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4A_417/2023 (f) du 01.10.2024 – IJ maladie LCA – Personne assurée licenciée avant de tomber malade (pendant le délai de congé) – Preuve du dommage / 8 CC

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2023 (f) du 01.10.2024

 

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IJ maladie LCA – Personne assurée licenciée avant de tomber malade (pendant le délai de congé) – Preuve du dommage / 8 CC

Indemnités journalières calculées sur la base des indemnités de l’assurance-chômage et non sur l’ancien salaire

Le fait que l’employé ait été libéré de l’obligation de travailler n’exerce aucune influence sur le droit au salaire, respectivement aux indemnités journalières pendant la durée de sa maladie

Indemnité de départ, prévue contractuellement, couvre la perte de revenu résultant de la résiliation desdits rapports – Indemnité de départ prise en considération par la caisse de chômage et non par l’assurance perte de gain maladie

 

Assuré engagé le 01.06.2008 par la société C.__ SA. Son contrat de travail prévoyait qu’en cas de licenciement, l’employeuse verserait une indemnité unique correspondant à six mois de salaire de base.

L’employeuse a souscrit une assurance perte de gain collective auprès d’une compagnie d’assurances, effective dès le 01.01.2020. Cette assurance couvrait 90% du salaire assuré pendant 730 jours, après un délai d’attente de 60 jours, en cas d’incapacité de travail due à une maladie. Les CGA prévoient notamment qu’est réputée incapacité de travail toute perte de l’aptitude de l’assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d’une maladie.

Par courrier du 22.01.2021, l’employeuse a licencié l’assuré pour le 31.07.2021 et l’a libéré de son obligation de travailler.

En août 2021, l’employeuse a transmis à l’assureur une déclaration de maladie indiquant que l’assuré se trouvait en incapacité totale de travail depuis le 21.06.2021.

Le 07.09.2021, l’assureur a informé l’assuré qu’il le considérait apte à reprendre son activité chez un autre employeur et a clos le dossier. L’assuré a contesté cette décision. Il s’est inscrit au chômage le 07.11.2021.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/494/2023 – consultable ici)

Par arrêt du 26.06.2023, la cour cantonale a partiellement admis la demande, condamnant l’assureur à verser CHF 191’576.25 plus intérêts à l’assuré pour la période du 20.08.2021 au 31.01.2022. Se basant sur une expertise judiciaire, la cour a établi que l’assuré était en incapacité de travail totale jusqu’au 30.11.2021, puis à 50% du 01.12.2021 au 31.01.2022. La cour a retenu que l’assuré avait perçu son salaire jusqu’au 31.07.2021 et qu’il était toujours sous contrat de travail pendant la période litigieuse, durant laquelle il a subi une perte de gain due à son incapacité de travail. Les indemnités journalières ont été calculées sur la base de 90% de l’ancien salaire de l’assuré, soit CHF 565’287.85.

 

TF

Consid. 3
En l’espèce, il est établi et non contesté que l’employé a été licencié le 22.01.2021 pour le 31.07.2021 et libéré de l’obligation de travailler jusqu’à cette échéance; il a perçu une indemnité de départ équivalant à six mois de salaire.

Il s’est trouvé en incapacité totale de travailler dès le 21.06.2021. Selon l’expertise, cette incapacité s’est prolongée jusqu’au 31.01.2022, d’abord à 100% puis à 50%. Compte tenu du délai d’attente de 60 jours prévu par la police d’assurance, le droit aux prestations de l’assurance perte de gain ne pouvait débuter que le 20.08.2021, point de départ qui n’est pas contesté.

La cour cantonale a admis l’incapacité de travailler sur la base de l’expertise et, partant, la perte de gain de l’employé. Elle l’a calculée en se fondant sur un salaire annuel de CHF 565’287.85 (90% de ce montant, conformément aux CGA).

Consid. 6.1
S’agissant d’une assurance de dommages, conformément à l’art. 8 CC, la personne assurée doit établir au degré de la vraisemblance prépondérante que son incapacité de travailler pour cause de maladie lui a causé une perte de gain, c’est-à-dire un dommage. Autrement dit, elle doit établir avec vraisemblance prépondérante que si elle n’était pas malade, elle exercerait une activité lucrative. Cela implique donc de se poser, dans chaque cas d’espèce, la question suivante: le travailleur exercerait-il ou non une activité lucrative s’il n’était pas malade? Ce n’est en effet que dans l’affirmative que tant l’assurance d’indemnités journalières pour cause de maladie que l’assurance-chômage allouent des prestations.

Il ressort de la jurisprudence qu’il faut distinguer deux cas de figure, en fonction du moment auquel intervient la résiliation du contrat de travail (signification du congé) :

  • Si la personne assurée était déjà malade au moment où son contrat de travail a été résilié, après la période de protection contre les congés, il est présumé (présomption de fait) que, sans la maladie qui l’affecte, elle exercerait non seulement une activité lucrative, mais elle aurait continué à travailler pour son employeur, et donc à percevoir le même salaire pendant toute la durée de son incapacité de travail. Dans ce cas de figure, la perte de gain correspond à sa perte de salaire (ATF 147 III 73 consid. 3.2 et 3.3).
  • Si la personne assurée a été licenciée avant de tomber malade (pendant le délai de congé), elle doit établir avec une vraisemblance prépondérante qu’elle exercerait une activité lucrative si elle n’était pas malade, et qu’elle aurait eu droit aux indemnités de l’assurance-chômage. Dans ce cas de figure, il ne peut pas être présumé qu’elle percevrait le même salaire que précédemment et les indemnités journalières doivent être calculées sur la base des indemnités de l’assurance-chômage (ATF 147 III 73 consid. 3.3; cf. toutefois consid. 4 non publié de cet ATF s’agissant d’un nouvel emploi concret [ » konkret bezeichnete Stelle « ], avec des indications sur le nouveau salaire possible).

Lorsqu’elle est en incapacité de travail, la personne qui exercerait une activité lucrative si elle n’était pas malade n’est pas apte au travail et ne peut donc pas percevoir de prestations de l’assurance-chômage. En revanche, puisqu’elle est malade, elle a droit aux prestations de l’assurance-maladie collective, calculées sur la base des indemnités de l’assurance-chômage.

Consid. 6.2
Selon la cour cantonale, pour déterminer si l’assuré avait subi une perte de gain du 20.08.2021 au 31.01.2022, il convenait de définir s’il était encore lié par son contrat de travail avec son ancienne employeuse. Il avait été licencié le 22.01.2021 pour le 31.07.2021 et s’était retrouvé en incapacité de travail dès le 21.06.2021. Se fondant sur les dispositions légales applicables au contrat de travail, la cour cantonale a retenu que le terme des rapports de travail était reporté au 31.01.2022 au vu de la période de protection contre les congés dont bénéficiait l’assuré (art. 336c al. 1 let. b CO; art. 336c al. 2 et 3). Ce dernier avait subi une perte de gain du 20.08.2021 au 31.01.2022, puisqu’il n’avait reçu aucun revenu alors qu’il était encore sous contrat de travail et se trouvait en incapacité de travailler. La cour cantonale a ensuite calculé le montant des indemnités journalières sur la base de l’ancien salaire de l’assuré.

Consid. 6.3
En l’espèce, il est établi que la résiliation des rapports de travail a été communiquée par courrier du 22.01.2021, et que l’employé est tombé en incapacité de travailler le 21.06.2021, soit pendant le délai de congé. Au vu du délai d’attente de l’assurance de 60 jours, le droit aux prestations de l’assurance n’a commencé que le 20.08.2021. L’assureur ne conteste pas le report du terme des rapports de travail au 31.01.2022.

Ces faits réalisent les conditions du second cas de figure sus-exposé. Les prestations de l’assureur perte de gain doivent donc être calculées sur la base des indemnités de l’assurance-chômage. C’est ainsi à tort que la cour cantonale a tablé sur la fin des rapports de travail au 31.01.2022 pour admettre que l’employé a droit à des prestations de l’assureur perte de gain fondées sur son ancien salaire de CHF 565’287.85 pour la période du 20.08.2021 au 31.01.2022. En effet, puisque le contrat de travail a été résilié avant que l’employé ne tombe malade, il est évident que les rapports de travail n’auraient pas été poursuivis, même sans la maladie.

Dans sa réponse, l’assuré soutient que l’arrêt 4A_424/2020 – soit l’ATF 147 III 73 – dans lequel les indemnités perte de gain litigieuses ont été calculées sur la base des indemnités de l’assurance-chômage, concernait des prestations qui devaient être versées une fois que le travailleur ne pouvait plus prétendre à recevoir son salaire et émargeait à l’assurance-chômage. Selon l’assuré, il en allait différemment dans son cas, puisqu’il disposait d’un droit à recevoir son salaire jusqu’au 31.01.2022. L’assuré se méprend. L’ATF 147 III 73 concerne le même cas de figure que la présente affaire: les rapports de travail, débutés en 2008, ont été résiliés le 12.02.2018 pour le 31.08.2018; la personne assurée est devenue incapable de travailler dès le 27.07.2018. Les indemnités litigieuses ont été versées après le délai d’attente de 90 jours de l’assurance perte de gain dès l’incapacité de travail. Contrairement à ce qu’allègue l’assuré, elles n’ont pas été payées après que le contrat de travail ait pris fin; il omet le report du terme des rapports de travail dû à la période de protection contre les congés. Cet ATF ne lui est donc d’aucun secours.

Ainsi, il appartiendra à la cour cantonale de calculer le montant des indemnités journalières de l’assurance perte de gain pour la période du 20.08.2021 au 31.01.2022 en se fondant sur les indemnités de chômage auxquelles l’assuré aurait pu prétendre s’il n’avait pas été malade. Il incombera également à l’autorité précédente de statuer à nouveau sur les dépens de la procédure cantonale; elle n’a à juste titre pas perçu de frais judiciaires (cf. art. 114 let. e CPC).

 

Consid. 7.1.1
Sous le grief lié à l’incapacité de travail de l’assuré, l’assureur soutient que celle-ci ne devrait pas être appréciée par rapport à l’activité qu’il exerçait précédemment pour son employeur. Selon l’assureur, l’expertise est théorique puisqu’elle apprécie l’incapacité par rapport à une situation hypothétique, soit celle d’une activité de cadre supérieur d’une entreprise multinationale, alors que l’assuré n’exerce plus cette activité depuis qu’il a été libéré de son obligation de travailler. Elle se fonde sur le ch. D2 CGA, qu’elle rapproche de l’art. 6 LPGA (poste de travail habituel), et en déduit que depuis son licenciement, avec libération de l’obligation de travailler, l’assuré a eu une activité de recherche d’emploi, qu’il s’agit de son activité habituelle et que c’est sur cette base que devait s’apprécier sa capacité de travail. Il se plaint d’arbitraire et de violation des dispositions légales et contractuelles applicables.

Cette critique est infondée. La jurisprudence n’a jamais déduit du fait que l’employé a été libéré de l’obligation de travailler que désormais, sa capacité de travail devait être appréciée en fonction de sa recherche d’un emploi.

 

Consid. 7.2
L’assureur avance encore que, puisque l’assuré a été libéré de son obligation de travailler, il n’y avait pas de lien de causalité entre son incapacité de travail et l’éventuelle perte de gain, de sorte que l’assuré n’avait pas droit aux indemnités litigieuses.

Toutefois, le fait que l’employé ait été libéré de l’obligation de travailler n’exerce aucune influence sur le droit au salaire, respectivement aux indemnités journalières pendant la durée de sa maladie.

 

Consid. 7.4.1
A titre complémentaire, l’assureur soutient que l’assuré n’a de toute façon pas subi de perte de gain pour la période du 20.08.2021 au 31.01.2022, puisqu’il avait perçu une indemnité de départ équivalant à six mois de salaire. La volonté de l’assuré et de son ancienne employeuse était de considérer cette indemnité comme du salaire pour cette période, ce qu’avait également retenu la caisse de chômage. Dans ces conditions, les juges cantonaux ont constaté de manière arbitraire que l’assuré avait subi une perte économique du 20.08.2021 au 31.01.2022. Ils ne pouvaient pas reporter cette indemnité sur la période postérieure au 31.01.2022.

Consid. 7.4.2
La cour cantonale a relevé que l’indemnité de départ, prévue contractuellement, couvrait à la fin des rapports de travail la perte de revenu résultant de la résiliation desdits rapports, et non de l’incapacité de travail. Puisque le terme du délai de congé avait été reporté au 31.01.2022 en raison de l’incapacité de travail de l’assuré, l’indemnité de départ serait prise en considération par la caisse de chômage dès le 01.02.2022. Certes, il ressortait de la décision de la caisse de chômage qu’elle avait tenu compte de cette indemnité dès le mois d’août 2021; cependant, elle avait précisé que sa décision revêtait un caractère provisoire et pourrait être revue en cas de décision judiciaire tranchant différemment la question de la fin des rapports de travail. Partant, durant la période du 20.08.2021 au 31.01.2022, l’assuré, qui était alors sous contrat de travail, se trouvait en incapacité de travail et n’avait pas perçu de revenu, de sorte qu’il avait subi une perte de gain.

Consid. 7.4.3
L’assureur fait valoir que dans le cadre d’un litige aux prud’hommes, la volonté de l’assuré et de son ancienne employeuse était de considérer l’indemnité versée comme du salaire pour la période litigieuse, de sorte qu’il n’y avait aucune perte de gain. Ce faisant, l’assureur se fonde sur des éléments non constatés, sans requérir valablement un complètement de l’état de fait à cet égard. Cela n’est pas suffisant. Par ailleurs, contrairement à ce qu’il soutient, les juges cantonaux ont basé leur appréciation sur un élément concret. En effet, le contrat de travail prévoyait lui-même le versement d’une indemnité en cas de licenciement. Ainsi, cette indemnité aurait de toute évidence été payée même sans l’incapacité de travail de l’assuré et n’était donc pas en lien avec cette dernière. Pour le surplus, lorsque l’assureur allègue que la caisse de chômage avait elle-même retenu que l’assuré n’avait subi aucun dommage pour la période du 20.08.2021 au 31.01.2022, il ne discute pas valablement l’argumentation de la cour cantonale relative à la décision de la caisse de chômage.

En définitive, l’assureur ne parvient pas à démontrer que les juges cantonaux auraient retenu de manière arbitraire que l’indemnité de départ était destinée à couvrir une éventuelle perte de gain dès le 31.01.2022, et que l’assuré avait subi une perte économique du 20.08.2021 au 31.01.2022. Le grief doit donc être rejeté.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assureur, annule l’arrêt cantonal et renvoie la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision.

 

Arrêt 4A_417/2023 consultable ici

 

Arrêt du Tribunal administratif fédéral B-5886/2023 (d) du 05.07.2024 – Comparis est considéré comme un intermédiaire d’assurance

Arrêt du Tribunal administratif fédéral B-5886/2023 (d) du 05.07.2024

 

Communiqué de presse du TAF du 12.07.2024 consultable ici

Arrêt du Tribunal administratif fédéral B-5886/2023 consultable ici

 

Comparis est considéré comme un intermédiaire d’assurance

 

Le Tribunal administratif fédéral est parvenu à la conclusion que Comparis est un intermédiaire d’assurance en raison des prestations proposées.

En septembre 2023, l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) a constaté que comparis.ch SA devait être considérée comme un intermédiaire d’assurance et a ordonné à l’entreprise de déposer une demande d’inscription au registre des intermédiaires d’assurance non liés. En octobre 2023, Comparis a fait recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral (TAF).

 

Les conditions sont remplies

Le TAF constate que la recourante exploite le site comparis.ch depuis plus de 25 ans. Sur celui-ci, les utilisateurs peuvent notamment comparer des solutions d’assurance. En continuant à cliquer, ils peuvent ensuite commander une offre d’assurance directement auprès de la compagnie d’assurance concernée. Depuis le 1er juillet 2023, la commande d’offres se fait certes de manière formelle via la société sœur optimatis.ch. Le bouton pour la commande se trouve désormais sur une «zone visuellement séparée» d’Optimatis, mais toujours sur le site de Comparis. Les activités de ces deux sociétés sœurs sont économiquement dépendantes l’une de l’autre, car Optimatis n’est en mesure de proposer aux internautes de demander des offres d’assurance que si leur intérêt a été éveillé au préalable par le portail comparatif de Comparis. Ce n’est que si les internautes commandent les offres aux assurances via le lien d’Optimatis que les commissions des compagnies d’assurance sont dues. Or, du point de vue du groupe Comparis, ces commissions représentent une part importante du bénéfice de son activité commerciale. Le TAF en conclut que la FINMA a donc qualifié à raison Comparis comme intermédiaire d’assurance. Comme Comparis ne reconnaît pas ouvertement ses liens avec certaines compagnies d’assurance, mais donne l’impression de fournir ses prestations de manière neutre, elle est considérée comme un intermédiaire d’assurance non lié. En conséquence, le TAF rejette le recours de Comparis.

 

Cet arrêt est susceptible de recours au Tribunal fédéral.

 

Communiqué de presse du TAF du 12.07.2024 consultable ici

Arrêt du Tribunal administratif fédéral B-5886/2023 consultable ici

 

4A_169/2023 (f) du 31.01.2024, destiné à la publication – Assurance complémentaire LCA d’un capital en cas d’invalidité – Notion d’assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale au sens de l’art. 7 CPC

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_169/2023 (f) du 31.01.2024, destiné à la publication

 

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Assurance complémentaire LCA d’un capital en cas d’invalidité – Notion d’assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale au sens de l’art. 7 CPC

Compétence ratione materiae de la Cour cantonale des assurances sociales

 

L’assuré a souscrit auprès de B.__ SA (ci-après: la société d’assurance) une « assurance d’un capital en cas d’invalidité ou décès par suite d’accident » (ci-après: l’assurance), qui indique que le risque assuré est celui de l’accident. L’assurance prévoit le versement d’un capital de 5’000 fr. en cas de décès et de 100’000 fr. en cas d’invalidité, ce montant-ci pouvant être augmenté en application des conditions particulières de l’assurance.

Dans la nuit du 25.07.2020 au 26.07.2020, l’assuré a subi un accident. Par décision du 12.02.2022, l’assurance-accidents a octroyé à l’assuré une rente d’invalidité et, en application des art. 24 et 25 LAA, une IPAI de 103’740 francs.

 

Procédure cantonale

Le 24.11.2022, l’assuré a ouvert une action en paiement auprès de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal à l’encontre de la société d’assurance, concluant au versement d’un montant de 350’000 fr., intérêts en sus.

Par jugement du 16.02.2023, la Cour des assurances sociales a déclaré l’action irrecevable. La cour cantonale a jugé que l’assurance litigieuse ne pouvait être qualifiée d’assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale au sens de l’art. 7 CPC, de sorte qu’elle n’était pas compétente ratione materiae. En substance, la cour cantonale a retenu que le capital assuré en cas d’invalidité, soit 100’000 fr., excédait les limites de l’art. 14 de l’ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal) et que le versement d’un capital invalidité n’était plus prévu par l’art. 1 let. a de l’ordonnance sur la surveillance de l’assurance-maladie sociale (OSAMal). En outre, ledit capital servait à couvrir non pas une perte de salaire due à une incapacité de travail pour cause de maladie, à l’instar des indemnités journalières prévues par la loi fédérale sur le contrat d’assurance (LCA) et qui sont complémentaires à l’assurance-maladie sociale, mais une incapacité de gain durable.

 

TF

Consid. 1
En tant qu’elle s’est déclarée incompétente ratione materiae, la cour cantonale a mis fin à la procédure devant elle. Contrairement à ce que soutient l’assuré, il ne s’agit donc pas d’une décision incidente portant sur la compétence (art. 92 LTF), mais d’une décision finale (art. 90 LTF; cf. arrêt 4A_275/2021 du 11 janvier 2022 consid. 2.1, non publié in ATF 148 III 172).

Dans la mesure où la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton du Valais a rendu la décision attaquée en qualité d’instance cantonale unique au sens de l’art. 7 CPC (art. 5 al. 1 let. a de la loi du canton du Valais du 11 février 2009 d’application du code de procédure civile suisse [LACPC/VS; RS/VS 270.1]; cf. art. 75 al. 2 let. a LTF et ATF 138 III 799 consid. 1.1), le présent recours est ouvert sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). […]

 

Consid. 3.3
C’est à tort que la cour cantonale et l’assuré ont fait référence aux « autres branches d’assurance » au sens de l’art. 14 aOAMal et de l’art. 1 let. a OSAMal, dans la mesure où ces dispositions se réfèrent à l’actuel art. 2 al. 2 de la loi fédérale sur la surveillance de l’assurance-maladie sociale (LSAMal), qui ne vise que les caisses-maladie. Ce faisant, ils perdent en effet de vue qu’une assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale peut être conclue tant avec une caisse-maladie qu’avec une entreprise d’assurance privée (cf. infra consid. 4.2).

 

Consid. 4
Est litigieuse la compétence ratione materiae de la cour cantonale au regard de l’art. 7 CPC pour connaître du litige portant sur l’assurance complémentaire d’un capital en cas d’invalidité ou décès par suite d’accident, soumise à la LCA.

Consid. 4.1
Selon l’art. 7 CPC, les cantons peuvent instituer un tribunal qui statue en tant qu’instance cantonale unique sur les litiges portant sur les assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale selon la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal).

Cette disposition a été introduite sur proposition des Chambres fédérales pour permettre aux cantons de déroger au double degré de juridiction qu’impose l’art. 75 LTF (cf. art. 75 al. 2 let. a LTF) et de conserver l’instance cantonale unique à laquelle ils étaient habitués et à laquelle étaient soumis les litiges relatifs tant à l’assurance-maladie sociale elle-même que ceux relatifs aux assurances complémentaires à celle-ci. Comme les litiges en matière d’assurance-maladie sociale ne sont, de par la loi, pas soumis à l’exigence d’un double degré de juridiction, les cantons devaient pouvoir prévoir qu’un tribunal unique puisse examiner aussi les litiges relatifs à l’assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale. Cela devait permettre aussi au même tribunal de statuer sur ces deux types d’assurances (BO 2007 CE 500-501 et 644).

L’initiative parlementaire 13.441 déposée le 21 juin 2013 par Mauro Poggia, qui visait à également soumettre à un tribunal unique les litiges relevant de l’assurance complémentaire à l’assurance-accidents obligatoire, a été classée. Ces litiges ne sont donc pas soumis à l’art. 7 CPC (PATRICIA DIETSCHY-MARTENET, in Petit commentaire, Code de procédure civile, 2021, no 7 ad art. 7 CPC).

Selon la jurisprudence, si le canton a fait usage du choix que lui offre l’art. 7 CPC, il doit soumettre tous les litiges portant sur les assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale à un tribunal unique (ATF 138 III 558 consid. 3.1). Le tribunal unique appliquera la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) à la partie assurance-maladie sociale et la LCA à la partie assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale. C’est le recours en matière civile au Tribunal qui est ouvert contre la partie assurance complémentaire, sans égard à la valeur litigieuse (ATF 138 III 799 consid. 1.1, 2 consid. 1.2.2).

Consid. 4.2
Il découle du but visé par l’art. 7 CPC, à savoir de déroger au double degré de juridiction prévu par l’art. 75 LTF, que cette disposition doit être interprétée de manière restrictive.

Pour satisfaire au critère de la complémentarité à l’assurance-maladie sociale que l’art. 7 CPC exige, il faut que l’assurance soit complémentaire à la LAMal par les risques couverts et par les prestations qu’elle offre. Autrement dit, il faut, premièrement, que l’assurance complémentaire litigieuse couvre des risques prévus par la LAMal, c’est-à-dire la maladie, l’accident ou la maternité (ces trois risques étant visés par l’art. 1a al. 2 LAMal) et, secondement, que les prestations litigieuses soient destinées à compléter, c’est-à-dire à améliorer, les prestations de base prévues par la LAMal, à l’exclusion des prestations prévues par d’autres lois sociales (dans ce sens, arrêt 4A_12/2016 du 23 mai 2017 consid. 1.2; KATHARINA ANNA ZIMMERMANN, Zusatzversicherungen zur sozialen Krankenversicherung, 2022, p. 48 n. 89; HANS-JAKOB MOSIMANN, in Schweizerische Zivilprozessordnung, Brunner et al. [édit.], vol. I, 2e éd. 2016, no 2 ad art. 7 CPC et les références citées; DIETSCHY-MARTENET, op. cit., no 4 ad art. 7 CPC et les références citées; HAAS/SCHLUMPF, in Kurzkommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3e éd. 2021, no 5 ad art. 7 CPC). N’est en revanche pas déterminante la question de savoir si l’assureur est une caisse-maladie ou une entreprise d’assurance privée (ATF 141 III 479 consid. 2.1; DIETSCHY-MARTENET, op. cit., no 3 ad art. 7 CPC; HAAS/SCHLUMPF, loc. cit.).

Il en découle que si le risque assuré n’est pas l’un ou plusieurs des trois risques susmentionnés, l’art. 7 CPC n’est pas applicable. Cette disposition n’est pas non plus applicable si les prestations offertes ne complètent pas le catalogue de prestations de la LAMal, par exemple si les prestations sont destinées à améliorer les prestations de la LAA.

Consid. 4.3
En l’espèce, il faut donc examiner, dans une première étape, si le risque assuré par l’assurance litigieuse est l’un ou plusieurs des trois risques couverts par la LAMal, puis, si tel est le cas, déterminer, dans une seconde étape, si les prestations de l’assurance litigieuse viennent compléter celles de la LAMal ou d’une autre assurance.

Il n’est pas contesté que l’assurance litigieuse couvre le risque d’accident, de sorte que la condition exigée dans la première étape est remplie.

Il convient donc de déterminer si la prestation de l’assurance litigieuse, soit le versement d’un capital de 100’000 fr. en cas d’invalidité suite à un accident, vient compléter les prestations de la LAMal ou d’une autre assurance, par exemple la LAA. Comme l’admet lui-même l’assuré, dite prestation peut être qualifiée de complément à l’indemnité pour atteinte à l’intégrité au sens des art. 24 et 25 LAA. En l’occurrence, elle viendrait s’ajouter au montant en capital déjà octroyé à ce titre à l’assuré par l’assurance-accidents par décision du 12.02.2022. Force est donc de constater que la prestation litigieuse vient compléter le catalogue de prestations de la LAA et, donc, qu’elle ne constitue pas une assurance complémentaire à l’assurance-maladie sociale au sens de l’art. 7 CPC (cf. ZIMMERMANN, op. cit., p. 113 n. 222).

Dès lors, l’art. 7 CPC n’est pas applicable en l’espèce et c’est à bon droit que la cour cantonale s’est déclarée incompétente ratione materiae.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 4A_169/2023 consultable ici

 

4A_477/2022 (f) du 06.02.2024 – Tarif des traitements stationnaires – Assurance complémentaire d’hospitalisation – Interprétation des CGA

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_477/2022 (f) du 06.02.2024

 

Consultable ici

 

Tarif des traitements stationnaires – Assurance complémentaire d’hospitalisation – Interprétation des CGA

Fixation par l’assureur des tarifs maximaux lorsqu’il ne reconnaît pas les tarifs d’une division hospitalière et des honoraires médicaux stationnaires privés

 

L’assurée bénéficie d’une couverture d’assurance maladie obligatoire (LAMal) ainsi que de trois couvertures d’assurances complémentaires (LCA) auprès d’une caisse-maladie (ci-après: l’assureur), dont l’une couvre les prestations d’hospitalisation en division « mi-privée » avec libre choix du médecin et de l’hôpital (ci-après: l’assurance-hospitalisation).

Par courrier du 03.12.2018, l’assureur a fait savoir à l’Association D.__ que les tarifs pratiqués par bon nombre de ses médecins adhérents pour les traitements stationnaires qu’ils prodiguaient à charge de l’assurance complémentaire d’hospitalisation étaient excessifs; il avait tenté de négocier avec l’Association D.__ pour instaurer des tarifs dans le cadre de cette assurance; au vu de l’échec de ces négociations, il en était réduit à faire figurer la « facturation stationnaire » des médecins hospitaliers du canton de Genève (pour les interventions semi-privées et privées effectuées dans les cliniques privées du canton) sur la liste des hôpitaux sans couverture intégrale des frais pour les assurances-hospitalisation. En conséquence, à compter du 01.01.2019, les « prestations LCA » des médecins (salariés ou agréés) pratiquant en division semi-privée et privée dans les cliniques privées du canton pourraient seulement être remboursées à hauteur des tarifs et règles qu’un autre assureur (E.__ SA) avait conclu avec l’Association D.__ (ci-après : la convention D.__-E.__) avec effet au 01.01.2018. En cas de traitement dans l’un des établissements concernés, l’assureur ne pourrait donc pas garantir la prise en charge intégrale des coûts.

L’assurée ayant appris dans le courant du mois d’octobre 2018 qu’elle était enceinte, elle a pris contact avec l’établissement Clinique F.__ SA (ci-après: la clinique) en vue de son accouchement. De son côté, la clinique a fait parvenir à l’assureur, le 28.02.2019, une demande de garantie de paiement en division semi-privée, en prévision du terme qui était prévu le 07.06.2019.

Par pli du 17.05.2019, l’assureur a informé la clinique, avec copie à l’assurée et à son médecin-traitant, qu’il accordait la garantie de paiement demandée avec la restriction suivante: la convention D.__-E.__ servirait de référence tarifaire.

Par courrier séparé du 17.05.2019 à l’assurée, l’assureur s’est dit au regret de lui signaler qu’il se pouvait qu’une partie des coûts de son futur séjour hospitalier ne soit pas couverte : malgré les démarches entreprises, l’assureur n’avait pas été en mesure de trouver un accord avec les médecins de la clinique. Aussi a-t-il recommandé à l’assurée de demander à tous ses médecins traitants de confirmer préalablement par écrit qu’ils respecteraient la convention D.__-E.__. A défaut, il se pouvait qu’elle doive faire face à des coûts non couverts. Des documents étaient joints pour signature par lesdits médecins.

Le 29.05.2019, l’assurée a écrit à l’assureur pour lui faire part de sa surprise de découvrir, à trois semaines du terme prévu de sa grossesse, les restrictions tarifaires évoquées. L’assureur lui a alors répondu qu’il ne pouvait aller au-delà des tarifs en cause, par égard pour l’ensemble des assurés soumis aux mêmes restrictions.

Le 14.06.2019, l’assurée a accouché à la clinique, où elle a séjourné jusqu’au 20.06.2019. Sur l’ensemble des factures remboursées par l’assureur, il subsiste une différence de 1’222 fr. que l’assurée a réglée elle-même.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/776/2022 – consultable ici)

Par jugement du 06.09.2022, rejet de la demande par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 4.1
Les dispositions contractuelles et les conditions générales d’assurance expressément incorporées au contrat doivent être interprétées selon les mêmes principes juridiques (ATF 142 III 671 consid. 3.3; 135 III 1 consid. 2, 410 consid. 3.2; 133 III 675 consid. 3.3).

En présence d’un litige sur l’interprétation d’une clause contractuelle, le juge doit tout d’abord s’efforcer de déterminer la réelle et commune intention des parties, sans s’arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO); s’il y parvient, il s’agit d’une constatation de fait qui lie en principe le Tribunal fédéral conformément à l’art. 105 LTF.

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si leurs volontés intimes divergent, le juge doit interpréter les déclarations faites et les comportements selon la théorie de la confiance; il recherchera ainsi comment une déclaration ou une attitude pouvait et devait être comprise de bonne foi en fonction de l’ensemble des circonstances (ATF 142 III 671 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2; 138 III 29 consid. 2.2.3). L’application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal peut examiner librement (art. 106 al. 1 LTF); cependant, pour trancher cette question, il doit se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, dont la constatation relève du fait (ATF 135 III 410 consid. 3.2).

Consid. 4.2
Lorsque l’assureur, au moment de conclure le contrat, présente des conditions générales, il manifeste la volonté de s’engager selon les termes de ces conditions; si une volonté réelle concordante n’a pas été constatée, il faut donc se demander comment le destinataire de cette manifestation de volonté pouvait la comprendre de bonne foi. Cela conduit à une interprétation objective des termes contenus dans les conditions générales, même si elle ne correspond pas à la volonté intime de l’assureur (cf. ATF 136 III 186 consid. 3.2.1; 135 III 295 consid. 5.2).

Si l’interprétation selon le principe de la confiance ne permet pas de dégager le sens de clauses ambiguës, celles-ci sont à interpréter contre l’assureur qui les a rédigées, en vertu de la règle « in dubio contra stipulatorem » (ATF 133 III 61 consid. 2.2.2.3; 126 V 499 consid. 3b; 124 III 155 consid. 1b; 122 III 118 consid. 2a; 119 II 368 consid. 4b). L’art. 33 LCA, en tant qu’il prévoit que les clauses d’exclusion sont opposables à l’assuré uniquement si elles sont rédigées de façon précise et non équivoque, est une concrétisation de ce principe (ATF 115 II 264 consid. 5a; arrêt 5C.134/2002 du 17 septembre 2002 consid. 3.1). Conformément au principe de la confiance, c’est en effet à l’assureur qu’il incombe de délimiter la portée de l’engagement qu’il entend prendre et le preneur n’a pas à supposer des restrictions qui ne lui ont pas été clairement présentées (ATF 133 III 675 consid. 3.3; sous une forme résumée: ATF 135 III 410 consid. 3.2). Pour que cette règle trouve à s’appliquer, il ne suffit pas que les parties soient en litige sur la signification à donner à une déclaration; encore faut-il que celle-ci puisse de bonne foi être comprise de différentes façons (« zweideutig ») et qu’il soit impossible de lever autrement le doute créé, faute d’autres moyens d’interprétation (ATF 122 III 118 consid. 2d; 118 II 342 consid. 1a; 100 II 144 consid. 4c).

Consid. 4.3
De surcroît, la validité d’une clause contenue dans des conditions générales préformulées est limitée par la règle dite de la clause insolite (ATF 135 III 1 consid. 2.1), laquelle soustrait de l’adhésion censée donnée globalement à des conditions générales, toutes les clauses insolites sur lesquelles l’attention de la partie la plus faible ou la moins expérimentée en affaires n’a pas été spécialement attirée (sur la notion de clause insolite : ATF 138 III 411 consid. 3.1; 135 III 1 consid. 2.1, 225 consid. 1.3). En particulier, la règle de la clause insolite peut trouver application lorsque la clause a pour effet de réduire drastiquement la couverture d’assurance de telle sorte que les risques les plus fréquents ne sont plus couverts (arrêt 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.3 et les références).

 

Consid. 5
La cour cantonale a bâti son raisonnement sur ce canevas.

L’art. 4.6 CCA 2010 était rédigé comme suit: « Lorsqu’un hôpital ne connaît aucun critère de classification pour les divisions hospitalières ou en applique d’autres que ceux mentionnés ci-dessus ou lorsque les tarifs d’une division ne sont pas reconnus par l’assureur, il s’agit alors d’une division privée. L’assureur peut fixer des tarifs maximaux, considérés comme critère pour le classement des divisions assurées. L’assureur tient une liste des hôpitaux qui ne disposent d’aucune division privée, mi-privée ou commune au sens des présentes dispositions. Cette liste est constamment mise à jour et peut être consultée auprès de l’assureur ou un extrait peut en être demandé. ».

Le Tribunal fédéral s’était déjà penché sur le sens de cette disposition contractuelle dans une affaire opposant l’assureur à un autre assuré (cf. arrêt 4A_578/2019 du 16 avril 2020 consid. 4.4 à 4.6.3). Procédant à une interprétation objective, il avait jugé qu’elle constituait un droit formateur contractuellement réservé permettant à l’assureur de fixer des tarifs maximaux s’il ne reconnaissait pas les tarifs d’une division hospitalière.

Contrairement à ce que l’assurée professait, cet article ne visait pas exclusivement les frais de séjour hospitaliers, mais également les honoraires médicaux stationnaires privés (frais de traitement prodigués par les médecins salariés ou agréés par la clinique). Tel était le résultat d’une interprétation selon le principe de la confiance. Il fallait en effet lire l’art. 4.6 CCA 2010 en parallèle de l’art. 36.1 CGA 2007 selon lequel « les honoraires convenus entre l’assuré et le fournisseur de prestations n’engagent pas l’assureur. L’assureur ne s’engage à verser des prestations que dans le cadre des tarifs qu’il reconnaît » et l’art. 7.1 CCA 2010 aux termes duquel « si et aussi longtemps que les conditions relatives à l’octroi des prestations sont remplies, les prestations couvrent tous les frais de séjour et de traitement scientifiquement reconnus, dans un hôpital de soins aigus, ainsi que les frais de traitement des médecins en fonction de l’assurance convenue (division commune, mi-privée ou privée) et selon le tarif reconnu par l’assureur ».

Cette clause n’avait rien d’insolite. Un raisonnement a maiore ad minus fondé sur un arrêt du Tribunal fédéral relatif à une clause plus incisive, puisqu’elle prévoyait que les prestations ne seraient versées qu’en cas de séjour dans un hôpital avec lequel une convention tarifaire avait été conclue (ATF 133 III 607), le mettait en lumière. Par ailleurs, dans le cadre des assurances complémentaires, les restrictions à la couverture d’assurance étaient courantes. L’art. 4.6 CCA 2010 s’inscrivait bien dans cette ligne.

Enfin, cette clause n’était pas contraire au principe de la bonne foi. L’assureur avait averti l’assurée le 17.05.2019 qu’il entendait fixer un plafond correspondant aux tarifs figurant dans la convention D.__-E.__, dans le cadre du séjour que l’assurée entendait faire à la clinique; la garantie de paiement en vue de cette hospitalisation serait octroyée dans la limite de ces tarifs. A quoi s’ajoutait que la convention D.__-E.__ liait une association importante du corps médical local à un acteur majeur de l’assurance-maladie en Suisse; les limites tarifaires prévues dans ce document avaient dès lors une certaine représentativité. Finalement, il existait une différence assez faible entre les frais facturés et ceux pris en charge par l’assureur. Et s’il importait à l’assurée d’être intégralement remboursée, son choix aurait pu se porter sur un autre établissement, dont les tarifs en division semi-privée étaient reconnus par l’assureur.

Pour tous ces motifs, la demande en paiement se révélait mal fondée.

 

Consid. 6
L’assurée décoche une série de griefs à l’encontre de cette analyse.

Consid. 6.1
En premier lieu, le tarif médical privé pratiqué par ses médecins constituerait, à l’en croire, un « tarif privé usuel » au sens de l’art. 36 al. 2 CGA 2007 lequel dispose : « L’assureur reconnaît les tarifs acceptés par les assurances sociales suisses et les tarifs privés usuels. Les dispositions des Conditions complémentaires d’assurance qui diffèrent de celles-ci demeurent réservées ».

L’assurée ne prétend toutefois avoir allégué quoi que ce soit dans ses écritures à ce sujet, elle ne se réfère à aucun élément de preuve au dossier corroborant son affirmation et l’arrêt attaqué est muet sur cette thématique. Même si le présent différend est régi par la maxime inquisitoire sociale, l’assurée était tenue de soumettre au tribunal la trame factuelle sur laquelle le jugement devait porter. Elle n’affirme pas l’avoir fait sur le point qui l’occupe. Certes, elle soutient que la différence « assez faible » entre les prestations remboursées et celles demeurant à sa charge en serait la démonstration éloquente. Cela étant, cette différence ne lui a pas paru si minime lorsqu’elle a formé recours. Pour finir, l’art. 36 al. 1 CGA 2007 réserve expressément les dispositions contraires des CCA et l’art. 4.6 CCA compte parmi celles-ci. Partant, le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.

 

Consid. 6.2
L’assurée fait valoir que l’adaptation du contrat d’assurance aurait nécessité une information préalable, laquelle lui aurait ouvert le droit de résilier ledit contrat pour la prochaine échéance. Elle laisse toutefois le lecteur dans l’expectative sur les conséquences à en tirer, de sorte que cette ébauche de grief s’avère irrecevable.

 

Consid. 6.4
Dans un grief subsidiaire, l’assurée fait valoir que l’interprétation de l’article querellé selon le principe de la confiance mènerait à un tout autre résultat que celui auquel ont abouti les juges cantonaux.

Sa vision restrictive de l’art. 4.6 CCA 2010 ne convainc toutefois pas. L’art. 36.1 CGA 2007 ainsi que l’art. 7.1 CCA 2010 apportent un éclairage suffisamment révélateur : l’assurée ne pouvait comprendre en toute bonne foi, si elle lisait ces dispositions en parallèle, que seuls les frais de séjour hospitaliers – à l’exclusion des frais de traitement des médecins salariés ou agréés par l’hôpital en cause – étaient susceptibles d’être plafonnés par un tarif. Il ne s’agit pas de deux domaines complètement distincts et l’assureur ne les a pas disséqués de la sorte dans les conditions d’assurance. Certes, pour répondre à un autre argument de l’assurée, l’assureur eût pu être encore plus explicite dans les termes utilisés. Ceci ne change toutefois rien à la rectitude de l’analyse opérée par les juges cantonaux, dans la droite ligne de l’arrêt 4A_578/2019 déjà cité lequel, n’en déplaise à l’assurée, portait non seulement sur des frais de séjour à l’hôpital mais aussi sur des prestations médicales supplémentaires non-couvertes par l’assurance obligatoire.

Consid. 6.5
Dans un baroud d’honneur, l’assurée estime qu’une semblable restriction, larvée dans une clause ambiguë, aurait dû lui être clairement présentée. Elle semble vouloir tirer avantage du principe in dubio contra stipulatorem qui ne trouve pourtant pas vocation à s’appliquer puisque les juges cantonaux ont dégagé le sens de la clause querellée en faisant appel au principe de la confiance. Cet ultime grief doit donc être rejeté, tout comme les précédents.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

Arrêt 4A_477/2022 consultable ici

 

Procédure de consultation : Notification d’actes le week-end et les jours fériés par courrier A Plus : le délai commencera à courir plus tard

Procédure de consultation : Notification d’actes le week-end et les jours fériés par courrier A Plus : le délai commencera à courir plus tard

 

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 14.02.2024 consultable ici

 

La distribution d’envois postaux déclenchant des délais un samedi ne doit pas être source d’inconvénients juridiques pour les destinataires. Le Conseil fédéral propose une nouvelle règle applicable à l’ensemble du droit fédéral pour les communications assorties de délais qui sont remises le week-end. Celles-ci ne seront réputées notifiées que le premier jour ouvrable qui suit. Lors de sa séance du 14 février 2024, le Conseil fédéral a ouvert la consultation sur un avant-projet mettant en œuvre la motion 22.3381 « De l’harmonisation de la computation des délais » de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N).

Depuis quelque temps, la Poste suisse propose des envois par courrier A Plus, dont la traçabilité est assurée y compris le samedi. Le destinataire n’a pas à en accuser réception et peut en subir des désavantages lorsqu’il s’agit de communications dont la notification déclenche un délai légal, telles que les résiliations, les décisions des autorités ou les jugements. Actuellement, le délai commence à courir le lendemain de la notification, en l’occurrence le dimanche. Il est donc déjà en cours si le destinataire ne sort la communication de sa boîte aux lettres que le lundi parce qu’il est absent le week-end. Il a donc d’autant moins de temps pour réagir dans le délai imparti. De plus, il ne sait pas si la communication a été remise le lundi ou le samedi puisque cette information ne figure pas sur l’envoi. Il risque de manquer le délai s’il se trompe sur la date de fin, et de perdre ses droits.

Lors de la révision récemment achevée du code de procédure civile (CPC), le Parlement a trouvé une solution à ce problème pour le domaine de la procédure civile. Une fiction de notification s’appliquera : une communication remise un samedi, un dimanche ou un jour férié ne sera réputée notifiée que le premier jour ouvrable qui suit. Les destinataires disposeront donc d’un jour ouvrable au moins pour en prendre connaissance avant que le délai ne commence à courir.

 

Extension de la fiction de notification à tous les délais du droit fédéral

La motion 22.3381 « De l’harmonisation de la computation des délais » de la CAJ-N charge le Conseil fédéral d’appliquer la solution trouvée dans le CPC à toutes les autres lois fédérales comportant des règles de computation des délais, afin de garantir que les mêmes règles s’appliquent à l’ensemble du droit fédéral.

Le Conseil fédéral poursuit deux approches simultanées pour mettre en œuvre la motion. Il complète d’une part les lois fédérales comportant des règles de computation des délais par une disposition analogue à celle inscrite dans le CPC. Les lois concernées sont la loi sur la procédure administrative (PA), la loi sur le Tribunal fédéral (LTF), le code pénal militaire (CPM), le code de procédure pénale militaire (PPM), la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct (LIFD) et la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA). Le code de procédure pénale (CPP) ne subit pas de modification dans la mesure où il prescrit la notification contre accusé de réception.

D’autre part, le Conseil fédéral inscrit une disposition subsidiaire dans la loi fédérale sur la supputation des délais comprenant un samedi, de manière à couvrir les lois fédérales qui comportent des délais, mais aucune règle de computation. Cette disposition s’appliquera notamment aux délais du droit matériel privé, par exemple aux délais de résiliation.

La consultation prendra fin le 24 mai 2024.

 

 

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 14.02.2024 consultable ici

Loi fédérale sur les notifications d’actes le week-end et les jours fériés – Rapport explicatif relatif à l’ouverture de la procédure de consultation, disponible ici

Avant-projet de la Loi fédérale sur les notifications d’actes le week-end et les jours fériés consultable ici

Tableau synoptique présentant les modifications prévues par rapport au droit en vigueur disponible ici

 

Notificazioni nei fine settimana e nei giorni festivi con posta A-Plus: il termine inizia a decorrere più tardi, comunicato stampa del Consiglio federale, 14.02.2024, disponibile qui

 

Zustellung an Wochenenden und Feiertagen mit « A-Post Plus »: Frist soll später beginnen, Medienmitteilung des Bundesrats, 14.02.2024, hier abrufbar

 

4A_271/2023 (d) du 14.11.2023 – Indemnités journalières maladie LCA / Notion d’incapacité de travail – Question de droit – Interprétation des CGA

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_271/2023 (d) du 14.11.2023

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle, seul l’arrêt fait foi

 

Indemnités journalières maladie LCA

Notion d’incapacité de travail – Question de droit – Interprétation des CGA

Caractéristique essentielle ou importante de l’activité professionnelle habituelle

 

Assuré, chef d’équipe CNC né en 1957, employé par C.__ SA. Déclaration de sinistre le 13.02.2019, annonçant une incapacité de travail depuis le 23.01.2019. Par lettre du 17.10.2019, l’employeur a résilié le contrat de travail avec l’assuré pour le 31.01.2020.

Sur la base du rapport du Dr D.__, l’assurance perte de gain maladie a informé l’assuré le 02.10.2019 qu’il était dès à présent apte à travailler à 100% à un autre poste. Elle a toutefois accepté de continuer à verser l’indemnité journalière à 100% jusqu’au 31.10.2019 et, après cette date, les indemnités journalières seraient versées en fonction de son incapacité de travail. Par courriel du 21.10.2019, l’assuré a fait part de son désaccord et a remis des rapports médicaux à l’assurance. Le 06.12.2019, l’assurance a informé l’intéressé que les documents médicaux remis se rapportaient au poste actuel et a rappelé que l’assuré disposait d’une pleine capacité de travail dans un autre poste. En guise de geste commercial, l’assurance a informé qu’elle continuerait à verser les indemnités journalières jusqu’au 31.01.2020 et qu’elle ne verserait plus d’indemnités journalières après cette date.

Le 19.06.2020, le médecin du SMR a estimé que l’assuré présentait une capacité de travail de 50 à 70%, tout en recommandant, en raison du déconditionnement probable entre-temps et dans l’optique d’une réinsertion professionnelle durable, de débuter avec un taux d’occupation de 50%.

Par courriel du 29.09.2020, l’assuré a demandé à l’assurance de continuer à verser l’indemnité journalière à 100% avec effet rétroactif. Par courrier du 23.10.2020, l’assurance l’a informé que, sur la base de l’évaluation du médecin du SMR, elle verserait l’indemnité journalière du 01.02.2020 au 18.06. 2020 sur la base d’une incapacité de travail de 100% et, à partir du 19.06.2020, sur la base d’une incapacité de travail de 50%. L’assurance a ensuite versé l’indemnité journalière jusqu’à l’épuisement du droit aux prestations (05.03.2021) sur la base d’une incapacité de travail de 50%.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 95/14 – 85/2015 – consultable ici)

L’instance cantonale a considéré que l’assurance avait à juste titre considéré que l’assuré avait une capacité de travail de 50% pour la période déterminante. Cette capacité de travail attestée s’applique ensuite à l’activité habituelle de l’intéressé. Dans ce contexte, elle a constaté qu’une activité adaptée supposait si possible de ne pas travailler de nuit, que les horaires de travail soient réguliers, que l’employeur soit bienveillant et compréhensif et que le lieu de travail soit calme. L’activité ne devait pas non plus, du moins au début, comporter de tâches de direction. Il ressort du questionnaire rempli par l’employeur le 25.07.2019 que l’activité de l’assuré consistait à diriger des collaborateurs (34 à 66%, soit 3 à 5,25 heures par jour), parfois à programmer et à effectuer des travaux de bureau (6 à 33% chacun, soit 0,5 à 3 heures par jour) et rarement à travailler à la machine CNC (1 à 5%, soit jusqu’à environ 0,5 heure par jour). Ces indications d’activités comportaient une marge de manœuvre relativement importante en termes de temps, de sorte qu’il n’était pas possible de déterminer avec précision l’étendue des tâches de direction et de gestion qui n’étaient pas possibles du point de vue psychiatrique. Toutefois, la cour cantonale est partie du postulat que l’assuré aurait pu exercer son activité habituelle ou une activité comparable à sa profession habituelle à un taux d’occupation de 50% depuis le 19.06.2020.

Par jugement du 19.04.2023, le tribunal cantonal a rejeté la demande de l’assuré.

 

TF

Consid. 3.1
Le 1er janvier 2022, la loi révisée sur le contrat d’assurance est entrée en vigueur. Conformément à la disposition transitoire de l’art. 103a LCA, les dispositions suivantes du nouveau droit s’appliquent aux contrats qui ont été conclus avant l’entrée en vigueur de la modification du 19 juin 2020 : les prescriptions en matière de forme (let. a) ; le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b (let. b). Toutes les autres dispositions ne s’appliquent qu’aux contrats nouvellement conclus (cf. message relatif à la modification de la loi sur le contrat d’assurance du 28 juin 2017, FF 2017 5089 ss, 5136 [en français : FF 2017 4767, 4812]). Le contrat d’assurance à l’origine du présent litige a été conclu avant le 19 juin 2020. A l’exception des prescriptions de forme et du droit de résiliation, les dispositions de la LCA dans sa version en vigueur jusqu’à fin 2021 (ci-après aLCA) sont donc applicables. A l’exception de l’art. 87 aLCA, qui norme le droit de créance du bénéficiaire dans l’assurance-accidents ou maladie collective, l’aLCA ne contient pas de dispositions spécifiques concernant les indemnités journalières en cas de maladie. Ce sont donc en premier lieu les conventions contractuelles qui sont déterminantes.

Consid. 3.2
Si l’assuré est en incapacité de travail après constatation médicale, l’assurance paie, conformément à l’art. B8 ch. 1 f. CGA, l’indemnité journalière est versée à l’expiration du délai d’attente convenu, au plus tard pendant la durée des prestations mentionnée dans la police. En cas d’incapacité de travail totale, l’assurance l’indemnité journalière mentionnée dans la police. En cas d’incapacité de travail partielle, le montant est déterminé en fonction de l’étendue de l’incapacité de travail. L’incapacité de travail est déterminée selon l’art. A4, ch. 2 CGA : l’incapacité totale ou partielle, due à une maladie, d’accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui. En cas d’incapacité de longue durée, l’activité raisonnablement exigible dans une autre profession ou un autre domaine de tâches est également prise en compte.

Consid. 4.3.1
L’assuré se plaint d’une application erronée de l’art. A4 ch. 2 CGA par l’instance cantonale. Selon lui, celui qui, pour des raisons de santé, ne peut plus exercer qu’une partie secondaire des activités nécessaires à son ancienne profession est totalement incapable de travailler dans celle-ci. Ainsi, un cuisinier qui, pour des raisons de santé, ne peut plus travailler en cuisine, mais qui est encore en mesure de passer des commandes de denrées alimentaires à l’ordinateur, doit être considéré comme totalement incapable de travailler dans son ancienne profession de cuisinier, tout comme un chef d’équipe CNC qui ne peut plus assumer de tâches de direction. L’assuré fait donc valoir en substance que l’instance cantonale s’est fondée sur une notion erronée de l’incapacité de travail dans l’ancienne profession. Alors que l’état de santé de l’assuré, la liste des tâches de l’ancienne profession ainsi que la détermination des activités professionnelles qui ne peuvent plus être exercées en raison de l’état de santé constituent des constatations de fait, la notion d’incapacité de travail constitue une notion juridique qui peut être librement examinée par le Tribunal fédéral (ULRICH MEYER – BLASER, Der Rechtsbegriff der Arbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, namentlich für den Einkommensvergleichung in der Invaliditätsbemessung, in : Schaffhauser/Schlauri [Hrsg. ], Schmerz und Arbeitsunfähigkeit, 2003, p. 47 ss ; cf. aussi ATF 140 V 193 consid. 3.1). En conséquence, il convient de définir ci-après la notion d’incapacité de travail selon l’art. A4 ch. 2 CGA.

Consid. 4.3.2
Les CGA sont des conditions générales, donc des dispositions contractuelles, qui ont été préformulées de manière générale en vue de la conclusion future d’un grand nombre de contrats (ATF 148 III 57 consid. 2). Lorsqu’elles sont valablement intégrées dans des contrats, les conditions générales doivent en principe être interprétées selon les mêmes principes que les clauses contractuelles rédigées individuellement (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 et les références ; 142 III 671 consid. 3.3 et les références). Ce qui est donc déterminant, c’est en premier lieu la volonté réelle et commune des parties contractantes et, en second lieu, si une telle volonté ne peut être établie, l’interprétation des déclarations des parties sur la base du principe de la confiance (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 ; 142 III 671 consid. 3.3). Pour ce faire, il convient de partir du texte des déclarations, qui ne doivent toutefois pas être appréciées isolément, mais en fonction de leur sens concret (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 ; 146 V 28 consid. 3.2). Même si le texte semble clair à première vue, il ne faut donc pas s’en tenir à une interprétation purement littérale (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 ; 131 III 606 consid. 4.2). Les déclarations des parties doivent au contraire être interprétées de la manière dont elles pouvaient et devaient être comprises en fonction de leur teneur et de leur contexte ainsi que de l’ensemble des circonstances. Le juge doit prendre en considération le but réglementaire de la disposition contractuelle poursuivi par le déclarant, tel que le destinataire de la déclaration pouvait et devait le comprendre de bonne foi (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 ; 146 V 28 consid. 3.2). Par conséquent, ce qui est déterminant pour l’interprétation d’une disposition contractuelle rédigée par une partie contractante, c’est le but réglementaire que l’autre partie contractante pouvait et devait raisonnablement reconnaître dans la clause considérée en tant que partie contractante de bonne foi. En principe, il faut présumer que le destinataire de la déclaration peut supposer que le déclarant vise une règle raisonnable et appropriée (ATF 148 III 57 consid. 2.2.1, avec références). L’examen d’une interprétation objective des déclarations de volonté est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement, alors qu’il est en principe lié par les constatations de l’autorité cantonale concernant les circonstances extérieures ainsi que la connaissance et la volonté des parties (art. 105 al. 1 LTF ; ATF 148 III 57 consid. 2.2.1 ; 146 V 28 consid. 3.2).

Consid. 4.3.3
Selon l’art. A4 ch. 2 CGA, l’incapacité de travail est définie comme l’incapacité totale ou partielle, due à une maladie, d’accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui. Il résulte du libellé de l’art. A4 ch. 2 CGA que le travailleur est partiellement apte à travailler tant que ses capacités restantes lui permettent d’accomplir un travail exigible dans sa profession actuelle. Il en découle en même temps que la seule incapacité du travailleur, due à la maladie, d’exercer une fonction déterminée (même si elle est essentielle) dans son ancienne profession ne conduit en principe pas à une incapacité de travail totale. Il en serait autrement si, en raison de la maladie, une caractéristique essentielle ou importante (« zwingende bzw. dominierende Eigenschaft ») pour l’exercice de la profession devenait impossible à tel point que la capacité de travail restante dans l’ancienne profession ne serait pas économiquement exploitable ou ne pourrait être raisonnablement exigée. Une capacité de travail résiduelle économiquement exploitable dans l’activité exercée jusqu’alors exclut ainsi, en règle générale, le droit à la totalité de l’indemnité journalière assurée (cf. ATF 114 V 281 consid. 3d). Le but de l’assurance d’indemnités journalières conclue plaide également en faveur d’une telle interprétation. Ainsi, une assurance d’indemnités journalières sert de revenu de substitution et ne remplace l’obligation de l’employeur de continuer à verser le salaire que dans la mesure et aussi longtemps que le travailleur n’est pas en mesure, pour des raisons de santé, de remplir tout ou partie de ses obligations contractuelles ou d’exercer une autre activité lucrative. Elle n’est toutefois pas destinée à compenser la perte de salaire d’un bénéficiaire qui pourrait à nouveau obtenir un revenu d’une activité lucrative (arrêt 9C_595/2008 du 5 novembre 2008 consid. 4.1).

On ne peut donc pas suivre l’assuré dans la mesure où il fait valoir qu’il est totalement incapable de travailler dans sa profession habituelle parce qu’il ne peut pas assumer de tâches de direction. Ainsi, dans son recours, il ne démontre pas suffisamment en quoi l’exercice de tâches de direction constitue une caractéristique essentielle de son activité professionnelle au point que la capacité de travail restante dans son ancienne profession n’aurait pas été économiquement exploitable ou n’aurait pas été exigible.

Le Tribunal fédéral confirme la conclusion de l’instance cantonale selon laquelle l’assuré avait une capacité de travail de 50% durant la période déterminante.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 4A_271/2023 consultable ici

 

Proposition de citation : 4A_271/2023 (d) du 14.11.2023, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2024/02/4a_271-2023)

 

Articles et ouvrages – Sélection novembre 2023

Voici une sélection (personnelle et subjective) des divers articles, contributions et ouvrages parus récemment :

 

  • Christoph Müller, avec la collaboration de Mathieu Singer, La responsabilité́ civile extracontractuelle, 2e éd., 2023

 

  • Patrick Stoudmann, Le divorce en pratique : entretien du conjoint et des enfants, partage de la prévoyance professionnelle, 2e éd., 2023

 

  • Laura Kunz/Pia Meier, Das Arbeits(un)fähigkeitszeugnis : Tour d’Horizon durch die verschiedenen Erscheinungsformen im Arbeits-, Privatversicherungs- und Sozialversicherungsrecht: rechtliche Grundlagen und aktuelle Kontroversen, in Jusletter, 13. November 2023

 

  • Kurt Pärli/Nic Frei, Konflikt, Krankheit, Kündigung – wenn es kracht am Arbeitsplatz : Fallkonstellationen und aktuelle Rechtsprechung, in Jusletter, 13. November 2023

 

  • Manon Schneider/Gaëtan Corthay, PPE et responsabilité civile : la lacune de protection du propriétaire d’étage et les moyens de la combler, in PPE 2023, p. 183-233

 

  • Grégory Bovey, Le pouvoir d’appréciation du juge en matière de responsabilité du propriétaire d’immeuble à la lumière d’exemples choisis, in Le juge apprécie, 2023, p. 29-44

 

  • Christine Chappuis, La perle, le tribunal et la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits, in Le juge apprécie, 2023, p. 45-59

 

  • Anne-Sylvie Dupont, Le prêt sur gage et la protection sociale, in Le juge apprécie, 2023, p. 61-69

 

  • Thierry Tanquerel, Le juge administratif n’apprécie pas, in Le juge apprécie, 2023, p. 315-332

 

  • Luc Thévenoz/Célian Hirsch, Le pouvoir du juge d’apprécier le dommage d’investissement (art. 42 al. 2 CO) in Le juge apprécie, 2023, p. 333-343

 

  • Anne-Sylvie Dupont, La «pantomime des gueux» : de la cour des miracles à la Cour des assurances sociales, in Le droit au service de l’humanité, 2023, p. 147-155

 

  • Michael Biot, Droit de participation des employés au choix de l’institution de prévoyance selon l’art. 11 LPP : étendue, modalités de mise en œuvre et conséquences en cas de non-respect de la loi, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 111-130

 

  • Jean-Philippe Dunand, De l’esclave Stichus au chauffeur Uber : six modalités du lien de subordination dans les relations de travail, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 209-254

 

  • Sandrine Kreiner, Le télétravail des frontaliers: quel impact sur l’imposition du revenu et l’assujettissement aux assurances sociales?, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 347-371

 

  • Gautier Lang, Droit au congé de paternité sous l’angle de l’art 329g CO; filiation reconnue à l’étranger et autres situations particulières, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 373-401

 

  • Sandeep Pai, « Incapacité » de travail : impossibilité ou confort?, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 509-539

 

  • Stéphanie Perrenoud, Allocations parentales : actualités et perspectives du régime des allocations pour perte de gain, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 541-566

 

  • Guylaine Riondel Besson, Le détachement des travailleurs dans les relations franco-suisses au sens de la sécurité sociale et du droit du travail, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 663-681

 

  • Sara Rousselle-Ruffieux/Paul Michel, L’indemnisation de la perte de gain maladie à la fin des rapports de travail, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 683-709

 

  • David Ternande, Coordination des indemnités de chômage avec les indemnités journalières des autres assureurs sociaux et privés, in Panorama IV en droit du travail, 2023, p. 751-770

 

  • Gerd-Marko Ostendorf, Long-/Post-COVID : Probleme in der Begutachtung für die Privatversicherung, in Der medizinische Sachverständige, Jahrgang 119 (2023), Nummer 3, p. 116-121

 

  • Marco Weiss, Strafbestimmungen des AHVG, in Forum poenale, 16. Jahrgang (2023), Heft 3, p. 198-204

 

  • Davide Keller, Il certificato medico e le conseguenze penali di una scorretta certificazione, in Forum poenale, 16. Jahrgang (2023), Heft 5, p. 357-362

 

  • Marco Weiss, Strafbarkeit von versicherungsexternen medizinischen Gutachtern, in Forum poenale, 16. Jahrgang (2023), Heft 5, p. 363-367

 

  • Bernhard König, Die Haftung der Pistenhalter nach « Pistenschluss », in Zeitschrift für Verkehrsrecht, Jahrgang 68(2023), Heft 11, p. 423-425

 

  • Tiago Gomes, La subrogation de l’assureur social dans un contexte international, in Annuaire SDRCA 2022, p. 33-59

 

  • Muriel Vautier, Le calcul du dommage lorsque la victime est domiciliée à l’étranger, in Annuaire SDRCA 2022, p. 61-118

 

  • Ulrike Mönnich, Versicherungsaufsichtsrechtliche Risiken beim cross-border business, in Annuaire SDRCA 2022, p. 119-153

 

  • Guy Longchamp, Exigibilité des prestations de prévoyance professionnelle : questions choisies, in Annuaire SDRCA 2022, p. 215-228

 

  • Jacques Haldy, La révision en procédure civile, in Res iudicata – e poi?, Commissione ticinese per la formazione permanente dei giuristi, 2023, p. 3-16

 

  • Etienne Poltier, La modification des décisions administratives, in Res iudicata – e poi?, Commissione ticinese per la formazione permanente dei giuristi, 2023, p. 43-65

 

  • Andreas Zünd/Marco Savoldelli, La revisione di sentenze del Tribunale federale, in Res iudicata – e poi?, Commissione ticinese per la formazione permanente dei giuristi, 2023, p. 67-90

 

  • Francesco Parrino, Strumenti per correggere una decisione nell’ambito delle assicurazioni soziali : esempi tratti dalla recente giurisprudenza del Tribunale federale in Res iudicata – e poi?, Commissione ticinese per la formazione permanente dei giuristi, 2023, p. 115-145

 

  • Simon Gasser/Frédéric Lazeyras, Le remboursement des cotisations AVS en cas de départ de Suisse, Expert fiduciaire, Volume 30(2023), numéro 5, p. 300-304

 

 

Rachats ultérieurs dans le pilier 3a

Rachats ultérieurs dans le pilier 3a

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 22.11.2023 consultable ici

 

Il sera bientôt possible de combler des lacunes de cotisations dans le pilier 3a par des rachats ultérieurs. Cette mesure concerne les personnes qui, certaines années, n’ont pas pu effectuer de versement dans leur pilier 3a ou qui n’ont pu faire que des versements partiels. Lors de sa séance du 22 novembre 2023, le Conseil fédéral a mis en consultation une modification correspondante de l’ordonnance sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance (OPP 3). Cette consultation dure jusqu’au 6 mars 2024.

L’introduction de nouvelles dispositions permettra de procéder à des rachats dans le pilier 3a. Le Conseil fédéral répond ainsi à la demande formulée dans la motion 19.3702 du conseiller aux États Erich Ettlin, «Autoriser les rachats dans le pilier 3a». Les lacunes de cotisations apparues après l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions pourront dès lors être comblées par des rachats ultérieurs. De cette manière, les personnes n’ayant pas pu effectuer certains versements dans leur pilier 3a ou n’ayant pu faire que des versements partiels pourront combler leurs lacunes de cotisations pour les dix années précédentes par des rachats ultérieurs donnant droit à une déduction fiscale. Cette mesure doit permettre de renforcer la prévoyance individuelle du pilier 3a.

Sont autorisés les rachats annuels dans le pilier 3a d’un montant équivalent à la «petite cotisation» (soit 7056 francs en 2023), en plus de la cotisation ordinaire. La limite de rachat s’applique également aux personnes qui ne sont pas assurées dans le deuxième pilier. Pour pouvoir effectuer un rachat, il faut être autorisé à verser des cotisations au pilier 3a, donc disposer d’un revenu soumis à l’AVS en Suisse et avoir versé la totalité de la cotisation annuelle ordinaire pour l’année du rachat. Le montant du rachat est entièrement déductible du revenu imposable, au même titre que les cotisations annuelles ordinaires.

Les rachats dans la prévoyance individuelle liée se font suivant le principe de l’autodéclaration. Les nouvelles dispositions réglementaires visent à garantir la légalité des rachats. De plus, les institutions devront fournir une attestation permettant un suivi ultérieur des rachats et, en particulier, un contrôle de conformité par les autorités fiscales compétentes.

La possibilité de verser sur un compte du pilier 3a des montants dépassant le maximum déductible afin de rattraper des versements pour des années passées profite surtout aux ménages disposant d’un revenu annuel imposable de plus de 100’000 francs. Selon la statistique sur l’impôt fédéral direct 2019, environ 10% des contribuables sont en mesure de bénéficier de la déduction fiscale maximale dans la prévoyance individuelle.

 

Conséquences financières

Selon une première estimation, les nouvelles dispositions entraîneront une diminution des recettes fiscales de l’ordre de 100 à 150 millions de francs pour l’impôt fédéral direct, dont 21,2% affecteront les cantons et 78,8% la Confédération.

L’estimation de la diminution des recettes de l’impôt sur le revenu perçu par les cantons et les communes se situe entre 200 et 450 millions de francs par année.

 

Rapport explicatif pour la procédure de consultation (disponible ici)

Principe et procédure d’élaboration des dispositions de l’ordonnance

L’adaptation de l’ordonnance crée la base légale demandée par la motion Ettlin 19.3702, «Autoriser les rachats dans le pilier 3a» pour effectuer dans le pilier 3a des rachats donnant droit à des déductions fiscales et permettant de combler des lacunes de cotisations dans la prévoyance individuelle liée. En ce qui concerne les conditions à remplir pour pouvoir procéder à un rachat, la mise en œuvre tient compte des principes du pilier 3a en tant qu’assurance du revenu : les rachats seront autorisés rétroactivement pour les années de cotisation au cours desquelles le preneur de prévoyance remplissait les conditions pour verser des cotisations dans le pilier 3a, c’est-à-dire touchait en Suisse un revenu d’une activité lucrative soumis à l’AVS. Le potentiel de rachat sera calculé en fonction de la ou des lacunes de cotisations annuelles à combler. Il sera possible de procéder à un rachat chaque année, mais au plus à hauteur de la «petite» déduction visée à l’art. 7, al. 1, let. a, OPP 3 (7056 francs en 2023) et pour une période limitée aux dix années de cotisation qui précèdent l’année du rachat.

 

La réglementation en bref

La modification de l’ordonnance définit les conditions nécessaires pour garantir que les rachats dans le pilier 3a soient, dès le départ, réalisés correctement et ainsi éviter que des rachats se révèlent inadmissibles ultérieurement, un risque notamment accru lorsqu’un preneur de prévoyance possède plusieurs comptes ou polices du pilier 3a. Les clarifications et les vérifications nécessaires à un versement correct incombent en priorité aux parties concernées, à savoir le preneur de prévoyance et son institution de la prévoyance individuelle liée. Le preneur de prévoyance devra formuler une demande préalable de rachat auprès de son institution et fournir certaines indications nécessaires pour déterminer la ou les lacunes de cotisations à combler et pour évaluer l’admissibilité du rachat demandé. Cette demande devra être faite par écrit et signée par son auteur, de préférence au moyen d’un formulaire prévu à cet effet par l’institution ou conforme aux usages de la branche. Avant d’accepter le rachat, l’institution devra vérifier ces indications et demander des informations complémentaires au preneur de prévoyance si elle a des doutes quant à l’admissibilité de sa demande. S’il est procédé au rachat, ces indications seront ajoutées à l’attestation qu’elle délivre au preneur de prévoyance comme justificatif du montant des cotisations donnant droit à une déduction fiscale. Le preneur de prévoyance dispose ainsi des informations nécessaires à l’évaluation de son potentiel de rachat résiduel et à la justification de futures demandes. Il incombe à l’institution de la prévoyance individuelle liée de traiter et conserver ces informations dans ses dossiers et, en cas de transfert du capital de prévoyance, de les transmettre à la nouvelle institution.

 

Disposition transitoire

L’al. 1 de la disposition transitoire prévoit que seules les lacunes de cotisations apparues après l’entrée en vigueur de la modification de l’ordonnance donnent droit à un rachat. Il n’est donc pas possible de combler les lacunes de cotisations antérieures à l’entrée en vigueur de la mesure concernant les rachats. Par exemple, si la modification de l’ordonnance entre en vigueur au début de l’année 2025, une lacune de cotisations donnant droit à un rachat ne peut apparaître pour la première fois que cette année-là. Cela signifie qu’un rachat au sens de l’art. 7a, al. 1, sera admis pour la première fois au cours de l’année de cotisation 2026. Par exemple, une personne assurée qui a cotisé pour la dernière fois en 2020 dans le pilier 3a peut combler pour la première fois en 2026 la lacune de cotisations de l’année 2025. En revanche, elle ne pourra pas combler les arriérés de cotisations plus anciens, datant des années 2021-2024.

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 22.11.2023 consultable ici

Rapport explicatif pour la procédure de consultation, novembre 2023 disponible ici

Texte de l’ordonnance OPP3 disponible ici

 

Il Consiglio federale intende consentire il riscatto retroattivo di prestazioni nel pilastro 3°, communicato stampa dell’UFAS disponibile qui

Rapporto esplicativo per la consultazione, novembre 2023 (disponibile qui)

Testo dell’ordinanza OPP3 (disponibile qui)

 

Bundesrat will nachträgliche Einkäufe in die Säule 3a ermöglichen, Medienmitteilung von BSV hier abrufbar

Erläuternder Bericht für die Vernehmlassung, November 2023 (hier abrufbar)

Verordnungstext BVV3 (hier abrufbar)

 

4A_288/2022 (f) du 01.06.2023 – Réticence admise – Omission de déclarer une hernie ombilicale asymptomatique / 4 aLCA – 6 aLCA

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_288/2022 (f) du 01.06.2023

 

Consultable ici

 

Réticence admise – Omission de déclarer une hernie ombilicale asymptomatique / 4 aLCA – 6 aLCA

 

Assuré a conclu avec la société d’assurance une police d’assurance complémentaire à l’assurance-maladie obligatoire comprenant trois produits, soit une couverture du séjour en division semi-privée, une assurance d’indemnités journalières en cas d’hospitalisation et un capital de 2’500 fr. en cas d’hospitalisation.

Le 02.11.2018, il a rempli et signé un questionnaire de santé en vue de la conclusion de cette assurance et a répondu «non» aux deux questions suivantes:

  • question 5b: «Etes-vous actuellement ou avez-vous été en traitement au cours des cinq dernières années auprès d’un médecin ?»;
  • question 8: «Présentez-vous des séquelles de maladie, d’accident, d’infirmité, d’intoxication ou avez-vous connaissance de problèmes liés à votre état de santé (par ex. maladie congénitale) qui n’ont pas encore fait l’objet de traitement ?».

Le 27.11.2019, demande de garantie en lien avec une hospitalisation de l’assuré prévue le 12.12.2019 en division semi-privée. Rapport du spécialiste FMH en chirurgie et chirurgie viscérale : diagnostic de hernie ombilicale symptomatique ; l’affection n’a pas fait l’objet de traitements antérieurs auprès d’un autre médecin, le premier traitement pour cette affection étant prévu le 12.12.2019. Interrogé sur la «date d’apparition des symptômes perceptibles par le patient», il a répondu que l’assuré présentait une gêne et des douleurs «depuis quelques mois». Quant à la date à laquelle le patient avait eu connaissance du diagnostic précis de l’affection, il a indiqué: «première consultation juillet 2018». Il pronostiquait une évolution favorable après la cure du 12.12.2019.

Par courrier recommandé du 03.12.2019, la société d’assurance a résilié le contrat d’assurance complémentaire avec effet rétroactif au 30.11.2019, au motif que l’assuré avait donné une réponse incorrecte en déclarant «non» aux questions 5b et 8 de son questionnaire de santé: il avait omis de mentionner la hernie ombilicale pour laquelle il devait prochainement être hospitalisé, alors qu’il avait déjà consulté le spécialiste en chirurgie viscérale au sujet de cette affection en juillet 2018. Si cette affection avait été mentionnée dans la proposition d’assurance, la société d’assurance aurait proposé une réserve.

Dans un courrier du 09.12.2019, le spécialiste en chirurgie viscérale a invité la société d’assurance à reconsidérer sa décision: le patient l’avait consulté en juillet 2018 pour obtenir un avis chirurgical concernant une hernie ombilicale. A l’époque, cette hernie était asymptomatique et de petite taille, de sorte qu’il n’avait pas retenu d’indication opératoire. Il avait proposé une abstention thérapeutique et recommandé au patient de ne pas se focaliser sur cette découverte clinique. Il n’était pas étonné que son patient ne l’ait pas mentionnée puisqu’il l’avait rassuré à ce propos et que l’intéressé ne s’en plaignait pas. La hernie avait augmenté depuis quelques mois seulement et était devenue symptomatique, raison pour laquelle une intervention correctrice avait été envisagée.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/452/2022 – consultable ici)

Le spécialiste en chirurgie viscérale a été entendu comme témoin. Selon ses déclarations, le patient l’avait consulté en juillet 2018 parce que son nombril avait changé de forme. L’investigation avait révélé une hernie ombilicale pour laquelle il n’y avait pas d’indication opératoire. Il l’avait donc rassuré en affirmant qu’aucun traitement n’était à envisager. Il l’avait néanmoins prévenu que la situation pouvait évoluer, la hernie devenir symptomatique et nécessiter un traitement dans le futur. De nombreux patients vivaient sans problème avec une telle hernie. A son sens, la situation était comparable à celle des personnes souffrant d’un hallux valgus: ce genre de constatation physique n’impliquait pas forcément qu’une opération serait nécessaire un jour.

Par jugement du 12.05.2022, rejet de la demande par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3
Le litige porte sur l’existence d’une réticence au sens de l’art. 6 LCA, que la société d’assurance a invoqué pour résilier le contrat la liant à l’assuré.

La réticence se définit comme l’omission de déclarer, ou le fait de déclarer inexactement, lors de la conclusion du contrat, un fait important que celui ayant l’obligation de déclarer connaissait ou devait connaître (art. 6 al. 1 aLCA, dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2022, ici déterminante). Cette notion renvoie aux déclarations obligatoires imposées par l’art. 4 aLCA. Selon l’alinéa 1 de cette disposition, celui qui présente une proposition d’assurance doit déclarer par écrit à l’assureur, suivant un questionnaire ou en réponse à toutes autres questions écrites, tous les faits qui sont importants pour l’appréciation du risque, tels qu’ils lui sont ou doivent lui être connus lors de la conclusion du contrat. La question posée doit être précise et non équivoque (cf. art. 4 al. 3 i.f. aLCA; ATF 136 III 334 consid. 2.3; 134 III 511 consid. 3.3.4; arrêt 4A_555/2019 du 28 août 2020 consid. 2). Le proposant doit répondre de manière véridique aux questions telles qu’il peut les comprendre de bonne foi. Il n’y a pas de réponse inexacte si la question est ambiguë et que la réponse donnée apparaît véridique selon la manière dont la question pouvait être comprise de bonne foi par le proposant (ATF 136 III 334 consid. 2.3).

Pour qu’il y ait réticence, il faut, d’un point de vue objectif, que la réponse donnée à la question ne soit pas conforme à la vérité, par omission ou inexactitude; la réticence peut consister à affirmer un fait faux, à taire un fait vrai ou à présenter une vision déformée de la vérité (ATF 136 III 334 consid. 2.3). D’un point de vue subjectif, la réticence suppose que le proposant connaissait ou aurait dû connaître la vérité. Le proposant doit déclarer non seulement les faits qui lui sont connus sans autre réflexion, mais aussi ceux qui ne peuvent lui échapper s’il réfléchit sérieusement à la question posée (ATF 136 III 334 consid. 2.3; 134 III 511 consid. 3.3.3; arrêt précité 4A_555/2019 consid. 2).

Il faut en plus que la réponse inexacte porte sur un fait important pour l’appréciation du risque (art. 4 al. 1 et art. 6 al. 1 aLCA). Sont importants tous les faits de nature à influer sur la détermination de l’assureur de conclure le contrat ou de le conclure aux conditions convenues (art. 4 al. 2 aLCA). L’art. 4 al. 3 aLCA présume que le fait est important s’il a fait l’objet d’une question écrite de l’assureur, précise et non équivoque. Une telle présomption peut cependant être renversée. Ce n’est certes pas au proposant de déterminer à la place de l’assureur quels sont les éléments pertinents pour apprécier le risque, mais il pourra renverser la présomption en démontrant qu’il a omis un fait objectivement insignifiant. Ainsi, n’enfreint pas son devoir de renseigner celui qui tait des indispositions sporadiques qu’il pouvait de bonne foi considérer comme sans importance et passagères, sans devoir les tenir pour une cause de rechute ou des symptômes d’une maladie imminente aiguë (ATF 136 III 334 consid. 2.4 et les arrêts cités; 134 III 511 consid. 3.3.4; arrêt précité 4A_555/2019 consid. 2).

En cas de réticence, l’assureur est en droit de résilier le contrat (art. 6 al. 1 aLCA); s’il exerce ce droit, il est autorisé à refuser également sa prestation pour les sinistres déjà survenus lorsque le fait qui a été l’objet de la réticence a influé sur leur survenance ou leur étendue (art. 6 al. 3 LCA). Le droit de résilier s’éteint quatre semaines après que l’assureur a eu connaissance de la réticence (art. 6 al. 2 LCA). La résiliation due à la réticence doit être motivée avec précision: la déclaration de résiliation doit mentionner la question qui a reçu une réponse inexacte et préciser de façon circonstanciée en quoi consiste le fait important non déclaré ou inexactement déclaré (ATF 129 III 713 consid. 2.1; arrêt 4A_376/2014 du 27 avril 2015 consid. 2.3.1).

Consid. 6
L’assuré invoque une violation des art. 4 et 6 aLCA: en présence d’une question évasive, une approche restrictive eût été de rigueur. Or, la cour cantonale aurait conduit son raisonnement dans une toute autre optique, admettant largement la réticence alors que l’assuré, à l’issue de sa consultation chez un spécialiste, aurait obtenu l’assurance qu’il n’avait rien ni aucun traitement à entreprendre, ses symptômes se réduisant à une élévation indolore au niveau du ventre.

L’assuré fonde son argument sur des faits qui s’écartent de ceux retenus dans l’arrêt attaqué. En réalité, quelques mois à peine avant de remplir le questionnaire de santé, il était allé consulter un spécialiste parce que son nombril avait changé de forme et qu’il s’en inquiétait. Ce spécialiste a diagnostiqué une hernie ombilicale, certes en se montrant rassurant et en indiquant qu’il n’y avait pas de raison de s’inquiéter, aucun traitement n’étant à envisager. Il a cependant émis une réserve, en ce sens que les choses pouvaient évoluer, la hernie devenir symptomatique et nécessiter un traitement. Si tel était le cas, il se tenait à disposition du patient. Dans ces conditions, l’assuré ne pouvait en toute bonne foi, quelques mois plus tard, répondre «non» à la question de savoir s’il avait connaissance de «problèmes liés à [son] état de santé» n’ayant «pas encore fait l’objet de traitement». Comme l’a relevé l’autorité précédente de façon convaincante, une hernie ombilicale a valeur de maladie selon la Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM-10). Il ne s’agit donc pas d’une indisposition sporadique que l’assuré pouvait raisonnablement et de bonne foi considérer comme sans importance et passagère. D’autant moins que son médecin l’avait expressément informé du risque d’évolution néfaste.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 4A_288/2022 consultable ici

 

4A_327/2016 (d) du 27.09.2016, publié aux ATF 142 III 767 – Droit aux indemnités journalières maladie LCA – Convention de libre passage (CLP) – Pas de notion d’assurance rétroactive – 9 aLCA

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2016 (d) du 27.09.2016, publié aux ATF 142 III 767

 

ATF 142 III 767 consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Droit aux indemnités journalières maladie LCA – Convention de libre passage (CLP) – Pas de notion d’assurance rétroactive / 9 aLCA

 

TF

Consid. 7.1
La Convention de libre passage (CLP) est un accord entre les assureurs ; ceux-ci ne sont pas (directement) liés entre eux par l’art. 9 LCA, étant donné que l’art. 9 LCA concerne la conclusion du contrat d’assurance, c’est-à-dire la relation entre l’assureur et l’assuré ou le preneur d’assurance. La doctrine présente différentes opinions sur la manière de classer juridiquement cette CLP. Selon l’avis de l’Association Suisse d’Assurances elle-même, il ne s’agit pas d’un vrai contrat au bénéfice de tiers qui accorde aux assurés un droit direct contre les assureurs concernés. Dans cette mesure, il n’y a pas de conflit avec l’art. 9 LCA (Thomas Mattig, Freizügigkeit in der Krankentaggeldversicherung nach VVG, in: Krankentaggeldversicherung: Arbeits- und versicherungsrechtliche Aspekte, 2007, p. 106 s. ; suivi par Häberli/Husmann, Krankentaggeld, versicherungs- und arbeitsrechtliche Aspekte, 2015, p. 208). Selon un autre avis, le contenu de l’accord fait partie « de manière évidente du contrat collectif individuel [respectif] », car la CLP engage tous les principaux assureurs d’indemnités journalières LCA à fournir ces prestations. Toutefois, dans la mesure où la CLP promet une couverture pour des événements qui remplissent les conditions de l’art. 9 LCA, la personne assurée ne peut pas faire valoir de droit contractuel à l’encontre de l’assureur, mais tout au plus un droit à des dommages-intérêts, si tant est qu’il faille lui reconnaître un droit de créance autonome (Gebhard Eugster, Vergleich der Krankentaggeldversicherung [KTGV] nach KVG und nach VVG, in: Krankentaggeldversicherung: Arbeits- und versicherungsrechtliche Aspekte, 2007, p. 72 f.)

L’assuré soutient qu’il s’agit d’un contrat au bénéfice de tiers. Il fonde son argumentation sur l’art. 5 al. 1 CLP, selon lequel le nouvel assureur doit accorder les conditions de passage prévue par la CLP sans demande particulière du preneur d’assurance. Cette disposition indique que le nouvel assureur a cette obligation, mais elle ne précise pas envers qui – cette question n’est justement pas résolue.

La question de savoir s’il s’agit d’un contrat au bénéfice de tiers peut finalement rester ouverte ici. En effet, en application de la CLP, l’art. 9 al. 1 lit. a des Conditions générales d’assurance (ci-après: CGA) de la compagnie d’assurance dispose qu’il n’y a pas de couverture d’assurance pour les maladies qui existent au moment de l’entrée en service ou du début de l’assurance, tant qu’elles entraînent une incapacité de travail, « sauf si [la compagnie d’assurance] ne doive garantir le maintien de la couverture d’assurance en vertu d’accords de libre passage entre assureurs ». Dans la mesure où la CLP oblige à prendre en charge un cas de sinistre en cours ou une rechute, le contrat d’assurance lui-même confère ainsi aux assurés un droit direct correspondant à l’encontre de la compagnie d’assurance intimée. Il est donc décisif de savoir si la CLP contient des dispositions dont le contenu contrevient à l’interdiction de l’assurance rétroactive selon l’art. 9 LCA et qui, en conséquence, ne peuvent pas être convenues entre l’assureur et l’assuré ou le preneur d’assurance (par exemple – comme c’est le cas ici – en incluant la CLP dans les CGA).

 

Consid. 7.2
En l’espèce,  il n’est plus contesté que l’incapacité de travail à partir du 14 mars 2014 constitue une rechute.

Cette situation est couverte par l’art. 4 al. 2 CLP, selon lequel le nouvel assureur doit prendre en charge le sinistre en cours (voir également l’exemple correspondant dans Mattig, op. cit., p. 105). L’art. 4 al. 4 CLP contient en outre une disposition spécifique concernant la rechute. Si l’on considère isolément la nouvelle relation d’assurance avec l’assureur du nouvel employeur, cela constituerait un cas d’assurance rétroactive interdite selon l’art. 9 LCA (comme le soutient également Mattig, op. cit., p. 106 ; Eugster, op. cit., p. 73 ; Häberli/Husmann, op. cit., p. 208), si cela était également applicable ici.

Or, limiter l’analyse au seul contrat d’assurance avec l’assureur du nouvel employeur ignore le fait qu’il s’agit ici d’une coordination entre deux assureurs collectifs. C’est pourquoi il convient d’examiner s’il est conforme au sens et au but de l’art. 9 LCA d’interdire également une telle réglementation de coordination. L’assuré invoque implicitement ce point de vue lorsqu’il affirme qu’il s’agit d’une reprise de contrat (de l’ancien contrat d’assurance) par le nouvel assureur et non d’une assurance rétroactive. Il ne s’agit manifestement pas d’une reprise de contrat à proprement parler, car l’ancien contrat d’assurance n’est pas repris dans son intégralité. Il s’agit plutôt d’un problème de «prolongation de la couverture», c’est-à-dire de la responsabilité pour les sinistres en cours au-delà de la fin du contrat d’assurance. Dans le cas d’une véritable prolongation de la couverture, l’incapacité de travail survient après la fin des rapports de travail (ou de la durée du contrat).

Dans la pratique, les CGA des différents assureurs régissent ces cas de manière très différente. Par exemple, selon le chiffre 6 des CGA d’un assureur, la couverture d’assurance s’éteint à la fin des rapports de travail (c’est-à-dire lorsque l’assuré quitte le cercle des personnes assurées) ; une telle disposition laisse finalement ouverte la question de savoir comment la prolongation de la couverture est réglée (Stephan Fuhrer, Kollektive Krankentaggeldversicherung – aktuelle Fragen, in : Jahrbuch SGHVR 2014 p. 88 et note de bas de page 73, en se référant expressément au chiffre 6 de ces CGA). Dans une affaire où l’incapacité de travail était déjà survenue pendant la période d’assurance précédente et persistait à la fin de la relation de travail (cas d’assurance dit étendu ; cf. Fuhrer, op. cit., p. 87), le Tribunal fédéral a reconnu qu’en l’absence de clauses contractuelles contraires, l’assuré conserve son droit aux prestations même après la fin de la relation d’assurance et ce jusqu’à l’épuisement de la durée des prestations (ATF 127 III 106 consid. 3b ; cf. aussi Eugster, op. cit., p. 63). Certains estiment en outre qu’une disposition des CGA selon laquelle, dans les «cas d’assurance étendus», l’assureur ne doit plus verser de prestations lorsque le travailleur quitte l’entreprise assurée, serait inhabituelle et donc inadmissible (Fuhrer, op. cit., p. 89 s.).

En tout état de cause, rien ne s’opposerait à ce que l’ancien assureur d’indemnités journalières collectives assume expressément la prolongation de la couverture pour les sinistres en cours ou les rechutes. La réglementation contenue dans la CLP n’est rien d’autre, sur le fond, que la garantie d’une telle prolongation de la couverture pour les maladies qui existaient dans l’ancien rapport de travail et ayant déjà entraîné une incapacité de travail. Comme l’assuré le mentionne à juste titre, le fait qu’il s’agisse d’une prolongation de la couverture selon le contrat d’assurance en vigueur jusqu’alors ressort également du fait que les prestations doivent être versées selon les conditions du contrat existant auprès de l’ancien assureur et non selon le nouveau contrat d’assurance ; et ce aussi bien en ce qui concerne le montant de l’indemnité journalière, le délai d’attente et la durée des prestations (art. 4 al. 2 CLP) qu’en ce qui concerne la prise en compte des indemnités journalières déjà versées par l’ancien assureur dans la durée des prestations (art. 4 al. 4 CLP). On ne voit pas pourquoi un accord entre les assureurs, selon lequel le nouvel assureur assume cette prolongation de la couverture à la place de l’ancien assureur, aux conditions de l’ancien contrat d’assurance et de manière limitée à la durée des prestations de ce dernier, ne serait pas admissible sur le fond.

Il ne s’agit pas d’une « opération de contournement » interdite (cf. toutefois Eugster, op. cit., p. 72 à la note 76). Dans un cas de passage de l’assurance collective d’indemnités journalières à l’assurance individuelle d’indemnités journalières (du même assureur), dans laquelle l’assureur avait repris en tant qu’assureur individuel une éventuelle prolongation de la couverture résultant de l’assurance collective, le Tribunal fédéral a jugé qu’il n’y avait pas dans ce cas d’assurance rétroactive interdite, car la rechute en question était déjà assurée dans l’assurance collective (arrêt 4A_39/2009 du 7 avril 2009 consid. 3.5.2).

Par conséquent, l’assuré a droit, sur la base de l’art. 9 al. 1 lit. a CGA en relation avec l’art. 4 al. 2 et 4 de la CLP, à ce que la compagnie d’assurance intimée fournisse à son égard les prestations relevant de la prolongation de couverture aux conditions de l’ancien contrat d’assurance et limitées à la durée des prestations de celui-ci ; cela ne constitue aucunement une infraction à l’art. 9 LCA.

 

ATF 142 III 767 consultable ici

 

Proposition de citation : ATF 142 III 767, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2023/09/142_III_767)