile in italiano

Multilaterale Vereinbarung regelt Homeoffice von Grenzgängern, Artikel von Lionel Tauxe vom 31.08.2023, veröffentlicht in « Soziale Sicherheit CHSS » (hier verfügbar)

 

Les dispositions d’exécution de la réforme AVS 21 entrent en vigueur le 1er janvier 2024

Les dispositions d’exécution de la réforme AVS 21 entrent en vigueur le 1er janvier 2024

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 30.08.2023 consultable ici

 

La mise en œuvre de la réforme AVS 21 nécessite des modifications au niveau réglementaire. Une procédure de consultation a eu lieu à ce sujet. Lors de sa séance du 30 août 2023, le Conseil fédéral a pris connaissance des résultats de la consultation et a adopté la modification du règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants. Cette modification entrera en vigueur le 1er janvier 2024, en même temps que la réforme.

La mise en œuvre de la réforme AVS 21 suppose d’apporter certaines modifications aux dispositions d’exécution qui figurent dans le règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants (RAVS) et dans d’autres actes.

 

Précisions concernant les mesures de compensation

Le RAVS apporte des précisions concernant les mesures de compensation prévues dans la loi en faveur des femmes nées entre 1961 et 1969 (génération transitoire) :

  • Le supplément de rente sera déterminé lorsque l’assurée atteint l’âge de référence et sur la base du revenu annuel moyen perçu jusqu’à cette date. Ce montant fixe sera versé sans changement pendant toute la durée de perception de la rente de vieillesse.
  • Le montant du supplément de rente pour les rentes partielles sera échelonné en fonction du nombre d’années de cotisation. Comme pour la rente de vieillesse, il dépendra de la durée pendant laquelle l’assurée a cotisé.
  • Les taux de réduction applicables aux femmes de la génération transitoire qui anticipent la perception de leur rente seront échelonnés en trois classes de revenus. Le RAVS précise en particulier les taux applicables aux femmes de la génération transitoire qui anticipent par mois la perception de leur rente de vieillesse.

 

Précisions concernant la flexibilisation du passage à la retraite

L’assouplissement des conditions de départ à la retraite implique également d’apporter des précisions tant dans le RAVS que dans de nombreux autres textes, en particulier en ce qui concerne les modalités en cas de modification du pourcentage de rente perçu.

Comme il sera désormais possible d’anticiper la perception de la rente de vieillesse par mois, les taux de réduction doivent être définis pour chaque mois. Leur niveau ne change pas. Comme prévu par le législateur, les taux de réduction ne seront adaptés à l’augmentation de l’espérance de vie qu’en 2027.

Les assurés ne pourront à l’avenir ajourner leur prestation de vieillesse au-delà de l’âge de référence dans le 2e pilier que s’ils continuent d’exercer une activité lucrative. Il en va de même pour l’ajournement du versement de la prestation de libre passage, un point qui a été controversé lors de la consultation. Le Conseil fédéral a décidé de prévoir une période de transition de cinq ans pendant laquelle les assurés pourront ajourner la perception de leurs prestations de vieillesse, même sans poursuivre une activité lucrative.

 

Activité lucrative au-delà de l’âge de référence

Les personnes qui travaillent au-delà de l’âge de référence pourront à l’avenir renoncer à la franchise et demander à verser des cotisations sur l’intégralité de leur revenu professionnel. Les salariés devront communiquer cette décision à leur employeur au plus tard lors du paiement du premier salaire après l’âge de référence. Le choix de verser des cotisations sur l’intégralité du salaire ou d’appliquer la franchise sera automatiquement reconduit les années de cotisation suivantes, sauf si la personne communique une décision contraire lors du paiement du premier salaire de l’année suivante. Les indépendants qui veulent renoncer à la franchise devront en informer la caisse de compensation compétente jusqu’au 31 décembre de l’année de cotisation en cours. Ce choix sera automatiquement reconduit les années de cotisation suivantes, sauf si l’assuré communique à la caisse de compensation avant le 31 décembre de l’année concernée sa volonté d’appliquer la franchise.

Les cotisations AVS versées sur le revenu d’une activité lucrative exercée après l’âge de référence permettront de combler des lacunes de cotisation et d’assurance, mais aussi d’améliorer le revenu annuel moyen déterminant, ce qui pourra entraîner une augmentation du montant de la rente. Les assurés qui souhaitent bénéficier de ces mesures pourront demander, une seule fois, un nouveau calcul de leur rente. Les cotisations sont prises en compte jusqu’à cinq ans après l’âge de référence.

 

 

Stabilisation de l’AVS (AVS 21)

Le 25 septembre 2022, le peuple suisse a accepté la réforme Stabilisation de l’AVS (AVS 21), qui comprend une modification de la loi sur l’assurance-vieillesse et survivants et un arrêté fédéral sur le financement additionnel de l’AVS par le biais d’un relèvement de la TVA. Le 9 décembre 2022, le Conseil fédéral a fixé au 1er janvier 2024 l’entrée en vigueur de la réforme et de l’ordonnance concernant le relèvement des taux de la taxe sur la valeur ajoutée pour le financement additionnel de l’AVS.

La réforme AVS 21 vise à stabiliser l’AVS et à maintenir le niveau des rentes. L’âge de la retraite sera désormais appelé « âge de référence » et fixé à 65 ans pour les femmes comme pour les hommes. L’âge de référence pour les femmes sera donc relevé progressivement de 64 à 65 ans. Ce relèvement s’accompagnera de mesures de compensation : les femmes de la génération transitoire (nées entre 1961 et 1969) bénéficieront de meilleures conditions si elles optent pour une retraite anticipée ou recevront un supplément de rente si elles travaillent jusqu’à 65 ans.

Par ailleurs, la réforme permettra plus de flexibilité : les assurés pourront fixer librement le moment de leur départ à la retraite entre 63 et 70 ans et réduire progressivement leur activité lucrative en percevant une rente partielle. Les personnes qui continueront de travailler après 65 ans pourront, à certaines conditions, combler leurs lacunes de cotisation et d’assurance et ainsi améliorer leur rente, ce qui créera une incitation à travailler plus longtemps.

La hausse de la TVA générera des recettes supplémentaires : le taux réduit passera de 2,5 à 2,6%, le taux spécial, de 3,7 à 3,8%, et le taux normal, de 7,7 à 8,1%.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 30.08.2023 consultable ici

Rapport de l’OFAS du 30.08.2023 sur les résultats de la consultation, Modification du règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants (AVS 21), disponible ici

Modification du RAVS et Rapport explicatif relatif aux modifications d’ordonnances du 30.08.2023 consultable ici

 

Le disposizioni d’esecuzione concernenti la riforma AVS 21 entreranno in vigore il 1° gennaio 2024, Comunicato stampa del 30.08.2023 dell’UFAS disponibile qui

Die Ausführungsbestimmungen zur Reform AHV 21 treten am 1.1.2024 in Kraft, Medienmitteilung vom 30.08.2023 des BSV hier verfügbar

 

Le Conseil fédéral concrétise la révision des rentes de survivants de l’AVS

Le Conseil fédéral concrétise la révision des rentes de survivants de l’AVS

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 28.06.2023 consultable ici

 

Lors de sa séance du 28 juin 2023, le Conseil fédéral a adopté les axes de la réforme du régime des rentes de survivants de l’AVS. Ces mesures visent à rétablir l’égalité de droit entre les veufs et les veuves, à adapter le système aux réalités sociales actuelles et à réaliser des économies pour la Confédération conformément au mandat fixé par le Conseil fédéral. Le Conseil fédéral mettra un projet en consultation à l’automne 2023.

En 2022, un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a constaté une inégalité de traitement entre les femmes et les hommes en matière de rente de survivants. Depuis cet arrêt et dans l’attente d’une adaptation des bases légales, un régime transitoire a été mis en place afin de garantir que la rente de veuf ne s’éteigne plus à la majorité du dernier enfant, conformément à la pratique en vigueur pour les veuves.

Parallèlement, dans le cadre des mesures d’économie pour la Confédération dans les dépenses liées, le Conseil fédéral a pris en février et mars 2023 des décisions de principe concernant les rentes de survivants. Il a ainsi chargé le Département fédéral de l’intérieur d’examiner la possibilité de limiter les conditions d’octroi de ces rentes et d’analyser les rentes pour enfants de l’AVS afin d’atteindre une économie de 100 millions de francs pour la Confédération. Hormis les objectifs d’économie, la révision des bases légales a également pour objectifs l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de prestations de survivants et l’adaptation de l’octroi des prestations à l’évolution de la société.

 

Principaux axes de la révision

Dans ce contexte, la révision des rentes de survivants prévoit les mesures suivantes:

  • Droit axé sur la période éducative et d’assistance de l’enfant: les rentes de veuf et de veuve seraient octroyées aux parents jusqu’aux 25 ans de leurs enfants, voire au-delà pour un enfant adulte en situation de handicap donnant droit au parent à des bonifications pour tâches d’assistance à ce titre, y compris pour les parents non mariés;
  • Rente durant deux ans pour les veufs et les veuves sans enfants à charge: les veufs et veuves mariés ou divorcés n’ayant plus d’enfants à charge auraient droit à une rente de survivants durant deux ans et plus à une rente à vie pour leur permettre de s’adapter à la nouvelle situation, à condition qu’il existe une obligation d’entretien du défunt; cette rente serait octroyée uniquement aux personnes ayant eu des enfants;
  • Suppression des rentes de veuf et de veuve aux moins de 55 ans: les rentes de veuf et de veuve âgés de moins de 55 ans et sans enfants à charge seraient supprimées dans un délai de deux ans (disposition transitoire). Les bénéficiaires de rentes de veuve ou de veuf plus âgés bénéficient d’une garantie des droits acquis;
  • Maintien des rentes de veuf et de veuve pour les rentiers actuels de 50 ans et plus qui perçoivent des prestations complémentaires à l’AVS ;
  • Mesure en faveur des veufs et des veuves âgés: les veuves et les veufs âgés de 58 ans et plus au moment du décès, mariés ou divorcés pour autant qu’il existe une obligation d’entretien du défunt et sans enfants à charge, pourraient recevoir des prestations complémentaires si le décès mène à la précarité.

 

Rentes pour enfants de l’AVS

Le projet de révision a également analysé les rentes pour enfant de l’AVS afin de réduire les dépenses liées de la Confédération. Deux options ont été analysées pour répondre aux objectifs d’économie de la Confédération. Le Conseil fédéral arrive à la conclusion que tant une suppression des rentes pour enfant de l’AVS qu’une réduction de celles-ci ne se justifient pas. Elles auraient un impact trop important sur la situation économique des retraités ayant des charges familiales alors que les économies réalisées par ce biais ne seraient pas significatives.

Le projet de révision du Conseil fédéral permet de corriger l’inégalité de traitement entre hommes et femmes et de le faire de manière socialement supportable pour les personnes concernées. En 2035, lorsque le nouveau régime déploierait pleinement ses effets, des économies d’environ 810 millions de francs dans l’AVS et d’environ 160 millions de francs pour la Confédération pourraient être atteintes.

 

Mes remarques :

Selon le droit actuel, les prestations en faveur des survivants sont les suivantes :

Les femmes mariées dont le conjoint est décédé ont droit à une rente de veuve :

  • lorsqu’elles ont un ou plusieurs enfants au moment du veuvage ou
  • lorsqu’elles n’ont pas d’enfant mais qu’elles ont 45 ans révolus et sont mariées depuis au moins cinq ans au moment du décès de leur conjoint. Pour les veuves qui ont été mariées plus d’une fois, la durée des différents mariages est additionnée.

Les femmes divorcées dont l’ex-conjoint est décédé peuvent prétendre à une rente de veuve :

  • lorsqu’elles ont des enfants et que le mariage a duré au moins 10 ans ou
  • lorsqu’elles avaient plus de 45 ans au moment du divorce et que le mariage a duré au minimum 10 ans, ou encore
  • lorsqu’elles ont 45 ans révolus lorsque l’enfant cadet atteint l’âge de 18 ans.

Les femmes divorcées qui ne remplissent aucune de ces conditions ont droit à une rente de veuve aussi longtemps qu’elles ont des enfants de moins de 18 ans.

Les hommes mariés et divorcés dont la conjointe, ou l’ex-conjointe, est décédée ont droit à une rente de veuf tant et aussi longtemps qu’ils ont des enfants de moins de 18 ans. Le droit à la rente de veuf prend fin dès que l’enfant cadet atteint l’âge de 18 ans. Le régime transitoire en vigueur depuis le 11 octobre 2022 s’applique aux veufs avec enfants : leur droit à une rente de veuf ne s’éteint plus lorsque le cadet de leurs enfants atteint l’âge de 18 ans, et la rente continue d’être versée au-delà de cet âge.

Les hommes divorcés ont droit à une rente de veuf aussi longtemps qu’elles ont des enfants de moins de 18 ans.

L’AVS prévoit le versement d’une rente d’orphelin en cas de décès de la mère ou du père. Lorsque les deux parents décèdent, les enfants ont droit à deux rentes d’orphelins.

Le droit à la rente d’orphelin s’éteint au 18e anniversaire de l’enfant bénéficiaire ou au terme de sa formation, mais au plus tard lorsqu’il a 25 ans révolus.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 28.06.2023 consultable ici

 

Il Consiglio federale concretizza la revisione delle rendite per superstiti dell’AVS, Comunicato stampa UFAS, 28.06.2023

Bundesrat konkretisiert Revision der AHV-Hinterlassenenrenten, Medienmitteilung BSV, 28.06.2023

 

Reconnaître les logements protégés dans les prestations complémentaires à l’AVS

Reconnaître les logements protégés dans les prestations complémentaires à l’AVS

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 21.06.2023 consultable ici

 

Le Conseil fédéral souhaite mieux soutenir l’autonomie des personnes âgées et encourager leur maintien à domicile. Il propose d’accorder aux bénéficiaires de prestations complémentaires à la rente de vieillesse des prestations d’assistance qui devraient être remboursées dans le cadre des frais de maladie et d’invalidité. Lors de sa séance du 21 juin 2023, le Conseil fédéral a mis en consultation, jusqu’au 23 octobre 2023, une modification de la loi sur les prestations complémentaires en ce sens.

Environ un tiers des personnes vivant dans un établissement médico-social (EMS) nécessite moins d’une heure de soins par jour. L’entrée en EMS pourrait être retardée, voire évitée, si ces personnes avaient la possibilité d’habiter un logement adapté aux personnes âgées ou de bénéficier de prestations d’assistance à domicile. D’ici à 2040, l’effectif des personnes de plus de 65 ans devrait augmenter de moitié et celui des personnes de 80 ans et plus devrait presque doubler. Cette croissance rapide représente un défi pour la prise en charge et les soins à apporter aux personnes âgées. Celles-ci souhaitent rester autonomes aussi longtemps que possible, et le soutien dont elles ont besoin n’est pas uniquement lié à la santé. Des prestations d’assistance telles qu’une aide au ménage, aux courses, à la livraison des repas ou un environnement sûr pour éviter les chutes leur donneraient la possibilité de vivre plus longtemps de manière autonome.

Pour cette raison, le Conseil fédéral entend modifier la loi sur les prestations complémentaires (LPC). Cette modification répond à la motion de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (18.3716) «Prestations complémentaires pour les personnes âgées en logement protégé» et se fonde sur les résultats d’une étude mandatée par l’Office fédéral des assurances sociales. Le projet prévoit de rembourser des prestations d’assistance devant favoriser l’autonomie des personnes âgées à leur domicile ou dans une forme institutionnalisée de logement protégé. Les prestations suivantes doivent être prises en compte par les PC dans le cadre du remboursement des frais de maladie et d’invalidité :

  • système d’appel d’urgence ;
  • aide au ménage ;
  • service de repas ;
  • service de transport et d’accompagnement ;
  • adaptation du logement aux besoins des personnes âgées, et
  • supplément pour la location d’un logement adapté aux personnes âgées.

Le Conseil fédéral saisit en outre l’occasion de ce projet pour améliorer deux situations particulières de bénéficiaires de prestations complémentaires : d’une part, les personnes bénéficiant d’une contribution d’assistance auront droit à un supplément pour la location d’une chambre en plus, destinée à une personne qui les assiste de nuit. D’autre part, le supplément pour la location d’un appartement permettant la circulation d’une chaise roulante sera réparti différemment entre les membres du ménage : jusqu’ici, ce montant était divisé entre toutes les personnes habitant un même logement, ce qui pénalisait les personnes en chaise roulante vivant en communauté d’habitation. Désormais, ce montant ne sera pris en compte que dans le calcul de la personne en chaise roulante. Par contre, si plusieurs personnes en chaise roulante vivent ensemble, un seul supplément est accordé par logement.

 

Coûts pour les cantons

Les coûts liés aux prestations complémentaires sont financés à hauteur de 5/8 par la Confédération et 3/8 par les cantons. À l’inverse, le remboursement des frais de maladie et d’invalidité est financé uniquement par les cantons. Comme les prestations d’assistance sont remboursées dans ce cadre, les coûts pour les cantons sont estimés entre au moins 227 et au plus 476 millions de francs en 2030. Dans le même temps, le report des entrées en EMS entraînera pour les cantons des économies estimées à 279 millions de francs la même année.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 21.06.2023 consultable ici

Rapport explicatif, Reconnaissance des logements protégés pour les bénéficiaires de PC à l’AVS, juin 2023, disponible ici

Projet mis en en consultation consultable ici

 

Riconoscere le forme di alloggio con assistenza nell’ambito delle prestazioni complementari all’AVS, comunicato stampa del 21.06.2023, UFAS, disponibile qui

Anerkennung des betreuten Wohnens in den EL zur AHV, Medienmitteilung vom 21.06.2023, BSV, hier verfügbar

 

9C_226/2022 (f) du 02.05.2023 – Moyens auxiliaires d’un bénéficiaire de rente de vieillesse / Maintien des droits acquis lors de l’accession à l’âge de la retraite – 4 OMAV / Prothèse de type C-Leg

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_226/2022 (f) du 02.05.2023

 

Consultable ici

 

Moyens auxiliaires d’un bénéficiaire de rente de vieillesse / OMAV

Maintien des droits acquis lors de l’accession à l’âge de la retraite / 4 OMAV

Prothèse de type C-Leg

 

Assuré a été amputé de sa jambe droite à la suite d’un accident survenu le 08.07.1981. Il a bénéficié de la prise en charge des frais d’entretien et de renouvellement de la prothèse standard qui lui avait été remise à titre de moyen auxiliaire de l’assurance-invalidité. Dans le cadre d’une précédente procédure, le tribunal cantonal a confirmé le refus de l’office AI de remettre à l’assuré une prothèse équipée d’un genou articulé contrôlé par microprocesseur de type C-Leg. L’administration a par la suite pris en charge les frais d’acquisition d’un nouveau genre de prothèse mécanique avec un pied Echelon.

Le 06.04.2020, l’intéressé a présenté une nouvelle demande de moyen auxiliaire, sous forme de prothèse de type C-Leg, au motif que celle-ci était nécessaire à l’exercice de l’activité poursuivie après l’âge de la retraite. Entre autres mesures d’instruction, l’office AI a confié une expertise à la Fédération suisse de consultation en moyens auxiliaires (FSCMA). Considérant que seule la prothèse accordée avant l’âge de la retraite pouvait être maintenue à titre de moyen auxiliaire de l’assurance-vieillesse et survivants, la caisse de compensation (ci-après: la caisse) a rejeté la demande (décision du 21.12.2020, confirmée sur opposition le 02.06.2021).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 15.03.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5.2.1
L’assuré fait grief à la juridiction cantonale d’avoir nié son droit à la remise d’une prothèse de type C-Leg au motif que les prothèses de jambe ne figuraient pas dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV. Il rappelle que l’art. 43quater LAVS vise à permettre aux rentiers AVS d’obtenir des moyens auxiliaires nécessaires à l’exercice d’une activité lucrative ou à la réalisation de leurs travaux habituels (al. 2). Il soutient en substance que la liste évoquée – qui avait été édictée sur la base des délégations de compétence au Conseil fédéral (art. 43quater al. 1 LAVS) et au Département fédéral de l’intérieur (art. 66ter al. 1 RAVS) – est à ce point restrictive qu’elle irait contre la volonté du législateur en ne déterminant pas de manière adéquate les moyens auxiliaires qui peuvent être remis aux rentiers AVS, ce qui aurait pour conséquence de les priver des droits ou garanties que la loi entendait leur octroyer.

Consid. 5.2.2
Cette argumentation est infondée. Contrairement à ce que veut faire accroire l’assuré, les juges cantonaux n’ont pas nié son droit à la remise d’une prothèse de jambe de type C-Leg au seul motif que la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV ne mentionnait pas ce genre de moyen auxiliaire. S’ils ont certes expressément relevé ce point, ils ont toutefois considéré que, compte tenu de l’âge de l’assuré lors du dépôt de sa dernière demande, seules les dispositions de la LAVS pouvaient trouver application en l’espèce (à l’exclusion de celles de la LAI). C’est pourquoi, dès lors que les prothèses de jambe ne figuraient pas dans la liste de l’annexe à l’OMAV, ce qui excluait la remise automatique de toute prothèse, ils ont examiné s’ils pouvaient faire droit aux prétentions de l’assuré sous l’angle du maintien des droits que celui-ci avait acquis sous le régime de la LAI prévu à l’art. 4 OMAV. Ils sont parvenus à la conclusion que l’assuré ne pouvait prétendre l’octroi d’une prothèse plus perfectionnée que celle obtenue sous le régime de la LAI. Puisque l’assuré ne s’est nullement vu refuser l’octroi d’une prothèse de jambe en raison de l’absence d’un tel moyen dans la liste de l’annexe à l’OMAV et qu’il ne se retrouve pas dans la situation où, ayant atteint l’âge de la retraite, il est pour la première fois confronté à la nécessité de porter une prothèse de jambe, mais qu’il bénéficie d’une telle prothèse depuis 1981, il n’a pas d’intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral détermine de manière générale si l’absence de mention du moyen auxiliaire en question dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV est contraire ou non à la volonté du législateur. 

 

Consid. 5.3.2
Contrairement à ce que veut faire accroire l’assuré une fois encore, le tribunal cantonal n’a pas nié son droit à une prothèse de jambe à cause du fait qu’il avait atteint l’âge de l’AVS et que la liste de l’annexe à l’OMAV ne prévoyait pas la remise d’un tel moyen. Il a concrètement considéré que l’assuré avait toujours droit à une prothèse mais qu’il ne pouvait prétendre un moyen auxiliaire plus perfectionné que celui qui lui avait été accordé depuis 1981, sous peine d’étendre la garantie des droits acquis d’une manière contraire au sens et au but de la loi. On précisera que le droit à l’octroi d’une prothèse de type C-Leg avait déjà été nié au motif que ce moyen auxiliaire ne pouvait pas être considéré comme simple, adéquat et économique dans la situation de l’assuré. Dans ces circonstances, il n’y a pas de discrimination en raison de l’âge dès lors que l’assuré a bénéficié et continue de bénéficier depuis 1981 d’un modèle de moyen auxiliaire jugé simple et adéquat pour atteindre les buts fixés par la loi. Par ailleurs, dans la mesure où l’assuré ne se retrouve pas dans la situation où il est pour la première fois confronté à la nécessité de porter une prothèse de jambe, il n’a pas d’intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral détermine de manière générale si l’absence de mention du moyen auxiliaire en question dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV discrimine les bénéficiaires de rentes AVS par rapport aux bénéficiaires de rentes AI.

 

Consid. 5.4.2
L’analogie entre semelles ou chaussures orthopédiques et prothèses mécaniques ou électroniques effectuée par le tribunal cantonal n’est pas pertinente. Les deux premiers moyens auxiliaires évoqués sont en effet clairement différenciés dans l’annexe de l’ordonnance du Département fédéral de l’intérieur concernant la remise des moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité (OMAI), tandis que les deux seconds y sont désignés par le terme générique de prothèse fonctionnelle définitive pour les jambes. Une prothèse C-Leg ne saurait donc être considérée comme un moyen auxiliaire d’un genre différent d’une prothèse mécanique. Le Tribunal fédéral n’a d’ailleurs jamais nié le droit d’un assuré au motif qu’une prothèse électronique constituerait un moyen auxiliaire « luxueux » n’entrant – par principe – pas en compte dans une liste des moyens auxiliaires susceptibles d’être accordés. Au contraire, il s’est généralement attaché à examiner le caractère simple, adéquat et économique d’une telle prothèse dans les cas particuliers qui lui étaient soumis (à cet égard, cf. p. ex. ATF 143 V 190 consid. 7.3.2; 141 V 30 consid. 3.2.3; 132 V 215; voir aussi arrêts 8C_279/2014 du 10 juillet 2015 in: SVR 2016 UV n° 3 p. 5; I 502/05 du 9 juin 2006 in: SVR 2006 IV n° 53 p. 201). Cela n’est cependant d’aucune utilité à l’assuré dans la mesure où son droit à la prothèse en question doit être examiné à l’aune des droits acquis garantis par l’art. 4 OMAV.

Consid. 5.4.3
Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la portée de l’art. 4 OMAV. Il a considéré que les organes chargés de l’application de la LAVS étaient tenus de fournir seulement les moyens auxiliaires que les organes chargés de l’application de la LAI avaient accordés auparavant et qui n’étaient pas cités dans la liste de l’annexe à l’OMAV. Il a plus particulièrement indiqué que le but de l’art. 4 OMAV était de maintenir les droits acquis avant l’âge de retraite, mais pas de conférer à l’assuré un droit à l’octroi d’un moyen auxiliaire s’adaptant à l’atteinte à la santé. Il a précisé qu’admettre que la garantie des droit acquis inclue des prestations dont l’assuré n’aurait besoin qu’en raison d’une détérioration de sa situation médicale une fois atteint l’âge de la retraite outrepasserait le sens de l’art. 4 OMAV (arrêts 9C_598/2016 du 11 avril 2017 consid. 3.1; 9C_317/2009 du 19 avril 2010 consid. 4 et les références). Or, en suggérant que la prothèse mécanique qui lui avait été accordée peu avant son accession à l’âge de la retraite était devenue inadaptée et que la remise d’une prothèse C-Leg répondrait à des besoins impérieux, l’assuré tente de justifier ses nouvelles prétentions par l’évolution de son état de santé. Même si la juridiction cantonale a admis que les propriétés des exoprothèses contrôlées par microprocesseur amélioreraient le quotidien de l’assuré, elle pouvait donc légitimement nier son droit à l’octroi d’un tel moyen auxiliaire en application de la garantie des droits acquis de l’art. 4 OMAV.

On précisera encore que, comme le souligne l’assuré, le Tribunal fédéral a certes admis que le moyen auxiliaire remis sur la base de la garantie des droits acquis pouvait parfois être d’une meilleure qualité que celui accordé sous le régime de la LAI (arrêts 9C_598/2016 du 11 avril 2017 consid. 3.1; 9C_474/2012 du 6 mai 2013 consid. 3 et les références). L’octroi d’un tel moyen a toutefois toujours été justifié par des motifs techniques foncièrement indépendants de la seule qualité intrinsèque du moyen en question. Ainsi, par exemple, dans l’ATF 106 V 10, la remise d’un appareil binaural à un assuré ayant bénéficié d’un appareil monaural était motivée par le fait qu’il s’agissait d’un appareil simple, adéquat, du même genre que celui accordé précédemment et qui, étant donné l’évolution technologique, ne représentait désormais plus une mesure luxueuse mais simplement appropriée (consid. 2 in fine). Dans l’arrêt 9C_474/2012 du 6 mai 2013, la prise en charge d’un siège élévateur à l’occasion du remplacement d’un fauteuil roulant par un nouveau modèle plus perfectionné était motivée par le fait que sa conception ne permettait plus de réaliser tous les actes autorisés par l’ancien (consid. 3.4). Dans l’arrêt 9C_598/2016 du 11 avril 2017, le remplacement d’un appareil auditif par un modèle plus coûteux était motivé par le fait que les modifications ne pouvaient être distinguées conceptuellement de la prestation allouée jusqu’alors dans la mesure où il s’agissait du même moyen auxiliaire (consid. 4). Le fait qu’une prothèse de type C-Leg soit d’une meilleure qualité qu’une prothèse mécanique ne suffit dès lors pas en soi à justifier sa remise.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_226/2022 consultable ici

 

8C_409/2022 (f) du 03.05.2023 – Statut de travailleur dépendant vs d’indépendant pour une personne assurée exerçant plusieurs activités lucratives en même temps / 1a al. 1 LAA – 1 OLAA – 5 al. 2 LAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_409/2022 (f) du 03.05.2023

 

Consultable ici

 

Statut de travailleur dépendant vs d’indépendant pour une personne assurée exerçant plusieurs activités lucratives en même temps / 1a al. 1 LAA – 1 OLAA – 5 al. 2 LAVS

Risque économique d’entrepreneur

 

B.A.__ (ci-après : le père), architecte au bénéfice d’un statut d’indépendant dès octobre 2016, est le père de A.A.__ (ci-après : le fils), né en 1988, qui exerce la profession de dessinateur en bâtiments. Père et fils collaborent dans le cadre de mandats confiés par le premier nommé.

Le fils a demandé une affiliation à l’assurance-accidents en tant qu’indépendant dès le 01.01.2017. Par courrier du 13.06.2018, puis par décision de constatation du 17.06.2019 confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a retenu un double statut du fils dès le 01.01.2017: celui d’indépendant à titre principal dans le cadre de ses mandats privés, et de salarié s’agissant de l’activité déployée dans le cadre des mandats confiés par son père.

Par décision du 21.08.2019, confirmée sur opposition le 06.01.2020 également, le père s’est vu imputer le statut d’employeur de son fils, respectivement le statut de salarié de ce dernier.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 14&15/20 – 53/2022 – consultable ici)

Par jugement du 09.05.2022, admission des recours du père et du fils par le tribunal cantonal, réformant en ce sens que le fils remplissait, au sens de la LAA, les critères pour se voir reconnaître l’exercice d’une activité indépendante dans le cadre des mandats qui lui étaient confiés par son père.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 1a al. 1 let. a LAA, sont assurés à titre obligatoire conformément à la présente loi les travailleurs occupés en Suisse. Aux termes de l’art. 1 OLAA, est réputé travailleur quiconque exerce une activité lucrative dépendante au sens de la législation fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants. Conformément à l’art. 5 al. 2 LAVS, on considère comme salaire déterminant toute rétribution pour un travail dépendant effectué dans un temps déterminé ou indéterminé. Quant au revenu provenant d’une activité indépendante, il comprend tout revenu du travail autre que la rémunération pour un travail accompli dans une situation dépendante (art. 9 al. 1 LAVS).

Consid. 3.2
Le point de savoir si l’on a affaire, dans un cas donné, à une activité indépendante ou salariée ne doit pas être tranché d’après la nature juridique du rapport contractuel entre les partenaires. Ce qui est déterminant, bien plutôt, ce sont les circonstances économiques (ATF 144 V 111 consid. 4.2; 140 V 241 consid. 4.2). D’une manière générale, est réputé salarié celui qui dépend d’un employeur quant à l’organisation du travail et du point de vue de l’économie de l’entreprise, et ne supporte pas le risque encouru par l’entrepreneur (ATF 123 V 161 consid. 1; arrêt 9C_70/2022 du 16 février 2023 consid. 6.2, destiné à la publication; arrêts 9C_423/2021 du 1er avril 2022 consid. 6.1; 8C_38/2019 du 12 août 2020 consid. 3.2). Ces principes ne conduisent cependant pas, à eux seuls, à des solutions uniformes applicables schématiquement. Les manifestations de la vie économique revêtent en effet des formes si diverses qu’il faut décider dans chaque cas particulier si l’on est en présence d’une activité dépendante ou d’une activité indépendante en considérant toutes les circonstances de ce cas. Souvent, on trouvera des caractéristiques appartenant à ces deux genres d’activité; pour trancher la question, on se demandera quels éléments sont prédominants dans le cas considéré (ATF 140 V 108 consid. 6; 123 V 161 consid. 1; arrêt 8C_398/2022 du 2 novembre 2022 consid. 3.2 et les références).

Consid. 3.3
Les principaux éléments qui permettent de déterminer le lien de dépendance quant à l’organisation du travail et du point de vue de l’économie de l’entreprise sont le droit de l’employeur de donner des instructions, le rapport de subordination du travailleur à l’égard de celui-ci, ainsi que l’obligation de l’employé d’exécuter personnellement la tâche qui lui est confiée. Un autre élément est le fait qu’il s’agit d’une collaboration régulière, autrement dit que l’employé est régulièrement tenu de fournir ses prestations au même employeur. En outre, la possibilité pour le travailleur d’organiser son horaire de travail ne signifie pas nécessairement qu’il s’agit d’une activité indépendante (ATF 122 V 169 consid. 6a/cc; arrêts 8C_398/2022 précité consid. 3.3; 8C_38/2019 précité consid. 3.2; 9C_213/2016 du 17 octobre 2016 consid. 3.3 et les références).

Consid. 3.4
Le risque économique d’entrepreneur peut être défini comme étant celui que court la personne qui doit compter, en raison d’évaluations ou de comportements professionnels inadéquats, avec des pertes de la substance économique de l’entreprise. Constituent notamment des indices révélant l’existence d’un tel risque le fait que la personne concernée opère des investissements importants, subit les pertes, supporte le risque d’encaissement et de ducroire, assume les frais généraux, agit en son propre nom et pour son propre compte, se procure elle-même les mandats, occupe du personnel et utilise ses propres locaux commerciaux. Le risque économique de l’entrepreneur n’est cependant pas à lui seul déterminant pour juger du caractère dépendant ou indépendant d’une activité. La nature et l’étendue de la dépendance économique et organisationnelle à l’égard du mandant ou de l’employeur peuvent singulièrement parler en faveur d’une activité dépendante dans les situations dans lesquelles l’activité en question n’exige pas, de par sa nature, des investissements importants ou de faire appel à du personnel. En pareilles circonstances, il convient d’accorder moins d’importance au critère du risque économique de l’entrepreneur et davantage à celui de l’indépendance économique et organisationnelle (arrêts 8C_398/2022 précité consid. 3.4; 9C_213/2016 précité consid. 3.4 et les références).

Consid. 3.5
Si une personne assurée exerce plusieurs activités lucratives en même temps, la qualification du statut ne doit pas être opérée dans une appréciation globale. Il sied alors d’examiner pour chaque revenu séparément s’il provient d’une activité dépendante ou indépendante (ATF 144 V 111 consid. 6.1; 123 V 161 consid. 4a; 122 V 169 consid. 3b; arrêt 8C_804/2019 du 27 juillet 2020 consid. 3.2).

 

Consid. 5.2.1
Ainsi, concernant le matériel et les locaux nécessaires à travailler en indépendance énumérés par la cour cantonale, l’assurance-accidents mentionne que le fils ne disposait pas de cette infrastructure dès le début de son activité au 01.01.2017 et qu’il n’a effectué la majorité de ces investissements que vers la fin de la période litigieuse. En effet, en janvier 2017, le fils ne disposait que d’un ordinateur et d’un abonnement à un logiciel de conception, selon ses propres déclarations, et il n’a effectué les autres investissements que vers la fin de la période litigieuse. Ainsi, selon l’avenant au contrat de bail à loyer figurant au dossier, il ne louait un local que depuis le 01.09.2019. De même, ce n’est qu’à compter du 01.11.2019 qu’il a conclu un contrat en vue de bénéficier d’un site internet (nom de domaine) et d’une adresse e-mail professionnelle. En plus, il n’a acquis l’imprimante que le 02.12.2019, soit quelques semaines avant la fin de la période litigieuse. En outre, la somme totale des investissements opérés par le fils, surtout au début de son activité, était manifestement très modeste, consistant en un ordinateur d’une valeur d’environ 1’000 fr. et un logiciel de 400 fr. Par ailleurs, dans le cadre du questionnaire d’affiliation à la caisse cantonale vaudoise de compensation AVS pour les personnes de condition indépendante du 2 janvier 2018, le fils a indiqué qu’il exerçait son activité dans les locaux de ses mandants, lesquels étaient mis à sa disposition gratuitement. En somme, il ne disposait ni du matériel nécessaire, ni d’un site internet ou de locaux propres durant la majeure partie de la période considérée. Même si l’on admettait, à l’instar de la cour cantonale, une certaine marge de temps pour la mise en œuvre de l’activité indépendante (ce que l’assurance-accidents conteste), une telle marge ne saurait atteindre près de trois ans. La cour cantonale n’ayant pas pris en considération ces éléments, son appréciation de l’infrastructure à disposition du fils ne convainc pas.

Consid. 5.2.2
L’assurance-accidents soutient en plus que les professions auxquelles la cour cantonale apparente l’activité du fils (comme avocats, médecins, etc.) ne sauraient être considérées en soi comme indépendantes. En effet, la qualification d’une telle activité doit également être examinée au vu de toutes les circonstances économiques du cas d’espèce (ce qui vaut par ailleurs également pour les tâcherons que mentionne l’assurance-accidents: cf. ATF 101 V 87 consid. 2; arrêt 8C_597/2011 du 10 mai 2012 consid. 2.3).

Consid. 5.2.3
En ce qui concerne la constatation de la cour cantonale que le fils exerçait sous sa propre responsabilité, il sied de retenir, avec l’assurance-accidents, que cela était certes exact pour les travaux effectués pour quelques clients finaux auxquels il facturait directement ses prestations. Toutefois, s’agissant de l’activité déployée en faveur du père, seule déterminante en l’espèce, la situation était différente: Dans cette constellation, le fils travaillait uniquement pour le père – et non pour les clients finaux à l’égard desquels il n’avait aucune obligation juridique. Il ressort des factures présentes au dossier que, dans le cadre de ces mandats, il facturait toujours ses prestations au père et jamais aux clients finaux et qu’il n’a jamais facturé de frais pour l’impression de plans auprès d’imprimeurs, mais se limitait à rapporter ses heures de travail, exactement comme le font les travailleurs rémunérés à l’heure. Pour son travail confié par le père, le seul risque qu’il encourait était donc celui d’un salarié dont l’employeur ne s’acquitte pas du salaire pour un travail accompli. Dans le questionnaire du 30.04.2018, le fils a en outre indiqué que les « plans fournis doivent être en règle, bien que la responsabilité finale repose sur les architectes avec qui je travaille ». Force est de constater que la cour cantonale n’a pas non plus discuté ces éléments dans son appréciation de la responsabilité du fils. En ce qui concerne la conclusion d’un contrat d’assurance RC, l’assurance-accidents souligne à juste titre que c’est cohérent dès lors que le fils avait un statut mixte et qu’il exerçait en qualité d’indépendant pour certains clients envers lesquels il était responsable, tandis qu’il n’avait aucun lien avec les clients du père. Les conclusions de la cour cantonale concernant sa responsabilité à l’égard des clients du père ne sauraient ainsi être confirmées.

Consid. 5.2.4
Ni l’assurance-accidents ni la cour cantonale n’ont considéré comme déterminant le lien de filiation entre père et fils. Est en revanche pertinent le lien de dépendance économique de celui-ci à l’égard de celui-là. En effet, il ressort de l’analyse des factures que le fils a tiré 64% de ses revenus du travail confié par le père en 2017, 90% en 2018 et 34% en 2019. La cour cantonale ne s’est pas non plus prononcée sur ce fait, qui est pourtant décisif dès lors qu’il établit la régularité et l’importance des relations de travail entre les intimés, respectivement la dépendance économique du fils à l’égard du père.

Consid. 5.2.5
Enfin, la cour cantonale n’a pas non plus tenu compte du fait que, selon les renseignements donnés par le fils lui-même, il était tenu à une exécution personnelle du travail qui lui était confié – ce qui est caractéristique d’un contrat de travail – et qu’il ne sollicitait pas régulièrement de travaux au moyen d’annonces, de prospectus, d’un site web propre ou par tout autre biais. Or ces éléments plaident également en faveur du caractère dépendant de l’activité déployée par le fils pour le compte du père.

Consid. 5.3
En résumé, dans son appréciation, la cour cantonale n’a ni discuté ni pris en considération les nombreux éléments (ressortant des décisions sur opposition, du dossier et des mémoires de l’assurance-accidents dans la procédure cantonale) en faveur d’une activité dépendante: l’absence de matériel et de locaux propres durant l’essentiel de la période, l’absence d’investissements importants, surtout au début de la période litigieuse, l’absence de responsabilité personnelle du fils envers les clients finaux dans le cadre des mandats confiés par le père, la régularité de la relation de travail entre les parties intimées, la dépendance économique importante du fils, l’obligation d’exécution personnelle du travail et l’absence de recherche active de nouveaux mandats. Or, dans leur ensemble, ces éléments l’emportent sur les éléments qui iraient dans le sens de l’indépendance du fils envers le père. Ainsi, force est de constater que dans le cadre des mandats que lui avait confiés le père, le fils devait être qualifié de dépendant. Il en résulte que l’appréciation juridique effectuée par la cour cantonale se révèle insoutenable et contraire au droit fédéral, ce qui mène à l’admission du recours.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, annule le jugement cantonal et confirme les décisions sur opposition.

 

Arrêt 8C_409/2022 consultable ici

 

Nouvel accord à partir du 1er juillet 2023 : pas de changement de compétence en matière d’assurances sociales lors de télétravail inférieur à 50% dans certains Etats

Nouvel accord à partir du 1er juillet 2023 : pas de changement de compétence en matière d’assurances sociales lors de télétravail inférieur à 50% dans certains Etats

 

Communication de l’OFAS consultable ici (dernière modification le 15.05.2023)

 

En raison des restrictions imposées en lien avec la pandémie, l’application flexible des règles européennes d’assujettissement en matière de sécurité sociale prévues dans le cadre de l’Accord sur la libre circulation des personnes Suisse-UE (ALCP) et de la Convention AELE s’est appliquée jusqu’au 30 juin 2022. Cette flexibilité a été prolongée pendant une phase transitoire jusqu’au 30 juin 2023.

Jusqu’à cette date, une personne (par exemple un travailleur frontalier exerçant son activité à domicile) reste soumise à la législation suisse de sécurité sociale quelle que soit la part d’activité exercée sous forme de télétravail dans son Etat de résidence (UE/AELE). Une attestation A1 n’est en principe pas nécessaire dans de telles situations.

 

Pas de changement de compétence en cas de télétravail inférieur à 50% dès le 1er juillet 2023 en relation avec les Etats ayant signé l’accord multilatéral

La Suisse et certains Etats de l’UE et de l’AELE vont signer un accord multilatéral qui déroge aux règles d’assujettissement ordinaires pour faciliter le télétravail au-delà du 30 juin 2023, dans l’intérêt des travailleurs concernés et de leurs employeurs.

Cet accord prévoit que les personnes travaillant dans un Etat pour un employeur qui y a son siège peuvent effectuer jusqu’à 50% de télétravail transfrontalier (au maximum 49.9% du temps de travail) depuis leur Etat de résidence, en principe en utilisant des moyens informatiques, tout en maintenant la compétence de l’Etat du siège de l’employeur pour les assurances sociales. Cette dérogation ne peut concerner que les situations concernant deux Etats qui sont signataires de l’accord.

A ce jour, outre la Suisse, les Etats suivants ont indiqué avoir l’intention de signer l’accord :

Allemagne, Autriche, Belgique, Estonie, Finlande, Hongrie, Irlande, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Slovaquie, République Tchèque, ainsi que le Liechtenstein et la Norvège.

Cette liste sera mise à jour au fur et à mesure. Pour toute question concernant la position d’un Etat n’y figurant pas, il convient de s’adresser aux autorités de l’Etat concerné.

L’accord multilatéral concerne les personnes auxquelles l’ALCP resp. la Convention AELE est applicable. Il n’est pas applicable aux :

  • personnes qui exercent également une activité autre que du télétravail dans l’Etat de résidence signataire de l’accord (p. ex. visite de clients, activité accessoire indépendante) ;
  • personnes exerçant également une activité dans l’UE resp. l’AELE en dehors de leur Etat de résidence signataire de l’accord et de la Suisse ;
  • personnes travaillant pour un autre employeur situé dans l’UE resp. l’AELE en plus de l’activité exercée pour leur employeur suisse ;
  • travailleurs indépendants.

Le texte de l’accord et un mémorandum explicatif sont disponibles (en anglais, des traductions sont en cours (état au 15.05.2023)) :

Il est prévu d’adapter les règles de coordination européennes à plus long terme afin de prendre en compte le télétravail transfrontalier.

Cette communication ne concerne que les assurances sociales, pas le droit en matière de fiscalité.

 

Répercussions de l’accord sur les travailleurs frontaliers dans les relations avec l’Allemagne, l’Autriche et le Liechtenstein

Dès le 1er juillet 2023, les travailleurs frontaliers occupés par un employeur suisse (ou plusieurs employeurs suisses) qui télétravaillent jusqu’à 50% (au maximum 49.9% du temps de travail) depuis l’Allemagne, l’Autriche ou le Liechtenstein peuvent rester assurés en Suisse.

Inversement, les frontaliers résidant et télétravaillant moins de 50% en Suisse pour un employeur (ou plusieurs employeurs) dont le siège est en Allemagne, en Autriche ou au Liechtenstein, peuvent rester soumis aux assurances sociales du siège de l’employeur.

 

Informations pratiques

Pour que l’accord s’applique à leurs salariés, les employeurs suisses doivent demander une attestation A1 (validité maximale de 3 ans, renouvelable) à leur caisse de compensation AVS au moyen de la plateforme ALPS (Applicable Legislation Portal Switzerland), qui est en cours d’actualisation également afin d’automatiser autant que possible les processus et la délivrance de l’attestation A1.

En principe la plateforme ALPS devrait déjà être adaptée au 1er juillet 2023, mais il n’est pas nécessaire de présenter une demande tout de suite, car l’attestation A1 pourra couvrir rétroactivement la période débutant au 1er juillet 2023 pour toutes les demandes déposées jusqu’à fin juin 2024.

 

Pas de changement de compétence et application des règles ordinaires en cas de télétravail inférieur à 25% dans les relations avec tous les Etats de l’UE/AELE

L’accord multilatéral s’applique au télétravail transfrontalier compris entre 25% et 49.9% du temps de travail. Les règles et procédures ordinaires continuent à s’appliquer au télétravail transfrontalier inférieur à 25% même s’il est effectué dans un Etat signataire de l’accord.

En cas de télétravail exercé sur le territoire d’un Etat qui n’a pas signé l’accord multilatéral dérogatoire, ou pour un employeur ayant un siège dans un Etat qui n’a pas adhéré à l’accord, les règles et procédures ordinaires applicables avant la pandémie sont à nouveau applicables à partir du 1er juillet 2023 pour la demande d’attestation A1 (l’assujettissement est déterminé par l’institution compétente de l’Etat de résidence): le télétravail transfrontalier jusqu’à 25% (au maximum 24.9%) est possible sans impact sur les assurances sociales.

 

Détachement en cas de télétravail temporaire à plein temps dans un Etat de l’UE ou de l’AELE

Les Etats appliquant les règles européennes de coordination se sont mis d’accord pour interpréter les dispositions relatives au détachement de manière à ce qu’un détachement en vertu de l’art. 12 du règlement (CE) nº 883/2004 soit également possible en cas de télétravail temporaire et ponctuel à plein temps (100% du temps de travail). Dès lors, un employeur suisse peut détacher un salarié pour télétravailler dans un Etat de l’UE resp. de l’AELE, peu importe à l’initiative de qui le télétravail transfrontalier est effectué, pour autant qu’il ait été convenu entre l’employé et l’employeur. Peu importe également que le télétravail transfrontalier temporaire soit motivé par des raisons professionnelles ou privées.

Si les conditions du détachement sont remplies et que le télétravail transfrontalier ne dépasse pas la durée maximale de 24 mois, un détachement est p. ex. possible dans les situations suivantes :

  • prise en charge de proches à l’étranger ;
  • raisons médicales ;
  • fermeture des bureaux pour rénovation ;
  • télétravail depuis une destination de vacances.

Les demandes d’attestation A1 sont à adresser par l’employeur suisse à la caisse de compensation AVS compétente, qui traite la demande selon la procédure habituelle prévue pour des détachements.

Aucune prolongation au-delà de 24 mois du détachement en cas de télétravail transfrontalier temporaire n’est acceptée.

 

 

En résumé (commentaires personnels) :

  • Lorsque le siège de l’employeur et le domicile de l’employé se trouvent dans un pays qui a signé le nouvel accord, le télétravail est possible jusqu’à 49,9% du temps de travail.
  • Lorsque le siège de l’employeur ou le domicile de l’employé se trouve dans un pays qui n’a pas signé le nouvel accord, le télétravail est possible jusqu’à 24,9% du temps de travail.
  • La communication de l’OFAS concerne uniquement la sécurité sociale et n’englobe pas le droit en matière de fiscalité.

 

Communication de l’OFAS consultable ici (dernière modification le 15.05.2023)

Texte de l’accord et mémorandum explicatif disponibles ici (en anglais ; état au 15.05.2023)

Neue Vereinbarung ab dem 1. Juli 2023: Kein Zuständigkeitswechsel im Bereich der Sozialversicherungen bei Telearbeit unter 50% in bestimmten Staaten (Stand am 15.05.2023; hier verfügbar)

Nuovo accordo a partire dal 1° luglio 2023: nessuna modifica di competenza in materia di assicurazioni sociali in caso di telelavoro inferiore al 50% in alcuni Stati (al 15.05.2023; disponibile qui)

 

 

9C_60/2022 (f) du 09.03.2023 – Taux des frais administratifs – 58 al. 4 LAVS – 69 LAVS / Bases légales valables pour la perception des cotisations sociales par la caisse de compensation

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2022 (f) du 09.03.2023

 

Consultable ici

 

Taux des frais administratifs / 58 al. 4 LAVS – 69 LAVS

Bases légales valables pour la perception des cotisations sociales par la caisse de compensation

Procédure simplifiée / 51 LPGA

 

A.__ Sàrl (ci-après: la société) exploite une discothèque. En tant qu’employeur, elle est affiliée à la caisse de compensation pour le paiement des cotisations sociales de ses employés. Outre des acomptes de cotisations pour les années 2013 à 2019, la caisse de compensation a régulièrement adressé à la société (au début de chaque année qui suivait le versement des acomptes) des décomptes annuels indiquant le montant des cotisations encore dues ou versées en trop et les frais administratifs y relatifs. Sur demande de A.__ Sàrl, la caisse de compensation a rendu une décision formelle, confirmée sur opposition, portant exclusivement sur le montant des frais administratifs. Elle a fixé le taux de ces frais à 4,05% pour les années 2013 à 2015 et 2019 ainsi qu’à 2,55% pour les années 2016 à 2018.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 15.12.2021, admission partielle par le tribunal cantonal, réformation la décision en ce sens que le taux des frais administratifs relatif aux années 2015 et 2019 était fixé à 2.55%.

 

TF

Consid. 4.1
Compte tenu des motifs et conclusions du recours, il s’agit d’abord de déterminer si le tribunal cantonal pouvait légitimement conclure que les décomptes relatifs aux années 2013 et 2014 ne pouvaient plus être revus dans le cadre de son examen du recours, ce qui rendait en outre sans objet le grief de la société sur la prescription de la créance de cotisations pour les années citées.

Consid. 4.3.1
Les cotisations dues par l’employeur sont en général encaissées selon la procédure simplifiée prévue à l’art. 51 al. 1 LPGA (art. 14 al. 3 première phrase LAVS). Cela signifie que ces cotisations doivent faire l’objet de la décision écrite prévue à l’art. 49 al. 1 LPGA uniquement si l’intéressé la demande (art. 51 al. 2 LPGA) dans un délai d’examen et de réflexion convenable (ATF 134 V 145 consid. 5.3).

La société soutient avoir contesté le montant facturé à titre de frais administratifs régulièrement depuis le 14 janvier 2014 déjà. Le point de savoir si cette date doit être retenue au lieu de celle de juillet 2015 admise par la juridiction cantonale peut demeurer indécis. Dans l’éventualité où les décomptes de cotisations pour les années 2013 et 2014 seraient bel et bien entrés en force de chose décidée, le tribunal cantonal ne pouvait de toute façon pas se dispenser de les revoir dans le cadre de l’examen du recours pour les motifs qui suivent.

Consid. 4.3.2
Faute de demande de décision formelle dans un délai d’examen et de réflexion convenable, la prise de position de l’assureur selon la procédure simplifiée entre en force et déploie ses effets au même titre qu’une décision. Elle ne peut être modifiée qu’aux conditions de la révision ou de la reconsidération de l’art. 53 LPGA (VALÉRIE DÉFAGO GAUDIN, Commentaire romand, LPGA, 2018, n° 10 ad art. 51 LPGA). L’assureur peut reconsidérer une décision formellement passée en force et sur laquelle une autorité judiciaire ne s’est pas prononcée quant au fond, à condition qu’elle soit manifestement erronée et que sa rectification revête une importance notable (art. 53 al. 2 LPGA). Il n’est pas tenu de reconsidérer les décisions qui remplissent les conditions fixées. Il en a simplement la faculté et ni l’assuré ni le juge ne peuvent l’y contraindre (ATF 133 V 50 consid. 4.1). Cependant, lorsqu’il entre en matière sur une demande de reconsidération et examine si les conditions requises sont remplies, avant de statuer au fond par une nouvelle décision de refus, celle-ci est susceptible d’être attaquée en justice. Le contrôle juridictionnel dans la procédure de recours subséquente se limite alors au point de savoir si les conditions d’une reconsidération (inexactitude manifeste de la décision initiale et importance notable de la rectification) sont réunies (ATF 119 V 475 consid. 1b/cc). En revenant dans ses décisions des 19 mars et 26 juin 2020 sur les décomptes annuels entrés en force pour les années 2013 et 2014, alors qu’elle n’y était pas obligée, la caisse de compensation a en l’occurrence concrètement rendu une décision de reconsidération. La décision sur opposition du 26 juin 2020 pouvait donc être attaquée en justice aussi en tant qu’elle portait sur les années en cause. La juridiction cantonale ne pouvait ainsi pas se dispenser d’examiner les griefs de la société à propos de la prescription de la créance de cotisations et du montant des frais administratifs perçus pour les années 2013 et 2014.

Consid. 4.3.3
En principe, il conviendrait de renvoyer la cause aux juges cantonaux pour qu’ils examinent ces aspects du litige (art. 107 al. 2 LTF). Toutefois, dans la mesure où les faits constatés en première instance permettent d’examiner tant le grief concernant la prescription de la créance de cotisations pour les années 2013 et 2014 que le grief portant sur le montant des frais administratifs pour ces mêmes années, un impératif d’économie de procédure justifie à titre exceptionnel que le Tribunal fédéral renonce à ce renvoi et procède lui-même à un examen au fond (ATF 141 II 14 consid. 1.6).

[…]

Consid. 5.2.3.1
L’art. 69 al. 1 LAVS est la concrétisation légale en matière de contribution aux frais administratifs dans l’AVS du principe de la couverture des frais ou de l’équivalence. Il impose le respect d’une certaine proportion entre le montant desdits frais et la valeur objective de la prestation fournie (à cet égard, cf. ATF 132 II 371 consid. 2.1). Même si elle fait référence à la capacité financière des affiliés, il n’en demeure pas moins que cette norme lie le montant des frais évoqués à ceux engendrés par la facturation des cotisations sociales. La référence à la capacité financière des affiliés vise seulement à limiter le montant maximum des frais pouvant être perçus. Ce montant a été fixé au maximum à 5% de la somme des cotisations que doivent verser les affiliés (art. 1 de l’ordonnance du DFI du 19 octobre 2011 sur le taux maximum des contributions aux frais d’administration dans l’AVS, édicté en vertu de la délégation de compétence prévue à l’art. 157 RAVS, lui-même édicté en vertu de la délégation de compétence inscrite à l’art. 69 al. 1 dernière phrase LAVS). Quoi qu’en dise la société, il apparaît dès lors clairement que les frais administratifs constituent une contribution causale liée aux coûts qu’ils engendrent et non directement à la capacité financière de leurs débiteurs (cf. aussi arrêt H 56/81 du 17 novembre 1983 in: RCC 1984 p. 179).

Consid. 5.2.3.2
En vertu de l’art. 190 Cst., le Tribunal fédéral est lié par la délégation de compétence prévue par le législateur fédéral. On peut cependant ajouter que les critiques de la société à cet égard ne sont pas pertinentes. Le principe de la légalité exige qu’en cas de délégation de compétence à l’organe exécutif, la norme de délégation indique au moins dans les grandes lignes le cercle des contribuables, l’objet et la base de calcul de la contribution afin que l’autorité exécutive ne dispose pas d’une marge de manœuvre excessive et que les citoyens puissent discerner les contours de la contribution qui pourra être prélevée (à cet égard, cf. ATF 143 I 227 consid. 4.2). Le principe de la couverture des frais ou de l’équivalence permet une application moins rigoureuse du principe de la légalité en matière de contributions causales, au point que le législateur pourrait aller jusqu’à déléguer à l’exécutif la compétence d’en fixer le montant (à cet égard, cf. ATF 143 II 283 consid. 3.5). Le législateur n’a en l’occurrence pas délégué la compétence de fixer le montant des frais administratifs au Conseil fédéral mais a choisi de confier cette tâche directement aux comités de direction des caisses de compensation (art. 58 al. 4 let. c LAVS). Il a lui-même ancré le principe de la couverture des frais à l’art. 69 LAVS et n’a laissé au Conseil fédéral que le soin de prendre les mesures nécessaires afin d’empêcher que les taux de contribution aux frais d’administration ne diffèrent trop d’une caisse à l’autre (art. 69 al. 1 dernière phrase LAVS). L’organe exécutif a concrétisé sa compétence par l’intermédiaire du Département fédéral de l’intérieur en fixant le montant maximum des frais administratifs à 5% de la somme des cotisations dues (art. 157 RAVS; art. 1 de l’ordonnance du DFI du 19 octobre 2011 sur le taux maximum des contributions aux frais d’administration dans l’AVS). Le comité de direction de la caisse de compensation a concrétisé la sienne en édictant un règlement prévoyant que le montant des frais administratifs devait correspondre à une certaine proportion en pourcent des cotisations ou en pour-mille de la masse salariale et un document interne en fixant précisément le taux. Le système mis en place par la caisse de compensation correspond donc à la volonté du législateur qui, dans la mesure où il s’agissait de contributions causales susceptibles de contrôle grâce au principe de l’équivalence ou de la couverture des frais, n’avait pas besoin d’être plus précis dans ses délégations de compétence.

Dans ces circonstances, peu importe de savoir si l’art. 57 al. 1 LAVS permettait au Conseil fédéral de déléguer sa compétence d’approuver le règlement de la caisse de compensation à l’OFAS (art. 100 RAVS) dans la mesure où le règlement ne doit contenir que les principes de la perception des contributions aux frais d’administration (art. 57 al. 2 let. f LAVS). Aussi, la juridiction cantonale n’avait pas à examiner plus avant le grief de la société relatif à un éventuel défaut d’approbation par le Conseil fédéral, de sorte que le droit d’être entendu n’a pas été violé. Le point de savoir si la fixation des frais administratifs en fonction de la masse salariale est compatible avec le critère de la capacité financière prévue à l’art. 69 al. 1 LAVS n’est par ailleurs pas une question pertinente dès lors que la référence à cette capacité vise seulement à empêcher que la perception des frais – effectifs – en fonction de la masse salariale ou du volume des cotisations ne mette à contribution le débiteur desdites cotisations de manière excessive.

La perception des cotisations sociales par la caisse de compensation repose donc sur des bases légales valables. On précisera que ce qui précède vaut non seulement pour les années 2015 à 2019 mais aussi pour les années 2013 et 2014.

Consid. 6
La juridiction cantonale a encore examiné le taux sur la base duquel le montant des frais administratifs avait été calculé en l’occurrence. Elle a considéré que le principe d’équivalence n’avait pas été respecté dès lors que ledit taux avait été majoré en raison de poursuites. Elle a constaté que les frais d’administration liés à la procédure de poursuite représentaient près de 40% des frais d’administration annuels alors que la société n’avait fait l’objet que d’une réquisition de poursuite et que la caisse de compensation avait facturé en sus les frais de rappel. Elle a dès lors réformé la décision administrative litigieuse en ce sens que le taux de base de 2,55% était admis et que la majoration de 1,5% en cas de poursuite était proscrite. La société ne critique pas ces considérations. Dans sa réponse du 17.03.2022, la caisse de compensation a déclaré n’avoir rien à ajouter à l’arrêt cantonal. En conséquence, toujours par souci d’économie de procédure, il faut aussi appliquer le raisonnement des juges cantonaux au montant des frais administratifs pour les années 2013 et 2014 dans la mesure où la perception de ceux-ci avait également fait l’objet d’une réquisition de poursuite. Il convient dès lors de modifier l’arrêt attaqué et la décision administrative litigieuse en ce sens que le taux permettant de déterminer le montant des frais administratifs pour les années 2013 et 2014 est de 2,55% et de renvoyer la cause à la caisse de compensation pour qu’elle calcule le montant à restituer à la société. La caisse de compensation devra aussi se prononcer sur les intérêts réclamés par la société.

 

Le TF admet partiellement le recours de la société.

 

 

Arrêt 9C_60/2022 consultable ici

 

9C_508/2021 (f) du 26.09.2022 – Cotisations AVS – Responsabilité de l’employeur – 52 LAVS / Appel en cause des autres administrateurs de la société

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_508/2021 (f) du 26.09.2022

 

Consultable ici

 

Cotisations AVS – Responsabilité de l’employeur / 52 LAVS

Appel en cause des autres administrateurs de la société

 

La société B.__ SA était affiliée en tant qu’employeur pour le paiement des cotisations sociales auprès de la caisse de compensation. La faillite de la société a été prononcée en janvier 2015, puis suspendue faute d’actifs en septembre 2019. La société a été radiée du registre du commerce en septembre 2019.

Par trois décisions séparées du 11.05.2018, la caisse de compensation a réclamé à A.__, en sa qualité d’administrateur président avec signature individuelle de la société, à C.__, en sa qualité d’administrateur avec signature collective à deux, et à D.__, en sa qualité d’administrateur avec signature collective à deux, la réparation du dommage qu’elle a subi dans la faillite de la société. A.__ a formé une opposition contre la décision du 11.05.2018. Par décision sur opposition du 10.09.2018, la caisse de compensation a rejeté l’opposition et fixé le dommage à CHF 510’130.65, correspondant au solde des cotisations sociales dues sur les salaires versés par la société pour les années 2013 à 2015.

 

Procédure cantonale (arrêt AVS 48/18 – 42/2021 – consultable ici)

A.__ a déféré la décision sur opposition à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal et requis la jonction de sa cause avec celle parallèle de C.__.

Statuant le 16.08.2021, la cour cantonale a rejeté la requête de jonction, rejeté le recours et confirmé la décision sur opposition du 10.09.2018.

 

TF

A.__ reproche à la juridiction cantonale d’avoir méconnu le droit fédéral en n’appelant pas en cause les autres administrateurs de la société. Dès lors que la caisse de compensation avait prononcé une décision à leur encontre, il soutient que C.__ et D.__ auraient à tout le moins dû être invités à participer à sa procédure de recours. D’ailleurs, il avait expressément demandé la jonction de sa cause avec celle de C.__.

Consid. 3.2
L’institution de l’appel en cause n’est pas expressément prévue par la procédure administrative fédérale. Elle est cependant reconnue par la jurisprudence, par exemple en présence de plusieurs responsables potentiels au sens de l’art. 52 LAVS. Il appartient alors à la caisse de compensation, respectivement au Tribunal des assurances saisi d’un recours, d’inviter à participer à la procédure, à titre de co-intéressées, les personnes contre lesquelles la caisse a rendu une décision de réparation du dommage et contre lesquelles elle n’a pas renoncé à agir ensuite de leur opposition (ATF 134 V 306 consid. 3). A défaut, le Tribunal fédéral, saisi ultérieurement d’un recours en matière de droit public, retournera en règle générale la cause à l’instance inférieure pour qu’elle procède conformément à ce qui précède, à moins qu’il ne soit en mesure de corriger lui-même le vice de procédure, à titre exceptionnel (arrêt H 101/06 du 7 mai 2007 consid. 4.5 et les références). Une telle exception a été admise lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et conduirait seulement à prolonger inutilement la procédure, alors que le tiers avait pu s’exprimer dans la procédure fédérale (arrêt H 72/06 du 16 octobre 2006 consid. 2.4).

Consid. 3.3
En l’espèce, comme le fait valoir à juste titre A.__, la cour cantonale n’a pas invité à participer à la procédure cantonale, à titre de co-intéressées, les personnes contres lesquelles la caisse de compensation intimée a rendu une décision en réparation du dommage. Cette manière de procéder n’est pas conforme aux exigences du droit fédéral (ATF 134 V 306 consid. 3 et les références). Elle a pour effet de soustraire les tiers co-intéressés de l’autorité de chose jugée du jugement à rendre, de sorte que celui-ci ne leur sera par la suite pas opposable dans le cadre d’une procédure dirigée contre eux (ATF 125 V 80 consid. 8b). Les prises de position des tiers co-intéressés sont encore possibles et sont susceptibles d’avoir une influence concrète sur la position juridique du recourant. Il convient dès lors de remettre le recourant dans la situation qui aurait été la sienne si les garanties de l’appel en cause n’avaient pas été méconnues (comp. arrêts 9C_158/2008 du 30 septembre 2008 consid. 3.2; H 101/06 du 7 mai 2007 consid. 4.5 et les références).

 

Le TF admet le recours de A.__.

 

Arrêt 9C_508/2021 consultable ici

 

9C_429/2022 (f) du 03.11.2022 – Cotisations AVS – Responsabilité de l’employeur – Délai de prescription relatif – 52 LAVS – 60 al. 1 CO / Échéance du délai de prescription relatif après l’entrée en vigueur du nouveau droit le 01.01.2020 – Examen par le TF de l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_429/2022 (f) du 03.11.2022

 

Consultable ici

 

Cotisations AVS – Responsabilité de l’employeur – Délai de prescription relatif / 52 LAVS – 60 al. 1 CO

Échéance du délai de prescription relatif après l’entrée en vigueur du nouveau droit le 01.01.2020 – Examen par le TF de l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC

 

B.__ SA (ci-après: la société), inscrite au registre du commerce en mai 1986, a été dissoute par suite de faillite. A.__ en a été l’administrateur avec signature individuelle.

Par décision du 01.10.2020, confirmée sur opposition le 23.03.2021, la caisse de compensation a réclamé à A.__, en sa qualité d’administrateur de la société, la somme de 89’284 fr. 65 à titre de réparation du dommage causé par le non-paiement de cotisations sociales dues pour l’année 2013.

 

Procédure cantonale (arrêt AVS 18/21 – 24/2022 – consultable ici)

Par jugement du 11.07.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3
En instance fédérale, le litige porte uniquement sur le point de savoir si la créance en réparation du dommage de la caisse de compensation est ou non prescrite, sous l’angle du délai de prescription relatif de l’art. 52 al. 3 LAVS. A cet égard, l’arrêt entrepris rappelle qu’à la suite de la réforme des règles sur la prescription découlant d’un acte illicite ou d’un enrichissement illégitime, qui concerne également l’action en responsabilité contre l’employeur au sens de la LAVS, le délai de prescription relatif de l’art. 52 al. 3 LAVS est passé de deux à trois ans, avec effet au 01.01.2020 (cf. Message du 29 novembre 2013 relatif à la modification du code des obligations [droit de la prescription], FF 2014 260 s ch. 2.2; RO 2018 5343). L’art. 52 al. 3 LAVS prévoit en effet que l’action en réparation du dommage se prescrit conformément aux dispositions du CO sur les actes illicites; l’art. 60 al. 1 CO prévoit un délai relatif de prescription de trois ans.

Consid. 4.1
La juridiction cantonale a constaté que le dies a quo du délai relatif de prescription de l’art. 52 al. 3 LAVS devait être fixé au 19.01.2018 – correspondant à la date du dépôt de l’état de collocation – et que le délai prescription relatif de deux ans, déterminé selon l’ancien droit, arrivait à échéance le 19.01.2020, soit postérieurement à l’entrée en vigueur du nouveau droit le 01.01.2020. Par conséquent, en vertu des principes généraux en matière de droit transitoire (cf. ATF 138 V 176 consid. 7.1) ou de l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC, le nouveau délai de prescription relatif de trois ans s’appliquait et son échéance devait être fixée au 19.01.2021. Ainsi, la décision du 01.10.2020 de la caisse de compensation avait été rendue à temps et constituait le premier acte interruptif de prescription. Un nouveau délai avait alors commencé à courir et avait été derechef interrompu par la décision sur opposition rendue le 23.03.2021, de sorte que la créance en réparation du dommage de la caisse de compensation n’était pas prescrite.

Consid. 4.2
A.__ ne conteste pas que le délai de prescription a commencé à courir le 19.01.2018. Il remet uniquement en cause l’interprétation qu’a faite la juridiction cantonale de l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC. Il se prévaut d’une interprétation littérale et historique de cette disposition, en se référant notamment à l’avant-projet du code des obligations (droit de la prescription) d’août 2011 (ci-après: avant-projet; Rapport explicatif relatif à l’avant projet, Office fédéral de la justice, Berne 2011). Il en conclut que toute créance qui était d’ores et déjà prescrite selon l’ancien droit ne pourrait bénéficier des nouveaux délais de prescription « sans référence à une quelconque entrée en vigueur du nouveau droit ». Il en découlerait que la créance était prescrite depuis le 19.01.2020, de sorte que la décision administrative était tardive.

Consid. 5.1.1
Modifié par la révision du droit de la prescription avec effet à partir du 01.01.2020, l’art. 49 Tit. fin. CC règle la prescription des droits en matière de droit transitoire. Il y a lieu de s’y référer en ce qui concerne la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS, à défaut de dispositions spéciales (cf. ATF 148 II 73 consid. 6.2.2; WILDHABER/DEDE, in Berner Kommentar, Die Verjährung Art. 127-142 OR, n° 110 ad Vorbemerkungen zu Art. 127-142 OR). Conformément à l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC, lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus longs que l’ancien droit, le nouveau droit s’applique dès lors que la prescription n’est pas échue en vertu de l’ancien droit; lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus courts que l’ancien droit, l’ancien droit s’applique (al. 2); l’entrée en vigueur du nouveau droit est sans effets sur le début des délais de prescription en cours, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 3).

Consid. 5.1.2
A la suite du recourant, on constate que l’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC proposé par le Conseil fédéral (Message du 29 novembre 2013 relatif à la modification du code des obligations [Droit de la prescription], FF 2014 277), et adopté par le Parlement, a été modifié par rapport à l’avant-projet. En particulier, la disposition ne comprend plus une référence à l’entrée en vigueur du nouveau droit (la disposition de l’avant-projet prévoyait que: « le nouveau droit s’applique dès son entrée en vigueur aux actions non encore prescrites » [avant-projet, p. 9]). Il ressort toutefois des travaux préparatoires que, malgré cette modification, le principe selon lequel le nouveau délai de prescription (plus long) n’est applicable que si l’ancien délai de prescription court encore au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit a été maintenu (Message cité, FF 2014 253 ch. 2.2; cf., aussi BO 2014 CN 1792). En d’autres termes, si le délai de prescription de la loi ancienne est plus court que celui de la loi nouvelle, il convient d’appliquer le délai de cette loi nouvelle, pour autant que la prescription ne soit pas déjà acquise au moment du changement de la loi (DENIS PIOTET, Le nouveau droit transitoire de la prescription [ art. 49 Tit. fin. CC], Revue de droit suisse 2021 I p. 290). L’art. 49 al. 1 Tit. fin. CC a donc pour effet de prolonger le délai de prescription en cours. Toutefois, la prescription ayant couru sous l’ancien droit doit être décomptée de la prescription déterminée en vertu du nouveau droit (FRÉDÉRIC KRAUSKOPF/RAPHAEL MÄRKI, Wir haben ein neues Verjährungsrecht! in Jusletter 2 juillet 2018, n° 34; cf. aussi PASCAL PICHONNAZ/FRANZ WERRO, Le nouveau droit de la prescription: Quelques aspects saillants de la réforme, in Le nouveau droit de la prescription, Fribourg 2019, p. 32; VINCENT BRULHART/JÉRÔME LORENZ, Impacts du nouveau droit de la prescription sur les contrats en cours (articles 128a CO et 49 Titre final CC) in Le nouveau droit de la prescription, Fribourg 2019, p. 164).

Consid. 5.1.3
Ces principes correspondent du reste à ceux posés par la jurisprudence en lien avec le droit transitoire relatif au délai de prescription prévu par l’art. 52 al. 3 aLAVS (en relation avec l’art. 82 aRAVS). Selon le Tribunal fédéral, les prétentions en dommages-intérêts contre l’employeur qui n’étaient pas encore périmées au 01.01.2003 étaient assujetties aux règles de prescription de l’art. 52 al. 3 aLAVS. Dans ce cas, il y avait lieu d’imputer au délai de prescription de deux ans de l’art. 52 al. 3 aLAVS le temps écoulé sous l’ancien droit (ATF 134 V 353).

Consid. 5.2
Dans le cas d’espèce, il n’est pas contesté que la prescription a commencé à courir le 19.01.2018 et que le délai de prescription relatif de deux ans arrivait à échéance le 19.01.2020, en vertu de l’ancien droit. En raison de l’introduction au 01.01.2020 du nouvel art. 52 al. 3 LAVS, alors que la prescription relative dans le cas d’espèce n’était pas acquise en vertu de l’ancien droit, le délai de prescription relatif a été rallongé d’une année, pour arriver à échéance le 19.01.2021. Par conséquent, la décision de la caisse de compensation du 01.10.2020, qui a été notifiée au recourant antérieurement à la nouvelle date d’échéance, a interrompu la prescription de la créance en réparation du dommage, comme l’a retenu à bon droit la cour cantonale.

 

Le TF rejette le recours de A.__.

 

Arrêt 9C_429/2022 consultable ici