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9C_226/2022 (f) du 02.05.2023 – Moyens auxiliaires d’un bénéficiaire de rente de vieillesse / Maintien des droits acquis lors de l’accession à l’âge de la retraite – 4 OMAV / Prothèse de type C-Leg

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_226/2022 (f) du 02.05.2023

 

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Moyens auxiliaires d’un bénéficiaire de rente de vieillesse / OMAV

Maintien des droits acquis lors de l’accession à l’âge de la retraite / 4 OMAV

Prothèse de type C-Leg

 

Assuré a été amputé de sa jambe droite à la suite d’un accident survenu le 08.07.1981. Il a bénéficié de la prise en charge des frais d’entretien et de renouvellement de la prothèse standard qui lui avait été remise à titre de moyen auxiliaire de l’assurance-invalidité. Dans le cadre d’une précédente procédure, le tribunal cantonal a confirmé le refus de l’office AI de remettre à l’assuré une prothèse équipée d’un genou articulé contrôlé par microprocesseur de type C-Leg. L’administration a par la suite pris en charge les frais d’acquisition d’un nouveau genre de prothèse mécanique avec un pied Echelon.

Le 06.04.2020, l’intéressé a présenté une nouvelle demande de moyen auxiliaire, sous forme de prothèse de type C-Leg, au motif que celle-ci était nécessaire à l’exercice de l’activité poursuivie après l’âge de la retraite. Entre autres mesures d’instruction, l’office AI a confié une expertise à la Fédération suisse de consultation en moyens auxiliaires (FSCMA). Considérant que seule la prothèse accordée avant l’âge de la retraite pouvait être maintenue à titre de moyen auxiliaire de l’assurance-vieillesse et survivants, la caisse de compensation (ci-après: la caisse) a rejeté la demande (décision du 21.12.2020, confirmée sur opposition le 02.06.2021).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 15.03.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5.2.1
L’assuré fait grief à la juridiction cantonale d’avoir nié son droit à la remise d’une prothèse de type C-Leg au motif que les prothèses de jambe ne figuraient pas dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV. Il rappelle que l’art. 43quater LAVS vise à permettre aux rentiers AVS d’obtenir des moyens auxiliaires nécessaires à l’exercice d’une activité lucrative ou à la réalisation de leurs travaux habituels (al. 2). Il soutient en substance que la liste évoquée – qui avait été édictée sur la base des délégations de compétence au Conseil fédéral (art. 43quater al. 1 LAVS) et au Département fédéral de l’intérieur (art. 66ter al. 1 RAVS) – est à ce point restrictive qu’elle irait contre la volonté du législateur en ne déterminant pas de manière adéquate les moyens auxiliaires qui peuvent être remis aux rentiers AVS, ce qui aurait pour conséquence de les priver des droits ou garanties que la loi entendait leur octroyer.

Consid. 5.2.2
Cette argumentation est infondée. Contrairement à ce que veut faire accroire l’assuré, les juges cantonaux n’ont pas nié son droit à la remise d’une prothèse de jambe de type C-Leg au seul motif que la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV ne mentionnait pas ce genre de moyen auxiliaire. S’ils ont certes expressément relevé ce point, ils ont toutefois considéré que, compte tenu de l’âge de l’assuré lors du dépôt de sa dernière demande, seules les dispositions de la LAVS pouvaient trouver application en l’espèce (à l’exclusion de celles de la LAI). C’est pourquoi, dès lors que les prothèses de jambe ne figuraient pas dans la liste de l’annexe à l’OMAV, ce qui excluait la remise automatique de toute prothèse, ils ont examiné s’ils pouvaient faire droit aux prétentions de l’assuré sous l’angle du maintien des droits que celui-ci avait acquis sous le régime de la LAI prévu à l’art. 4 OMAV. Ils sont parvenus à la conclusion que l’assuré ne pouvait prétendre l’octroi d’une prothèse plus perfectionnée que celle obtenue sous le régime de la LAI. Puisque l’assuré ne s’est nullement vu refuser l’octroi d’une prothèse de jambe en raison de l’absence d’un tel moyen dans la liste de l’annexe à l’OMAV et qu’il ne se retrouve pas dans la situation où, ayant atteint l’âge de la retraite, il est pour la première fois confronté à la nécessité de porter une prothèse de jambe, mais qu’il bénéficie d’une telle prothèse depuis 1981, il n’a pas d’intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral détermine de manière générale si l’absence de mention du moyen auxiliaire en question dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV est contraire ou non à la volonté du législateur. 

 

Consid. 5.3.2
Contrairement à ce que veut faire accroire l’assuré une fois encore, le tribunal cantonal n’a pas nié son droit à une prothèse de jambe à cause du fait qu’il avait atteint l’âge de l’AVS et que la liste de l’annexe à l’OMAV ne prévoyait pas la remise d’un tel moyen. Il a concrètement considéré que l’assuré avait toujours droit à une prothèse mais qu’il ne pouvait prétendre un moyen auxiliaire plus perfectionné que celui qui lui avait été accordé depuis 1981, sous peine d’étendre la garantie des droits acquis d’une manière contraire au sens et au but de la loi. On précisera que le droit à l’octroi d’une prothèse de type C-Leg avait déjà été nié au motif que ce moyen auxiliaire ne pouvait pas être considéré comme simple, adéquat et économique dans la situation de l’assuré. Dans ces circonstances, il n’y a pas de discrimination en raison de l’âge dès lors que l’assuré a bénéficié et continue de bénéficier depuis 1981 d’un modèle de moyen auxiliaire jugé simple et adéquat pour atteindre les buts fixés par la loi. Par ailleurs, dans la mesure où l’assuré ne se retrouve pas dans la situation où il est pour la première fois confronté à la nécessité de porter une prothèse de jambe, il n’a pas d’intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral détermine de manière générale si l’absence de mention du moyen auxiliaire en question dans la liste exhaustive de l’annexe à l’OMAV discrimine les bénéficiaires de rentes AVS par rapport aux bénéficiaires de rentes AI.

 

Consid. 5.4.2
L’analogie entre semelles ou chaussures orthopédiques et prothèses mécaniques ou électroniques effectuée par le tribunal cantonal n’est pas pertinente. Les deux premiers moyens auxiliaires évoqués sont en effet clairement différenciés dans l’annexe de l’ordonnance du Département fédéral de l’intérieur concernant la remise des moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité (OMAI), tandis que les deux seconds y sont désignés par le terme générique de prothèse fonctionnelle définitive pour les jambes. Une prothèse C-Leg ne saurait donc être considérée comme un moyen auxiliaire d’un genre différent d’une prothèse mécanique. Le Tribunal fédéral n’a d’ailleurs jamais nié le droit d’un assuré au motif qu’une prothèse électronique constituerait un moyen auxiliaire « luxueux » n’entrant – par principe – pas en compte dans une liste des moyens auxiliaires susceptibles d’être accordés. Au contraire, il s’est généralement attaché à examiner le caractère simple, adéquat et économique d’une telle prothèse dans les cas particuliers qui lui étaient soumis (à cet égard, cf. p. ex. ATF 143 V 190 consid. 7.3.2; 141 V 30 consid. 3.2.3; 132 V 215; voir aussi arrêts 8C_279/2014 du 10 juillet 2015 in: SVR 2016 UV n° 3 p. 5; I 502/05 du 9 juin 2006 in: SVR 2006 IV n° 53 p. 201). Cela n’est cependant d’aucune utilité à l’assuré dans la mesure où son droit à la prothèse en question doit être examiné à l’aune des droits acquis garantis par l’art. 4 OMAV.

Consid. 5.4.3
Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la portée de l’art. 4 OMAV. Il a considéré que les organes chargés de l’application de la LAVS étaient tenus de fournir seulement les moyens auxiliaires que les organes chargés de l’application de la LAI avaient accordés auparavant et qui n’étaient pas cités dans la liste de l’annexe à l’OMAV. Il a plus particulièrement indiqué que le but de l’art. 4 OMAV était de maintenir les droits acquis avant l’âge de retraite, mais pas de conférer à l’assuré un droit à l’octroi d’un moyen auxiliaire s’adaptant à l’atteinte à la santé. Il a précisé qu’admettre que la garantie des droit acquis inclue des prestations dont l’assuré n’aurait besoin qu’en raison d’une détérioration de sa situation médicale une fois atteint l’âge de la retraite outrepasserait le sens de l’art. 4 OMAV (arrêts 9C_598/2016 du 11 avril 2017 consid. 3.1; 9C_317/2009 du 19 avril 2010 consid. 4 et les références). Or, en suggérant que la prothèse mécanique qui lui avait été accordée peu avant son accession à l’âge de la retraite était devenue inadaptée et que la remise d’une prothèse C-Leg répondrait à des besoins impérieux, l’assuré tente de justifier ses nouvelles prétentions par l’évolution de son état de santé. Même si la juridiction cantonale a admis que les propriétés des exoprothèses contrôlées par microprocesseur amélioreraient le quotidien de l’assuré, elle pouvait donc légitimement nier son droit à l’octroi d’un tel moyen auxiliaire en application de la garantie des droits acquis de l’art. 4 OMAV.

On précisera encore que, comme le souligne l’assuré, le Tribunal fédéral a certes admis que le moyen auxiliaire remis sur la base de la garantie des droits acquis pouvait parfois être d’une meilleure qualité que celui accordé sous le régime de la LAI (arrêts 9C_598/2016 du 11 avril 2017 consid. 3.1; 9C_474/2012 du 6 mai 2013 consid. 3 et les références). L’octroi d’un tel moyen a toutefois toujours été justifié par des motifs techniques foncièrement indépendants de la seule qualité intrinsèque du moyen en question. Ainsi, par exemple, dans l’ATF 106 V 10, la remise d’un appareil binaural à un assuré ayant bénéficié d’un appareil monaural était motivée par le fait qu’il s’agissait d’un appareil simple, adéquat, du même genre que celui accordé précédemment et qui, étant donné l’évolution technologique, ne représentait désormais plus une mesure luxueuse mais simplement appropriée (consid. 2 in fine). Dans l’arrêt 9C_474/2012 du 6 mai 2013, la prise en charge d’un siège élévateur à l’occasion du remplacement d’un fauteuil roulant par un nouveau modèle plus perfectionné était motivée par le fait que sa conception ne permettait plus de réaliser tous les actes autorisés par l’ancien (consid. 3.4). Dans l’arrêt 9C_598/2016 du 11 avril 2017, le remplacement d’un appareil auditif par un modèle plus coûteux était motivé par le fait que les modifications ne pouvaient être distinguées conceptuellement de la prestation allouée jusqu’alors dans la mesure où il s’agissait du même moyen auxiliaire (consid. 4). Le fait qu’une prothèse de type C-Leg soit d’une meilleure qualité qu’une prothèse mécanique ne suffit dès lors pas en soi à justifier sa remise.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_226/2022 consultable ici

 

8C_254/2022 (f) du 03.02.2023 – Propulsion électrique pour fauteuil manuel – Moyens auxiliaires / Critères de simplicité et d’adéquation – Principe de la proportionnalité dans le cadre de l’assurance-accidents sociale – 11 al. 2 LAA – 1 al. 2 OMAA / Causalité naturelle et adéquate

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_254/2022 (f) du 03.02.2023

 

Consultable ici

 

Propulsion électrique pour fauteuil manuel – Moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction / 11 LAA – OMAA

Critères de simplicité et d’adéquation – Principe de la proportionnalité dans le cadre de l’assurance-accidents sociale / 11 al. 2 LAA – 1 al. 2 OMAA

Octroi d’un moyen auxiliaire – Existence d’un lien de causalité (naturelle et adéquate) entre l’atteinte à la santé et l’accident / 6 LAA – 1 al. 1 OMAA

 

Assuré né en 1978 qui, le 26.09.2006, a été victime d’un accident de moto, provoquant une paraplégie complète au-dessous de la vertèbre D4, nécessitant la remise d’un fauteuil roulant manuel. Dès le 01.10.2007, l’assuré a progressivement repris le travail et a depuis lors occupé différents postes de juriste dans les secteurs privé et public. A l’heure actuelle, il exerce comme avocat indépendant et comme juge assesseur. Il est marié et père de deux enfants.

L’assurance-accidents a octroyé à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur un taux d’invalidité de 30% avec effet au 01.04.2012, mais lui a refusé une allocation pour impotent.

Par courrier du 25.03.2019, l’assuré a sollicité une allocation pour impotent en raison de problèmes rencontrés aux deux épaules. Par décision, l’assurance-accidents a, d’une part, refusé le droit à des prestations d’assurance LAA en lien avec les troubles aux deux épaules, et, d’autre part, a accordé une allocation pour impotent de degré faible à compter du 01.03.2019.

Le 24.02.2021, l’assuré a sollicité la prise en charge d’un système de traction électrique de type « Triride » d’une valeur de 8’961 fr. Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a refusé la prise en charge d’un propulseur électrique à titre de moyen auxiliaire.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/297/2022 – consultable ici)

Par jugement du 30.03.2022, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 11 LAA, l’assuré a droit aux moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction; le Conseil fédéral établit la liste de ces moyens auxiliaires (al. 1). Les moyens auxiliaires sont d’un modèle simple et adéquat; l’assureur les remet en toute propriété ou en prêt (al. 2). A l’art. 19 OLAA, le Conseil fédéral a délégué au Département fédéral de l’intérieur (DFI) la compétence de dresser la liste des moyens auxiliaires et d’édicter des dispositions sur la remise de ceux-ci. Ce département a édicté l’ordonnance du 18 octobre 1984 sur la remise de moyens auxiliaires par l’assurance-accidents (OMAA [RS 832.205.12]) avec, en annexe, la liste des moyens auxiliaires. Selon l’art. 1 OMAA, l’assuré a droit aux moyens auxiliaires figurant sur la liste en annexe, dans la mesure où ceux-ci compensent un dommage corporel ou la perte d’une fonction qui résulte d’un accident ou d’une maladie professionnelle (al. 1). Le droit s’étend aux moyens auxiliaires nécessaires et adaptés à l’atteinte à la santé, d’un modèle simple et adéquat, ainsi qu’aux accessoires indispensables et aux adaptations qu’exige l’atteinte à la santé; le nombre et les caractéristiques des moyens auxiliaires doivent répondre tant aux exigences de la vie privée qu’à celles de la vie professionnelle (al. 2). L’annexe à l’OMAA comprend notamment les fauteuils roulants sans moteur (ch. 9.01) ainsi que les fauteuils roulants à moteur électrique; ces derniers sont fournis si des assurés incapables de marcher ne peuvent pas utiliser un fauteuil roulant usuel par suite de paralysies ou d’autres infirmités des membres supérieurs et ne peuvent se déplacer de façon indépendante qu’en fauteuil roulant mû électriquement (ch. 9.02). Les dispositifs de propulsion électrique pour fauteuil manuel – comme celui litigieux en l’espèce – sont assimilés aux fauteuils roulants à moteur électrique (ATF 135 I 161 consid. 4; arrêt 8C_699/2013 du 3 juillet 2014 consid. 2.1). Le droit à ce moyen auxiliaire suppose donc que l’assuré ait besoin d’un fauteuil roulant, qu’il ne soit pas en mesure d’utiliser un fauteuil roulant usuel et qu’il ne puisse se déplacer de manière autonome qu’avec un fauteuil roulant électrique (arrêt 9C_543/2014 du 17 novembre 2014 consid. 5).

Consid. 3.2.1
Comme tout moyen auxiliaire, un fauteuil roulant à moteur électrique ou un dispositif assimilé doit répondre aux critères de simplicité et d’adéquation (art. 11 al. 2 LAA; art. 1 al. 2 OMAA). Ces critères, qui sont l’expression du principe de la proportionnalité, supposent d’une part que la prestation en cause soit propre à atteindre le but fixé par la loi et apparaisse nécessaire et suffisante à cette fin, et d’autre part qu’il existe un rapport raisonnable entre le coût et l’utilité du moyen auxiliaire, compte tenu de l’ensemble des circonstances de fait et de droit du cas particulier (ATF 141 V 30 consid. 3.2.1; 135 I 151 consid. 5.1; arrêt 8C_52/2016 du 8 avril 2016 consid. 3.1, in SVR 2016 UV n° 43 p. 142). Il découle de ces exigences que le droit à un fauteuil électrique est exclu pour les assurés qui peuvent se déplacer seuls en fauteuil roulant manuel, même dans les cas où un système électrique leur serait utile (ATF 140 V 538 consid. 5.2; cf. ATF 132 V 215 consid. 4.31 et les références). La remise de ce moyen est également exclue si la personne invalide ne peut pas utiliser seule le système de démarrage et de freinage électrique d’un fauteuil roulant (ATF 140 V 538).

Consid. 3.2.2
Selon la jurisprudence, l’existence d’une forte déclivité ou d’un emplacement inaccessible à un fauteuil roulant n’est pas en soi un motif suffisant pour admettre le droit à un dispositif de propulsion électrique car, le cas échéant, toute personne dépendante d’un fauteuil roulant pourrait prétendre à un tel dispositif. Une telle extension du droit n’est pas compatible avec le but consistant à accorder un fauteuil roulant électrique aux assurés qui ne peuvent pas utiliser un fauteuil roulant usuel par suite de paralysies ou d’autres infirmités des membres supérieurs et ne peuvent se déplacer de façon indépendante qu’en fauteuil mû électriquement (ch. 9.02 de l’annexe à l’OMAA). Bien que le chiffre 9.02 de l’annexe à l’OMAA indique qu’un assuré a droit à un fauteuil roulant électrique pour se « déplacer de façon indépendante », cela ne signifie pas que l’intéressé doit pouvoir circuler sur tous les terrains et dans tous les lieux possibles. Il ressort en effet du principe de la proportionnalité qu’un rapport raisonnable doit exister, dans le cadre de l’assurance-accidents sociale, entre le but visé, le bénéfice supposé apporté par le moyen auxiliaire en question et le coût de celui-ci. Dans ce contexte, les exigences de la vie privée et de la vie professionnelle (art. 1 al. 2 OMAA) font référence aux lieux les plus proches situés hors du domicile dans lesquels s’établissent les contacts sociaux habituels de la population (ATF 135 I 161 consid. 6; arrêts 9C_543/2014 du 17 novembre 2014 consid. 5; 8C_699/2013 du 3 juillet 2014 consid. 6.2; 9C_265/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4.1; 8C_34/2011 du 13 septembre 2011 consid. 4.3, in SVR 2012 IV n° 20 p. 89). A cet égard, il est un fait notoire que, pour des raisons architecturales, de nombreux lieux publics ou privés ne sont pas ou que très difficilement accessibles aux personnes handicapées se déplaçant en fauteuil roulant (manuel ou électrique). Si cet état de fait est la source d’inconvénients certains, puisqu’il tend, en comparaison avec la situation des personnes valides, à restreindre l’autonomie et la qualité du contact social des personnes à mobilité réduite, la jurisprudence a également souligné que l’assurance sociale n’a pas pour mission d’assurer les mesures qui sont les meilleures dans le cas particulier, mais seulement celles qui sont nécessaires et propres à atteindre le but visé (ATF 131 V 167 consid. 4.2 et la référence citée; arrêts 8C_279/2014 du 10 juillet 2015 consid. 7.2, in SVR 2016 UV n° 3 p. 5; 9C_265/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4.2; 8C_699/2013 du 3 juillet 2014 consid. 6.2; à propos de la discrimination à l’égard des personnes handicapées, voir ATF 134 I 105 consid. 5).

 

Consid. 4.3
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral exposée ci-dessus, un fauteuil roulant à moteur électrique ou un dispositif assimilé n’est octroyé qu’à titre exceptionnel (cf. consid. 3.2 supra). En l’espèce, il ressort des constatations de l’arrêt attaqué et des déclarations de l’assuré que celui-ci est toujours en mesure de se déplacer en fauteuil roulant manuel de manière indépendante, c’est-à-dire sans l’aide d’un tiers ou d’un appareil de traction électrique. En effet, il a déclaré lors de l’audition de comparution personnelle du 25.02.2022 qu’il pouvait se déplacer sur une distance d’environ un kilomètre sans avoir trop de problèmes aux épaules. Son étude se trouvait à environ un kilomètre de son domicile, de sorte qu’il pouvait s’y rendre en fauteuil roulant manuel, et l’école de ses enfants était à la même distance, sans montée. Il peut ainsi rejoindre sans l’aide d’autrui ses principaux lieux de contacts sociaux et professionnels, notamment son étude, les commerces et l’école de ses enfants, qui sont tous situés dans ce périmètre d’un kilomètre. Pour aller aux endroits de contacts sociaux réguliers plus éloignés, il dispose d’une voiture adaptée à son handicap. Certes, la remise de l’appareil de traction électrique lui éviterait dix transferts douloureux par semaine du fauteuil roulant à la voiture et vice-versa (mais pas les autres transferts inévitables dans la vie quotidienne mentionnés par la cour cantonale). L’assuré soutient (dans son mémoire de réponse) que ce dispositif lui éviterait dix transferts par jour, mais il ne démontre pas en quoi les constatations de fait de la cour cantonale seraient incorrectes. Il allègue en outre pas pouvoir se déplacer seul sur une distance de plus d’un kilomètre, ce qui aurait pour conséquence qu’il ne pourrait notamment pas se rendre sur son lieu de travail, « qui se situe à une distance de deux kilomètres aller-retour ». Ce faisant, il se met toutefois en contradiction avec ses propres dépositions devant les premiers juges, selon lesquelles il peut se rendre à son étude en fauteuil roulant manuel. Au vu des conditions strictes que pose la jurisprudence à l’octroi d’un dispositif de propulsion électrique (voire d’un fauteuil roulant à moteur électrique), la possibilité d’éviter certains transferts ne saurait justifier d’assimiler la nécessité de ménager les épaules à une impossibilité de se déplacer de manière autonome en fauteuil roulant manuel.

Concernant l’argument selon lequel le dispositif à traction électrique serait la seule mesure adéquate pour permettre à l’assuré de surveiller ses enfants lors de leurs sorties à l’extérieur, et qu’il serait ainsi à même d’assumer ses responsabilités de père dans les lieux de contacts sociaux habituels que sont notamment les parcs, l’assurance-accidents soutient, à juste titre, que cet élément sécuritaire justifierait alors l’octroi d’un dispositif de traction électrique à tout parent dépendant d’un fauteuil roulant et ce indépendamment de toute paralysie ou autre infirmité des membres supérieurs; ce dispositif ne servirait ainsi pas pour compenser une perte de fonction des membres supérieurs.

Il ressort des considérations de la cour cantonale que la remise du dispositif à traction litigieux est certes une solution idéale pour la situation de l’assuré, car elle facilite son quotidien et lui offre un confort maximal. Toutefois, dans son cas particulier, le but légal poursuivi, c’est-à-dire compenser la perte de fonction des jambes et lui offrir une mobilité autonome, peut déjà être atteint de manière adéquate et suffisante avec un fauteuil manuel et un véhicule automobile adapté. Dès lors, l’octroi du dispositif à propulsion électrique est en contradiction avec le principe selon lequel l’assurance sociale n’a pas pour mission d’assurer les mesures qui sont les meilleures, mais seulement celles qui sont nécessaires et propres à atteindre le but visé (ATF 135 I 161 consid. 5.1), et est ainsi contraire au droit fédéral.

 

Consid. 5.1
L’assurance-accidents avait également refusé le moyen auxiliaire sollicité au motif qu’il n’existait pas de lien de causalité entre les troubles aux épaules et l’accident du 26.09.2006. Elle s’était fondée sur sa décision du 28.10.2019, dans laquelle elle avait refusé le droit aux prestations de l’assurance-accidents pour les troubles aux épaules faute de lien de causalité avec l’évènement accidentel. Cependant, la cour cantonale a laissé ouverte la question de la causalité, considérant qu’elle n’était pas décisive pour juger du droit à un dispositif de propulsion électrique, mais qu’était déterminante la seule question de savoir si le moyen auxiliaire servait à compenser un dommage corporel ou une perte de fonction due à l’accident, soit en l’espèce l’usage des jambes.

Consid. 5.2
Il sied de rappeler que, comme toute autre prestation de l’assurance-accidents, l’octroi d’un moyen auxiliaire présuppose (entre autres) l’existence d’un lien de causalité (naturelle et adéquate) entre l’atteinte à la santé et l’évènement accidentel (cf. ATF 129 V 177 consid. 3). Cela ne ressort pas seulement de l’art. 6 al. 1 LAA, mais également de l’art. 1 al. 1 OMAA, qui exige que les moyens auxiliaires doivent servir à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle (cf. ATF 146 V 129 consid. 5.6). Comme le recours doit être admis déjà pour les raisons exposées ci-dessus, il n’est toutefois pas nécessaire d’examiner plus avant la question du lien de causalité.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, annule le jugement cantonal et confirme la décision sur opposition.

 

 

Arrêt 8C_254/2022 consultable ici

 

8C_125/2022 (f) du 20.09.2022 – Droit au traitement médical après la fixation de la rente – 19 LAA – 21 LAA / Supports plantaires – Moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_125/2022 (f) du 20.09.2022

 

Consultable ici

 

Droit au traitement médical après la fixation de la rente / 19 LAA – 21 LAA

Supports plantaires – Moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction / OMAA

 

Assurée victime, le 05.10.2012, d’un accident de la circulation routière, au cours duquel elle a subi un polytraumatisme touchant notamment le rachis, les membres inférieurs ainsi que la cheville gauche.

Expertise médicale confiée à un spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, ayant rendu son rapport le 31.05.2019 ainsi qu’un rapport complémentaire le 08.08.2019.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a mis un terme au versement des indemnités journalières avec effet au 31.10.2019 ainsi qu’à la prise en charge des frais de traitement à la même date, sous réserve de l’art. 21 LAA, et a reconnu à l’assurée le droit à une rente d’invalidité transitoire fondée sur un taux de 35% ainsi qu’à une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 30%. Elle a relevé que selon les conclusions du médecin-expert, il n’y avait plus de traitement médical susceptible d’influencer la capacité de travail, si bien qu’un tel traitement était à la charge de l’assurance-maladie obligatoire.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 58/20 – 4/2022 – consultable ici)

Par jugement du 03.01.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
L’assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l’accident (art. 10 al. 1 LAA). Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente, soit lorsqu’il n’y a plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de santé de l’assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité ont été menées à terme (art. 19 al. 1 LAA). Le principe de la cessation de la prise en charge du traitement médical est toutefois relativisé par l’art. 21 al. 1 LAA, qui prévoit qu’au-delà de la fixation de la rente, le traitement médical est accordé à son bénéficiaire dans les cas énumérés aux lettres a à d, soit notamment lorsque le bénéficiaire a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (let. c).

Consid. 3.2
Les moyens auxiliaires peuvent faire partie d’un traitement médical (art. 10 let. e LAA) ou être destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction (art. 11 al. 1, 1re phrase, LAA). Ils apparaissent comme un complément du traitement médical selon l’art. 10 LAA (ATF 141 V 30 consid. 3.2.5 et les références citées). Toutefois, contrairement au traitement médical, les prestations prévues aux art. 11 à 13 LAA ne tombent pas sous le champ d’application de l’art. 19 al. 1 LAA; elles peuvent être allouées avant la fixation de la rente ou naître postérieurement à celle-ci, pour autant que les conditions énumérées de l’art. 21 al. 1 LAA soient remplies (ATF 143 V 148 consid. 5.2 et 5.3; arrêt 8C_776/2016 du 23 mai 2017 consid. 5.3 publié in SVR 2017 UV n° 42 p. 145).

Consid. 3.3
Pour les moyens auxiliaires qui sont destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction, le Conseil fédéral a été chargé d’établir une liste (art. 11 al. 1 LAA), ce qu’il a délégué au Département fédéral de l’intérieur (art. 19 OLAA). Ce département a édicté l’ordonnance du 18 octobre 1984 sur la remise de moyens auxiliaires par l’assurance-accidents (OMAA) avec, en annexe, la liste des moyens auxiliaires. Dans la catégorie des chaussures orthopédiques, l’annexe à l’OMAA comprend notamment des supports plantaires (ch. 4.03).

 

Consid. 4.2
L’assurée ne fait que proposer sa propre interprétation des conclusions du médecin-expert. On ne voit pas – et l’assurée n’explique pas – en quoi une activité essentiellement assise, avec déplacements occasionnels et port de charge occasionnel d’un maximum de 5 kilos, nécessiterait une bonne mobilité des pieds. Il sied en effet de relever que c’est précisément pour les troubles à la cheville et au pied gauches qu’une activité principalement assise, telle qu’une activité de bureau, a été considérée comme exigible à plein temps, avec une baisse de rendement de 30% en raison notamment de la gêne au déplacement, ce que l’assurée ne conteste pas. […] La cour cantonale n’est pas tombée dans l’arbitraire en considérant que l’état de santé de l’assurée avait été considéré comme stabilisé en été 2018, tous les médecins consultés s’entendant sur le fait qu’il n’existait pas, pour les différentes atteintes, de mesures médicales de nature à améliorer notablement l’état de santé de l’assurée. C’est aussi à bon droit que les juges cantonaux ont considéré, pour ce qui concernait la période postérieure à la fixation de la rente, que les mesures préconisées par le médecin-expert n’étaient pas propres à améliorer de manière notable la capacité de gain de l’assurée. En effet, bien que le médecin-expert ait indiqué qu’une péjoration future de la cheville gauche était à craindre (30% à 50% de probabilité une arthrose grave de la sustalienne nécessitant une prothèse de la cheville d’ici 20 à 30 ans), il n’a cependant fait état d’aucun traitement médical ni de soins dont l’assurée aurait besoin de manière durable et qui seraient susceptibles de conserver sa capacité résiduelle de gain.

Consid. 5.1
Dans un deuxième grief, l’assurée reproche à la cour cantonale d’avoir traité la question du chaussage adapté sous l’angle de traitement médical, alors qu’il s’agirait d’un moyen auxiliaire (art. 11 LAA) destiné à faciliter la marche. Par ailleurs, la constatation de la cour cantonale selon laquelle « (…) les supports plantaires devraient être envisagés d’ici dix à vingt ans, à raison d’une à deux paires par année » ne serait pas documentée et ne ressortirait pas du rapport d’expertise du 31.05.2019 ni de son complément du 08.08.2019.

Consid. 5.2
En l’espèce, les supports plantaires sont destinés à compenser un dommage corporel et constituent donc des moyens auxiliaires au sens de l’art. 11 LAA (cf. arrêt 8C_126/2017 du 5 septembre 2017 consid. 3 et 3.3.2). Si l’on peut donner acte à l’assurée que les juges cantonaux ont traité son droit à un chaussage adapté sous l’angle du traitement médical, force est de constater qu’ils se sont néanmoins fondés sur la bonne base légale, soit l’art. 21 al. 1 let. c LAA, qui s’applique tant au traitement médical (art. 10 LAA) qu’aux moyens auxiliaires (art. 11 LAA) après la fixation de la rente. Aussi, en se référant à l’avis complémentaire du médecin-expert, la juridiction cantonale a constaté sans arbitraire que, s’agissant du pied gauche, des supports plantaires devraient être envisagés d’ici dix à vingt ans, à raison d’une à deux paires par année, de sorte que de tels supports ne sauraient en l’état être pris en charge par l’assurance-accidents.

Par conséquent, l’arrêt attaqué ne viole pas le droit fédéral dans son résultat et doit être confirmé en tant qu’il nie, en l’état actuel, le droit de l’assurée à des supports plantaires.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_125/2022 consultable ici

 

8C_255/2021 (d) du 20.06.2022 – IPAI – Une greffe autologue (plastie du LCA) n’est pas un moyen auxiliaire / 24 LAA – Annexe 3 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_255/2021 (d) du 20.06.2022

(arrêt à 5 juges non destiné à la publication)

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

IPAI – Une greffe autologue (plastie du LCA) n’est pas un moyen auxiliaire / 24 LAA – Annexe 3 OLAA

 

Assuré, né en 1988, ouvrier du bâtiment, a chuté, le 14.12.2015, d’une palette d’une hauteur d’environ 1 mètre. IRM du 28.01.2016 : rupture complète du LCA du genou droit. Le 11.04.2016, l’assuré a bénéficiée d’une reconstruction du LCA. En septembre 2017 et en septembre 2018, l’assuré a subi deux nouvelles interventions chirurgicales.

Par décision du 09.10.2019, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a refusé le droit à la rente d’invalidité, faute d’une incapacité de gain d’au moins 10%, et nié tout droit à une IPAI.

 

Procédure cantonale (arrêt 725 20 222 / 262 – consultable ici)

Par jugement du 29.10.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5.1
Il convient enfin d’examiner les objections concernant l’indemnité pour atteinte à l’intégrité selon l’art. 24 al. 1 LAA en relation avec l’art. 36 OLAA. Le tribunal cantonal a considéré à ce sujet que, selon la jurisprudence, l’évaluation de l’atteinte à l’intégrité en cas d’implantation de prothèses ou d’endoprothèses doit reposer sur l’état de santé non corrigé (avec référence à l’arrêt 8C_600/2007 du 28 avril 2008 consid. 2.1.2). Or, aucune prothèse n’est posée lors d’une ligamentoplastie, mais le ligament croisé antérieur a été remplacé par un tendon autologue (greffe autologue). La pratique invoquée par l’assuré n’est donc pas applicable en l’espèce.

Consid. 5.2
L’assuré fait valoir, en se référant au ch. 1, al. 4, de l’annexe 3 de l’OLAA, que le législateur ne fait pas de distinction entre les endoprothèses et les greffes autologues, mais qu’il parle de manière générale des moyens auxiliaires qui peuvent compenser un état dû à un accident. Selon lui, il n’y a pas de raison objective et évidente pour qu’une greffe ne constitue pas un moyen auxiliaire selon l’intention du législateur. Au contraire, les endoprothèses et les greffes remplissent le même objectif, à savoir compenser un « état défectueux » [defekten Zustand]. Pour cette raison, il estime qu’une atteinte à l’intégrité d’au moins 5%, à évaluer ex ante, doit être reconnue et que c’est à tort que le médecin-conseil a examiné cette question sur la base de l’état postopératoire.

Consid. 5.3.1
Il convient d’approuver l’assuré dans la mesure où le législateur n’a pas défini dans l’annexe 3 de l’OLAA ce qu’il faut entendre par moyens auxiliaires dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire. Sa référence au consid. 2.1.2 de l’arrêt 8C_600/2007 du 28 avril 2008, également cité par le tribunal cantonal, n’est toutefois pas pertinente en l’espèce. Le Tribunal fédéral y a seulement reconnu qu’en cas de perte de l’usage ou d’incapacité d’un organe, il n’y a pas lieu d’opérer une distinction entre la correction à l’aide d’un moyen auxiliaire, d’une part, et la compensation par le biais d’une endoprothèse, d’autre part. Il n’y a de toute évidence rien à en tirer dans l’affaire litigieuse en l’espèce.

Consid. 5.3.2
UELI KIESER (Kommentar zum ATSG, 4e éd. 2020, N. 27 zu Art. 14) constate, en se référant à l’ATF 115 V 191 E. 2c, qu’est considéré comme moyen auxiliaire un objet dont l’utilisation permet de remplacer la défaillance de certaines parties ou fonctions du corps humain. En sont exclus les dispositifs qui ne peuvent remplir leur fonction de remplacement que s’ils sont d’abord introduits à l’intérieur du corps par une intervention chirurgicale et ne peuvent être remplacés que par la voie équivalente ; dans ce cas, il ne s’agit pas d’un moyen auxiliaire (cf. également MARTINA FILIPPO, Basler Kommentar, Unfallversicherungsgesetz, 2019, N. 13 zu Art. 11 UVG; sur la notion de moyen auxiliaire en général : ATF 141 V 9 E. 3.3). Dans l’ATF 115 V 191 précité, l’ancien Tribunal fédéral des assurances a reconnu, dans un cas relevant du droit de l’assurance-invalidité, qu’un implant cochléaire, contrairement à un appareil auditif, ne constituait pas un moyen auxiliaire. On peut donc en conclure que des tendons autologues servant à remédier à la lésion de la partie du corps concernée ne peuvent a priori pas constituer un moyen auxiliaire, comme l’a reconnu à juste titre la cour cantonale.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 8C_255/2021 consultable ici

 

 

Proposition de citation : 8C_255/2021 (d) du 20.06.2022, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2023/01/8c_255-2021)

 

Lettre circulaire AI no 416 – Réparations des fauteuils roulants : augmentation des montants maximaux autorisant des réparations sans demande de garantie de prise en charge

Lettre circulaire AI no 416 – Réparations des fauteuils roulants : augmentation des montants maximaux autorisant des réparations sans demande de garantie de prise en charge (valable à partir du 01.04.2022)

 

LCAI no 416 du 25.03.2022 consultable ici

 

La circulaire concernant la remise de moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité (CMAI) indique les montants maximaux à concurrence desquels les réparations sont possibles sans demande de garantie de prise en charge. Pour les fauteuils roulants manuels, une réparation peut être réalisée par le fournisseur de prestations sans demande de garantie de prise en charge si le montant n’excède pas 600 francs ; pour les fauteuils roulants électriques, ce montant maximal est de 1500 francs (ch. 2079 et 2084 CMAI). Avec cette règle, l’AI entend exercer un certain contrôle sur les réparations afin de pouvoir intervenir si une réparation n’est pas indiquée (par ex. lorsque le devis pour la réparation n’est pas correct ou lorsque la réparation ne s’avère pas économiquement intéressante).

Les montants susmentionnés comprennent la main d’œuvre, le matériel et les forfaits de déplacement. La pratique a montré que, dans la plupart des cas, les coûts des réparations sont supérieurs aux limites de 600 et 1500 francs. Cela est notamment dû au fait que le fauteuil roulant peut être réparé chez l’assuré ou qu’il doit être transporté dans l’atelier, et que les forfaits de déplacement sont alors facturés.

Étant donné que, comme susmentionné, la majeure partie des réparations dépassent les montants maximaux de 600 et 1500 francs, une demande de garantie de prise en charge est souvent nécessaire pour les réparations. Étant donné que les réparations doivent généralement être réalisées immédiatement et qu’une procédure de garantie de prise en charge peut durer plusieurs semaines au sein des offices AI, ce type de demande ne semble pas opportun dans la majeure partie des cas. Cela crée en outre des charges administratives disproportionnées pour les offices AI.

Après discussion avec la FSCMA et les associations Ortho Reha Suisse et Swiss Medtech, l’OFAS a donc décidé d’augmenter les montants maximaux, qui passeront à partir du 01.04.2022 à 900 francs pour les fauteuils manuels et à 1800 francs pour les fauteuils électriques. Cela devrait permettre que les réparations soient réalisées en temps utile et ne surchargent pas les offices AI, tout en laissant la possibilité à l’AI de continuer à exercer un contrôle adéquat sur les réparations et leurs coûts.

Les ch. 2079 et 2084 CMAI seront adaptés en conséquence pour le 01.01.2023.

 

 

LCAI no 416 du 25.03.2022 consultable ici

IV-Rundschreiben Nr. 416 : Rollstuhlreparaturen – Erhöhung der Beträge bis zu welchen Rollstuhlreparaturen ohne Kostengutsprachegesuch möglich sind (gültig ab 01.04.2022)

Lettera circolare AI n. 416 : Riparazioni di carrozzelle – Aumento degli importi massimi per le riparazioni che possono essere effettuate senza richiesta di garanzia di copertura delle spese (valida dal 01.04.2022)

 

 

9C_365/2021 (d) du 19.01.2022 – Moyens auxiliaires à l’âge AVS – Chaussures orthopédiques / Capacité à se tenir debout de façon autonome – Notion de déplacement

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_365/2021 (d) du 19.01.2022

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Moyens auxiliaires à l’âge AVS – Chaussures orthopédiques / 43quater LAVS – 66ter RAVS – OMAV

Capacité à se tenir debout de façon autonome – Notion de déplacement

 

Assurée, née le 07.12.1954, perçoit une rente vieillesse depuis janvier 2019. Le 31.07.2019, elle a demandé à l’office AI de prolonger la garantie de prise en charge des frais pour des chaussures orthopédiques sur mesure, en joignant un devis du 30.07.2019 d’un montant de CHF 5’513.15. Décision de refus de la caisse cantonale de compensation.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 28.04.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 43quater LAVS, le Conseil fédéral fixe les conditions auxquelles les bénéficiaires de rentes de vieillesse ou de prestations complémentaires qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse et qui ont besoin d’appareils coûteux pour se déplacer, établir des contacts avec leur entourage ou assurer leur indépendance ont droit à des moyens auxiliaires (al. 1). Il désigne les moyens auxiliaires que l’assurance remet et ceux pour lesquels elle alloue des contributions à titre de participation aux frais; il règle la remise de ces moyens auxiliaires ainsi que la procédure et détermine quelles dispositions de la LAI sont applicables (al. 3).

Consid. 3.2
Le Département fédéral de l’intérieur fixe les conditions du droit à la remise de moyens auxiliaires aux bénéficiaires d’une rente de vieillesse, prescrit le genre des moyens auxiliaires à re­mettre et règle la procédure de remise (art. 66ter al. 1 RAVS). Les art. 14bis et 14ter RAI sont applicables par analogie (al. 2).

Consid. 3.3
L’art. 2 al. 1 OMAV (concernant la remise de moyens auxiliaires par l’assurance‑vieillesse; RS 831.135.1) prévoit que les bénéficiaires d’une rente de vieillesse qui sont domiciliés en Suisse et ont besoin de moyens auxiliaires pour accomplir leurs travaux habituels, se déplacer, établir des contacts avec leur entourage ou développer leur autonomie personnelle, ont droit à des prestations de l’assurance, selon la liste annexée. Cette liste définit exhaustivement le genre et l’ampleur des prestations afférentes à chaque moyen auxiliaire.

Le ch. 4.51 de la liste des moyens auxiliaires annexée à l’OMAV, relatif aux chaussures orthopédiques sur mesure et chaussures orthopédiques de série, frais de fabrication inclus, mentionne la prise en charge pour autant qu’elles soient adaptées individuellement à une forme ou à une fonction pathologique du pied ou qu’elles remplacent un appareil orthopédique. La prestation de l’assurance peut être revendiquée au maximum tous les deux ans, à moins que des raisons médicales ne justifient un nouvel achat de chaussures orthopédiques sur mesure avant l’expiration de ce délai.

Consid. 3.4
Conformément à l’art. 4 OMAV, les bénéficiaires d’une rente de vieillesse domiciliés en Suisse qui bénéficient de moyens auxiliaires ou de contributions aux frais au sens des art. 21 et 21bis LAI au moment où ils peuvent prétendre une rente AVS, continuent d’avoir droit à ces prestations dans la même mesure, tant que les conditions qui présidaient à leur octroi sont remplies et autant que la présente ordonnance n’en dispose pas autrement. Pour le reste, les dispositions de l’assurance-invalidité relatives aux moyens auxiliaires sont applicables par analogie.

Consid. 4
Le tribunal cantonal a rejeté le recours de l’assurée au motif que les chaussures orthopédiques sur mesure ne servaient pas se déplacer, pas plus qu’à établir des contacts avec son entourage ou développer son autonomie personnelle. L’assurée ne serait plus capable de marcher et ne pourrait pas non plus marcher avec les chaussures orthopédiques sur mesure demandées. En outre, elle ne serait plus en mesure de se tenir debout toute seule. Elle ne peut pas effectuer elle-même les transferts depuis ou vers le fauteuil roulant électrique. Pour cela, elle a besoin de l’aide de deux soignants; l’un stabilise le « Eulenburg » et l’autre positionne les pieds. Un transfert effectué de cette manière par des tiers ne constitue pas un déplacement au sens de l’art. 43quater al. 1 LAVS ou de l’art. 21 al. 2 LAI.

Consid. 5
Il n’est pas contesté que l’assurée ne peut plus marcher seule, ni même faire quelques pas. Le tribunal cantonal a toutefois constaté de manière manifestement erronée qu’elle ne pouvait même plus se tenir debout seule. Les médecins de la clinique universitaire E.__ ont rapporté que des chaussures orthopédiques sur mesure permettraient de rétablir la capacité de se tenir debout pour le transfert entre le lit et le fauteuil roulant, capacité qui n’est plus donnée en raison de la déformation du pied, de l’instabilité qui en résulte et des douleurs.

La constatation de fait de l’instance cantonale, critiquée dans le recours, doit donc être corrigée en ce sens que l’assurée est en mesure de se tenir debout de manière autonome grâce aux chaussures orthopédiques sur mesure, même si ce n’est que pour une courte durée.

Consid. 6.1
Dans le cadre des listes annexées à l’OMAI et l’OMAV, il existe un droit à des moyens auxiliaires dans la mesure où ils sont nécessaires pour se déplacer, établir des contacts avec l’entourage ou développer l’autonomie personnelle. Cette condition est remplie si l’on ne peut exiger de la personne assurée qu’elle se déplace, reste en contact avec l’entourage ou prenne soin d’elle-même sans l’objet revendiqué et si la personne assurée a la volonté et la capacité d’atteindre l’un de ces buts à l’aide de l’objet revendiqué (arrêts 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 consid. 3.2 et 8C_531/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4.2, chacun avec référence au ATFA 1968 p. 2018 consid. 3d).

Consid. 6.3
L’arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 26 septembre 1984, publié dans RCC 1985 p. 168 ss, cité par l’assurée, se basait sur le cas d’un assuré qui avait demandé des attelles en matière synthétique (pour ménager son appareil de marche en métal et en cuir utilisé au quotidien). Celles-ci lui permettaient de se rendre de la douche à la piscine de manière autonome et lui permettaient ainsi de se déplacer, ce qui correspondait à l’objectif de l’art. 21 al. 2 LAI. Toutefois, étant donné que l’assurée ne peut plus marcher même avec les chaussures orthopédiques sur mesure et qu’elle n’est notamment pas en mesure de parcourir sans aide extérieure le court trajet entre le lit et le fauteuil roulant, il ne résulte rien en sa faveur de ce jugement.

Consid. 6.4
Le Tribunal fédéral a déjà eu à juger deux cas similaires à celui dont il s’agit ici (la similitude des faits n’apparaissant que si l’on se réfère aux décisions des instances inférieures sur lesquelles se fondent les arrêts du Tribunal fédéral correspondants). Ceux-ci ne concernaient certes pas des chaussures orthopédiques, mais des orthèses de jambe, mais les principes énoncés à l’époque sont valables pour les deux catégories de moyens auxiliaires.

Dans l’arrêt 8C_531/2009 du 23 octobre 2009, il s’agissait d’une assurée qui ne pouvait pas marcher elle-même avec les orthèses de la cuisse et de la jambe demandées comme moyens auxiliaires, mais qui pouvait se tenir debout. La capacité de se tenir debout, rétablie au moyen d’orthèses, a eu un effet positif sur la locomotion (selon les constatations de la décision cantonale à l’origine de l’affaire), notamment dans la mesure où l’assurée ne devait plus être soulevée pour passer du lit au fauteuil roulant. L’arrêt 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 s’est penché sur le cas d’un assuré pour lequel les orthèses de la jambe inférieure sollicitées n’entraînaient certes ni la capacité de marcher ni celle de se tenir debout, mais permettaient un positionnement stable des pieds déformés dans le fauteuil roulant (selon les constatations de la décision cantonale à l’origine de l’arrêt) et ne permettaient donc que la locomotion en fauteuil roulant ou la facilitaient considérablement.

Dans les deux cas, le Tribunal fédéral a nié le droit aux prestations. Il a motivé sa décision par le fait que les moyens auxiliaires demandés ne permettaient pas aux personnes assurées d’atteindre l’un des objectifs légaux. Il a ainsi rejeté la position défendue dans les décisions attaquées (fondée sur un passage non pertinent du message du 27 février 1967 relatif à la 1re révision de l’AI [FF 1967 I 653, 676 s.]). ), selon lequel il aurait suffi que le moyen auxiliaire apporte une certaine autonomie dans le cadre du transfert entre le lit et le fauteuil roulant (arrêt 8C_531/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4) ou qu’il permette ou facilite le déplacement en fauteuil roulant (arrêt 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 consid. 3).

Consid. 6.5
Les chaussures orthopédiques sur mesure demandées à titre de moyens auxiliaires permettent uniquement à l’assurée de se tenir debout sur une courte période, notamment pour le transfert entre le lit et le fauteuil roulant, qui doit être effectué par deux personnes auxiliaires. Ils confèrent certes à l’assurée une certaine autonomie ou lui permettent voire facilitent ses déplacements en fauteuil roulant ; en revanche elles ne lui permettent pas d’atteindre l’un des buts prévus par la loi. La situation n’est donc pas différente des deux arrêts cités.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_365/2021 consultable ici

 

 

Proposition de citation : 9C_365/2021 (d) du 19.01.2022, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2022/03/9c_365-2021)

AI : Revoir le remboursement de services fournis par des tiers

AI : Revoir le remboursement de services fournis par des tiers

 

Communiqué de presse du Parlement du 02.03.2022 consultable ici

 

Le remboursement de services fournis par des tiers à des personnes atteintes de handicap dans le cadre de leur travail devrait être modifié. Le Conseil des Etats a tacitement transmis mercredi une motion du National. L’idée est d’encourager l’intégration au marché du travail.

L’assurance invalidité (AI) aide les handicapés en leur garantissant des moyens auxiliaires. Certaines prestations sont fournies par des tiers. Par exemple, les sourds ont besoin des services d’interprètes en langue des signes, les malentendants, de retranscripteurs, les aveugles, de services de lecture à voix haute.

Aujourd’hui, la loi prévoit le remboursement mensuel d’au maximum une fois et demie le montant minimal de la rente ordinaire de vieillesse. Mais ce système empêche les personnes concernées de compenser les mois où elles travaillent plus avec les mois où elles travaillent moins.

Les contributions ne peuvent en effet pas être reportées au-delà du mois. Les personnes concernées doivent faire face à des restrictions dans leur travail quotidien, a déclaré Maya Graf (Vert-e-s/BL) au nom de la commission.

 

Décompte annuel

La motion propose donc de passer d’un système de décompte mensuel à un modèle annuel. Cela permettrait aux personnes de planifier elles-mêmes les moyens à leur disposition, de s’adapter aux aspects fluctuants du monde du travail et d’anticiper les variations de la charge de travail. « Cela renforcerait leur autonomie et leur indépendance », a-t-elle ajouté.

La modification proposée permettrait une utilisation plus efficace et plus ciblée des moyens existants, tout en garantissant une meilleure aide aux ayants droit.

Le ministre de la santé Alain Berset a rassuré: l’assouplissement demandé pourrait coûter jusqu’à 350’000 francs de plus. « Mais dans la réalité on peut s’attendre à des coûts supplémentaires bien inférieurs. »

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 02.03.2022 consultable ici

 

Motion Hurni 21.4036 « Chaussures orthopédiques pour personnes diabétiques. Stop au passage douloureux de l’Al à l’AVS! » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Motion Hurni 21.4036 « Chaussures orthopédiques pour personnes diabétiques. Stop au passage douloureux de l’Al à l’AVS! » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de modifier l’OMAV (RS 831.135.1) en ce sens qu’il est prévu la possibilité de recevoir au moins une paire de chaussures orthopédiques par année.

 

Développement

Les personnes diabétiques ayant besoin de chaussures orthopédiques après l’âge de la retraite sont soumises au régime des moyens auxiliaires de l’AVS. Alors qu’avec les moyens auxiliaires de l’AI, une paire de chaussure par an peut être obtenue sous déduction d’une franchise (Annexe OMAI), à l’AVS, seule une paire tous les deux ans est remboursée !

Cette disposition est extrêmement problématique, d’abord parce qu’il est nécessaire de disposer de chaussures différentes selon la saison, mais surtout, parce que lorsqu’on utilise qu’une paire de chaussures, il faut bien moins de deux ans pour les user… Ceci d’autant plus qu’il est justement souvent recommandé aux personnes diabétiques de marcher régulièrement.

Le texte de l’OMAV prévoit bien qu’il est possible d’obtenir une nouvelle paire avant le délai de deux ans, mais uniquement pour des raisons médicales. Or l’usure des chaussures ou leur inadéquation selon la saison n’entrent pas dans ce critère.

Cette inégalité de traitement entre AVS et AI implique donc pour des personnes diabétiques et à la retraite de ne pas pouvoir se faire rembourser des moyens auxiliaires dont ils ont pourtant besoin dans leur vie de tous les jours.

 

Proposition du Conseil fédéral du 17.11.2021

Le Conseil fédéral propose d’accepter la motion.

 

 

 

Motion Hurni 21.4036 « Chaussures orthopédiques pour personnes diabétiques. Stop au passage douloureux de l’Al à l’AVS! » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021 consultable ici

 

 

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de modifier les bases légales pertinentes de manière à ce qu’à l’avenir, les employeurs – et non seulement les employés – aient la possibilité de déposer auprès de l’AI une demande de moyens auxiliaires à utiliser sur le lieu de travail. Par analogie avec les cas de détection précoce au sens de l’art. 3b, al. 3, de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI), l’assuré devra être averti avant le dépôt de la demande.

 

Développement

Les moyens auxiliaires utilisés sur le lieu de travail sont énumérés au chiffre 13 et au chiffre 11.05 de l’annexe de l’ordonnance du DFI concernant la remise de moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité. Aujourd’hui, seuls les employés peuvent déposer une demande auprès de l’AI pour obtenir un moyen auxiliaire sur leur lieu de travail en lien avec leur handicap (par exemple, supports spéciaux pour la position debout ou modifications architectoniques). Cette limitation rend le traitement de la demande plus difficile pour toutes les parties concernées et entraîne des efforts de coordination inutiles. L’échange d’informations entre l’employeur et l’AI passe par l’employé alors qu’une communication directe serait souvent plus efficace et ciblée.

Comme il est parfois opportun que l’employé présente lui-même sa requête, cette option doit être conservée. La possibilité pour l’employeur de déposer lui aussi une requête est rationnelle et permet de réduire du même coup la charge de l’employé, qui a besoin de ses forces pour accomplir son travail. Dans tous les cas, l’employé doit être informé du dépôt d’une requête.

Pour les employeurs, l’application de la législation actuelle constitue souvent un obstacle. Le dépôt de la demande et une communication directs avec l’AI représenteraient un allégement, surtout si des modifications du lieu de travail sont nécessaires pour plusieurs employés. Le conseil axé sur la réadaptation prévu à l’art. 3a de la LAI révisée plaide également en faveur de l’extension aux employeurs du droit de déposer une demande. Selon la situation, le dialogue entre l’employeur et l’AI a déjà été engagé et le dépôt de la demande par l’employeur est la solution la plus rationnelle. Cette proposition a été élaborée par des personnes handicapées au sein d’un groupe de réflexion. L’extension aux employeurs du droit de déposer une demande peut apporter une contribution importante à l’intégration des personnes handicapées.

 

Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Les employeurs sont actuellement déjà très impliqués dans la demande de moyens auxiliaires adaptés à la situation des assurés sur leur lieu de travail. Cette participation se trouve encore renforcée dans le développement continu de l’AI. La nécessité de déposer une demande de moyen auxiliaire découle des limitations individuelles auxquelles sont confrontés les assurés. Ce sont en effet ces limitations qui déterminent la nature du moyen auxiliaire à mettre en place pour répondre de manière adéquate et efficace aux besoins de l’assuré et lui permettre de s’en servir.

C’est l’assuré qui peut se prévaloir d’un droit aux moyens auxiliaires. La décision de l’AI lui est adressée et il peut être amené à faire valoir ses droits dans une procédure judiciaire. Ces droits s’inscrivent dans la maxime d’office selon laquelle tout droit à des prestations doit faire l’objet d’un examen complet, une demande de moyens auxiliaires ne pouvant être traitée isolément.

Pour faire valoir leurs droits, les assurés sont appelés à présenter eux-mêmes à l’AI leurs demandes de prestations. En présentant lui-même sa demande, l’assuré autorise d’un point de vue légal l’office AI à utiliser des données personnelles particulièrement sensibles dans le but de vérifier son droit aux prestations. Certains types de moyens auxiliaires demandent une investigation poussée qui ne peut se faire sans une collaboration entre l’assuré, les médecins, les thérapeutes, les spécialistes de la rééducation et l’employeur. Ce n’est qu’après l’examen approfondi de la demande que le moyen auxiliaire peut être accordé à l’assuré, que ce soit en prêt ou en propriété. Le traitement d’une demande de moyen auxiliaire sur le lieu de travail sans la participation active de l’assuré et de l’employeur est voué à l’échec.

Autoriser un employeur à déposer une demande de prestation unilatéralement serait contraire à la liberté et à l’autodétermination de l’assuré lorsqu’il choisit de déposer une demande. Une telle procédure ne simplifierait en rien le travail administratif, du fait que la collaboration de l’assuré est essentielle à l’examen des prestations. Cependant, le Conseil fédéral comprend le besoin de simplifier le travail administratif en lien avec les demandes de moyens auxiliaires. L’OFAS est chargé d’évaluer les possibilités de simplification (adaptation du formulaire d’intervention précoce). Il n’est pas nécessaire de modifier le cadre légal.

 

Proposition du Conseil fédéral du 17.11.2021

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

 

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021 consultable ici

 

 

9C_594/2020 (f) du 15.09.2021 – Moyens auxiliaires – Frais d’entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire – 21 LAI – 14 RAI – 2 et 7 OMAI / Liste des thérapeutes agréés – Choix du personnel médical et des fournisseurs de moyens auxiliaires – Convention tarifaire / 26bis LAI – 27 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_594/2020 (f) du 15.09.2021

 

Consultable ici

 

Moyens auxiliaires / OMAI

Frais d’entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire / 21 LAI – 14 RAI – 2 et 7 OMAI

Liste des thérapeutes agréés – Choix du personnel médical et des fournisseurs de moyens auxiliaires – Convention tarifaire / 26bis LAI – 27 LAI

 

Assurée souffrant de surdité bilatérale congénitale, de troubles secondaires de l’expression orale et de troubles psychiques, au bénéficie d’une rente AI et de moyens auxiliaires, dont un implant cochléaire. Le 23.11.2017, elle a requis de l’office AI la prise en charge des frais d’entraînement auditif en lien avec son nouvel implant cochléaire. Elle a précisé que cet entraînement serait dispensé par la logopédiste B.__. Par décision, l’office AI a rejeté la requête dès lors que la logopédiste choisie n’apparaissait pas sur la liste des thérapeutes agréés par l’Association romande des enseignants en lecture labiale (ARELL).

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a considéré que l’office AI n’avait pas violé le droit fédéral en refusant de prendre en charge les coûts relatifs à un entraînement auditif auprès de la logopédiste B.__, au motif que son nom ne figurait pas sur la liste des spécialistes agréés par l’ARELL – avec laquelle l’OFAS avait conclu une Convention tarifaire concernant la rémunération individuelle des enseignants/tes en entraînement à la compréhension – même si l’art. 7 OMAI ne permettait pas expressément à l’OFAS de conclure une telle convention. Elle a aussi indiqué que la convention mentionnée rendait non seulement possible un entraînement auditif de qualité dispensé par des spécialistes ayant une formation spécifique, mais garantissait également une facturation uniforme et économiquement adéquate. Elle a encore précisé que des enseignants agréés par l’ARELL se trouvaient à Martigny et à Monthey.

Par jugement du 24.08.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Convention tarifaire avec les associations des professions médicales et paramédicales – 27 LAI

L’art. 27 al. 1 LAI autorise le Conseil fédéral à conclure des conventions, notamment, avec les associations des professions paramédicales (par exemple la logopédie) qui appliquent les mesures de réadaptation, afin de régler leur collaboration avec les organes de l’assurance et de fixer les tarifs. Le Conseil fédéral a délégué sa compétence à l’OFAS (art. 24 al. 2 RAI).

Or d’une part, les mesures de réadaptation comprennent l’octroi de moyens auxiliaires (art. 8 al. 3 let. d LAI). D’autre part, la prise en charge des frais résultant du besoin d’entraînement particulier pour utiliser un moyen auxiliaire est un droit accessoire au droit à un tel moyen. Le besoin d’entraînement implique forcément l’octroi d’un moyen auxiliaire. La personne qui dispense un tel entraînement – pour autant qu’elle satisfasse aux prescriptions cantonales visées par l’art. 26bis al. 1 LAI – est donc une personne qui « applique [une] mesure de réadaptation » au sens de l’art. 27 al. 1 LAI. Par conséquent, l’OFAS était en droit de conclure une convention tarifaire avec l’ARELL afin de fixer les tarifs des logopédistes désignés par elle et ainsi habilités à pratiquer un entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire.

On ajoutera que, dans la mesure où l’assurance-invalidité a toujours eu vocation à prendre en charge uniquement des moyens auxiliaires simples et adéquats (cf. Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi sur l’assurance-invalidité ainsi qu’à un projet de loi modifiant celle sur l’assurance-vieillesse et survivants du 24 octobre 1958, FF 1958 II 1289, 2e al. ad art. 21), ainsi qu’à garantir la compétence des fournisseurs de prestations (cf. Message du Conseil fédéral cité, FF 1958 1291, 4e al. ad art. 26), l’OFAS n’est pas sorti du cadre de la délégation de compétence ni n’a violé le droit fédéral (cf. arrêt 9C_177/2020 du 28 mai 2021 consid. 7.1 destiné à la publication) en concluant avec l’ARELL une convention visant à fixer des tarifs (art. 1) et à veiller à ce que les prestations soient fournies par du personnel spécialisé, qualifié et diplômé (art. 2).

 

Libre choix du personnel paramédical – 26bis LAI

Selon l’art. 26bis al. 1 LAI, un assuré peut choisir librement le personnel paramédical, les établissements et les ateliers ou encore les entreprises présentes sur le marché ordinaire du travail qui mettent en œuvre des mesures de réadaptation et les fournisseurs de moyens auxiliaires, pour autant qu’ils satisfassent aux prescriptions cantonales et aux exigences de l’assurance. Le fait que l’OFAS était en l’espèce en droit de conclure une convention tarifaire avec l’ARELL, conformément à l’art. 24 al. 2 RAI en relation avec l’art. 27 al. 1 LAI (cf. consid. 6.1 supra), n’a pas pour conséquence de restreindre cette liberté de choix mais seulement de limiter l’étendue de la prise en charge par l’assurance. L’art. 24 al. 3 RAI prévoit en effet à cet égard que pour les personnes et institutions qui appliquent des mesures de réadaptation sans avoir adhéré à une convention, les qualifications professionnelles fixées contractuellement valent comme exigences minimales de l’assurance au sens de l’art. 26bis al. 1 LAI et les tarifs établis par convention comme montants maximaux au sens des art. 21quater al. 1 let. c et 27 al. 3 LAI.

Il n’est dès lors pas impossible que l’assurée ait droit au remboursement des frais d’un entraînement dispensé par un enseignant non agréé par l’ARELL à concurrence du montant qu’elle aurait obtenu pour un prestataire figurant sur la liste de cette institution. Toutefois, comme ni l’administration ni les premiers juges ne se sont exprimés sur ce point, il convient d’annuler le jugement attaqué ainsi que la décision administrative litigieuse et de renvoyer la cause à l’office AI afin qu’il examine le cas sous l’angle évoqué et rende une nouvelle décision.

 

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assurée, annule le jugement cantonal et la décision litigieuse, renvoyant la cause à l’office AI pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 9C_594/2020 consultable ici