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Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

Régime transitoire en matière de rentes de veufs de l’AVS suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

 

  1. Contexte

Dans son arrêt du 11.10.2022, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé l’arrêt du 20.10.2020 de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) concernant l’affaire B. contre Suisse (Requête n° 78630/12). La Cour avait conclu que le requérant avait subi une inégalité de traitement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) du fait de l’extinction du droit à la rente de veuf à la majorité du dernier enfant, alors qu’une telle extinction n’est pas prévue pour une veuve se trouvant dans la même situation.

La Suisse doit dès lors se conformer à l’arrêt de la CrEDH qui est désormais définitif et cesser la violation constatée et ce dès l’entrée en force de l’arrêt, soit dès le 11.10.2022. Une adaptation des bases légales est nécessaire et devra être entreprise dans le respect du processus législatif. Celui-ci peut être relativement long et ne pourra de ce fait intervenir qu’ultérieurement. C’est pourquoi, un régime transitoire doit être mis en place pour enrayer la violation constatée par la CrEDH dans de plus brefs délais.

 

  1. Régime transitoire pour les rentes de veuf en cours et futures

Dans la mesure où l’arrêt de la Grande Chambre porte sur un cas individuel, celui-ci ne déploiera d’effets que dans les situations identiques à celle qui a été jugée. Concrètement, cela implique que seuls les veufs qui ont des enfants percevront la rente de veuf aux mêmes conditions que les veuves dans la même situation. Ainsi, la rente de veuf octroyée sur la base de l’art. 23 LAVS ne prendra plus fin lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans et continuera à être versée. Ce régime transitoire ne remet pas en cause l’application des art. 24 al. 1 et 24a LAVS de sorte que les veufs sans enfant ne sauraient prétendre à une rente de veuf sur la base de cet arrêt. S’agissant des hommes divorcés, le droit à la rente de veuf s’éteint dans tous les cas aux 18 ans de l’enfant cadet. En outre, l’arrêt susmentionné n’a aucune influence sur les rentes de veuve.

Le régime transitoire déploie ses effets à compter du 11.10.2022, moment de l’entrée en force de l’arrêt définitif de la Grande Chambre, et s’étendra jusqu’à l’entrée en vigueur d’une prochaine révision de la LAVS en matière de rentes de survivants. Les directives et autres documents seront adaptés dans un deuxième temps.

Les catégories de veufs suivantes sont concernées par le régime transitoire. Sont également concernés les partenaires enregistrés survivants qui sont assimilés à des veufs :

  • Les veufs avec enfants mineurs dont la rente de veuf est en cours de versement au moment de l’arrêt définitif (11.10.2022). Les cas pour lesquels une demande est déposée après le 11.10.2022 sont également concernés. Pour reconnaître un droit à la rente de veuf au-delà des 18 ans de l’enfant, le fait que l’enfant n’ait pas atteint l’âge de 18 ans au 11.10.2022 est déterminant.
  • Les hommes non divorcés avec enfants, qui deviennent veufs après le 11.10.2022, c’est-à-dire dont le droit aux prestations naît suite à un décès intervenu après cette date. La présence d’un ou plusieurs enfants au moment du décès suffit, l’âge de celui-ci est sans importance (comme pour les veuves).
  • Les veufs avec enfants qui ont contesté la décision de suppression de leur rente de veuf et dont l’affaire est pendante au 11.10.2022.
  • Les hommes dont le droit à la rente de veuf renaît sur la base de l’art. 23 al. 5 LAVS, pour autant que l’enfant cadet donnant droit à la rente n’ait pas encore atteint l’âge de 18 ans en date du 11.10.2022.

 

Pour ces personnes, les rentes de veufs seront octroyées selon l’art. 23 LAVS et versées au-delà des 18 ans de l’enfant. Les prestations ne seront donc plus limitées dans le temps et ne s’éteindront qu’en cas de décès, de remariage ou de naissance du droit à une rente de vieillesse de l’AVS, respectivement d’une rente de l’AI, plus élevée. Pour le remplacement de la rente de veuf par sa propre rente de vieillesse ou de l’AI, les conditions sont analogues que pour les rentes de veuve (ch. 5620ss DR).

Les veufs dont les rentes ont cessé d’être versées suite à une décision devenue définitive avant le 11.10.2022 ne sont donc pas concernés par ce régime transitoire. En effet, un changement de loi ou de jurisprudence ne constitue pas un motif de reconsidération. Les demandes visant à faire renaître une rente de veuf éteinte avant le 11.10.2022 en raison de la majorité de l’enfant et dont la décision est passée en force seront rejetées.

Le régime transitoire, comme l’arrêt de la Grande Chambre, déploie ses effets à partir du 11.10.2022. Les éventuelles décisions de suppression de rente intervenues après le 11.10.2022 doivent être annulées. Les décisions de suppression de rente, qui ne sont pas encore entrées en force doivent être annulées. De nouvelles décisions doivent être rendues et le versement de la rente de veuf doit continuer au-delà de la majorité de l’enfant. Si des paiements rétroactifs doivent être effectués, et qu’ils remontent à plus de 2 ans, des intérêts moratoires sont dûs (ch. 10503ss DR).

La mise en place du régime transitoire auprès des organes d’exécution prendra toutefois un certain temps. En effet, il est nécessaire d’adapter le logiciel de calcul de rente, les systèmes informatiques ainsi que les diverses procédures et les registres des rentes. Les droits seront toutefois accordés avec effet rétroactif au 11.10.2022.

  1. Aperçu des constellations possibles et des conséquences qui en découlent

 

Situation au 11.10.2022 Droit à la rente de veuf Mesure à prendre par la caisse de compensation
Rente de veuf en cours (veuf avec un enfant de moins de 18 ans au moment du veuvage)

 

Droit illimité Information et nouvelle décision au bénéficiaire de la prestation. Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu avant le 11.10.2022 (ex. demande tardive) Droit illimité, pour autant que le veuf ait au moins un enfant mineur en date du 11.10.2022 Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Demande de rente de veuf après le 11.10.2022 pour un veuvage intervenu après le 11.10.2022 Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant au moment du veuvage (l’âge de l’enfant n’est pas déterminant) Décision et octroi de la rente de veuf illimitée dans le temps.
Renaissance du droit à la rente de veuf selon l’art. 23 al. 5 LAVS Droit illimité, pour autant que le veuf ait un enfant de moins de 18 ans en date du 11.10.2022 Décision réouvrant le droit à la rente et octroi d’une rente illimitée.
Le versement de la rente de veuf se poursuit au-delà des 18 ans de l’enfant.
Décision de suppression du droit à la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant non entrée en force Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision d’office.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant et versement illimité dans le temps.
Procédure d’opposition en cours suite à la suppression de la rente de veuf en raison de la majorité de l’enfant Nouveau droit illimité à la rente de veuf Nouvelle décision sur opposition.
Reprise du versement de la rente de veuf à compter de la majorité de l’enfant, le cas échéant avec des intérêts moratoires en raison du paiement rétroactif, et versement illimité dans le temps
Procédure de recours pendante au tribunal   Attente de la décision du tribunal
Décision de suppression du droit à la rente de veuf entrée en force, en raison de la majorité de l’enfant atteinte avant le 11.10.2022. Pas de droit à la rente de veuf Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.
Conjoints divorcés au sens de l’art. 24a LAVS Pas de changement, application du droit en vigueur. Les éventuelles demandes de reconsidération doivent être rejetées.

 

  1. Régime transitoire pour les prestations complémentaires en cours et futures

Droit aux PC en cas de perception d’une rente de veuf

Les personnes concernées par le régime transitoire décrit au point 2 qui se voient octroyer et verser une rente de veuf selon l’art. 23 LAVS aux mêmes conditions que les veuves ayant des enfants peuvent faire valoir leur droit à des PC pendant toute la durée de la perception de la rente, pour autant qu’elles remplissent les autres conditions d’octroi. Si un droit échu à une rente de veuf renaît en vertu de ce régime transitoire, l’éventuel droit à des PC renaît également.

 

Droit aux PC sans perception d’une rente de veuf

Pour autant que les autres conditions d’octroi soient remplies, un veuf ou une veuve peut aussi faire valoir un droit à des PC s’il ou elle ne perçoit pas de rente de survivant de l’AVS. La condition est que l’individu aurait eu droit à une rente de survivant si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29 al. 1 LAVS (art. 4 al. 1 let. b, ch. 2, LPC).

Pendant la durée d’application du régime transitoire, les hommes mariés ou en partenariat enregistré qui se retrouvent veufs peuvent faire valoir leur droit à des PC même si leur enfant le plus jeune a déjà au moins 18 ans. Cette règle ne s’applique toutefois que si l’une des conditions suivantes est remplie :

  • l’individu concerné touchait déjà des PC le 11.10.2022, car il était veuf et avait des enfants mineurs ;
  • l’individu concerné est devenu veuf avant le 11.10.2022 et son enfant le plus jeune n’avait pas encore 18 ans à cette date (la date de la demande de PC et celle de la naissance du droit aux PC ne jouent aucun rôle) ;
  • l’individu concerné est devenu veuf après le 11.10.2022 et avait des enfants à ce moment-là (leur âge ne joue aucun rôle) ;
  • le versement des PC a été interrompu lorsque l’enfant le plus jeune a atteint l’âge de 18 ans, l’individu concerné a contesté cette décision et le cas était encore en suspens au 11.10.2022 ;
  • le droit à une rente de veuf qu’aurait eu l’individu concerné si la personne décédée qui partageait sa vie (par union ou partenariat enregistré) avait justifié de la durée minimale de cotisation au sens de l’art. 29, al. 1, LAVS renaît sur la base de l’art. 23, al. 5, LAVS, et l’enfant le plus jeune y donnant droit n’a pas encore 18 ans au 11.10.2022.

Les veufs divorcés ou sans enfants n’ont toujours pas droit à des PC.

 

Calcul des PC annuelles

Pendant la durée du régime transitoire, l’art. 14b OPC-AVS/AI s’applique par analogie aux veufs qui n’ont pas d’enfants mineurs. À partir du mois suivant le 18ᵉ anniversaire de l’enfant le plus jeune, le revenu de l’activité lucrative à prendre en compte pour les veufs non invalides correspond donc au moins au revenu applicable en vertu de l’art. 14b, let. a à c, OPC-AVS/AI. Les dispositions correspondantes des directives (chap. 3.4.2.5 et 3.4.2.6 DPC) s’appliquent également par analogie.

 

Validité du régime transitoire

Le régime transitoire déploie ses effets de manière rétroactive à compter du 11.10.2022. Pour les hommes mariés ou en partenariat enregistré, les droits aux PC échus avant cette date en raison de la majorité de l’enfant le plus jeune ne renaissent pas.

Cependant, si la décision n’était pas encore entrée en force au 11.10.2022, le droit aux PC renaît d’office. Il en va de même pour les PC dont la suspension a déjà été décidée pour une date postérieure au 11.10.2022. Dans ces cas, les décisions d’office correspondantes doivent être reconsidérées et le versement des PC doit reprendre à partir du moment auquel il a été suspendu en raison de la majorité de l’enfant. Pour les éventuels intérêts moratoires, voir le chap. 4.5 DPC.

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 460 du 21.10.2022 consultable ici

Übergangsregelung für Witwerrenten der AHV in Folge Urteil des Europäischen Gerichtshofs für Menschenrechte (EGMR), Mitteilungen an die AHV-Ausgleichskassen und EL-Durchführungsstellen Nr. 460, 21.10.2022, hier verfügbar

NB : Pas de version en italien du Bulletin.

 

9C_543/2021 (f) du 20.07.2022, destiné à la publication – Droit à la rente d’orphelin de l’institution de prévoyance / Pas d’application par analogie de l’art. 49bis al. 3 RAVS en LPP pour l’élément quantitatif – Buts des prestations différents en AVS et en LPP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_543/2021 (f) du 20.07.2022, destiné à la publication

 

Consultable ici

 

Droit à la rente d’orphelin de l’institution de prévoyance / 22 LPP

Interprétation par le TF des art. 25 LAVS, 49bis RAVS et 22 al. 3 let. a LPP

But des prestations du 2e (maintien du niveau de vie antérieur) va au-delà de celui des prestations du 1er pilier (couverture des besoins vitaux)

Pas d’application par analogie de l’art. 49bis al. 3 RAVS en LPP pour l’élément quantitatif – Buts des prestations différents en AVS et en LPP

 

A la suite du décès de son époux, en octobre 2011, A.A.__ (ci-après : la veuve) a été mise au bénéfice de prestations pour survivants de la prévoyance professionnelle. La Caisse de pensions lui a alloué une rente de conjoint survivant et une rente d’orpheline pour sa fille cadette B.A.__ (née en janvier 1992 [ci-après : l’orpheline]), à partir du 01.11.2011.

Depuis la rentrée 2011, l’orpheline a suivi une formation en cours d’emplois auprès de la Haute école C.__ (Bachelor of Science HES en Economie d’entreprise). En parallèle, elle a travaillé au sein de l’administration cantonale jurassienne comme collaboratrice à un taux d’occupation de 50%, du 01.09.2011 au 31.08.2015.

En octobre 2014, la Caisse cantonale de compensation, qui allouait une rente de veuve et une rente d’orpheline de l’assurance-vieillesse et survivants (AVS) à la veuve depuis le 01.11.2011, a informé l’institution de prévoyance qu’elle comptait réviser le dossier de la prénommée, au regard de la formation effectuée en emploi par sa fille. Par courrier du 24.02.2015, la Caisse de pensions a indiqué à la veuve qu’elle supprimait le droit à la rente d’orpheline avec effet rétroactif au 31.12.2012. Elle lui a également demandé le remboursement des rentes d’orpheline versées à tort du 01.01.2013 au 30.09.2014 (à hauteur de 19’102 fr. 65), en mentionnant compenser immédiatement les montants réclamés avec la pension de conjoint survivant. Elle a maintenu sa position par lettre du 15.03.2018, une fois terminée la procédure opposant la veuve à la Caisse cantonale de compensation sur la suppression du droit à la rente d’orpheline de l’AVS au 31.12.2012 et la restitution des prestations versées à tort du 01.09.2013 au 30.09.2014 (notamment arrêt 9C_531/2016 du 11.05.2017).

 

Procédure cantonale

Le 22.01.2020, la veuve a introduit une action contre la Caisse de pensions devant le Tribunal cantonal, en concluant à ce que l’institution de prévoyance soit condamnée à lui verser un montant de 27’193 fr., avec intérêts à 5% depuis le 01.01.2016 (échéance moyenne). Statuant le 08.09.2021, le Tribunal cantonal a rejeté l’action.

 

TF

Le litige porte sur le droit de la veuve à un montant de 27’193 fr. correspondant aux sommes qu’elle fait valoir à titre de retenues par la Caisse la Caisse de pensions sur la rente de conjoint survivant (de février 2015 à juillet 2017) et de rente d’orpheline d’octobre 2014 à mai 2016. En d’autres termes, il s’agit d’examiner si la veuve est tenue de restituer à la Caisse de pensions les montants correspondant aux rentes d’orpheline qui auraient été versées à tort à partir du 01.10.2013. Selon la juridiction cantonale, le droit à la rente d’orpheline s’est éteint dès cette date, parce que l’orpheline ne pouvait alors plus être réputée en formation en raison de son activité lucrative parallèle, ce que la veuve conteste.

 

Consid. 2.2
Sous le titre « Début et fin du droit aux prestations » (pour survivants), l’art. 22 al. 1 LPP prévoit que le droit des survivants aux prestations prend naissance au décès de l’assuré, mais au plus tôt quand cesse le droit au plein salaire. Selon l’art. 22 al. 3 let. a LPP, le droit aux prestations pour orphelin s’éteint au décès de l’orphelin ou dès que celui-ci atteint l’âge de 18 ans. Il subsiste, jusqu’à l’âge de 25 ans au plus, tant que l’orphelin fait un apprentissage ou des études.

Dans sa version en vigueur à partir du 01.01.2014, le Règlement de prévoyance de la Caisse de pensions (ci-après: le règlement) reprend la teneur de l’art. 22 al. 3 let. a LPP, à son art. 48 al. 4 et 5. La disposition réglementaire prévoit que la pension d’orphelin est due jusqu’à la fin du mois au cours duquel l’enfant atteint l’âge de 18 ans (art. 48 al. 4); le droit à la pension subsiste jusqu’à la fin du mois au cours duquel l’enfant atteint l’âge de 25 ans tant que l’enfant fait des études ou un apprentissage (art. 48 al. 5, 1er tiret). Modifié par une décision du Conseil d’administration du 09.01.2021, l’art. 48 al. 4 du règlement prévoit désormais que le droit à la pension subsiste jusqu’à la fin du mois au cours duquel l’enfant atteint l’âge de 25 ans tant que l’enfant est en formation au sens des art. 49biset 49ter RAVS, sans exercer d’activité professionnelle à titre principal ou prépondérant. Dans sa teneur déterminante en l’occurrence, en vigueur avant la modification adoptée le 09.01.2021, l’art. 48 al. 5 du règlement n’a pas de portée propre par rapport à l’art. 22 al. 3 let. a LPP.

Consid. 2.3
En ce qui concerne la rente d’orphelin de l’AVS, l’art. 25 al. 4 LAVS prévoit que le droit à une rente d’orphelin prend naissance le premier jour du mois suivant le décès du père ou de la mère. Il s’éteint au 18e anniversaire ou au décès de l’orphelin. En vertu de l’art. 25 al. 5 LAVS, pour les enfants qui accomplissent une formation, le droit à la rente s’étend jusqu’au terme de cette formation, mais au plus jusqu’à l’âge de 25 ans révolus. Le Conseil fédéral peut définir ce que l’on entend par formation.

Conformément à cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l’art. 49bis RAVS, selon lequel un enfant est réputé en formation lorsqu’il suit une formation régulière reconnue de jure ou de facto à laquelle il consacre la majeure partie de son temps et se prépare systématiquement à un diplôme professionnel ou obtient une formation générale qui sert de base en vue de différentes professions (al. 1). Sont également considérées comme formation les solutions transitoires d’occupation telles que les semestres de motivation et les préapprentissages, les séjours au pair et les séjours linguistiques, pour autant qu’ils comprennent une partie de cours (al. 2). L’enfant n’est pas considéré en formation si son revenu d’activité lucrative mensuel moyen est supérieur à la rente de vieillesse complète maximale de l’AVS (al. 3). Autrement dit, lorsqu’un enfant perçoit un revenu d’activité lucrative mensuel moyen supérieur à la rente de vieillesse AVS, il n’a pas droit à la rente d’orphelin de l’AVS, quand bien même il suit une formation remplissant les conditions des al. 1 et 2 de l’art. 49bis RAVS (cf. ATF 142 V 226).

A partir du 01.01.2013, la rente AVS maximale s’élevait à 2340 fr. par mois.

 

Consid. 4
Selon la jurisprudence, la loi s’interprète en premier lieu d’après sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit de sa relation avec d’autres dispositions légales (interprétation systématique), du but poursuivi, de l’esprit de la règle, des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle qu’elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d’interprétation (ATF 147 V 242 consid. 7.2; 146 V 87 consid. 7.1 et les références).

Consid. 5.1
Dans ses trois versions linguistiques, l’art. 22 al. 3 let. a LPP subordonne le maintien du droit aux prestations pour orphelin après que l’ayant droit a atteint l’âge de 18 ans à la poursuite d’une formation (« tant que l’orphelin fait un apprentissage ou des études », « bis zum Abschluss der Ausbildung », « fintanto che l’orfano è a tirocinio o agli studi »). Si la lettre de la disposition n’est pas identique à celle de l’art. 25 al. 5, 1re phrase, LAVS (« le droit à la rente s’étend jusqu’au terme de cette formation », « bis zu deren Abschluss » [die Ausbildung], « al termine della stessa » [formazione]), le sens en est le même: la fin de la formation (études ou apprentissage) entraîne l’extinction du droit à la rente d’orphelin.

L’art. 22 al. 3 LPP ne définit pas la notion de formation (« Ausbildung ») si ce n’est en indiquant, dans ses versions latines, qu’il s’agit d’effectuer un apprentissage ou des études. Avec ces termes, en tant que synonyme de formation (« Ausbildung »), le législateur a utilisé une notion sujette à interprétation, dans la mesure déjà où il n’apparaît pas d’emblée quel type d’études ou de formation (professionnelle) entre en considération. Le point de savoir quel but les études doivent viser ou si le suivi de cours doit comprendre une durée minimale peut par exemple prêter à discussion.

Consid. 5.2.1
En proposant une disposition sur le début et la fin du droit aux prestations pour survivants de la prévoyance professionnelle accordées aux orphelins (art. 21 al. 3 du projet de loi), le Conseil fédéral a implicitement indiqué suivre la réglementation en vigueur dans l’AVS, en mentionnant s’en écarter sur un seul point non pertinent en l’occurrence (maintien du droit des orphelins invalides pour les deux tiers au moins jusqu’à l’âge de 25 ans; FF 1976 I 117, 200 ch. 521.32). La proposition (devenue finalement l’art. 22 al. 3 LPP) a été adoptée sans discussion dans les deux Conseils du Parlement fédéral (BO CN 1977 1327; BO CE 1980 274 s.).

Consid. 5.2.2
En ce qui concerne la notion de formation dans le domaine de l’AVS à l’époque de l’adoption de l’art. 22 al. 3 LPP et de l’entrée en vigueur de la LPP, le 1er janvier 1985 (RO 1983 797), l’art. 25 al. 2, 2e phrase, LAVS, qui réglait la fin du droit à la rente d’orphelin, faisait référence (dans sa version française) à l’apprentissage et aux études. Selon cette disposition, pour les enfants qui font un apprentissage ou des études, le droit à la rente dure jusqu’à la fin de l’apprentissage ou des études, mais au plus jusqu’à l’âge de 20 ans révolus (FF 1947 I 5, 14; RO 63 843). Alors qu’à l’origine, la commission d’experts avait proposé de servir les rentes d’orphelin jusqu’à l’âge de 18 ans révolus, le Conseil fédéral a prévu d’élever cet âge à 20 ans – lequel a par la suite été fixé à 25 ans (modification de la LAVS du 19 décembre 1963 [6e révision de la LAVS]; RO 1964 277) -, dans sa proposition à l’Assemblée fédérale. Il était d’avis que le principe du droit à la rente jusqu’à 20 ans révolus pour les orphelins qui font un apprentissage ou des études secondaires ou universitaires était nécessaire pour engager à acquérir une formation professionnelle sérieuse (Message du 24 mai 1946 relatif à un projet de loi sur l’assurance-vieillesse et survivants, FF 1946 II 353, 520 ch. III.B.III).

Ce n’est qu’avec la modification de la LAVS du 7 octobre 1994 (10e révision de l’AVS), entrée en vigueur le 1er janvier 1997 (RO 1996 2466), que l’art. 25 LAVS a introduit une délégation de compétence en faveur du Conseil fédéral pour qu’il puisse définir « certains principes ou certaines lignes directrices » sur le sujet de la formation par voie d’ordonnance. La loi indiquait seulement jusque-là que le droit à la rente d’orphelin s’éteint au terme de l’apprentissage ou des études, mais au plus tard au 25e anniversaire de l’ayant droit. Il incombait donc aux tribunaux et à l’administration de définir ce qu’il fallait entendre par apprentissage ou études. Si cette solution présentait l’avantage de permettre à la pratique de s’adapter sans difficulté à l’évolution des conceptions en matière de formation, il paraissait néanmoins judicieux d’accorder une compétence de définition au Conseil fédéral (Message du 5 mars 1990 concernant la dixième révision de l’assurance-vieillesse et survivants, FF 1990 II 1, 93 ch. 51). L’art. 25 al. 3 LAVS a été adopté avec la teneur suivante: « Pour les enfants qui accomplissent une formation, le droit à la rente s’étend jusqu’au terme de cette formation, mais au plus jusqu’à l’âge de 25 ans révolus. Le Conseil fédéral peut définir ce que l’on entend par formation ».

Consid. 5.2.3
Comme le Tribunal fédéral a eu l’occasion de le rappeler dans l’arrêt 9C_915/2015 du 2 juin 2016, publié in ATF 142 V 226 (consid. 3.3), le gouvernement fédéral a fait usage de la compétence en question en introduisant les art. 49bis (Formation) et 49ter (Fin ou interruption de la formation) RAVS avec effet au 1er janvier 2011 (modification du 24 septembre 2010 du RAVS [RO 2010 4573]). Selon l’OFAS (Commentaire des modifications du RAVS au 1er janvier 2011, p. 7 ss), il apparaissait indiqué de fixer des critères de distinction dans les dispositions réglementaires, face à la diversification des filières de formation et à la recrudescence des cas où il semblait légitime de se demander si l’on se trouvait véritablement en présence d’une formation. Cette modification législative avait pour but de permettre l’émergence d’une pratique plus simple et plus uniforme, eu égard notamment aux ambiguïtés observées dans le traitement des interruptions de formation, en particulier pour raisons de service militaire ou de service civil. C’était également l’occasion de reconnaître en tant que formation des semestres de motivations ou des préapprentissages, mais aussi, à l’inverse, de retirer le qualificatif « en formation » aux stagiaires et étudiants qui, au cours de leur stage pratique ou de leurs études, réalisaient un revenu supérieur à la rente de vieillesse complète maximale de l’assurance-vieillesse et survivants. Aucune prestation de sécurité sociale ne devait en effet être versée lorsque l’enfant réalisait un revenu qui lui permettait de subvenir entièrement ou partiellement à ses besoins, ce qui était le cas lorsque l’enfant obtenait un salaire élevé auquel venait s’ajouter une rente d’orphelin ou une rente pour enfant; la limite de revenu correspondait à la rente AVS maximale (commentaire cité, p. 8).

Consid. 5.3
A défaut de disposition légale matérielle sur la notion de formation dans le domaine des assurances sociales, jusqu’à l’entrée en vigueur des art. 49biset 49ter RAVS, c’est la jurisprudence qui s’est chargée de définir ce terme, en posant des principes qui ont été repris par la pratique administrative (cf. Directives de l’OFAS concernant les rentes de l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité fédérale [DR]). La jurisprudence constante a conféré une acception large aux termes d’apprentissage ou d’études, les englobant dans la notion générale de formation professionnelle. Elle a considéré comme formation non seulement le suivi d’une école ou de cours, mais également toute préparation systématique tendant à donner des connaissances professionnelles déterminées (formation professionnelle proprement dite), durant laquelle l’orphelin ne peut prétendre à aucun salaire ou à un salaire sensiblement inférieur – soit inférieur de plus de 25% – à la rémunération initiale de celui qui possède une formation complète dans la branche en cause (ATF 109 V 104 consid. 1a; 108 V 54 consid. 1a; 102 V 208 consid. 1).

S’agissant en particulier de la question de savoir si le fait que l’orphelin titulaire de la rente réalise, durant la formation, un revenu lui permettant de subvenir à ses besoins entraîne l’extinction du droit à la rente d’orphelin de la LAVS, le Tribunal fédéral y a répondu par la négative. Il a souligné que les étudiants et les apprentis qui subvenaient eux-mêmes à leur entretien ne devaient pas être moins bien traités que ceux qui n’avaient pas besoin de gagner leur vie parce qu’ils avaient de la fortune ou étaient entretenus par leurs parents. Même si cette pratique aboutissait à des résultats peu satisfaisants, puisque la rente devait être également versée à des orphelins qui disposaient de revenus élevés permettant de couvrir leurs besoins, il n’en demeurait pas moins que les rentes ordinaires de l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité étaient allouées indépendamment de la situation financière des bénéficiaires. Il incombait au législateur d’adopter une autre réglementation au cas où cela devait être jugé nécessaire pour des motifs de politique sociale (ATF 106 V 147 consid. 3; en dernier lieu, arrêt 9C_674/2008 du 18 juin 2009 consid. 2.2, in SVR 2010 IV n° 1 p. 1, rendu en matière de rente complémentaire pour enfant). Le principe selon lequel la réalisation par l’orphelin d’un revenu permettant de subvenir à son entretien ne fait pas obstacle à l’octroi de la rente a été repris dans la pratique administrative jusqu’au 31.12.2010 (cf. p. ex. ch. 3367 DR, état au 1er janvier 2005 et état au 1er janvier 2010).

Consid. 5.4
Du point de vue systématique, on constate qu’à la différence de l’art. 25 al. 3 LAVS, l’art. 22 al. 3 LPP ne prévoit pas la compétence du Conseil fédéral de définir ce que l’on entend par formation. Il ne comprend pas non plus un renvoi à la notion de formation au sens de la RAVS, comme le fait par exemple l’art. 1 al. 1 de l’ordonnance du 31 octobre 2007 sur les allocations familiales (OAFam), en relation avec l’art. 3 al. 1 let. b LAFam, pour le droit à l’allocation de formation. Selon cette disposition de l’OAFam, ce droit « existe pour les enfants accomplissant une formation au sens des art. 49bis et 49ter du règlement du 31 octobre 1947 sur l’assurance-vieillesse et survivants ».

Or, pour admettre la conformité au droit fédéral de l’art. 49bis al. 3 RAVS (en relation avec une rente complémentaire pour enfants de l’assurance-invalidité [art. 35 al. 1 LAI]), le Tribunal fédéral a mis en évidence, dans l’ATF 142 V 226 déjà cité, que la délégation législative de l’art. 25 al. 5 LAVS accordait un (très) large pouvoir d’appréciation au Conseil fédéral. Reconnaissant que la limite de revenu fixée à l’art. 49bis al. 3 RAVS ne présentait pas de lien direct avec la notion de « formation », il a considéré que la délégation législative devait néanmoins être comprise de façon large et être interprétée à la lumière du but assigné par le législateur à la rente complémentaire pour enfant (de l’AVS). Dès lors qu’un enfant qui réalisait à côté de sa formation un revenu mensuel moyen au cours d’une année civile au moins équivalent à la rente maximale de l’AVS était en mesure de subvenir dans une large mesure, si ce n’est totalement, à ses besoins et n’était plus tributaire du soutien financier de ses parents. De ce fait, le parent bénéficiaire de la rente n’avait plus d’obligation d’entretien à l’égard de son enfant, si bien que la rente complémentaire pour enfant perdait sa justification au regard du droit des assurances sociales (ATF 142 V 226 consid. 7.2.2).

Consid. 5.5
A l’instar de la rente d’orphelin du premier pilier (cf. ATF 134 V 15 consid. 2.3.3), la rente d’orphelin prévue par l’art. 20 al. 1 LPP – dont l’art. 22 LPP détermine le début et la fin – a pour fonction de compenser les difficultés financières liées à la disparition d’un parent. Par définition, elle naît lorsque le père ou la mère est décédé et est due à l’enfant qui en est directement l’ayant droit. Même si le statut familial (enfant du défunt) au moment du décès de la personne assurée ouvre en principe le droit à la rente d’orphelin, l’idée que l’entretien de l’enfant est supprimé en raison du décès, ce que la rente d’orphelin doit venir combler, du moins en partie, joue également un rôle fondamental (MARC HÜRZELER, System und Dogmatik der Hinterlassenensicherung im Sozialversicherungs- und Haftpflichtrecht, Berne 2014, p. 96). Après que l’orphelin a atteint l’âge de 18 ans révolus, l’élément déterminant pour le droit à la rente correspondante ou le maintien de ce droit est la situation de formation concrète dans laquelle il se trouve, qui limite voire même empêche la mise en œuvre de la capacité de subvenir à ses propres besoins (HÜRZELER, op. cit., p. 335).

A la différence de la rente pour orphelin de l’assurance-vieillesse et survivants, qui fait partie des prestations du premier pilier (assurance-vieillesse, survivants et invalidité fédérale et prestations complémentaires) devant couvrir les besoins vitaux des personnes assurées de manière appropriée (art. 112 al. 2 let. b Cst.), la rente pour orphelin de la prévoyance professionnelle relève des prestations du deuxième pilier qui doivent permettre aux personnes assurées de maintenir de manière appropriée leur niveau de vie antérieur (art. 113 al. 2 let. a Cst.; voir également art. 1 al. 1 LPP; cf. ATF 136 V 313 consid. 3.1). Le but des prestations du deuxième pilier, soit le maintien du niveau de vie, va donc au-delà de celui des prestations du premier pilier (couverture des besoins vitaux), même si cette conception n’a pas valeur absolue, dans la mesure où, pour les personnes de condition modeste, maintien du niveau de vie et couverture des besoins vitaux tendent par exemple à se confondre (ATF 136 V 313 consid. 3.2 et les références).

 

Consid. 6.1
Selon la doctrine, en raison de l’étroite coordination entre le premier et le deuxième pilier, en particulier dans le contexte des conditions du droit aux prestations, il y a lieu pour l’interprétation de l’art. 22 al. 3 let. a LPP de recourir à la jurisprudence et aux avis doctrinaux relatifs à l’art. 25 al. 2, 2e phrase, LAVS (HANS MICHAEL RIEMER, Familienrechtliche Beziehungen als Leistungsvoraussetzungen gemäss AHVG/IVG, BVG-Obligatorium und freiwilliger beruflicher Vorsorge, in Mélanges pour le 65e anniversaire de Cyril Hegnauer, Berne 1986, p. 414 et 422; GABRIELA RIEMER-KAFKA, Soziale Sicherheit von Kindern und Jugendlichen, Berne 2011, n° 648 et note de bas de page 968; HÜRZELER/BRÜHWILER, Obligatorische berufliche Vorsorge, in Soziale Sicherheit, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR] vol. XIV, 3e éd. 2016, p. 2117 n° 144; ISABELLE VETTER-SCHREIBER, BVG/FZG Kommentar, 4e éd. 2021, n° 1 et 5 ad art. 22 LPP). Pour la doctrine, étant donné que l’art. 22 al. 3 let. a LPP correspond à la réglementation de l’art. 25 al. 5 LAVS, les dispositions d’exécution des art. 49biset 49ter RAVS sont applicables par analogie en matière de prévoyance professionnelle. Par conséquent, lorsque l’orphelin exerce une activité lucrative en parallèle à sa formation, le statut de formation est circonscrit par une comparaison quantitative où le montant du revenu généré est déterminant. Un enfant est dès lors considéré comme n’étant pas en formation lorsque le revenu moyen mensuel provenant de son activité lucrative dépasse le montant maximal de la rente de vieillesse (mensuelle) de l’AVS (HÜRZELER/SCARTAZZINI, in LPP et LFLP, 2e éd. 2020, n° 25 et 29 ad art. 22 LPP; ESTHER AMSTUTZ, in Basler Kommentar, Berufliche Vorsorge, 2021, n° 29 s. ad art. 22 LPP; dans ce sens également MIRIAM LENDFERS, Junge Erwachsene in Ausbildung, in Jahrbuch zum Sozialversicherungsrecht [JaSo] 2014, p. 131).

Consid. 6.2
Le point de vue de la doctrine, que la juridiction cantonale a intégralement fait sien, ne peut pas être entièrement suivi.

Consid. 6.2.1
Il paraît justifié d’interpréter la notion de formation de l’art. 22 al. 3 let. a LPP par analogie avec celle de l’art. 25 al. 5 LAVS, en fonction des éléments qualitatifs prévus par l’art. 49bis al. 1 et 2 RAVS. Les éléments qualitatifs prévus par l’art. 49bis RAVS reprennent, dans une large mesure, la jurisprudence fédérale sur la notion de formation au sens de la LAVS, à laquelle le Tribunal fédéral s’est référé pour définir les termes d' »apprentissage et d’études » [soit concrètement « Ausbildung »] au sens de l’art. 22 al. 3 let. a LPP (arrêt B 25/97 du 13 novembre 1998 consid. 2e, in RSAS 2000 p. 535).

Consid. 6.2.2
En revanche, en ce qui concerne l’élément quantitatif par lequel le Conseil fédéral a défini la notion de formation en adoptant l’art. 49bis al. 3 RAVS, le Tribunal fédéral avait considéré par le passé – avant l’entrée en vigueur de cette disposition – que le fait que l’orphelin réalisait un revenu lui permettant de subvenir à ses besoins, en parallèle à ses études, ne constituait pas un motif d’extinction du droit à la rente d’orphelin de l’AVS (consid. 5.3 supra). Il a par ailleurs retenu que la limite de revenu figurant à l’art. 49bis al. 3 RAVS ne présente pas de lien direct avec la notion de formation (cf. aussi LENDFERS, op. cit., p. 128); s’il a admis la conformité au droit fédéral de cette norme, c’est en raison du large pouvoir d’appréciation dont disposait le Conseil fédéral au regard de la délégation législative de l’art. 25 al. 5, 2e phrase, LAVS (consid. 5.4 supra). Une telle délégation législative fait cependant défaut à l’art. 22 al. 3 let. a LPP, tout comme un renvoi à la norme de la LAVS, ce qui exclut, sous l’angle systématique, une application directe de l’art. 49bis al. 3 RAVS.

Quant à une application par analogie de cette disposition, en ce sens que l’élément quantitatif prévu vaudrait également pour la rente d’orphelin de la prévoyance professionnelle, elle ne prend pas en considération le but des prestations du deuxième pilier, qui n’est pas le même que celui de l’AVS/AI (consid. 5.5 supra). L’idée qui sous-tend la limite quantitative prévue par l’art. 49bis al. 3 RAVS est que l’enfant qui réalise un revenu équivalent à celle-ci est en mesure de subvenir dans une large mesure à ses besoins (consid. 5.4 supra). Or le droit à une rente d’orphelin de l’AVS et celui à une rente d’orphelin de la prévoyance professionnelle obligatoire sont en principe ouverts en parallèle (cf. art. 34a al. 2 LPP sur le concours des prestations), de sorte que la rente d’orphelin de la prévoyance professionnelle est censée améliorer la situation de l’enfant au-delà de la seule couverture de ses besoins vitaux. La suppression de la rente d’orphelin du deuxième pilier, pour le même motif que celle du premier pilier, revient à nier que la prestation de la prévoyance professionnelle a pour but d’améliorer la situation financière de l’enfant en formation, l’objectif étant le maintien du niveau de vie et non seulement la couverture des besoins vitaux.

L’application de la limite forfaitaire, fixée de manière schématique à l’art. 49bis al. 3 RAVS, ne se justifie par conséquent pas dans le cadre de l’art. 22 al. 3 let. a LPP (cf. aussi les critiques sur la limite forfaitaire, LENDFERS, op. cit., p. 135; R IEMER-KAFKA, op. cit., n° 398 et note de bas de page 622; HÜRZELER, op. cit., p. 335 s. et note de bas de page 1175).

Consid. 6.2.3
Pour le reste, l’institution de prévoyance ne soutient pas que l’exercice de l’activité lucrative en cause aurait empêché la fille de la veuve de suivre sa formation avec l’assiduité nécessaire pendant la période concernée, étant précisé que la situation d’un abus de droit, où un orphelin qui consacrerait la plus grande partie de son temps à l’exercice d’une activité lucrative tout en restant inscrit dans un cursus de formation pour ne pas perdre son droit, demeure réservée.

 

Consid. 7
Il résulte de ce qui précède que la suppression du droit à la rente pour orphelin de la fille de la veuve à partir du 01.01.2013 en application par analogie de l’art. 49bis al. 3 RAVS n’est pas conforme au droit de la prévoyance professionnelle. En conséquence, les conditions d’une restitution de prestations indument perçues au sens de l’art. 35a LPP, examinées par la juridiction cantonale, n’étaient pas réalisées. Il convient de reconnaître l’obligation de la Caisse de pensions de verser à la veuve la somme de 27’193 fr. réclamée, montant que l’institution de prévoyance ne remet pas en cause.

Concernant les intérêts moratoires, le règlement prévoit qu’un intérêt moratoire est dû en cas de versement de pensions, à partir du jour de la poursuite ou de la demande en justice, le taux correspondant au taux minimal LPP (art. 24 let. a du règlement de la Caisse de pensions intimée). Par « taux minimal LPP », la Caisse de pensions entend appliquer aux intérêts moratoires le taux d’intérêt minimal fixé dans la prévoyance professionnelle obligatoire, prévu à l’art. 12 OPP 2 (RS 831.441.1), à savoir 1% (pour la période courant dès le 1er janvier 2017; art. 12 let. j OPP 2). La prétention de la veuve doit donc être assortie d’un taux d’intérêts de 1% à partir du 22.01.2020 (date à laquelle l’action a été introduite en instance cantonale; ATF 137 V 373 consid. 6.6; 119 V 131).

 

Le TF admet le recours de la veuve.

 

Arrêt 9C_543/2021 consultable ici

 

9C_358/2021 (f) du 04.03.2022 – Concubinage et prestation de survivant – 20a LPP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_358/2021 (f) du 04.03.2022

 

Consultable ici

Résumé tiré du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 159 disponible ici

 

Concubinage et prestation de survivant / 20a LPP

 

En l’absence d’annonce écrite du concubinage et signée par les deux partenaires du vivant de l’assuré, il n’y a pas de droit à une prestation de survivant.

X et Y ont formé une communauté de vie, dont sont issus deux enfants nés en 2017 et 2020. X. était assuré à la Caisse de pensions C. X. est décédé d’une crise cardiaque en 2020. La Caisse C. a alloué des rentes d’orphelins ainsi que des capitaux-décès aux enfants du couple. Par contre, elle n’a pas accordé de prestations à la concubine Y. au motif qu’il n’y avait pas eu d’annonce écrite du concubinage du vivant de X.

Selon le TF, s’il ne fait aucun doute que le décès de l’assuré X, partenaire de Y. et père de ses enfants, est intervenu de manière particulièrement inattendue, il n’est pas de ce seul fait choquant qu’on oppose à Y. l’omission du couple d’annoncer leur communauté de vie à la caisse de pensions du défunt. Cela vaut d’autant plus qu’ils vivaient ensemble depuis 2012 et que leur premier enfant est né en 2017, de sorte qu’ils ont disposé de plusieurs années pour procéder à l’annonce requise. La recourante Y. ne fait d’ailleurs plus valoir que l’exigence d’annonce n’aurait pas été portée à la connaissance de l’assuré, étant précisé qu’au moins à partir de 2017, la Caisse C. avait attiré l’attention de X. sur cette exigence par une note figurant dans les certificats de prévoyance.

Le TF considère que le règlement de la Caisse C. conditionne clairement le droit à la rente du concubin survivant à une annonce écrite et signée des deux partenaires du vivant de l’assuré. Une telle condition est conforme à l’art. 20a LPP et ne viole pas le principe de l’égalité de traitement (art. 8 al. 2 Cst.). Par ailleurs, cette exigence ne constitue pas une simple règle d’ordre, mais bel et bien une condition formelle du droit à la rente, licite selon la jurisprudence constante (cf. p. ex. ATF 142 V 233 consid. 2.1). Le fait d’avoir déclaré devant témoins vouloir procéder à une telle annonce ne suffit par conséquent pas à fonder le droit à la rente de survivant.

 

 

Arrêt 9C_358/2021 consultable ici

Résumé tiré du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 159 disponible ici

 

 

CSSS-N : Vers une réforme en profondeur des rentes de survivants

CSSS-N : Vers une réforme en profondeur des rentes de survivants

 

Communiqué de presse du Parlement du 08.04.2022 consultable ici

 

Afin de répondre aux évolutions de la société, la Commissions de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS-N) souhaite revoir en profondeur les prestations des rentes de survivants.   Elle juge en effet que l’inégalité de traitement entre veuves et veufs ne se justifie plus, tout comme la distinction en fonction de l’état civil. Ainsi, elle a donné suite aux initiatives parlementaires « Iv. pa. Gredig. Prestations de survivants. Mettre fin aux inégalités de traitement » (21.416), par 18 voix contre 5 et 2 abstentions, et « Iv. pa. Kamerzin. Egalité pour les veuves et les veufs dès que le dernier des enfants atteint l’âge de 18 ans » (21.511), par 14 voix contre 11. Elle a également décidé, par 20 voix contre 2 et 3 abstentions, de déposer l’initiative « Iv. Pa. CSSS-N. Égalité de traitement pour les veufs et les veuves » (22.426). En revanche, elle propose par 11 contre 9 et 5 abstentions de ne pas donner suite à « Iv. pa. Kamerzin. Egalité pour les veuves et les veufs de plus de 45 ans » (21.512), jugeant que l’octroi d’une rente de survivant à un conjoint n’ayant pas d’enfant correspond à un modèle de société dépassé.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 08.04.2022 consultable ici

 

Verso una riforma radicale delle rendite per superstiti, Comunicato stampa dell’08.04.2022

Für eine tiefgreifende Reform der Hinterlassenenrenten, Medienmitteilung den 08.04.2022

 

 

 

Motion Gysin 21.4282 « 2e pilier. Régler le concubinage dans la loi » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Motion Gysin 21.4282 « 2e pilier. Régler le concubinage dans la loi » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de préparer les modifications législatives nécessaires afin que les caisses de pension garantissent, aux mêmes conditions, les prestations prévues pour les conjoints survivants aux concubins survivants.

 

Développement

La loi prévoit que le conjoint survivant à droit à une rente s’il a au moins un enfant à charge, qu’il a atteint l’âge de 45 ans et que le mariage a duré au moins 5 ans. Les personnes divorcées ont également droit à la rente, si certaines conditions sont remplies. Par contre, la loi ignore les concubins. Certaines caisses de pension prévoient dans leur règlement des prestations pour les concubins survivants.

L’affiliation à telle ou telle caisse de pension relève de l’employeur. L’employé n’a pas la possibilité de choisir l’institution qui répond le mieux à ses besoins. Sachant que plus de 20 % des couples suisses vivent en concubinage et que ce chiffre tend à augmenter, il est grand temps de moderniser la réglementation du 2e pilier.

Les prestations pour les partenaires survivants ne doivent pas dépendre du règlement des caisses de pension. Elles doivent être prévues par loi afin de garantir l’égalité de traitement et d’éviter des lacunes de prévoyance.

 

Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Les prestations pour survivants du régime obligatoire du 2e pilier (art. 19 ss LPP, RS 831.40 ; art. 20 OPP 2, RS 831.441.1 ; art. 15 OLP, RS 831.425) tiennent compte du fait que, dans notre système juridique, les personnes ayant conclu un mariage ou un partenariat enregistré forment une communauté économique. De nombreuses institutions de prévoyance prennent également en considération dans leur règlement la réalité sociale des personnes qui mènent de fait une vie de couple en leur donnant la possibilité de percevoir une rente à la place ou parfois en complément d’un capital-décès. Elles permettent ainsi aux assurés qui optent consciemment pour un partenariat informel plutôt que pour un mariage ou un partenariat enregistré, avec les conséquences juridiques qui y sont attachées, de choisir les bénéficiaires de leurs prestations. Nombre d’assurés qui vivent en concubinage souhaitent en effet que les éventuelles prestations de décès soient, par exemple, versées à leurs propres enfants adultes plutôt qu’à leur partenaire, surtout si ce dernier dispose déjà d’une prévoyance vieillesse suffisante ou si la relation avec lui est encore relativement récente. Placer le concubinage et le mariage sur un pied d’égalité pour ce qui est des prestations pour survivants du régime obligatoire reviendrait à limiter ces possibilités de choix et priverait le concubinage de certaines caractéristiques qui conduisent précisément des personnes à privilégier cette forme de relation par rapport au mariage. En outre, les représentants des salariés ont la possibilité, au sein des conseils de fondation paritaires, d’influencer l’ordre des bénéficiaires prévu dans le règlement et d’apporter les changements qui leur paraissent adéquats. Enfin, les coûts supplémentaires qui découleraient d’une telle mise sur un pied d’égalité du concubinage et du mariage devraient être supportés de manière solidaire par l’ensemble des assurés d’une institution de prévoyance (ainsi que par l’employeur dans le cadre de l’obligation paritaire de cotiser).

Les droits à des prestations de survivants ne doivent pas être considérés indépendamment du contexte global. Dans la réglementation actuelle de la prévoyance professionnelle, le mariage et le concubinage ont des conséquences juridiques fondamentalement différentes. Une personne qui perçoit une rente de survivant d’une relation antérieure perd immédiatement le droit à cette prestation si elle se remarie, alors qu’elle le conserve si elle vit en concubinage. Les conséquences de la rupture d’une relation pour d’autres raisons que le décès sont également très différentes : en cas de divorce ou de dissolution d’un partenariat enregistré, les prétentions de prévoyance acquises durant le mariage ou le partenariat enregistré sont généralement partagées à parts égales. A l’inverse, une personne qui vivait en concubinage peut conserver pour elle-même toutes les prétentions de prévoyance acquises pendant la durée de la relation. Un éventuel alignement des droits des concubins sur les droits des conjoints en ce qui concerne les prestations de survivants ne devrait donc pas être opéré sans tenir compte du contexte de la réglementation du 2e pilier dans son ensemble.

La question des conséquences juridiques de la vie en concubinage se pose actuellement dans d’autres domaines du droit. Les décisions sur d’éventuelles modifications législatives ne devraient donc pas être prises de manière isolée, mais devraient tenir compte, dans la mesure du possible, de l’introduction possible d’un  » pacte civil de solidarité  » (Pacs). L’élaboration du rapport en réponse au postulat Caroni 18.3234 « Etat des lieux sur le concubinage en droit actuel » et aux postulats 15.3431 Caroni et 15.4082 CSEC-N  » Un pacs spécifique à la Suisse  » est en cours. Le Conseil fédéral devrait adopter le rapport au premier trimestre 2022.

 

Proposition du Conseil fédéral du 17.11.2021

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

 

Motion Gysin 21.4282 « 2e pilier. Régler le concubinage dans la loi » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021 consultable ici

 

 

8C_462/2010 (d) du 22.10.2010 – ATF 136 V 419 – Amiante – Rente de veuve – 29 LAA / Retraite anticipée partielle (50%) avant la retraite ordinaire – Eclosion de la maladie professionnelle postérieure à la retraite AVS / Gain assuré pour la rente de survivants – 15 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_462/2010 (d) du 22.10.2010 [ATF 136 V 419]

 

Consultable ici

Publié aux ATF 136 V 419

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Amiante – Rente de veuve / 29 LAA

Retraite anticipée partielle (50%) avant la retraite ordinaire – Eclosion de la maladie professionnelle postérieure à la retraite AVS

Gain assuré pour la rente de survivants / 15 LAA – 24 al. 1 OLAA

Renchérissement de la rente

 

Assuré, né en 1935, a travaillé comme ajusteur de machines chez S.__ AG de 1963 jusqu’à sa retraite ordinaire fin mai 2000. Après avoir pris une retraite partielle (50%) en 1996 pour des raisons économiques, il n’a travaillé que 30% du temps au cours des années suivantes ; pour le 20% restant, il était considéré comme chômeur.

Un mésothéliome pleural a été diagnostiqué le 21.10.2002, vraisemblablement contracté à la suite d’une exposition à l’amiante dans le cadre de son travail entre 1963 et 1978. Il est décédé le 04.01.2005 des suites de cette maladie.

L’assurance-accidents a octroyé une rente de veuve de CHF 1’103.20 ou – dès le 01.01.2007 – de CHF 1’112.05 par mois avec effet rétroactif au 01.02.2005 ; le gain assuré déterminant était basé sur le revenu que l’assuré aurait pu obtenir d’un emploi à 50% chez son ancien employeur avant sa retraite ordinaire sans chômage.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 06.04.2010, admission du recours par le tribunal cantonal, renvoyant la cause à l’assurance-accidents pour nouvelle décision au sens des considérants. La cour cantonale a notamment considéré que l’assureur-accidents avait à juste titre fondé la rente de veuve sur le salaire que le défunt avait gagné en dernier lieu avant la retraite ordinaire dans le cadre d’un rapport de travail à 50% – sans chômage partiel ; toutefois, le revenu ainsi calculé devrait également être adapté au renchérissement pour la période comprise entre la retraite du défunt fin mai 2000 et le début de la rente le 01.02.2005.

 

TF

Il est incontesté que l’assuré est décédé des suites d’une maladie professionnelle au sens de l’art. 9 LAA. Il s’agissait d’une conséquence de substances nocives (amiante) auxquelles il avait été exposé entre 1963 et 1978, lors de son emploi dans la société S.__ AG.

Dans l’ATF 135 V 279, le Tribunal fédéral a reconnu que, sur la base des normes pertinentes (art. 15 al. 1-3 et art. 34 al. 1 LAA; art. 22 al. 2 et 4, art. 23 s. ainsi qu’art. 44 s. OLAA) aucune solution spécifique n’est prévue pour la constellation à apprécier en l’espèce – l’assuré avait quitté la vie active lors de l’éclosion de la maladie professionnelle parce qu’il avait atteint l’âge de la retraite AVS et n’est donc plus (plus) assuré.

Le concept de la LAA repose sur l’hypothèse que l’événement assuré s’est produit à un moment où l’assuré exerce encore une activité professionnelle.

Dans des cas comme celui qui nous occupe, l’assurance-accidents constitue, à titre exceptionnel, une assurance pour les personnes n’exerçant pas d’activité professionnelle et pour lesquelles il n’existe aucune réglementation pertinente en matière de calcul de rente (cf. ALFRED MAURER, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 1985, p. 362).

La règle de base pour le calcul de la rente est que le dernier salaire avant la survenance de l’événement assuré, c’est-à-dire en l’occurrence le début de la maladie professionnelle (octobre 2002 ; cf. art. 9 al. 3 LAA), est déterminant. Comme ce n’est généralement pas le cas pour les retraités AVS [absence de salaire avant la survenance de la maladie professionnelle], les revenus que l’assuré a perçus en dernier lieu alors qu’il était encore assuré sont considérés comme déterminants (ATF 135 V 279 consid. 4.1 et 4.2.1 p. 281 ss et références à MAURER, loc. cit. p. 220 ci-dessus ; le même, Recht und Praxis der Schweizerischen obligatorischen Unfallversicherung, 1963, p. 133).

Dans ce contexte, c’est à juste titre que la cour cantonale a retenu comme élément déterminant pour le calcul du gain assuré le salaire que le défunt aurait gagné en tant qu’employé assuré avant la retraite ordinaire le 31.05.2000 dans le cadre d’un pensum de 50% auprès de l’ancien employeur. La décision sur opposition est, sur ce point, correcte.

En ce qui concerne la question du renchérissement, il a été jugé dans l’ATF 135 V 279 (en particulier consid. 5 p. 283 ss.) que la rente de survivant fictive – in casu calculée hypothétiquement du de la retraite ordinaire de l’assuré décédé à la fin du mois de mai 2000 – (et non le gain assuré sur lequel elle était basée) devait être renchérie jusqu’au début effectif de la rente le 01.02.2005. Cette conclusion résulte sans équivoque de l’ATF 135 V 279 consid. 5.3.1 et 5.3.2 (p. 285 et suivantes), alors que le regest correspondant publié dans le Recueil officiel ne reflète certes pas tout à fait clairement le contenu essentiel du dispositif.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents.

 

Arrêt 8C_462/2010 consultable ici – ATF 136 V 419 consultable ici

Proposition de citation : Arrêt du Tribunal fédéral 8C_462/2010 (d) du 22.10.2010 [ATF 136 V 419] – Amiante – Rente de veuve, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2021/09/8c_462-2010-atf-136-v-419)

 

8C_443/2013 (f) du 24.06.2014 – Amiante – Rente de veuve – 29 LAA / Invalidité totale [non LAA] avant la retraite AVS – Eclosion de la maladie professionnelle postérieure à la retraite AVS / Gain assuré pour la rente de survivants – 15 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_443/2013 (f) du 24.06.2014

 

NB : arrêt à 5 juges non publié

Consultable ici

 

Amiante – Rente de veuve / 29 LAA

Invalidité totale [non LAA] avant la retraite AVS – Eclosion de la maladie professionnelle postérieure à la retraite AVS

Gain assuré pour la rente de survivants / 15 LAA

 

L’assuré a travaillé comme maçon au service de plusieurs entreprises en Suisse entre 1962 et 1994. A partir du 01.10.1994, il a été mis au bénéfice d’une rente entière de l’assurance-invalidité en raison d’affections dorsales. A l’âge terme, le droit à une rente de vieillesse de l’AVS lui a été reconnu.

A la suite d’un contrôle médical le 25.01.2008, le médecin-traitant a constaté la présence d’une fibrose pulmonaire possiblement sur toxicité à la Cordarone. Après diverses investigations, l’assurance-accidents a admis sa responsabilité au titre d’une maladie professionnelle, dont elle a fixé la survenance au 25.01.2008.

L’assuré est décédé le 24.05.2010. Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a refusé d’allouer une rente de survivante à la veuve de l’assuré. Elle a considéré qu’aucun gain assuré ne pouvait être pris en considération pour le calcul de la rente (théorique) à laquelle l’intéressée pouvait prétendre. En effet, avant que la maladie professionnelle ne se manifeste, l’assuré décédé avait bénéficié, successivement, d’une rente de l’assurance-invalidité, puis d’une rente de l’AVS, de sorte qu’il n’avait réalisé aucun revenu déterminant au sens du droit de l’AVS.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 103/12 – 35/2013 – consultable ici)

Par jugement du 07.05.2013, admission du recours par le tribunal cantonal, renvoyant la cause à l’assurance-accidents pour nouvelle décision au sens des considérants.

 

TF

Il est admis en l’espèce que l’assuré est décédé des suites d’une maladie professionnelle causée par une exposition à des poussières d’amiante et qui s’est déclarée en janvier 2008.

Le droit à une rente de conjoint survivant (art. 29 LAA) en faveur de la veuve n’est pas contesté en tant que tel par l’assurance-accidents. Celle-ci se prévaut toutefois de l’absence d’un gain susceptible d’être pris en compte au titre de gain assuré en faisant valoir que le défunt était au bénéfice d’une rente entière de l’assurance-invalidité à partir de 1994.

Les principaux risques pour la santé associés à l’exposition à l’amiante sont le développement de fibroses (asbestose, lésions pleurales) et de cancers (essentiellement carcinome bronchique et mésothéliome). Le risque de développement d’une maladie en raison d’une exposition à l’amiante dépend en particulier de l’intensité et de la durée d’exposition. Le temps de latence avant l’apparition de la maladie est important et peut s’étendre sur plusieurs décennies (cf. ATF 133 V 421 consid. 5.1 p. 426; cf. aussi ATF 140 II 7). Ce laps de temps n’a toutefois pas d’incidence sur le droit aux prestations de l’assurance-accidents – notamment la rente de conjoint survivant – qui sont dues indépendamment de l’existence d’un rapport d’assurance au moment où la maladie s’est déclarée. Ce qui importe, c’est que l’intéressé ait été assuré pendant la durée de l’exposition (Alfred Maurer, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2e éd. 1989, p. 219).

Conformément à l’art. 15 LAA, les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Est réputé gain assuré pour le calcul des rentes le salaire que l’assuré a gagné durant l’année qui a précédé l’accident (al. 2). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions sur le gain assuré pris en considération dans des cas spéciaux, notamment en cas de maladie professionnelle (art. 15 al. 3 let. b LAA). A ce jour, le Conseil fédéral n’a toutefois pas fait usage de cette délégation de compétence (voir les art. 22 et 24 OLAA). En principe, et comme cela résulte de l’art. 9 al. 3 LAA précité, le gain assuré pour le calcul des rentes en cas de maladie professionnelle correspond au gain que l’assuré a obtenu dans l’année qui a précédé le déclenchement de la maladie professionnelle. Cette réglementation ne tient toutefois pas compte du fait que certaines maladies professionnelles ont, comme on l’a vu, un temps de latence très important; elles peuvent donc se déclarer bien après que l’assuré a atteint l’âge d’ouverture du droit à une rente de l’AVS, et, par conséquent, à une époque où il n’est depuis longtemps plus assuré contre les accidents et les maladies professionnelles.

Comme ni la LAA ni ses dispositions d’exécution ne règlent cette situation particulière, le Tribunal fédéral a comblé cette lacune par voie jurisprudentielle. Le gain assuré déterminant pour le montant d’une rente de survivant doit être calculé en fonction du salaire que le bénéficiaire d’une rente de vieillesse décédé – des suites d’une maladie professionnelle – a perçu en dernier lieu lorsqu’il était assuré conformément à la LAA. Ce gain est ensuite adapté à l’évolution nominale des salaires dans la branche professionnelle initiale jusqu’à l’âge donnant droit à une rente de vieillesse de l’AVS. La rente (fictive) de survivant ainsi obtenue doit encore être adaptée au renchérissement pour la période comprise entre la mise à la retraite du défunt et le moment de la naissance du droit à la rente de l’époux survivant (ATF 136 V 419; 135 V 279; voir aussi André Pierre Holzer, Der versicherte Verdienst in der obligatorischen Unfallversicherung, RSAS 2010 p. 201 ss, plus spécialement p. 228 sv.).

L’ATF 135 V 279 concernait un assuré né en 1929 qui avait travaillé comme salarié (et soumis à ce titre à l’assurance-accidents obligatoire) jusqu’en 1953. Il avait ensuite travaillé comme indépendant et n’avait donc plus de couverture d’assurance obligatoire. Il n’avait pas été assuré à titre facultatif. En 1994, il avait pris sa retraite. Il est décédé en 2005 des suites d’une infection pulmonaire découverte en février de la même année et causée par une exposition à l’amiante au cours de son activité salariée. Quant à l’ATF 136 V 419, il concernait un assuré né en 1935 qui avait travaillé de 1963 jusqu’en mai de l’année 2000 dans une entreprise où il avait été exposé à l’amiante. A partir de l’année 1996, il avait été mis à la retraite anticipée à 50 % pour raisons économiques. A l’occasion d’une visite médicale le 21 octobre 2002, un mésothéliome pleural avait été diagnostiqué et attribué à une exposition à l’amiante dans son activité professionnelle antérieure. Il était décédé le 4 janvier 2005.

Les règles jurisprudentielles susmentionnées, relatives au gain assuré, ont ensuite été appliquées dans un cas où comme en l’espèce l’assuré avait travaillé comme salarié (dans une activité exposée). Il avait ensuite été mis au bénéfice d’une rente entière de l’assurance-invalidité jusqu’à l’âge de la retraite. Il était décédé (après sa retraite) des suites d’une maladie professionnelle liée à son activité salariée antérieure (arrêt 8C_689/2013 du 24 janvier 2014).

Il n’y a pas lieu de revenir sur cette jurisprudence.

C’est en vain que l’assurance-accidents soutient qu’elle n’est pas applicable dans des situations où l’assuré, en raison d’une invalidité totale, ne subissait aucune perte de gain avant d’avoir atteint l’âge ouvrant droit à une rente de vieillesse. La reconnaissance d’un droit à une rente de conjoint survivant, tout en le niant faute de gain assuré déterminant pour son calcul, créerait une incohérence dans le système.

Certes, le gain annuel déterminant pour le calcul des rentes de survivants pourrait se trouver réduit si le défunt, pour raison de santé, sans lien avec la maladie professionnelle, a exercé dans le passé une activité assurée à temps partiel seulement. Ses survivants seraient désavantagés par rapport à ceux d’une personne qui est devenue entièrement invalide dans les mêmes circonstances, mais après avoir exercé une activité salariée à plein temps. Compte tenu des taux d’activité respectifs, le gain assuré serait en effet plus élevé dans le second cas que dans le premier. L’assurance-accidents y voit une inégalité de traitement.

La différence critiquée découle toutefois du régime légal qui prescrit l’allocation de rentes de survivants même pour une affection qui se manifeste après une très longue période de latence, ainsi que du choix du législateur de fonder les rentes sur le dernier gain assuré. Renoncer, dans la présente constellation, à prendre en considération le gain assuré antérieur engendrerait une autre inégalité. Il n’y aurait aucun motif valable d’y renoncer dans ce cas mais non dans le cas d’un assuré qui a cessé son activité salariée avant l’âge de la retraite, pour exercer une activité indépendante (non assurée; situation de l’ATF 135 V 279) ou qui l’a abandonnée (ou simplement réduite) par pure convenance personnelle. Comme on l’a vu, le droit aux prestations en cas de maladie professionnelle n’est pas subordonné à la condition que l’assuré ait été obligatoirement assuré jusqu’à l’âge auquel il peut prétendre une rente de vieillesse. Peu importent en définitive les raisons pour lesquelles l’assuré n’a plus été assujetti à l’assurance postérieurement à la période d’exposition dans une activité salariée.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_443/2013 consultable ici

 

 

Adoption du postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves »

Adoption du postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves »

 

Bulletin officiel de la session du Parlement du 05.05.2021 consultable ici

 

Intervention du conseiller fédéral Alain Berset (après celles de Madame Feri et de Madame Herzog)  : Depuis l’introduction, en 1997, de la rente de veuf, dans le cadre de la dixième révision de l’AVS, le Conseil fédéral a exprimé à plusieurs reprises la volonté d’adapter les conditions d’octroi des rentes de survivants à l’évolution de la société. C’était le cas, je le rappelle ici, lors de la onzième révision de l’AVS, avec la proposition d’uniformiser les conditions d’octroi des rentes de veuf et de veuve. Cette révision a été rejetée en mai 2004 en votation populaire. Nous avons également présenté des mesures dans le cadre du projet Prévoyance vieillesse 2020. Mais le Parlement n’y a alors pas donné suite. Le projet actuel AVS 21 ne contient pas de proposition de modification des rentes de survivants, parce que l’objectif de cette réforme est avant tout de stabiliser la situation financière de l’AVS en touchant au minimum au contenu.

Je dois vous communiquer encore, et cela va aussi dans le sens du postulat, qu’un projet de recherche sur la situation économique des veuves, des veufs et des orphelins est en cours. Ce projet de recherche devrait donner lieu à une actualisation des informations et à un rapport dont les conclusions devraient permettre de répondre aux attentes du postulat.

Le Conseil fédéral vous propose donc d’accepter ce postulat parce que les travaux qu’il faudrait faire pour le remplir sont déjà en cours. Indépendamment de ce que vous faites du postulat, ces travaux ne vont pas s’arrêter, ils vont se poursuivre. Mais enfin, ce serait naturellement intéressant pour nous de savoir que cela se fait avec le soutien du Parlement.

J’aimerais donc vous inviter, au nom du Conseil fédéral, à soutenir ce postulat.

 

Abstimmung – Vote

Für Annahme des Postulates … 116 Stimmen
Dagegen … 48 Stimmen
(1 Enthaltung)

 

 

Bulletin officiel de la session du Parlement du 05.05.2021 consultable ici

Postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves » consultable ici

 

 

Motion Hurni 20.4445 « Rentes de veuf. Mettre fin maintenant à une règle illicite, contraire à l’égalité et surannée » – Avis du Conseil fédéral

Motion Hurni 20.4445 « Rentes de veuf. Mettre fin maintenant à une règle illicite, contraire à l’égalité et surannée » – Avis du Conseil fédéral

 

Motion 20.4445 consultable ici

 

Texte déposé

L’art. 24 al. 2 LAVS est modifié ou supprimé pour être rendu conforme à l’arrêt de la CourEDH B. c. Suisse (requête n° 78630/12) et surtout, au principe de l’égalité consacré par notre Constitution.

 

Développement

Le 20 octobre 2020, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt sans équivoque au sujet de l’art. 24 al. LAVS. Confirmant ainsi un avis largement répandu dans la doctrine et jurisprudence suisse (DUPONT Anne-Sylvie, Discrimination des veufs : la Suisse condamnée. Analyse de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme B. c. Suisse (requête n° 78630/12), Newsletter rcassurances.ch décembre 2020), la Cour a jugé que l’art. 24 al. 2 LAVS était contraire à l’art. 14 de la Convention, constituant donc une discrimination.

Cet article concernant la rente de veuf prévoit en effet qu’ « outre les causes d’extinction mentionnées à l’art. 23 al. 4 le droit à la rente de veuf s’éteint lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans » introduisant ainsi une inégalité de traitement manifeste entre veufs et veuves. Pour la Cour, les conceptions historiques et sociales qui ont prévalu à l’adoption de cette norme ne peuvent aujourd’hui plus servir de justification à cette discrimination. Aujourd’hui, l’égalité de traitement et la conception égalitaire des tâches éducatives rend cette disposition choquante.

L’arrêt n’étant pas définitif, le Conseil fédéral pourrait encore porter l’affaire devant la Grand Chambre, mais quoi qu’il soit sous l’angle juridique, cette règle n’a plus de justification politique et est insoutenable. Il n’y a pas de raison que les enfants de veufs soient mis dans une situation plus précaire que les enfants de veuves, car ces sont bien les enfants qui sont les premières victimes de cette discrimination.

 

Avis du Conseil fédéral du 17.02.2021

Le Conseil fédéral ne conteste pas la nécessité d’un réaménagement des conditions d’octroi des rentes de survivants qui prenne en considération les changements sociaux intervenus depuis l’introduction des rentes de veuve et d’orphelin en 1948 et de la rente de veuf en 1997. Dans son message sur la 11e révision de l’AVS, rejetée par le peuple le 16 mai 2004 (00.014 11e révision de l’AVS ; FF 2000 1771), le Conseil fédéral proposait déjà d’uniformiser les conditions du droit aux rentes de survivants en alignant les règles relatives aux veufs sur celles des veuves. En réponse au postulat 08.3235 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique CN  » Rentes de veuves et de veufs « , une vaste étude sur la situation économique des veuves et des veufs a été réalisée (Philippe Wanner et Sarah Fall,  » La situation économique des veuves et de veufs « , 2011, Université de Genève, Laboratoire de démographie et d’études familiales). Sur la base de cette étude, le Conseil fédéral a présenté, dans le cadre de son message concernant la réforme  » Prévoyance vieillesse 2020  » (14.088 Prévoyance vieillesse 2020. Réforme ; FF 2015 1), diverses mesures relatives aux prestations de survivants visant tout particulièrement à assurer la période éducative des enfants de manière plus efficace en maintenant la rente de veuve et de veuf uniquement pour les femmes et les hommes qui, au moment du veuvage, ont un enfant ayant droit à une rente d’orphelin ou qui nécessite des soins. Toutefois, au cours des débats, le Parlement a décidé d’abandonner ces mesures, au motif qu’elles étaient susceptibles de compromettre le succès de la réforme lors d’une votation populaire.

Dans le projet de réforme AVS 21, dont le message est actuellement en traitement au Parlement (19.050 Message relatif à la stabilisation de l’AVS (AVS 21) ; FF 2019 5979), le Conseil fédéral a voulu concentrer la discussion sur les éléments essentiels et urgents en vue de garantir l’équilibre financier de l’AVS et de ce fait, il n’a pas repris les mesures concernant les rentes de survivants.

L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CrEDH) dans l’affaire B. contre Suisse du 20 octobre 2020 n’est pas définitif. Cela étant, le Conseil fédéral estime que la thématique des prestations de survivants doit être réexaminée dans la perspective d’une future révision ou d’un projet séparé concernant l’ensemble du système des rentes de survivants (rentes de veuves, de veufs et d’orphelin), et pas uniquement dans le sens d’une modification réservée aux seuls veufs comme le demande la motion. Un projet de recherche actualisant la situation économique des veuves et des veufs est actuellement en cours. Le Conseil fédéral propose également d’accepter le postulat 20.4449 Feri  » Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves  » qui demande d’établir un rapport examinant comment supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves dans le cadre de l’AVS et de l’assurance-accidents.

 

Proposition du Conseil fédéral du 17.02.2021

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

 

Motion Hurni 20.4445 « Rentes de veuf. Mettre fin maintenant à une règle illicite, contraire à l’égalité et surannée » consultable ici

Cf. également la motion Romano 20.4693 « Egalité des droits s’agissant de la rente de veuf ou de veuve. L’arrêt de la CEDH appelle une modification de la loi », sur le même thème. L’avis du Conseil fédéral, également du 17.02.2021, est similaire.

 

 

Postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves »

Postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves »

 

Consultable ici

 

Texte déposé

La Confédération est chargée d’établir un rapport examinant comment supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves dans le cadre de l’AVS et de l’assurance-accidents ; le rapport portera également sur la manière d’assurer aux survivants des moyens d’existence adéquats indépendamment de leur situation familiale et de leur mode de vie.

 

Développement

Les conditions donnant droit à une rente au titre de la LAVS ou de la LAA diffèrent en fonction du sexe de la personne survivante. Cette distinction est fondée sur l’idée que l’homme travaille pour subvenir aux besoins de la famille alors que la femme s’occupe du ménage et des enfants. La Cour européenne des droits de l’homme a estimé le 20.10.2020 qu’une telle vision ne correspondait plus à la réalité et que la discrimination des veufs qui en résulte contrevenait à la Convention européenne des droits de l’homme [1]. La Suisse est maintenant priée d’adapter sa législation aux conditions de vie actuelles et à l’art. 8 al. 3 de la Constitution, de sorte que cette législation ne fasse plus référence au sexe, à l’image des dispositions concernant le deuxième pilier.

Afin de garantir à long terme une couverture adéquate pour tous les survivants, il convient d’évaluer soigneusement le risque social lié au veuvage en prenant en considération l’ensemble des modes de vie et des configurations familiales possibles. Certaines catégories de survivants sont particulièrement tributaires de prestations suffisantes pour assurer leur subsistance, par exemple les parents qui s’occupent d’un enfant handicapé adulte ou ceux qui, ayant travaillé à temps partiel et avec des interruptions, ont un deuxième pilier très réduit. Il faut aussi tenir compte du fait que le retour sur le marché du travail après un veuvage peut être pratiquement impossible suivant l’âge du survivant, son état de santé ou la durée pendant laquelle il n’a pas exercé d’activité professionnelle. Les conjoints doivent pouvoir choisir librement la répartition des rôles qui leur convient, un choix dans lequel de multiples facteurs entrent en ligne de compte : garde des enfants, optimisation des revenus du ménage, considérations de santé, représentations culturelles, etc. En vertu des art. 8 al. 2 et 15 de la Constitution, aucun de ces facteurs ne doit servir de fondement à une discrimination.

A l’avenir, l’AVS et l’assurance-accidents doivent compenser de manière adéquate la perte de revenus consécutive au décès d’un partenaire ou d’un conjoint indépendamment de son sexe, afin d’atténuer les conséquences économiques de ce décès et de protéger les personnes concernées de la pauvreté.

 

Proposition du Conseil fédéral du 03.02.2021

Le Conseil fédéral propose d’accepter le postulat.

 

 

[1] Arrêt de la CrEDH B. c. Suisse – 78630/12 du 20.10.2020 consultable sur notre site ici

 

 

Postulat Feri 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves » consultable ici