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8C_333/2023 (d) du 01.02.2024, destiné à la publication – Obligation de demander le versement anticipé de la prestation de libre passage et droit aux prestations d’aide sociale

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_333/2023 (d) du 01.02.2024, destiné à la publication

 

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Communiqué de presse du TF du 05.03.2024 disponible ici

 

Obligation de demander le versement anticipé de la prestation de libre passage et droit aux prestations d’aide sociale

 

Le Tribunal fédéral se prononce sur le rapport entre l’obligation de demander le versement anticipé de l’avoir de libre passage de la prévoyance professionnelle et le droit aux prestations d’aide sociale. Selon cet arrêt, on ne saurait imposer aux bénéficiaires de l’aide sociale de demander le versement anticipé de leur avoir de libre passage à l’âge de 60 ans, si ledit avoir devait être déjà épuisé lorsqu’ils atteindraient l’âge limite de 63 ans ouvrant le droit à une rente AVS anticipée. Le montant des avoirs ainsi consommés se mesure à l’aune du calcul du besoin pour obtenir les prestations complémentaires.

Un homme aujourd’hui âgé de 64 ans percevait des prestations de l’aide sociale depuis 2013. En 2022, l’autorité compétente en matière d’aide sociale de sa commune de domicile a cessé de verser lesdites prestations et exigé la restitution d’un montant de 78’000 francs, au motif que l’intéressé lui aurait dissimulé l’existence de son compte de libre passage. Il aurait selon elle pu retirer cet avoir au mois d’avril 2019, à l’âge de 60 ans ; il n’aurait alors plus été dépendant de l’aide sociale. Le Conseil d’État, puis le Tribunal cantonal du canton de Bâle-Campagne ont confirmé cette décision

Le Tribunal fédéral admet le recours de l’intéressé. Le litige porte sur le point de savoir si le recourant a indûment touché des prestations de l’aide sociale dès lors qu’il aurait été tenu de retirer son capital de libre passage le plus tôt possible (en l’occurrence au mois d’avril 2019, cinq ans avant d’atteindre l’âge de la retraite). L’aide sociale est régie par le principe de subsidiarité ; des prestations d’assistance ne sont ainsi octroyées que si la personne ne peut pas subvenir à ses besoins ou qu’elle ne peut obtenir d’aide de tiers, ou pas à temps. Selon les recommandations de la Conférence suisse des institutions d’action sociale (normes CSIAS), la préservation des avoirs de la prévoyance professionnelle (maintien de la protection de la prévoyance) prime sur le principe de subsidiarité en règle générale jusqu’à la perception d’une rente AVS. Une obligation de demander le versement anticipé de l’avoir de libre passage à l’âge de 60 ans ne peut certes pas être catégoriquement exclue. Elle serait toutefois incompatible avec le but de prévoyance de ces moyens financiers si l’avoir de libre passage libéré devait être déjà entièrement épuisé au moment de percevoir l’AVS. Une obligation de demander le versement anticipé de l’avoir de libre passage doit donc être considérée comme disproportionnée à tout le moins en cas de risque de dépendre à nouveau de l’aide sociale, avant que ne soit atteint l’âge de 63 ans ouvrant le droit à la rente AVS anticipée. S’agissant du montant probable du capital de libre passage ainsi consommé, il convient de se fonder sur le besoin tel qu’il est défini pour le calcul des prestations complémentaires, qui est plus élevé que le besoin au sens du droit d’aide sociale. En l’espèce, il s’avère que compte tenu des dépenses annuelles à hauteur d’environ 40’000 francs, l’avoir de libre passage de l’intéressé, d’un montant de près de 100’000 francs (après imposition), en cas de versement à 60 ans n’aurait pas suffi jusqu’au versement de la rente AVS anticipée à 63 ans. L’autorité compétente en matière d’aide sociale n’aurait ainsi pas été en droit d’imposer à l’intéressé de libérer son avoir de libre passage. Les prestations d’aide sociale perçues depuis 2019 l’ont par conséquent été légalement. Une restitution n’entre pas en ligne de compte.

 

Arrêt 8C_333/2023 consultable ici

Communiqué de presse du TF du 05.03.2024 disponible ici

 

 

9C_430/2022 (f) du 16.11.2023, destiné à la publication – Interruption de l’assurance obligatoire – Interprétation par le TF de l’art. 47 LPP / Retraite anticipée – Notion de la survenance du cas de prévoyance « vieillesse »

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2022 (f) du 16.11.2023, destiné à la publication

 

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Interruption de l’assurance obligatoire – Interprétation par le TF de l’art. 47 LPP

Retraite anticipée – Notion de la survenance du cas de prévoyance « vieillesse »

 

La Société Suisse des Entrepreneurs (SSE), d’une part, et les syndicats SIB (Syndicat Industrie & Bâtiment; aujourd’hui: UNIA) et SYNA, d’autre part, ont conclu le 12.11.2002 la Convention collective de travail pour la retraite anticipée dans le secteur principal de la construction (ci-après: la CCT RA). Cette convention, dont l’entrée en vigueur a été fixée au 01.07.2003 et qui est applicable à l’ensemble du territoire suisse (à l’exception du Valais), a pour but de permettre aux travailleurs du secteur principal de la construction de prendre une retraite anticipée dès l’âge de 60 ans révolus et d’en atténuer les conséquences financières.

Afin d’assurer l’application de la convention, les parties contractantes ont constitué le 19.03.2003 la Fondation pour la retraite anticipée dans le secteur principal de la construction (ci-après: la Fondation FAR). Celle-ci a conclu un accord avec la Fondation institution supplétive LPP (ci-après: l’institution supplétive) afin, notamment, que cette institution reçoive la prestation de sortie acquise à la date de départ à la retraite anticipée des travailleurs affiliés et les bonifications de vieillesse jusqu’à l’âge ordinaire de la retraite AVS, dans les cas où l’institution de prévoyance de l’employeur ne le proposait pas; en outre, une fois l’âge de la retraite AVS atteint, l’institution supplétive était tenue de verser une rente de vieillesse (ou un capital; accord du 16.06.2003, puis du 15.03.2005). Le 02.05.2018, l’institution supplétive a résilié l’accord conclu avec la Fondation FAR, avec effet au 31.12.2018.

A.__, né en janvier 1959, et B.__, né en février 1959, ont perçu des prestations de la Fondation FAR dès le 01.02.2019 (s’agissant du premier), respectivement le 01.03.2019 (concernant le second), soit au moment où ils ont atteint l’âge de 60 ans et mis un terme à l’activité professionnelle qu’ils déployaient pour des entreprises assujetties à la CCT RA. Ayant tous deux été affiliés, dans le cadre de leur activité professionnelle respective, auprès d’une institution de prévoyance pour la couverture des risques de vieillesse, d’invalidité et de décès qui ne proposait pas la continuation du rapport d’assurance après la résiliation du contrat de travail, ils ont présenté une demande de maintien de la prévoyance professionnelle sans assurance de risque auprès de l’institution supplétive (plan de prévoyance maintien facultatif de la prévoyance vieillesse dans le cadre de la LPP [WO]). Après que celle-ci a rejeté les demandes, les 26.03.2019 et 19.06.2019, l’avoir de vieillesse acquis par chacun des prénommés a été transféré sur un compte de libre passage.

 

Procédure cantonale (arrêt 200.2019.82.LPP  – consultable ici)

Statuant le 06.07.2022, la juridiction cantonale a rejeté les actions.

 

TF

Consid. 2.2.1 à 2.2.4
Selon l’art. 47 LPP, avec le titre marginal « Interruption de l’assurance obligatoire », l’assuré qui cesse d’être assujetti à l’assurance obligatoire peut maintenir sa prévoyance professionnelle ou sa seule prévoyance vieillesse, dans la même mesure que précédemment, soit auprès de la même institution de prévoyance, si les dispositions réglementaires le permettent, soit auprès de l’institution supplétive (al. 1).

Conformément à l’art. 33a LPP, relatif au « Maintien de la prévoyance au niveau du dernier gain assuré », l’institution de prévoyance peut prévoir dans son règlement la possibilité, pour les assurés ayant atteint l’âge de 58 ans et dont le salaire diminue de la moitié au plus, de demander le maintien de leur prévoyance au niveau du dernier gain assuré (al. 1). La prévoyance peut être maintenue au niveau du dernier gain assuré au plus tard jusqu’à l’âge réglementaire ordinaire de la retraite (al. 2).

L’art. 47a LPP, avec le titre marginal « Interruption de l’assurance obligatoire à partir de 58 ans », est entré en vigueur le 1er janvier 2021. Il prévoit que l’assuré qui, après avoir atteint l’âge de 58 ans, cesse d’être assujetti à l’assurance obligatoire en raison de la dissolution des rapports de travail par l’employeur peut maintenir son assurance en vertu de l’art. 47, ou exiger que son assurance soit maintenue dans la même mesure que précédemment auprès de la même institution de prévoyance en vertu des al. 2 à 7 du présent article (al. 1).

L’art. 1 al. 2 LPP, qui porte le titre marginal « But », prévoit que le salaire assuré dans la prévoyance professionnelle ou le revenu assuré des travailleurs indépendants ne doit pas dépasser le revenu soumis à la cotisation AVS.

 

Consid. 4.1
A la suite des premiers juges, on rappellera que la loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d’autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d’interprétation, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s’il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 148 II 299 consid. 7.1 et les arrêts citées).

Consid. 4.3
Certes, à la suite des premiers juges, on constate que l’interprétation systématique révèle l’existence d’une contradiction entre l’art. 47 LPP et l’art. 1 al. 2 LPP, dès lors que cette dernière norme prévoit que seul un salaire (art. 7 LPP) ne dépassant pas le revenu soumis à la cotisation AVS est assuré, alors que dans les hypothèses visées par l’art. 47 al. 1 LPP, un tel salaire est en principe inexistant. Cela étant, à l’inverse de l’instance précédente, on ne saurait en déduire que l’application de l’art. 47 al. 1 LPP, en cas de cessation d’une activité lucrative, s’avère possible uniquement pendant deux ans et seulement à des assurés n’ayant pas atteint l’âge de 58 ans. En particulier, l’interprétation tant littérale qu’historique de la disposition en cause ne permet pas de parvenir à ce résultat.

Consid. 4.3.1
Sur le plan de l’interprétation littérale de l’art. 47 LPP, il ressort du texte légal que l’application de la disposition suppose un assujettissement antérieur à l’assurance obligatoire, ainsi que la cessation de cet assujettissement. Le texte de la norme ne fait en revanche pas mention d’une durée maximale du maintien de la prévoyance professionnelle, ni d’un âge maximal de l’assuré.

Consid. 4.3.2
Il ressort de l’interprétation historique de l’art. 47 al. 1 LPP – à laquelle l’instance précédente a pourtant également dûment procédé -, que la continuation de l’assurance ne devait pas être réservée aux cas d’interruption passagère de l’assujettissement à l’assurance obligatoire. Dans le cadre des débats parlementaires relatifs à la LPP, la discussion a porté sur le maintien de l’assurance et il a été mis en évidence que la continuation de l’assurance ne doit pas être limitée dans le temps (cf. BO 1977 N 1349 ss, en particulier l’intervention du rapporteur de la commission du Conseil national Anton Muheim [BO 1977 N 1350]). En effet, le maintien de l’assurance est financé par l’assuré et non par son ancien employeur (cf. intervention Muheim, précitée). En outre, la question de la volonté de l’assuré de retrouver à terme une activité lucrative conduisant à nouveau à un assujettissement à l’assurance obligatoire n’a pas été abordée. D’ailleurs, le Tribunal fédéral avait déjà relevé que l’ancien art. 47 LPP s’appliquait indépendamment des motifs de la sortie de l’assurance obligatoire et sans exiger que cette sortie fût passagère (arrêt B 1/91 du 4 septembre 1992 consid. 4a, in RSAS 1995, p. 295).

Consid. 4.3.3
L’interprétation systématique fait certes apparaître une contradiction entre l’art. 47 LPP et l’art. 1 al. 2 LPP. Cette dernière disposition a cependant été introduite dans le cadre de la première révision de la LPP, le 1er janvier 2006 (RO 2004 1677), soit postérieurement à l’adoption de l’art. 47 al. 1 LPP (entré en vigueur le 1er janvier 1985, puis modifié avec effet au 1er janvier 1997 [RO 1996 273]). Lors de l’adoption de l’art. 1 al. 2 LPP, il a été mentionné qu’il fallait lutter contre les abus liés à l’utilisation du deuxième pilier à des fins fiscales (en admettant par exemple des déductions fiscales qui ne correspondent pas au salaire proprement dit; cf. BO 2002 E 1036, intervention de la Conseillère fédérale Ruth Dreifuss). Toutefois, la question de la relation entre cette disposition et l’art. 47 LPP n’a pas été examinée dans le cadre des débats parlementaires (BO 2002 N 504 s.; BO 2002 E 1035 s.; BO 2003 N 618 ss; BO 2003 E 444), comme l’a également constaté la juridiction cantonale. La contradiction entre les art. 1 al. 2 et 47 al. 1 LPP n’a pas non plus été abordée lors des débats parlementaires dans le cadre de l’adoption de l’art. 33a LPP, entré en vigueur le 1er janvier 2011 (RO 2010 4427), puis de celle de l’art. 47a LPP, entré en vigueur le 1er janvier 2021 (RO 2020 585), ni du reste la question des rapports entre ces nouvelles dispositions et l’art. 47 al. 1 LPP (cf. BO 2008 E 583; BO 2009 N 1593 ss; BO 2009 E 1237; BO 2018 N 451 ss et 465; BO 2018 E 323), comme l’ont également retenu les premiers juges.

Partant si le législateur entendait restreindre la portée temporelle de l’art. 47 LPP lors de l’adoption de l’art. 1 al. 2 LPP (ou celle postérieure des art. 33a et 47a LPP), il lui eût appartenu de mentionner clairement sa volonté, par exemple en incluant expressément une condition d’âge à l’art. 47 al. 1 LPP et/ou en prévoyant que seule une cessation temporaire de l’activité lucrative en permet l’application. Cette considération s’impose au regard de l’interprétation tant littérale qu’historique de l’art. 47 al. 1 LPP (consid. 4.3.1 et 4.3.2). On ajoutera que comme le font valoir les recourants, les art. 33a et 47 LPP règlent des situations différentes: alors que l’art. 33a LPP figure dans le titre 1 de la partie 2 de la LPP, relatif à l' »Assurance obligatoire des salariés », l’art. 47 LPP prend place dans le titre 3 de la partie 2 de la LPP, qui porte sur l' »Assurance facultative ». Quant à l’art. 47a LPP, il est entré en vigueur le 1er janvier 2021 (RO 2020 585), soit postérieurement aux faits juridiquement déterminants pour le présent litige (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références). A cet égard, on constate du reste, à la lecture du texte clair de l’art. 47a al. 1 LPP, que cette norme autorise expressément l’application de l’art. 47 LPP à des assurés âgés de plus de 58 ans, dans la situation qu’elle régit.

Consid. 4.3.4
L’intimée ne saurait rien non plus déduire en sa faveur des avis de la Conférence suisse des impôts et de l’OFAS, dont il ressort que les déductions fiscales des cotisations versées par des assurés en application de l’art. 47 LPP (cf. également art. 81 al. 2 LPP) ne sont possibles que pendant une durée de deux ans au maximum (Conférence suisse des impôts, Prévoyance et impôts: cas d’application de prévoyance professionnelle et de prévoyance individuelle, 2022, A.2.4.1), respectivement que s’il est possible que le salaire assuré au sens de l’art. 47 LPP dépasse le salaire assuré auprès de l’AVS, un tel dépassement doit être provisoire ou transitoire et ne peut durer plus de deux ans, à moins qu’une base légale expresse ne précise le contraire, à l’exemple de l’art. 33a LPP (prise de position de l’OFAS « Assurance externe et maintien de l’assurance en cas de réduction du taux d’occupation », Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 110 du 15 janvier 2009, ch. 677). Ces avis ne permettent en effet pas de restreindre l’application temporelle de l’art. 47 LPP dans le sens retenu par les premiers juges, dès lors déjà qu’il s’agit de directives et circulaires administratives qui, même si elles ne sont pas dépourvues d’importance sous l’angle de l’égalité de traitement des assurés, ne créent pas de nouvelles règles de droit et ne lient pas le juge (cf. ATF 148 V 102 consid. 4.2 et les arrêts cités).

Consid. 4.3.5
Sur le plan finalement de l’interprétation téléologique, l’intention du législateur de restreindre les droits des travailleurs proches de l’âge de la retraite, en supprimant la possibilité jusqu’alors conférée par l’art. 47 al. 1 LPP pour ceux qui cesseraient leur activité lucrative sans être licenciés, ne ressort pas des travaux préparatoires des différentes réformes de la LPP. L’introduction des art. 33a et 47a LPP visait en effet à réduire la rigidité du système de retraite pour les personnes souhaitant diminuer progressivement leur taux d’occupation professionnelle ou perdant leur emploi (cf., notamment, Message concernant la révision de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité [Réforme structurelle] du 15 juin 2007, FF 2007 5381 [5433 s.]), comme l’ont constaté les premiers juges. A cet égard, si le législateur entendait introduire une différence de traitement entre les travailleurs proches de l’âge de la retraite, en fonction de la nature de la dissolution des rapports de travail (licenciement par l’employeur, d’une part, démission du travailleur ou accord de résiliation entre le travailleur et son employeur, d’autre part) lorsqu’il a introduit l’art. 47a LPP, en réservant dorénavant l’application de l’art. 47 LPP, après l’âge de 58 ans, aux seuls travailleurs dont la dissolution des rapports de travail est le fait de l’employeur, il lui eût appartenu de le préciser clairement à l’art. 47 LPP. On ajoutera du reste que l’art. 47a LPP confère des droits plus étendus que l’art. 47 LPP, puisqu’il permet à l’assuré licencié après avoir atteint l’âge de 58 ans, non seulement de maintenir son assurance en vertu de l’art. 47, mais également d’exiger que son assurance soit maintenue dans la même mesure que précédemment auprès de la même institution de prévoyance (conformément aux al. 2 à 7 de l’art. 47a LPP).

Consid. 4.4
En définitive les considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles l’art. 47 al. 1 LPP ne peut pas s’appliquer à un assuré qui a déjà atteint l’âge de 58 ans et l’application de cette norme est dans tous les cas limitée à une période de deux ans, ne peuvent pas être suivies. L’assuré qui, après avoir atteint l’âge de 58 ans, cesse d’être assujetti à l’assurance obligatoire en raison de la dissolution des rapports de travail par lui-même peut maintenir son assurance aux conditions fixées par l’art. 47 LPP, même s’il s’agit d’une cessation d’activité définitive.

 

Consid. 5.1
Il convient ensuite d’examiner si malgré le fait que l’art. 47 LPP peut s’appliquer en cas de cessation définitive de l’activité professionnelle et aux assurés âgés de plus de 58 ans, c’est à bon droit que l’instance précédente a considéré que les recourants ne pouvaient pas se prévaloir de l’application de cette disposition à leur situation respective afin de requérir le maintien de leur prévoyance vieillesse auprès de l’intimée.

Consid. 5.2
On rappellera, à la suite de la juridiction de première instance, que l’application de l’art. 47 LPP exige un assujettissement antérieur à l’assurance obligatoire, ainsi que la cessation de cet assujettissement (consid. 4.3.1 supra). Pour que l’institution supplétive puisse maintenir la prévoyance professionnelle ou la prévoyance vieillesse d’un assuré, il est par ailleurs nécessaire qu’une prestation de sortie lui soit versée. La prestation de sortie versée à l’institution de prévoyance tenue de fournir la couverture d’assurance permet en effet le financement des prestations futures. Or à cet égard, conformément à l’art. 2 al. 1 LFLP, la prestation de sortie ne peut être versée par l’ancienne institution de prévoyance de l’assuré que s’il la quitte avant la survenance d’un cas de prévoyance (cas de libre passage; consid. 5.3.1.2 infra).

Lorsqu’une institution de prévoyance accorde la possibilité d’une retraite anticipée (cf. art. 13 al. 2 LPP, en relation avec l’art. 1i OPP 2) – comme c’est le cas des institutions de prévoyance auprès desquelles les recourants étaient affiliés par leur ancien employeur respectif, selon les constatations cantonales non contestées par les parties -, la survenance du cas de prévoyance « vieillesse » a lieu non seulement lorsque l’assuré atteint l’âge légal de la retraite selon l’art. 13 al. 1 LPP, mais aussi lorsqu’il atteint l’âge auquel le règlement lui donne droit à une retraite anticipée. Si la résiliation du rapport de travail intervient à un âge auquel l’assuré peut, en vertu des dispositions du règlement de l’institution de prévoyance, prétendre des prestations de vieillesse au titre de la retraite anticipée, le droit à des prestations de vieillesse prévues par le règlement naît indépendamment de l’intention de l’assuré d’exercer une activité lucrative ailleurs. Il en va autrement lorsque le règlement subordonne l’octroi de prestations à titre de retraite anticipée à une déclaration de volonté de l’assuré: dans ce cas, l’événement vieillesse excluant le droit à une prestation de sortie n’intervient que si l’assuré a fait valoir ses prétentions (ATF 138 V 227 consid. 5.2.1 et les arrêts cités). Le point de savoir si un cas de libre passage ou un cas de prévoyance vieillesse survient avec l’abandon de l’activité lucrative avant l’accession à l’âge ordinaire de la retraite doit ainsi être examiné – sous réserve de l’art. 2 al. 1bis LFLP – à la lumière du règlement de la dernière institution de prévoyance à laquelle l’assuré a été affilié, étant précisé que la perception d’une rente transitoire de la part de la Fondation FAR n’est pas déterminante (ATF 141 V 162 consid. 4.3), comme l’ont dûment rappelé les premiers juges. La perception d’une telle rente ne constitue en effet pas un cas d’assurance. A cet égard, l’art. 18 al. 3 du règlement de la Fondation FAR, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 mars 2019, prévoit que les rentes transitoires peuvent être cumulées avec des rentes de l’AVS et de la prévoyance professionnelle lorsque celles-ci sont réduites en raison de la retraite anticipée (cf. ATF 141 V 162 consid. 4.3.2 et 4.3.3).

 

Consid. 5.3.1.1
Selon les constatations cantonales, non contestées par les recourants, B.__ avait été affilié par son ancien employeur à la Fondation C.__. Il avait atteint l’âge de 60 ans en février 2019 et avait commencé à percevoir des prestations de la Fondation FAR dès mars 2019. A la demande du prénommé, la Fondation C.__ lui avait versé une prestation de sortie, en contradiction avec son propre règlement de prévoyance, qui prévoit qu’une personne assurée qui quitte l’institution de prévoyance entre l’âge minimal de retraite anticipée (en l’occurrence, 58 ans) et l’âge réglementaire ordinaire de la retraite peut seulement prétendre une prestation de sortie si elle continue à exercer une activité lucrative ou est déclarée au chômage. Dans la mesure où B.__ n’avait plus exercé d’activité lucrative et ne s’était pas retrouvé au chômage postérieurement à la fin de son dernier emploi (art. 2 al. 1bis LFLP a contrario), l’instance précédente a considéré qu’il n’avait d’autre choix que de prendre une retraite anticipée et que c’était donc à tort que la Fondation C.__ lui avait versé une prestation de sortie.

Consid. 5.3.1.2
Dans ces circonstances, c’est à bon droit que les premiers juges ont admis que l’institution supplétive était fondée à refuser le maintien de la prévoyance vieillesse au sens de l’art. 47 al. 1 LPP, compte tenu qu’un cas de prévoyance était déjà survenu, conformément au règlement de prévoyance. En effet, l’ancienne institution de prévoyance de l’assuré ne peut verser une prestation de sortie à l’institution de prévoyance tenue de maintenir la prévoyance professionnelle ou la prévoyance vieillesse que si l’assuré la quitte avant la survenance d’un cas de prévoyance (art. 2 al. 1 LFLP), ce qui s’explique par le fait que la prestation de sortie est destinée à financer les prestations qui seront allouées ultérieurement à l’assuré par la nouvelle institution de prévoyance (consid. 5.2 supra). Lorsque le cas de prévoyance est survenu, un transfert de la prestation de sortie n’est à l’inverse plus possible, dès lors que le capital acquis par l’assuré est utilisé pour financer les prestations qui lui sont allouées par l’institution de prévoyance à laquelle il était alors affilié. Dans une jurisprudence publiée récemment, le Tribunal fédéral avait déjà relevé la problématique liée au fait que l’art. 47 LPP permet le maintien de la prévoyance dans la même mesure que précédemment, bien que ni un salaire minimum selon l’art. 7 LPP ne soit atteint ni les conditions de l’art. 2 al. 1bis LFLP ne soient remplies (ATF 141 V 162 consid. 4.3.4). Compte tenu du caractère d’exception de l’art. 47 LPP, qui permet de déroger au principe général selon lequel seul est possible un assujettissement si un salaire minimum est versé (art. 7 LPP), il se justifie de réserver l’application de la possibilité offerte par l’art. 47 LPP aux situations dans lesquelles le cas de prévoyance vieillesse n’est pas encore survenu selon le règlement de prévoyance. Cette possibilité est en effet offerte indépendamment du fait que les assurés remplissent les conditions générales de l’accès à la prévoyance professionnelle (voir aussi GEISER/SENTI, in Commentaire LPP et LFLP, 2e éd. 2020, no 5 ad art. 47 LPP), mais cela ne signifie pas que l’on puisse faire abstraction de la survenance d’un cas d’assurance. Le recours est mal fondé sur ce point.

 

Consid. 5.3.2
Concernant ensuite A.__, il ressort du jugement entrepris qu’il avait été affilié par son ancien employeur auprès de la Fondation D.__, qu’il avait atteint l’âge de 60 ans en janvier 2019 et commencé à percevoir des prestations de la Fondation FAR en février 2019, ce que les parties ne contestent pas. Sa prestation de sortie lui avait été versée, à sa demande, par la Fondation D.__, conformément au règlement de prévoyance de celle-ci, selon lequel si les rapports de travail cessent entre l’âge permettant de prendre une retraite anticipée (en l’espèce, 58 ans) et l’âge ordinaire de la retraite, une prestation de sortie est versée à la personne assurée qui ne souhaite pas une retraite anticipée. A cet égard, A.__ n’avait pas perçu de prestations à titre de retraite anticipée ni demandé à en percevoir. Quoi qu’en dise l’intimée, le cas de prévoyance n’était dès lors pas survenu pour le prénommé. Dans la mesure où l’application de l’art. 47 al. 1 LPP n’est pas réservée aux assurés qui n’ont pas déjà atteint l’âge de 58 ans ni limitée à une période de deux ans (consid. 4 supra), et dès lors que A.__ remplit les conditions de l’art. 47 al. 1 LPP (supra consid. 5.2), l’intimée doit recevoir sa prestation de sortie et maintenir sa couverture d’assurance. Le recours est bien fondé sur ce point.

 

Consid. 6.1
Dans une argumentation subsidiaire, les recourants invoquent une violation des dispositions étendues et déclarées de force obligatoire de la CCT RA concernant le maintien de la prévoyance au sens de l’art. 47 LPP. Ils font valoir à cet égard que dans l’hypothèse où le Tribunal fédéral devrait admettre qu’il se justifie de réserver l’art. 47 LPP aux assurés n’ayant pas encore atteint l’âge de 58 ans et d’en limiter l’application pour une durée de deux ans au plus, les clauses normatives – étendues et déclarées de force obligatoire – de la CCT RA mettant en oeuvre le régime de retraite anticipée « créent un régime quasi-légal de maintien de la prévoyance, analogue et parallèle à celui de l’art. 47 LPP », qui leur permet de maintenir leur prévoyance auprès de l’institution supplétive en vertu de l’art. 47 LPP entre l’âge de 60 et 65 ans, afin de percevoir une « rente de retraite » non réduite à l’âge ordinaire de la retraite.

Consid. 6.2
Il n’y a pas lieu d’examiner plus avant cette argumentation s’agissant de A.__, dès lors qu’il a droit au maintien de la prévoyance en application de l’art. 47 LPP (consid. 5.3.2 supra). Quant à B.__, il ne saurait rien en déduire en sa faveur, dès lors déjà que la CCT RA ne prévoit pas un droit au maintien de la prévoyance auprès de l’institution supplétive en vertu de l’art. 47 LPP. On rappellera à cet égard que la CCT RA règle exclusivement les relations entre l’employeur, le travailleur et la Fondation FAR, si bien que l’institution supplétive n’entre pas dans son champ d’application (cf. ATF 141 V 162 consid. 4.3.1).

 

Le TF admet la demande de A.__ et rejette celle de B.__.

 

 

Arrêt 9C_430/2022 consultable ici

 

9C_31/2022 (d) du 24.07.2023 – Prévoyance professionnelle – Versement d’un capital-décès en cas d’invalidité partielle (rétroactive) d’un assuré décédé

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_31/2022 (d) du 24.07.2023

 

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_31/2022 consultable ici
(arrêt à 5 juges, non publié)

Résumé tiré du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 162 (ch. 1126) consultable ici

 

Versement d’un capital-décès en cas d’invalidité partielle (rétroactive) d’un assuré décédé / art. 15 LPP – 34 al. 1 let. b LPP – 11 al. 1 OPP 2 – 14 OPP 2 – 15 OPP 2

 

Selon le Tribunal fédéral, la totalité de l’avoir de vieillesse, c’est-à-dire aussi bien la partie «active» que la partie «passive», est pertinente pour calculer le capital-décès dans la présente affaire.

Dans une décision rendue après le décès de l’assuré survenu le 11 février 2020, l’office AI alloue à ce dernier une demi-rente AI avec effet rétroactif du 1er janvier au 29 février 2020. Par la suite, l’institution de prévoyance verse à la partenaire de l’assuré un capital-décès correspondant à la partie «active» de l’avoir de vieillesse (50%), mais refuse toute prestation supérieure à ce montant. Elle fonde sa décision sur la disposition du règlement qui prévoit que le capital-décès correspond à l’avoir disponible sur le compte de vieillesse au jour du décès de l’assuré. Elle part du principe qu’en vertu des art. 14 al. 4 et 15 OPP 2, l’avoir de vieillesse de l’assuré au jour de son décès se limite à la partie correspondant à la poursuite de l’activité lucrative à 50% (aussi appelé compte de vieillesse «actif»). La partenaire de l’assuré décédé s’y oppose. Elle considère que, selon le règlement de prévoyance, la totalité du compte de vieillesse doit être retenue pour le calcul du capital-décès, c’est-à-dire non seulement la partie «active» du compte de vieillesse, mais aussi la partie correspondant à l’invalidité partielle (aussi appelée compte de vieillesse «passif»).

Dans le cas d’espèce, le TF a considéré ce qui suit : l’institution de prévoyance doit continuer de tenir jusqu’à l’âge de la retraite le compte de vieillesse de l’assuré invalide auquel elle verse une rente (art. 14 al. 1 OPP 2). Selon l’art. 15 OPP 2, l’institution de prévoyance divise l’avoir de vieillesse en deux parts égales lorsque l’assuré touche une demi-rente d’invalidité. Elle continue de tenir jusqu’à l’âge de la retraite la partie de l’avoir de vieillesse correspondant à l’invalidité partielle (compte de vieillesse «passif»), comme le prévoit l’art. 14 OPP 2, et assimile la partie de l’avoir correspondant à la poursuite de l’activité lucrative à celle d’un assuré valide. L’art. 14 al. 4 OPP 2 règle uniquement le cas où l’invalidité d’un assuré percevant une rente disparaît avant qu’il n’atteigne l’âge de la retraite. L’OPP 2 ne prévoit aucune disposition pour le cas de figure considéré ici, à savoir celui d’un assuré qui décède avant d’avoir perçu de rente AI. Elle ne précise pas non plus ce qui doit advenir du compte de vieillesse «passif» dans un tel cas. Contrairement à l’avis défendu par l’institution de prévoyance, ni les art. 14 et 15 OPP 2 ni le règlement de prévoyance ne prévoient que la partie «passive» du compte de vieillesse revienne à l’institution et soit exclue du capital-décès.

Le TF arrive à la conclusion que, selon le règlement de prévoyance, la partenaire n’a pas seulement droit à un capital-décès correspondant à la partie «active» de l’avoir de vieillesse, mais également à un montant supplémentaire correspondant à la partie «passive» du compte de vieillesse.

 

Arrêt 9C_31/2022 consultable ici

Résumé tiré du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 162 (ch. 1126) consultable ici

 

Entrée en vigueur de la réforme AVS 21 et prévoyance professionnelle

Entrée en vigueur de la réforme AVS 21 et prévoyance professionnelle

 

Article tiré du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 162 (ch. 1117 et 1124) consultable ici

 

La réforme AVS 21, avec ses dispositions d’exécution, entrera en vigueur le 1er janvier 2024.

Cette réforme introduit un système de retraite flexible dans les 1er et 2e piliers. Il remplace l’actuel âge ordinaire de la retraite différent pour les hommes (65 ans) et les femmes (64 ans) par un âge de référence identique de 65 ans pour toutes les personnes assurées. Il sera notamment possible de prendre une retraite anticipée, différée ou partielle.

Les assurés ne pourront à l’avenir ajourner leur prestation de vieillesse au-delà de l’âge de référence dans le 2e pilier que s’ils continuent d’exercer une activité lucrative. Il en va de même pour l’ajournement du versement de la prestation de libre passage, un point qui a été controversé lors de la consultation.

Le Conseil fédéral a décidé de prévoir une période de transition de cinq ans pendant laquelle les assurés pourront ajourner la perception de leurs prestations de vieillesse, même sans poursuivre une activité lucrative.

L’âge de référence des femmes sera relevé progressivement de la manière suivante :

Âge de référence des femmes AVS/LPP
relèvement progressif selon la réforme AVS 21 qui entrera en vigueur le 1er janvier 2024
(art. 21 al. 1 LAVS et let. a des dispositions transitoires de la modification du 17 décembre 2021)
Femmes nées en 1960 ou avant 64 ans
Femmes nées en 1961 64 ans et 3 mois
Femmes nées en 1962 64 ans et 6 mois
Femmes nées en 1963 64 ans et 9 mois
Femmes nées en 1964 ou après 65 ans

Voir aussi le lien internet suivant (OFAS) : âge de référence : calculs personnalisés :
Stabilisation de l’AVS (AVS 21) (admin.ch)

Lien internet du communiqué de presse du 30 août 2023 :
Les dispositions d’exécution de la réforme AVS 21 entrent en vigueur le 1er janvier 2024 (admin.ch)

Modifications d’ordonnances du 30 août 2023 (RO 2023 506)

 

Commentaire des modifications d’ordonnances

Modifications de l’ordonnance sur le libre passage (OLP)

Art. 6 al. 4 OLP
Le terme d’»âge ordinaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 16 al. 1 OLP
L’ordonnance sur le libre passage doit être modifiée afin d’instaurer une disposition analogue à celle déjà en vigueur aujourd’hui pour le pilier 3a et qui s’appliquera également en cas d’ajournement de la prestation de vieillesse dans le 2ème pilier selon les art. 13, al. 2, et art. 13b, al. 2, LPP. Le but de cette modification est d’encourager la poursuite du travail au-delà de l’âge de référence, mais l’ajournement de la rente est aussi lié à la poursuite de l’activité lucrative pour des raisons fiscales, car seules des personnes qui continuent effectivement de travailler doivent pouvoir profiter des privilèges fiscaux liés à la prévoyance professionnelle. Les hommes et les femmes qui souhaitent ajourner la perception de la rente au-delà de l’âge de référence devront prouver à leur institution de libre passage qu’ils continuent à exercer une activité lucrative qu’elle soit dépendante ou indépendante. La condition de la poursuite effective d’une activité lucrative est remplie, lorsque la personne assurée le prouve en présentant par exemple un décompte de salaire, un contrat de travail ou une attestation de l’employeur pour les salariés. Si la personne exerce une activité indépendante, elle pourra le démontrer en produisant par exemple un relevé du compte commercial. La loi ne prévoit aucun taux d’occupation minimal. La disposition doit également être modifiée afin d’utiliser la terminologie «âge de référence» en lieu et place d’»âge ordinaire de la retraite».

Art. 19c al. 1 OLP
Le terme d’»âge de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Cet article est adapté à la nouvelle teneur de l’art. 16, al. 1. Les avoirs des personnes qui apportent la preuve à leur institution de libre passage qu’elles continuent d’exercer une activité lucrative après l’âge de référence ne doivent évidemment pas être déclarés comme des «avoirs oubliés».

Art. 19g al. 2 OLP
Le terme d’»âge réglementaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence réglementaire». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 19i OLP – Partage de la prévoyance en cas d’ajournement de la rente de vieillesse
Le terme d’»âge réglementaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence réglementaire». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Disposition transitoire de la modification du 30 août 2023
En raison de la modification de l’art. 16 OLP, l’assuré qui n’exerce plus d’activité lucrative doit retirer ses avoirs de libre passage lorsqu’il atteint l’âge de référence. Cette nouvelle réglementation concernerait également les personnes ayant atteint ou sur le point d’atteindre l’âge de référence au moment de l’entrée en vigueur. Ces personnes n’auraient plus le temps de modifier leur plan de retraite. Elles doivent donc avoir encore du temps jusqu’à fin 2029, mais au plus tard cinq ans après avoir atteint l’âge de référence, pour le retrait de leur avoir de libre passage. Cette disposition transitoire garantit également aux institutions de libre passage de disposer de suffisamment de temps pour adapter leurs règlements et leurs processus.

 

Modifications de l’ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2)

Art. 14 al. 1 OPP 2
Le terme d’»âge-terme de la vieillesse» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 24, titre, et al. 1, phrase introductive, OPP 2 – Réduction des prestations d’invalidité perçues avant l’âge de référence et des prestations de survivants
Le terme d’»âge ordinaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 24a, titre, al. 1, phrase introductive, al. 2 et 6 OPP 2 – Réduction des prestations d’invalidité à l’âge de référence
Les termes d’»âge ordinaire de la retraite» et d’»âge réglementaire de la retraite» sont remplacés par ceux d’»âge de référence» et d’»âge de référence réglementaire». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 26a, titre et al. 1 OPP 2 – Partage de la prévoyance en cas de réduction de la rente d’invalidité avant l’âge de référence réglementaire
Le terme d’»âge de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 26b, titre et al. 1 OPP 2 – Partage de la prévoyance en cas de réduction de la rente d’invalidité après l’âge de référence réglementaire
Le terme d’»âge réglementaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence réglementaire». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 60a al. 3 et 4 OPP 2
Al. 3 : Dans la prévoyance professionnelle, une personne assurée a la possibilité, dans certaines situations, par exemple à la suite d’une diminution du taux d’activité ou en cas de maintien de l’assurance selon l’art. 47a LPP, de laisser des parts de l’avoir de prévoyance dans l’institution de prévoyance précédente et de ne pas devoir les percevoir. Si cette personne prend une nouvelle activité lucrative et ne transfère pas l’avoir de prévoyance, celui-ci ou comme jusqu’à présent son avoir de libre passage doit être pris en considération en cas d’éventuel rachat.

Al. 4 : Selon l’art. 79b al. 2, let. b, LPP, le Conseil fédéral règle désormais le rachat pour les assurés qui perçoivent déjà (rente) ou ont déjà perçu (capital) une prestation de vieillesse de la prévoyance professionnelle. Celui qui reprend une activité lucrative après une retraite anticipée et qui remplit les conditions légales est à nouveau assuré de façon active dans la prévoyance professionnelle et peut à nouveau effectuer des rachats. Selon le nouvel al. 4 de l’art. 60a, en cas de rachat, le montant maximal possible de rachat doit être réduit du montant qui correspond à la prestation de vieillesse déjà perçue. Afin de pouvoir calculer les possibilités de rachat, l’institution de prévoyance a besoin des informations sur le retrait de cette prestation et doit exiger les renseignements nécessaires de la personne assurée. Afin d’éviter une surassurance, les personnes ne peuvent effectuer des rachats que jusqu’à hauteur des prestations réglementaires selon l’art. 79b, al. 1, LPP qui ne dépassent pas le niveau de prévoyance antérieur (comme cela existait avant la survenance du cas de prévoyance vieillesse).

Cette règle correspond à une pratique déjà en vigueur (cf. Bulletin de la prévoyance professionnelle no 91, ch. 527). Elle empêche que des personnes qui perçoivent déjà une prestation de vieillesse puissent constituer une deuxième prévoyance par le biais de rachats en bénéficiant à nouveau d’allégements fiscaux.

Avec la nouvelle possibilité légale des retraites partielles, il faut éviter des situations de surassurance par des rachats ultérieurs également pour ces cas. L’ajout de «ou augmentent à nouveau leur taux d’activité» dans le nouvel alinéa 4 garantit de façon analogue d’éviter de telles situations.

Art. 62d OPP 2
La disposition transitoire prévoit expressément que l’âge de référence selon la disposition transitoire de la LAVS s’applique également à l’âge de référence des femmes dans la prévoyance professionnelle.

 

Modifications de l’ordonnance sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance (OPP 3)

 

Art. 3 al. 1 OPP 3
Le terme d’»âge ordinaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 3a al. 3 et 4 OPP 3
Le terme d’»âge ordinaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

Art. 7 al. 3 OPP 3
Le terme d’»âge ordinaire de la retraite» est remplacé par celui d’»âge de référence». Matériellement, la disposition reste inchangée.

 

Pour plus de détails, voir le message du 28 août 2019 relatif à la stabilisation de l’AVS (AVS 21), FF 2019 5979 (pp. 6047 ss et 6074 ss)

 

Questions-réponses sur les modifications de la prévoyance professionnelle introduites par la réforme AVS 21 (prise de position de l’OFAS)

  • Une personne assurée qui a pris une retraite anticipée peut-elle racheter l’intégralité des prestations réglementaires dans une nouvelle institution de prévoyance ?

Reposant sur une pratique déjà en vigueur (cf. Bulletin de la prévoyance professionnelle no 91, ch. 527), l’art. 60a al. 4 OPP 2, précise désormais les possibilités de rachat des personnes assurées qui, avant l’âge de référence, perçoivent une rente de vieillesse ou ont déjà perçu une prestation de vieillesse en capital de la prévoyance professionnelle.

Une personne assurée qui reprend une activité professionnelle après une retraite anticipée a, dans certains cas, la possibilité de racheter des prestations réglementaires. Afin d’éviter une surassurance, la personne assurée ne peut racheter que les prestations réglementaires visées à l’art. 79b al. 1 LPP, qui excèdent la prévoyance antérieure à la survenance du cas de prévoyance dans l’institution de prévoyance précédente. Pour le calcul de la somme de rachat, la nouvelle institution de prévoyance doit donc imputer l’avoir de vieillesse qui était disponible à l’échéance des prestations de vieillesse.

Exemple 1 : une personne assurée quitte l’employeur A à l’âge de 60 ans. Ayant épargné, à un taux d’occupation de 100%, un avoir de vieillesse de 400’000 francs, elle perçoit l’intégralité de sa prestation de vieillesse. À l’âge de 63 ans, elle décide de reprendre une activité à 50% auprès du nouvel employeur B. Selon le plan de prévoyance et le règlement de la nouvelle institution de prévoyance B, la personne assurée dispose d’un potentiel de rachat de 100’000 francs. Afin d’éviter une surassurance, l’institution de prévoyance B doit imputer l’avoir de vieillesse déjà perçu de 400’000 francs sur le nouveau potentiel de rachat de 100’000 francs. Par conséquent, dans ce cas, il n’est plus possible d’effectuer des rachats.

Après une retraite partielle, le potentiel de rachat est déjà calculé sur la base du salaire restant, plus faible. L’avoir de vieillesse utilisé pour la retraite partielle ne peut dès lors pas faire l’objet d’une déduction supplémentaire.

Exemple 2 : à l’âge de 60 ans, la personne assurée prend une retraite partielle auprès de l’employeur A ; elle perçoit une prestation de vieillesse correspondant à 50% de son avoir de vieillesse (200’000 francs). Avant la retraite partielle, le potentiel de rachat s’élevait à 150’000 francs. Après la retraite partielle, le nouveau potentiel de rachat est calculé sur la base du salaire restant (taux d’occupation de 50%), d’après le plan de prévoyance et le règlement de l’institution de prévoyance A. La personne dispose donc encore d’un potentiel de rachat de 75’000 francs. Comme le taux d’occupation n’augmente pas après la retraite partielle, l’institution de prévoyance A ne peut pas déduire en plus l’avoir de vieillesse de 200’000 francs perçu par la personne assurée.

En conclusion, en ce qui concerne les personnes qui font usage des nouvelles possibilités de retraite partielle, la réglementation vise donc, d’une part, à ne pas les placer dans une situation moins favorable pour ce qui est des possibilités de rachat et, d’autre part, à éviter une surassurance.

 

  • Une institution de prévoyance peut-elle continuer à prélever des contributions pour frais d’administration auprès d’assurés qui ajournent le versement des prestations de vieillesse sans payer de cotisations (art. 13 al. 2 LPP) ?

En cas d’ajournement des prestations de vieillesse au sens de l’art. 13 al. 2 LPP, la personne assurée reste en principe dans le même plan de prévoyance qu’avant qu’elle n’ait atteint l’âge de référence et avant l’ajournement des prestations, à ceci près qu’elle ne paie plus de cotisations de vieillesse et de risque. Si le règlement de l’institution de prévoyance prévoit expressément que les salariés paient une partie des contributions pour frais d’administration, celles-ci peuvent toujours être prélevées. Cependant, l’OFAS estime qu’il ne serait pas admissible que ces contributions soient prélevées uniquement auprès des assurés qui ajournent leur prestation de vieillesse, alors que pour les assurés actifs, par exemple, l’employeur doit payer la totalité des contributions pour frais d’administration. Il est primordial que tous les assurés soient traités sur un pied d’égalité.

 

  • En cas d’ajournement de la prestation de vieillesse au sens de l’art. 13 al. 2 LPP, l’avoir de vieillesse doit-il toujours être rémunéré ?

Oui. Comme la possibilité d’ajourner la perception de la rente est partie intégrante des prescriptions minimales LPP, l’avoir de vieillesse visé à l’art. 15 al. 1 LPP doit être rémunéré, en vertu de l’art. 15 al. 2 LPP, durant toute la période d’ajournement (cf. Message relatif à la stabilisation de l’AVS [AVS 21], commentaire de l’art. 13, al. 2, LPP).

 

  • Selon le nouvel art. 16 OLP, jusqu’à quand au plus tard les assurés doivent-ils retirer leur avoir de prévoyance de l’institution de libre passage ?

En vertu de la disposition transitoire relative à l’art. 16 OLP, une personne peut différer le versement de son avoir de libre passage jusqu’à cinq ans après avoir atteint l’âge de référence, mais au plus tard en 2029, et ce, même si elle n’exerce plus d’activité lucrative. Ce n’est qu’ensuite que le nouvel art. 16 OLP est applicable : il prévoit que l’avoir de libre passage d’une personne ne peut être ajourné après qu’elle a atteint l’âge de référence que si elle continue d’exercer une activité lucrative.

Exemple pour les personnes qui n’appartiennent pas à la génération transitoire :

Une femme, née en avril 1959, atteint l’âge de référence en avril 2023, à 64 ans. Même si elle n’exerce pas d’activité lucrative après ses 64 ans, elle peut maintenir son compte de libre passage en vertu de la disposition transitoire. Dans la mesure où elle a atteint l’âge de référence en avril 2023, elle doit donc retirer son compte de libre passage au plus tard à fin avril 2028.

Un homme, né en avril 1959, atteint l’âge de référence en avril 2024, à 65 ans. Même s’il n’exerce pas d’activité lucrative après ses 65 ans, il peut maintenir son compte de libre passage en vertu de la disposition transitoire. Dans la mesure où il a atteint l’âge de référence en avril 2024, il doit donc retirer son compte de libre passage au plus tard à fin avril 2029.

 

  • Effet de la disposition transitoire relative à l’art. 16 OLP pour les années 2024-2034, avec ou sans activité lucrative

Tous les assurés qui n’exercent plus d’activité lucrative après avoir atteint l’âge de référence doivent retirer leur avoir de libre passage jusqu’à 5 ans après l’avoir atteint, mais au plus tard en 2029 (et ce, même s’il ne s’est pas encore écoulé 5 ans depuis qu’ils l’ont atteint). Comme l’âge de référence des femmes sera relevé de manière échelonnée, le moment de la perception de la prestation de vieillesse est différent pour les femmes et les hommes.

Femmes:

Année de naissance sans activité lucrative, perception au plus tard en 2029 à l’âge de

avec activité lucrative, perception au plus tard à l’âge de
1960 69 ans 69 ans (2029)
1961 68 ans 69 ans et 3 mois (2030/31)
1962 67 ans 69 ans et 6 mois (2031/32)
1963 66 ans 69 ans et 9 mois (2032/33)
1964 65 ans 70 ans (2034)

 

Hommes:

Année de naissance sans activité lucrative, perception au plus tard en 2029 à l’âge de

avec activité lucrative, perception au plus tard à l’âge de
1960 69 ans 70 ans
1961 68 ans 70 ans
1962 67 ans 70 ans
1963 66 ans 70 ans
1964 65 ans 70 ans

Exemples :

La prestation de libre passage d’une femme née le 30 novembre 1961 doit lui être versée le 31 décembre 2029, dans le cas où elle n’exerce plus d’activité lucrative. Si elle en exerce encore une, elle devra percevoir sa prestation de vieillesse au plus tard le 28 février 2031 (à l’âge de 69 ans et 3 mois).

La prestation de libre passage d’un homme né le 30 novembre 1961 devra lui être versée le 31 décembre 2029, dans le cas où il n’exerce plus d’activité lucrative. S’il en exerce encore une, il devra percevoir sa prestation de vieillesse au plus tard le 30 novembre 2031 (à l’âge de 70 ans).

 

  • Est-ce que la nouvelle règle pour le retrait des avoirs de libre passage concerne tous les comptes de libre passage ?

La nouvelle règle s’applique pour le retrait de tous les comptes de libre passage, indépendamment de leur date d’ouverture. Si un compte de libre passage a été ouvert avant l’entrée en vigueur de la modification de l’art. 16 OLP, cette modification est également applicable. Sauf poursuite d’une activité lucrative, tous les avoirs de libre passage doivent donc être versés à 65 ans au plus tard.

 

  • Le terme «prestations de vieillesse» mentionné à l’art. 60a al. 4 OPP 2, englobe-t-il également les institutions de libre passage ?

Le but de l’art. 60a al. 4 OPP 2, est d’éviter qu’une personne qui a déjà perçu des prestations de vieillesse puisse effectuer des rachats importants sans qu’il ne soit tenu compte des prestations déjà perçues. La rédaction de cette disposition, qui ne parle que de «prestations de vieillesse» sans désignation des institutions de prévoyance, doit être comprise pour l’ensemble des prestations de vieillesse du 2e pilier versées, à savoir celles des institutions de prévoyance et des fondations de libre passage. Si l’on ne tenait compte que des prestations de vieillesse perçues auprès d’une institution de prévoyance, on créerait alors une différence de traitement entre les prestations de vieillesse perçues d’une institution de prévoyance et celles perçues d’une fondation de libre passage.

 

 

Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 162 (30.11.2023), Entrée en vigueur de la réforme AVS 21 et prévoyance professionnelle (ch. 1117), Questions-réponses sur les modifications de la prévoyance professionnelle introduites par la réforme AVS 21 (ch. 1124), consultable ici

Mitteilungen über die berufliche Vorsorge Nr. 162 (30.11.2023), Inkrafttreten der Reform AHV 21 und berufliche Vorsorge (Rz 1117), Fragen und Antworten zu den Änderungen in der beruflichen Vorsorge im Rahmen der Reform AHV 21 (Rz 1124), hier abrufbar

 

Questions-réponses sur les modifications de la prévoyance professionnelle introduites par la réforme AVS 21 – Prise de position de l’OFAS

Questions-réponses sur les modifications de la prévoyance professionnelle introduites par la réforme AVS 21 – Prise de position de l’OFAS

 

Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 161 du 11.05.2023 consultable ici

LPP,  dans sa version au 01.01.2024, consultable ici et LFLP, dans sa version au 01.01.2024, consultable ici

 

 

La réforme AVS 21 entre en vigueur le 1er janvier 2024. Les effets de cette réforme sur la prévoyance professionnelle sont présentés ci-après sous forme de questions-réponses.

1. Le nouvel âge de référence de l’AVS s’applique-t-il aussi à la prévoyance professionnelle ?

Oui, le nouvel âge de référence de 65 ans pour les hommes et les femmes s’applique également dans la prévoyance professionnelle. L’âge de référence s’appliquant aux femmes de la génération transitoire sera relevé par étapes de trois mois par an dans les deux piliers. Ce relèvement commence un an après l’entrée en vigueur de la réforme, c’est-à-dire en 2025. À partir de 2028, l’âge de référence sera de 65 ans pour toutes et tous.

Les femmes nées en 1960 partiront à la retraite à 64 ans, alors que celles nées en 1964 seront les premières à travailler jusqu’à 65 ans.

Femmes nées en 1960 64 ans
Femmes nées en 1961 64 ans et 3 mois
Femmes nées en 1962 64 ans et 6 mois
Femmes nées en 1963 64 ans et 9 mois
Femmes nées en 1964 65 ans

 

2. Qu’est-ce qui change concrètement pour une personne âgée de 59 ans ?

Rien. La réforme flexibilise les conditions de départ à la retraite pour les personnes entre 63 et 70 ans uniquement. Une personne de 59 ans ne peut donc prendre une retraite anticipée que si le règlement de sa caisse de pension le prévoit, comme dans le droit actuel. Le droit à la perception anticipée des prestations ne prend naissance qu’à partir de 63 ans (voir question suivante).

Si elle souhaite baisser son taux d’occupation et que le règlement de son institution de prévoyance ne lui permet pas de percevoir sa prestation de vieillesse de manière anticipée, c’est le droit en vigueur qui s’applique : il n’est possible d’éviter un décompte équivalent à un cas de libre passage que lorsque le règlement de l’institution de prévoyance prévoit une réglementation au moins aussi favorable pour l’assuré ou tient compte de l’activité moyenne (art. 20 al. 2 LFLP).

De même, maintenir sa prévoyance au niveau du dernier gain assuré en versant des cotisations d’épargne jusqu’à l’âge de référence réglementaire n’est possible que si le règlement de l’institution de prévoyance le prévoit (art. 33a LPP).

3. Qu’est-ce qui change pour une personne de 63 ans ?

Grâce à la réforme, cette personne a désormais le droit de percevoir sa prestation de vieillesse de manière anticipée si elle ne veut plus travailler. Si la personne était auprès d’une institution de prévoyance qui ne prévoyait pas la retraite anticipée dans son règlement, elle a désormais le droit à une prestation de vieillesse.

Si cette personne baisse son taux d’occupation, elle n’est en outre pas obligée de retirer l’avoir correspondant. Celui-ci est conservé par l’institution de prévoyance et peut être perçu ultérieurement. Elle n’est donc plus tributaire des dispositions explicites du règlement de son institution de prévoyance.

 

4. Qu’est-ce qui change pour une personne qui aura 65 ans en 2024 ?

Cette personne atteindra l’âge de référence et aura donc le droit de percevoir sa prestation de vieillesse. Rien ne change donc par rapport au droit actuel.

Si la personne souhaite continuer à travailler après son 65e anniversaire, l’institution de prévoyance doit lui proposer d’ajourner sa prestation de vieillesse jusqu’à la cessation de son activité professionnelle, mais au plus tard jusqu’à son 70e anniversaire. Ajourner la perception de la totalité de la prestation de vieillesse est possible même en cas de réduction du taux d’occupation. Cependant, elle ne peut maintenir sa prévoyance en continuant à payer les cotisations correspondantes que si le règlement de son institution de prévoyance le prévoit (art. 33b LPP). Selon le droit en vigueur, la personne devrait percevoir sa prestation de vieillesse à 65 ans, si les dispositions règlementaires de son institution de prévoyance ne prévoient pas que la prestation de vieillesse ne prend naissance qu’à la fin de l’activité professionnelle.

 

5. Combien d’étapes pour le retrait partiel de la prestation le règlement de l’institution de prévoyance doit-il au moins proposer ?

Les institutions de prévoyance doivent offrir la possibilité de percevoir les prestations de vieillesse de manière anticipée à partir de 63 ans et en ajourner la perception jusqu’à 70 ans. Dans cet intervalle, elles doivent proposer l’option d’un passage progressif à la retraite en au moins trois étapes. Concrètement, les assurés doivent avoir la possibilité de percevoir leur prestation de vieillesse sous forme de rente en trois étapes.

Si le règlement autorise l’assuré à percevoir une prestation en capital en lieu et place d’une rente de vieillesse (art. 37 al. 4 LPP) et que l’assuré fait usage de cette possibilité, l’institution de prévoyance ne doit proposer que deux étapes supplémentaires.

 

6. Une institution de prévoyance peut-elle régler de façon plus précise la perception partielle de la prestation de vieillesse dans son règlement de prévoyance ?

Les institutions de prévoyance doivent proposer trois étapes de perception partielle de la rente de vieillesse entre 63 et 70 ans.

Les institutions de prévoyance ne peuvent pas subordonner les possibilités de retrait prévues légalement à d’autres conditions. Pour protéger les institutions de prévoyance, la loi prévoit que le premier retrait partiel doit représenter au moins 20% de la prestation de vieillesse. La forme sous laquelle l’avoir est perçu (rente ou capital) ne joue aucun rôle. L’institution de prévoyance peut autoriser un pourcentage minimal moins élevé.

L’assuré peut également demander que le quart de son avoir de vieillesse déterminant pour le calcul de la prestation de vieillesse effectivement touchée lui soit versé sous la forme d’une prestation en capital (art. 37 al. 2 LPP ; cf. question 7). L’institution peut fixer un délai déterminé que l’assuré doit respecter pour faire valoir son droit à une prestation en capital (art. 37 al. 4 LPP). Des règles supplémentaires sont seulement autorisées pour garantir une exécution raisonnable. En effet, il s’agit de ne pas restreindre davantage les droits des assurés.

Cependant, l’institution qui offre la possibilité de percevoir la prestation en plus de trois étapes peut prévoir des conditions s’appliquant aux étapes supplémentaires. La loi prévoit seulement que le capital peut être perçu en trois étapes au plus. De même, quand des retraits partiels sont déjà possibles à partir de 58 ans, l’institution de prévoyance peut fixer des règles particulières.

 

7. L’assuré a-t-il le droit de retirer son avoir sous forme de capital ?

Les institutions de prévoyance n’ont pas l’obligation de prévoir dans leur règlement un retrait en capital indépendant d’une rente de vieillesse, mais elles sont ensuite tenues de verser, à la demande de l’assuré, le quart de son avoir de vieillesse déterminant pour le calcul de la prestation de vieillesse effectivement touchée sous la forme d’une prestation en capital (art. 37 al. 2 LPP). L’OFAS estime toutefois que les institutions de prévoyance ne sont pas obligées, en cas de retrait de la rente de vieillesse en trois étapes, de verser à chaque étape un quart de l’avoir de vieillesse disponible en capital. Elles sont toutefois libres de le prévoir, tout comme elles peuvent autoriser trois retraits partiels en capital indépendamment d’une rente de vieillesse.

 

8. Comment procéder lorsqu’un assuré a plusieurs rapports de prévoyance liés au même employeur et souhaite percevoir une partie de sa rente de manière anticipée ?

Si une personne a plusieurs rapports de prévoyance dans le cadre d’un seul emploi, deux situations sont à différencier :

Si la personne continue après la retraite partielle à être assurée auprès de plusieurs institutions de prévoyance avec dans chacune une baisse du salaire assuré, le retrait partiel dans chaque institution de prévoyance doit au maximum être égal à la diminution de salaire.

Si la personne n’est plus assurée que dans un plan après la retraite partielle car elle ne remplit plus les conditions d’entrée dans l’autre/les autres institutions de prévoyance, elle devrait en principe percevoir intégralement les prestations de vieillesse de cette/ces institutions de prévoyance si elle a atteint l’âge de préretraite du règlement si elle le souhaite. Sinon, elle percevra la part de prestation de vieillesse correspondant à la baisse du salaire et la partie restante peut être versée auprès d’une fondation de libre passage ou auprès d’une autre institution de prévoyance à laquelle elle est assurée, si les dispositions réglementaires de celle-ci le permettent.

En ce qui concerne la caisse de base, du fait d’une baisse du taux d’activité, une perception des prestations de vieillesse à hauteur de la retraite partielle devrait avoir lieu en cas de baisse du salaire assuré à la demande de l’assuré.

En revanche, si le salaire assuré ne baisse pas dans la caisse de base (ou auprès d’une institution de prévoyance), car la baisse de salaire ne concerne qu’une caisse-cadre, nous sommes d’avis qu’aucune prestation de vieillesse ne doit être versée de la caisse de base. Il faut donc distinguer ce cas de celui où une personne n’est assurée qu’auprès d’une institution de prévoyance minimum LPP alors que son salaire AVS est bien plus élevé. Dans ce cas-là, les prestations de vieillesse correspondant à la baisse du salaire peuvent être versées.

 

9. Les institutions de prévoyance doivent-elles vérifier si l’assuré a plusieurs rapports de prévoyance et perçoit également des prestations à ce titre ?

A notre avis, si une personne a plusieurs employeurs, chacun des employeurs doit être considéré individuellement. Le salarié annonce son intention de prendre une retraite partielle à chaque employeur ou à un seul s’il le souhaite. Pour chaque employeur, l’institution de prévoyance sait si tout le salaire de cet employeur est assuré auprès d’elle ou si une partie de salaire est assurée auprès d’une autre institution de prévoyance. Elle peut donc facilement se coordonner avec l’autre/les autres institutions de prévoyance de l’employeur.

 

10. En cas de retraite anticipée partielle, l’institution de prévoyance peut-elle disposer dans son règlement que l’assuré quitte la caisse si le salaire restant est inférieur au seuil d’entrée ?

L’art. 13a al. 4 LPP permet à une institution de prévoyance de prévoir réglementairement que, si dans le cadre de la retraite partielle, le salaire restant est inférieur au seuil d’entrée de l’institution de prévoyance, la prestation de vieillesse est obligatoirement perçue.

Si rien n’est prévu réglementairement, que se passe-t-il ? Si l’on considère que, du moment où il n’atteint plus le seuil d’entrée, l’assuré quitte l’institution de prévoyance, on devrait alors appliquer l’art. 2 al. 1bis LFLP. L’assuré pourrait alors demander le versement de sa prestation de sortie sur un compte de libre passage. Si, dans le cas où le règlement ne prévoit rien, c’est cette possibilité qui est retenue, il va de soi qu’un règlement pourrait prévoir une telle solution.

En cas de libre passage, la personne pourrait théoriquement demander le transfert auprès de deux fondations de libre passage.

 

11. L’institution de prévoyance doit-elle proposer un ajournement de la prestation de vieillesse sans cotisations d’épargne ?

Oui, l’institution de prévoyance doit offrir aux assurés l’ajournement de la perception de leur prestation de vieillesse sans verser des cotisations d’épargne. Les art. 13 al. 2 et 13b al. 2 LPP régissent le droit des assurés à ajourner la perception de leur prestation de vieillesse au-delà de l’âge de référence et jusqu’à la cessation de leur activité professionnelle (mais au plus tard jusqu’à 70 ans) en cas de poursuite de celle-ci. L’institution de prévoyance ne peut en revanche subordonner cet ajournement au versement de cotisations supplémentaires par le salarié et l’employeur.

Outre la garantie du droit légal des assurés à l’ajournement, l’institution de prévoyance peut prévoir dans son règlement la possibilité pour ses assurés de verser des cotisations supplémentaires en cas de poursuite de leur activité professionnelle (art. 33b LPP). Il faut toutefois expressément préciser que le maintien de la prévoyance dans ce cas est possible uniquement «sur demande de l’assuré».

 

12. À partir de quel âge une assurée appartenant à la génération transitoire peut-elle retirer son avoir du 3e pilier ?

Jusqu’à l’entrée en vigueur d’AVS 21 le 1er janvier 2024, les femmes peuvent retirer leur prestation du pilier 3a dès leur 59e anniversaire. Avant cette date, toutes les femmes nées entre 1960 et 1964 auront atteint l’âge de 59 ans.

Les femmes nées en 1964 peuvent donc également retirer leurs prestations du 3e pilier en 2023 à l’âge de 59 ans. Or, dès l’entrée en vigueur d’AVS 21 le 1er janvier 2024, le nouveau droit s’applique et un retrait pour les femmes nées en 1964 n’est possible qu’à partir de 60 ans. Les femmes nées en 1964 n’auraient donc pas la possibilité de retirer leur avoir en 2024 pendant quelques mois jusqu’à leur 60e anniversaire. L’OFAS estime toutefois que le droit que les femmes de cette génération ont acquis en 2023 de pouvoir retirer leur pilier 3a ne doit pas tomber avec l’entrée en vigueur d’AVS 21. Cette solution pragmatique permet d’éviter une interruption temporaire de la possibilité de retirer son avoir.

Exemple : une assurée née le 30 juin 1964 peut retirer son 3e pilier à partir du 1er juillet 2023 (l’ancien droit s’applique : retrait dès 59 ans). Bien que l’assurée n’ait pas encore 60 ans le 1er janvier 2024, elle garde la possibilité de retirer son 3e pilier puisque son droit a pris naissance le 1er juillet 2023.

Les femmes nées en 1965 auront 59 ans en 2024. Elles sont donc soumises au nouveau droit, et ne pourront retirer leur avoir qu’à leurs 60 ans, en 2025.

 

13. Jusqu’à quel âge au plus tard les assurées sans activité professionnelle appartenant à la génération transitoire doivent-elles retirer leur avoir du pilier 3a ?

Dès l’entrée en vigueur d’AVS 21 le 1er janvier 2024, tous les avoirs du 3e pilier doivent être retirés au plus tard à 65 ans (contre 64 ans actuellement pour les femmes cessant leur activité) si l’assuré n’exerce plus d’activité professionnelle. Pour les générations nées en 1961/1962/1963, les dispositions transitoires de l’AVS s’appliquent :

 

Année Année de naissance Retrait au plus tard à
2024 Femmes nées en 1960 64 ans
2025/2026 Femmes nées en 1961 64 ans et 3 mois
2026/2027 Femmes nées en 1962 64 ans et 6 mois
2027/2028 Femmes nées en 1963 64 ans et 9 mois
2029 Femmes nées en 1964 65 ans

Exemple : une assurée née le 30 novembre 1961 doit retirer son avoir du 3e pilier jusqu’au 28 février 2026 (à 64 ans et 3 mois).

 

14. Bien que la réforme AVS 21 n’entre en vigueur qu’en 2024, les institutions de prévoyance peuvent-elles déjà adapter le financement des rentes AVS transitoires cette année ?

Les rentes transitoires sont des rentes AVS de substitution allouées par les institutions de prévoyance conformément au règlement LPP durant la période précédant la retraite et jusqu’au versement d’une rente AVS ordinaire. Quelques institutions de prévoyance proposent de telles rentes transitoires. Ces dernières sont en général (co)financées par l’employeur ou par une réduction du montant de la rente versée à vie par l’institution de prévoyance à l’assuré.

Dès 2025, l’âge de référence pour les femmes sera relevé par étapes de trois mois, avec pour corollaire un allongement de la durée de versement des rentes AVS transitoires. Par exemple, la rente transitoire d’une femme née en 1962 et prenant sa retraite à 62 ans devra être versée six mois de plus, puisque celle-ci pourra percevoir une rente AVS pleine à 64 ans et six mois seulement. Il est donc nécessaire d’adapter le financement des rentes transitoires. Les institutions de prévoyance devraient donc d’ores et déjà pouvoir prendre des mesures visant à garantir le versement des prestations transitoires jusqu’à l’âge de référence réel, et non jusqu’à 64 ans seulement.

 

Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 161 du 11.05.2023 consultable ici

Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP), dans sa version au 01.01.2024, consultable ici

Loi fédérale du 17 décembre 1993 sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (Loi sur le libre passage, LFLP), dans sa version au 01.01.2024, consultable ici

 

Mitteilungen über die berufliche Vorsorge Nr. 161 (11.05.2023), Fragen und Antworten zu den Änderungen in der beruflichen Vorsorge im Rahmen der Reform AHV 21 – Stellungnahmen des BSV

 

 

 

 

 

5A_907/2021 (f) du 20.04.2022, publié 148 III 232 – Séquestre des avoirs de prévoyance – 92 al. 1 LP – 275 LP – 4 LFLP – 5 LFLP – 16 OLP

Arrêt du Tribunal fédéral 5A_907/2021 (f) du 20.04.2022, publié 148 III 232

 

Arrêt 5A_907/2021 consultable ici, résumé du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

ATF 148 III 232 consultable ici

 

Séquestre des avoirs de prévoyance – Condition de l’exigibilité du droit aux prestations / 92 al. 1 LP – 275 LP – 4 LFLP – 5 LFLP – 16 OLP

 

L’avoir de prévoyance ne peut faire l’objet d’un séquestre que si la personne assurée a fait une demande de versement. Ce principe vaut pour les avoirs de prévoyance du 2e pilier, y compris les comptes et polices de libre passage, ainsi que pour les avoir de prévoyance individuelle liée (pilier 3a). Une demande de transfert dans une institution de libre passage ne suffit pas pour rendre séquestrable l’avoir de prévoyance.

Dans cet arrêt, le TF a examiné la question de savoir s’il pouvait y avoir séquestre de la prestation de sortie de l’intimé qui était détenue par son ancienne institution de prévoyance à laquelle il avait cessé d’être affilié facultativement comme indépendant et à qui il avait donné l’ordre de transférer sa prestation de sortie à une institution de libre passage. Selon l’art. 275 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), les art. 91 à 109 LP relatifs à la saisie s’appliquent par analogie à l’exécution du séquestre. L’art. 92 LP, al. 1, ch. 10 LP, déclare insaisissables « les droits aux prestations de prévoyance et de libre passage non encore exigibles à l’égard d’une institution de prévoyance professionnelle ».

Le TF a déjà jugé, au sujet du paiement en espèces de la prestation de sortie en cas de libre passage (art. 5 LFLP), que la simple possibilité de demander le paiement ne provoque pas l’exigibilité de la prestation. La demande de paiement en espèces de la prestation de sortie en cas de libre passage est une condition dont dépend l’exigibilité du droit au paiement. Aussi longtemps qu’une telle demande n’est pas déposée, la prestation de libre passage doit rester affectée au maintien de la prévoyance et ne peut donc être ni saisie, ni séquestrée. Le TF a déjà également considéré qu’il n’y a rien d’abusif de se conformer aux règles qui permettent de maintenir l’affectation de la prestation de sortie au but de prévoyance, même lorsque les conditions pour obtenir un versement sont remplies.

En l’espèce, le TF a jugé que la prestation de libre passage n’était pas exigible et donc pas séquestrable, car l’intimé avait demandé à son ancienne institution de prévoyance le transfert de celle-ci sur un compte auprès d’une institution de libre passage afin de maintenir sa prévoyance sur la base de l’art. 4 LFLP.

 

Arrêt 5A_907/2021 consultable ici

ATF 148 III 232 consultable ici

Résumé in Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

 

8C_487/2021 (f) du 05.05.2022 – LPP – L’admission du recours par la partie intimée ne dispensent pas le Tribunal fédéral d’examiner la cause au fond – 32 LTF / Maxime d’office – 43 al. 1 LPGA – 61 let. c LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_487/2021 (f) du 05.05.2022

 

Consultable ici

 

Rente d’invalidité LPP – Erreur manifeste du tribunal cantonal dans calcul avoir vieillesse

L’admission du recours par la partie intimée ne dispensent pas le Tribunal fédéral d’examiner la cause au fond – 32 LTF / Maxime d’office – 43 al. 1 LPGA – 61 let. c LPGA

Frais judiciaires et dépens – 66 LTF – 68 LTF

 

Assurée, née en 1976, a travaillé du 01.02.2007 au 31.03.2012 en qualité de secrétaire trilingue et était affiliée pour la prévoyance professionnelle auprès de la A.__ (l’institution de prévoyance).

Le 24.02.2014, l’assurée a présenté une demande de prestations de l’assurance-invalidité. Elle été mise au bénéfice d’une rente entière d’invalidité dès le 01.08.2014 conformément à l’arrêt rendu le 09.03.2017 par le tribunal cantonal dans la cause l’opposant à l’office AI.

Saisie le 31.05.2017 d’une demande de rente de la prévoyance professionnelle, l’institution de prévoyance a informé l’assurée qu’elle estimait ne pas être tenue de lui allouer des prestations. Le 14.03.2018, l’assurée a ouvert action contre l’institution de prévoyance en concluant à l’octroi d’une rente entière d’invalidité d’au moins 41’184 fr. par an dès le 01.04.2012 avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 01.06.2017.

Par arrêt du 29.07.2019 (arrêt PP 4/18 – 25/2019), la cour cantonale a admis la demande, a constaté que l’assurée avait droit à une rente entière d’invalidité de la prévoyance professionnelle à compter du 01.04.2012 et a invité l’institution de prévoyance à fixer le montant des prestations à servir conformément aux considérants.

A la suite de cet arrêt, l’institution de prévoyance a alloué à l’assurée une rente d’invalidité d’un montant mensuel de 2’998 fr. 80. Cette dernière a manifesté son désaccord avec ce montant, invoquant le droit à une rente d’invalidité annuelle de 41’184 fr., soit une rente de 3’432 fr. par mois. L’institution de prévoyance a maintenu sa position, expliquant que l’incapacité de travail invalidante remontait au 27.08.2009, de sorte que le calcul de la rente était effectué sur la base du gain assuré selon le certificat personnel au 01.01.2009 (61’444 fr. 65) et non sur celui au 01.01.2012 (70’595 fr.).

 

Procédure cantonale (arrêt PP 5/20 – 16/2021 – consultable ici)

Le 05.03.2020, l’assurée a déposé à titre principal une demande d’interprétation du dispositif de l’arrêt rendu le 29.07.2019 par la cour cantonale, en concluant à ce que son droit à la rente d’invalidité dès le 01.04.2012 se calcule d’après son gain assuré figurant sur le dernier certificat de prévoyance au 01.01.2012. Subsidiairement, elle a formé une demande en constatation de droit tendant à ce que la rente annuelle entière d’invalidité qui lui est due par l’institution de prévoyance avec intérêts s’élève à au moins 41’184 fr.

Par arrêt du 12.05.2021, la cour cantonale a déclaré irrecevable la demande d’interprétation (chiffre I) et a admis la demande en constatation de droit (chiffre II) en ce sens que l’assurée a droit à compter du 01.04.2012 à une rente annuelle d’invalidité de 46’005 fr. 15 avec intérêts à 5% dès le 14.03.2018 (chiffre III).

 

TF

Consid. 3.1
Compte tenu des motifs et conclusions du recours, le litige en instance fédérale ne porte plus que sur un seul aspect du calcul opéré par la cour cantonale pour fixer le montant de la rente annuelle d’invalidité due par l’institution de prévoyance à l’assurée dès le 01.04.2012.

Alors que les juges cantonaux ont retenu, au titre de l’avoir de vieillesse déterminant pour calculer cette rente, un montant de 704’519 fr. 93, l’institution de prévoyance soutient que ce montant doit être établi à 630’672 fr. 90, ce qui donne, après application du taux de conversion de 6,53% selon l’annexe 3 RPEC [Règlement de prévoyance pour les personnes employées et les bénéficiaires de rente de la Caisse de prévoyance de la Confédération; RS 172.220.141.1], une rente annuelle d’invalidité de 41’182 fr. 95 et non pas de 46’005 fr. 15 comme fixé dans le dispositif de l’arrêt entrepris. Plus particulièrement, l’institution de prévoyance s’en prend à la manière dont la cour cantonale a déterminé, dans le cas d’espèce, la somme des bonifications de vieillesse depuis la naissance du droit à la prestation d’invalidité jusqu’à l’âge de 65 ans selon l’art. 24 RPEC, somme qui, avec l’avoir de vieillesse selon l’art. 36 RPEC que la personne assurée a accumulé jusqu’à la naissance du droit à la prestation d’invalidité, compose l’avoir de vieillesse déterminant servant au calcul de la rente (voir l’art. 57 al. 1 let. a et b RPEC).

Consid. 3.2
L’assurée ayant conclu à l’admission du recours sur ce point, il convient de déterminer ce que cela implique pour l’examen de la cause par la Cour de céans.

En droit privé, lorsque la cause est soumise à la maxime de disposition, l’acquiescement devant un tribunal est considéré comme un acte de procédure unilatéral par lequel la partie intimée reconnaît le bien-fondé de la prétention de la partie recourante et admet les conclusions de celle-ci (cf. arrêt 5A_667/2018 du 2 avril 2019 consid. 3.2, publié in SJ 2019 I 344). En droit des assurances sociales, dans lequel prévaut la maxime d’office (cf. art. 43 al. 1 et art. 61 let. c LPGA), l’acquiescement de la partie intimée ne permet pas au Tribunal fédéral de rayer la cause du rôle conformément à l’art. 32 al. 2 LTF; en d’autres termes, des conclusions de la partie intimée tendant à l’admission du recours ne dispensent pas le Tribunal fédéral d’examiner la cause au fond, en vérifiant que la situation résultant de l’admission du recours soit conforme au droit fédéral et en rendant une décision sur le fond (FLORENCE AUBRY GIRARDIN, in: Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, n° 23a ad art. 32 LTF; arrêts 8C_331/2020 du 4 mars 2021 consid. 2.1; 9C_149/2017 du 10 octobre 2017 consid. 1; 2C_299/2009 du 28 juin 2010 in RDAF 2010 II 494, consid. 1.3.4).

Il convient dès lors d’examiner si, comme le soutient l’institution de prévoyance, la cour cantonale a violé les dispositions pertinentes du RPEC en établissant le montant de la rente annuelle d’invalidité à 46’005 fr. 15 sur la base d’un avoir de vieillesse déterminant de 704’519 fr. 93.

Consid. 4.1
Invoquant un établissement inexact des faits (art. 97 al. 1 et art. 105 al. 2 LTF), l’institution de prévoyance reproche à la cour cantonale d’avoir pris en compte à double la même prestation de libre passage de l’assurée dans l’avoir de vieillesse déterminant pour le calcul de la rente d’invalidité selon l’art. 57 al. 1 let. a et b RPEC. Elle explique que le 09.10.2012, elle avait transféré, en raison de la sortie de l’assurée de sa caisse, un montant de 46’381 fr. 40 (sic) sur un compte auprès de la Fondation institution supplétive LPP et que ce montant lui avait été reversé par cette dernière le 16.10.2019, majoré des intérêts courus depuis le versement jusqu’à la date de remboursement (48’279 fr. 19), après qu’elle avait été condamnée à verser une rente d’invalidité à l’assurée par arrêt du 29.07.2019. Ces faits ressortaient clairement de ses écritures ainsi que des documents qu’elle avait versés en procédure cantonale, et auraient dû être constatés par la cour cantonale conformément à son obligation d’établir les faits d’office (art. 73 al. 2 LPP). La prise en compte, par l’instance cantonale, à la fois du montant de 46’381 fr. 40 et du versement de 48’279 fr. 19 conduisait à un calcul de rente erroné en violation des dispositions règlementaires.

Consid. 4.2
En l’occurrence, on doit donner raison à l’institution de prévoyance. Après avoir pris en considération d’une manière correcte la prestation de sortie de l’assurée, à sa valeur au 31.03.2012 (soit 46’381 fr. 40), au titre de l’avoir de vieillesse accumulée par celle-ci au moment de la naissance du droit à la prestation d’invalidité (cf. art. 57 al. 1 let. a RPEC), la cour cantonale a également porté en compte, dans le calcul de la somme des bonifications de vieillesse futures de l’assurée (cf. art. 57 al. 1 let. b RPEC), le montant de 48’279 fr. 19 correspondant au versement effectué par la Fondation institution supplétive LPP à l’institution de prévoyance en date du 16.10.2019 (voir le tableau y relatif figurant à la page 25 de l’arrêt entrepris). Il s’agit là d’une erreur manifeste de la cour cantonale, puisqu’il ressort des pièces produites par-devant elle que le montant de 48’279 fr. 19 constitue la prestation de sortie de l’assurée versée par l’institution de prévoyance en 2012 et restituée à cette dernière en 2019 avec les intérêts courus depuis lors conformément à l’art. 90 RPEC, et non pas une prestation de sortie acquise par l’assurée auprès d’autres institutions de prévoyance et apportée à l’institution de prévoyance. Si l’on fait abstraction du montant précité dans le calcul de la somme des bonifications de vieillesse futures de l’assurée, l’avoir de vieillesse déterminant de celle-ci s’élève à 630’672 fr. 90, comme cela résulte du tableau récapitulatif à la page 18 du recours. Il en découle une rente annuelle d’invalidité de 41’182 fr. 95 (630’672 fr. 90 x 6,53).

Consid. 4.3
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis et l’arrêt attaqué réformé en ce sens que l’assurée a droit, à compter du 01.04.2012, à une rente annuelle d’invalidité de 41’182 fr. 95 avec intérêts à 5% dès le 14.03.2018.

 

Consid. 5
Doit encore être résolue la question des frais et dépens de la présente procédure.

Consid. 5.1
Selon l’art. 66 al. 1 LTF, en règle générale, la partie qui succombe doit payer les frais judiciaires; si les circonstances le justifient, le Tribunal peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. En ce qui concerne les dépens, le Tribunal fédéral décide si et, le cas échéant, dans quelle mesure les frais de la partie obtenant gain de cause sont supportés par celle qui succombe (art. 68 al. 1 LTF). En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu’ils obtiennent gain de cause dans l’exercice de leurs attributions officielles (art. 68 al. 3 LTF).

Consid. 5.2
En l’espèce, l’institution de prévoyance obtient gain de cause. Elle a dû recourir pour faire corriger une erreur manifeste commise par la cour cantonale dans l’établissement de l’avoir de vieillesse déterminant de l’assurée. Devant le Tribunal fédéral, cette dernière ne s’est pas identifiée à l’arrêt entrepris, mais elle a au contraire acquiescé au recours, mettant en évidence l’erreur qui faussait le calcul de sa rente. On ne saurait donc lui reprocher d’avoir succombé sur ce point devant le Tribunal fédéral (cf. arrêt 4A_595/2011 précité consid. 3), de sorte qu’il sera renoncé à la perception de frais judiciaires pour la procédure fédérale (art. 66 al. 1, deuxième phrase, LTF). Bien qu’obtenant gain de cause, l’institution de prévoyance, en sa qualité d’institution chargée de tâches de droit public, n’a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF; ATF 128 V 124 consid. 5b). Quant à l’assurée, elle saurait ne se voir allouer les dépens qu’elle demande dès lors qu’elle n’obtient pas gain de cause (art. 68 al. 1 LTF).

 

Le TF admet le recours de l’institution de prévoyance.

 

 

Arrêt 8C_487/2021 consultable ici

 

Prévoyance professionnelle : le taux d’intérêt minimal reste à 1%

Prévoyance professionnelle : le taux d’intérêt minimal reste à 1%

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 12.10.2022 consultable ici

 

Le taux d’intérêt minimal appliqué dans la prévoyance professionnelle restera fixé à 1% l’année prochaine. Lors de sa séance du 12 octobre 2022, le Conseil fédéral a été informé qu’il n’était pas nécessaire de revoir le taux cette année. Ce taux détermine l’intérêt minimal auquel doivent être rémunérés les avoirs de vieillesse du régime obligatoire conformément à la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (LPP).

 

Aux termes de la loi, l’élément déterminant pour la fixation du taux est l’évolution du rendement des obligations de la Confédération ainsi que, en complément, celui des actions, des obligations et de l’immobilier.

Le rendement des obligations de la Confédération a nettement progressé : le taux d’intérêt des obligations de la Confédération à dix ans était de -0,13% à la fin 2021 et de 1,09% à la mi-septembre 2022. Si les actions et l’immobilier ont connu une évolution positive en 2021, l’année en cours a été marquée par des reculs importants. Malgré la situation actuellement difficile sur les marchés, le maintien du taux d’intérêt minimal à 1% se justifie dans l’ensemble. C’est pourquoi le taux n’est pas revu cette année. Le Conseil fédéral est tenu de réévaluer le taux d’intérêt minimal au moins tous les deux ans et procédera à cet examen l’année prochaine.

Le 30 août 2022, la Commission fédérale de la prévoyance professionnelle s’est, elle aussi, prononcée pour un maintien du taux à 1%.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 12.10.2022 consultable ici