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ATF 146 V 95 – 9C_391/2019 (d) du 23.03.2020 – Partage des avoirs de prévoyance professionnelle en cas de divorce / Interprétation des art. 122 et 123 CC – Cas de prévoyance invalidité en cours (annoncé à l’AI) mais sans octroi de rente lors de l’introduction de la procédure de divorce

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_391/2019 (d) du 23.03.2020, publié aux ATF 146 V 95

 

Arrêt 9C_391/2019 consultable ici

ATF 146 V 95 consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi.

 

Partage des avoirs de prévoyance professionnelle en cas de divorce / 122 ss CC

Interprétation des art. 122 et 123 CC / Cas de prévoyance invalidité en cours (annoncé à l’AI) mais sans octroi de rente lors de l’introduction de la procédure de divorce

 

Par jugement du 22.06.2018, le divorce entre A.__ (né en 1958) et B.__ (née en 1959) a été prononcé ; le partage de la moitié des avoirs de prévoyance professionnelle accumulés pendant le mariage a été ordonné conformément à l’art. 122 CC. Après que le jugement de divorce est devenu définitif et dans le cadre de la procédure prévue à l’art. 281 al. 3 CPC, le tribunal a renvoyé le 31.08.2018 l’affaire au tribunal cantonal compétent pour le partage des prestations de sortie (« décision en termes de montant »).

 

Procédure cantonale

La cour cantonale a calculé la prestation de sortie pour l’épouse à CHF 670’106.35 et pour l’époux à CHF 343’049.30 lors de l’introduction de la procédure de divorce. Elle en a déduit les avoirs de prévoyance existant au moment du mariage et constitués jusqu’au moment de l’introduction de la procédure de divorce, soit CHF 318’013.37 pour l’époux et CHF 197’602.52 pour l’épouse. L’instance cantonale a fixé le partage de l’avoir de prévoyance de l’époux à CHF 352’092,98 et celui de son épouse divorcée à CHF 145’446,78. Par conséquent, après avoir divisé ces montants à parts égales, il a accordé à l’épouse divorcée CHF 103’323,10 CHF (net) au titre de la compensation des pensions.

Par arrêt du 07.05.2019, le tribunal cantonal des assurances a ordonné à l’institution de prévoyance de transférer CHF 103’323.10 du compte de l’époux, majoré des intérêts à compter du 20.02.2018, sur le compte de l’épouse divorcée auprès de la caisse de pension X.__.

 

TF

A.__ a recouru contre l’arrêt du 07.05.2019, demandant son annulation et le « report de la détermination du montant à transférer par son institution de prévoyance jusqu’à la détermination de la pension d’invalidité » »

La IIe Cour de droit social et la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral ont mené la procédure d’échange selon l’art. 23 LTF.

 

Consid. 2.2

En cas de divorce, les prestations de sortie et les parts de rente sont partagées conformément aux art. 122 à 124e CC et 280 et 281 CPC ; les art. 3 à 5 LFLP s’appliquent par analogie au montant à transférer (art. 22 LFLP).

Conformément au principe de l’art. 122 CC, les prétentions de prévoyance professionnelle acquises durant le mariage et jusqu’à l’introduction de la procédure de divorce sont partagées entre les époux. Il faut distinguer les partages « pour les prestations de sortie » (art. 123 CC), « en cas de perception d’une rente d’invalidité avant l’âge réglementaire de la retraite » (art. 124 CC) et « en cas de perception d’une rente d’invalidité après l’âge réglementaire de la retraite ou d’une rente de vieillesse » (art. 124a CC).

 

Consid. 2.3

Les prestations de sortie acquises, y compris les avoirs de libre passage et les versements anticipés pour la propriété du logement, sont partagées par moitié (art. 123 al. 1 CC). En vertu de l’art. 123 al. 3 CC, les prestations de sortie à partager se calculent conformément aux art. 15 à 17 et 22a ou 22b LFLP. Au sens de l’art. 124 al. 1 CC, si, au moment de l’introduction de la procédure de divorce, l’un des époux perçoit une rente d’invalidité et qu’il n’a pas encore atteint l’âge réglementaire de la retraite, le montant auquel il aurait droit en vertu de l’art. 2 al 1ter LFLP en cas de suppression de sa rente est considéré comme prestation de sortie. Conformément à l’art. 124 al. 2 CC, les dispositions relatives au partage des prestations de sortie s’appliquent par analogie.

La différence entre les dispositions de l’art. 123 et de l’art. 124 CC réside essentiellement dans le fait que la répartition prévue à l’art. 123 CC ne concerne que les prestations de sortie « acquises » (c’est-à-dire les prestations « effectivement » épargnées et portant intérêt), tandis que celle prévue à l’art. 124 CC, il s’agit d’une prestation de sortie « hypothétique », qui comprend en outre les avoirs (ainsi que les intérêts) provenant du maintien du compte de vieillesse après le début de l’invalidité (cf. art. 14 OPP 2) dans le domaine obligatoire et l’exonération des cotisations en vertu de la réglementation dans le domaine plus étendu) (Message du 29 mai 2013 concernant la révision du code civil suisse (Partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce), FF 2013 4353 ch. 1.5.2 et 4357 ch. 2.1 ; JUNGO/GRÜTTER, in : FamKomm Scheidung, vol. I, 3. Aufl. 2017, N. 6 ss. à l’art. 124 CC ; FLEISCHANDERL/HÜRZELER, in : FamKomm Scheidung, Bd. II, Anhang Sozialversicherungsrechtliche Fragen in Bezug auf Trennung und Scheidung, 3. Aufl. 2017, p. 432 Rz. 206 ; GEISER/WALSER, in : Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, Bd. I, 6. Aufl. 2018, N. 2 à l’art. 124 ZGB).

 

Consid. 2.4

Pour chaque conjoint, la prestation de sortie à partager correspond à la différence entre la prestation de sortie, augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au jour de l’introduction de la procédure de divorce, et la prestation de sortie augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au moment de la conclusion du mariage. Pour ce calcul, on ajoute à la prestation de sortie et à l’avoir de libre passage existant au moment de la conclusion du mariage les intérêts dus au jour de l’introduction de la procédure de divorce. Les paiements en espèces et les versements en capital effectués durant le mariage ne sont pas pris en compte (art. 22a al. 1 LFLP). Les prétentions réciproques des époux à des prestations de sortie ou à des parts de rente sont compensées entre elles (art. 124c al. 1, 1e phrase, CC).

 

Consid. 3

La seule somme litigieuse et à examiner est le montant de l’avoir de vieillesse de l’époux divorcé au 19.02.2018 (introduction de la procédure de divorce), que la cour cantonale a pris en compte à hauteur de CHF 670’106.35. L’époux affirme (comme déjà dans la procédure devant le tribunal cantonal) qu’il est tombé gravement malade en novembre 2014 et qu’il s’est ensuite annoncé à l’assurance-invalidité afin de bénéficier de leurs prestations. La procédure était en cours et la question de savoir s’il avait droit à une rente d’invalidité AI avec effet rétroactif (dès 2015) et, par conséquent, à celle de la prévoyance professionnelle était ouverte. L’avoir de vieillesse de CHF 670’106.35 déclaré par son institution de prévoyance au 19 février 2018 n’était donc que provisoire et pouvait encore être considérablement réduit. Le présent litige ne pourra être réglé qu’après que le droit à une pension d’invalidité aura été clarifié.

 

Consid. 4.1

S’agissant de l’application des art. 123 et 124 CC, l’instance cantonale a seulement considéré que le cas de droit à une rente ne s’était pas produit pour l’époux divorcé lors de l’introduction de la procédure de divorce le 19.02.2018, puisque aucun droit à une rente de l’AI n’était né jusqu’à ce moment-là. Les éventuelles procédures en cours auprès de l’AI ne devaient donc pas être prises en compte dans le partage des prétentions de prévoyance professionnelle. La cour cantonale a donc (implicitement) assimilé la perception effective d’une rente à la survenance de l’événement assuré ou l’a considérée comme le critère déterminant pour la délimitation entre les art. 123 et 124 CC et a (exclusivement) considéré que la première des deux dispositions était applicable.

 

Consid. 4.2.1

Selon l’ancien droit applicable jusqu’au 31.12.2016, le partage des prestations de sortie était (en principe ; cf. pour une exception SVR 2011 BVG Nr. 24 S. 91, 9C_610/2010 consid. 3 ; 2010 BVG Nr. 11 S. 40, 9C_691/2009 consid. 2) était exclue si un « cas de prévoyance » est déjà « survenu » pour l’un des époux (« Vorsorgefall eingetreten » ; « sopraggiunto [un] caso d’assicurazione » resp. « di previdenza ») au moment considéré (cf. art. 122 al. 1 et 124 al. 1 aCC [RO 1999 1128 s.]; ATF 142 V 419 consid. 4.4 p. 424).

 

Consid. 4.2.2

Le Tribunal fédéral a défini ce principe comme suit : Le cas d’invalidité assuré ne survient pas avec l’incapacité de travail sous-jacente, mais avec le début du droit à une prestation d’invalidité (art. 26 al. 1 LPP). Cela correspond à la jurisprudence relative au partage de la prestation de sortie en cas de divorce : selon celle-ci, le cas d’invalidité assuré est survenu si l’un des conjoints est invalide à raison de 50% au moins ou – depuis le 01.01.2005 – 40% au moins ou a présenté une incapacité de travail d’au moins 50% ou – depuis le 01.01.2005 d’au moins 40% durant une année sans interruption notable ou a perçu la prestation sous la forme d’un capital (ATF 142 V 419 consid. 4.3.1 p. 422 ; ATF 134 V 28 consid. 3.4.2 p. 32 ; ATF 129 III 481 consid. 3.2.2 p. 484).

Dans l’ATF 142 V 419 consid. 4.4, le Tribunal fédéral, au vu de cette jurisprudence, a relativisé l’importance de la perception (effective) d’une rente : il a précisé que la réduction complète d’un droit à une rente d’invalidité de la prévoyance professionnelle pour cause de surindemnisation ne change rien à la survenance du cas d’invalidité assuré du premier pilier dans le cadre d’un divorce. Dans les cas cités, l’existence d’un droit à une rente d’invalidité (au moins de l’assurance-invalidité) était déjà claire avant le moment déterminant (entrée en force du jugement de divorce) (ATF 142 V 419 lit. A p. 420 ; 134 V 28 consid. 3.1 p. 30 ; 129 III 481 consid. 3 p. 483).

 

Consid. 4.2.3

Dans l’arrêt 9C_388/2009 du 10.05.2010 consid. 4.4 (non publié in ATF 136 V 225, mais in SVR 2011 BVG Nr. 8 p. 27), le Tribunal fédéral a précisé que ce n’est pas la perception de la rente en tant que telle qui est déterminante, mais uniquement le fait que le droit aux prestations soit né avant le moment déterminant, même si une décision définitive à ce sujet n’intervient qu’ultérieurement (pendant la procédure devant le tribunal de la prévoyance professionnelle ou même après sa conclusion). Si, dans ce sens, le cas d’invalidité s’était produit (et que le partage selon l’art. 122 al. 1 aCC était impossible), le cas devait être renvoyé d’office au juge du divorce, qui était à son tour compétent, pour la détermination d’une indemnité équitable (art. 124 al. 1 aCC) (ATF 136 V 225 consid. 5.3 p. 227 ss).

Puis le Tribunal fédéral a considéré ce qui suit dans l’arrêt 9C_191/2013 du 08.07.2013 consid. 4 (SVR 2014 BVG Nr. 2 p. 5 ; en confirmation de l’arrêt 9C_388/2009 resp. ATF 136 V 225 et en référence à l’arrêt 9C_899/2007 du 28.03.2008 consid. 5.2, FamPra.ch 2008 p. 654) : En principe, le tribunal de la prévoyance professionnelle est lié par le partage prévu dans le jugement de divorce et doit simplement l’exécuter. Cela s’applique également si un cas de prévoyance survient après le moment déterminant ([alors] entrée en force du jugement de divorce). La situation est toutefois différente s’il s’avère par la suite qu’un événement assuré de facto s’est déjà produit avant la date déterminante. Dans ce cas, l’ensemble de la procédure régie par les art. 122/141-142 aCC et 25a aLFLP ne peut être appliqué. Dans ce cas, si le tribunal de la prévoyance professionnelle n’a pas encore procédé à la répartition selon l’art. 122 aCC, il doit suspendre la procédure si le versement rétroactif de prestations d’invalidité jusqu’à une date antérieure au jugement de divorce est probable ou si l’institution de prévoyance est en train de clarifier la question, ou – si un versement rétroactif est certain – renvoyer la question au tribunal du divorce afin qu’il détermine une indemnité équitable conformément à l’art. 124 al. 1 aCC, au besoin par voie de révision du jugement de divorce. Cela vaut également si la procédure AI est encore en cours. En effet, les personnes qui sont invalides à 40% au moins au sens de l’AI ont droit à des prestations d’invalidité LPP (art. 23 lit. a in initio LPP). Le moment décisif pour la survenance du cas d’invalidité assuré est l’entrée en force de la décision de l’assurance-invalidité. Ceci en raison du fait que l’octroi d’une rente de l’assurance invalidité donne également droit à rente au titre de la prévoyance professionnelle obligatoire.

 

Consid. 4.2.4

Il en ressort que dans la situation juridique applicable jusqu’à fin 2016, pour l’application de l’art. 122 al. 1 aCC ou de l’art. 124 al. 1 aCC la perception effective d’une rente avant la date déterminante n’était pas pertinente. Seule la survenance du cas d’invalidité assuré selon le premier (ou le deuxième) pilier était relevant, même si elle n’était déterminée qu’ultérieurement – dans le cadre d’une attribution de rente rétroactive.

 

Consid. 4.3.1

On peut se demander si, dans le droit actuel, le même critère doit être appliqué pour la démarcation entre les art. 123 et 124 CC.

La loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d’autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d’interprétation, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme (ATF 146 V 51 consid. 8.1 p. 63 ; ATF 145 III 109 consid. 5.1 p. 114 ; ATF 144 III 29 consid. 4.4.1 p. 34 s. ; ATF 131 III 314 consid. 2.2 p. 315 s. ; ATF 121 III 460 consid. 4a/bb p. 465 ; chacun avec les références).

 

Consid. 4.3.2

Selon l’art. 124 al. 1 CC, l’élément déterminant pour son application est le fait que le conjoint « perçoit » (« bezieht », « percepisce ») une rente d’invalidité au moment (nouvellement pertinent) de l’introduction de la procédure de divorce. Cette formulation semble claire. Toutefois, l’élément de la perception effective d’une rente est déjà relativisé au vu de la formulation de l’art. 124 al. 3 CC en ce qui concerne « une rente d’invalidité […] réduite pour cause de surindemnisation » (éventuellement totale) (cf. également le consid. 4.2.2 ci-dessus et la référence à l’ATF 142 V 419 consid. 4.4 p. 424).

 

Consid. 4.3.3

Rien n’indique, dans les documents, qu’il y ait eu une discussion sur l’aspect du libellé de l’art. 124 al. 1 CC qui nous intéresse ici. Tant dans le message du Conseil fédéral (FF 2013 4341 ss, notamment 4353 ss [ch. 1.5.2 et 1.5.3] et 4357 ss [ch. 2.1]) que dans les délibérations de l’Assemblée fédérale (BO 2014 S 522 ss ; BO 2015 N 757 ss), la perception d’une rente était assimilée à la survenance de l’événement assuré et les expressions correspondantes étaient utilisées comme synonymes. Il n’est pas évident que cela ait été compris différemment que dans l’ancienne situation juridique (cf. consid. 4.2.3 ci-dessus) et que le terme plus étroit de perception effective de la rente soit désormais déterminant.

 

Consid. 4.3.4

La nouvelle réglementation du partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce visait notamment à permettre le partage des avoirs de pension même si l’un des conjoints était déjà invalide. Toutes les prétentions de prévoyance professionnelle acquises durant le mariage (jusqu’à l’introduction de la procédure de divorce) (prestations de sortie) devaient être soumis au partage (FF 2013 4355 ch. 1.5.3, 4904 ss ch. 2.1 ; BO 2014 S 524 ; BO 2015 N 759, 761, 764). L’octroi rétroactif d’une rente à un moment antérieur à la date effective de l’introduction du divorce peut également conduire – en fonction de la durée du mariage – à une augmentation supplémentaire de l’avoir de prévoyance. Il n’est pas logique que le conjoint divorcé ne participe pas aux bonifications dues au maintien du compte de vieillesse pour la seule raison qu’ils ne sont accordés qu’après la date déterminante (mais rétroactivement).

 

Consid. 4.3.5

D’un point de vue systématique, il faut noter qu’en principe le montant de l’art. 124 al. 1 CC ne peut pas être utilisé pour le partage de la prévoyance professionnelle si une rente d’invalidité a été réduite en raison de la surindemnisation avec les prestations de l’assurance-accidents ou de l’assurance militaire. Dans ce cas, une indemnité équitable est due conformément à l’art. 124e al. 1 CC (art. 124 al. 3 CC en relation avec l’art. 26a OPP 2 ; FF 2013 4363 ch. 2.1). La raison de cette exception existe indépendamment du fait que le droit à la pension était déjà ouvert au moment de l’introduction de la procédure de divorce ou seulement ultérieurement.

 

Consid. 4.4

A l’aune de ce qui précède, l’élément déterminant pour l’application de l’art. 124 CC est de savoir si un droit à une rente d’invalidité de la prévoyance professionnelle est né ou, en d’autres termes, si le cas d’invalidité est survenu avant l’introduction de la procédure de divorce. Dans le domaine de la prévoyance professionnelle obligatoire, la survenance de l’événement assuré coïncide avec l’ouverture du droit à une rente de l’assurance invalidité, même si la rente de la prévoyance professionnelle est différée (pour éviter une surindemnisation). Il en va de même pour la prévoyance étendue si le règlement ne contient rien de contraire (ATF 142 V 419 consid. 4.3.3-4.4 p. 423 s.; GEISER/WALSER, op. cit., N. 7 ad Art. 124 ZGB; FLEISCHANDERL/HÜRZELER, op. cit., p. 432 s. no 207). Contrairement à l’avis de l’instance cantonale, le fait qu’une décision définitive sur le droit à une rente d’invalidité soit encore pendante et que, par conséquent, aucune rente ne soit (encore) perçue n’exclut ni la survenance de l’événement assuré au moment déterminant, ni l’application de l’art. 124 CC (cf. également MEYER/UTTINGER, in: BVG und FZG, 2e ed., 2019, no 42 ad Art. 73 BVG; JUNGO/GRÜTTER, op. cit., no 5 ad art. 122 ZGB et no 13 s. ad art. 124 ZGB).

 

Consid. 5.1 (non publié aux ATF 146 V 95)

Compte tenu des observations (suffisamment précises) de l’époux recourant, il est difficile de savoir si un cas de prévoyance « invalidité » s’est produit dans son cas avant l’introduction de la procédure de divorce. Il n’est pas possible de répondre à cette question sur la base des dossiers de la juridiction cantonale. La cour cantonale devra procéder aux clarifications nécessaires (cf. art. 73 al. 2 LPP). Lorsqu’un droit à une rente d’invalidité avec effet rétroactif à un moment antérieur à l’introduction de la procédure de divorce ne peut être exclu, il est généralement opportun de suspendre la procédure – comme dans le droit précédant (cf. consid. 4.2.3) – jusqu’à ce que la question de la survenance de l’événement assuré soit clarifiée.

Cela vaut également en l’espèce où le tribunal de la prévoyance professionnelle, selon l’ordonnance du dispositif n° 3 du jugement de divorce et la lettre de transfert du tribunal de district (cf. faits de la cause, lit. A), doit déterminer le montant à transférer dans le cadre du partage des avoirs de prévoyance professionnelle.

 

Consid. 5.3 (non publié aux ATF 146 V 95)

La partie défenderesse et l’OFAS évoquent les inconvénients liés au retard (supplémentaire) du partage des avoirs de prévoyance professionnelle. Toutefois, afin d’éviter ces inconvénients, des mesures provisionnelles peuvent être prises conformément au droit procédural cantonal (cf. § 46 al. 2 de la loi argovienne du 4 décembre 2007 sur l’administration du droit administratif (Verwaltungsrechtspflegegesetz, VRPG ; SAR 271.200).

 

Le TF admet le recours de l’époux divorcé.

 

 

Arrêt 9C_391/2019 consultable ici

ATF 146 V 95 consultable ici

 

 

Proposition de citation : ATF 146 V 95 – 9C_391/2019 (d) du 23.03.2020 – Interprétation des art. 122 et 123 CC, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2021/11/atf-146-v-95-9c_391-2019)

5A_819/2017 (f) du 20.03.2018 – Partage de la prévoyance : le dépôt de la demande de divorce comme date déterminante pour la procédure de divorce en cours – 122 CC – 7d al. 2 tit. fin. CC

Arrêt du Tribunal fédéral 5A_819/2017 (f) du 20.03.2018 [arrêt non publié]

 

Consultable ici

Résumé du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 151

 

Partage de la prévoyance : le dépôt de la demande de divorce comme date déterminante pour la procédure de divorce en cours – 122 CC – 7d al. 2 tit. fin. CC

 

La date du dépôt de la demande de divorce est déterminante pour le partage de la prévoyance, également dans les procédures de divorce qui ont été introduites avant l’entrée en vigueur de la révision du partage de la prévoyance et qui sont pendantes devant une autorité judiciaire cantonale.

Depuis le 01.01.2017, c’est la date du dépôt de la demande de divorce qui est déterminante pour le partage de la prévoyance, et non plus celle de l’entrée en force du jugement de divorce. Dans le cas présent, le TF devait préciser si ce principe s’applique également lorsque la demande de divorce a été déposée (longtemps) avant l’entrée en vigueur de la révision du partage de la prévoyance. En l’espèce, la procédure de divorce avait été introduite en 2010.

Le TF a jugé que la réglementation transitoire de l’art. 7d al. 2 tit. fin. CC, est claire : « Les procès en divorce pendants devant une instance cantonale sont soumis au nouveau droit dès l’entrée en vigueur de la modification du [01.01.2017]. » Ainsi, dans ces cas également, seule la prestation de sortie disponible au jour de l’introduction de la procédure de divorce doit être partagée.

 

 

Arrêt 5A_819/2017 consultable ici