Archives de catégorie : Assurance-accidents LAA

8C_153/2016 (f) du 13.12.2016 – Rixe – Blessures par balles – Réduction des prestations en espèces – 39 LAA – 49 al. 2 OLAA / Lien de causalité adéquate

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_153/2016 (f) du 13.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jB02x0

 

Rixe – Blessures par armes à feu – Réduction des prestations en espèces – 39 LAA – 49 al. 2 OLAA

Lien de causalité adéquate

 

Assuré blessé par plusieurs coups de feu, tirés par D.__, à la suite d’une altercation survenue en février 2015 devant une discothèque. Une action pénale a été ouverte contre D.__ pour tentative de meurtre, éventuellement mise en danger de la vie d’autrui.

Faits

Vers quatre heures du matin, l’assuré et D.__ avaient eu une altercation verbale à l’intérieur de la discothèque au sujet de l’amie de ce dernier, E.__. Les deux hommes étaient ensuite sortis de la discothèque, accompagnés de F.__, agent de sécurité de l’établissement. Ils avaient continué à se disputer, avant d’en venir aux mains. D.__ avait poussé son adversaire et lui avait asséné un coup de poing. L’assuré l’avait à son tour bousculé. Finalement, les deux protagonistes avaient été séparés par des témoins de la scène. L’assuré avait alors été ramené et retenu à l’intérieur de la discothèque, cependant que D.__ était resté dehors. Depuis la discothèque, l’assuré avait téléphoné à un ami, G.__, pour qu’il vienne le chercher. Il avait été convenu que ce dernier l’attendrait avec son véhicule près d’une porte à l’arrière de l’établissement. A l’arrivée de G.__, l’assuré était sorti avec l’agent de sécurité de l’établissement, qui devait l’accompagner jusqu’à la voiture. Sur le chemin, D.__, accompagné d’un autre homme, était venu vers eux, muni d’un bâton. L’assuré était alors allé à leur rencontre. Les trois hommes s’étaient rejoints au milieu de la route. L’agent de sécurité et G.__ s’étaient également approchés. L’assuré et D.__ étaient excités. A un certain moment, celui-ci était allé vers sa voiture « pour chercher la fille ». Il était revenu et avait frappé l’assuré avec son bâton. Celui-ci avait tenté de se protéger. D.__ avait alors chargé un pistolet et fait feu à plusieurs reprises.

 

Rixe – 39 LAA – 49 al. 2 OLAA

Édicté par le Conseil fédéral en vertu de la délégation de compétence de l’art. 39 LAA, l’art. 49 al. 2 OLAA dispose que les prestations en espèces sont réduites au moins de moitié en cas d’accident non professionnel survenu notamment en cas de participation à une rixe ou à une bagarre, à moins que l’assuré ait été blessé par les protagonistes alors qu’il ne prenait aucune part à la rixe ou à la bagarre ou qu’il venait en aide à une personne sans défense (let. a), ou encore lors de dangers auxquels l’assuré s’expose en provoquant gravement autrui (let. b).

Il y a lieu de rappeler que la notion de participation à une rixe ou à une bagarre est plus large que celle de l’art. 133 CP.

Pour admettre l’existence d’une telle participation, il suffit que l’assuré entre dans la zone de danger, notamment en participant à une dispute. Peu importe qu’il ait effectivement pris part activement aux faits ou qu’il ait ou non commis une faute: il faut au moins qu’il se soit rendu compte ou ait pu se rendre compte du danger.

Il doit en outre exister un lien de causalité entre le comportement de la personne assurée et le dommage survenu. Si l’attitude de l’assuré – qui doit être qualifiée de participation à une rixe ou à une bagarre – n’apparaît pas comme une cause essentielle de l’accident ou si la provocation n’est pas de nature, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, à entraîner la réaction de violence, l’assureur-accidents n’est pas autorisé à réduire ses prestations d’assurance. Il convient de déterminer rétrospectivement, en partant du résultat qui s’est produit, si et dans quelle mesure l’attitude de l’assuré apparaît comme une cause essentielle de l’accident (ATF 134 V 315 consid. 4.5.1.2 p. 320; arrêt 8C_445/2013 du 27 mars 2014 consid. 3.1).

 

Après une première altercation, qui avait nécessité l’interposition de tiers pour séparer les deux protagonistes et la mise à l’écart de l’assuré à l’intérieur de la discothèque, celui-ci pouvait s’attendre à ce que la situation dégénère à nouveau en voyant D.__ qui l’avait attendu et qui s’avançait dans sa direction. Tout portait à croire que l’assuré craignait une nouvelle bagarre. Ainsi le fait que D.__ était resté trente minutes environ sur le parking devait donner à penser qu’il n’entendait pas en rester là. La circonstance que l’assuré avait auparavant jugé utile d’appeler un ami pour venir le chercher près d’une porte à l’arrière de la discothèque témoigne des craintes qu’il éprouvait sur les intentions de D.__. Or, une fois arrivé près de la voiture de G.__, au lieu de chercher à éviter la confrontation, il est allé à la rencontre de D.__, se plaçant ainsi dans la zone de danger exclue de la couverture d’assurance.

 

Lien de causalité adéquate

Il y a une interruption du rapport de causalité adéquate si une autre cause, qu’il s’agisse d’une force naturelle ou du comportement d’une autre personne, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l’on ne pouvait pas s’y attendre; l’imprévisibilité d’un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate; il faut encore que cet acte ait une importance telle qu’il s’impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener et notamment le comportement en discussion (ATF 134 V 340 consid. 6.2 p. 349; 133 V 14 consid. 10.2 p. 23; 130 III 182 consid. 5.4 p. 188). Par exemple, le Tribunal fédéral a jugé que lorsqu’un membre d’une famille (en l’espèce, la fille) entre dans la chambre d’un autre (en l’occurrence, le père) en insistant pour avoir une discussion orageuse, on ne pouvait s’attendre, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience en générale de la vie, à ce que l’autre réagisse en tirant sur lui avec un revolver. Dans un tel cas, le lien de causalité adéquate entre le comportement reproché à la victime et le résultat survenu a été nié (arrêt 8C_363/2010 du 29 mars 2011 et, concernant la même affaire, au plan civil, arrêt 4A_66/2010 du 27 mai 2010).

Dans le cas présent, il n’y a pas d’éléments comparables à ceux de ces deux arrêts. Sans doute, l’assuré ne devait-il pas s’attendre à ce que D.__ tire plusieurs coups de feu dans sa direction. Mais cela ne suffit pas pour admettre une interruption du lien de causalité adéquate entre l’attitude de l’assuré et l’atteinte dont il était victime.

Lorsqu’il est venu à la rencontre de l’assuré, D.__, qui avait attendu trente minutes à l’extérieur et qui était accompagné d’un autre homme (« un costaud » selon ce même témoin) était visiblement résolu à en découdre. Dans un tel contexte l’assuré ne pouvait pas totalement exclure que D.__ se serve d’une arme dangereuse – quelle qu’elle fût – qui soit propre à entraîner des lésions allant de par leur gravité au-delà de celles qui résultent de simples voies de fait.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_153/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jB02x0

 

 

8C_929/2015 (f) du 05.12.2016 – Troubles psychiques et causalité adéquate / Casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route / Accident de gravité moyenne à la limite des cas grave / IPAI pour séquelles psychiques et état antérieur

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_929/2015 (f) du 05.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jeT54s

 

Troubles psychiques et causalité adéquate – 6 LAA

Casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route

Accident de gravité moyenne à la limite des cas grave – Choc auto-vélo – Assurée projetée à 22 mètres

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) pour séquelles psychiques et état antérieur – 24 LAA – 25 LAA

 

Assurée qui a été victime d’un accident de la circulation le 17.09.2002 : alors qu’elle circulait à bicyclette, l’intéressée, qui circulait entre deux voies de direction, s’est déplacée sur la droite pour une raison inconnue et l’automobile qui la suivait a heurté l’arrière du vélo. Le point de chute de l’assurée se situait à 22 mètres environ du lieu de l’impact. Les médecins du service des urgences ont diagnostiqué une large plaie de type dégantage située au niveau de la partie postéro-latérale du mollet gauche, associée à une fracture du péroné. Dans un rapport du 17.02.2003, un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie a indiqué l’existence d’un état dépressif consécutif à l’accident.

L’assurance-accidents supprimé le droit de l’assurée à des prestations d’assurance (frais de traitement et indemnité journalière) à compter du 31.01.2010. En outre, elle a nié le droit de l’intéressée à une rente d’invalidité et lui a alloué une IPAI fondée sur un taux de 20% en raison des séquelles au membre inférieur gauche. Elle a nié l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident et les troubles psychiques présentés. Quant aux séquelles physiques de l’accident, elles n’entraînaient pas de limitation dans l’activité professionnelle exercée par l’intéressée avant son chômage.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/850/2015 – consultable ici : http://bit.ly/2jvpZi6)

Par jugement du 11.11.2015, admission du recours par le tribunal cantonal. La cour a reconnu le droit de l’assurée à une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 100% à compter du 01.02.2010, ainsi qu’à une IPAI fondée sur un taux de 93%, sous déduction de l’indemnité d’un taux de 20% déjà allouée.

 

TF

 

Classification de l’accident – Accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves

Pour procéder à la classification de l’accident dans l’une des trois catégories prévues par la jurisprudence, il faut uniquement se fonder, d’un point de vue objectif, sur l’événement accidentel lui-même. Sont déterminantes les forces générées par l’accident et non pas les conséquences qui en résultent. La gravité des lésions subies – qui constitue l’un des critères objectifs pour juger du caractère adéquat du lien de causalité – ne doit être prise en considération à ce stade de l’examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l’accident (SVR 2013 UV n° 3 p. 7, 8C_398/2012, consid. 5.2; SVR 2012 UV n° 23 p. 83, 8C_435/2011, consid. 4.2; arrêt 8C_818/2015 du 15 novembre 2016 consid. 5.1).

Si l’on se réfère à la casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route (véhicule automobile ou cyclomoteur), les cas classés dans la catégorie des accidents de gravité moyenne ont en commun le fait que la collision s’est produite alors que le véhicule impliqué circulait à une vitesse plutôt modérée (voir par exemple les arrêts 8C_62/2013 du 11 septembre 2013 consid. 7.3; 8C_816/2012 du 4 septembre 2013; 8C_530/2007 du 10 juin 2008). En revanche, l’accident subi par un cycliste violemment percuté par une voiture à une intersection et projeté à 30 mètres de la zone de choc a été classé dans la catégorie des accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves (arrêt 8C_818/2015, déjà cité, consid. 5.3).

En l’espèce, les éléments recueillis par la gendarmerie permettent de retenir que le heurt a été très violent. Il est en effet établi que la conductrice du véhicule circulait à une vitesse de 60 à 70 km/h au moment où elle a heurté l’arrière du vélo de l’assurée. En outre, celle-ci a été projetée à 22 mètres environ de la zone de choc. A cet égard, il y a lieu de dénier toute pertinence pour l’appréciation de la gravité de l’accident à l’argument de l’assurance-accidents, selon lequel une telle distance est une réaction physique habituelle en cas d’impact entre une voiture et un cycliste lorsque celui-ci ne rencontre aucun obstacle susceptible de le stopper. Quant aux lésions physiques provoquées par l’accident, elle ne permettent pas de nier que les forces en jeu lors de la collision étaient importantes.

Au regard de la violence du choc, c’est donc à bon droit que les juges cantonaux ont rangé l’événement du 17.09.2002 parmi les accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves.

 

Caractère particulièrement impressionnant de l’accident laissé indécis

En présence d’un événement accidentel à la limite des cas graves, un seul critère parmi ceux déterminants peut être suffisant pour conclure à l’existence d’un lien de causalité adéquate entre des troubles psychiques et un accident (ATF 115 V 133 consid. 6 c/bb p. 140; 403 consid. 5 c/bb p. 409). C’est pourquoi, en l’espèce, on peut laisser indécis le point de savoir si, au regard de la jurisprudence précitée et compte tenu de l’amnésie présentée par l’assurée, le critère du caractère impressionnant de l’accident est réalisé.

 

Critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques

Les lésions subies par l’assurée ne se limitent pas à l’état cicatriciel, d’ailleurs important, qui subsiste dans la partie postérieure de la jambe gauche. Il subsiste en outre des séquelles neurologiques avec troubles de la sensibilité affectant plusieurs nerfs, à savoir le nerf sural, le musculo-cutané et le nerf saphène interne gauche. Ces séquelles ont pour effet de diminuer la résistance de la jambe gauche à l’effort et d’entraîner de multiples limitations. Qui plus est, les experts ont mis en évidence une hyposmie partielle gauche en lien avec l’accident. Cela étant, il n’y a pas lieu de mettre en cause le point de vue des premiers juges selon lequel le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques est en l’occurrence réalisé. En présence d’un accident à la limite des cas graves, cela suffit pour reconnaître le caractère adéquat du lien de causalité en ce qui concerne les troubles psychiques de l’assurée.

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) pour séquelles psychiques et état antérieur

Selon l’art. 24 LAA, l’assuré qui souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique par suite de l’accident a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité (al. 1). L’indemnité est fixée en même temps que la rente d’invalidité ou, si l’assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2).

Aux termes de l’art. 25 al. 2 LAA, le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l’indemnité. Il a fait usage de cette délégation de compétence à l’art. 36 OLAA (RS 832.802). Selon l’al. 2 de cette disposition réglementaire, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est calculée selon les directives figurant à l’annexe 3 à l’OLAA. Cette annexe comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b p. 32, 209 consid. 4a/bb p. 210; 113 V 218 consid. 2a p. 219) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent. Pour les atteintes à l’intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, compte tenu de la gravité de l’atteinte (ch. 1 al. 2). La Division médicale de la CNA a établi des tables d’indemnisation en vue d’une évaluation plus affinée de certaines atteintes (Indemnisation des atteintes à l’intégrité selon la LAA). Ces tables n’ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s’agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l’égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l’annexe 3 à l’OLAA (ATF 124 V 209 consid. 4a/cc p. 211; 116 V 156 consid. 3a p. 157; RAMA 1998 n° U 296 p. 235, U 245/96 consid. 2a).

En l’espèce, les experts ont fixé à 23% le taux de l’atteinte à l’intégrité en relation avec les séquelles somatiques de l’accident. Ils ont indiqué que les séquelles psychiques, qualifiées de modérées à sévères, ouvrent droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 70%. Cependant, étant donné que l’atteinte psychique est influencée par un état antérieur, à savoir un trouble de la personnalité émotionnellement labile, type borderline, décompensé, les experts ont pondéré ce taux à raison de 50% pour conclure à un taux de 35% en ce qui concerne les séquelles psychiques et à un taux global de 58% (23% + 35%). De son côté, la cour cantonale a considéré que la réduction de 50% opérée sur le taux d’atteinte psychique de 70% en raison du trouble de la personnalité préexistant n’était pas justifiée.

Selon la table 19 des indemnisations des atteintes à l’intégrité selon la LAA, il n’est pas toujours aisé d’opérer une césure entre troubles somatiques et psychiques. Si, à la suite d’un polytraumatisme, des troubles fonctionnels d’étiologie somatique et des douleurs chroniques persistent, les troubles psychiques que celles-ci ont induits sont pris en compte globalement dans l’évaluation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité. Toutefois, dans les éventualités où des troubles psychiques de nature différente sont constatés, une évaluation psychiatrique est nécessaire pour déterminer si une atteinte à l’intégrité psychique supplémentaire est présente qui n’a pas été prise en compte dans l’estimation de base. Si les symptômes psychiques ne sont, en soi, pas spécifiques, certains diagnostics, comme l’état de stress post-traumatique séquellaires à un accident, sont considérés comme tels.

En l’occurrence, on ne saurait dès lors critiquer le point de vue des premiers juges en tant qu’ils ont additionné les atteintes en relation avec les troubles somatiques, d’une part, et psychiques, d’autre part. En revanche, dans la mesure où elle a nié – à juste titre – l’existence d’un lien de causalité entre l’accident et le trouble de la personnalité émotionnellement labile, type borderline, décompensé, la juridiction précédente n’était pas fondée à s’écarter du taux de 35% attesté par les experts en relation avec les séquelles psychiques de l’accident. Le taux global de l’atteinte à l’intégrité doit dès lors être fixé à 58% (23% + 35%) au lieu de 93%. Dans cette mesure, le recours se révèle partiellement bien fondé.

 

Le TF accepte partiellement le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_929/2015 consultable ici : http://bit.ly/2jeT54s

 

 

8C_14/2016 (f) du 21.12.2016 – Montant de l’indemnité journalière – 23 al. 8 OLAA / Rechute comme indépendant / Détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante – 23 RAVS / Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux – 22 al. 2 let. c OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_14/2016 (f) du 21.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jFq9WT

 

Accident en 1972 – LAMA – Rechute comme indépendant en 2014

Montant de l’indemnité journalière – 23 al. 8 OLAA

Détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante – 23 RAVS / Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux – 22 al. 2 let. c OLAA

 

Assuré qui a été victime d’un accident de la circulation en 1972, pris en charge par la CNA. Une rente d’invalidité a été allouée, fondée sur une incapacité de gain de 25% dès le 02.12.1973, de 50% à compter du 01.03.1996 et de 62% à partir du 01.03.2007. L’assuré bénéficie en outre d’une demi-rente de l’assurance-invalidité depuis le 01.05.1994. Entre-temps, l’intéressé a entrepris un apprentissage de menuisier et a obtenu un CFC en 1978. Il par la suite a fondé une entreprise en raison individuelle et a travaillé en qualité de menuisier-charpentier indépendant.

La CNA a pris en charge la rechute annoncée le 18.02.2014. De l’extrait du compte individuel, il est fait état d’un revenu annuel d’indépendant de 9’333 fr. pour l’année 2013. De son côté, l’assuré a fait valoir un gain mensuel net de 5’669 fr. La CNA a informé l’intéressé qu’il avait droit à une indemnité journalière d’un montant de 20 fr. 50 (9’333 fr. x 80 % : 365 jours) à compter du 18.02.2014, confirmé sur opposition.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 18.11.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 23 al. 8 OLAA, le salaire déterminant en cas de rechute est celui que l’assuré a reçu juste avant celle-ci; il ne saurait toutefois être inférieur à 10% du montant maximum du gain journalier assuré, sauf pour les bénéficiaires de rentes de l’assurance sociale. Dans ce sens, l’art. 21 al. 3, 2ème phrase, LAA prévoit qu’en cas de rechute et de séquelles tardives survenues après la fixation de la rente, le bénéficiaire de la rente dont le gain diminue a droit à une indemnité journalière dont le montant est calculé sur la base du dernier gain réalisé avant le nouveau traitement médical. Cette disposition permet au titulaire d’une rente partielle de l’assurance-accidents qui a mis en valeur sa capacité résiduelle de gain de percevoir, outre la rente allouée initialement, une indemnité journalière calculée sur la base de son dernier revenu avant la rechute ou la séquelle tardive (ATF 139 V 514 consid. 3.2 p. 518; arrêt 8C_1023/2008 du 1 er décembre 2009 consid. 5.4). En outre, la jurisprudence considère que le terme de « salaire » mentionné à l’art. 23 al. 8 OLAA permet de tenir compte également d’un revenu d’indépendant perçu juste avant la rechute (SVR 2010 UV n° 15 p. 57, 8C_898/2008, consid. 4.2).

Sous réserve de certaines dérogations énumérées sous lettres a à d, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 22 al. 2, 1ère phrase, OLAA). Pour la détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante, les caisses de compensation se fondent sur des données fiscales qui les lient (art. 23 RAVS). Toutefois, pour les membres de la famille de l’employeur travaillant dans l’entreprise, les associés, les actionnaires ou les membres de sociétés coopératives, il est au moins tenu compte du salaire correspondant aux usages professionnels et locaux (art. 22 al. 2 let. c OLAA). Le but de cette réglementation est d’éviter que les assurés qui se trouvent dans un rapport particulier avec leur employeur et, de ce fait, perçoivent un gain inférieur à celui qu’ils pourraient réaliser normalement sur le marché du travail, ne soient désavantagés lorsqu’ils ont droit à des prestations de l’assurance-accidents (SVR 2007 UV n° 39 p. 131, 8C_88/2007, consid. 2; arrêt 8C_893/2011 du 31 mai 2012 consid. 2).

 

La cour cantonale a fixé le gain assuré déterminant pour le calcul de l’indemnité journalière compte tenu du gain d’indépendant réalisé par l’assuré juste avant la survenance de l’incapacité entière de travail. Retenant que l’assuré ne se trouve pas dans un rapport particulier avec un employeur, puisqu’il est lui-même son propre employeur, elle a considéré qu’il ne pouvait pas se prévaloir de la dérogation prévue à l’art. 22 al. 2 let. c OLAA pour obtenir de l’assureur-accidents l’indemnisation des frais fixes et des autres charges d’exploitation conduisant à un revenu inférieur au gain réalisé, conformément aux usages professionnels, par un menuisier occupé à 50%.

 

Selon le TF, le gain assuré déterminant pour le calcul de l’indemnité journalière se fondant sur le gain réalisé par l’assuré en qualité d’indépendant, avant la survenance de l’incapacité de travail n’est pas affecté par des frais supplémentaires de remplacement ou par une éventuelle augmentation des autres charges d’exploitation liée à l’incapacité entière de travail.

Cela étant, l’assuré n’apparaît pas désavantagé par son statut d’indépendant au moment de la rechute. Pour ce motif déjà, sa situation n’a ainsi rien de comparable avec celle des assurés qui se trouvent dans un rapport particulier avec leur employeur et, de ce fait, perçoivent un gain inférieur à celui qu’ils pourraient réaliser normalement sur le marché du travail. Au demeurant, si le gain réalisé par l’intéressé dans son activité d’indépendant est modeste, cela est dû au fait que cette activité est réduite en raison de l’invalidité, laquelle ouvre d’ailleurs droit à une rente de l’assurance-accidents qui, elle, n’est pas calculée en fonction du revenu d’indépendant.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_14/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jFq9WT

 

 

9C_480/2016 (f) du 10.11.2016 – Revenu sans invalidité – Classification NOGA et ESS – 16 LPGA / Durée usuelle du travail hebdomadaire selon les statistiques pour le revenu sans invalidité et pour le revenu d’invalide

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_480/2016 (f) du 10.11.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jHHpbw

 

Revenu sans invalidité – Classification NOGA et ESS / 16 LPGA

Durée usuelle du travail hebdomadaire selon les statistiques pour le revenu sans invalidité et pour le revenu d’invalide

 

Assurée, travaillant comme « merchandiser » à temps partiel, est totalement incapable d’exercer son activité depuis le 08.02.2006 en raison de problèmes de dos et d’une tension artérielle élevée.

 

TF

Classification NOGA et ESS

Le jugement cantonal retient que l’assurée a travaillé huit ans comme manutentionnaire à temps partiel dans un grand magasin d’alimentation et que le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les femmes travaillant dans le secteur du commerce de gros et des intermédiaires du commerce (ligne 51 de l’ESS). L’office recourant soutient que cette constatation est manifestement inexacte, car l’assurée aurait travaillé en dernier lieu comme « merchandiser », c’est-à-dire comme démonstratrice de vente dans le commerce de détail, une activité qui correspondrait à la catégorie 52 de l’ESS.

L’ESS se fonde sur la Nomenclature générale des activités économiques (NOGA) pour classer les entreprises en fonction de leur activité économique. Compte tenu de la période pour laquelle doit être déterminé le revenu sans invalidité, les données pertinentes sont celles de la NOGA 2002 et l’ESS 2006. Le jugement attaqué se réfère à la ligne 51, « commerce de gros, intermédiaires du commerce ». Celle-ci comprend la revente d’articles et de produits à des détaillants, des usagers industriels et commerciaux, des collectivités et des utilisateurs professionnels, ou à d’autres grossistes et intermédiaires. Il s’agit en particulier de l’activité des négociants en gros, des courtiers en marchandise, des commissionnaires, des acheteurs itinérants et de toutes les activités de personnes qui mettent en contact des acheteurs et des vendeurs (OFS, Nomenclature générale des activités économiques (NOGA) : notes explicatives, Neuchâtel 2002, p. 114). Pour sa part, l’office recourant fait valoir que la catégorie 52, celle du commerce de détail, est applicable. Cette division comprend la revente au public de biens destinés à la consommation des particuliers ou des ménagers, par des magasins, des maisons de vente par correspondance, des représentants et des marchands ambulants (OFS, NOGA: notes explicatives, op. cit., p. 126).

Il est vrai, comme le relève l’office recourant, que la demande de prestations fait état d’une activité de « merchandiser », qui correspond également aux informations données par l’employeur. L’administration fait toutefois erreur lorsqu’elle soutient que cette activité était celle d’une démonstratrice de vente. Comme il ressort de différentes données recueillies par l’office recourant, l’assurée avait effectivement pour tâches de réceptionner des palettes de marchandise, de mettre en place la marchandise dans les rayons du magasin d’alimentation et d’assurer le réapprovisionnement des rayons et la gestion des stocks, à savoir une activité qui correspond largement à celle de manutentionnaire.

Par ailleurs, et cela est décisif, l’autorité judiciaire cantonale pouvait retenir que cette activité correspondait au secteur « commerce de gros, intermédiaires du commerce » (catégorie 51), et non à celui du commerce de détail (catégorie 52), dès lors que l’assurée, qui exerçait son activité en partie à l’intérieur d’un magasin d’alimentation, mais pour le compte de diverses sociétés d’intermédiaires ou de commerce de gros, n’était pas employée par un commerce de détail et n’effectuait aucune vente au public. Une telle activité est englobée dans celle de commerce de gros qui comprend aussi la livraison et la mise en place des marchandises pour le compte du commerçant de gros (OFS, NOGA: notes explicatives, op. cit., p. 114).

 

Durée usuelle du travail hebdomadaire selon les statistiques

L’office recourant conteste la durée du travail hebdomadaire retenue par la cour cantonale dans son calcul du revenu sans invalidité. Il soutient que l’horaire de travail applicable est de 41,7 heures, correspondant à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2006.

Lorsqu’ils ont déterminé le salaire sans invalidité, les premiers juges se sont référés à juste titre à la durée usuelle de la semaine dans le commerce de gros, à savoir le secteur où l’assurée aurait exercé une activité si elle n’avait pas été invalide (42 heures par semaine en 2006, cf. OFS, Durée normale du travail dans les entreprises selon la division économique (NOGA 2008) en heures par semaine, période 1990-2015, Neuchâtel 2016, tableau T.03.02.03.01.04.01, ligne 46).

Il était également exact de se référer à la catégorie « total secteur privé » (41,7 heures par semaine, cf. OFS, Durée normale du travail dans les entreprises selon la division économique (NOGA 2008) en heures par semaine, op. cit., tableau T.03.02.03.01.04.01, total) pour évaluer le revenu d’invalide exigible de l’assurée, dans la mesure où le revenu de référence était celui des femmes effectuant des tâches et répétitives dans le secteur privé. En règle générale, lorsque le revenu d’invalide est calculé sur la base de l’ESS, le revenu de référence est en effet la moyenne usuelle dans toutes les entreprises du secteur privé, et non celle d’une branche économique en particulier (cf. arrêt 8C_710/2014 du 12 mai 2015 consid. 4.3 et les références citées), de telle sorte que la durée hebdomadaire de référence doit également être la moyenne usuelle du secteur privé (comp. arrêt 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1).

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_480/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jHHpbw

 

 

8C_61/2016 (f) du 19.12.2016 – Causalité naturelle – rechute 14 ans après l’accident – 6 LAA – 11 OLAA / Déchirure de la coiffe des rotateurs – Preuve d’une lésion assimilée – 9 al. 2 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_61/2016 (f) du 19.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jFNBTB

 

Causalité naturelle – rechute 14 ans après l’accident – 6 LAA – 11 OLAA

Déchirure de la coiffe des rotateurs – Preuve d’une lésion assimilée – 9 al. 2 OLAA

 

Assuré, médecin spécialiste en allergologie et immunologie clinique, travaille en qualité de médecin-assistant auprès du service de médecine interne de l’Hôpital. Le 08.02.1998, il est tombé sur son épaule gauche alors qu’il pratiquait le ski. Après avoir consulté le docteur C.__, spécialiste en chirurgie à l’Hôpital, l’assuré a continué son travail sans interruption.

Le 24.01.2012, l’assuré a consulté un spécialiste en chirurgie orthopédique et médecin traitant. L’IRM de l’épaule gauche a objectivé, entre autres, une désinsertion de l’extrémité distale du supra-épineux avec liquide dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne. Après expertise médicale, l’assurance-accidents a supprimé le droit de l’assuré à des prestations avec effet au 08.04.1998.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 56/14 – 114/2015 – consultable ici : http://bit.ly/2jFP8cj)

Par jugement du 21.11.2015, acceptation du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Causalité naturelle – Rechute

Le droit à des prestations découlant d’un accident assuré suppose d’abord, entre l’événement dommageable de caractère accidentel et l’atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu’il y a lieu d’admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière (ATF 129 V 177 consid. 3.1 p. 181; 402 consid. 4.3.1 p. 406; 119 V 335 consid. 1 p. 337; 118 V 286 consid. 1b p. 289 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec l’événement assuré. Les prestations d’assurance sont donc également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives (art. 11 OLAA). Selon la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu’elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c’est la même maladie qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu’une atteinte apparemment guérie produit, au cours d’un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 137 consid. 3a p. 138 et les références). A cet égard, la jurisprudence considère que plus le temps écoulé entre l’accident et la manifestation de l’affection est long, et plus les exigences quant à la preuve, au degré de la vraisemblance prépondérante, du rapport de causalité naturelle doivent être sévères (RAMA 1997 n° U 275 p. 191, U 93/96, consid.1c; arrêt 8C_796/2013 du 30 septembre 2014 consid. 3.2).

 

Lésion assimilée à un accident

Aux termes de l’art. 6 al. 2 LAA, le Conseil fédéral peut inclure dans l’assurance-accidents des lésions corporelles qui sont semblables aux conséquences d’un accident. En vertu de cette délégation de compétence, il a édicté l’art. 9 al. 2 OLAA, selon lequel certaines lésions corporelles sont assimilées à un accident même si elles ne sont pas causées par un facteur extérieur de caractère extraordinaire, pour autant qu’elles ne soient pas manifestement imputables à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs.

La liste exhaustive de l’art. 9 al. 2 OLAA mentionne les déchirures de tendons (let. f). La jurisprudence considère qu’une déchirure de la coiffe des rotateurs peut être assimilée à une déchirure des tendons au sens de l’art. 9 al. 2 let. f OLAA, lorsque sont réunis tous les éléments caractéristiques d’un accident à l’exception du facteur extérieur de caractère extraordinaire (ATF 123 V 43 consid. 2b p. 44 s.).

 

En l’espèce, les examens pratiqués par le radiologue et le neurologue ont mis en évidence une déchirure partielle de la coiffe des rotateurs touchant les tendons sus-épineux et sous-scapulaire, accompagnée d’une lésion du plexus brachial. Cette lésion constitue une déchirure tendineuse assimilée à un accident au sens de l’art. 9 al. 2 let. f OLAA (ATF 123 V 43 consid. 2b p. 44 s.). Néanmoins, selon la jurisprudence, il y a lieu de conclure à une lésion exclusivement maladive ou dégénérative si la lésion corporelle (assimilée) ne peut pas être rattachée à l’accident en cause (arrêts 8C_763/2015 du 11 juillet 2016 consid. 3.3; 8C_698/2007 du 27 octobre 2008 consid. 4.2; 8C_357/2007 du 31 janvier 2008 consid. 3.2).

De l’avis de l’expert F.___, spécialiste en chirurgie orthopédique mandaté par l’assurance-accidents, l’accident du 08.02.1998 était – et encore seulement d’une manière éventuelle – à l’origine d’une simple contusion de l’épaule gauche. En effet, elle n’est pas de nature à établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que la déchirure partielle de la coiffe des rotateurs touchant les tendons sus-épineux et sous-scapulaire objectivée en 2012 est apparue lors de la chute à ski survenue le 08.02.1998. Dans la mesure où cette lésion corporelle (assimilée) ne peut pas être rattachée à l’accident en cause, il y a lieu de conclure à l’existence d’une lésion exclusivement maladive ou dégénérative. L’expert F.___ a clairement expliqué les motifs pour lesquels il y avait eu une récupération rapide de la fonction (donc des amplitudes) de l’épaule gauche, dans les heures ou les jours suivant l’accident. Cela étant, il n’y a pas lieu de s’écarter du point de vue de cet expert, selon lequel le status quo ante / sine a été atteint au plus tard deux mois après l’accident.

 

Le TF accepte le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_61/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jFNBTB

 

 

8C_56/2016 (f) du 19.12.2016 – Causalité adéquate / Notion de « lésions traumatiques objectivables » / Clarté d’un rapport médical – Valeur probante du rapport médical – IRM fonctionnelle

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_56/2016 (f) du 19.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2iQRT6n

 

Causalité adéquate selon 115 V 133 – Accident de gravité moyenne – Cumul de 3 critères sur les 7

Notion de « lésions traumatiques objectivables » – 6 LAA

Preuve de l’existence de lésions cérébrales post-traumatiques

Clarté d’un rapport médical – Valeur probante du rapport médical – IRM fonctionnelle

 

TF

Lésions traumatiques objectivables

On ne peut parler de lésions traumatiques objectivables d’un point de vue organique que lorsque les résultats obtenus sont confirmés par des investigations réalisées au moyen d’appareils diagnostiques ou d’imagerie et que les méthodes utilisées sont reconnues scientifiquement (ATF 138 V 248 consid. 5.1 p. 251; SVR 2012 UV n° 5 p. 17). Par ailleurs, la question de savoir si une atteinte à la santé se trouve en lien de causalité naturelle avec un événement accidentel doit être résolue au degré de la vraisemblance prépondérante et s’apprécie avant tout sur la base d’évaluations médicales auxquelles on peut attribuer un caractère probant suffisant selon la jurisprudence (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352).

 

Clarté d’un rapport médical – Valeur probante du rapport médical – IRM fonctionnelle

Le rapport du professeur E.__ se présente sous une forme qui n’est pas conforme aux exigences jurisprudentielles posées en matière de valeur probante des documents médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352), et manque singulièrement de clarté. La partie consacrée à l’interprétation des clichés IRM n’est pas rédigée en des termes intelligibles pour un non spécialiste. Les résultats obtenus sont rapportés de manière brute, sans synthèse ni explication en quoi ceux-ci constituent une indication caractéristique d’une atteinte traumatique. Quant aux considérations émises dans les conclusions, elles ne comportent en tout état de cause aucune discussion motivée et accessible au juge, propre à démontrer, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’assurée présente des lésions cérébrales causées par l’accident assuré (à l’exclusion d’autres facteurs) et que de surcroît, ces lésions sont responsables des troubles neuropsychologiques dont elle se plaint.

Ensuite, il est difficile de distinguer quelles constatations ont été décelées au moyen de l’imagerie conventionnelle et quelles autres ont été interprétées par le biais de l’imagerie non conventionnelle. On peut cependant remarquer qu’une grande partie d’entre elles se fondent sur des examens de la deuxième catégorie (à savoir l’imagerie associant la technique dite de tenseur de diffusion utilisées dans l’IRM fonctionnelle), dont le Tribunal fédéral a déjà maintes fois rappelé qu’ils ne constituent pas une méthode diagnostique éprouvée par la science médicale pour établir un rapport de causalité entre des symptômes présentés par un assuré et un traumatisme par accélération cervicale ou un traumatisme équivalent (ATF 134 V 231 consid. 5.3 p. 234).

Il convient de relever que le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de formuler des remarques semblables dans une affaire analogue qui concernait également un rapport du professeur E.__ (cf. arrêt 8C_720/2012 du 15 octobre 2013 consid. 5.1 et 5.2). Compte tenu de ce qui précède, on ne peut pas non plus, en l’espèce, déduire du rapport du professeur E.__ l’existence d’une atteinte organique d’origine accidentelle.

 

Preuve de l’existence de lésions cérébrales post-traumatiques

Le docteur K.__, spécialiste FMH en neurologie ainsi qu’en psychiatrie et psychothérapie au service de compétence de médecine des assurances de l’assureur-accidents, arrive à la conclusion qu’en l’absence de lésion axonale diffuse, les constats minimes des gyrus ne peuvent être que possiblement en relation de causalité avec l’événement du 11.06.2007. Ce point de vue corrobore l’avis des médecins ayant pratiqué l’IRM, lesquels ont considéré que ces atteintes étaient conciliables (« vereinbar ») avec l’accident, ce qui signifie qu’une relation de causalité relève tout au plus du domaine du possible. Cela ne suffit pas, au degré de vraisemblance prépondérante, pour admettre l’existence d’une telle relation de causalité. Le docteur K.__ rappelle également que l’assurée n’a pas perdu connaissance suite à son accident et n’a pas reçu de soins en raison de problèmes d’ordre neurologique à la suite de ce dernier. Le médecin en conclut qu’il s’agit vraisemblablement d’une atteinte d’ordre maladive plutôt que d’une atteinte accidentelle.

Au surplus, le docteur K.__ a relevé que, même dans l’hypothèse où les constats minimes des gyrus frontaux devaient être considérés comme les conséquences d’une lésion traumatique du cerveau survenue le 11.06.2007, ces atteintes ne pourraient nullement expliquer, d’un point de vue neurologique, les troubles cliniques, les maux de tête ou les troubles épileptiformes présentés par l’assurée.

Le TF se rallie au point de vue de la juridiction cantonale, selon lequel l’assurée ne présente pas de séquelles organiques objectivables en relation de causalité naturelle avec l’accident.

 

Lien de causalité adéquate selon 115 V 133 – Accident de gravité moyenne – Cumul de 3 critères sur les 7

Dans le cas d’accidents classifié dans la catégorie des accidents de gravité moyenne, sans être à la limite des accidents graves ni des accidents de peu de gravité, il faut un cumul de trois critères sur les sept ou au moins que l’un des critères retenus se soit manifesté de manière particulièrement marquante pour l’accident pour pouvoir admettre le lien de causalité adéquate (par. ex. arrêt 8C_434/2013 du 7 mai 2014 consid. 7.1 et les arrêts cités).

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_56/2016 consultable ici : http://bit.ly/2iQRT6n

 

 

9C_127/2016 (f) du 09.11.2016 – Expertise médicale judiciaire / Remise en cause par les parties et non par le juge du diagnostic retenu

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_127/2016 (f) du 09.11.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jTjfdA

 

Expertise médicale judiciaire

Remise en cause par les parties et non par le juge du diagnostic retenu

 

TF

Il n’appartient pas au juge de remettre en cause le diagnostic retenu par un médecin et de poser de son propre chef des conclusions qui relèvent de la science et des tâches du corps médical. Il convient bien plutôt pour la partie (en l’occurrence, l’office AI) qui entend remettre en cause le bien-fondé du point de vue médical sur lequel se sont fondées les autorités judiciaires de mettre en évidence des éléments objectivement vérifiables – de nature notamment clinique ou diagnostique – qui auraient été ignorés dans le cadre de l’appréciation et qui seraient suffisamment pertinents.

En ce qui concerne les critiques relatives à l’importance du trouble dépressif, l’office recourant fait grief aux premiers juges d’avoir attaché une importance trop grande à cette affection. L’appréciation de la sévérité du trouble admise par l’expert est toutefois un débat qui relève typiquement de la compétence du corps médical et dans lequel le juge ne saurait en principe s’immiscer. En l’absence d’autres explications médicales permettant d’éclairer sous un jour différent le point de l’expert, il n’y a pas lieu de s’écarter de son avis (cf. arrêt 9C_855/2015 du 2 mai 2016 consid. 4.3). Quoiqu’en dise par ailleurs l’office recourant, l’expert a retenu les diagnostics psychiques en se fondant sur ses propres observations et non pas seulement sur les plaintes rapportées par l’assuré. Il a en outre détaillé quels traitements étaient effectivement suivis régulièrement par l’assuré et mentionné que celui-ci prenait en tous cas les médicaments « véritablement nécessaires et indiqués ».

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_127/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jTjfdA

 

 

CSSS-N : Régler rapidement la question de la surveillance des assurés

CSSS-N : Régler rapidement la question de la surveillance des assurés

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.01.2017 consultable ici : http://bit.ly/2jpppnZ

 

La Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national soutient son homologue du Conseil des Etats dans sa volonté d’instaurer rapidement une base légale précise concernant la surveillance des assurés.

 

Dans un arrêt du 18 octobre 2016, la Cour européenne des droits de l’homme déplore l’absence d’une base légale précise pour la surveillance des assurés en Suisse. Estimant elle aussi qu’il y a lieu de combler cette lacune au plus vite, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) s’est ralliée sans opposition à la décision de son homologue du Conseil des Etats, prise le 8 novembre dernier, d’élaborer une initiative de commission (16.479  Iv. pa. CSSS-E «Base légale pour la surveillance des assurés»). Dans le meilleur des cas, les conseils pourront adopter la disposition en question à la session d’hiver 2017.

 

Voir également :

Arrêt de la CrEDH Vukota-Bojić c. Suisse (en) du 18.10.2016 – Surveillance illicite d’une victime d’accident de la route par une compagnie d’assurances contraire à son droit à la vie privée

La Confédération veut autoriser les assurances à surveiller leurs assurés

Base légale pour la surveillance des assurés

 

 

Rejet par le National du postulat 14.4256 « Méthode de calcul du taux d’invalidité. Faire en sorte que les personnes à bas revenus ne soient plus pénalisées »

Rejet par le National du postulat 14.4256 « Méthode de calcul du taux d’invalidité. Faire en sorte que les personnes à bas revenus ne soient plus pénalisées »

 

Postulat Schenker 14.4256 « Méthode de calcul du taux d’invalidité. Faire en sorte que les personnes à bas revenus ne soient plus pénalisées » consultable ici : http://bit.ly/2hhjSMp

Débat du 14.12.2016 consultable ici : http://bit.ly/2h1UBKk

 

Selon le Conseil fédéral, il n’y a pas de préjudices pour les personnes à bas ou moyens revenus et le système actuel garantit l’égalité et l’équité pour tous les assurés, quel que soit leur revenu. Dans les faits, on constate que si les personnes dont le revenu sans invalidité est bas atteignent plus vite un taux d’invalidité ouvrant le droit à la rente, ces mêmes personnes obtiennent aussi plus facilement, avec la mise en œuvre de mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité, une capacité de gain qui exclut l’octroi d’une rente. Si on regarde le marché du travail, on constate effectivement qu’il est souvent plus facile, pour des personnes au revenu modeste, de trouver un nouvel emploi qui permette de réaliser un revenu similaire, malgré l’atteinte à la santé.

Le conseiller fédéral Berset a précisé que les assurances sociales, dans l’optique du Conseil fédéral, n’ont pas pour but de gommer les inégalités salariales que l’on peut trouver sur le marché de l’emploi.

Il a ajouté que le Conseil fédéral est en train de travailler au développement continu de l’assurance-invalidité. Les travaux ont notamment été engagés à la suite du rejet par le Parlement de la révision 6b de l’assurance-invalidité, ainsi qu’à la suite de la volonté manifestée par le Parlement d’être confronté à nouveau à de nouvelles propositions à ce sujet. Dans ce développement continu de l’assurance-invalidité, le Conseil fédéral souhaite optimiser encore le système.

L’introduction d’un système de rentes linéaires devrait probablement permettre de mieux tenir compte du taux d’invalidité et donc aussi des conséquences économiques des atteintes à la santé dont souffrent certains assurés, et ainsi de pouvoir encore améliorer la situation des personnes concernées.

Le Conseil national a rejeté le postulat.

 

 

 

Clôture de la table ronde sur l’amiante : un soutien rapide pour les victimes

Clôture de la table ronde sur l’amiante : un soutien rapide pour les victimes

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 19.12.2016 consultable ici : http://bit.ly/2hLzBXL

 

Les personnes souffrant d’un mésothéliome provoqué par l’amiante et leurs proches devraient bénéficier rapidement d’un soutien financier et d’une prise en charge psychologique. La table ronde mise sur pied par le conseiller fédéral Alain Berset et présidée par l’ancien conseiller fédéral Moritz Leuenberger s’est accordée sur les grandes lignes d’un projet définissant les modalités de versement des indemnisations. Les montants alloués aux victimes proviendront d’un fonds dont le financement est d’ores et déjà partiellement garanti. Une fondation privée aura pour tâche de dédommager les ayants droit et d’assurer le financement du fonds à long terme. Ainsi prend fin le mandat de la table ronde.

 

Toutes les personnes ayant contracté depuis 2006 une tumeur maligne de la plèvre ou du péritoine (mésothéliome) liée à l’amiante ont droit à une indemnisation, qu’il s’agisse d’une maladie professionnelle reconnue ou non. Ainsi en ont décidé les représentants des personnes victimes de l’amiante, des entreprises ayant produit et travaillé avec ce matériau, des syndicats et de l’économie, réunis autour d’une table ronde créée en 2015.

Calculé au cas par cas, le montant de l’aide financière se fondera sur les prestations que l’assurance-accidents obligatoire (LAA) verse aux patients atteints d’une maladie professionnelle reconnue et liée à l’amiante. Des prestations pour les personnes assurées selon la LAA sont également prévues afin de garantir que les patients reçoivent tous le même soutien, qu’ils soient assurés selon la LAA ou non.

 

Financement du fonds garanti dans un premier temps

Les personnes qui perçoivent une indemnisation du fonds renoncent, en contrepartie, à des actions de droit civil. La table ronde souhaite que les plaintes en suspens soient également réglées par voie extrajudiciaire.

Une centaine de millions de francs sera nécessaire au financement du fonds jusqu’en 2025. Dans le cadre de la table ronde, les commissions professionnelles paritaires, l’industrie de transformation de l’amiante, le secteur des assurances et les entreprises ferroviaires se sont déjà engagés à hauteur d’environ 30 millions de francs. Les promesses de contribution ont été formulées spontanément et sont parfois assorties de la condition que d’autres acteurs s’engagent également. Si nécessaire, la direction de la future fondation veillera à trouver en temps voulu une solution pour assurer l’après-2025.

 

Mise en place d’un service d’assistance psychologique

Par ailleurs, un service d’assistance gratuit sera mis en place pour les personnes concernées, en collaboration avec les institutions existantes. Aujourd’hui, les personnes touchées par l’amiante et leurs proches bénéficient certes de soins médicaux de qualité, mais le suivi psychologique est souvent insuffisant. L’offre s’adresse également aux personnes qui ont été en contact avec de l’amiante et craignent de contracter un mésothéliome. Les ligues pulmonaires régionales s’attèlent à mettre sur pied des projets pilotes en Suisse alémanique et en Suisse romande, des offres qui seront aussi en partie financées par le fonds.

 

Une fondation pour soutenir les victimes

Sur recommandation de la table ronde, la fondation de droit privé Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) verra le jour ces prochaines semaines avec pour but d’examiner les demandes des victimes de l’amiante et d’accorder un soutien tant financier que psychologique. Le conseil de fondation aura en outre pour tâche d’inciter d’autres secteurs économiques à participer volontairement au financement du fonds. Composé de représentants des associations et des entreprises ayant alloué des moyens financiers ainsi que de représentants des victimes et des syndicats, il sera probablement présidé par Urs Berger, président de l’Association suisse d’assurances (ASA).

 

Quelque 120 nouveaux cas de mésothéliome par an

Chaque année en Suisse, environ 120 personnes contractent un mésothéliome parce qu’elles ont inhalé une quantité cancérogène de fibres d’amiante par le passé. Une trentaine d’entre elles ne perçoivent pas de prestations de l’assurance-accidents obligatoire car leur maladie n’est pas liée à leur activité professionnelle. Elles sont donc souvent moins bien loties financièrement que celles assurées selon la LAA.

L’amiante était surtout utilisé dans les années 1960 et 1970 dans différents matériaux de construction, aussi bien dans le bâtiment que dans l’industrie et la technique. En 1989, une interdiction générale est entrée en vigueur, laquelle proscrit l’utilisation des préparations et des objets à base d’amiante. Depuis des années, différents offices, les services cantonaux compétents, la Suva, les organisations patronales et les syndicats coopèrent très étroitement pour prévenir et protéger la population des effets nocifs de cette substance. Le travail de prévention est important car beaucoup de bâtiments anciens contiennent encore de l’amiante. En cas de suspicion lors de travaux de transformations et de rénovation, des spécialistes doivent examiner la présence d’amiante pour éviter les expositions et de nouveaux cas de maladie.

 

Travaux législatifs en cours

Les personnes touchées par l’amiante et leurs proches peuvent intenter une action civile contre l’entreprise et les personnes qu’elles estiment responsables de leur maladie afin d’exiger des réparations et des dommages-intérêts. Or, selon la législation actuelle, il y a prescription dix ans après la fin de l’exposition nocive, donc souvent bien avant que la maladie ne se déclare. La révision du droit de la prescription, qui doit notamment en redéfinir les délais pour les dommages postérieurs – à l’instar de ceux provoqués par les fibres d’amiante – est inscrite à l’agenda du Parlement. Elle a toutefois été suspendue dans l’attente des résultats de la table ronde. Selon celle-ci, les prestations d’indemnisation des victimes de l’amiante et de leurs proches fourniront sans doute au Parlement des éléments de réflexion décisifs pour trouver une solution appropriée à cette problématique.

 

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 19.12.2016 consultable ici : http://bit.ly/2hLzBXL

 

Documentations complémentaires :

Rapport final de la Table ronde sur l’amiante du 30 novembre 2016

Annexe 1 – Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) : principes

Annexe 2 – Explications relatives aux principes

Annexe 3 – Estimation des coûts (chapitre B)

Annexe 4 – Estimations des coûts (chapitre C)

Annexe 5 – Décès liés à l’amiante selon la branche professionnelle

Annexe 6 – Factsheet Maladies professionnelles causées par l’amiante

Annexe 7 – Table ronde sur l’amiante : organisations, entreprises et autorités représentées

Annexe 8 – Financement FIVA. Engagements commissions paritaires)

Plate-forme d’information Forum Amiante Suisse, FACH