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Assurances sociales : ce qui va changer en 2022

Assurances sociales : ce qui va changer en 2022

 

Article de Mélanie Sauvain paru in Sécurité sociale CHSS consultable ici

 

Le projet Développement continu de l’AI entre en vigueur le 1er janvier 2022, avec notamment l’introduction d’un système linéaire de rentes. C’est la principale modification dans le domaine des assurances sociales suisses. La présente contribution donne un aperçu de ce qui change en 2022, sur la base des informations disponibles mi-novembre 2021.

Changements au 1er janvier 2022

  • Assurance-invalidité (AI)

Le projet Développement continu de l’AI s’inscrit dans la lignée des réformes précédentes qui ont transformé l’AI en une assurance de réadaptation grâce à l’introduction et l’extension d’une multitude de mesures d’intégration et de réintégration professionnelle. Les nouvelles dispositions (RO 2021 706), adoptées en juin 2020 par le Parlement et en vigueur dès le 1er janvier 2022, se concentrent sur trois groupes-cibles : les enfants, les jeunes adultes et les personnes atteintes dans leur santé psychique. Elles visent en premier lieu à intensifier le suivi des personnes concernées, à étendre des mesures qui ont déjà fait leurs preuves et à renforcer la collaboration avec les médecins traitants et les employeurs.

La principale mesure qui concerne les enfants est l’actualisation de la liste des infirmités congénitales (IC ou OIC-DFI ; RO 2021 708), révisée pour la dernière fois en 1985. Le but était d’adapter la liste à l’état actuel des connaissances scientifiques. Certaines maladies, pouvant être aujourd’hui facilement traitées, ont été retirées de la liste et sont désormais prises en charge par l’assurance-maladie. D’autres affections sont simplement regroupées sous une nouvelle position, en l’occurrence un nouveau chiffre, et restent donc à la charge de l’AI. Enfin, plusieurs maladies ont été ajoutées à cette liste : c’est le cas de certaines maladies rares dorénavant considérées comme des infirmités congénitales. En parallèle, les critères pour définir une IC figurent désormais dans la loi (art. 13 LAI), ce qui apporte clarté et sécurité juridique pour les personnes assurées, ainsi que pour les organes d’exécution. En cas d’atteintes à la santé complexes, un accompagnement plus étroit sera proposé à l’enfant et à sa famille par l’AI. Les traitements médicaux seront mieux coordonnés afin de favoriser une réadaptation professionnelle ultérieure. Dans cette optique, l’AI renforce sa collaboration avec les médecins traitants.

Pour les adolescents et jeunes adultes atteints dans leur santé, notamment psychique, des mesures ciblées sont mises en place pour éviter autant que possible qu’ils ne touchent une rente d’invalidité dès leur entrée dans la vie adulte. Améliorer les transitions entre scolarité obligatoire et formation professionnelle, et entre formation professionnelle et marché du travail, est une priorité. En ce sens, il s’agit d’intervenir le plus vite possible auprès de ce public. Si un jeune présente par exemple une psychose, l’extension de la détection précoce augmente les chances d’une prise en charge rapide. Il pourra ainsi bénéficier d’un accompagnement continu par exemple ou/et d’une mesure de réinsertion visant à structurer sa journée. Pour lui permettre d’achever sa formation, les mesures médicales de réadaptation de l’AI pourront désormais lui être octroyées jusqu’à l’âge de 25 ans au besoin. Une autre mesure importante est le renforcement de la collaboration avec les médecins traitants, pour que ces derniers mettent rapidement leurs patients en contact avec l’AI et soutiennent les mesures de celle-ci.

Plusieurs nouvelles dispositions visent à améliorer la (ré)-insertion professionnelle des personnes atteintes dans leur santé psychique, ces troubles étant la cause la plus fréquente d’octroi d’une rente AI. Les prestations de conseil et de suivi sont davantage adaptées aux besoins des assurés avec une augmentation de leur continuité et de leur durée. La détection précoce sera étendue afin que l’AI puisse fournir un soutien dès que les premiers signes annonçant une incapacité de travail se manifestent. Les mesures de réinsertion seront octroyées de manière plus souple et pourront notamment être reconduites. Une nouvelle mesure d’ordre professionnel est mise en place après avoir fait ses preuves lors de projets-pilote : la location de services. Elle permet à une entreprise de faire connaissance avec un futur employé potentiel sans engagement. L’employeur n’a pas besoin de conclure un contrat de travail et est exempté de l’obligation d’assurance. La démarche permet à la personne assurée de mettre un pied dans le marché primaire du travail, de se faire connaître, d’élargir son expérience professionnelle et d’augmenter ses chances d’être engagée.

Le principal changement pour tous les assurés est le passage à un nouveau système de rentes linéaire. Il s’appliquera à tout nouveau bénéficiaire dès le 1er janvier 2022. Les rentes en cours seront calculées selon le nouveau système si, lors d’une révision, le taux d’invalidité a subi une modification d’au moins 5 points. Les rentes des bénéficiaires de moins de 30 ans seront transposées dans le système linéaire dans les dix ans à venir au maximum. Les droits acquis sont garantis pour les personnes de 55 ans et plus. Avec l’introduction du nouveau modèle, la quotité de la rente d’invalidité est fixée en pourcentage d’une rente entière, et non plus par paliers de quarts de rente. Comme jusqu’ici, l’assuré a droit à une rente à partir d’un taux d’invalidité de 40% ; à une rente entière à partir d’un taux d’invalidité de 70%. Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond désormais précisément au taux d’invalidité. Pour les taux d’invalidité compris entre 40 et 49%, la rente s’échelonne de 25 à 47,5% (voir graphique). Le nouvel échelonnement en pourcentage exact est utilisé dans l’assurance-invalidité et dans la prévoyance professionnelle obligatoire. En faisant disparaître les effets de seuil sur le revenu disponible, dus aux quatre paliers, le législateur a voulu encourager la reprise d’une activité lucrative ou l’augmentation du taux d’occupation des bénéficiaires de rente.

Systèmes de rente, avant et après le Développement continu de l’AI

 

La méthode pour fixer le taux d’invalidité de personnes travaillant à temps partiel a également été modifiée sur le fond. Désormais, on considère systématiquement que les personnes à temps partiel accomplissent également des travaux habituels (ménage) qui doivent être pris en compte dans le calcul.

Le Développement continu de l’AI introduit aussi plusieurs nouveautés concernant les expertises médicales, expertises souvent nécessaires lors de l’instruction pour déterminer si une personne a droit aux prestations de l’AI. La voie du consensus est privilégiée dans l’attribution du mandat d’expertise, la personne assurée devant être concertée si elle le souhaite. L’expérience a montré qu’une expertise décidée par consensus est mieux acceptée par la personne concernée. La transparence des expertises est aussi améliorée, puisque les entretiens entre experts et assurés font désormais l’objet d’un enregistrement sonore, joint au dossier. Les offices AI tiennent eux une liste publique contenant des informations sur les experts auxquels ils font appel. Désormais, les expertises bidisciplinaires sont attribuées de manière aléatoire comme c’était déjà le cas pour les expertises pluridisciplinaires.

Dans un souci d’évaluer et de garantir la qualité de ces expertises, une commission extraparlementaire indépendante entrera en fonction au 1er janvier 2022. Elle a pour tâche de surveiller l’accréditation des centres d’expertises, la procédure d’établissement des expertises médicales et les résultats de celles-ci. Sa composition n’était pas encore connue au moment de la rédaction de cet article. Elle comprendra des représentants des différentes assurances sociales, du corps médical, des experts, des milieux scientifiques, des institutions de formation de la médecine des assurances, ainsi que des organisations de patients et des organisations d’aide aux personnes handicapées.

Le projet Développement continu de l’AI a été conçu comme une révision visant à améliorer le système de l’AI, neutre en termes de coûts. Cela veut dire que les coûts supplémentaires et les économies réalisées devraient s’équilibrer. À plus long terme, le renforcement de la réadaptation doit permettre un allègement des finances de l’AI.

 

  • Contribution d’assistance de l’AI

Le montant du forfait de nuit de la contribution d’assistance est relevé, de 88 fr. 50 à 160 fr. 50 dès 2022. L’évaluation de cette prestation, entre 2012 et 2019, a mis en évidence l’insuffisance de ces montants pour rémunérer les assistants conformément aux dispositions figurant dans les contrats-types de travail pour les travailleurs de l’économie domestique (Guggisberg 2020).

 

  • Assurance-maladie

En 2022 et pour la première fois depuis 2008, la prime moyenne de l’assurance obligatoire des soins va diminuer. La prime mensuelle s’élèvera à 315.30 francs par mois, en baisse de 0,2% par rapport à 2021.

Cette diminution est à mettre sur le compte de la révision de l’ordonnance sur la surveillance de l’assurance-maladie, entrée en vigueur en juin 2021 (RO 2021 254). La réforme incite les assureurs, d’une part, à calculer les primes au plus juste et, d’autre part, à recourir aux réductions volontaires des réserves. L’Office fédéral de la santé publique a ainsi approuvé pour 2022 une baisse volontaire des réserves de certains assureurs à hauteur de 380 millions de francs (28 millions en 2021). Les réserves cumulées dépassent encore les 12,4 milliards, ce qui plaide pour d’autres réductions à l’avenir.

Pour le moment, il n’est pas encore possible de connaître l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les coûts de la santé, et donc sur les futures primes-maladie. Le Conseil fédéral publiera un rapport sur le sujet à la fin de 2022.

Le 1er janvier 2022 entre en vigueur l’ordonnance sur l’assurance-maladie révisée (RO 2021 439) avec de nouvelles dispositions relatives aux critères d’admission et à la planification des hôpitaux, des maisons de naissance et des établissements médico-sociaux. Les cantons appliqueront désormais des critères uniformes en vue d’améliorer la coordination entre eux. Les hôpitaux qui figurent sur les listes cantonales ne sont eux plus autorisés à offrir des rémunérations ou des bonus liés au volume. L’objectif consiste à lutter contre la multiplication des prestations non justifiées du point de vue médical.

 

  • Prévoyance professionnelle : pas de retrait du capital en cas de créance d’entretien

Il sera plus difficile de retirer son capital de prévoyance professionnelle en cas de manquement à l’obligation d’entretien. Les offices actifs dans l’aide au recouvrement et les institutions de prévoyance devront se conformer à de nouvelles obligations d’annonce dès le 1er janvier 2022 (RO 2020 7) Concrètement, l’institution de prévoyance et de libre passage d’une personne qui manque à son obligation d’entretien, par exemple envers son enfant, sera informée de cette créance par l’office de recouvrement compétent. L’institution de prévoyance sera ensuite tenue de communiquer sans délai une éventuelle échéance d’un versement sous forme de capital. Ces annonces permettront d’engager à temps des démarches judiciaires en vue de garantir les créances d’entretien.

 

  • Adaptation des rentes invalidité et survivants de la PP

Certaines rentes de survivants et d’invalidité de la prévoyance professionnelle obligatoire seront adaptées pour la première fois à l’évolution des prix au 1er janvier 2022. Le taux d’adaptation sera de 0,3% pour les rentes ayant pris naissance en 2018 ; de 0,1% pour celles nées en 2012.

 

  • Taux d’intérêt minimal dans la PP

Le taux d’intérêt minimal dans la prévoyance professionnelle (PP) obligatoire reste fixé à 1% en 2022. Le taux d’intérêt minimal ne concerne que les avoirs relevant du domaine obligatoire du 2e pilier. Pour le reste, les instituts de prévoyance sont libres de fixer une autre rémunération. Le taux de 1% est en vigueur depuis 2017.

 

  • Numéro AVS : utilisation étendue

Les autorités seront autorisées dès le 1er janvier 2022 à utiliser systématiquement le numéro AVS comme identificateur de personnes pour accomplir leurs tâches légales. Cette modification de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) (RO 2021 758) doit rendre plus efficaces les procédures administratives et permettre d’éviter des confusions lors du traitement de dossiers personnels. L’utilisation étendue du numéro AVS contribue à la mise en œuvre de la stratégie suisse de cyberadministration. L’accès aux banques de données utilisant le numéro AVS sera sécurisé de manière optimale (droits d’accès limités, transmission sécurisée, cryptage, protection antivirus, etc.).

 

Changements courant 2022

  • Assurance-maladie : prise en charge des psychothérapies

Les psychologues-psychothérapeutes pourront dès le 1er juillet 2022 fournir leurs prestations à la charge de l’assurance obligatoire des soins (AOS) (RO 2021 188) sur prescription médicale. Le but de la révision de l’ordonnance correspondante est de faciliter et d’accélérer la prise en charge des personnes atteintes de troubles psychiques. Une prescription par un médecin de famille remplacera le modèle actuel de la délégation qui nécessite de consulter au préalable un médecin spécialiste en psychothérapie ou psychiatrie. Une prescription médicale donne droit à quinze séances au maximum. À partir de 30 séances, il faut consulter l’assureur afin de prolonger la thérapie. Dans le cadre d’une situation de crise ou d’une thérapie de courte durée chez les patients atteints de maladies graves, tous les médecins peuvent prescrire une fois dix séances au maximum. Cette disposition doit prévenir une augmentation injustifiée des prestations et encourager la coordination entre les médecins et les psychothérapeutes. Selon les estimations du Conseil fédéral, l’AOS remboursera à l’avenir un montant de 100 millions de francs pour des prestations payées auparavant par les patients eux-mêmes. Les répercussions de cette nouvelle réglementation au niveau des coûts et des soins feront l’objet d’une évaluation ces prochaines années.

 

  • APG : congé d’adoption

Le Parlement a donné son feu vert à l’introduction d’un congé d’adoption (13.478) de deux semaines, indemnisé par les allocations perte de gain (APG), en automne 2021. Le délai référendaire pour combattre ce projet court jusqu’au 20 janvier 2022 (FF 2021 2323). S’il n’y a pas d’opposition, la date d’entrée en vigueur sera alors fixée par le Conseil fédéral. Cela pourra être à la mi-2022 ou en 2023. Ce congé sera réservé aux parents adoptifs d’enfant de moins de 4 ans et qui exercent une activité lucrative. Les parents adoptifs pourront choisir lequel des deux bénéficiera du congé ou de le partager entre eux. Les deux semaines pourront être prises en bloc ou sous forme de 10 jours de congé isolés.

 

Principaux chantiers 2022

  • Prévoyance vieillesse : réformes et initiatives

Les projets de Stabilisation de l’AVS (AVS 21, 19.050) et réforme de la prévoyance professionnelle (Réforme LPP 2021, 20.089) se trouvent à des stades différents au Parlement. La première est bientôt sous toit (session d’hiver 2021 ou session de printemps 2022), alors que la seconde va être examinée par la première chambre.

Deux initiatives populaires en lien avec la prévoyance vieillesse ont par ailleurs abouti et vont être mises en votation ces prochaines années. La première demande le versement d’une 13e rente AVS (FF 2021 1505). La seconde, nommée initiative sur les rentes (FF 2021 1957), veut dans une première phase augmenter l’âge de la retraite à 66 ans pour tout le monde, et dans une deuxième phase lier cet âge à l’espérance de vie de la population à 65 ans. Ces deux initiatives ont déjà été rejetées par le Conseil fédéral.

 

  • Assurance-maladie : initiative et contre-projet

Le Conseil fédéral a transmis au Parlement un contre-projet indirect (FF 2021 2383) à l’initiative populaire « Maximum 10 % du revenu pour les primes d’assurance-maladie » qu’il propose de rejeter. L’initiative dite d’allègement des primes vise à ce que les assurés ne doivent pas consacrer plus de 10% de leur revenu disponible au paiement de leurs primes-maladie. La réduction des primes serait financée à raison de deux tiers au moins par la Confédération, le reste par les cantons. Comme contre-projet, le Conseil fédéral propose une modification de la loi fédérale sur l’assurance-maladie : les cantons seront tenus de réglementer la réduction des primes de telle sorte que le montant annuel accordé en ce sens corresponde au moins à un pourcentage déterminé des coûts de la santé. Pour ce faire, ils devront tenir compte du poids des primes sur le budget des assurés aux revenus les plus faibles du canton. Les cantons continueront à organiser comme ils l’entendent la réduction des primes.

 

 

Article de Mélanie Sauvain paru in Sécurité sociale CHSS consultable ici

Article «Sozialversicherungen: Was ändert sich 2022?» disponible ici

 

 

9C_421/2021 (f) du 21.09.2021 – Rente extraordinaire d’invalidité d’un assuré âgé de 21 ans – 39 LAI / Même nombre d’années d’assurance que les personnes de sa classe d’âge – 39 al. 1 LAI – 42 al. 1 LAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_421/2021 (f) du 21.09.2021

 

Consultable ici

 

Rente extraordinaire d’invalidité d’un assuré âgé de 21 ans / 39 LAI

Même nombre d’années d’assurance que les personnes de sa classe d’âge / 39 al. 1 LAI – 42 al. 1 LAVS

 

A la suite d’un premier refus de prestations de l’assurance-invalidité pour manque de collaboration de l’assuré (décision du 25.09.2017), l’assuré, ressortissant suisse né en 1991, a déposé une nouvelle demande de prestations, au mois de décembre 2018. L’office AI a rejeté cette demande, par décision du 11.09.2020. En bref, il a considéré que si l’assuré présentait une incapacité de travail et de gain de 50% depuis le mois de novembre 2011, il n’avait droit ni à une rente ordinaire d’invalidité, étant donné qu’il ne remplissait pas la condition de la durée minimale de cotisations de trois ans lors de la survenance de l’invalidité, ni à une rente extraordinaire, dès lors qu’il n’avait pas le même nombre d’années d’assurance que les personnes de sa classe d’âge.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 325/20 – 177/2021 – consultable ici)

Selon les constatations cantonales, l’assuré, né en 1991, était en incapacité de travail à tout le moins depuis le mois de décembre 2011 et l’invalidité est survenue au mois de décembre 2012 (art. 28 al. 1 let. b LAI).

Par jugement du 11.06.2021, admission du recours par le tribunal cantonal, réformant la décision en ce sens que l’assuré a droit à une demi-rente extraordinaire d’invalidité, fondée sur un taux d’invalidité de 50%, à compter du 01.06.2019, et a renvoyé la cause à l’office AI pour fixer les montants dus.

 

TF

Les ressortissants suisses qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une rente extraordinaire d’invalidité s’ils ont le même nombre d’années d’assurance que les personnes de leur classe d’âge, mais n’ont pas droit à une rente ordinaire parce qu’ils n’ont pas été soumis à l’obligation de verser des cotisations pendant trois années entières au moins (art. 42 al. 1 LAVS, applicable par renvoi de l’art. 39 al. 1 LAI, en relation avec l’art. 36 al. 1 LAI).

Il ne suffit pas d’être assuré en Suisse pour présenter le même nombre d’années d’assurance que les personnes de sa classe d’âge au sens de l’art. 42 al. 1 LAVS, et donc, pour se voir reconnaître le droit à une rente extraordinaire. Selon la jurisprudence, en exigeant que les personnes concernées aient le même nombre d’années d’assurance que les personnes de leur classe d’âge, l’art. 42 al. 1 LAVS ne vise pas les requérants qui comptent une lacune de cotisations du fait de leur non-assujettissement à l’assurance pendant une certaine période de leur vie depuis le 1er janvier suivant la date où ils ont eu 20 ans révolus. Il vise des personnes qui, n’ayant pas encore atteint l’âge déterminant ou qui, tout en ayant été assujetties à l’AI suisse depuis cette limite d’âge, n’ont pas, avant la survenance du risque, cotisé du tout ou pendant trois années, faute d’y avoir été obligées (ATF 131 V 390 consid. 7.3.1; arrêt 9C_528/2010 du 11 juillet 2011 consid. 3.2). En conséquence, les considérations des juges cantonaux, selon lesquelles bien que l’assuré n’eût pas acquitté de cotisations en 2012, il peut se prévaloir du même nombre d’années d’assurance que les assurés de sa classe d’âge, dès lors qu’il était assujetti à l’assurance du fait de son domicile en Suisse, ne peuvent pas être suivies.

Il s’impose néanmoins de confirmer l’arrêt entrepris, qui a reconnu le droit de l’assuré à une demi-rente extraordinaire d’invalidité dès le 01.06.2019, par substitution de motifs.

Contrairement à ce qu’a retenu la juridiction cantonale, l’assuré ne présente en effet pas de lacune de cotisations. Selon les constatations cantonales, l’assuré, né en 1991, était en incapacité de travail à tout le moins depuis le mois de décembre 2011 et l’invalidité est survenue au mois de décembre 2012 (art. 28 al. 1 let. b LAI), soit avant le 1er décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle il a atteint 22 ans révolus. A cet égard, selon le ch. 7006 des Directives de l’OFAS concernant les rentes (DR) de l’assurance vieillesse, survivants et invalidité fédérale, valables dès le 1er janvier 2003 (état au 1er janvier 2021), doivent en effet être mises au bénéfice d’une rente extraordinaire d’invalidité les personnes domiciliées en Suisse (art. 39 al. 1 LAI) qui sont invalides depuis leur naissance ou qui sont devenues invalides selon un taux justifiant l’octroi d’une rente avant le 1er décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle elles ont atteint 22 ans révolus, mais qui n’ont pas acquis le droit à une rente ordinaire. Ainsi, dans ces circonstances, le fait que l’assuré n’a pas versé de cotisations à compter du 1er janvier de l’année qui suit la date à laquelle il a eu 20 ans (cf. art. 3 al. 1 LAVS), soit en l’occurrence à tout le moins en 2012, n’est pas déterminant, contrairement à ce que soutient l’office AI recourant.

L’arrêt entrepris est conforme au droit dans son résultat. Le recours est mal fondé.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_421/2021 consultable ici

 

9C_790/2020 (f) du 13.10.2021 – Revenu d’invalide après réadaptation AI – 16 LPGA / Activité ne mettant pas pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible – Application des ESS

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_790/2020 (f) du 13.10.2021

 

Consultable ici

 

Rappel de la notion de l’appréciation des preuves arbitraire

Revenu d’invalide après réadaptation AI / 16 LPGA

Activité ne mettant pas pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible / Application des ESS

 

Assuré, né en 1968, plâtrier-peintre indépendant depuis de janvier 2005 chute d’un toit le 24.10.2008. Il subit une fracture du coude droit, traitée par voie chirurgicale, notamment par la mise en place d’une prothèse. En incapacité de travail depuis lors, l’assuré a déposé le 12.06.2009 une demande AI.

La reprise de son ancienne activité n’étant pas exigible, l’assuré a entamé, sous l’égide de l’assurance-invalidité, un apprentissage dans le but d’obtenir un certificat fédéral de capacité de dessinateur en bâtiment, qui a été interrompu en raison des douleurs dont il souffrait au membre supérieur droit. Dès le 29.11.2010, il a suivi plusieurs stages d’orientation professionnelle, des cours ainsi qu’une formation (AFP) d’employé de bureau, qui s’est achevée le 31.07.2013. L’assuré a complété son cursus par une formation d’employé de commerce (CFC) auprès d’une agence immobilière et a terminé avec succès sa formation durant l’été 2015. Après avoir été placé à l’essai, l’assuré a été engagé au sein de B.__ Sàrl à partir du 01.06.2016 en qualité de collaborateur au service comptabilité. Du 30.06.2017 au 07.07.2017, il a séjourné en milieu hospitalier en raison de troubles psychiques.

Face à ces nouveaux éléments, l’office AI a mis en œuvre une expertise pluridisciplinaire (médecine interne, rhumatologie et psychiatrie). Après avoir consulté son SMR, l’office AI a reconnu à l’assuré une demi-rente d’invalidité du 01.12.2009 au 31.07.2017 et une rente entière d’invalidité à compter du 01.08.2017, le versement de la rente ayant été suspendu du 01.03.2011 au 30.04.2016.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 345/19 – 373/2020 – consultable ici)

La cour cantonale a fait siennes les conclusions des médecins-experts en constatant que l’activité d’aide de bureau et d’employé de commerce, dans laquelle l’assuré s’était reconverti n’était pas totalement adaptée aux limitations fonctionnelles du membre supérieur droit, car elle nécessitait fréquemment l’usage des deux mains. Elle a néanmoins considéré que dans une activité totalement adaptée, excluant pratiquement l’utilisation du membre supérieur droit, une capacité de travail de 80% était exigible sur le plan médical, depuis l’automne 2009.

Par jugement du 12.11.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Le litige porte sur le droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité du 01.12.2009 au 31.07.2017, au lieu de la demi-rente qui lui a été reconnue pour cette période.

 

Les constatations de l’autorité cantonale de recours sur l’atteinte à la santé, la capacité de travail de la personne assurée et l’exigibilité – pour autant qu’elles ne soient pas fondées sur l’expérience générale de la vie – relèvent d’une question de fait et peuvent donc être contrôlées par le Tribunal fédéral uniquement sous l’angle restreint de l’arbitraire (ATF 142 V 178 consid. 2.4; 137 V 210 consid. 3.4.2.3; 132 V 393 consid. 3.2). L’appréciation des preuves est arbitraire lorsqu’elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier, ou lorsque l’autorité ne tient pas compte, sans raison sérieuse, d’un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des conclusions insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3). Il n’y a pas arbitraire du seul fait qu’une solution autre que celle de l’autorité cantonale semble concevable, voire préférable (ATF 143 IV 347 consid. 4.4; 141 I 70 consid. 2.2; 140 I 201 consid. 6.1). Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 146 II 111 consid. 5.1.1; 143 I 321 consid. 6.1; 141 I 49 consid. 3.4).

 

L’assuré reproche à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte d’une capacité de travail de 40% qu’il avait dans l’activité de collaborateur au service de comptabilité chez B.__ Sàrl, soit l’activité dans laquelle il s’était reconverti professionnellement. Il se réfère par ailleurs à un arrêt 8C_837/2019 du 16 septembre 2020, dans lequel le Tribunal fédéral avait considéré que l’activité de cariste exercée par l’assuré, qui ne résultait pas de mesures de réadaptation au sens des art. 8 ss LAI mais uniquement d’une mesure d’intervention précoce (art. 7d al. 2 let. b LAI), ne permettait pas de considérer d’emblée que cette activité mettait pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible. D’après l’assuré, il faudrait en déduire, a contrario, que l’activité exercée ensuite d’une « vraie » mesure de réadaptation mettrait pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible.

Le revenu d’invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l’assuré. Lorsque l’activité exercée après la survenance de l’atteinte à la santé repose sur des rapports de travail particulièrement stables, qu’elle met pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible et que le gain obtenu correspond au travail effectivement fourni et ne contient pas d’éléments de salaire social, c’est le revenu effectivement réalisé qui doit être pris en compte pour fixer le revenu d’invalide. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS; ATF 143 V 295 consid. 2.2; 139 V 592 consid. 2.3).

 

En l’occurrence, s’il est certes établi que l’assuré ne peut plus exercer sa profession initiale de plâtrier-peintre, raison pour laquelle l’assurance-invalidité lui a reconnu le droit à des mesures professionnelles, on ne saurait pour autant considérer que le revenu d’invalide doit être calculé en fonction de cette activité ou du rendement accompli dans le cadre de celle-ci. Contrairement à l’argumentation de l’assuré, c’est à bon droit que les juges cantonaux ont pris en considération les données statistiques résultant de l’ESS pour évaluer le revenu d’invalide et non pas le revenu que l’assuré percevait auprès de B.__ Sàrl. En effet, dans la mesure où il n’exerçait plus cette activité et que celle-ci ne mettait pas pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle exigible, les conditions prévues par la jurisprudence pour tenir compte du revenu effectivement réalisé n’étaient à l’évidence pas remplies.

 

En conclusion de ce qui précède, il n’y a pas lieu de s’écarter des constatations de la juridiction cantonale sur la capacité résiduelle de travail de l’assuré et sur le taux d’invalidité qui en est résulté pour la période ici en cause (52%). La perte de gain de 76% dont se prévaut l’assuré n’est pas fondée.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_790/2020 consultable ici

 

 

 

8C_452/2020 (f) du 07.10.2021 – Récusation d’un expert – Pas d’inimitié marquée de l’expert à l’encontre de l’avocat de l’assuré – 44 LPGA / Tentative de désignation consensuelle préalable pas applicable en assurance-accidents

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_452/2020 (f) du 07.10.2021

 

Consultable ici

NB: arrêt du TF détaillé , avec de nombreuses références. Arrêt d’une grande utilité dans la pratique quotidienne, tant pour les assurés (pour motiver une récusation) que pour les assureurs-accidents.

 

Récusation d’un expert – Pas d’inimitié marquée de l’expert à l’encontre de l’avocat de l’assuré / 44 LPGA

Procédure de mise en œuvre d’une expertise – Tentative de désignation consensuelle préalable pas applicable en assurance-accidents – Pas de droit justiciable de l’assuré à la mise en œuvre d’une expertise sur une base consensuelle

 

 

Assuré, né en 1972, peintre, a été victime le 28.10.2013 d’une chute qui a entraîné une contusion lombaire.

Par courrier du 09.05.2019, l’assurance-accidents a informé l’assuré qu’elle estimait une expertise nécessaire et qu’elle entendait la confier au CEMED à Nyon, plus particulièrement au professeur C.__ pour le volet orthopédie-chirurgie du rachis, au docteur D.__ pour le volet neurologique et au docteur E.__ pour le volet psychiatrique ; elle invitait l’assuré à prendre position sur l’opportunité de l’expertise en soi, le centre d’expertise proposé et les questions qu’elle entendait poser aux experts.

Le 05.06.2019, l’assuré, sous la plume de son avocat, a approuvé le principe de l’expertise et les questions posées. Il s’est toutefois opposé à la désignation en tant qu’expert du docteur D.__, au motif que celui-ci avait montré, par le passé, « une remarquable propension à ne pas faire la part des choses entre attaques ad hominem et sa mission d’expertise, en s’en prenant à un expertisé en raison du fait que [son avocat avait] émis des critiques quant à sa nomination en qualité d’expert ». Il se référait à cet égard au ch. 70 d’un arrêt ATAS/818/2017 rendu le 25.09.2017 par la Chambre des assurances sociales dans une cause concernant une autre assurée représentée par le même avocat. Estimant ainsi qu’en raison de l’animosité dont il avait fait preuve par le passé envers son avocat, le docteur D.__ « ne [remplissait] pas les conditions nécessaires pour être nommé expert au sens de l’art. 44 LPGA », l’assuré proposait les noms de trois autres médecins neurologues.

Par décision incidente du 13.06.2019, l’assurance-accidents a rejeté la demande de récusation du docteur D.__, au motif que les griefs évoqués dans le courrier du 05.06.2019 ne constituaient pas des motifs de récusation pertinents au sens des dispositions légales applicables ou de la jurisprudence du Tribunal fédéral.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/444/2020 – consultable ici)

Par arrêt du 08.06.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Recevabilité du recours

Une décision porte sur une demande de récusation lorsqu’elle tranche la question de la récusation d’un membre de l’autorité, tel qu’un juge; la jurisprudence a cependant admis que l’art. 92 LTF s’applique aussi à la décision sur la récusation d’un expert (BERNARD CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, n° 15 ad art. 92 LTF; ATF 138 V 271 consid. 2.2.1). Doit en outre être assimilée à une décision sur une demande de récusation au sens de l’art. 92 LTF toute décision qui se prononce séparément sur la composition régulière de l’autorité qui entend statuer ensuite sur le fond; il s’agit en effet d’une question préliminaire qui doit être définitivement liquidée sans attendre la suite de la procédure (arrêt 4A_141/2018 du 4 septembre 2018 consid. 1.2, avec référence à CORBOZ, op. cit., n° 18 ad art. 92 LTF, et au Message du Conseil fédéral, FF 2001 p. 4131).

Un préjudice au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF ne peut être qualifié d’irréparable que s’il cause un dommage de nature juridique qui ne peut pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant; en revanche, un dommage de pur fait, comme la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n’est pas considéré comme irréparable (ATF 133 IV 139 consid. 4 et les arrêts cités). Il appartient à la partie recourante, sous peine d’irrecevabilité, non seulement d’alléguer, mais aussi d’établir la possibilité que la décision incidente lui cause un dommage irréparable, à moins que celui-ci ne fasse d’emblée aucun doute (ATF 133 III 629 consid. 2.3.1).

En l’espèce, l’arrêt attaqué constitue indubitablement une décision préjudicielle ou incidente qui porte sur une demande de récusation, au sens exposé ci-dessus, en tant qu’il statue sur la question de la récusation de l’expert D.__. Dans cette mesure, le recours est donc recevable au regard de l’art. 92 LTF. Il y a lieu d’admettre que l’assuré peut aussi, dans le cadre de ce recours, contester la composition régulière de la Chambre des assurances sociales. Il peut également invoquer la violation de ses droits de participation sur le choix de l’expert, dans la mesure où il risquerait de subir un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF s’il ne pouvait le faire que dans le cadre d’un recours contre la décision finale (cf. ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.7; 141 V 330 consid. 5.2 et 7.1).

 

Récusation d’un expert – 44 LPGA

Selon l’art. 44 LPGA, si l’assureur doit recourir aux services d’un expert indépendant pour élucider les faits, il donne connaissance du nom de celui-ci aux parties; celles-ci peuvent récuser l’expert pour des raisons pertinentes et présenter des contre-propositions. La communication du nom de l’expert doit notamment permettre à l’assuré de reconnaître s’il s’agit d’une personne à l’encontre de laquelle il pourrait disposer d’un motif de récusation (ATF 146 V 9 consid. 4.2). Lorsque l’assureur social et l’assuré ne s’entendent pas sur le choix de l’expert, l’administration doit rendre une décision directement soumise à recours (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.6; 138 V 318 consid. 6.1).

Les objections que peut soulever l’assuré à l’encontre de la personne de l’expert peuvent être de nature formelle ou matérielle; les motifs de récusation formels sont ceux prévus par la loi (cf. art. 10 al. 1 PA et 36 al. 1 LPGA); d’autres motifs, tels que le manque de compétence dans le domaine médical retenu ou encore un manque d’adéquation personnelle de l’expert, sont de nature matérielle (ATF 132 V 93 consid. 6.5; arrêt 9C_180/2013 du 31 décembre 2013 consid. 2.3; JACQUES OLIVIER PIGUET, in Commentaire romand de la LPGA, 2018, n° 24 ad art. 44 LPGA).

S’agissant des motifs de récusation formels d’un expert, il y a lieu selon la jurisprudence d’appliquer les mêmes principes que pour la récusation d’un juge (ATF 137 V 210 consid. 2.1.3; 132 V 93 consid. 7.1; 120 V 357 consid. 3a) et qui découlent directement du droit constitutionnel à un tribunal indépendant et impartial garanti par l’art. 30 al. 1 Cst. – qui en la matière a la même portée que l’art. 6 par. 1 CEDH (ATF 134 I 20 consid. 4.2) – respectivement, pour un expert, des garanties générales de procédure de l’art. 29 al. 1 Cst., qui assure à cet égard une protection équivalente à celle de l’art. 30 al. 1 Cst. (arrêt 5A_484/2015 du 2 octobre 2015 consid. 2.3.2 et les références).

Un expert passe ainsi pour prévenu lorsqu’il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. Dans ce domaine, il s’agit toutefois d’un état intérieur dont la preuve est difficile à apporter. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire de prouver que la prévention est effective pour récuser un expert. Il suffit que les circonstances donnent l’apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de l’expert. L’appréciation des circonstances ne peut pas reposer sur les seules impressions de l’expertisé, la méfiance à l’égard de l’expert devant au contraire apparaître comme fondée sur des éléments objectifs (ATF 132 V 93 consid. 7.1; 128 V 82 consid. 2a).

Selon l’art. 58 al. 1 PCF, applicable par renvoi de l’art. 55 LPGA à travers l’art. 19 PA, les cas de récusation prévus à l’art. 34 LTF s’appliquent par analogie à la récusation des experts. Selon l’art. 34 let. e LTF – qui, à l’instar de l’art. 56 let. f CPP ou de l’art. 47 al. 1 let. f CPC, ne fait que concrétiser les principes découlant de l’art. 6 par. 1 CEDH et de l’art. 30 al. 1 Cst. et a la portée d’une clause générale (ATF 143 IV 69 consid. 3.2; arrêt 4A_586/2008 du 12 juin 2009 consid. 2) -, un juge peut être récusé s’il peut être prévenu de toute autre manière, notamment en raison d’une amitié étroite ou d’une inimitié personnelle avec une partie ou son mandataire.

En ce qui concerne l’inimitié, il faut qu’il y ait un antagonisme passionné (« leidenschaftliche Gegnerschaft ») (arrêts 1P.340/1993 du 8 septembre 1993 consid. 2a; 1P.559/1992 du 11 novembre 1992 consid. 2c; P.373/1982 du 30 novembre 1982 consid. 4a) ou à tout le moins un différend marqué (« besonderes Zerwürfnis ») ou des tensions prononcées (« ausgeprägte Spannungen ») entre le juge et une partie, ce qui, d’un point de vue objectif, suggère une inimitié (ISABELLE HÄNER, in Basler Kommentar zum Bundesgerichtsgesetz, 3e éd. 2018, n° 16 ad art. 34 LTF; REGINA KIENER, Richterliche Unabhängigkeit, 2001, p. 99). Ainsi, un juge qui a déposé une plainte pénale et pris des conclusions civiles en réparation du tort moral pour atteinte à l’honneur est tenu de se récuser dans une procédure ultérieure impliquant l’auteur de l’atteinte (ATF 134 I 20 consid. 4). En revanche, de simples déclarations d’un magistrat portant une appréciation sur la personne ou le comportement d’une partie (« wertende Äusserungen »; cf. HÄNER, op. cit., n° 16 ad art. 34 LTF; KIENER, op. cit., p. 100 ss) doivent être interprétées de manière objective, en tenant compte de leur contexte, de leurs modalités et du but apparemment recherché par leur auteur (arrêt 1B_255/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.1). Ainsi, par exemple, le seul fait qu’un juge ait utilisé dans son jugement des termes inadéquats et contraires à l’exigence d’humanité et de respect du justiciable (traitant celui-ci de « justiciable querelleur, menteur, ergoteur et vindicatif », ayant « des comportements querelleurs, ergoteurs et pénibles que rien n’excuse ») ne justifie pas sa récusation lorsqu’aucune marque de prévention antérieure à la rédaction du jugement de condamnation ne ressortait du procès-verbal ou du déroulement de l’audience (arrêt 1B_255/2021 précité consid. 3.3).

Il convient d’examiner en premier lieu le grief selon lequel les juges cantonaux auraient violé le droit fédéral en retenant qu’il n’existait pas de motif de récusation formel à l’encontre du docteur D.__.

Après avoir rappelé les principes applicables à la récusation d’un expert, la cour cantonale a exposé que l’assuré reprochait au docteur D.__ d’éprouver une inimitié marquée à l’encontre de son mandataire, comme cela ressortirait de la procédure ayant abouti à l’arrêt ATAS/818/2017 du 25 septembre 2017, dans laquelle ce médecin aurait déclaré à la personne qu’il devait expertiser que son avocat  » lui avait fait du mal, car il l’avait critiqué (…). Lorsque la consultation [avait] repris, il [était] à nouveau revenu sur le problème avec [son] avocat qui avait, selon lui, écrit de mauvaises choses sur lui. A la fin, il [avait] également dit la même chose à [la fille de l’expertisée]. (…) il [était] revenu sur le sujet, en disant que ce que M e Maugué affirmait était de la diffamation. (…). Il [avait dit à la fille de l’expertisée] qu’il allait le faire en attaquant certainement Me M.__ en diffamation ». Comme cela ressortait de la doctrine et de la jurisprudence, il fallait un désaccord particulier ou une tension prononcée entre le docteur D.__ et l’avocat, suggérant une inimitié, pour que le motif de récusation prévu par l’art. 34 al. 1 let. e LTF pût être retenu. Or force était de constater que les propos reprochés au médecin précité, pour autant qu’ils eussent été effectivement tenus, l’avaient été dans le cadre de l’expertise d’une autre assurée. Le comportement reproché au docteur D.__ ne semblait pas avoir fait l’objet d’une dénonciation à l’autorité de surveillance des médecins. De même, le comportement reproché à l’avocat n’avait pas été porté à la connaissance du Bâtonnier ou de la commission du barreau. Il ne ressortait pas non plus de l’arrêt du 25 septembre 2017 invoqué par l’assuré que le comportement du docteur D.__ aurait eu des répercussions sur l’appréciation faite par ce médecin, la valeur probante de son rapport n’ayant en particulier été remise en question ni par l’assurée ni par la Chambre des assurances sociales. Enfin, l’assuré ne prétendait pas non plus que lesdites dissensions, pour autant qu’elles eussent existé, auraient perduré au-delà de la procédure ayant conduit à l’arrêt du 25 septembre 2017 précité. En réalité, les commentaires du docteur D.__, pour autant qu’ils eussent effectivement été tenus, l’avaient été dans une procédure particulière, à laquelle les prétendues dissensions entre l’expert et l’avocat susmentionné semblaient se limiter. Dans ces circonstances, on ne pouvait pas parler d’inimitié entre les deux intéressés, de sorte que c’était à juste titre que l’assurance-accidents avait refusé de récuser le docteur D.__.

Cette appréciation de la cour cantonale échappe à la critique au regard des faits sur lesquels elle se fonde, lesquels ne sont pas remis en cause par l’assuré et lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 et 2 LTF). L’assuré se contente de maintenir que la « virulence » des propos qu’aurait tenus le docteur D.__ à l’encontre de son conseil en 2015 (cf. ch. 55 et 59 de l’arrêt ATAS/818/2017 du 25 septembre 2017) dénoterait une animosité qui dépasserait largement le cadre de la procédure dans laquelle ils auraient été tenus. Toutefois, force est de constater que le fait que le docteur D.__ ait mal pris les critiques dont il avait fait l’objet de la part de l’avocat alors que ce dernier défendait une autre assurée il y a une demi-douzaine d’années ne permet nullement de retenir qu’il existerait actuellement entre le premier – qui n’a pas saisi la justice pénale ou civile ni même la commission du Barreau – et le second un antagonisme passionné ou même seulement des tensions prononcées qui seraient de nature à jeter un doute sur l’impartialité de l’expert à l’égard de l’assuré.

 

Tentative de désignation consensuelle préalable

Dans un arrêt de principe publié à l’ATF 137 V 210, le Tribunal fédéral a modifié sa jurisprudence antérieure (ATF 132 V 93) selon laquelle la mise en œuvre d’une expertise par l’assureur social ne revêtait pas le caractère d’une décision; il a jugé qu’en l’absence d’accord entre les parties, une telle mise en œuvre devait revêtir la forme d’une décision, qui pouvait être attaquée devant les tribunaux cantonaux des assurances sociales, respectivement devant le Tribunal administratif fédéral (consid. 3.4.2.6 et 3.4.2.7). Par la suite, le Tribunal fédéral a précisé que dans le domaine de l’assurance-accidents également, il fallait ordonner une expertise en cas de désaccord, par le biais d’une décision incidente sujette à recours auprès du tribunal cantonal des assurances, respectivement auprès du Tribunal administratif fédéral (ATF 138 V 318 consid. 6.1).

À l’ATF 139 V 349, le Tribunal fédéral a considéré qu’il était conforme au droit de limiter l’attribution des mandats d’expertise selon le principe aléatoire – tel que requis depuis l’ATF 137 V 210 pour les mandats d’expertises médicales confiées à un COMAI – aux expertises comprenant trois ou plus de trois disciplines médicales selon l’art. 72bis RAI (consid. 2.2 et 5.4). Il a relevé que pour les expertises médicales mono- et bidisciplinaires qui n’étaient pas attribuées selon le principe aléatoire (consid. 4.2), l’incombance (Obliegenheit) de l’Office AI et de la personne assurée de s’efforcer d’aboutir à une désignation consensuelle de l’expert ou des experts prenait une importance particulière et que, lorsqu’il entendait confier une telle expertise à un COMAI, l’Office AI avait l’obligation d’entreprendre cette procédure de désignation consensuelle (consid. 5.4).

Examinant le grief de l’assuré selon lequel l’assurance-accidents n’aurait pas recherché un accord sur la personne de l’expert et n’aurait ainsi pas respecté ses droits de participation, la Chambre des assurances sociales a indiqué qu’elle avait été amenée à rendre des arrêts de principe sur le sujet en 2013, dans lesquels elle avait alors jugé qu’indépendamment des griefs invoqués par l’assuré à l’encontre de l’expert, la cause devait être renvoyée à l’Office AI, au motif que ce dernier n’avait pas essayé de parvenir à un accord avec l’assuré sur le choix de l’expert, ce qui violait les droits de participation de l’assuré dans la procédure de désignation de l’expert (ATAS/226/2013 du 28 février 2013 et ATAS/263/2013 du 13 mars 2013). Toutefois, ces deux arrêts, qu’elle avait ensuite régulièrement mentionnés dans sa jurisprudence, avaient été rendus en matière d’assurance-invalidité et ce antérieurement à l’ATF 139 V 349, dans lequel le Tribunal fédéral avait évoqué une incombance (cf. consid. 2.4.2 supra). En revanche, le Tribunal administratif fédéral et plusieurs juridictions cantonales s’étaient prononcés postérieurement à l’ATF 139 V 349 précité et avaient, de manière générale, considéré que l’assuré n’avait pas de droit justiciable à la mise en œuvre d’une expertise sur une base consensuelle (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral C-463/2013 du 1 er mai 2014; arrêt de la Cour des assurances sociales du canton de Vaud Al 143/12 du 26 août 2013; arrêt du Tribunal des assurances sociales de Bâle-Ville IV.2018.37 du 23 juillet 2018; arrêts du Tribunal des assurances sociales du canton de Zurich UV.2019.00276 du 13 mars 2020, UV.2017.00202 du 23 février 2018 et IV.2016.00514 du 8 novembre 2016; arrêt du Tribunal administratif, division des assurances sociales, du canton de Berne 200 17 517 IV du 29 août 2017; arrêt de la Cour de justice d’Appenzell Rhodes-Extérieures O3V 14 15 du 18 février 2015).

Au vu de l’ATF 139 V 349, il fallait considérer que la désignation consensuelle d’un expert ne constituait pas un droit pouvant être déduit en justice, dès lors qu’il s’agissait d’une simple incombance et non d’une obligation, et que le caractère obligatoire de la procédure de désignation consensuelle se limitait aux cas dans lesquels l’Office AI souhaitait confier une expertise mono- ou bidisciplinaire à un COMAI. En effet, le Tribunal fédéral avait considéré que dans de tels cas, il existait un risque d’abus de la part de l’OAI, en ce sens que cet office pouvait être tenté de renoncer à une ou plusieurs disciplines médicales pour s’épargner la procédure d’attribution aléatoire qui prévalait en cas d’expertises pluridisciplinaires (ATF 139 V 349 consid. 5.4; arrêt 9C_718/2013 du 12 août 2014 consid. 4). En revanche, il n’était pas nécessaire de prévoir un tel correctif en matière d’assurance-accidents, dans laquelle la procédure d’attribution ne s’appliquait pas.

En l’espèce, la cour cantonale a constaté que l’assurance-accidents avait informé l’assuré de la mise en œuvre de l’expertise, en lui indiquant le nom de l’organisme envisagé et des médecins pressentis pour la réaliser (avec leurs spécialités) et en lui soumettant la liste des questions envisagées. L’assuré s’était catégoriquement opposé à ce que le docteur D.__ fût retenu en tant qu’expert au motif que celui-ci avait par le passé montré un comportement critiquable à l’encontre de son avocat dans le cadre d’une cause concernant une autre assurée. En l’absence de consensus sur le choix de l’expert, c’était à juste titre que l’assurance-accidents avait statué sur la question par une décision incidente, dans laquelle elle avait motivé sa position, sans qu’un nouvel échange à ce propos fût nécessaire. Au surplus, il ressortait des écritures de l’assuré que celui-ci était catégoriquement opposé à la désignation du docteur D.__. Or dans de telles circonstances, renvoyer la cause pour une désignation consensuelle de l’expert reviendrait à reconnaître un droit de véto à l’assuré et à exiger de l’assurance-accidents qu’elle renonce à l’expert choisi afin d’arriver à un consensus, ce qui ne correspondait pas à la jurisprudence fédérale.

L’assuré reproche à la cour cantonale d’avoir violé les « règles relatives à un procès équitable » en retenant que les droits de participation de l’assuré tels que consacrés par la jurisprudence du Tribunal fédéral ne sont pas des droits justiciables dans le champ de l’assurance-accidents, mais une simple incombance.

La question de savoir s’il existe un droit justiciable à la désignation consensuelle de l’expert en matière d’assurance-accidents peut demeurer indécise en l’espèce. Il n’est en effet pas contesté que le principe de l’attribution aléatoire des mandats d’expertises pluridisciplinaires développé en matière d’assurance-invalidité ne s’applique pas à l’assurance-accidents (cf. consid. 2.4.2 supra). Si l’assureur-accidents – comme l’Office AI pour les expertises mono- ou bidisciplinaires – doit s’efforcer de mettre en œuvre une expertise sur une base consensuelle et prendre en considération les objections soulevées par l’assuré quant à la personne de l’expert, le Tribunal fédéral a clairement rejeté la conception selon laquelle un expert ne pourrait être désigné qu’avec le consentement de l’assuré dès que celui-ci émet des objections sur la personne de l’expert, car cela reviendrait à reconnaître un droit de veto à l’assuré; il a précisé que même en cas d’objection justifiée de l’assuré, l’assureur n’est pas tenu de suivre sans autre les contre-propositions de l’assuré (ATF 139 V 349 consid. 5.2.1).

En l’espèce, la seule objection soulevée par l’assuré à l’encontre de la désignation du docteur D.__ tenait à la prétendue inimitié de celui-ci envers son avocat, qui aurait constitué un motif formel de récusation. Or comme cette objection était dénuée de fondement, l’assurance-accidents n’avait pas, en l’absence de toute objection de nature matérielle envers la personne du docteur D.__, à continuer de rechercher une désignation consensuelle de l’expert. En effet, cela serait revenu à admettre un droit de veto de l’assuré à l’encontre du docteur D.__ en dépit de l’inexistence de motifs de récusation. C’est ainsi à juste titre que l’assurance-accidents a statué sur la question par une décision incidente. Le grief de l’assuré doit dès lors être rejeté.

 

Droit à un tribunal établi par la loi

L’assuré reproche enfin à la Chambre des assurances sociales d’avoir violé son droit à un tribunal établi par la loi (art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH). Il invoque à cet égard l’art. 133 al. 2 de la loi cantonale genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ/GE; RS/GE E 2 05), qui dispose que lorsqu’elle entend se prononcer sur une question de principe ou modifier la jurisprudence, la chambre des assurances sociales siège dans la composition de cinq juges et deux juges assesseurs, et non dans sa composition ordinaire d’un juge et deux juges assesseurs (cf. art. 133 al. 1 LOJ/GE). Il soutient qu’en considérant que la désignation consensuelle d’un expert ne constituait pas un droit pouvant être déduit en justice, la cour cantonale aurait modifié sa jurisprudence antérieure, selon laquelle le droit de l’assuré à une tentative de désignation consensuelle de l’expert, consacré par les ATF 137 V 210 et 138 V 318, était un droit justiciable. Il se réfère à quatre arrêts de la Chambre des assurances sociales, tous rendus en matière d’assurance-accidents (ATAS/1138/2017 du 13 décembre 2017; ATAS/1109/2019 du 27 novembre 2019; ATAS/178/2020 du 4 mars 2020; ATAS/362/2020 du 7 mai 2020).

Ce grief est dénué de fondement. En effet, la cour cantonale a rejeté le recours au motif que l’assuré est catégoriquement opposé à la désignation comme expert du docteur D.__, à l’encontre duquel il n’existe pas de motif de récusation, et que dans de telles circonstances, renvoyer la cause pour une désignation consensuelle de l’expert reviendrait à reconnaître un droit de veto à l’assuré, ce qui ne correspondrait pas à la jurisprudence publiée à l’ATF 139 V 349. Comme on l’a vu, une telle motivation échappe à la critique indépendamment du point de savoir s’il existe un droit justiciable à la désignation consensuelle de l’expert en matière d’assurance-accidents. Dans la mesure où l’arrêt attaqué n’opère pas un revirement de la jurisprudence de la Chambre des assurances sociales mais se fonde sur la jurisprudence publiée du Tribunal fédéral, il n’avait pas à être rendu dans la composition prévue par l’art. 133 al. 2 LOJ/GE.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_452/2020 consultable ici

 

 

Expertises et assurances sociales : mise en place d’une commission d’assurance qualité

Expertises et assurances sociales : mise en place d’une commission d’assurance qualité

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 24.11.2021 consultable ici

 

Lors de sa séance du 24.11.2021, le Conseil fédéral a mis en place la Commission fédérale d’assurance qualité des expertises médicales et a élu ses membres. La commission débutera ses activités le 01.01.2022. Elle surveillera, pour toutes les assurances sociales, l’habilitation des centres d’expertises, le processus d’expertise ainsi que les résultats des expertises médicales, et formulera des recommandations officielles sur ces thématiques. L’Assemblée fédérale avait décidé de la création de cette commission dans le cadre de la réforme « Développement continu de l’assurance-invalidité ».

La qualité des expertises médicales dans les assurances sociales, en particulier celles relevant de l’assurance-invalidité (AI), a fait l’objet d’une attention croissante au cours des dernières années. Dans le cadre de la réforme « Développement continu de l’AI », qui entrera en vigueur le 01.01.2022, les parlementaires se sont également penchés sur cette question et ont décidé de la création d’une nouvelle commission extraparlementaire dédiée à la qualité et à l’assurance qualité des expertises médicales. Jusqu’à présent, aucune institution indépendante n’était chargée de cette mission en Suisse.

 

Promouvoir la qualité des expertises réalisées pour les assurances sociales

La Commission fédérale d’assurance qualité des expertises médicales a pour tâche d’élaborer des recommandations sur les points suivants :

  • exigences et normes de qualité pour le processus de réalisation des expertises,
  • critères relatifs à l’activité des spécialistes (expertes et experts) ainsi qu’à leur formation universitaire, postgrade et continue,
  • critères relatifs à l’accréditation des centres d’expertises et à leur activité,
  • critères et outils relatifs à l’évaluation qualitative des expertises.

Elle surveillera en outre si ces critères sont respectés par les experts et les centres d’expertises et pourra formuler des recommandations officielles.

La commission sera dirigée par une présidente ou un président et sera composée de douze membres. Le Conseil fédéral a nommé les membres jusqu’à la fin 2023, date à laquelle prend fin le mandat actuel des commissions extraparlementaires. La commission comptera des représentants des médecins (trois personnes), des assurances sociales (AI et assurance-accidents, deux personnes), des organisations de patients et des organisations d’aide aux personnes handicapées (deux personnes), des milieux scientifiques (deux personnes), des centres d’expertises (une personne), des neuropsychologues (une personne) ainsi que du secteur de la formation en médecine des assurances (une personne).

Sur le plan organisationnel, la commission dépend administrativement du Département fédéral de l’intérieur (DFI). Son secrétariat est rattaché à l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS).

La base légale de la Commission fédérale d’assurance qualité des expertises médicales est ancrée dans la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA). L’activité de la commission s’étend à toutes les assurances soumises à la LPGA (en particulier l’AI, l’assurance-accidents, l’assurance militaire et l’assurance-maladie).

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 24.11.2021 consultable ici

Membres de la Commission fédérale d’assurance qualité des expertises médicales élus le 24.11.2021 (liste consultable ici)

Décision du Conseil fédéral consultable ici (en allemand)

 

 

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de modifier les bases légales pertinentes de manière à ce qu’à l’avenir, les employeurs – et non seulement les employés – aient la possibilité de déposer auprès de l’AI une demande de moyens auxiliaires à utiliser sur le lieu de travail. Par analogie avec les cas de détection précoce au sens de l’art. 3b, al. 3, de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI), l’assuré devra être averti avant le dépôt de la demande.

 

Développement

Les moyens auxiliaires utilisés sur le lieu de travail sont énumérés au chiffre 13 et au chiffre 11.05 de l’annexe de l’ordonnance du DFI concernant la remise de moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité. Aujourd’hui, seuls les employés peuvent déposer une demande auprès de l’AI pour obtenir un moyen auxiliaire sur leur lieu de travail en lien avec leur handicap (par exemple, supports spéciaux pour la position debout ou modifications architectoniques). Cette limitation rend le traitement de la demande plus difficile pour toutes les parties concernées et entraîne des efforts de coordination inutiles. L’échange d’informations entre l’employeur et l’AI passe par l’employé alors qu’une communication directe serait souvent plus efficace et ciblée.

Comme il est parfois opportun que l’employé présente lui-même sa requête, cette option doit être conservée. La possibilité pour l’employeur de déposer lui aussi une requête est rationnelle et permet de réduire du même coup la charge de l’employé, qui a besoin de ses forces pour accomplir son travail. Dans tous les cas, l’employé doit être informé du dépôt d’une requête.

Pour les employeurs, l’application de la législation actuelle constitue souvent un obstacle. Le dépôt de la demande et une communication directs avec l’AI représenteraient un allégement, surtout si des modifications du lieu de travail sont nécessaires pour plusieurs employés. Le conseil axé sur la réadaptation prévu à l’art. 3a de la LAI révisée plaide également en faveur de l’extension aux employeurs du droit de déposer une demande. Selon la situation, le dialogue entre l’employeur et l’AI a déjà été engagé et le dépôt de la demande par l’employeur est la solution la plus rationnelle. Cette proposition a été élaborée par des personnes handicapées au sein d’un groupe de réflexion. L’extension aux employeurs du droit de déposer une demande peut apporter une contribution importante à l’intégration des personnes handicapées.

 

Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021

Les employeurs sont actuellement déjà très impliqués dans la demande de moyens auxiliaires adaptés à la situation des assurés sur leur lieu de travail. Cette participation se trouve encore renforcée dans le développement continu de l’AI. La nécessité de déposer une demande de moyen auxiliaire découle des limitations individuelles auxquelles sont confrontés les assurés. Ce sont en effet ces limitations qui déterminent la nature du moyen auxiliaire à mettre en place pour répondre de manière adéquate et efficace aux besoins de l’assuré et lui permettre de s’en servir.

C’est l’assuré qui peut se prévaloir d’un droit aux moyens auxiliaires. La décision de l’AI lui est adressée et il peut être amené à faire valoir ses droits dans une procédure judiciaire. Ces droits s’inscrivent dans la maxime d’office selon laquelle tout droit à des prestations doit faire l’objet d’un examen complet, une demande de moyens auxiliaires ne pouvant être traitée isolément.

Pour faire valoir leurs droits, les assurés sont appelés à présenter eux-mêmes à l’AI leurs demandes de prestations. En présentant lui-même sa demande, l’assuré autorise d’un point de vue légal l’office AI à utiliser des données personnelles particulièrement sensibles dans le but de vérifier son droit aux prestations. Certains types de moyens auxiliaires demandent une investigation poussée qui ne peut se faire sans une collaboration entre l’assuré, les médecins, les thérapeutes, les spécialistes de la rééducation et l’employeur. Ce n’est qu’après l’examen approfondi de la demande que le moyen auxiliaire peut être accordé à l’assuré, que ce soit en prêt ou en propriété. Le traitement d’une demande de moyen auxiliaire sur le lieu de travail sans la participation active de l’assuré et de l’employeur est voué à l’échec.

Autoriser un employeur à déposer une demande de prestation unilatéralement serait contraire à la liberté et à l’autodétermination de l’assuré lorsqu’il choisit de déposer une demande. Une telle procédure ne simplifierait en rien le travail administratif, du fait que la collaboration de l’assuré est essentielle à l’examen des prestations. Cependant, le Conseil fédéral comprend le besoin de simplifier le travail administratif en lien avec les demandes de moyens auxiliaires. L’OFAS est chargé d’évaluer les possibilités de simplification (adaptation du formulaire d’intervention précoce). Il n’est pas nécessaire de modifier le cadre légal.

 

Proposition du Conseil fédéral du 17.11.2021

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

 

Motion Lohr 21.4089 « Améliorer l’intégration sur le lieu de travail. Les employeurs doivent aussi pouvoir déposer des demandes visant à adapter l’environnement de travail » – Avis du Conseil fédéral du 17.11.2021 consultable ici

 

 

9C_594/2020 (f) du 15.09.2021 – Moyens auxiliaires – Frais d’entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire – 21 LAI – 14 RAI – 2 et 7 OMAI / Liste des thérapeutes agréés – Choix du personnel médical et des fournisseurs de moyens auxiliaires – Convention tarifaire / 26bis LAI – 27 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_594/2020 (f) du 15.09.2021

 

Consultable ici

 

Moyens auxiliaires / OMAI

Frais d’entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire / 21 LAI – 14 RAI – 2 et 7 OMAI

Liste des thérapeutes agréés – Choix du personnel médical et des fournisseurs de moyens auxiliaires – Convention tarifaire / 26bis LAI – 27 LAI

 

Assurée souffrant de surdité bilatérale congénitale, de troubles secondaires de l’expression orale et de troubles psychiques, au bénéficie d’une rente AI et de moyens auxiliaires, dont un implant cochléaire. Le 23.11.2017, elle a requis de l’office AI la prise en charge des frais d’entraînement auditif en lien avec son nouvel implant cochléaire. Elle a précisé que cet entraînement serait dispensé par la logopédiste B.__. Par décision, l’office AI a rejeté la requête dès lors que la logopédiste choisie n’apparaissait pas sur la liste des thérapeutes agréés par l’Association romande des enseignants en lecture labiale (ARELL).

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a considéré que l’office AI n’avait pas violé le droit fédéral en refusant de prendre en charge les coûts relatifs à un entraînement auditif auprès de la logopédiste B.__, au motif que son nom ne figurait pas sur la liste des spécialistes agréés par l’ARELL – avec laquelle l’OFAS avait conclu une Convention tarifaire concernant la rémunération individuelle des enseignants/tes en entraînement à la compréhension – même si l’art. 7 OMAI ne permettait pas expressément à l’OFAS de conclure une telle convention. Elle a aussi indiqué que la convention mentionnée rendait non seulement possible un entraînement auditif de qualité dispensé par des spécialistes ayant une formation spécifique, mais garantissait également une facturation uniforme et économiquement adéquate. Elle a encore précisé que des enseignants agréés par l’ARELL se trouvaient à Martigny et à Monthey.

Par jugement du 24.08.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Convention tarifaire avec les associations des professions médicales et paramédicales – 27 LAI

L’art. 27 al. 1 LAI autorise le Conseil fédéral à conclure des conventions, notamment, avec les associations des professions paramédicales (par exemple la logopédie) qui appliquent les mesures de réadaptation, afin de régler leur collaboration avec les organes de l’assurance et de fixer les tarifs. Le Conseil fédéral a délégué sa compétence à l’OFAS (art. 24 al. 2 RAI).

Or d’une part, les mesures de réadaptation comprennent l’octroi de moyens auxiliaires (art. 8 al. 3 let. d LAI). D’autre part, la prise en charge des frais résultant du besoin d’entraînement particulier pour utiliser un moyen auxiliaire est un droit accessoire au droit à un tel moyen. Le besoin d’entraînement implique forcément l’octroi d’un moyen auxiliaire. La personne qui dispense un tel entraînement – pour autant qu’elle satisfasse aux prescriptions cantonales visées par l’art. 26bis al. 1 LAI – est donc une personne qui « applique [une] mesure de réadaptation » au sens de l’art. 27 al. 1 LAI. Par conséquent, l’OFAS était en droit de conclure une convention tarifaire avec l’ARELL afin de fixer les tarifs des logopédistes désignés par elle et ainsi habilités à pratiquer un entraînement auditif en lien avec un implant cochléaire.

On ajoutera que, dans la mesure où l’assurance-invalidité a toujours eu vocation à prendre en charge uniquement des moyens auxiliaires simples et adéquats (cf. Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi sur l’assurance-invalidité ainsi qu’à un projet de loi modifiant celle sur l’assurance-vieillesse et survivants du 24 octobre 1958, FF 1958 II 1289, 2e al. ad art. 21), ainsi qu’à garantir la compétence des fournisseurs de prestations (cf. Message du Conseil fédéral cité, FF 1958 1291, 4e al. ad art. 26), l’OFAS n’est pas sorti du cadre de la délégation de compétence ni n’a violé le droit fédéral (cf. arrêt 9C_177/2020 du 28 mai 2021 consid. 7.1 destiné à la publication) en concluant avec l’ARELL une convention visant à fixer des tarifs (art. 1) et à veiller à ce que les prestations soient fournies par du personnel spécialisé, qualifié et diplômé (art. 2).

 

Libre choix du personnel paramédical – 26bis LAI

Selon l’art. 26bis al. 1 LAI, un assuré peut choisir librement le personnel paramédical, les établissements et les ateliers ou encore les entreprises présentes sur le marché ordinaire du travail qui mettent en œuvre des mesures de réadaptation et les fournisseurs de moyens auxiliaires, pour autant qu’ils satisfassent aux prescriptions cantonales et aux exigences de l’assurance. Le fait que l’OFAS était en l’espèce en droit de conclure une convention tarifaire avec l’ARELL, conformément à l’art. 24 al. 2 RAI en relation avec l’art. 27 al. 1 LAI (cf. consid. 6.1 supra), n’a pas pour conséquence de restreindre cette liberté de choix mais seulement de limiter l’étendue de la prise en charge par l’assurance. L’art. 24 al. 3 RAI prévoit en effet à cet égard que pour les personnes et institutions qui appliquent des mesures de réadaptation sans avoir adhéré à une convention, les qualifications professionnelles fixées contractuellement valent comme exigences minimales de l’assurance au sens de l’art. 26bis al. 1 LAI et les tarifs établis par convention comme montants maximaux au sens des art. 21quater al. 1 let. c et 27 al. 3 LAI.

Il n’est dès lors pas impossible que l’assurée ait droit au remboursement des frais d’un entraînement dispensé par un enseignant non agréé par l’ARELL à concurrence du montant qu’elle aurait obtenu pour un prestataire figurant sur la liste de cette institution. Toutefois, comme ni l’administration ni les premiers juges ne se sont exprimés sur ce point, il convient d’annuler le jugement attaqué ainsi que la décision administrative litigieuse et de renvoyer la cause à l’office AI afin qu’il examine le cas sous l’angle évoqué et rende une nouvelle décision.

 

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assurée, annule le jugement cantonal et la décision litigieuse, renvoyant la cause à l’office AI pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 9C_594/2020 consultable ici

 

 

Développement continu de l’AI : entrée en vigueur le 01.01.2022

Développement continu de l’AI : entrée en vigueur le 01.01.2022

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 03.11.2021 consultable ici
(version italienne / allemande)

 

Le Développement continu de l’AI entrera en vigueur le 01.01.2022. Le Conseil fédéral l’a décidé lors de sa séance du 03.11.2021. Cette révision de loi apporte des améliorations en particulier en faveur des enfants, des jeunes et des personnes atteintes de troubles psychiques. Les expertises médicales feront l’objet de mesures visant à garantir la qualité et à améliorer la transparence. La mise en œuvre de la révision implique d’importantes modifications au niveau réglementaire, lesquelles ont été soumises à consultation. Le Conseil fédéral a pris connaissance des résultats et adapté quelques dispositions en conséquence.

Le Développement continu de l’AI vise notamment à soutenir, de façon encore plus ciblée, les enfants et les jeunes en situation de handicap ainsi que les personnes atteintes dans leur santé psychique, ceci afin de renforcer leur potentiel de réadaptation et d’améliorer leur aptitude au placement. À cette fin, l’AI intensifiera la collaboration avec les acteurs impliqués, en particulier les médecins traitants et les employeurs. En outre, les mesures en faveur des jeunes seront coordonnées et davantage orientées vers le marché primaire du travail. Les prestations de conseil et de suivi seront étoffées et consolidées pour profiter tant aux jeunes assurés qu’aux professionnels de l’enseignement et de la formation. Les instruments de détection précoce et les mesures de réinsertion socioprofessionnelles qui ont fait leurs preuves auprès des adultes seront étendus aux jeunes.

 

Expertises médicales : amélioration de la qualité et de la transparence

Dans le cadre du Développement continu de l’AI, les mesures d’instruction et la procédure liée aux expertises médicales seront uniformisées pour toutes les assurances sociales. Lors de l’attribution des mandats d’expertise, l’assurance et la personne assurée devront se mettre d’accord sur un mandataire. En outre, les expertises deviendront plus transparentes : les entretiens entre experts et assurés feront désormais l’objet d’un enregistrement sonore, qui sera joint au dossier. En ce qui concerne l’AI en particulier, les offices AI tiendront une liste publique contenant des informations sur les experts auxquels ils font appel (nombre d’expertises effectuées, remboursements, incapacités de travail attestées, appréciation des expertises dans le cadre de décisions de justice).

 

Les expertises bidisciplinaires seront confiées exclusivement et de manière aléatoire à des centres agréés ou à des binômes d’experts, comme c’était le cas pour les seules expertises pluridisciplinaires (trois disciplines ou plus) jusqu’ici. Une commission extraparlementaire indépendante sera instituée pour veiller à la qualité des expertises. Ses tâches et compétences seront réglées par voie d’ordonnance. À la demande des participants à la consultation, le nombre de représentants du corps médical au sein de la commission diminue au profit de celui des organisations de patients et d’aide aux personnes handicapées. Par ailleurs, des exigences relatives aux qualifications professionnelles des experts médicaux seront définies.

 

Évaluation du taux d’invalidité : une réglementation plus claire

Un système de rentes linéaire est introduit pour les nouveaux bénéficiaires de rente, afin de les inciter à augmenter le taux de leur activité lucrative. Dans le système actuel à quatre échelons, de nombreux bénéficiaires de rente AI n’ont pas intérêt à travailler davantage, car cela n’augmenterait pas leur revenu disponible en raison d’effets de seuil. Une rente entière sera octroyée, comme aujourd’hui, à partir d’un taux d’invalidité de 70%.

Avec l’introduction d’un système de rentes linéaire, l’exactitude du taux d’invalidité revêtira une plus grande importance. En effet, dans ce nouveau système, chaque point de pourcentage sera déterminant pour le calcul du montant de la rente. Afin d’accroître la sécurité juridique et l’uniformité, les principes essentiels de l’évaluation du taux d’invalidité seront désormais définis au niveau d’une ordonnance et non plus par voie de directive. La réforme clarifie en outre les dispositions applicables aux cas suivants : personnes travaillant à temps partiel, comparaison du revenu réalisé avant la survenance de l’invalidité avec celui réalisable après, personnes sans diplôme professionnel, invalides précoces ou de naissance et revenus particulièrement bas avant la survenance de l’invalidité. Ces modifications devraient profiter aux personnes assurées à différents égards. Les participants à la consultation ont en particulier critiqué la réglementation sur l’abattement en raison d’une atteinte à la santé et l’application des tableaux de l’Enquête suisse sur la structure des salaires pour la détermination d’un revenu réalisable. Le Conseil fédéral a décidé de s’en tenir à cette pratique tout en chargeant l’Office fédéral des assurances sociales d’examiner la possibilité de développer de nouvelles bases spécifiques à l’AI.

[NB : le communiqué de presse ne mentionne pas l’abandon de l’abattement sur les salaires statistiques utilisés pour le revenu avec invalidité (nouvelle appellation du revenu d’invalide). Cf. à ce sujet les commentaires de l’art. 26bis al. 3 P-RAI dans le rapport explicatif pour la situation dès le 01.01.2022 et les prises de position dans le rapport sur les résultats de la consultation (p. 48).]

 

Infirmités congénitales : mise à jour de la liste

L’AI finance le traitement médical de certaines infirmités congénitales qui touchent les enfants et les jeunes. La réforme prévoit d’inscrire dans la loi des critères clairs pour déterminer si une maladie est assimilée à une infirmité congénitale, et donc si l’AI prend en charge les coûts de son traitement. La liste des infirmités congénitales sera mise à jour. Les affections qui peuvent être traitées facilement seront désormais prises en charge par l’assurance-maladie. À l’inverse, de nouvelles maladies, en particulier des maladies rares, seront prises en charge par l’AI. La tenue de la liste des infirmités congénitales sera confiée au Département fédéral de l’intérieur (DFI). L’ordonnance actuelle du Conseil fédéral sera donc remplacée par une ordonnance départementale, ce qui facilitera la mise à jour régulière de la liste.

 

Prise en charge de médicaments : création d’un centre de compétences

Pour les infirmités congénitales reconnues, l’AI prend aussi en charge les coûts des médicaments. Afin de simplifier la procédure et de concentrer les compétences techniques, une liste des spécialités sera créée pour l’AI (liste des spécialités en matière d’infirmités congénitales, LS IC). Elle recensera les médicaments pris en charge par l’AI ainsi que leur prix maximal. Pour être admis sur la liste, les médicaments devront faire l’objet d’un examen selon les critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité, sur le modèle de la procédure appliquée dans l’assurance-maladie. La nouvelle LS IC remplacera l’actuelle liste des médicaments destinés au traitement des infirmités congénitales. Lorsqu’une personne assurée atteint l’âge de 20 ans, les médicaments remboursés par l’AI seront pris en charge dans la même mesure par l’assurance obligatoire des soins.

Un centre de compétences sera créé auprès de l’Office fédéral de la santé publique pour la procédure d’admission et la tenue de la LS IC. En effet, cet office étant responsable de la liste des spécialités de l’assurance-maladie, il dispose déjà de l’expérience nécessaire en la matière.

 

Aides financières de l’AI : ajournement de l’ordre de priorité

Les organisations faîtières de l’aide privée aux personnes en situation de handicap peuvent recevoir des aides financières de l’AI. Dans le cadre du Développement continu de l’AI, il était prévu que le Conseil fédéral détermine un ordre de priorité suivant lequel répartir ces aides dans les limites du montant fixé. S’étant heurtée à une vive opposition lors de la consultation, cette réglementation est pour l’heure abandonnée. Un éventuel ajustement sera envisagé de concert avec les organisations concernées pour la prochaine période contractuelle 2024-2027.

 

Nouvelle ordonnance du département sur les prestations de soins

Le DFI met en vigueur une nouvelle ordonnance sur les prestations de soins au 01.01.2022. Celle-ci désigne les prestations de soins ambulatoires (par exemple soins prodigués par des organisations d’aide et de soins à domicile) fournies aux enfants et aux adolescents qui seront prises en charge par l’AI. En faisant édicter une ordonnance du ressort du DFI, le Conseil fédéral répond à un mandat découlant du Développement continu de l’AI.

 

 

Quelques précisions (données issues du rapport explicatif)

 

Optimisation de la réadaptation

  • Formation professionnelle initiale

Pour que la formation professionnelle initiale (FPI) puisse être menée à bien et déboucher sur une intégration au marché du travail (primaire) aussi durable que possible, il est important qu’elle corresponde aux aptitudes et au niveau de développement de l’assuré (cf. art. 8, al. 1bis, LAI).

Avec le Développement continu de l’AI (DC AI), l’art. 16 LAI a été complété de sorte que la FPI vise si possible l’insertion professionnelle sur le marché du travail primaire et soit mise en œuvre sur ce dernier. La norme de délégation de l’al. 4 donnera au Conseil fédéral la compétence de fixer les conditions d’octroi de mesures de formation pratiques et à bas seuil en ce qui concerne leur nature, leur durée et leur étendue.

La réglementation de la FPI doit également être concrétisée au niveau de l’ordonnance. Les points suivants seront inscrits dans le RAI : Définition du recoupement avec l’art. 15 LAI (Orientation professionnelle) (art. 5, al. 2, PRAI) ; Définition de la réussite d’une FPI (art. 5, al. 3, P-RAI) ; Précision de la norme de délégation donnée au Conseil fédéral (art. 5, al. 4 et 5, P-RAI) ; Définition du recoupement avec l’art. 17 LAI (Reclassement) (art. 5bis, al. 1, P-RAI).

 

  • Indemnité journalière de l’AI

La nouvelle réglementation de la LAI relative aux indemnités journalières vise à mettre les jeunes atteints dans leur santé sur un pied d’égalité financière avec les personnes du même âge en bonne santé. Elle permet d’éviter que, pendant la formation, les premiers ne reçoivent des indemnités journalières plus élevées que le salaire perçu par les seconds. Le droit aux indemnités journalières sera ouvert dès le début de la formation, et cela même en l’absence d’une perte de gain et avant l’âge de 18 ans. Ce modèle permettra à l’assuré de percevoir un vrai salaire, directement versé par l’employeur en contrepartie du travail fourni.

Le RAI doit être modifié en conséquence, en particulier en ce qui concerne les modalités d’octroi des indemnités journalières durant l’instruction (art. 17, al. 2, P-RAI) et durant le délai d’attente (art. 18 P-RAI) et les bases de calcul du montant des indemnités journalières (art. 21octies, al. 3, et 22, P-RAI).

 

  • Couverture accidents

L’assurance-accidents de personnes bénéficiant de mesures de l’AI (AA AI), introduite par le Développement continu de l’AI (DC AI), offre une sécurité juridique à toutes les personnes concernées, ce qui favorisera la réadaptation. Les nouvelles dispositions permettent à l’AI de prendre en charge les coûts et obligations notamment des employeurs, dans l’optique d’inciter ces derniers à proposer des mesures de réadaptation.

En 2018, le Tribunal fédéral a, pour la première fois, jugé (ATF 144 V 411) qu’une mesure de réadaptation de l’AI (concrètement, un placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI) était assujettie à la couverture accidents selon la loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA). Les dispositions relatives à la couverture accidents contenues dans le message relatif au DC AI ont donc été adaptées à la nouvelle jurisprudence.

La mise en œuvre de l’AA AI nécessite plusieurs modifications dans le RAI et l’OLAA (notamment les art. 88sexies ss P-RAI ainsi que le titre 8a P-OLAA [art. 132 ss P-OLAA]]). Ces adaptations concernent principalement la procédure relative à la nouvelle branche d’assurance. Au vu de la situation spécifique des assurés bénéficiant de mesures de réadaptation, il est également nécessaire de préciser certaines modalités (notamment calcul des prestations en cas d’accident).

 

Mesures médicales

  • Mesures médicales de réadaptation

Dans le DC AI, la limite d’âge pour les mesures médicales de réadaptation de l’art. 12 LAI a été relevée. Les assurés participant à une mesure de réadaptation d’ordre professionnel bénéficieront désormais de mesures médicales de réadaptation jusqu’à 25 ans. Les modalités de l’enchaînement de mesures de réadaptation d’ordre professionnel doivent être réglées dans le RAI (art. 2bis P-RAI). En outre, les conditions régissant la prise en charge des coûts doivent être concrétisées de sorte qu’une mesure médicale de réadaptation doit être demandée avant le début du traitement (art. 2, al. 3, P-RAI). Cette modification entend alléger la charge administrative liée à la procédure de délimitation des compétences entre les assureurs-maladie et l’AI.

 

Système de rentes

  • Système de rentes linéaire

Avec l’introduction du système de rentes linéaire dans l’AI, le montant du droit aux prestations sera fixé en pourcentage d’une rente complète, et non plus par paliers d’un quart de rente. La disparition du système de paliers entraîne des adaptations formelles du RAI et du RAVS (art. 33bis, al. 2, et art. 38, al. 2, P-RAI ; art. 51, al. 5, RAVS) ; une disposition transitoire portant sur la diminution des deux rentes d’un couple sera également nécessaire. Par ailleurs, les tables de rentes seront remplacées par des prescriptions relatives au calcul du montant des rentes (art. 53, al. 1, P-RAVS).

Comme le nouvel échelonnement du droit à la rente s’appliquera également aux prestations d’invalidité de la prévoyance professionnelle obligatoire, les art. 4 et 15 P-OPP 2 ainsi que l’art. 3 de l’ordonnance sur la prévoyance professionnelle obligatoire des chômeurs seront modifiés.

 

  • Évaluation du taux d’invalidité

La norme de délégation accordée au Conseil fédéral par le DC AI pour le calcul du revenu déterminant a été précisée (art. 28a, al. 1, LAI). Celui-ci pourra donc régler par voie d’ordonnance le revenu avec et sans invalidité ainsi que les facteurs de correction applicables.

Le nouveau système de rentes linéaire revalorisera les prestations au pourcentage près du taux d’invalidité. Pour un taux d’invalidité compris entre 40% et 70%, chaque pour cent modifiera le montant de la rente. La pratique actuelle, fondée principalement sur les directives et tirée en grande partie de la jurisprudence, sera inscrite dans la législation par voie d’ordonnance dans le cadre de la norme de délégation accordée au Conseil fédéral. L’objectif est de créer la plus grande sécurité juridique possible afin de prévenir autant que possible les litiges relatifs au calcul du taux d’invalidité.

Dans un premier temps, il s’agira de déterminer le statut de l’assuré, à savoir si ce dernier exerce une activité lucrative, n’exerce pas d’activité lucrative ou exerce une activité lucrative à temps partiel (art. 24septies P-RAI). Ensuite, les principes généraux applicables à la comparaison des revenus, et en particulier à la date déterminante et à l’application des valeurs statistiques, seront fixés (art. 25 P-RAI).

L’art. 25 al. 2 P-RAI dispose que la situation et les salaires sur le marché suisse du travail sont déterminants pour le calcul du taux d’invalidité. Dans des cas particuliers dûment motivés, l’office AI pour les assurés résidant à l’étranger peut également établir les revenus à comparer sur la base du marché du travail étranger, notamment quand les revenus effectifs sur ce marché sont connus et qu’ils ne peuvent pas être convertis sans autres sur le marché suisse du travail. Cela suppose toutefois que les deux revenus à comparer sont déterminés sur le même marché du travail étranger.

Le revenu avec et sans invalidité sera défini, si possible sur la base du revenu effectif, sinon, sur la base de valeurs statistiques (art. 26 et 26bis P-RAI). En principe, il faut utiliser à cet effet les tableaux de l’ESS ; d’autres valeurs statistiques peuvent être utilisées lorsque le revenu en question n’est pas représenté dans l’ESS.

Pour le calcul du taux d’invalidité, il est prévu d’appliquer les principes généraux aux invalides précoces ou de naissance et de renoncer à l’actuel classement par groupe d’âge jusqu’à 30 ans (art. 26, al. 5 et 6, P-RAI). L’inégalité de traitement sera ainsi supprimée. Les jeunes assurés en possession d’une attestation de formation professionnelle ou d’un certificat fédéral de capacité selon la LFPr doivent être considérés comme les autres jeunes du même âge sans atteinte à la santé.

Une parallélisation sera effectuée pour les revenus sans invalidité, lorsque le salaire de l’assuré est inférieur de plus de 5% au salaire usuel dans la branche (art. 26, al. 2, P-RAI). La nouvelle réglementation est plus avantageuse que la réglementation actuelle pour les assurés, parce qu’il n’est plus nécessaire d’examiner quels sont précisément les facteurs à l’origine d’un revenu inférieur à la moyenne ou si, éventuellement, l’assuré ne se serait pas satisfait d’un revenu aussi modeste. On part plutôt du principe qu’un salarié n’aurait vraisemblablement pas accepté volontairement un revenu aussi faible. La parallélisation doit par conséquent être systématiquement effectuée lorsque le revenu effectivement réalisé selon l’al. 1 est inférieur de 5%, voire davantage au revenu médian usuel dans la branche selon l’ESS. Contrairement à la pratique du Tribunal fédéral, une parallélisation est ici aussi pratiquée lorsque l’assuré réalise le salaire minimum prévu par convention collective de travail (CCT) ou contrat-type de travail (CTT) mais que celui-ci reste néanmoins inférieur de 5 %, voire davantage au revenu médian usuel dans la branche selon l’ESS. Une CCT ou un CTT ne réglemente que le salaire minimum, généralement pas le revenu usuel. Enfin, de nombreuses CCT et CTT ne s’appliquent que régionalement. Le travail des organes d’exécution serait considérable s’il fallait vérifier dans chaque cas qu’une CCT ou un CTT s’applique. Avec l’application automatique de la parallélisation pour les salariés, tous les facteurs économiques pouvant être pris en considération pour un abattement en raison d’une atteinte à la santé sont déjà pris en compte.

Pour les assurés qui sont invalides de naissance ou invalides précoces, le revenu sans invalidité est fixé sur la base de valeurs statistiques non spécifiques au sexe (cf. art. 26, al. 6, P-RAI). Pour éviter toute distorsion, le revenu avec invalidité doit donc lui aussi être déterminé sur la base de valeurs indépendantes du sexe.

S’agissant du revenu avec invalidité, l’abattement en raison d’une atteinte à la santé n’est désormais plus appliqué (cf. commentaires de l’art. 26bis al. 3 P-RAI).

Les règles s’appliquant au calcul du taux d’invalidité des assurés exerçant une activité lucrative à temps partiel ou n’exerçant pas d’activité lucrative resteront largement inchangées (art. 27 et 27bis P-RAI). Toutefois, le calcul applicable au temps partiel sera uniformisé et égalitaire du point de vue juridique. Les activités lucratives et les travaux habituels seront désormais considérés comme complémentaires, de sorte que tout ce qui n’est pas réputé activité lucrative relèvera des travaux habituels (art. 27bis, al. 1, P-RAI).

 

Procédure et expertises

La procédure d’instruction menée d’office vise à garantir un traitement aussi simple et rapide que possible des procédures en matière d’assurances sociales. Les droits de participation des assurés ainsi que les rôles et les compétences des organes d’exécution seront réglés dans la LPGA pour toutes les assurances sociales. De plus, les mesures en matière de procédure d’instruction sont clarifiées et uniformisées, notamment s’agissant des expertises médicales :

  • si un assureur et un assuré ne parviennent pas à s’entendre sur un expert, l’assureur communique sa conclusion par décision incidente (art. 44, al. 4, LPGA). Pour que l’expert puisse être choisi de manière consensuelle, les parties doivent, si possible, parvenir à un accord avant la décision. La procédure de consensus est précisée dans l’OPGA (art. 7j P-OPGA). La possibilité d’une recherche de consensus ne prive pas l’assureur de sa compétence s’agissant de la désignation de l’expert. La jurisprudence actuelle selon laquelle l’assuré ne peut se prévaloir d’aucun droit à la désignation d’un expert de son choix continue de s’appliquer.
  • S’agissant de l’attribution des mandats d’expertise, le Conseil fédéral peut édicter des règles pour chaque domaine des assurances sociales (art. 44, al. 7, LPGA). Les règles s’appliquant au domaine de l’AI méritent d’être révisées. Ainsi, en vue de garantir la qualité et à l’instar des expertises multidisciplinaires, les expertises bidisciplinaires sont attribuées uniquement, et de manière aléatoire, à des centres d’expertises ou à des binômes d’experts autorisés (art. 72bis, al. 1bis, P-RAI). De plus, les exigences relatives à la qualification professionnelle des experts médicaux désireux de travailler sur mandat d’une assurance sociale sont définies au plan fédéral (art. 7l P-OPGA).
  • Les entretiens entre l’expert et l’assuré sont enregistrés (enregistrement sonore) et joints au dossier. Le terme «entretien» est employé dans la loi (art. 44, al. 6, LPGA), mais n’y est pas défini. Il doit donc être précisé dans le règlement (art. 7k P-OPGA). Par entretien, on entend l’anamnèse et la description par l’assuré de l’atteinte à sa santé. Les explications et déclarations personnelles de l’assuré sont placées au premier plan. L’enregistrement sonore doit garantir que les déclarations de l’assuré sont saisies correctement et reprises avec exactitude dans le rapport de l’expert. La partie consacrée à l’évaluation psychologique dans les expertises psychiatriques, neurologiques et neuropsychologiques ne peut pas être enregistrée. Lorsque l’assuré souhaite renoncer à l’enregistrement sonore de l’entretien, il doit en aviser par écrit l’assureur. La renonciation ne peut être communiquée qu’à l’organe d’exécution. Si l’assuré décide seulement après coup qu’il ne souhaite pas d’enregistrement, il doit demander à l’organe d’exécution, dans les dix jours qui suivent l’entretien, la destruction de l’enregistrement (art. 7k al. 3 lit. b P-OPGA). En règle générale, l’expertise n’est pas encore terminée à ce stade, ce qui signifie que l’expert n’enverra que son rapport écrit à l’organe d’exécution.
  • Les offices AI géreront une liste publique en vue d’assurer un maximum de transparence en matière de répartition des mandats d’expertise (art. 57, al. 1, let. n, LAI). Ces deux nouveautés sont précisées par voie d’ordonnance (art. 7k et 7l P-OPGA ; art. 41b P-RAI).
  • En vue de l’établissement d’expertises, les médecins doivent avoir suivi une formation postgrade en tant que spécialiste, mais aussi dans le domaine des expertises médicales. L’exigence relative à la possession d’une certification de l’association Médecine d’assurance suisse (Swiss Insurance Medicine, SIM) garantit que les médecins spécialistes qui réalisent des expertises pour les assurances sociales en tant qu’experts ont suivi une formation proposée en Suisse dans le domaine des expertises médicales (art. 7m al. 2 P-OPGA). Le respect de cette condition professionnelle peut également être vérifié sur Internet et dans un registre librement accessible. La qualification en médecine des assurances est requise uniquement pour les disciplines médicales les plus demandées (spécialistes en médecine interne générale, en psychiatrie et en psychothérapie, en neurologie, en rhumatologie, en orthopédie ou en chirurgie orthopédique et en traumatologie de l’appareil locomoteur).
  • Par ailleurs, une commission extra-parlementaire indépendante chargée de veiller à la qualité des expertises est créée (art. 44, al. 7, let. c, LPGA ; art. 7o ss P-OPGA). Ses tâches et compétences sont réglées par voie d’ordonnance. Concrètement, il est prévu qu’elle élabore et contrôle des directives et des instruments en la matière (accréditation des centres d’expertises, normes de qualité pour les expertises, outils standardisés de contrôle de la qualité des expertises, formation de base et formation continue des experts, etc.), qu’elle émette des recommandations et en assure la surveillance (art. 7p P-OPGA).

Plusieurs de ces mesures prises aux niveaux de la loi et de l’ordonnance, comme la création d’une commission indépendante, la fixation de critères d’admission pour les experts médicaux et l’attribution aléatoire des mandats d’expertise bidisciplinaires, correspondent aux recommandations du rapport d’experts sur les expertises médicales dans l’AI, publié à l’automne 2020. L’étude a été rédigée par l’entreprise Interface Politikstudien Forschung Beratung, en collaboration avec le service de psychiatrie forensique de l’Université de Berne. Elle a été faite sur demande du DFI datant de fin 2019 et analyse le système de l’activité d’expert et l’attribution des mandats.

 

Autres mesures du Développement continu de l’AI

  • Indemnité journalière de l’assurance-chômage

Actuellement, les bénéficiaires d’une rente AI dont la rente a été réduite ou supprimée suite à une révision (art. 17 LPGA ou art. 8a LAI) ont droit à 90 indemnités journalières de l’assurance-chômage au plus (art. 27, al. 4, de la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité ; LACI). Les nouveaux art. 68septies LAI et 27, al. 5, et 94a, LACI étendent ce droit à 180 indemnités journalières et autorisent l’AI à prendre en charge les indemnités journalières dès le 91e jour. Le nouvel art. 120a P-OACI réglera la procédure de décompte des coûts entre l’AI et l’assurance-chômage débutant le 91e jour des indemnités journalières.

 

Mesures sans lien avec le Développement continu de l’AI

  • Contribution d’assistance

L’évaluation de la contribution d’assistance (2012 à 2019) a mis en évidence que les forfaits de nuits étaient insuffisants. L’urgence d’un ajustement dans ce domaine est devenue encore plus marquée avec le modèle complétant les contrats-types de travail (CTT) cantonaux pour les travailleurs de l’économie domestique mis à la disposition des cantons par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO). Le modèle CTT a pour objectif d’améliorer la situation des personnes qui s’occupent 24 heures sur 24 de personnes âgées ou en situation de handicap. Les actuels forfaits de nuit de la contribution d’assistance ne permettent pas de rémunérer les assistants conformément à ces dispositions.

Afin de trouver une solution à cette problématique, un groupe de travail, constitué de représentants de l’OFAS, de la COAI, des organisations pour personnes en situation de handicap, de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) et de la Conférence des chefs des départements cantonaux de l’économie publique (CDEP), a analysé plusieurs possibilités et retenu une variante. Celle-ci prévoit, conformément aux recommandations du SECO, de relever le montant du forfait de nuit de 88 fr. 55 à 160 fr. 50 (art. 39f, al. 3, P-RAI).

Il est également prévu de supprimer la limitation du droit à des prestations de conseil, actuellement fixée à une seule fois. Cette modification découle des discussions menées avec les organisations pour personnes en situation de handicap suite à l’évaluation de la contribution d’assistance. Certes, les prestations de conseil sont surtout demandées en début de contrat, et servent à organiser la prestation (engager du personnel, établir des contrats de travail, souscrire des assurances perte de gain, etc.). Toutefois, la pratique montre qu’elles s’avèrent aussi nécessaires par la suite, contrairement à ce qui était attendu, et ceci dans une mesure qui dépasse les quelques heures qui avaient été estimées.

 

Dispositions transitoires (selon le texte actuellement disponible)

a. Indemnités journalières

Le début effectif de la mesure est déterminant pour la détermination du droit aux indemnités journalières.

b. Évaluation du taux d’invalidité

Si une rente AI a été octroyée avant l’entrée en vigueur de la modification du … à un assuré qui, en raison de son invalidité, n’a pas pu acquérir de connaissances professionnelles suffisantes et si cet assuré n’avait pas encore 30 ans au moment de l’entrée en vigueur de la modification, le droit à la rente AI doit être révisé selon les nouvelles dispositions dans l’année qui suit. En sont exclus les assurés qui perçoivent déjà une rente entière. Une éventuelle augmentation de la rente a lieu au moment de l’entrée en vigueur de la modification du ….

c. Système de rentes

Si les let. b et c des dispositions transitoires de la modification du 19 juin 2020 de la LAI34 sont applicables à un conjoint, la réduction des deux rentes AI du couple en vertu de l’art. 37, al. 1bis, LAI s’effectue, en dérogation à l’art. 32, al. 2, en fonction du droit du conjoint dont la rente AI équivaut au pourcentage le plus élevé d’une rente entière.

d. Révision du montant de la contribution d’assistance pour les prestations de nuit

Le montant des contributions d’assistance allouées pour les prestations de nuit auxquelles les assurés avaient droit au moment de l’entrée en vigueur de la modification du … est adapté conformément à la modification. L’adaptation du montant déploie ses effets au moment de l’entrée en vigueur de la modification en question.

e. Conventions existantes concernant le remboursement de médicaments par l’assurance-invalidité

Les conventions existantes entre l’OFAS et les titulaires d’autorisation qui ont été conclues avant l’entrée en vigueur de la modification du… restent applicables jusqu’à l’inscription du médicament sur la liste des spécialités ou sur la liste des spécialités en matière d’infirmités congénitales.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 03.11.2021 consultable ici

Modification du RAI – Rapport explicatif (après la procédure de consultation) consultable ici

Modification de la LAI publié au RO 2021 705 et du RAI publié in RO 2021 706

Rapport explicatif RAI (après la procédure de consultation) disponible ici 

Rapport sur les résultats de la consultation consultable ici

Ordonnance du DFI concernant les infirmités congénitales (OIC-DFI) et rapport explicatif consultables ici et la publication au RO 2021 708

Ordonnance du DFI sur les prestations de soins fournies sous forme ambulatoire et rapport explicatif consultables ici et la publication au RO 2021 707

 

Cf. également le communiqué de presse d’Inclusion Handicap du 03.11.2021 consultable ici (version allemande ici)

 

Version italienne :

 

Version allemande :

 

 

9C_381/2020 (d) du 15.02.2021 – Allocation pour impotent de l’AI : aide de tiers pour accomplir les actes ordinaires de la vie vs accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_381/2020 (d) du 15.02.2021

 

Consultable ici

 

Allocation pour impotent de l’AI : aide de tiers pour accomplir les actes ordinaires de la vie vs accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie

 

Une même prestation d’aide peut relever aussi bien de l’aide de tiers dans l’accomplissement d’un acte ordinaire de la vie que de l’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie; or, elle ne peut faire l’objet d’une double prise en compte. Si l’aide requise va au-delà de la gestion de la vie quotidienne au sens de l’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie, elle doit être prise en compte à titre d’acte ordinaire de la vie.

 

Est déterminant pour évaluer le taux de l’impotence (faible, moyenne ou grave) le nombre d’actes de la vie quotidienne qui nécessitent l’aide d’une tierce personne ainsi que la question de savoir si la personne a besoin d’un accompagnement pour faire aux nécessites de la vie. Dans la pratique se pose par conséquent régulièrement la question de savoir si une aide doit être prise en compte à titre d’acte ordinaire de la vie ou d’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie. Le Tribunal fédéral a examiné cette question dans son arrêt du 15 février 2021 (9C_381/2020).

 

Pour le développement et les commentaires de cet arrêt, cf. la publication «Droit et Handicap 08/2021 (21.10.2021)» de Martina Čulić d’Inclusion Handicap, consultable ici.

 

 

Arrêt 9C_381/2020 consultable ici

8C_124/2021 (d) du 02.08.2021 – Revenu d’invalide – Capacité de travail exigible dans l’activité habituelle – 16 LPGA / Revenu d’invalide fixé sur la base du tableau T17 de l’ESS 2018

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_124/2021 (d) du 02.08.2021

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Revenu d’invalide – Capacité de travail exigible dans l’activité habituelle / 16 LPGA

Revenu d’invalide fixé sur la base du tableau T17 de l’ESS 2018

 

Assurée, née en 1972, mère d’un fils (né en 2002), de nationalité étrangère (depuis septembre 2016 également citoyenne suisse), entrée en Suisse après s’être mariée le 18.12.2000. Son mari est décédé en 2006. À partir de 2009, elle a travaillé pour C.__ SA avec un taux d’activité de 70 à 80 %. Le 14.02.2012, 1e annonce AI en raison de troubles psychiques persistants depuis août 2011. L’office AI lui a alors octroyé une mesure de coaching du 01.09.2012 au 31.05.2013. En avril 2013, l’assurée a retrouvé une pleine capacité de travail, raison pour laquelle l’office AI a mis fin aux mesures de réadaptation. Dernièrement, l’assurée a travaillé à partir de mai 2016 pour D.__ SA chez C.__ SA en tant que cheffe de projet dans le domaine de la communication externe d’entreprise.

Le 17.07.2017, nouvelle demande AI en raison d’une incapacité de travail de 100% depuis mars 2017 pour des troubles psychiques. Après instruction habituelle et mise en œuvre d’une expertise bi-disciplinaire (psychiatrique-rhumatologique), l’office AI a octroyé à l’assurée une rente d’invalidité limitée dans le temps : rente entière dès 01.03.2018 (taux d’invalidité de 100%) ; demi-rente dès mars 2019 (taux d’invalidité de 50%) ; refus de la rente à compter du 01.05.2019 (taux d’invalidité de 20%).

 

Procédure cantonale

Pour déterminer le revenu d’invalidité, la cour cantonale s’est basée sur le revenu médian (valeur centrale) des femmes, niveau de compétences 3, du tableau TA1 de l’ESS. L’assurée, âgée de 48 ans au moment du jugement, avait travaillé en tant que chef de projet pour des entreprises de renom pendant environ huit ans avant sa maladie en 2017. Cette période d’activité n’a pas duré si longtemps qu’un changement de branche professionnelle n’est plus exigible de sa part. Compte tenu de la situation globale, la cour cantonale a constaté qu’il n’est pas justifié de déroger au principe de l’applicabilité du tableau ESS TA1.

L’instance cantonale a constaté que des décompensations sont survenues en 2013 et 2017 après une forte charge de travail. Selon l’assurée, elle voulait reprendre le travail, mais elle craignait de se retrouver à nouveau dans une situation de surmenage. Ces circonstances ont nécessité un changement de secteur, raison pour laquelle les juges cantonaux ont donc déterminé le revenu d’invalide selon la ligne « Total » du tableau TA1 et non du tableau T17.

Par jugement du 24.11.2020, admission du recours par le tribunal cantonal, accordant à l’assurée une rente d’invalidité entière dès le 01.03.2018, de trois-quarts dès le 01.03.2019 et d’un quart dès le 01.05.2019.

 

TF

Selon le rapport d’expertise bi-disciplinaire, ayant pleine valeur probante, l’assurée a été en incapacité de travail à 100% de mars 2017 à novembre 2018 et à 50% de décembre 2018 à janvier 2019 en raison de troubles dépressifs récurrents. À partir de février 2019, l’incapacité de travail est de 20%. Le revenu sans invalidité, non contesté, est de CHF 103’400 en 2018 et CHF 104’331 en 2019. N’est pas non plus litigieuse l’absence d’abattement sur le salaire statistique pour la détermination du revenu d’invalide.

En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible –, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’ESS (cf. ATF 143 V 295 consid. 2.2).

En pratique, la comparaison des revenus effectuée sur la base de l’ESS se fonde sur le groupe des tableaux A (salaires bruts standardisés) (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). Il y a habituellement lieu d’appliquer le tableau TA1 (ATF 126 V 75 consid. 7a ; SVR 2003 IV no. 1 p. 1, I 518/01 consid. 4b). Toutefois, ce principe ne s’applique pas de manière absolue, mais connaît des exceptions. Il peut tout à fait être justifié de se référer à la table TA7 ou T17 (à partir de 2012) si cela permet une détermination plus précise du revenu d’invalidité et si le secteur public est également ouvert à l’assuré (cf. arrêt 8C_212/2018 du 13 juin 2018 consid. 4.4.1 et les références).

L’office AI (recourant) fait valoir que les salaires statistiques médians de la ligne « Total » du tableau TA1 (secteur privé) doivent être pris en compte notamment si l’assuré ne peut plus raisonnablement exercer son activité habituelle et doit se reconvertir dans un autre domaine d’activité. Contrairement à l’arrêt attaqué, cela ne s’applique pas à l’assurée. Depuis février 2019, on pouvait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle exerce son dernier emploi de cheffe de projet dans le domaine du marketing et de la communication avec une capacité de travail de 80%. Il ressort du curriculum vitae que l’assurée a exercé exclusivement des activités administratives dans les domaines du marketing, de la coordination des achats, de la gestion de projets et de la communication externe. Par ailleurs, on ne voit pas pourquoi le secteur public ne lui serait pas également ouvert. Compte tenu de la formation qu’elle a suivie dans le domaine du « Creative Advertising » et du « Communication Management » (diplôme en publicité et licence en communication), les très bonnes connaissances de l’allemand (en plus du chinois et de l’anglais comme langues maternelles) et la nationalité suisse obtenue en 2016, il était justifié de se référer aux données salariales du tableau T17 (Salaire mensuel brut (valeur centrale) selon les groupes de professions, l’âge et le sexe ; secteur privé et secteur public [Confédération, cantons, districts, communes, corporations] ensemble, Suisse, en 2018).

Afin de déterminer le revenu d’invalide exigible d’une manière aussi appropriée et proportionnée que possible, en tenant compte de l’expérience et des compétences professionnelles de l’assurée, l’office AI retient la ligne 2 (professions intellectuelles et scientifiques, femmes, âge de 30 à 49 ans) du tableau T17. La ligne 24 (spécialistes en administration d’entreprises) dudit tableau pourrait également être prise en compte. Le salaire médian de la ligne 24 étant de CHF 7’662.- (femmes, 30-49 ans) [plus favorable à l’assurée que celui de la ligne 2 du T17], il résulte un taux d’invalidité de 57% en décembre 2018 (capacité de travail de 50%) et en février 2019 un taux d’invalidité de 31% (capacité de travail de 80%).

Conformément à la pratique, l’assuré doit diminuer le dommage (cf. ATF 130 V 97 consid. 3.2 ; 129 V 460 consid. 4.2 ; arrêt 9C_117/2020 du 3 juin 2020 consid. 5.4) ; doit donc être prise en compte l’activité qui entraîne le taux d’invalidité le plus faible (arrêt 9C_672/2019 du 12 août 2020 consid. 7.2.2).

L’expert psychiatre était au courant des conditions sur le lieu de travail de l’assurée et de ses craintes. Néanmoins, les experts médicaux sont arrivés à la conclusion que le dernier emploi occupé était « idéal » pour l’assurée car il correspondait à ses qualifications et à son expérience et qu’une capacité de travail supérieure ne pouvait être attendue dans une autre activité. A cet égard, il est clair qu’un « changement de secteur économique » vers une activité exigible en dehors du groupe professionnel « Professions intellectuelles et scientifiques » (ligne 2 du tableau T17) ou du groupe professionnel « Spécialistes en administration d’entreprises » (ligne 24 du tableau T17) n’était ni recommandé ni nécessaire selon l’évaluation de l’expert.

Dans la mesure où l’instance cantonale a conclu qu’un « changement de secteur économique » était nécessaire, lequel était nécessairement associé à une perte économique importante, l’arrêt attaqué viole le droit fédéral.

Il ne peut être déduit de l’expertise bi-disciplinaire la nécessité d’un « changement de secteur économique ». Par ailleurs, une activité – raisonnablement exigible – dans les groupes de professions des lignes 2 et 24 du tableau T17 n’entraînerait pas une perte de gain ouvrant le droit à une rente d’invalidité. Ces activités du secteur public sont également accessibles à l’assurée.

Le Tribunal fédéral conclut que la cour cantonale a violé le droit fédéral en jugeant qu’un changement de branche économique était nécessaire et donc que les salaires médians du tableau TA1, ligne « Total », étaient déterminants. Selon le Tribunal fédéral, il semble au contraire approprié de prendre comme base les salaires statistiques du tableau T17 ; il n’y a par ailleurs pas d’erreurs manifestes de procéder à la comparaison des revenus sur cette base.

 

Le TF admet le recours de l’office AI.

 

Arrêt 8C_124/2021 consultable ici

 

Proposition de citation : 8C_124/2021 (d) du 02.08.2021 – Revenu d’invalide dans l’activité habituelle fixé sur la base du tableau T17 de l’ESS 2018, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2021/10/8c_124-2021)