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CSSS-N : Rejet de l’initiative populaire pour une 13e rente AVS

CSSS-N : Rejet de l’initiative populaire pour une 13e rente AVS

 

Communiqué de presse du Parlement du 21.10.2022 consultable ici

 

La Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) s’oppose à une augmentation de la rente AVS annuelle au moyen d’un treizième versement, considérant qu’une telle mesure aggraverait les problèmes de financement de l’AVS à long terme et qu’elle n’est pas appropriée pour apporter un soutien ciblé aux rentiers et rentières dans le besoin. Par conséquent, elle propose de recommander le rejet de l’initiative populaire pour une 13e rente AVS.

 

La Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national a achevé son examen de l’initiative populaire «Mieux vivre à la retraite (initiative pour une 13e rente AVS)» (22.043). Par 17 voix contre 7, elle propose de recommander le rejet de l’initiative. Celle-ci demande que les bénéficiaires d’une rente de vieillesse de l’AVS perçoivent chaque année un supplément correspondant à un douzième de leur rente annuelle ; ce supplément ne doit entraîner ni la réduction des prestations complémentaires ni la perte du droit à ces prestations. La majorité de la commission considère que l’AVS et les prestations complémentaires forment ensemble un système éprouvé qui permet déjà aujourd’hui d’assurer la subsistance économique des personnes à la retraite. Elle relève par ailleurs que les perspectives financières de l’AVS sont déjà incertaines avec le niveau actuel des rentes et que la marge de manœuvre dans le budget fédéral est limitée. À ses yeux, ces éléments plaident contre une augmentation des rentes AVS pour l’ensemble des bénéficiaires – que ceux-ci en aient besoin ou non –, comme le demande l’initiative.

Estimant que la mesure demandée par l’initiative populaire contribuerait de manière significative à lutter contre la pauvreté des personnes âgées et à garantir à celles-ci un niveau de vie adéquat, une minorité de la commission propose de recommander l’acceptation de l’initiative.

Par 15 voix contre 10, la commission a en outre rejeté une proposition visant à élaborer un contre-projet indirect à l’initiative qui prévoirait le versement d’une treizième rente AVS aux 40% des ménages disposant des revenus les plus faibles.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 21.10.2022 consultable ici

 

Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

 

  1. Contexte

Dans son arrêt du 11.10.2022, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé l’arrêt du 20.10.2020 de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) concernant l’affaire B. contre Suisse (Requête n° 78630/12). La Cour avait conclu que le requérant avait subi une inégalité de traitement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) du fait de l’extinction du droit à la rente de veuf à la majorité du dernier enfant, alors qu’une telle extinction n’est pas prévue pour une veuve se trouvant dans la même situation.

La Suisse doit dès lors se conformer à l’arrêt de la CrEDH qui est désormais définitif et cesser la violation constatée et ce dès l’entrée en force de l’arrêt, soit dès le 11.10.2022. Une adaptation des bases légales est nécessaire et devra être entreprise dans le respect du processus législatif. Celui-ci peut être relativement long et ne pourra de ce fait intervenir qu’ultérieurement. C’est pourquoi, un régime transitoire doit être mis en place pour enrayer la violation constatée par la CrEDH dans de plus brefs délais.

 

  1. Régime transitoire pour les rentes de veuf en cours et futures

Dans la mesure où l’arrêt de la Grande Chambre porte sur un cas individuel, celui-ci ne déploiera d’effets que dans les situations identiques à celle qui a été jugée. Concrètement, cela implique que seuls les veufs qui ont des enfants percevront la rente de veuf aux mêmes conditions que les veuves dans la même situation. Ainsi, la rente de veuf octroyée sur la base de l’art. 23 LAVS ne prendra plus fin lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans et continuera à être versée. Ce régime transitoire ne remet pas en cause l’application des art. 24 al. 1 et 24a LAVS de sorte que les veufs sans enfant ne sauraient prétendre à une rente de veuf sur la base de cet arrêt. S’agissant des hommes divorcés, le droit à la rente de veuf s’éteint dans tous les cas aux 18 ans de l’enfant cadet. En outre, l’arrêt susmentionné n’a aucune influence sur les rentes de veuve.

Le régime transitoire déploie ses effets à compter du 11.10.2022, moment de l’entrée en force de l’arrêt définitif de la Grande Chambre, et s’étendra jusqu’à l’entrée en vigueur d’une prochaine révision de la LAVS en matière de rentes de survivants. Les directives et autres documents seront adaptés dans un deuxième temps.

Les catégories de veufs suivantes sont concernées par le régime transitoire. Sont également concernés les partenaires enregistrés survivants qui sont assimilés à des veufs :

  • Les veufs avec enfants mineurs dont la rente de veuf est en cours de versement au moment de l’arrêt définitif (11.10.2022). Les cas pour lesquels une demande est déposée après le 11.10.2022 sont également concernés. Pour reconnaître un droit à la rente de veuf au-delà des 18 ans de l’enfant, le fait que l’enfant n’ait pas atteint l’âge de 18 ans au 11.10.2022 est déterminant.
  • Les hommes non divorcés avec enfants, qui deviennent veufs après le 11.10.2022, c’est-à-dire dont le droit aux prestations naît suite à un décès intervenu après cette date. La présence d’un ou plusieurs enfants au moment du décès suffit, l’âge de celui-ci est sans importance (comme pour les veuves).
  • Les veufs avec enfants qui ont contesté la décision de suppression de leur rente de veuf et dont l’affaire est pendante au 11.10.2022.
  • Les hommes dont le droit à la rente de veuf renaît sur la base de l’art. 23 al. 5 LAVS, pour autant que l’enfant cadet donnant droit à la rente n’ait pas encore atteint l’âge de 18 ans en date du 11.10.2022.

 

Pour ces personnes, les rentes de veufs seront octroyées selon l’art. 23 LAVS et versées au-delà des 18 ans de l’enfant. Les prestations ne seront donc plus limitées dans le temps et ne s’éteindront qu’en cas de décès, de remariage ou de naissance du droit à une rente de vieillesse de l’AVS, respectivement d’une rente de l’AI, plus élevée. Pour le remplacement de la rente de veuf par sa propre rente de vieillesse ou de l’AI, les conditions sont analogues que pour les rentes de veuve (ch. 5620ss DR).

Les veufs dont les rentes ont cessé d’être versées suite à une décision devenue définitive avant le 11.10.2022 ne sont donc pas concernés par ce régime transitoire. En effet, un changement de loi ou de jurisprudence ne constitue pas un motif de reconsidération. Les demandes visant à faire renaître une rente de veuf éteinte avant le 11.10.2022 en raison de la majorité de l’enfant et dont la décision est passée en force seront rejetées.

Le régime transitoire, comme l’arrêt de la Grande Chambre, déploie ses effets à partir du 11.10.2022. Les éventuelles décisions de suppression de rente intervenues après le 11.10.2022 doivent être annulées. Les décisions de suppression de rente, qui ne sont pas encore entrées en force doivent être annulées. De nouvelles décisions doivent être rendues et le versement de la rente de veuf doit continuer au-delà de la majorité de l’enfant. Si des paiements rétroactifs doivent être effectués, et qu’ils remontent à plus de 2 ans, des intérêts moratoires sont dûs (ch. 10503ss DR).

La mise en place du régime transitoire auprès des organes d’exécution prendra toutefois un certain temps. En effet, il est nécessaire d’adapter le logiciel de calcul de rente, les systèmes informatiques ainsi que les diverses procédures et les registres des rentes. Les droits seront toutefois accordés avec effet rétroactif au 11.10.2022.

  1. Aperçu des constellations possibles et des conséquences qui en découlent

 

Situation au 11.10.2022 Droit à la rente de veuf Mesure à prendre par la caisse de compensation
Rente de veuf en cours (veuf avec un enfant de moins de 18 ans au moment du veuvage)

 

Droit illimité Information et nouvelle décision au bénéficiaire de la prestation. Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu avant le 11.10.2022 (ex. demande tardive) Droit illimité, pour autant que le veuf ait au moins un enfant mineur en date du 11.10.2022 Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu après le 11.10.2022 Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant au moment du veuvage (l’âge de l’enfant n’est pas déterminant) Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Renaissance du droit à la rente de veuf selon l’art. 23 al. 5 LAVS Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant de moins de 18 ans en date du 11.10.2022 Décision réouvrant le droit à la rente et octroi d’une rente illimitée.
Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Décision de suppression du droit à la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant non entrée en force Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision d’office.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant et versement illimité dans le temps.
Procédure d’opposition en cours suite à la suppression de la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision sur opposition.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant, le cas échéant avec des intérêts moratoires en raison du paiement rétroactif, et versement illimité dans le temps
Procédure de recours pendante au tribunal   Attente de la décision du tribunal
Décision de suppression du droit à la rente de veuf entrée en force, en raison de la majorité de l’enfant atteinte avant le 11.10.2022. Pas de droit à la rente de veuf Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.
Conjoints divorcés au sens de l’art. 24a LAVS Pas de changement, application du droit en vigueur. Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.

 

  1. Régime transitoire pour les prestations complémentaires en cours et futures

Droit aux PC en cas de perception d’une rente de veuf

Les personnes concernées par le régime transitoire décrit au point 2 qui se voient octroyer et verser une rente de veuf selon l’art. 23 LAVS aux mêmes conditions que les veuves ayant des enfants peuvent faire valoir leur droit à des PC pendant toute la durée de la perception de la rente, pour autant qu’elles remplissent les autres conditions d’octroi. Si un droit échu à une rente de veuf renaît en vertu de ce régime transitoire, l’éventuel droit à des PC renaît également.

 

Droit aux PC sans perception d’une rente de veuf

Pour autant que les autres conditions d’octroi soient remplies, un veuf ou une veuve peut aussi faire valoir un droit à des PC s’il ou elle ne perçoit pas de rente de survivant de l’AVS. La condition est que l’individu aurait eu droit à une rente de survivant si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29 al. 1 LAVS (art. 4 al. 1 let. b, ch. 2, LPC).

Pendant la durée d’application du régime transitoire, les hommes mariés ou en partenariat enregistré qui se retrouvent veufs peuvent faire valoir leur droit à des PC même si leur enfant le plus jeune a déjà au moins 18 ans. Cette règle ne s’applique toutefois que si l’une des conditions suivantes est remplie :

  • l’individu concerné touchait déjà des PC le 11.10.2022, car il était veuf et avait des enfants mineurs ;
  • l’individu concerné est devenu veuf avant le 11.10.2022 et son enfant le plus jeune n’avait pas encore 18 ans à cette date (la date de la demande de PC et celle de la naissance du droit aux PC ne jouent aucun rôle) ;
  • l’individu concerné est devenu veuf après le 11.10.2022 et avait des enfants à ce moment-là (leur âge ne joue aucun rôle) ;
  • le versement des PC a été interrompu lorsque l’enfant le plus jeune a atteint l’âge de 18 ans, l’individu concerné a contesté cette décision et le cas était encore en suspens au 11.10.2022 ;
  • le droit à une rente de veuf qu’aurait eu l’individu concerné si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29, al. 1, LAVS renaît sur la base de l’art. 23, al. 5, LAVS, et l’enfant le plus jeune y donnant droit n’a pas encore 18 ans au 11.10.2022.

Les veufs divorcés ou sans enfants n’ont toujours pas droit à des PC.

 

Calcul des PC annuelles

Pendant la durée du régime transitoire, l’art. 14b OPC-AVS/AI s’applique par analogie aux veufs qui n’ont pas d’enfants mineurs. À partir du mois suivant le 18ᵉ anniversaire de l’enfant le plus jeune, le revenu de l’activité lucrative à prendre en compte pour les veufs non invalides correspond donc au moins au revenu applicable en vertu de l’art. 14b, let. a à c, OPC-AVS/AI. Les dispositions correspondantes des directives (chap. 3.4.2.5 et 3.4.2.6 DPC) s’appliquent également par analogie.

 

Validité du régime transitoire

Le régime transitoire déploie ses effets de manière rétroactive à compter du 11.10.2022. Pour les hommes mariés ou en partenariat enregistré, les droits aux PC échus avant cette date en raison de la majorité de l’enfant le plus jeune ne renaissent pas.

Cependant, si la décision n’était pas encore entrée en force au 11.10.2022, le droit aux PC renaît d’office. Il en va de même pour les PC dont la suspension a déjà été décidée pour une date postérieure au 11.10.2022. Dans ces cas, les décisions d’office correspondantes doivent être reconsidérées et le versement des PC doit reprendre à partir du moment auquel il a été suspendu en raison de la majorité de l’enfant. Pour les éventuels intérêts moratoires, voir le chap. 4.5 DPC.

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

Übergangsregelung für Witwerrenten der AHV in Folge Urteil des Europäischen Gerichtshofs für Menschenrechte (EGMR), Mitteilungen an die AHV-Ausgleichskassen und EL-Durchführungsstellen Nr. 460, 21.10.2022, hier verfügbar

NB : Pas de version en italien du Bulletin.

 

Majoration de 30 francs de la rente minimale AVS/AI dès le 01.01.2023

Majoration de 30 francs de la rente minimale AVS/AI

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 12.10.2022 consultable ici

Fiche d’information « Montants valables dès le 01.01.2023 » disponible ici

 

Les rentes AVS/AI seront adaptées à l’évolution des prix et des salaires : elles seront relevées de 2,5 % au 1er janvier 2023. Le Conseil fédéral a pris cette décision sur la base de l’indice mixte prévu par la loi lors de sa séance du 12 octobre 2022. La rente minimale AVS/AI se montera désormais à 1225 francs par mois. Les montants des allocations pour perte de gain (APG) seront également adaptés. Parallèlement, des adaptations seront apportées dans le domaine des cotisations, pour les prestations complémentaires, pour les prestations transitoires et dans la prévoyance professionnelle obligatoire.

Le montant de la rente minimale AVS/AI passera de 1195 à 1225 francs par mois et celui de la rente maximale, de 2390 à 2450 francs (pour une durée de cotisation complète). Le montant de la cotisation minimale AVS/AI/APG pour les indépendants et les personnes sans activité lucrative passera de 503 à 514 francs par an, et celui de la cotisation minimale dans l’AVS/AI facultative de 958 à 980 francs.

 

Adaptation selon l’indice mixte

Comme le prescrit la loi sur l’AVS, le Conseil fédéral examine, en règle générale tous les deux ans, la nécessité d’adapter les rentes de l’AVS et de l’AI à l’évolution des salaires et des prix. L’adaptation a lieu plus tôt si le renchérissement dépasse 4 % au cours d’une année. Pour prendre sa décision, le Conseil fédéral s’appuie sur la moyenne arithmétique de l’indice des salaires et de l’indice des prix (indice mixte) et prend en compte la recommandation de la Commission fédérale AVS/AI. Cette année, on s’attend à un renchérissement de 3% et à une augmentation des salaires de 2%. Il en résulte un indice mixte de 2,5%, qui justifie des augmentations de rentes de l’ordre du renchérissement. La dernière adaptation des rentes par le Conseil fédéral date de 2021. Il avait alors fixé le montant de la rente minimale AVS/AI à 1195 francs.

 

Coûts de l’adaptation des rentes

Le relèvement des rentes engendrera des dépenses supplémentaires d’environ 1370 millions de francs. L’AVS supportera des coûts supplémentaires à hauteur de 1215 millions de francs, dont 245 millions à la charge de la Confédération (qui finance 20,2% des dépenses de l’assurance). L’AI assumera des dépenses supplémentaires de 155 millions de francs ; la Confédération ne devra supporter ici aucune charge supplémentaire, sa contribution à l’AI n’étant plus calculée en pourcentage des dépenses.

 

Adaptation des montants limites dans la prévoyance professionnelle

Cette adaptation a également un impact sur la prévoyance professionnelle obligatoire. Le montant de la déduction de coordination dans le régime obligatoire de la prévoyance professionnelle passera de 25 095 à 25 725 francs, et le seuil d’entrée de 21 510 à 22 050 francs. La déduction fiscale maximale autorisée dans le cadre de la prévoyance individuelle liée (pilier 3a) passera de 6883 à 7056 francs pour les personnes possédant un 2e pilier et de 34 416 à 35 280 francs pour celles qui n’en ont pas. Ces adaptations entreront elles aussi en vigueur le 1er janvier 2023.

 

Adaptation des prestations APG

Dans le régime des allocations pour perte de gain (APG), le montant maximal de l’allocation passe de 245 francs actuellement à 275 francs. Le coût de cette mesure s’élève à 100 millions de francs pour les APG.

 

Adaptations concernant les prestations complémentaires et les prestations transitoires

Les montants annuels des prestations complémentaires et des prestations transitoires, destinées à couvrir les besoins vitaux, passeront de 19 610 à 20 100 francs pour les personnes seules et de 29 415 à 30 150 francs pour les couples. Ils passeront également à 10 515 francs pour les enfants âgés de plus de 11 ans et à 7380 francs pour les enfants de moins de 11 ans. L’adaptation des prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI induit, quant à elle, des dépenses supplémentaires d’environ 5,2 millions de francs pour la Confédération et de 3,5 millions pour les cantons.

Les montants maximaux des loyers sont adaptés au renchérissement depuis la dernière adaptation en 2021, sur la base de certaines positions de l’indice national des prix à la consommation pour le logement et l’énergie. L’augmentation est de 7,1 %. Les montants annuels maximaux s’élèveront désormais à 17 580 francs dans la région 1, à 17 040 francs dans la région 2 et à 15 540 francs dans la région 3. Les coûts de cette augmentation seront de 37,8 millions de francs. Comme les positions « énergie » et « services d’approvisionnement et d’entretien du logement » ont augmenté de 21 % dans l’indice des prix, le forfait pour les charges accessoires et les frais de chauffage sera également adapté et passera de 2520 à 3060 francs par année, pour un coût total de 4,5 millions de francs. Les coûts de l’augmentation des montants maximaux des loyers et des forfaits pour les charges accessoires et les frais de chauffage seront pris en charge par la Confédération et les cantons.

 

Trois motions sont en suspens aux Chambres fédérales : elles demandent l’adaptation complète au renchérissement des rentes de l’AVS et de l’AI, ainsi que des prestations complémentaires et des prestations transitoires. Ces motions prévoient en outre de réduire le seuil d’inflation permettant une nouvelle adaptation des rentes après un an. Les commissions compétentes des Chambres doivent encore traiter ces motions. Si les motions sont adoptées à l’issue de la session d’hiver, les adaptations législatives nécessaires au relèvement supplémentaire des prestations mentionnées seraient traitées dans le cadre d’une procédure d’urgence, en principe durant la session de printemps 2023, et les prestations versées à titre rétroactif au 1er janvier 2023.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 12.10.2022 consultable ici

Fiche d’information « Montants valables dès le 01.01.2023 » disponible ici

Ordonnances et commentaires consultables ici

Scheda informativa “Importi validi dal 1° gennaio 2023” disponibile qui

Hintergrunddokument «Beträge gültig ab dem 1. Januar 2023» hier verfügbar

CEDH – Affaire Beeler C. Suisse (Requête no 78630/12) – Arrêt de la Grande Chambre du 11.10.2022 – Rente de veuf AVS – La législation prévoyant la suppression de la rente de veuf des hommes, à la majorité de leur dernier enfant, est discriminatoire

CEDH – Affaire Beeler C. Suisse (Requête no 78630/12) – Arrêt de la Grande Chambre du 11.10.2022

 

Arrêt de la Grande Chambre du 11.10.2022 consultable ici

Communiqué de presse de la CEDH du 11.10.2022 consultable ici

 

Cessation, à la majorité du dernier enfant, du paiement de la rente de parent veuf s’occupant à plein temps des enfants, lorsque le bénéficiaire est un homme – 24 al. 2 LAVS

 

Résumé

Dans son arrêt de Grande Chambre, rendu ce jour dans l’affaire Beeler c. Suisse (requête no 78630/12), la Cour européenne des droits de l’homme dit, à la majorité (12 voix contre 5), qu’il y a eu :

Violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme

L’affaire concerne la suppression de la rente de veuf du requérant à la majorité de son dernier enfant. La loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) prévoit l’extinction du droit à la rente de veuf lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans, ce qu’elle ne prévoit pas à l’égard d’une veuve.

Devant la Cour, le requérant soutient qu’il a subi une discrimination par rapport aux veuves qui, dans la même situation, n’auraient pas perdu leur droit à une rente. Quant au Gouvernement, il fait valoir qu’il est encore justifié de se fonder sur la présomption selon laquelle l’époux assure l’entretien financier de son épouse, en particulier lorsqu’elle a des enfants, et, partant, d’accorder aux veuves une protection supérieure à celle des veufs. Selon lui, la différence de traitement ne reposerait donc pas sur des stéréotypes liés au sexe, mais sur une réalité sociale.

D’abord, la Cour note qu’entre 1997 et 2010, le requérant a bénéficié de la pension de veuf et qu’il a organisé les aspects clés de sa vie familiale, au moins en partie, en fonction de l’existence de cette allocation. La situation économique délicate dans laquelle il s’est retrouvé, à l’âge de 57 ans, du fait de la perte de la rente de conjoint survivant et des difficultés à réintégrer un marché du travail dont il était absent depuis 16 ans, résulte de la décision qu’il avait prise des années auparavant dans l’intérêt de sa famille, confortée à partir de 1997 par la perception de la rente de veuf. Dès lors, la Cour estime que les article 8 et 14 de la Convention sont applicables en l’espèce.

Ensuite, la Cour juge que, bien que se trouvant dans une situation analogue pour ce qui est de son besoin d’assurer sa subsistance, le requérant n’a pas été traité de la même façon qu’une femme/veuve. Il a donc subi une inégalité de traitement. Elle estime que le Gouvernement n’a pas démontré qu’il existait des considérations très fortes ou des « raisons particulièrement solides et convaincantes » propres à justifier cette différence de traitement fondée sur le sexe. Pour la Cour, le Gouvernement ne saurait se prévaloir de la présomption selon laquelle l’époux entretient financièrement son épouse (concept du « mari pourvoyeur ») afin de justifier une différence de traitement qui défavorise les veufs par rapport aux veuves. À ses yeux, cette législation contribue plutôt à perpétuer des préjugés et des stéréotypes concernant la nature ou le rôle des femmes au sein de la société et constitue un désavantage tant pour la carrière des femmes que pour la vie familiale des hommes.

 

Principaux faits

Le requérant, Max Beeler, est un ressortissant suisse, né en 1953. Père de deux enfants, il les a élevés seul après avoir perdu son épouse dans un accident alors que les enfants étaient âgés d’un an et neuf mois et de quatre ans.

Le 9 septembre 2010, après avoir constaté que la fille cadette du requérant allait atteindre la majorité, la caisse de compensation du canton d’Appenzell Rhodes-Extérieures mit fin au paiement de la rente de veuf du requérant. Ce dernier forma opposition en invoquant le principe de l’égalité entre l’homme et la femme prévu par la Constitution Suisse, argument que la caisse de compensation rejeta. Il forma alors un recours devant le tribunal cantonal, soutenant qu’il n’y avait pas de raisons de le défavoriser par rapport à une veuve. Le tribunal cantonal rejeta le recours, relevant que le législateur avait été conscient de l’inégalité de traitement entre les veufs et les veuves lors de la rédaction et de la révision de la LAVS et qu’il avait estimé qu’on pouvait exiger des hommes au foyer veufs qu’ils reprennent une activité professionnelle lorsque cessait leur obligation de prendre en charge leurs enfants, ce qu’on ne pouvait pas raisonnablement demander des femmes dans les mêmes circonstances. Le recours du requérant devant le Tribunal fédéral fut rejeté par un arrêt du 4 mai 2012 (9C_617/2011).

 

Griefs, procédure et composition de la Cour

Le requérant invoque l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit à la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme, se plaignant d’être victime d’une discrimination par rapport aux mères veuves assumant seules la charge de leurs enfants.

La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 19 novembre 2012.

Par son arrêt de chambre du 20 octobre 2020, la Cour avait conclu, à l’unanimité, à la violation de l’article 14 (interdiction de discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention.

Le 19 janvier 2021 le Gouvernement avait demandé le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre conformément à l’article 43 de la Convention (renvoi devant la Grande Chambre). Le 8 mars 2021, le collège de la Grande Chambre avait accepté ladite demande. Une audience avait eu lieu le 16 juin 2021.

L’arrêt a été rendu par la Grande Chambre de 17 juges.

 

Décision de la Cour

Applicabilité des articles 8 et 14

La Cour note que la rente en question vise à favoriser la vie familiale du conjoint survivant. Elle lui permet de s’occuper de ses enfants à plein temps si tel était auparavant le rôle du parent décédé, ou, dans tous les cas, de se consacrer davantage à ceux-ci sans avoir à affronter des difficultés financières qui le contraindraient à exercer une activité professionnelle.

En l’espèce, au moment du décès de l’épouse du requérant, en 1994, les filles du couple étaient âgées d’un an et neuf mois et de quatre ans respectivement. Dans cette situation, qui nécessitait la prise de décisions difficiles et déterminantes pour l’organisation de sa vie familiale, le requérant a quitté son emploi pour se consacrer à plein temps à sa famille, notamment en assurant la garde et l’éducation de ses filles. La Cour ne doute pas que le fait de percevoir la pension de veuf a nécessairement eu une incidence sur l’organisation de sa vie familiale tout au long de la période concernée. Il s’ensuit que depuis le moment où, en 1997, le requérant s’est vu accorder le bénéfice de la pension de veuf jusqu’à la suppression de celle-ci, en novembre 2010, l’intéressé et sa famille ont organisé les aspects clés de leur vie quotidienne, au moins en partie, en fonction de l’existence de cette allocation. En outre, la situation économique délicate dans laquelle le requérant s’est retrouvé, à l’âge de 57 ans, du fait de la perte de la rente de conjoint survivant et des difficultés à réintégrer un marché du travail dont il était absent depuis 16 ans, résulte de la décision qu’il avait prise des années auparavant dans l’intérêt de sa famille, confortée à partir de 1997 par la perception de la rente de veuf.

Par conséquent, la Cour conclut que les faits de l’espèce tombent sous l’empire de l’article 8 de la Convention. Cela suffit pour rendre l’article 14 de la Convention applicable.

 

Article 14 combiné avec l’article 8

La Cour estime que le requérant peut se prétendre victime d’une discrimination fondée sur le « sexe » au sens de l’article 14 de la Convention. Elle observe que l’extinction du droit du requérant à la rente de veuf se fondait sur l’article 24 § 2 de la LAVS qui, pour les veufs uniquement, situe cette extinction au moment où le dernier enfant devient majeur. Les veuves conservent quant à elles le droit à la rente de conjoint survivant même après que leur dernier enfant a atteint la majorité. Il en résulte que le requérant a cessé de percevoir la rente de veuf pour le seul motif qu’il est un homme. Bien que se trouvant dans une situation analogue pour ce qui est de son besoin d’assurer sa subsistance, le requérant n’a pas été traité de la même façon qu’une femme/veuve. Il a donc subi une inégalité de traitement du fait de l’arrêt du versement de sa rente de veuf.

Elle précise qu’elle a déjà admis que les ajustements des systèmes de pension doivent être effectués de manière progressive, prudente et mesurée, car toute autre approche pourrait mettre en péril la paix sociale, la prévisibilité du système des pensions et la sécurité juridique. Elle rappelle toutefois que seules des considérations très fortes peuvent l’amener à estimer compatible avec la Convention une différence de traitement fondée sur le sexe, et que la marge d’appréciation dont disposent les États pour justifier cette différence est étroite.

En l’espèce, elle note que, pour justifier la différence de traitement entre les deux sexes relativement au droit à la rente de conjoint survivant, le Gouvernement a soutenu que l’égalité entre hommes et femmes n’était pas encore complètement atteinte dans les faits en ce qui concerne l’exercice d’une activité rémunérée et la répartition des rôles au sein du couple. Selon le Gouvernement, il est encore justifié de se fonder sur la présomption selon laquelle l’époux assure l’entretien financier de son épouse, en particulier lorsqu’elle a des enfants, et, partant, d’accorder aux veuves une protection supérieure à celle des veufs. La différence de traitement litigieuse ne reposerait donc pas sur des stéréotypes liés au sexe, mais sur une réalité sociale.

La Cour rappelle que la progression vers l’égalité des sexes reste un but important des États membres du Conseil de l’Europe. En témoigne entre autres la Recommandation no R (85) 2 relative à la protection juridique contre la discrimination fondée sur le sexe, adoptée par le Comité des Ministres le 5 février 1985, qui appelle à garantir aux hommes et aux femmes un traitement égal tant au niveau de l’affiliation aux régimes de sécurité sociale et de retraite qu’au niveau des prestations payées par ces régimes.

Elle réaffirme, par conséquent, que des références aux traditions, présupposés d’ordre général ou attitudes sociales majoritaires ayant cours dans un pays donné ne suffisent plus aujourd’hui à justifier une différence de traitement fondée sur le sexe, que celle-ci soit en faveur des femmes ou des hommes. Il s’ensuit que le Gouvernement ne saurait se prévaloir de la présomption selon laquelle l’époux entretient financièrement son épouse (concept du « mari pourvoyeur ») afin de justifier une différence de traitement qui défavorise les veufs par rapport aux veuves.

Elle observe aussi que le gouvernement suisse a reconnu dès 1997 que les femmes exerçaient de plus en plus souvent une activité lucrative et qu’il était nécessaire d’accorder une protection aux hommes qui se consacraient aux travaux ménagers et à l’éducation des enfants. Une harmonisation complète des conditions relatives à la rente de veuve et de veuf semble cependant s’être heurtée à cette époque aux contraintes financières et aux critiques. D’autres tentatives entreprises par le gouvernement à partir de 2000 également ont échoué.

Dans ce contexte, la Cour attache une importance fondamentale aux considérations énoncées dans la présente affaire par le Tribunal fédéral qui, dans son arrêt du 4 mai 2012, a relevé que le législateur était conscient dès l’introduction de la rente de veuf que cette réglementation constituait une distinction inadmissible fondée sur le sexe, qui était contraire à la Constitution.

Pour la Cour, les tentatives de réforme susmentionnées ainsi que l’évaluation de la législation litigieuse par la juridiction suprême du pays, à savoir le Tribunal fédéral, montrent que les anciennes « inégalités de fait » entre les hommes et les femmes ont perdu leur acuité dans la société suisse. Ainsi, les considérations et suppositions sur lesquelles les modalités de la rente de conjoint survivant ont reposé pendant les décennies passées ne sont plus à même de justifier des différences fondées sur le sexe. Il ressort même de l’arrêt du Tribunal fédéral que la réglementation en question est contraire au principe d’égalité entre l’homme et la femme consacré par l’article 8 de la Constitution suisse. La Cour ajoute qu’à ses yeux cette législation contribue plutôt à perpétuer des préjugés et des stéréotypes concernant la nature ou le rôle des femmes au sein de la société et constitue un désavantage tant pour la carrière des femmes que pour la vie familiale des hommes.

En l’espèce, la Cour rappelle qu’après le décès de son épouse le requérant s’est consacré exclusivement à la garde et à l’éducation de ses enfants ainsi qu’aux soins à leur prodiguer, et a renoncé à exercer son métier. Âgé de 57 ans lorsque le versement de la rente a cessé, il avait arrêté toute activité lucrative depuis plus de 16 ans. À cet égard, la Grande Chambre partage l’avis de la chambre selon lequel il n’y a pas de raison de croire que le requérant aurait eu à cet âge-là, et compte tenu de sa longue absence du marché de travail, moins de difficultés à réintégrer celui-ci qu’une femme dans une situation analogue, ni que l’arrêt du versement de la rente l’aurait touché dans une moindre mesure qu’une veuve dans des circonstances comparables.

Compte tenu de ce qui précède, et eu égard à l’étroite marge d’appréciation laissée à l’État défendeur en l’espèce, la Cour estime que le Gouvernement n’a pas démontré qu’il existait des considérations très fortes ou des « raisons particulièrement solides et convaincantes » propres à justifier la différence de traitement fondée sur le sexe qui est dénoncée par le requérant. Elle estime dès lors que l’inégalité de traitement dont le requérant a été victime ne saurait passer pour reposer sur une justification raisonnable et objective. Il y a donc eu violation de l’article 14 combiné avec l’article 8 de la Convention.

 

Satisfaction équitable (Article 41)

La Cour dit (12 voix contre 5) que la Suisse doit verser au requérant 5 000 euros (EUR) pour dommage moral et 16 500 EUR pour frais et dépens.

 

Opinions séparées

Les juges Seibert-Fohr et Zünd ont chacun exprimé une opinion concordante. Les juges Kjølbro, Kucsko-Stadlmayer, Mourou Vikström, Koskelo et Roosma ont exprimé une opinion dissidente commune. Le texte de ces opinions est joint à l’arrêt.

 

Arrêt de la CrEDH B. c. Suisse du 20.10.2020 consultable ici

Arrêt de la Grande Chambre du 11.10.2022 consultable ici

Communiqué de presse de la CEDH du 11.10.2022 consultable ici

 

 

9C_36/2021 (f) du 07.12.2021 – Assujettissement et cotisations AVS – Société anonyme – Activité dépendante vs indépendante d’un avocat actionnaire-administrateur unique

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2021 (f) du 07.12.2021

 

Consultable ici

 

Assujettissement et cotisations AVS – Société anonyme – Activité dépendante vs indépendante d’un avocat actionnaire-administrateur unique

 

Affilié en tant qu’indépendant auprès de la caisse de compensation depuis 1986, Maître B.__ a créé A.__ SA (ci-après: la société) après avoir jusqu’alors été associé dans une étude d’avocats. La société a notamment pour but la fourniture de prestations juridiques en Suisse et à l’étranger par des avocats inscrits dans un registre des avocats suisse ou étranger et par des conseillers qualifiés, l’exercice de tous mandats, l’exploitation et la commercialisation de méthodologies patrimoniales, de solutions légales, de méthodologies d’ingénierie légales et d’architecture juridiques, la représentation de clients dans le cadre de procédures devant les tribunaux, arbitrages et autres autorités, ainsi que le conseil en général et en matière fiscale. Elle est affiliée en tant qu’employeur auprès de la caisse de compensation et Maître B.__ en est l’unique actionnaire et administrateur, avec signature individuelle.

A la suite d’un contrôle d’employeur effectué auprès de la société le 14.04.2014 et portant sur la période du 15.07.2010 au 31.12.2012, la caisse de compensation a établi un décompte rectificatif de cotisations paritaires employeur/employés et réclamé à A.__ SA le paiement de la somme de 40’034 fr. 45, intérêts moratoires de 4066 fr. 05 en sus, par décisions du 30.04.2014, contestées par A.__ SA. Après avoir procédé à un nouveau contrôle d’employeur le 18.06.2018, elle a établi un décompte rectificatif de cotisations paritaires pour la période du 01.01.2013 au 31.12.2014 et réclamé à A.__ SA la somme de 33’475 fr. 40, intérêts moratoires de 7409 fr. 25 en sus, par décisions du 06.12.2018. Elle a ensuite confirmé ses décisions des 30.04.2014 et 06.12.2018 par décision sur opposition du 20.06.2019.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1076/2020 – consultable ici)

Après avoir constaté qu’il y avait identité économique complète entre la société et Maître B.__, ce qui permettait d’exclure tout rapport de subordination entre eux, la juridiction cantonale a examiné qui de la société ou de l’avocat supportait le risque économique, ainsi que le point de savoir si le second disposait d’une organisation d’entreprise indépendante de celle de la première. Etant donné, notamment, que la société mettait gratuitement à disposition de l’avocat des locaux, du matériel et du personnel administratif, qu’elle concluait des mandats avec des clients et qu’elle avait souscrit une assurance professionnelle en responsabilité civile, les juges cantonaux ont admis que le risque économique était supporté par A.__ SA. En l’absence de pièces attestant de l’existence d’une réelle organisation d’entreprise de Maître B.__ indépendante de celle de la société anonyme, qui permettrait à celui-ci de se voir reconnaître le statut d’indépendant, ils en ont inféré que l’activité de l’avocat était dépendante.

Par jugement du 29.10.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Le litige porte sur la question de savoir si l’entreprise A.__ SA est tenue de payer des cotisations sociales sur les rémunérations qu’elle a versées à Maître B.__ entre le 15.07.2010 et le 31.12.2014. Pour résoudre le litige, il faut examiner si ces rémunérations sont dues pour une activité exercée à titre salarié ou indépendant.

Consid. 5.2
La juridiction cantonale n’a pas violé le droit fédéral en considérant que les rémunérations versées par la société anonyme à Maître B.__ entre le 15.07.2010 et le 31.12.2014 résultaient de l’exercice d’une activité dépendante.

Consid. 5.2.1
A l’inverse de ce que soutient en premier lieu la société anonyme, la juridiction cantonale n’était pas forcément tenue de procéder à l’examen des rapports juridiques existant entre elle et Maître B.__, lesquels sont régis par une convention de fiducie datée du 15.07.2010. Selon la jurisprudence, dûment rappelée par la juridiction cantonale, le point de savoir si l’on a affaire, dans un cas donné, à une activité indépendante ou salariée ne doit pas être tranché d’après la nature juridique du rapport contractuel entre les partenaires. Ce qui est déterminant, bien plutôt, ce sont les circonstances économiques (ATF 140 V 241 consid. 4.2 et les références). Les rapports de droit civil peuvent certes fournir quelques indices, mais ils ne sont pas déterminants. D’une manière générale, est réputé salarié celui qui dépend d’un employeur quant à l’organisation du travail et du point de vue de l’économie de l’entreprise, et ne supporte pas le risque encouru par l’entrepreneur. Ces principes ne conduisent cependant pas, à eux seuls, à des solutions uniformes, applicables schématiquement. Les manifestations de la vie économique revêtent en effet des formes si diverses qu’il faut décider dans chaque cas particulier si l’on est en présence d’une activité dépendante ou d’une activité indépendante en considérant toutes les circonstances de ce cas. Souvent, on trouvera des caractéristiques appartenant à ces deux genres d’activité; pour trancher la question, on se demandera quels éléments sont prédominants dans le cas considéré (ATF 140 V 108 consid. 6; arrêt 9C_578/2020 du 25 mai 2021 consid. 4.2.1).

Consid. 5.2.2
Certes, il ressort des constatations cantonales qu’il y a identité économique complète entre la société et Maître B.__, permettant ainsi d’exclure tout rapport de subordination entre eux. Cela étant, lorsque comme en l’occurrence, il y a identité économique entre la personne morale et son organe dirigeant et qu’il n’existe donc, par définition, aucun rapport de subordination ni contrat de travail entre la société anonyme et son actionnaire et administrateur unique, il convient de procéder à l’examen de l’ensemble des circonstances du cas concret pour déterminer si l’activité en cause est exercée de manière dépendante ou indépendante (arrêt 4A_10/2017 du 19 juillet 2017 consid. 3.1 et les arrêts cités). A cet égard, pour parvenir à la conclusion que le risque économique était supporté par A.__ SA et que l’avocat ne disposait pas d’une réelle organisation d’entreprise indépendante de celle de la société, la juridiction cantonale a constaté que celle-ci mettait gratuitement à disposition de Maître B.__ des locaux, du matériel et du personnel administratif, comme elle le faisait pour tous les autres collaborateurs qui exerçaient leurs activités dans le cadre d’un contrat de travail conclu avec elle. Les procurations signées par les clients l’étaient en faveur de la société anonyme et de l’avocat, si bien qu’elle concluait aussi des contrats de mandat avec la clientèle, comme cela ressort également du but de la société mentionné dans l’extrait du registre du commerce. Par ailleurs, l’assurance professionnelle en responsabilité civile avait été souscrite par A.__ SA.

La société anonyme n’apporte pas d’indices sérieux permettant de s’éloigner de ces constatations. Elle n’allègue en particulier pas que Maître B.__ emploierait du personnel ou qu’il supporterait les frais nécessaires à l’exercice de son activité. A cet égard, le fait que la société ne verserait pas de loyer à l’avocat, mais à une régie, et que celui-ci ne serait pas propriétaire des locaux, mais seulement copropriétaire de ceux-ci, n’est pas déterminant. L’intéressée admet en effet qu’elle assume les frais relatifs à la location des bureaux commerciaux, ainsi que les charges locatives sur la part de copropriété de Maître B.__, et ne prétend pas qu’elle aurait reçu une participation du prénommé à ces frais. Contrairement à ce que expose A.__ SA, la rémunération versée à l’avocat, sous forme d’acomptes payables par mensualités de 10’000 fr., le 25 de chaque mois, constitue également un indice en faveur de l’exercice d’une activité dépendante. Il s’agit en effet du paiement d’une rémunération fixe et non d’honoraires facturés par l’avocat en fonction des prestations effectivement fournies et du temps passé sur chaque dossier, en procédant à des décomptes « d’apothicaire », comme le relève du reste elle-même la société anonyme. Le fait que les rémunérations ne concernent que l’activité d’avocat, puisque Maître B.__ ne serait pas rémunéré pour sa fonction d’administrateur, n’est à cet égard pas non plus déterminant. Au vu du rôle et de l’intégration étroite de l’avocat dans l’organisation de la société anonyme, on ne saurait en effet admettre qu’il agissait en qualité de tiers vis-à-vis d’elle lorsqu’il accomplissait ses activités d’avocat et qu’il aurait effectué celles-ci même s’il n’avait pas été administrateur et actionnaire unique de la société. Ces différents éléments mettent en évidence que l’avocat ne supportait pas le risque encouru par l’entrepreneur et qu’il ne disposait pas d’une organisation d’entreprise distincte de celle de la société.

Consid. 5.2.3
L’argumentation de la société anonyme, selon laquelle Maître B.__ « a une obligation indéfectible de par la convention de fiducie le rendant de facto responsable de l’intégralité des frais et risques », ne résiste pas davantage à l’examen. La société affirme à cet égard que bien qu’elle assume les frais liés au personnel, aux locaux professionnels et au matériel informatique, c’est en réalité uniquement l’avocat qui supporte le « risque final économique », puisqu’en cas de manque de liquidités, c’est en effet à lui qu’il incombe d’avancer les montants nécessaires dans le respect des engagements pris vis-à-vis d’elle par la convention de fiducie. Comme le relève à juste titre l’OFAS, de par l’identité parfaite des parties au contrat de fiducie, non contestée par la société, la responsabilité de Maître B.__ instituée par ledit contrat envers elle n’est qu’une responsabilité interne envers lui-même et non une responsabilité externe envers les créanciers de la société. Outre que la société anonyme indique du reste avoir été créée par le prénommé dans une optique de limitation des risques et de la responsabilité vis-à-vis des tiers, il ressort des constatations cantonales que l’avocat n’assume pas les responsabilités économiques d’un chef d’entreprise, notamment à l’égard du personnel de la société anonyme et des clients, l’assurance professionnelle en responsabilité civile de l’avocat ayant à cet égard été conclue au nom de la société et non à celui de Maître B.__ (consid. 5.2.2 supra). Pour le surplus, la société ne s’en prend nullement à la considération des juges cantonaux selon laquelle l’identité économique totale entre elle-même et l’avocat permet d’exclure qu’elle se retourne contre Maître B.__.

 

Le TF rejette le recours de la société anonyme.

 

 

Arrêt 9C_36/2021 consultable ici

 

9C_123/2021 (f) du 05.04.2022 – Assujettissement obligatoire à l’AVS d’un ressortissant français établit en Suisse – 1a al. 1 let. a LAVS / Défaut de collaboration de la personne assurée à l’instruction de sa cause – 43 al. 3 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_123/2021 (f) du 05.04.2022

 

Consultable ici

 

Assujettissement obligatoire à l’AVS d’un ressortissant français résidant en Suisse / 1a al. 1 let. a LAVS

Défaut de collaboration de la personne assurée à l’instruction de sa cause / 43 al. 3 LPGA

 

Assuré, né en 1957, ressortissant français, s’est établi à Genève en 2006, puis en Valais le 31.12.2016. Le 15.03.2019, la caisse cantonale de compensation lui a fait savoir que les personnes sans activité lucrative domiciliées en Suisse avaient l’obligation d’être affiliées à la caisse de compensation de leur lieu de domicile. Elle l’a invité à remplir un questionnaire et à produire ses déclarations d’impôts complètes et les justificatifs de ses moyens d’existence pour les années 2014 à 2016. Le 08.04.2019, l’assuré a répondu qu’il n’était pas concerné par la demande, n’ayant jamais été sans activité lucrative ou en activité réduite pour les années 2014 à 2016 et encore moins postérieurement d’ailleurs. Le 25.04.2019, la caisse a demandé à l’assuré de lui remettre les copies de ses attestations annuelles de salaire 2014 à 2016 (en Suisse ou à l’étranger) ainsi que les copies de ses déclarations d’impôts 2014 à 2016 complètes, dès lors qu’il n’avait déclaré aucun salaire durant ces années-là. Par lettre du 17.05.2019, l’assuré a précisé à la caisse que depuis son arrivée en Suisse, il n’avait jamais eu de salaire que ce soit en Suisse ou provenant de l’étranger; il a ajouté qu’il ne souhaitait pas fournir ses déclarations d’impôts.

Le 06.06.2019, la caisse a rendu quatre décisions. Dans la première, elle a affilié l’assuré en qualité de personne sans activité lucrative du 01.01.2014 au 31.12.2016. Dans les trois autres, sur la base de la fortune nette de l’assuré communiquée par l’administration fiscale, elle a fixé au total à 2192 fr. 40, pour les années 2014 à 2016, les cotisations personnelles AVS/AI/APG ainsi que les frais d’administration et les intérêts moratoires correspondants. Saisie d’une opposition, la caisse l’a écartée par décision du 27.11.2019.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1248/2020 – consultable ici)

Par jugement du 21.12.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 4
L’assuré indique qu’il n’a jamais été salarié en Suisse. Il précise que les cotisations qui avaient été versées à ce titre pour les années 2010 à 2013 avaient été remboursées par la caisse de compensation à la société B.__ SA, dont il était administrateur et actionnaire uniques, car elles résultaient d’une erreur de sa fiduciaire; il ajoute qu’il en est allé de même pour les années 2015 à 2019. L’assuré soutient que son affiliation à la caisse de compensation comme personne sans activité lucrative pour les années 2014 à 2016 constitue une « duperie » et une « démarche déloyale », car la caisse de compensation avait précédemment informé la Caisse C.__ en France qu’il n’avait pas cotisé en Suisse, ce qui a eu un effet sur sa situation de retraite en France (prise en compte de 123 trimestres au lieu de 139) dès le 01.06.2019. Il ajoute que la caisse de compensation n’avait aucun intérêt digne de protection à rendre une décision (constatatoire) d’affiliation, puisqu’elle a pu rendre des décisions (condamnatoires) de cotisations.

Consid. 5.2
A la lecture des échanges de lettres intervenus entre les parties, on constate que l’assuré n’a pas collaboré à l’instruction de sa cause dans la mesure qui était raisonnablement exigible de sa part. En effet, lorsque la caisse de compensation a cherché à connaître ses moyens d’existence pour les années 2014 à 2016 en lui demandant de déposer des copies de ses attestations annuelles de salaire 2014 à 2016 (en Suisse ou à l’étranger) ainsi que les copies de ses déclarations d’impôts 2014 à 2016 complètes, puisqu’il n’avait déclaré aucun salaire durant ces années-là, l’assuré lui a simplement répondu que depuis son arrivée en Suisse, il n’avait jamais eu de salaire que ce soit en Suisse ou provenant de l’étranger. De plus, il a déclaré qu’il ne souhaitait pas fournir ses déclarations d’impôts.

En pareilles circonstances, puisque l’assuré n’entendait pas collaborer, la caisse de compensation pouvait statuer en l’état du dossier sans chercher à obtenir d’autres éléments sur ses revenus, en particulier une éventuelle rémunération liée à une activité salariée ou indépendante à l’étranger. A la lumière des renseignements recueillis conformément à l’art. 43 LPGA, le statut de l’assuré retenu par la caisse de compensation, confirmé par la juridiction cantonale (une personne sans activité lucrative pour les années 2014 à 2016) n’apparaît pas critiquable. En effet, à défaut d’avoir participé à l’instruction, l’assuré n’a pas rendu vraisemblable qu’il avait exercé une activité lucrative durant les années 2014 à 2016 en Suisse ou dans un Etat de l’Union européenne. Compte tenu de la nationalité française de l’assuré et de son domicile en Suisse, une telle constellation impliquait l’application de la législation suisse de sécurité sociale (art. 11 § 3 let. e du Règlement [CE] no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, RS 0.831.109.268.1; ATF 140 V 98 consid. 8.1). Conformément à l’art. 1a al. 1 let. a LAVS, l’assuré devait ainsi être affilié à l’AVS en tant que personne sans activité lucrative.

Consid. 5.3
On ajoutera que le grief de « duperie » et de « démarche déloyale » que l’assuré adresse à l’égard de la caisse de compensation est infondé. D’une part, l’assuré ne conteste pas l’exactitude des renseignements fournis à la Caisse C.__ en France par la Caisse suisse de compensation au moment où ils ont été transmis (l’absence de cotisations en Suisse à l’époque). D’autre part, l’administration de l’AVS devait affilier l’assuré puisque les conditions légales étaient remplies (cf. art. 1a al. 1 let. a et 10 LAVS, 28 et 29 RAVS).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_123/2021 consultable ici

 

Cf. également arrêt 9C_282/2021 du 05.04.2022 pour les cotisations dans le canton du Valais

 

 

9C_282/2021 (f) du 05.04.2022 – Assujettissement obligatoire à l’AVS d’un ressortissant français résidant en Suisse – 1a al. 1 let. a LAVS / Devoir d’instruction de la caisse de compensation – 43 al. 1 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_282/2021 (f) du 05.04.2022

 

Consultable ici

 

Assujettissement obligatoire à l’AVS d’un ressortissant français résidant en Suisse / 1a al. 1 let. a LAVS

Devoir d’instruction de la caisse de compensation / 43 al. 1 LPGA

 

Assuré, né en 1957, ressortissant français, s’est établi à Genève en 2006, puis en Valais le 31.12.2016. A la demande de la caisse cantonale de compensation qui s’était enquise de sa situation vis-à-vis de l’AVS, il a retourné le questionnaire annexé, dans lequel il a indiqué qu’il bénéficierait de rentes étrangères à partir du 01.05.2019 et qu’il continuerait à exercer une activité lucrative indépendante à mi-temps au service de la société B.__ SA (dont le siège est à U.__) lui rapportant un revenu annuel estimé à 30’000 fr.

Par écriture du 04.09.2019, la caisse lui a fait savoir qu’elle l’avait affilié auprès d’elle en tant que personne sans activité lucrative dès le 01.01.2017. Le 05.09.2019, la caisse a rendu une décision définitive de cotisations personnelles pour l’année 2017, portant sur un montant de 493 fr. 60 (cotisation minimale AVS/AI/APG et frais administratifs). Par deux décisions de cotisations provisoires pour les années 2018 et 2019, la caisse a fixé les cotisations et frais administratifs à respectivement 529 fr. 30 et 740 fr. 90. Saisie d’une opposition, la caisse l’a écartée par décision du 19.12.2019.

 

Procédure cantonale

Le 03.02.2020, la caisse a rendu deux décisions rectificatives de cotisations personnelles pour les années 2018 et 2019, les fixant respectivement à 493 fr. 60 et 497 fr. 60. L’assuré s’est déterminé sur ces décisions.

Par jugement du 29.04.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 4
Dans un premier moyen, l’assuré se réfère au questionnaire qu’il avait rempli le 24.02.2019 à la demande de la caisse de compensation. Il indique qu’il avait précisé dans ce document qu’il continuait à exercer une activité lucrative indépendante à mi-temps au service de la société B.__ SA lui rapportant un revenu annuel estimé à 30’000 fr. L’assuré en déduit qu’il n’est pas sans activité lucrative, de sorte qu’il ne devrait pas être affilié à ce titre auprès de la caisse de compensation.

Consid. 5
A l’examen du questionnaire du 24.02.2019, il apparaît que les constatations de fait du jugement entrepris sont lacunaires dans la mesure où les déclarations de l’assuré relatives à l’exercice d’une activité lucrative indépendante à mi-temps pour la société B.__ SA, dont le siège est à U.__, lui rapportant un revenu annuel estimé à 30’000 fr., n’ont pas été mentionnées et que la juridiction cantonale n’en a pas été tenu compte dans son appréciation. Or ces déclarations ne pouvaient pas être totalement ignorées, car elles seraient susceptibles d’influer sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF).

En l’état du dossier, il n’est pas établi si l’assuré a effectivement exercé une activité lucrative, comme il l’avait indiqué dans le questionnaire du 24.02.2019, puis en instance cantonale, où il avait précisé avoir travaillé comme indépendant du 01.01.2017 jusqu’au 31.05.2019. La caisse de compensation a fait fi de cette information et a affilié l’assuré comme personne sans activité lucrative dès le 01.01.2017. Or en vertu de son devoir d’instruction au sens de l’art. 43 LPGA, il appartenait à la caisse de compensation à tout le moins d’interpeller l’assuré sur le bien-fondé de ses déclarations et lui donner l’occasion de rendre vraisemblable l’exercice d’une activité indépendante en Suisse, voire à l’étranger. Suivant la réponse (une activité exercée en Suisse ou dans un pays de l’Union européenne, substantiellement ou non), la caisse intimée est ou non compétente pour prélever des cotisations (cf. art. 4 et 8 LAVS; art. 13 § 1 et § 3 du Règlement [CE] no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, RS 0.831.109.268.1). Il convient dès lors de renvoyer la cause à la caisse de compensation pour qu’elle complète l’instruction sur ce point.

Partant, le jugement attaqué, la décision sur opposition et les décisions sont annulés, la cause étant renvoyée à la caisse de compensation afin qu’elle fasse la lumière sur ce qui précède, puis le cas échéant fixe les cotisations qui seraient éventuellement dues. Dans ce contexte, on relèvera que la perception de cotisations liées à l’exercice d’une activité lucrative dans un pays de l’Union européenne ne serait en principe pas compatible avec le versement de cotisations pour personne sans activité lucrative en Suisse (cf. art. 11 § 3 du Règlement no 883/2004).

 

Le TF admet le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_282/2021 consultable ici

 

Cf. également arrêt 9C_123/2021 du 05.04.2022 pour les cotisations dans le canton du Genève

 

 

 

Motion Nantermod 22.3630 «Créer un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme indépendants et garantir leur protection sociale» – Avis du Conseil fédéral

Motion Nantermod 22.3630 «Créer un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme indépendants et garantir leur protection sociale» – Avis du Conseil fédéral

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de créer un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme indépendants. L’objectif sera qu’ils bénéficient d’une sécurité suffisante sur le plan juridique et en matière de planification. Ils pourront ainsi jouir à la fois de la flexibilité qu’ils désirent et d’une protection contre certains risques sociaux. Ce nouveau statut pourra être inscrit dans le code des obligations en tant que forme alternative au contrat de travail.

 

Développement

Dans son rapport « Numérisation – Examen d’une flexibilisation dans le droit des assurances sociales », le Conseil fédéral relève que l’économie de plateforme recèle un important potentiel économique. Il s’abstient toutefois pour l’heure d’adapter les bases légales à l’évolution de l’économie. Conséquence, nombre d’entreprises de l’économie numérique actives au niveau international préfèrent éviter la Suisse et n’y proposent pas leurs services, tandis que la création et la croissance des sociétés suisses sont entravées ou rendues inutilement compliquées.

Des prestataires de différentes branches (jardiniers, personnel de nettoyage, coursiers, comptables ou encore consultants) proposent depuis plusieurs années leurs services via des plateformes. Cette évolution est de plus en plus remise en question par les autorités d’exécution et les tribunaux, comme on l’a vu récemment avec l’arrêt du Tribunal fédéral concernant l’entreprise Uber à Genève. Il serait toutefois souhaitable que les prestataires suisses puissent eux aussi profiter de la flexibilisation du monde du travail, sans que cela se fasse au prix d’une couverture sociale insuffisante.

Afin de ne pas nuire plus longtemps à l’essor d’une branche au potentiel économique important et de mettre fin aux incertitudes qui entourent la protection sociale de ses prestataires, le Conseil fédéral est chargé de définir un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme indépendants, ce qui permettra par ailleurs d’encourager l’entrepreneuriat.

Les garanties attachées à ce nouveau statut seront réduites au minimum et consisteront principalement en une couverture sociale appropriée en matière de prévoyance vieillesse. Lorsqu’une relation contractuelle conférant un tel statut est établie, les parties manifesteront toutes deux leur accord à cet égard, étant entendu que cela n’affecte pas les solutions particulières qui pourront avoir été convenues entre partenaires sociaux.

 

Avis du Conseil fédéral du 24.08.2022

Par le postulat du Groupe libéral-radical du 13 décembre 2017 (17.4087 « Société numérique. Etudier la création d’un nouveau statut de travailleur ? »), le Parlement avait déjà chargé le Conseil fédéral d’examiner l’opportunité de créer un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme et d’en exposer les avantages et les inconvénients. Le Conseil fédéral a rempli ce mandat en publiant, le 27 octobre 2021, le rapport « Numérisation : examen d’une flexibilisation dans le droit des assurances sociales (Flexi-Test) ».

Le rapport montre que la question de savoir si une personne relèverait ou non de ce nouveau statut pourrait entraîner de nouveaux problèmes de délimitation entre les différentes formes d’activité et des litiges de longue durée. Ainsi, l’objectif de simplifier les choses et d’instaurer une sécurité du droit et de la planification serait clairement manqué.

Le système dual, qui opère une distinction entre salarié et indépendant, est présent dans tout l’ordre juridique suisse. L’introduction d’un troisième statut serait en contradiction fondamentale avec le droit des assurances sociales, et de nombreuses adaptations s’imposeraient. Comme le système dual est inscrit dans la Constitution fédérale (art. 113 et 114 Cst.), celle-ci devrait être modifiée avant que des modifications législatives puissent être mises en œuvre.

De nombreuses adaptations seraient également nécessaires dans les relations internationales, car il n’existe que deux statuts dans les conventions de sécurité sociale.

Selon son aménagement, l’introduction d’un troisième statut pourrait avoir pour conséquence que les personnes actuellement considérées comme salariées perdent la protection des assurances sociales fournie par leurs employeurs (assurance-chômage, assurance-accidents obligatoire et prévoyance professionnelle obligatoire).

Le Conseil fédéral estime que la distinction, au niveau des cotisations, entre salarié et indépendant est suffisamment souple, car elle couvre toutes les formes d’emploi, même ceux de l’économie de plateforme.

 

Proposition du Conseil fédéral du 24.08.2022

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Nantermod 22.3630 «Créer un nouveau statut pour les travailleurs de plateforme indépendants et garantir leur protection sociale» consultable ici

Mozione Nantermod 22.3630 “Indipendenti che lavorano per piattaforme digitali. Nuovo statuto per garantire la copertura sociale” disponibile qui

Motion Nantermod 22.3630 «Neuer Status für Selbständige in Plattform-Beschäftigung. Soziale Absicherung sicherstellen» hier verfügbar

 

Message du Conseil fédéral concernant la convention de sécurité sociale conclue avec l’Albanie

Message du Conseil fédéral concernant la convention de sécurité sociale conclue avec l’Albanie

 

Communiqué de presse du Parlement du 24.08.2022 consultable ici

 

Lors de sa séance du 24.08.2022, le Conseil fédéral a transmis au Parlement le message concernant l’approbation de la convention de sécurité sociale conclue entre la Suisse et l’Albanie. La convention coordonne en particulier les systèmes de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité des États contractants et règle le versement des rentes à l’étranger. Les relations économiques de la Suisse avec l’Albanie s’en trouveront renforcées.

Sur le fond, la convention correspond aux conventions de sécurité sociale déjà conclues par la Suisse et elle est conforme aux standards internationaux en matière de coordination des systèmes de sécurité sociale. Elle coordonne la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité de manière à prévenir que les ressortissants d’un des deux États contractants ne soient désavantagés ou discriminés par rapport à ceux de l’autre État. La convention garantit par conséquent une large égalité de traitement des assurés, règle le versement des rentes à l’étranger et évite les doubles assujettissements. Elle pose en outre les bases de la collaboration en matière de lutte contre les abus.

Une fois les négociations achevées, la convention a été signée par les États parties le 18.02.2022. Son entrée en vigueur requiert l’approbation préalable des parlements des deux États.

 

Condensé

La convention de sécurité sociale entre la Suisse et l’Albanie institue une base légale en droit international pour la coordination des assurances sociales entre les deux États. Elle s’appuie sur les normes internationales de coordination des systèmes de sécurité sociale et vise à coordonner la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité des États contractants afin d’éviter qu’un ressortissant de l’un des deux États se retrouve pénalisé ou discriminé par rapport à un ressortissant de l’autre État.

Contexte

Depuis l’entrée en vigueur de la convention de sécurité sociale entre la Suisse et la Bosnie et Herzégovine le 01.09.2021, l’Albanie est le seul pays des Balkans avec lequel la Suisse n’a pas encore conclu de convention de coordination de la sécurité sociale. L’Albanie est un pays prioritaire de la coopération suisse au développement dans les Balkans, qui vise notamment à stabiliser la situation en Serbie, au Monténégro, en Macédoine, en Bosnie et Herzégovine, au Kosovo et en Albanie en renforçant la coopération économique et la coopération en matière de migration.

Contenu du projet

Sur le fond, la convention avec l’Albanie correspond aux conventions de sécurité sociale que la Suisse a conclues avec d’autres pays des Balkans, tels que le Monténégro, la Serbie, le Kosovo et la Bosnie et Herzégovine; elle s’appuie sur les principes reconnus à l’international dans le domaine de la sécurité sociale. Les dispositions adoptées portent notamment sur l’égalité de traitement entre les ressortissants des États contractants, le versement des rentes à l’étranger, la prise en compte des périodes d’assurance, l’assujettissement des personnes exerçant une activité lucrative et l’entraide administrative. La convention crée en outre une base légale en matière de lutte contre la perception abusive de prestations.

Le message s’intéresse d’abord à la genèse de la convention; il présente ensuite le système de sécurité sociale albanais et se termine par un commentaire détaillé des dispositions de la convention.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 24.08.2022 consultable ici

Message du Conseil fédéral concernant l’approbation de la convention de sécurité sociale entre la Suisse et l’Albanie (version provisoire) disponible ici

Convention de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République d’Albanie consultable ici

 

9C_437/2021 (f) du 15.03.2022 – Rétribution d’un administrateur d’une SA, exerçant comme avocat indépendant / Salaire résultant d’une activité dépendante vs honoraires résultant d’une activité indépendante

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_437/2021 (f) du 15.03.2022

 

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Rétribution d’un administrateur d’une SA, exerçant comme avocat indépendant / Salaire résultant d’une activité dépendante vs honoraires résultant d’une activité indépendante

Présomption concernant la qualification des honoraires des membres du conseil d’administration d’une personne morale – Rappel et maintien de la jurisprudence (arrêt du TFA H 376/50 du 15.04.1953)

Renversement de la présomption admis

 

Au terme d’un contrôle des salaires déclarés par B.__ SA (ci-après: la société) entre les mois de janvier 2014 et décembre 2016, la caisse cantonale de compensation (ci-après: la caisse) a constaté, notamment, que la société contrôlée avait versé 3703 fr. 70 par mois à son administrateur, A.__, avocat indépendant, et enregistré les montants dans sa comptabilité sur un compte « honoraires juridiques ».

La caisse a réclamé à B.__ SA le paiement des cotisations sociales et des intérêts moratoires dus sur les reprises de salaires relatives aux années contrôlées, y compris sur les montants versés à A.__ (décisions du 16.10.2018). Ce dernier a contesté, en son nom, ces décisions en tant qu’elles qualifiaient implicitement de salaire les honoraires perçus pour des activités qu’il soutenait avoir déployées comme avocat indépendant. Il a déposé un courrier établi par la fiduciaire chargée de la comptabilité de son étude d’avocat attestant que le chiffre d’affaires de celle-ci – sur la base duquel des cotisations sociales avaient déjà été prélevées – incluait les honoraires versés par B.__ SA. La caisse a rejeté l’opposition (décision du 04.04.2019).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/661/2021 [arrêt non disponible sur le site du tribunal cantonal])

La juridiction cantonale a constaté que pendant la période contrôlée, A.__ avait simultanément exercé l’activité d’avocat indépendant et celle d’administrateur du bureau d’architecte, exploité par son père sous forme de société anonyme et dont il avait perçu une rétribution de 3703 fr. 70 par mois. Elle a considéré que les paiements mensuels devaient être qualifiés de salaires dès lors que les pièces du dossier ne permettaient pas de renverser la présomption qui assimilait la rémunération versée par une société anonyme à un membre de son conseil d’administration à un salaire déterminant au sens de la loi. Elle a précisé que les allégations du recourant et les témoignages récoltés ne démontraient pas au degré de vraisemblance requis que les activités déployées par A.__ pour la société se limitaient exclusivement à lui dispenser des conseils juridiques dans le domaine immobilier et à la représenter en justice mais établissaient, au contraire, que la rétribution perçue n’était pas sans relation avec le rôle d’administrateur d’un bureau d’architecte. Elle a encore constaté qu’en se retranchant derrière son secret professionnel, le recourant n’avait produit aucun document établissant qu’il n’avait représenté B.__ SA qu’en sa qualité d’avocat indépendant.

Les juges cantonaux ont par ailleurs considéré que vu l’ignorance du fait que A.__ percevait une rémunération mensuelle de la part de la société, la caisse de compensation était en droit de procéder à une reconsidération de ses décisions antérieures de cotisations et de rendre la décision du 16.10.2018, malgré le fait que ladite rémunération apparaissait dans le chiffre d’affaires de l’étude d’avocat et avait par conséquent déjà été soumise à cotisations.

Par jugement du 23.06.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Est litigieux le point de savoir si la rétribution octroyée à A.__ par B.__ SA de janvier 2014 à décembre 2016 doit être qualifiée de salaire résultant d’une activité dépendante comme l’a retenu le tribunal cantonal ou d’honoraires résultant d’une activité indépendante comme le soutient le recourant.

Consid. 4.1
Le tribunal cantonal a exposé la jurisprudence relative aux critères distinguant les activités salariées des activités indépendantes (cf. ATF 144 V 111 consid. 4.2 et les arrêts cités; arrêt 9C_1062/2010 du 5 juillet 2011 consid. 7.2), singulièrement celle établissant la présomption que la rétribution versée par une société anonyme à un membre de son conseil d’administration est un salaire (cf. ATF 105 V 113 consid. 3; arrêt H 136/81 du 13 septembre 1982 consid. 2, in RCC 1983 p. 22; H 376/52 du 15 avril 1953, in RCC 1953 p. 441). Il suffit d’y renvoyer.

Consid. 4.2
Le recourant s’interroge sur l’évolution de la jurisprudence relative à la présomption concernant la qualification des honoraires des membres du conseil d’administration d’une personne morale. Il semble en substance soutenir que le mandat d’administrateur, pour la distinction entre le revenu d’une activité salariée et celui d’une activité indépendante, dans l’arrêt H 376/52 du 15 avril 1953 et l’ATF 105 V 113, est sans explication devenu une présomption, dans l’ATF 121 I 259 et les arrêts ultérieurs (notamment les arrêts H 125/04 du 7 mars 2005 et 9C_727/2014 du 23 mars 2015), avec pour conséquence le renversement du fardeau de la preuve qui n’existait pas auparavant. Il demande au Tribunal fédéral de « clarifier » sa jurisprudence.

Consid. 4.3
En l’absence d’argumentation topique et motivée concernant la nécessité de changer de jurisprudence (cf. ATF 144 V 72 consid. 5.3.2), il n’appartient pas au Tribunal fédéral de « clarifier » sa jurisprudence. Il suffit de préciser que, contrairement à ce que A.__ suggère, la jurisprudence n’a pas subi d’évolution insidieuse. La présomption critiquée a été posée dans l’arrêt H 376/50 du 15 avril 1953. Comme il s’agit d’une présomption, il est possible d’en apporter la preuve du contraire. Or apporter la preuve du contraire dans le cas particulier consiste à démontrer que la rétribution reçue n’a pas de lien avec la qualité d’administrateur de la société qui la verse mais avec l’activité exercée comme avocat indépendant. Pour ce faire, il y a lieu d’appliquer les critères permettant de distinguer les revenus provenant d’une activité salariée de ceux provenant d’une activité indépendante. C’est une telle analyse qui a conduit à la confirmation de la présomption dans l’arrêt de 1953. Une lecture des arrêts ultérieurs cités par le recourant montre en outre que c’est également une telle analyse qui a toujours guidé le Tribunal fédéral dans la résolution des litiges similaires.

 

Consid. 5.1
Le recourant reproche aussi à la juridiction cantonale d’avoir violé le droit fédéral. Il soutient en substance que celle-ci a indûment limité ses moyens de preuve en considérant que seule la preuve d’une activité judiciaire ou, autrement dit, de représentation devant les tribunaux était à même de renverser la présomption. Il fait valoir que l’activité de conseil juridique (qu’il allègue avoir exercée pour la société) relève également des tâches assumées par un avocat indépendant pour son client.

Consid. 5.2
Cette argumentation n’est pas fondée. Dans la mesure où A.__ avait déclaré en cours de procédure que son travail pour la société consistait essentiellement à lui fournir des conseils juridiques en matière immobilière, tâche pouvant être exercée aussi bien en tant qu’administrateur salarié de la société qu’en qualité d’avocat-conseil indépendant de cette dernière, les juges cantonaux ont recherché dans le dossier constitué (en particulier dans les déclarations du recourant et des témoins) les éléments pouvant créditer une thèse plutôt que l’autre. Même si leur appréciation – certes succincte – paraît accorder une importance prépondérante au défaut de production de documents attestant une procédure judiciaire particulière, elle a également porté sur d’autres critères tels que la présence à des réunions dans un but de formation, la gestion effective de la société ou la présence dans les locaux de celle-ci. On ne saurait dès lors faire valablement grief au tribunal cantonal d’avoir violé le principe de la libre appréciation des preuves, en restreignant de manière indue les moyens de preuve que la loi offrait au recourant pour renverser la présomption.

 

Consid. 6.1
A.__ fait également grief à la juridiction cantonale d’avoir violé son devoir de motiver sa décision et d’avoir apprécié arbitrairement les preuves. Il procède à une analyse détaillée de ses déclarations – qu’il estime confirmées et complétées par les témoignages recueillis durant la procédure – et en déduit l’existence de critères – que les juges cantonaux auraient totalement ignorés – permettant de renverser la présomption et de démontrer que les 3703 fr. 70 perçus mensuellement correspondaient à des honoraires pour son activité d’avocat-conseil indépendant et non à un salaire lié à sa qualité d’administrateur.

Consid. 6.2
Sur la base des allégations des parties et des témoins, le tribunal cantonal a admis qu’il était possible que le recourant ait représenté la société de son père en justice et lui ait prodigué des conseils en tant qu’avocat indépendant. Il a toutefois constaté que ni A.__ ni les témoins n’avaient rendu vraisemblable que la rémunération perçue de la société relevait ne serait-ce qu’en partie d’une telle activité: le premier n’avait produit aucun document allant dans ce sens alors que les seconds liaient les conseils donnés à la gestion de la société plutôt qu’à l’activité d’avocat et n’avaient pas été en mesure de citer une procédure judiciaire en particulier. Il a en outre relevé que, dans la mesure où la présence de A.__ aux réunions de la société avait notamment pour but sa formation à la gestion de celle-ci afin de pouvoir s’en occuper à la suite de son père, la rémunération perçue n’était pas sans lien direct avec le rôle de membre du conseil d’administration. Il a par ailleurs considéré que le fait que la gestion de la société était exclusivement assurée par le père du recourant et que ce dernier ne passait qu’occasionnellement dans les locaux n’était pas déterminant pour qualifier la rétribution litigieuse.

Consid. 6.3
Comme cela ressort de la jurisprudence évoquée par les juges cantonaux (cf. consid. 4.1 supra), les manifestations de la vie économique peuvent revêtir des formes si diverses qu’il faut décider dans chaque cas particulier si l’on est en présence d’une activité salariée ou d’une activité indépendante en prenant en considération toutes les circonstances. Il existe de nombreux critères qui aident à faire la distinction et qu’il y a lieu d’apprécier pour trancher la question. Comme le met en évidence le recourant, l’appréciation succincte du tribunal cantonal se focalise principalement sur le défaut de production de documents et quelques rares autres éléments tirés des témoignages recueillis mais passe sous silence la majeure partie de ces derniers. Or les témoins sont unanimes, qu’ils soient architecte indépendant mandaté pour la gestion d’appartements appartenant à B.__ SA, architecte, comptable, secrétaire de la société ou conseiller fiscal de la famille de A.__ ou de B.__ SA. Tous avaient exclusivement affaire au père du recourant pour la gestion de la société. Tous ignoraient l’inscription de A.__ au registre du commerce en qualité d’administrateur de la société ou, du moins, les motifs de cette inscription. Tous admettaient avoir eu des contacts avec le recourant très occasionnellement et constaté qu’en ces occasions, le rôle de A.__ consistait à conseiller son père sur le plan juridique, à entreprendre des démarches administratives dans le cadre de projet d’architecture ou à régler des problèmes (y compris par la voie judiciaire) avec les locataires d’appartements appartenant à B.__ SA ou à une autre société dirigée par le père du recourant. Tous étaient catégoriques quant au fait que c’était le père de A.__ qui prenait les décisions, détenait les informations, était en contact avec les fournisseurs et les régies ou signait les hypothèques. La plupart attestait que le recourant était rarement présent dans les locaux de la société, n’y avait pas de bureau, ni d’adresse e-mail ou de carte de visite, ne donnait pas d’instruction aux employés, ni n’avait de relation avec les fournisseurs ou les clients. Tous soutenaient enfin que le rôle de A.__ au sein de B.__ SA relevait de l’activité d’avocat indépendant plutôt que de celle de salarié.

Consid. 6.4
On relèvera qu’aucune des caractéristiques typiques d’un contrat de travail qui suggéreraient l’existence d’une activité dépendante ou d’un quelconque lien de dépendance ne ressort des témoignages, qui corroborent effectivement les déclarations du recourant. Au contraire, tout laisse à penser que l’activité déployée par le recourant n’avait rien à voir avec la gestion et l’administration de la société et que celui-ci intervenait comme conseiller juridique indépendant et percevait des honoraires pour cette activité. Le fait que les témoins n’ont pas pu nommer une procédure judiciaire en particulier ou que A.__ a invoqué son secret professionnel pour refuser de produire des documents y afférents n’est pas déterminant à lui seul et ne change rien aux déclarations convergentes – et, partant, convaincantes – des témoins sur ce point. La présence du recourant à certaines réunions de régie de B.__ SA dans un but de formation à la gestion de celle-ci afin de pouvoir s’en occuper à la suite du père n’y change rien non plus, dans la mesure où les juges cantonaux n’ont pu évoquer aucun élément du dossier qui permettrait de rattacher la rémunération perçue à cette seule activité. Dans ces circonstances, il apparaît que A.__ avait rendu hautement vraisemblable que les 3703 fr. 70 mensuels correspondaient à des honoraires versés par la société pour rémunérer les conseils juridiques fournis et les activités déployées en qualité d’avocat indépendant, et non au salaire d’administrateur d’une société, d’autant plus que cette rémunération était comptabilisée par B.__ SA sur un compte « honoraires juridiques » et avait également été déclarée comme honoraires par le recourant. Ce dernier a par conséquent renversé la présomption relative à la qualification de salaire de la rémunération d’un administrateur. Son recours est donc fondé.

En conséquence, on constate que les versements mensuels de 3703 fr. 70, pendant la période courant de janvier 2014 à décembre 2016, correspondent à des honoraires ressortissant de l’activité indépendante d’avocat exercée par le recourant. Selon les constatations de la juridiction cantonale, des cotisations sociales ont déjà été prélevées à ce titre sur les montants en cause. Il convient dès lors d’annuler l’arrêt attaqué ainsi que la décision administrative litigieuse.

Le TF admet le recours de A._.

 

Arrêt 9C_437/2021 consultable ici