Motion Buffat 20.4210 « Augmentation de la sécurité pour les cyclistes » [rendre le port du casque obligatoire pour tous les cyclistes] – Avis du Conseil fédéral

Motion Buffat 20.4210 « Augmentation de la sécurité pour les cyclistes » – Avis du Conseil fédéral

 

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Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de proposer une modification de la loi sur la circulation routière (LCR) afin de rendre le port du casque obligatoire pour tous les cyclistes.

 

Développement

Depuis de nombreuses années, le développement du vélo dans toutes ses variantes (vélo de loisir, moyen de transport, vélo électrique) n’a cessé de prendre de l’ampleur.

Un nombre non négligeable de cyclistes roule sans casque. Avec l’arrivée des vélos électriques, la vitesse des vélos dépasse celle des cyclomoteurs.

En termes de chiffres, rien que pour 2018 ce ne sont pas moins de 27 morts en Suisse qui circulaient à vélo, dont 12 qui étaient à vélo électrique. Au niveau des blessés graves, ce sont 877 cyclistes à vélo « standard » (+7%) et 308 cyclistes à vélo électrique (+38%). La plupart des personnes tuées ou grièvement blessées le sont avec des vélos électriques de type « lent » (236 personnes vs 85 avec des vélos électriques rapides).

Je souhaite que la loi soit modifiée afin que le port du casque devienne obligatoire pour tous les cyclistes.

 

Avis du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral a proposé d’introduire une obligation générale de porter le casque pour les cyclistes en 2008, dans le cadre de la consultation sur le programme de sécurité routière Via sicura. Toutefois, les participants à la consultation ont rejeté la mesure à une large majorité. Certains ayant néanmoins laissé entendre qu’ils y seraient favorables pour les enfants, le Conseil fédéral a suggéré, dans son message, de n’imposer le port du casque qu’aux cyclistes jusqu’à quatorze ans, une limite d’âge bien acceptée par la population d’après des sondages (FF 2010 7703 ss). Le Parlement a pourtant clairement rejeté l’instauration de l’obligation de porter le casque pour les cyclistes jusqu’à quatorze ans en 2012, lors de ses délibérations sur Via sicura.

Dans le cadre de la consultation sur la révision partielle de la loi fédérale sur la circulation routière, de la loi sur les amendes d’ordre et de huit ordonnances, qui court jusqu’au 12 décembre 2020, le Conseil fédéral propose plusieurs mesures destinées à augmenter la sécurité des conducteurs de vélos électriques. Il prévoit par exemple d’imposer à ces derniers l’usage diurne des phares ou le port du casque. En outre, le Conseil fédéral questionne les participants à la consultation sur leur soutien éventuel à l’introduction de l’obligation de porter le casque pour les cyclistes jusqu’à seize ans. Il n’est cependant pas favorable à une obligation plus étendue.

 

Proposition du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

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Motion Prelicz-Huber 20.4044 « Obligation d’avancer les prestations. Combler les lacunes » – Avis du Conseil fédéral

Motion Prelicz-Huber 20.4044 « Obligation d’avancer les prestations. Combler les lacunes » – Avis du Conseil fédéral

 

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Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de présenter un projet qui garantisse que le traitement des enfants et des adolescents puisse commencer dès qu’il y a indication médicale pour la thérapie, même sans accord sur l’assurance qui prendra en charge les coûts.

 

Développement

Dans son avis du 13 novembre 2019 relatif à la motion 19.4196 déposée par Maya Graf (« Renforcer la médecine pédiatrique en garantissant le début du traitement avant de s’entendre sur l’assurance qui prendra en charge les coûts »), le Conseil fédéral déclare que les bases juridiques actuelles, notamment l’obligation d’avancer les prestations prévue à l’art. 70 LPGA, garantissent que les assurés ont accès aux prestations nécessaires avant que l’assurance qui doit prendre en charge les coûts soit désignée. Dans les faits, on observe toutefois des lacunes pour les enfants et les adolescents. Le Tribunal fédéral s’est d’ailleurs déjà penché sur la question dans l’un de ses arrêts (ATF 146 V 129). Les deux exemples suivants tirés de la vie réelle montrent les lacunes existantes.

Un enfant atteint d’autisme habite avec sa famille dans le canton X, qui ne propose aucune offre d’intervention précoce. Le traitement pourrait avoir lieu dans le canton limitrophe Y. Conformément aux directives qui régissent la péréquation financière au niveau fédéral, l’AI doit payer les prestations médicales et le canton de domicile les prestations pédagogiques. L’AI donne sa garantie pour la prise en charge de la partie médicale du traitement, mais le canton de domicile refuse de prendre en charge les prestations pédagogiques de ce traitement extracantonal alors même qu’il ne le propose pas sur son propre territoire.

En cas de trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité, certaines caisses-maladie conditionnent la prise en charge provisoire des prestations au dépôt simultané auprès de l’assurance-invalidité d’une demande de prise en charge des coûts. Si l’AI estime qu’elle n’est pas compétente et refuse d’examiner la demande, il est déjà arrivé que des caisses-maladie refusent d’avancer les prestations comme elles y sont tenues.

On voit que, contrairement à ce que déclare le Conseil fédéral dans son avis relatif à la motion précitée, des mesures législatives complémentaires sont nécessaires. Les lacunes en matière d’avance de prestations causent de la souffrance et de gros tracas aux personnes concernées et à ceux qui leur fournissent des traitements. Et si le début du traitement est retardé, le pronostic à long terme peut s’aggraver.

 

Avis du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral a eu connaissance de faits montrant que la prise en charge pose problème dans des domaines spécifiques. Selon lui, les causes ne résident pas dans les bases légales mais dans la mise en œuvre. Tel est le cas lorsque des prestations pédagogiques ne peuvent pas être prises en charge par une assurance sociale et que les questions de compétences cantonales doivent être résolues par d’autres moyens. L’un des objectifs du projet pilote « Intervention précoce intensive auprès des enfants atteints d’autisme infantile » vise par exemple à délimiter et à clarifier la prise en charge des coûts entre la Confédération et les cantons.

L’obligation d’avancer des prestations ne peut être réglée que lorsque plusieurs assurances sociales entrent en ligne de compte, en fonction de leurs bases légales spécifiques, en tant que débiteurs des prestations en question. Le Conseil fédéral estime que cette question est déjà suffisamment et clairement réglementée comme il l’expose dans son avis sur la motion 19.4196 « Renforcer la médecine pédiatrique en garantissant le début du traitement avant de s’entendre sur l’assurance qui prendra en charge les coûts ». Par ailleurs, le Tribunal fédéral a déjà établi que l’art. 70 al. 2 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) est complet à cet égard. Dans l’un de ses arrêts (ATF 146 V 129), il a également tranché sur une lacune pointée dans l’obligation d’avancer les prestations dans le domaine des moyens auxiliaires, précisant que l’extension du droit de remboursement à toutes les prestations indiquées médicalement sans que ces dernières ne répondent aux bases légales d’une assurance sociale (y compris aux exigences d’efficacité, d’adéquation et d’économicité) ne saurait être admise. Cela entraînerait un foisonnement incontrôlé du catalogue de prestations et, par là même, une augmentation considérable des volumes de prestations et des coûts.

 

Proposition du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Prelicz-Huber 20.4044 « Obligation d’avancer les prestations. Combler les lacunes » consultable ici

 

 

8C_1/2020 (f) du 15.10.2020 – Détermination de la méthode d’évaluation applicable pour un associé-gérant de deux Sàrl, dont il est également salarié – 18 LAA – 16 LPGA / Méthode extraordinaire / Frais de traduction de l’expertise économique réalisée sur mandat de l’assurance-accidents (allemand => français) – Principe de la territorialité des langues – 70 al. 1 Cst.

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_1/2020 (f) du 15.10.2020

 

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Détermination de la méthode d’évaluation applicable pour un associé-gérant de deux Sàrl, dont il est également salarié / 18 LAA – 16 LPGA

Méthode extraordinaire

Frais de traduction de l’expertise économique réalisée sur mandat de l’assurance-accidents (allemand => français) – Principe de la territorialité des langues / 70 al. 1 Cst.

 

Assuré exerce conjointement avec son épouse la fonction d’associé-gérant des sociétés B.__ Sàrl et C.__ Sàrl, dont il est également salarié et dont le but social est l’exploitation de trois cafés-restaurants à U.__. Le 03.03.2011, il a été victime d’un accident de la circulation qui lui a causé diverses fractures au niveau du poignet droit et de l’épaule gauche. L’assurance-accidents a versé des indemnités journalières jusqu’au 31.08.2017.

Après avoir ordonné la mise en œuvre d’une expertise économique afin d’évaluer les revenus avec et sans invalidité, l’assurance-accidents a rendu une décision par laquelle elle a reconnu le droit de l’assuré à une rente d’invalidité fondée sur un taux d’invalidité de 13% à compter du 01.09.2017. Rejet de l’opposition ainsi que de la demande de l’assuré de faire traduire en français le rapport d’expertise économique rédigé en allemand.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1052/2019 – consultable ici)

La cour cantonale a considéré que la méthode extraordinaire était la plus appropriée pour déterminer le taux d’invalidité de l’assuré. A son avis, la comparaison des résultats d’exploitation effectuée par l’assurance-accidents ne permettait pas de chiffrer la perte de gain de manière fiable. En effet, l’assuré n’était pas à la tête d’une simple entreprise unipersonnelle mais était associé-gérant (avec son épouse) de deux entreprises exploitant trois restaurants. Il était ainsi nécessaire de distinguer sa situation personnelle de celles des entreprises, ce que l’expert mandaté par l’assurance-accidents n’avait pas fait. En outre, on ne pouvait pas exclure que des facteurs étrangers à l’atteinte dont souffrait l’assuré aient influencé le résultat de ces entreprises, ne serait-ce qu’au regard de la concurrence, de la conjoncture et compte tenu du fait que lesdites entreprises employaient un personnel relativement nombreux, dont plusieurs membres de sa famille. Par ailleurs, les données comptables relatives aux charges salariales variaient fortement d’une année à l’autre et apparaissaient partiellement contradictoires avec les chiffres communiqués à l’AVS. En pareilles circonstances, il n’était pas possible de distinguer la part du résultat d’exploitation qu’il fallait attribuer aux facteurs étrangers à l’invalidité de celle qui revenait à la propre prestation de travail de l’assuré. Enfin, les juges cantonaux ont relevé qu’en chiffrant le revenu d’invalide en fonction du résultat d’exploitation et du salaire déclaré à l’AVS pour l’année 2012, l’expert avait méconnu que pour procéder à une comparaison des revenus, il convenait de se placer au moment de la naissance du droit à la rente, en l’occurrence au 01.09.2017, soit à une période pour laquelle on ne disposait d’aucun renseignement sur le revenu perçu par l’assuré.

La juridiction cantonale a confié la traduction en français du rapport d’expertise économique à un traducteur-juré.

Par jugement du 13.11.2019, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant le droit de l’assuré à une rente d’invalidité fondée sur un taux d’invalidité de 35% dès le 01.09.2017. Elle a en outre mis à la charge de l’assurance-accidents les frais de traduction du rapport d’expertise économique, à hauteur de 562 fr. 20.

 

TF

Méthode d’évaluation applicable

Chez les assurés exerçant une activité lucrative, le taux d’invalidité doit être évalué sur la base d’une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l’assuré aurait pu réaliser s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s’effectue, en règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode ordinaire de la comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.3.1 p. 337).

Lorsque l’assuré est une personne de condition indépendante, la comparaison porte sur les résultats d’exploitation réalisés dans son entreprise avant et après la survenance de l’invalidité. Ce n’est que si ces données comptables ne permettent pas de tirer des conclusions valables sur la diminution de la capacité de gain due à l’invalidité – ce qui est le cas lorsque les résultats de l’exploitation ont été influencés par des facteurs étrangers à l’invalidité – que le taux d’invalidité doit être évalué en application de la méthode extraordinaire (consistant à évaluer le taux d’invalidité d’après l’incidence de la capacité de rendement amoindrie sur la situation économique concrète). Les résultats d’exploitation d’une entreprise dépendent en effet souvent de nombreux paramètres difficiles à apprécier, tels que la situation conjoncturelle, la concurrence, l’aide ponctuelle des membres de la famille, des personnes intéressées dans l’entreprise ou des collaborateurs, lesquels constituent des facteurs étrangers à l’invalidité. Ainsi, il convient, dans chaque cas, afin de déterminer la méthode d’évaluation applicable, d’examiner si les documents comptables permettent ou non de distinguer la part du revenu qu’il faut attribuer aux facteurs étrangers à l’invalidité de celle qui revient à la propre prestation de travail de l’assuré (arrêts 9C_826/2017 du 28 mai 2018 consid. 5.2; 9C_106/2011 du 14 octobre 2011 consid. 4.3 et les références). Sinon, il faut, en s’inspirant de la méthode spécifique pour personnes sans activité lucrative dans l’assurance-invalidité (art. 28a al. 2 LAI, en relation avec les art. 27 RAI et 8 al. 3 LPGA), procéder à une comparaison des activités pour déterminer quel est l’empêchement provoqué par l’atteinte à la santé, puis apprécier séparément les effets de cet empêchement sur la capacité de gain (ATF 128 V 29; arrêts 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 5.4.2, 9C_236/2009 du 7 octobre 2009 consid. 3.2, in SVR 2010 IV n° 11 p. 35).

 

En l’espèce, les circonstances justifient le choix des juges cantonaux d’appliquer la méthode extraordinaire pour déterminer le taux d’invalidité de l’assuré. En effet, il ressort du rapport d’expertise économique que, postérieurement à la survenance de l’atteinte à la santé en 2011 et jusqu’en 2015 (dernière année prise en compte par l’expert), le chiffre d’affaires et la masse salariale des entreprises de l’assuré ont varié tant à la hausse qu’à la baisse suivant les années, marquant néanmoins une légère progression par rapport à la période précédant l’accident (années 2008 à 2010). L’expert mentionne toutefois que les chiffres relatifs à la charge salariale diffèrent selon que l’on tient compte des données obtenues de la fiduciaire ou des indications de l’Office cantonal des assurances sociales de Genève. Quant au bénéfice, il a varié de manière considérable à la hausse en 2012 puis à la baisse en 2013 et 2014 avant de progresser à nouveau en 2015. Il n’est cependant pas possible d’établir si et dans quelle mesure une telle évolution est due exclusivement à l’invalidité, ou si elle a aussi été influencée par la conjoncture, le développement de l’entreprise ou d’autres facteurs étrangers à l’invalidité. L’assurance-accidents soutient d’ailleurs elle-même dans son mémoire de recours que les variations du bénéfice et du chiffre d’affaires ne découlent pas de l’accident. On ne peut pas non plus parler de constance au regard du chiffre d’affaires, des charges salariales et du bénéfice de l’exploitation au cours des années qui ont précédé l’atteinte à la santé. D’autres circonstances mises en évidences par la cour cantonale (participation dans plusieurs sociétés, le fait que l’assuré n’était pas l’ayant droit économique unique des sociétés, collaboration des membres de sa famille) empêchent également de déterminer de manière fiable les revenus avec et sans invalidité nécessaires à une comparaison des revenus. Enfin, l’évaluation de l’invalidité par les organes de l’assurance-invalidité n’ayant pas de force contraignante pour l’assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3 p. 368), la méthode appliquée par l’office AI compétent pour statuer sur le droit de l’assuré à une rente d’invalidité n’est pas déterminante en l’espèce, cela d’autant moins qu’il n’apparaît pas que la décision en question aurait fait l’objet d’un examen par le juge.

Dans ces conditions, les juges cantonaux étaient fondés à considérer la méthode extraordinaire comme étant la plus appropriée. Pour le surplus, l’assurance-accidents ne conteste pas la répartition des champs d’activité fixée par la juridiction cantonale, les pondérations avec et sans handicap, ni les taux d’incapacité de travail relatifs à ces champs d’activité.

 

Frais de traduction

L’assurance-accidents se plaint du fait que la cour cantonale a mis à sa charge les frais de traduction du rapport d’expertise économique. Elle fait valoir que ce document consistait surtout en des chiffres et que le conseil de l’assuré l’avait parfaitement comprise. En outre, la traduction n’était pas nécessaire dans la mesure où la cour cantonale a considéré que le rapport n’était pas pertinent en l’espèce.

Les juges cantonaux ont motivé leur décision de mettre à la charge de l’assurance-accidents les frais de traduction en application du principe de la territorialité des langues, de l’art. 70 al. 1 Cst., ainsi que de la jurisprudence et de la doctrine y relatives. Ils ont exposé en particulier qu’à Genève, tout document soumis au juge devait être rédigé dans la langue officielle ou accompagné d’une traduction dans cette langue ; cette règle valait pour tous les écrits émanant directement du juge ou des parties, ainsi que pour les pièces que celles-ci produisaient. Ils ont considéré en outre que l’on ne pouvait pas exiger du mandataire de l’assuré qu’il établisse à l’intention de son client une traduction littérale d’un rapport d’analyse économique et que selon la jurisprudence (ATF 128 V 34 [cité arrêt I 321/01 du 27 février 2002 dans le jugement cantonal]), une partie n’abusait pas de son droit en demandant la traduction de pièces rédigées dans une langue qu’elle connaissait parfaitement. L’assurance-accidents ne prend pas position à cet égard mais se limite à se prévaloir de la prétendue inutilité de la mesure. Or, il est constant que l’assurance-accidents s’est fondée sur le rapport d’expertise économique pour calculer le taux de la rente d’invalidité litigieuse et qu’il s’agissait ainsi d’une pièce essentielle du dossier de nature à sceller le sort de la procédure (cf. ATF 128 V 34 consid. 2b/bb p. 38). Quant au fait que ce rapport consiste essentiellement en des données chiffrées, cela a pour conséquence de réduire le travail du traducteur mais n’en rend pas moins utile la traduction de l’analyse et des explications de ces données. Dans ces conditions, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d’avoir fait procéder à la traduction de l’expertise, quand bien même elle a jugé par la suite qu’une évaluation de l’invalidité selon la méthode de la comparaison des résultats d’exploitation n’était pas appropriée.

 

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_1/2020 consultable ici

 

 

9C_153/2020 (f) du 09.10.2020 – Taux d’invalidité – Assuré plâtrier indépendant – 16 LPGA / Revenu sans invalidité d’une personne de condition indépendante – Activité d’indépendant de 7 mois avant l’accident / Revenu sans invalidité déterminé selon l’ESS (T17)

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_153/2020 (f) du 09.10.2020

 

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Taux d’invalidité – Assuré plâtrier indépendant / 16 LPGA

Revenu sans invalidité d’une personne de condition indépendante – Activité d’indépendant de 7 mois avant l’accident

Revenu sans invalidité déterminé selon l’ESS (T17)

 

Assuré, né en 1971, a d’abord travaillé comme salarié jusqu’en mai 2014, puis en qualité de plâtrier indépendant dès juin 2014. Le 15.01.2015, il s’est blessé à la main droite et a subi une incapacité totale de travail dans sa profession de plâtrier.

Dépôt d’une demande de prestations AI en juin 2016. L’office AI alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 31.05.2017. L’administration a retenu que si l’incapacité de travail restait totale dans l’activité habituelle de plâtrier, la capacité de travail était en revanche entière à compter du 07.02.2017 dans une activité adaptée. Comparant un revenu sans invalidité de 73’744 fr. 92 en 2017, établi selon l’ESS (table T17, ligne 71, métiers qualifiés du bâtiment et assimilés, sauf électriciens, niveau de compétences 2), avec un revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, également calculé selon l’ESS (table TA1, niveau de compétences 1), l’office AI a fixé le taux d’invalidité à 11%.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 117/18 – 21/2020 – consultable ici)

La juridiction cantonale a constaté qu’un revenu de 85’300 fr. afférent à la période de juin à décembre 2014 avait été inscrit sur le compte individuel de l’assuré en tant que personne de condition indépendante, tandis que l’autorité fiscale avait retenu un revenu de 77’188 fr. pour l’année 2014 provenant de l’activité indépendante. Pour les juges cantonaux, cette activité avait débuté à un rythme très soutenu, offrant à l’assuré une rémunération équivalant à un peu plus du double de ce qu’il avait obtenu comme salarié durant les années précédentes. Comme le succès aurait perduré sans atteinte à la santé, il se justifiait d’annualiser les revenus d’une activité qui n’avait été que partielle et qui aurait procuré des revenus supérieurs si l’exercice 2014 avait été complet. Le Tribunal cantonal a dès lors admis qu’il n’y avait pas lieu de s’écarter de la règle de principe selon laquelle les revenus effectivement réalisés sont à prendre en compte. Dans le cas d’espèce, sur la base de six mois entiers d’activité indépendante (de juin à décembre 2014) qui ont procuré une rémunération brute de 85’375 fr. (soumise aux cotisations dues en tant qu’indépendant), les juges cantonaux ont extrapolé ce montant sur l’année entière et fixé la rétribution à 170’749 fr. 99 pour 2014. Comparant ce revenu sans invalidité au revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, ils ont fixé le taux d’invalidité à 62%, ce qui ouvrait le droit à trois quarts de rente à partir du 01.06.2016.

Par jugement du 27.01.2020, admission du recours par le tribunal cantonal et octroi d’une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 31.05.2017 puis de trois quarts de rente à compter du 01.06.2017.

 

TF

Pour déterminer le revenu sans invalidité, on rappellera qu’il faut établir ce que l’assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s’il n’était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. C’est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l’assuré avant l’atteinte à la santé en posant la présomption qu’il aurait continué d’exercer son activité sans la survenance de son invalidité. Pour les personnes de condition indépendante, on peut se référer aux revenus figurant dans l’extrait du compte individuel de l’AVS (arrêts 8C_661/2018 du 28 octobre 2019 consid. 3.2.2, 9C_771/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.6). En effet, l’art. 25 al. 1 RAI établit un parallèle entre le revenu soumis à cotisation à l’AVS et le revenu à prendre en considération pour l’évaluation de l’invalidité ; le parallèle n’a toutefois pas valeur absolue (arrêt 8C_748/2008 du 10 juin 2009 consid. 5.2.1).

A ce sujet, on rappellera que le revenu réalisé avant l’atteinte à la santé ne pourra pas être considéré comme une donnée fiable, notamment lorsque l’activité antérieure était si courte qu’elle ne saurait constituer une base suffisante pour la détermination du revenu sans invalidité (cf. ATF 135 V 59 consid. 3.4.6 p. 64; arrêt 9C_658/2015 du 9 mai 2016 consid. 5.1.1). Le cas échéant, on pourra se fonder sur le revenu moyen d’entreprises similaires (cf. arrêt 9C_474/2016 du 8 février 2017 consid. 4), ou sur les statistiques de l’ESS (cf. arrêt 9C_111/2009 du 21 juillet 2009 consid. 3.1).

 

En se référant à l’arrêt I 22/06 du 19 janvier 2007, l’office AI soutient que lorsqu’un assuré est atteint dans sa santé peu de temps après le début de son activité indépendante, il convient de se référer à des données statistiques afin d’établir le revenu sans invalidité, car dans un tel cas de figure, les résultats d’exploitation obtenus sur une durée de quelques mois ne permettent pas de fixer de manière fiable le revenu qui aurait pu être réalisé sans atteinte à la santé. A cet égard, les considérants de l’instance cantonale sur le potentiel de développement du marché et de l’entreprise de l’assuré lui paraissent insoutenables et relèveraient de simples affirmations dont il ignore sur quoi elles reposent. Les taxations fiscales, les décisions de cotisations personnelles, le compte individuel ainsi que la comptabilité de l’entreprise ne permettraient pas d’aboutir à de telles conclusions, ni de déterminer le revenu correspondant à l’activité indépendante sans la survenance de l’atteinte à la santé. L’office AI est aussi d’avis qu’il est arbitraire de transformer le revenu global en revenu mensuel puis de le multiplier par douze (pour obtenir le revenu annuel de 170’749 fr. 99), car cette méthode méconnaît le fonctionnement d’une entreprise du bâtiment ; en outre, l’activité indépendante n’a pas été exercée durant seulement six mois, mais sept mois en 2014 selon le compte individuel, voire huit mois d’après les documents émanant de l’assureur-accidents.

 

Les constatations de l’autorité précédente relatives aux revenus inscrits sur le compte individuel de l’assuré pour l’année 2014 sont manifestement inexactes et doivent être rectifiées et complétées d’office. En effet, s’il ressort de l’extrait du compte individuel que des revenus de 85’300 fr. (60’000 + 25’300) afférents à l’activité indépendante ont été portés en compte pour la période courant de juin à décembre 2014, il apparaît aussi qu’un montant de 49’643 fr. a été extourné pour cette activité indépendante en 2014 (cf. ch. 2403 des Directives de l’OFAS concernant le certificat d’assurance et le compte individuel). La soustraction aboutit à un revenu de l’activité indépendante de 35’657 fr. (85’300 – 49’643) pour cette année-là. En comparant ce revenu de 35’657 fr. avec le revenu d’invalide non contesté de 65’699 fr. 56, le droit à la rente serait ainsi d’emblée exclu, même si l’on extrapolait le montant de 35’657 fr. (correspondant à une période de sept mois) sur toute l’année 2014 et que l’on tienne compte ainsi d’un revenu de 61’126 fr. 30 (pour autant que ce procédé fût admissible).

Par ailleurs, aucune donnée fiable ne ressort des comptes d’exploitation et de pertes et profits de l’entreprise de l’assuré qui ont été versés au dossier. Au demeurant, l’assuré avait fait valoir, dans son recours cantonal, que pour pouvoir faire le calcul de son invalidité, « le montant de CHF 14’229.00 déclaré en tant que revenu brut en tant qu’indépendant vaut pour les mois de juin 2014 à janvier 2015. Partant, c’est une moyenne de CHF 1’778.60 par mois ». En pareilles circonstances et compte tenu de la brièveté de cette activité, celle-ci ne saurait constituer une base suffisante pour la détermination du revenu sans invalidité. C’est ainsi à juste titre que l’office AI l’a établi sur la base de données statistiques dont le bien-fondé n’est pas remis en cause en tant que tel.

A cet égard, on remarquera que le revenu sans invalidité de 73’744 fr. 92 retenu par l’office AI est légèrement inférieur à la moyenne des revenus qui ressortent du compte individuel de l’assuré pour les cinq années précédant l’atteinte à la santé (2010: 80’352 fr.; 2011: 83’999 fr.; 2012: 77’094 fr.; 2013: 75’563 fr.; 2014: 60’074 fr.), soit 75’416 fr. 40. Si l’on comparait ce revenu avec le revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, le taux d’invalidité serait alors de 13%, de sorte que l’issue du litige serait inchangée.

Vu ce qui précède, le taux d’invalidité de 11% retenu par l’office AI apparaît conforme au droit, de sorte qu’il a nié à juste titre le droit à la rente postérieurement au 31.05.2017.

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annule le jugement cantonal et confirme la décision de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_153/2020 consultable ici

 

 

8C_785/2019 (f) du 17.08.2020 – Gain assuré pour l’indemnité journalière LAA – 15 LAA / Assuré n’exerçant pas d’activité lucrative régulière – Salaire moyen équitable par jour – 23 al. 3 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_785/2019 (f) du 17.08.2020

 

Consultable ici

 

Gain assuré pour l’indemnité journalière LAA / 15 LAA

Assuré n’exerçant pas d’activité lucrative régulière – Salaire moyen équitable par jour / 23 al. 3 OLAA

 

Assuré, né en 1991, engagé depuis le 04.04.2016 en qualité de ferrailleur auprès de l’entreprise B.__ Sàrl (actuellement en liquidation). Par déclaration de sinistre du 26.05.2016, l’employeur a signalé à l’assurance-accidents que le prénommé était tombé le même jour dans un trou sur un chantier et qu’il s’était fracturé le bras droit; son salaire horaire était fixé à 28 fr. l’heure pour une occupation régulière à 100 % (contrat de durée indéterminée) et un horaire de travail de 45 heures par semaine.

Après avoir pris connaissance du contrat de travail et des décomptes de salaire pour les mois d’avril et mai 2016, l’assurance-accidents a informé l’assuré, par courrier du 15.07.2016, qu’elle allouait les prestations légales d’assurances pour les suites de l’accident du 26.05.2016 et que son droit à l’indemnité journalière était de 155 fr. 55 par jour calendaire.

A la suite d’investigations complémentaires, l’assurance-accidents a rendu une décision par laquelle elle a révisé sa décision du 15.07.2016 et a fixé l’indemnité journalière à 53 fr. par jour. En outre, elle a demandé à l’assuré le remboursement de la différence versée à tort, soit un montant de 36’565 fr. 55. Saisie d’une opposition, l’assurance-accidents l’a partiellement admise en ce sens qu’elle a renoncé à la demande de restitution des prestations versées à tort, les conditions pour une révision ou une reconsidération n’étant pas remplies, l’opposition étant pour le surplus rejetée.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/935/2019 – consultable ici)

Comme l’assurance-accidents, les juges cantonaux ont considéré qu’il n’était possible d’établir de façon fiable ni le dernier salaire reçu avant l’accident du 26.05.2016, ni l’horaire effectué par l’assuré durant cette période, vu les contradictions ressortant des différents documents versés au dossier. Procédant à une instruction complémentaire en vue d’établir le gain déterminant, la cour cantonale a notamment auditionné des témoins et a confronté les déclarations de l’assuré respectivement de son employeur avec celles des autres collaborateurs ainsi que de l’administrateur de l’entreprise. Se fondant sur les informations transmises par l’assurance-accidents, elle a constaté que l’employeur avait déclaré le salaire de l’assuré pour le mois d’avril 2016 après l’accident du 26.05.2016, alors qu’il avait déjà communiqué à l’assurance-accidents les données concernant tous ses autres collaborateurs. Quant au salaire du mois de mai 2016, il avait été annoncé le 04.07.2017 seulement, soit plus d’une année après le sinistre et près de neuf mois après la dernière communication des salaires des autres employés pour ce mois-ci. Sur la base de ces éléments, la cour cantonale a conclu qu’il y avait lieu de douter du bien-fondé des déclarations de l’assuré et de son employeur concernant non seulement le montant du salaire horaire convenu, mais également la régularité et l’ampleur de l’activité déployée par l’assuré durant les mois d’avril et mai 2016. En revanche, elle a considéré comme établi, au degré de la vraisemblance prépondérante requis, que l’assuré avait bien déployé une activité pour B.__ Sàrl en 2016, mais irrégulièrement, tout comme il l’avait fait en 2015 pour le compte du même employeur, en rappelant que son salaire avait alors été soumis à de fortes variations (13’727 fr. de janvier à juin 2015 et 10’480 fr. de septembre à décembre 2015 selon l’extrait de son compte individuel). Dans ces conditions, les juges cantonaux ont estimé que l’assurance-accidents était fondée à s’écarter du revenu déclaré par l’employeur au moment du sinistre et à se référer aux salaires mentionnés dans le compte individuel de l’assuré pour l’année 2015.

Par jugement du 10.10.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Par décision sur opposition du 14.07.2017, l’assurance-accidents a renoncé à réclamer à l’assuré la restitution des indemnités journalières versées à tort. Par conséquent, elle avait le droit de corriger ex nunc et pro futuro le montant de celles-ci, sans devoir se fonder sur un motif de révocation (reconsidération ou révision procédurale; arrêt 8C_22/2019 du 24 septembre 2019 consid. 3, non publié aux ATF 146 V 51 mais in: SVR 2020 UV n° 8 p. 23; ATF 133 V 57 consid. 6.8 p. 65).

 

Gain assuré pour l’indemnité journalière LAA

Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Est réputé gain assuré pour le calcul des indemnités journalières le dernier salaire que l’assuré a reçu avant l’accident (art. 15 al. 2, première phrase, LAA), y compris les éléments de salaire non encore perçus et auxquels il a droit (art. 22 al. 3 OLAA).

Conformément à la délégation de l’art. 15 al. 3 LAA, le Conseil fédéral a promulgué des dispositions sur la prise en considération du gain assuré dans des cas spéciaux, notamment pour l’indemnité journalière (art. 23 OLAA). Selon l’art. 23 al. 3 OLAA, lorsque l’assuré n’exerce pas d’activité lucrative régulière ou lorsqu’il reçoit un salaire soumis à de fortes variations, il y a lieu de se fonder sur un salaire moyen équitable par jour.

A l’ATF 139 V 464, le Tribunal fédéral a considéré que le point de savoir si les conditions de l’art. 23 al. 3 OLAA – à savoir les critères de l’activité irrégulière et les fortes variations de salaire – sont réalisées doit être examiné au regard de l’activité effectivement exercée au moment de l’accident, le parcours professionnel antérieur de l’assuré n’étant pas déterminant. Le fait que l’accident soit survenu peu après la prise du travail ne change rien à cet égard (ATF 139 V 464 consid. 4.2 et 4.3 p. 470 s.; 128 V 298 consid. 2b/bb p. 301). En d’autres termes, si l’assuré n’a pas travaillé ou seulement sporadiquement dans le passé, il n’y a pas lieu de conclure à une activité irrégulière au sens de l’art. 23 al. 3 OLAA; c’est l’activité effective au moment de la survenance de l’accident qui doit être irrégulière pour entraîner l’application de l’art. 23 al. 3 OLAA; par ailleurs, la durée effective de l’engagement n’a pas une importance particulière pour calculer le gain assuré déterminant pour les indemnités journalières (ATF 139 V 464 consid. 4.4 p. 471 s.). Si les conditions de l’art. 23 al. 3 OLAA ne sont pas réalisées, le dernier salaire perçu avant l’accident dans les rapports de travail actuels est déterminant pour calculer l’indemnité journalière en vertu de l’art. 15 al. 2 LAA en liaison avec l’art. 22 al. 3 OLAA (ATF 139 V 464 consid. 4.6 p. 472; arrêt 8C_296/2013 du 14 janvier 2014 consid. 5.1).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 p. 429; 139 V 176 consid. 5.3 p. 186; 138 V 218 consid. 6 p. 221 s.).

 

Activité lucrative irrégulière – 23 al. 3 OLAA

D’après la déclaration de sinistre, le salaire convenu entre l’assuré et son employeur était de 28 fr. l’heure pour une occupation régulière de 45 heures par semaine. Contrairement aux constatations des juges cantonaux, il n’y a pas lieu de remettre en question ces éléments. Ainsi, même si dans le contrat de travail il est fait mention d’un salaire horaire de 26 fr., il sied de constater que l’employeur a précisé lors de son audition par-devant la cour cantonale qu’il s’agissait « sans doute d’une erreur », le salaire convenu étant de 28 fr. l’heure. En outre, ce salaire horaire se trouve confirmé aussi bien dans les décomptes de salaire pour les mois d’avril et mai 2016 que dans la liste des salariés de l’entreprise B.__ Sàrl. C’est aussi en vain que la cour cantonale, pour remettre en cause le salaire horaire déclaré par l’assuré, s’est référée à la Convention nationale du secteur principal de la construction en Suisse (CN 2016 – 2018, état au 01.06.2017), dans la mesure où n’y figurent que les salaires minimaux (arrêts 8C_141/2016 et 8C_142/2016 du 17 mai 2016 consid. 5.2.2.3). Il en va de même de la comparaison du salaire de l’assuré avec celui des autres ouvriers salariés actifs entre janvier et juillet 2016, dont les conditions d’engagement ne sont pas connues et dont les salaires ne sont donc pas comparables.

S’agissant du point de savoir à quel taux d’activité l’assuré avait travaillé avant la survenance de son accident, la cour cantonale a retenu qu’il aurait déployé une activité irrégulière en 2016, tout comme il l’avait fait en 2015 pour le compte du même employeur, en rappelant que son salaire avait alors été soumis à de fortes variations (13’727 fr. de janvier à juin 2015 et 10’480 fr. de septembre à décembre 2015 selon l’extrait du compte individuel). Or selon la jurisprudence, la question de savoir si les critères de l’activité irrégulière et les fortes variations de salaire au sens de l’art. 23 al. 3 OLAA sont réalisées doit être examinée au regard de l’activité effectivement exercée au moment de l’accident, le parcours professionnel antérieur de l’assuré n’étant pas déterminant. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que depuis son nouvel engagement auprès de B.__ Sàrl le 04.04.2016, l’assuré a travaillé à un taux d’activité de 100 %. Le fait que son salaire ait été versé en main propre par l’employeur n’y change rien, tout comme le fait que les salaires du mois d’avril et mai 2016 aient été déclarés à la caisse de compensation plus tard que ceux des autres ouvriers. Enfin, quant à la constatation des juges cantonaux selon laquelle les revenus bruts et nets dans les décomptes de salaire relatifs aux mois d’avril et de mai 2016 seraient bien supérieurs à ceux annoncés à la caisse de compensation, il s’avère en effet que seul le salaire de base (28 fr. x 180 heures, soit 5040 fr.) a été déclaré à celle-ci, sans tenir compte des autres indemnités auxquelles l’assuré prétend (vacances payées par l’employeur, 13e salaire, indemnité professionnelle journalière, pause). La question de savoir s’il s’agit d’une erreur de comptabilité, comme le soutient l’assuré, peut rester indécise, dans la mesure où ce point n’est pas déterminant pour trancher la question de savoir si l’assuré exerçait une activité irrégulière ou percevait un salaire soumis à de fortes variations (art. 23 al. 3 OLAA).

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que l’activité exercée par l’assuré auprès de B.__ Sàrl ne constituait pas une activité irrégulière au sens de l’art. 23 al. 3 OLAA. C’est par conséquent à tort que l’assurance-accidents et les juges cantonaux ont calculé l’indemnité journalière sur la base d’un salaire moyen équitable par jour, respectivement en se fondant sur le gain réalisé en 2015. L’indemnité journalière doit bien plutôt être fixée conformément à l’art. 15 al. 2 LAA en lien avec l’art. 22 al. 3 OLAA. Cela étant, il appert que seul le salaire de base, soit le montant de 5040 fr., est établi. C’est donc sur cette base que l’indemnité journalière doit être calculée et par conséquent fixée à 132 fr. 55 (5040 fr. x 12 ÷ 365 x 80 %) conformément aux art. 17 al. 1 LAA et 25 al. 1 OLAA.

 

Le TF admet le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_785/2019 consultable ici

 

 

Analyse des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale

Analyse des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 17.11.2020 consultable ici

 

D’un côté, la priorité accordée par l’AI à la réadaptation a eu l’effet souhaité : 58% des assurés ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI en 2014 exerçaient une activité lucrative et ne touchaient pas de rente AI quatre ans plus tard ; cette proportion n’était que de 50% parmi les personnes qui avaient déposé une telle demande en 2005. D’un autre côté, la proportion de personnes tributaires de l’aide sociale après que l’AI a refusé de leur octroyer une rente est passée de 11,6 à 14,5%. C’est ce que montre une nouvelle étude de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Le développement continu de l’AI renforcera encore le travail de l’AI en faveur de la réadaptation, ce qui devrait réduire le nombre de transferts vers l’aide sociale. La réforme entrera vraisemblablement en vigueur en 2022.

Le travail de réadaptation fourni par l’AI a été considérablement renforcé à l’occasion de la 4e et surtout de la 5e révision de l’AI en 2004 et en 2008, mais aussi lors de la révision 6a en 2012. Un nombre plus élevé d’assurés ont ainsi bénéficié d’un soutien leur permettant de rester à leur poste ou assurant leur nouvelle réadaptation. Jusqu’à présent, il n’était pas possible de déterminer clairement si cet effort avait permis de maintenir durablement la capacité de gain de ces personnes ou s’il avait provoqué un transfert vers d’autres institutions de la sécurité sociale, en particulier vers l’aide sociale.

Afin de pouvoir répondre à ces questions, l’OFAS a constitué au cours des dix dernières années la base de données AS-AI-AC, qui permet d’analyser les passages entre l’aide sociale (AS), l’assurance-invalidité (AI) et l’assurance-chômage (AC). Cette base de données, actuellement gérée par l’Office fédéral de la statistique (OFS), couvre l’ensemble des personnes ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI entre 2005 et 2017. Elle s’étend désormais sur une période suffisamment longue pour rendre possibles des analyses de parcours. Le rapport de recherche « Évolution des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale », publié par l’OFAS, représente l’analyse la plus pertinente réalisée à ce jour sur cette base.

 

Davantage de demandes et de modifications de prestations de l’AI

L’étude met d’abord en évidence que le nombre de demandes de prestations déposées auprès de l’AI a augmenté d’environ un tiers entre 2005 et 2017, passant de 43 000 à 57 000. Environ un tiers des personnes ayant déposé une demande se sont vu octroyer des prestations de l’AI dans les quatre années suivantes. La nature des prestations accordées a fondamentalement changé : alors que le nombre de mesures externes de réadaptation a quasiment triplé, passant de 8% des assurés ayant déposé une demande en 2005 à 23% des assurés l’ayant fait en 2014, la part des rentes AI est quant à elle tombée, sur la même période, de 26 à 15%.

 

Davantage de personnes financièrement indépendantes

La part des personnes qui exerçaient une activité lucrative et ne touchaient pas de rente AI quatre ans après avoir déposé une demande de prestations à l’AI est passée de 50 à 58% au cours de la période considérée. Quant à la proportion de personnes tirant d’une activité lucrative un revenu supérieur à 3000 francs leur permettant de subvenir à leurs besoins, elle a progressé de 31 à 38% sur la même période. Davantage de personnes étaient ainsi financièrement indépendantes après avoir déposé une demande de prestations auprès de l’AI. Dans le même temps, la proportion de personnes ne touchant ni rente de l’AI, ni revenu d’une activité lucrative couvrant le minimum vital quatre ans après le dépôt d’une demande a, elle aussi, augmenté. De 40% parmi les assurés ayant déposé leur demande en 2006, elle a légèrement progressé pour atteindre 43% des demandes de prestations déposées en 2013.

 

Augmentation des transferts vers l’aide sociale

Dans de nombreux cas, les mesures de réadaptation de l’AI permettent aux assurés de maintenir ou de retrouver leur capacité de gain. Mais si ces assurés ne remplissent pas les conditions d’octroi d’une rente de l’AI, cela ne veut toutefois pas dire qu’ils retrouveront effectivement une place sur le marché du travail et qu’ils n’auront plus besoin d’aide. L’analyse des données AS-AI-AC met en évidence que de telles situations sont devenues plus fréquentes ces dernières années. Alors que 11,6% des assurés qui avaient déposé une demande AI en 2006 étaient tributaires de l’aide sociale quatre ans plus tard, cette proportion s’élevait à 14,5% en 2017, c’est-à-dire parmi les assurés ayant déposé une telle demande en 2013. Sur la base d’un modèle d’estimation qui élimine les facteurs externes à l’AI, on peut supposer que 5450 personnes touchaient l’aide sociale en 2017 parce qu’elles ne remplissaient plus les conditions d’octroi d’une rente AI, ceci en raison du recentrage sur la réadaptation opéré par les révisions de loi des dernières années. Ce chiffre représente environ 3% des cas d’aide sociale en 2017 ou 1,5% des 360 000 assurés ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI entre 2006 et 2013.

Par ailleurs, quelque 2000 personnes sont devenues tributaires de l’aide sociale au cours de la période considérée après que leur rente a été supprimée par l’AI. Cette situation pourrait toutefois s’expliquer par l’application d’une disposition de la révision 6a de l’AI qui a conduit à la révision de nombreuses rentes AI entre 2012 et 2014. Si c’est le cas, ces transferts de l’AI vers l’aide sociale représentent un phénomène uniquement temporaire. Une future analyse s’appuyant sur un ensemble encore plus large de données AS-AI-AC pourrait clarifier ce point.

 

Importance de l’évolution pour l’AI

Pour l’AI, les résultats de l’analyse montrent deux choses. Tout d’abord, la stratégie consistant à enregistrer le plus tôt possible les assurés confrontés à des problèmes de santé et à mettre en place des mesures ciblées pour maintenir leur poste de travail et leur capacité de gain s’avère juste et efficace. Ensuite, le soutien et les offres de réadaptation doivent être encore mieux conçus et mis en œuvre de façon ciblée pour réinsérer dans la vie active les assurés qui n’exercent pas (ou plus) d’activité lucrative. C’est précisément l’orientation générale adoptée pour le projet de développement continu de l’AI. Ce dernier propose de renforcer et d’étendre les mesures de réadaptation, en accordant une attention particulière aux jeunes assurés et aux assurés souffrant de troubles psychiques.

 

 

Interprétation des résultats et conclusion [extrait du Rapport de recherche OFAS 8/20]

Le nombre de personnes ayant déposé une première demande de prestations AI qui touchent l’aide sociale quatre ans plus tard a augmenté entre 2006 et 2013, tant en chiffres relatifs qu’en chiffres absolus. Du point de vue statistique, cette hausse ne s’explique ni par les changements intervenus dans la composition des demandeurs de prestations AI, ni par l’évolution des taux de chômage cantonaux. Toutes cohortes cumulées (2006-2013), quelque 36 520 personnes touchent l’aide sociale quatre ans après le dépôt de leur demande à l’AI ; on compte entre 3620 (2006) et 5720 (2013) personnes par cohorte. D’après les estimations proposées, environ un cinquième de ces bénéficiaires de l’aide sociale (21,2%, soit 7730 personnes) ne l’auraient pas perçue quatre ans après le dépôt de leur demande de prestations auprès de l’AI si le taux consolidé des rentes octroyées était resté le même qu’en 2006. Le pourcentage (maximal) de transfert calculé sur la base de ces estimations a augmenté au fil du temps : à partir de la cohorte 2009, le nombre estimé de cas de transfert par année est passé de 920 (2009 ; 20,3% de 4530) à 1650 (2013 ; 28,9% de 5720).

Le nombre de passages à l’aide sociale après une suppression de rente a également augmenté entre 2008 et 2015, donc au moins en partie avant l’entrée en vigueur, en 2012, de la 6e révision de l’AI. Statistiquement, cette hausse n’est pas liée aux changements intervenus dans la composition des personnes dont la rente a été supprimée ni à l’évolution du taux de chômage. Parmi les personnes dont la rente AI a été supprimée entre 2008 et 2015, quelque 2700 perçoivent l’aide sociale deux ans plus tard. Ici aussi, on observe une tendance à la hausse au fil des années, avec 240 cas en 2009 et environ 410 en 2015.

Une partie de ces transferts s’explique par le fait que la proportion de personnes qui se voient octroyer une rente AI et n’ont ainsi plus besoin de l’aide sociale est en diminution depuis 2010, comme l’ont montré les analyses réalisées à ce sujet. Faute de données suffisantes sur l’aide sociale datant d’avant 2010, de telles analyses ne sont possibles qu’à partir de cette année-là. L’autre partie du transfert s’explique par la hausse du nombre de nouveaux bénéficiaires de l’aide sociale au terme d’une procédure AI, qui ne peut également être observée qu’à partir de 2010.

Des calculs plus approfondis montrent en outre qu’une part proportionnellement élevée de personnes bénéficiant de l’aide sociale au terme d’une procédure AI continuent à la toucher pendant une longue période. Sur tous les nouveaux demandeurs de prestations AI de la cohorte 2006 qui perçoivent l’aide sociale en 2010, 59% en sont encore bénéficiaires pendant les quatre années suivantes, c’est-à-dire jusqu’en 2014. Pour les cohortes 2007, 2008 et 2009, cette proportion augmente légèrement, jusqu’à 61%. En comparaison, selon les indicateurs de l’aide sociale dans les villes suisses (Initiative des villes 2019, données de 14 villes), 40 à 50% des personnes dont le cas a été clôturé en 2018 ont touché l’aide sociale pendant moins d’un an, et 20 à 30% d’entre elles pendant trois ans ou plus, ces chiffres variant d’une ville à l’autre.

Pour conclure, changeons à présent de perspective pour pouvoir mieux classer les chiffres présentés selon leur signification pour l’aide sociale. Quittons le niveau des cohortes AI et passons à une vue transversale, en considérant les 175 240 unités d’assistance qui ont eu recours à l’aide sociale en 2017 selon la statistique de l’aide sociale. La question examinée est celle de savoir dans combien d’unités d’assistance pour lesquelles l’aide sociale a été perçue en 2017 se trouvent des personnes qui ont déposé une demande de prestations à l’AI entre 2006 et 2013 ou dont la rente a été supprimée entre 2008 et 2015. Du côté de l’AI, l’analyse prend en compte les quelque 279 000 personnes ayant déposé une demande entre 2006 et 2013. Environ 27 710 d’entre elles ont bénéficié de l’aide sociale en 2017, parmi lesquelles 2000 couples en ménage commun dont les deux membres ont déposé une demande auprès de l’AI. Comme l’unité d’assistance constitue l’unité de base de l’aide sociale, ces couples ne doivent être comptés qu’une seule fois ; en supprimant le double comptage des couples, il reste ainsi environ 25 710 bénéficiaires de l’aide sociale ayant déposé une demande auprès de l’AI par le passé. Près de 14,7% des 175 240 unités d’assistance qui ont touché l’aide sociale en 2017 incluaient par conséquent des personnes ayant déposé une demande auprès de l’AI entre 2006 et 2013. Outre ces personnes, on dénombre en 2017 plus de 2000 bénéficiaires de l’aide sociale dont la rente a été supprimée entre 2008 et 2015. Ce chiffre correspond à 1,1% des 175 240 unités d’assistance. Près d’une de ces unités d’assistance sur six (15,8%) correspond ainsi à des personnes soit qui ont déposé une demande de prestations auprès de l’AI auparavant (14,7%), soit dont la rente a été supprimée pendant la période mentionnée (1,1%).

En appliquant le pourcentage moyen de transfert de 21,2%, obtenu par une estimation statistique, aux 25 710 personnes qui, en 2017, touchaient l’aide sociale alors qu’elles avaient précédemment déposé une demande de prestations auprès de l’AI (en comptant les couples comme une seule personne), on arrive à 5450 personnes, soit 3,1% de l’ensemble des dossiers d’aide sociale de l’année 2017. Par ailleurs, si les suppressions de rentes intervenues entre 2008 et 2015 ayant débouché sur une perception de l’aide sociale en 2017 sont toutes assimilées à des transferts de l’AI vers l’aide sociale, soit 1,1% supplémentaires, cela représente, avec le nombre estimé de cas de transfert, un total de 4,2% des dossiers d’aide sociale pour l’année 2017.

 

Développement d’un système d’indicateurs AS-AI-AC

Sur la base des résultats des analyses mettant l’accent sur l’AI et des conclusions qui en ont été tirées, des recommandations générales sont formulées dans un rapport distinct concernant le développement du système AS-AI-AC et la création d’un système d’indicateurs destiné à surveiller la situation dans ce domaine. Ce rapport est disponible en allemand sous forme électronique sur le site de l’Office fédéral des assurances sociales :

https://www.bsv.admin.ch/bsv/home.webcode.html?webcode=D353.E059.de

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 17.11.2020 consultable ici

Rapport de recherche OFAS 8/20 « Empfehlungen zur Weiterentwicklung Indikatorensystem « SHIVALV » mit Fokus auf Entwicklung von Übertritten zwischen IV, ALV und Sozialhilfe » consultable ici (rapport en allemand, avec résumé en français, en italien et en anglais).

 

 

Publication du rapport de recherche : « Evaluation des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle »

Publication du rapport de recherche : « Evaluation des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle »

Rapport « Evaluation der Integrationsmassnahmen zur Vorbereitung auf die berufliche Eingliederung » consultable ici

 

Les mesures de réinsertion ont été introduites avec la 5e révision de l’AI et visent à préparer l’assuré à suivre des mesures d’ordre professionnel ou à réintégrer le monde du travail. L’évaluation analyse l’évolution des mesures de réinsertion depuis 2012 ainsi que celle des groupes cibles, de la mise en œuvre, des coûts et des résultats visés.

 

Avant-propos de l’Office fédéral des assurances sociales

Entrée en vigueur le 1er janvier 2008, la 5e révision de la loi sur l’assurance-invalidité a introduit, conformément au principe selon lequel la réadaptation prime la rente, deux nouveaux instruments de réadaptation professionnelle : les mesures d’intervention précoce et les mesures de réinsertion. Alors que les évaluations réalisées ces dernières années ont mis l’accent sur l’analyse de la mise en œuvre et de l’efficacité des diverses mesures de réadaptation professionnelle, le présent rapport est consacré exclusivement, et ce pour la première fois, aux mesures de réinsertion. Il analyse en détail la demande, les coûts, les caractéristiques des bénéficiaires de mesures, les contextes dans lesquels elles sont adoptées et, naturellement, les effets des mesures de réinsertion, ainsi que les facteurs de succès et les obstacles.

Comme on pouvait s’y attendre, le nombre de mesures octroyées a fortement augmenté depuis l’introduction de ces mesures et les coûts ont suivi une tendance similaire. Les résultats montrent également que le taux de succès a nettement augmenté ces dernières années. Alors qu’en 2012, quelque 52% des assurés ont achevé leur mesure de réinsertion avec succès, atteignant une capacité de travail d’au moins 50%, ce taux est passé à 65% en 2017. Ce résultat réjouissant pourra certainement encore s’améliorer grâce à l’optimisation constante des mesures de réinsertion. L’examen des effets à long terme des mesures de réinsertion montre enfin que près de 40% des assurés exercent une activité professionnelle trois ans après avoir achevé la mesure de réinsertion, la plupart réalisant un revenu qui couvre le minimum vital.

Quant aux facteurs de succès d’une réadaptation professionnelle durable, le présent rapport de recherche dresse le même tableau que nombre d’évaluations de la réadaptation professionnelle : moins il s’est écoulé de temps depuis la dernière activité professionnelle d’une personne, plus ses chances sont grandes de retrouver un emploi à l’achèvement d’une mesure de réinsertion. Les résultats montrent également que les mesures de réinsertion sont plus efficaces si au moins une partie de la mesure se déroule sur le marché primaire du travail.

Les résultats, les enseignements et les recommandations de l’étude renforcent l’orientation du Développement continu de l’assurance-invalidité et valident l’élargissement prévu des mesures telles que l’extension des mesures de réinsertion aux jeunes, l’abandon de l’impossibilité de renouveler les mesures de réinsertion au-delà d’un an ou de deux ans durant toute la vie de l’assuré et le soutien financier à de nouveaux employeurs pour des mesures de réinsertion. Les résultats du présent rapport seront repris dans les travaux en cours dans le cadre du Développement continu de l’assurance-invalidité.

 

Résumé [extraits]

La 5e révision de l’AI, en 2008, a introduit le principe des mesures de réinsertion, qui visent avant tout à préparer les personnes présentant des troubles psychiques à la réadaptation professionnelle. Les personnes assurées sont préparées petit à petit aux exigences du marché et retrouvent une capacité de travail équivalant à 50% au moins d’un temps plein. La présente évaluation analyse l’évolution des mesures de réinsertion depuis 2012 ainsi que celle des groupes cibles, de la mise en œuvre, des coûts et des résultats visés.

En 2018, 4172 assurés ont bénéficié d’une nouvelle mesure de réinsertion visant à les préparer à la réadaptation professionnelle, soit une augmentation de 68,8% par rapport à 2012. Par ailleurs, il s’agit maintenant plus fréquemment de « mesures de réinsertion proche de l’économie avec soutien sur le lieu de travail » (REST).

 

Utilisation et évolution différenciées des mesures de réinsertion en fonction des offices AI

Après une phase introductive de quatre ans, les mesures de réinsertion ont été appliquées dans l’ensemble des offices AI à partir de 2012. On constate toutefois des différences sur les plans de l’évolution et de l’utilisation des mesures : certains offices essaient de délivrer une décision de principe aussi rapidement que possible et utilisent activement les mesures de réinsertion afin d’identifier et d’accompagner les assurés assez tôt dans le processus de maladie. D’autres ont une interprétation très stricte des mesures de réinsertion et les proposent en premier lieu aux assurés ayant quitté le marché du travail depuis plus longtemps. Ils utilisent ces mesures pour déterminer le degré d’endurance et la capacité de travail des assurés et ont ensuite recours à d’autres types de mesures, notamment des mesures d’ordre professionnel, afin de réinsérer les assurés sur le marché du travail.

Par rapport à l’ensemble des nouvelles demandes à l’AI, plus de la moitié des offices AI (14) ont recours plus fréquemment que la moyenne aux mesures de réinsertion. Dans neuf offices, ce taux a fortement augmenté depuis 2012. Ces offices se distinguent par les points suivants :

  • Une part relativement élevée des mesures de réinsertion se déroulent sur le marché ordinaire du travail (>= 25%).
  • Les taux de succès sont largement supérieurs à la moyenne : plus de 70% des assurés bénéficiant de ces mesures atteignent une capacité de réadaptation professionnelle équivalant à 50% au moins d’un temps complet.
  • Depuis 2012, les coûts ont soit diminué, soit très légèrement augmenté.
  • En outre, les offices AI présentant une hausse de mesures de réinsertion nouvellement octroyées plus élevée que la moyenne (hausse de 100% ou plus) ont partiellement modifié leur pratique d’octroi et/ou introduit des mesures de promotion en la matière.

 

Mise en œuvre des mesures de réinsertion

En moyenne (médiane), il s’écoule 10 mois entre la (nouvelle) demande à l’AI et le premier recours à une mesure de réinsertion (hors bénéficiaires de rentes AI). Les assurés qui avaient encore une activité professionnelle ou étaient inscrits au chômage un an avant l’octroi des mesures de réinsertion reçoivent une décision de l’office AI après huit ou neuf mois. Cette procédure se comprend, puisque les mesures sont d’autant plus efficaces que l’intervalle de temps par rapport à la dernière activité professionnelle est court. Par contre, les personnes sans activité professionnelle, percevant des indemnités journalières de l’assurance-maladie ou l’aide sociale doivent attendre en moyenne six mois de plus entre la demande d’AI et le début des mesures de réinsertion. Or, chaque semestre supplémentaire divise par deux la probabilité de succès de ces mesures, compte tenu des autres facteurs d’influence.2 Il semble que les offices AI aient reconnu l’importance d’allouer aussi rapidement que possible, dans le cours de la maladie, des mesures de réinsertion aux assurés. La part des assurés bénéficiant déjà de ces mesures lors de la phase d’intervention précoce (IP) a nettement augmenté depuis 2016. Dans le même temps, la part des rentiers bénéficiant de mesures de réinsertion diminue sans cesse. Cependant, ces tendances varient en fonction des offices AI.

Depuis 2016, les offices AI tendent à allouer davantage de mesures de réinsertion. En moyenne, ils octroient deux mesures (sans prolongation) par assuré. Jusqu’à trois mesures, chaque mesure supplémentaire augmente la probabilité de succès, mais à partir de quatre, la hausse n’est plus significative. Combiner des mesures de réinsertion, dont la dernière sur le marché ordinaire du travail, et faire accompagner l’assuré par un coach en milieu de travail jusqu’à son retour sur ce marché offre les meilleures chances de succès.

La durée passée dans les mesures de réinsertion augmente proportionnellement au nombre de mesures. La combinaison « classique » d’entraînement à l’endurance suivi d’un entraînement progressif dure en moyenne plus de neuf mois. Lorsque les mesures de réinsertion débutent durant la phase d’IP, les assurés ont en général recours aux mesures pendant près d’un an. Chaque mois supplémentaire augmente les chances de succès d’un facteur de 1,01. Toutefois, cette progression se stabilise ou ralentit après douze mois.

 

Les interruptions surviennent principalement durant l’entraînement à l’endurance

Près d’un cinquième des mesures de réinsertion sont interrompues. En général, les assurés abandonnent déjà au cours de l’entraînement à l’endurance. Ce type de mesure est le plus fréquent à se terminer sur un échec, à savoir le fait qu’il n’est suivi par aucune autre mesure de réadaptation. L’abandon est nettement plus rare lorsque la mesure prend la forme d’une réinsertion proche de l’économie avec un soutien sur le lieu de travail. L’écart parfois important des taux d’interruption constaté entre les cinq offices AI analysés dépend notamment de la composition des groupes cibles. Les offices AI présentant une part plus élevée d’assurés ayant cessé toute activité professionnelle depuis un certain temps ont des taux plus hauts. Les mesures de réinsertion sont avant tout interrompues en raison d’une dégradation de l’état de santé, d’une absence de progrès ou d’un manque de coopération et de motivation des assurés.

 

Les mesures de réinsertion sont plus fructueuses lorsqu’elles se déroulent sur le marché ordinaire du travail

La possibilité de mettre en œuvre les mesures de réinsertion dans l’économie libre a gagné en importance ces dernières années dans les offices AI. On observe que ces derniers exercent une certaine pression sur les prestataires afin de permettre l’embauche dans l’économie libre et de soutenir les personnes bénéficiant de mesures de réinsertion dans leur recherche d’une place de travail adaptée. Mais pour réussir ce passage sur le marché ordinaire du travail, les assurés doivent d’abord être suffisamment stabilisés. Cette stabilité est atteinte en développant progressivement leur endurance dans un cadre institutionnel. Ceci fait, il semble important pour les assurés de se confronter à la réalité. Les chances de succès du retour au travail sont donc optimales lorsque les mesures de réinsertion sont mises en œuvre au plus proche de l’économie. Comme le montrent les analyses approfondies réalisées sur les cinq études de cas, l’approche des offices AI est très variable. Ces écarts s’expliquent par une interprétation plus ou moins stricte de l’objectif des mesures. Par ailleurs, la taille du territoire ou la topographie d’un canton jouent un rôle dans le fait que les mesures de réinsertion soient mises en œuvre dans une institution ou sur le marché ordinaire du travail. Les cantons plutôt urbains ou ceux présentant un taux de chômage relativement élevé privilégient les institutions ou le marché secondaire du travail. La diversité des conditions-cadres n’est toutefois pas la seule explication. Au cours des dernières années, certains offices AI ont intensifié leurs contacts avec les employeurs et développé leur réseau.

 

Hausse des dépenses corrélée à la hausse du nombre de cas

Les dépenses des mesures de réinsertion augmentent sans cesse depuis 2012, ce qui s’explique avant tout par le fait que le nombre d’assurés bénéficiant de ces mesures augmente au même rythme. Toutefois, cette corrélation linéaire n’est pas vraie pour tous les offices AI. Malgré l’augmentation du nombre de cas constatée jusqu’en 2018, certains ont réduit leurs dépenses. Il s’avère qu’ils ont recours aux mesures de réinsertion plus rapidement dans le cours de la maladie et que ces mesures se déroulent plus fréquemment sur le marché ordinaire du travail, sous la forme d’une REST.

L’augmentation des coûts varie également en fonction des offices AI. Ces coûts englobent l’ensemble des prestations spécifiques octroyées tout au long des mesures de réinsertion. Leur montant est étroitement lié à la durée et au nombre de mesures effectuées. Les offices AI où la durée moyenne des mesures a nettement augmenté au cours des dernières années présentent en général aussi une augmentation des coûts supérieure à la moyenne. Le passage des forfaits journaliers aux forfaits mensuels n’a aucune influence significative, en termes statistiques, sur la variance de l’évolution des coûts, même si, avec les forfaits mensuels, les offices AI assument un certain risque d’absence. Les forfaits journaliers, de par leur flexibilité, sont surtout utilisés dans les cas complexes comportant de nombreuses absences. Selon les gestionnaires de contrat interrogés, la hausse des coûts s’explique également par l’absence d’alternative à l’entraînement progressif, qui pourrait remplacer les mesures de réinsertion lorsque la personne a atteint une capacité de travail de 50% mais que sa performance doit être encore renforcée.

 

Solutions transitoires et passage sur le marché ordinaire de l’emploi

Depuis 2013, le taux de succès des mesures de réinsertion a augmenté de 9 points de pourcentage pour s’établir à 65% en 2017. Après avoir achevé une mesure de réinsertion, 46% des assurés atteignant une capacité de réadaptation professionnelle d’au moins 50% passent ensuite à une mesure d’ordre professionnel, et 1% à un travail de transition. Depuis 2013, la part des personnes trouvant un emploi, au moins à temps partiel, à l’issue d’une mesure de réinsertion est restée stable. Toutefois, la part des assurés s’inscrivant à l’AC après avoir complété une mesure de réinsertion (24%) a augmenté de 7%. Dans le même temps, la part des assurés percevant une rente AI entière ou partielle (sans activité professionnelle) par rapport à tous les assurés en mesure de réinsertion a diminué de 6% en 2017 pour s’établir à 12%.

Le nombre d’assurés bénéficiant d’une mesure d’ordre professionnel à l’issue d’une mesure de réinsertion est nettement plus élevé dans les cantons présentant un taux de chômage supérieur à la moyenne. La manière dont les offices AI conçoivent les mesures de réinsertion influence également le choix de la solution transitoire. Les offices utilisant ces mesures pour déterminer l’endurance et développer la capacité de travail (jusqu’à 50%) passent ensuite aux mesures d’ordre professionnel dans l’optique de renforcer cette capacité.

Le succès du retour en emploi dans l’économie libre dépend avant tout de deux facteurs : d’une part, les personnes sans activité professionnelle pendant moins d’un an avant l’octroi des mesures de réinsertion se réinsèrent plus facilement. D’autre part, les personnes ayant effectué leur dernière mesure de réinsertion sur le marché ordinaire du travail ont plus de chances de retrouver un poste.

 

Solution transitoire de la rente AI

Parmi les cohortes 2012-2017 étudiées, en moyenne 17,7% des assurés percevaient encore une rente AI au cours de l’année pendant laquelle ils ont complété une mesure de réinsertion. Pour près de 70% d’entre eux, il s’agissait d’une rente complète. En outre, environ 40% étaient des nouvelles rentes (allouées pour la première fois). La part des nouvelles rentes AI par rapport à tous les rentiers percevant encore une rente au cours de l’année de complétion d’une mesure de réinsertion a nettement augmenté ces dernières années. Cette évolution s’explique en premier lieu par le recul du nombre de rentiers bénéficiant d’une mesure de réadaptation. Il faut donc en conclure que, s’agissant des mesures de réinsertion, les offices AI privilégient de plus en plus les personnes récemment inscrites au détriment des rentiers.

 

Efficacité à moyen terme des mesures de réinsertion

Un regard sur la question de la durabilité de l’intégration au marché du travail des personnes ayant effectué une mesure de réinsertion montre que trois ans après la dernière mesure, 37% sont sur le marché du travail. La plupart disposent d’un revenu mensuel de 3000 francs ou plus. Un quart des assurés ayant complété ou interrompu une mesure trois ans auparavant perçoivent une rente AI entière, et 16% une rente partielle. En outre, 2% sont inscrits au chômage et 9% perçoivent l’aide sociale. Trois ans après avoir effectué une mesure de réinsertion, une personne sur dix n’a pas de revenu provenant d’une activité professionnelle ou des contributions du système de sécurité sociale.

 

Facteurs de succès et recommandations

Le taux de succès de la préparation des assurés à un objectif de réadaptation de 50% de la capacité de travail dépend du profil des assurés et des modalités de mise en œuvre. De plus, le type de mise en œuvre influence dans une large mesure les coûts des mesures de réinsertion. Toutefois, des facteurs « mous » tels que la collaboration des acteurs, la formulation des objectifs, le choix de la mesure de réinsertion, le suivi des assurés et l’aspect social (milieu familial, etc.) jouent également un grand rôle dans le déroulement des mesures. Les recommandations d’amélioration se fondent sur les résultats de l’évaluation et les bases légales en vigueur au moment de la rédaction du rapport. Les conditions de succès et les recommandations qui en sont issues sont résumées ci-après.

 

Profil des assurés

Les caractéristiques sociodémographiques, l’état de santé et la situation professionnelle avant l’octroi des mesures de réinsertion ont une influence déterminante sur le succès de ces dernières. Dans le même temps, les mesures devraient débuter aussi vite que possible après la (première) demande d’AI. En effet, lorsqu’il s’écoule plus de six mois entre cette demande et le début des mesures, les chances de succès sont divisées par deux. De plus, la stabilité de l’état de santé est cruciale à chaque étape des mesures de réinsertion.

Recommandation :

  1. Mettre en œuvre les mesures de réinsertion aussi rapidement que possible, en tenant compte de la stabilité de l’état de santé et des informations correspondantes (d’entente avec le médecin traitant, par ex.), avant que la personne n’ait pris trop de distance avec la vie professionnelle.
  2. Si des mesures de réinsertion sont mises en œuvre dans le cadre de la réadaptation de rentiers AI, il convient au préalable d’établir rigoureusement s’il existe réellement une chance pour ces derniers de retourner sur le marché ordinaire du travail. On utilisera pour ce faire d’autres instruments d’évaluation que les mesures de réinsertion.
  3. Les spécialistes de la réadaptation définiront les objectifs en collaboration avec les prestataires, les assurés et, si nécessaire, avec les médecins traitants, dans l’optique d’une gestion de cas globale et coordonnée. Les spécialistes de la réadaptation sont responsables de déterminer les objectifs des diverses mesures. Les objectifs sont adaptés aux besoins et à la situation des personnes concernées.

 

Modalités de mise en œuvre et durée des mesures de réinsertion

Les mesures ont les meilleures chances d’aboutir lorsqu’au moins une partie d’entre elles se déroulent sur le marché ordinaire du travail et que l’assuré est suivi par un coach en milieu de travail. La durée des mesures joue également un rôle : jusqu’à un an, chaque mois supplémentaire augmente les chances de succès de 1%. Ensuite, ces chances se stabilisent ou ralentissent nettement. De plus, il est important de préparer les assurés de manière ciblée à leur retour sur le marché du travail dès que leur état de santé est suffisamment stable. Recommandation :

  1. La préparation à la réadaptation professionnelle dans le cadre d’une mesure de réinsertion se fera par étapes, à savoir que le travail est découpé en phases et que les divers types de mesures de réinsertion sont combinés de manière réfléchie. Une partie au moins des mesures de réinsertion se dérouleront sur le marché ordinaire du travail.
  2. Les mesures de réinsertion seront organisées selon des modèles flexibles permettant aussi d’alterner entre institutions et marché du travail ou promouvant des formes intermédiaires entre institution et employeurs du marché ordinaire, et garantissant un suivi étroit des assurés et des employeurs.
  3. Si l’objectif est d’atteindre une capacité de travail de 100%, les mesures permettant de renforcer la capacité de travail à l’issue de la mesure de réinsertion font actuellement défaut. Il convient donc de les mettre sur pied, dans le cadre des mesures de réinsertion ou d’occupation.

 

Contact avec les employeurs

Les contacts personnels s’avèrent précieux quand il s’agit de présenter les possibilités de l’AI aux employeurs, d’expliquer le processus et de réduire les freins à l’embauche de personnes atteintes de maladies psychiques. Ces dernières années, quelques offices AI, notamment dans les cantons ruraux, ont pris contact avec les employeurs et développé un réseau.

Recommandation :

  1. Intensifier le contact avec les employeurs et le soutien proactif de ces derniers (échanges réguliers, information transparente ou manifestations de réseautage, etc.). Les offices AI des cantons ruraux peuvent servir de modèles de bonnes pratiques.

 

Prise en compte des facteurs non liés à l’AI

Le succès ou l’échec d’une mesure de réinsertion ne dépend pas exclusivement de la gestion du spécialiste de la réadaptation ou du prestataire : l’environnement social et la situation économique des assurés ont aussi un rôle prépondérant. Certains offices AI engagent un spécialiste du coaching en milieu de travail pour s’occuper des facteurs « non liés à l’AI ». À l’avenir, la complexité des cas continuera de croître. La nécessité d’une collaboration interinstitutionnelle augmentera donc en conséquence.

Recommandation :

  1. Les offices AI renforceront la clarification globale de la situation et tiendront compte des facteurs non liés à l’AI ou se coordonneront et entretiendront des contacts réguliers avec les services compétents pour ces problèmes.

 

Passage sur le marché ordinaire de l’emploi

Lorsque les mesures de réinsertion se déroulent en institution, le choix du prestataire est crucial ; il est, par exemple, important que les places d’entraînement au travail soient proches du marché primaire du travail. De plus, le prestataire devrait faire montre d’un certain engagement à soutenir les assurés dans leur recherche d’un poste. Les offices AI peuvent obliger les institutions à davantage axer leur offre sur le passage au marché ordinaire de l’emploi. Il est donc important que l’institution collabore avec un spécialiste de la réadaptation qui sera présent sur place. Mais garder le même interlocuteur s’avère également crucial pour un retour réussi sur le marché du travail.

Recommandation :

  1. S’agissant de la gestion des cas, il faudra s’efforcer de conserver le même interlocuteur, y compris après les mesures de réinsertion. En outre, on veillera particulièrement à proposer des places de travail adaptées aux besoins qui correspondent aux capacités ou possibilités des assurés.
  2. Il convient également de réfléchir à la meilleure manière, pour l’AI, de soutenir et d’accompagner l’assuré sur le marché ordinaire du travail à l’issue des mesures de réinsertion, par exemple pendant le temps d’essai.

 

 

Rapport n° 17/20 « Evaluation der Integrationsmassnahmen zur Vorbereitung auf die berufliche Eingliederung » consultable ici (rapport en allemand avec des résumés en français, italien et anglais)

 

 

8C_810/2019 (f) du 07.09.2020 – 3 accidents de la circulation – Séquelles physiques en lien de causalité avec chacun des accidents – 6 LAA / Absence de séquelles physiques en lien de causalité avec le 2e accident / Lien de causalité adéquate entre le 3e accident et les troubles (lésions du rachis cervical par accident de type « coup du lapin » examiné selon le 115 V 133) / Examen de la causalité adéquate en cas d’accidents successifs

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_810/2019 (f) du 07.09.2020

 

Consultable ici

 

3 accidents de la circulation – Séquelles physiques en lien de causalité avec chacun des accidents / 6 LAA

Absence de séquelles physiques en lien de causalité avec le 2e accident

Lien de causalité adéquate entre le 3e accident et les troubles (lésions du rachis cervical par accident de type « coup du lapin » examiné selon le 115 V 133)

Examen de la causalité adéquate en cas d’accidents successifs

 

Assurée, née en 1982, travaillant en qualité d’ensemblière, est victime de trois accidents successifs de la circulation :

  • Le 19.01.2009, elle a subi une distorsion cervicale simple en percutant une voiture à l’arrêt. Le cas avait alors été pris en charge par l’assurance-accidents, qui a versé des prestations jusqu’en décembre en 2010.
  • Le 02.12.2012, la voiture dont elle était passagère à l’arrière au milieu a glissé sur une plaque de glace et s’est brusquement arrêtée contre une butte, projetant les passagers vers leur gauche. Selon la description de l’accident figurant dans la déclaration de sinistre, l’arrêt soudain du véhicule a projeté l’assurée contre le passager arrière assis à côté d’elle ; afin d’éviter le choc entre eux, l’assurée « a effectué une torsion au niveau du bassin et du bras » pour se retenir contre la fenêtre ; elle a ressenti par la suite des douleurs au niveau de la fesse et de la jambe. Il est en outre mentionné « hanche droite » sous la rubrique « partie du corps atteinte ». Entendue à son domicile le 13.06.2013, l’assurée a précisé que l’accident s’était produit à vitesse réduite et que le voyage avait pu se poursuivre après l’arrêt du véhicule contre le talus. A la suite de l’accident du 02.12.2012, l’assurée a poursuivi son activité professionnelle, jusqu’à ce qu’elle consulte le 28.12.2012 son médecin traitant (médecin-chef du Service de chirurgie orthopédique et de réadaptation physique du Centre médical D.__), lequel a attesté une incapacité de travail dès cette date.
  • Le 19.07.2013, alors qu’elle était à l’arrêt devant un signal « cédez le passage » au volant de son véhicule, celui-ci a été percuté par le véhicule qui la suivait. En raison de douleurs cervicales, de vertiges et de nausées, elle s’est rendue aux urgences de l’Hôpital E.__ trois jours plus tard, où les médecins ont diagnostiqué une contusion cervicale et des céphalées post-traumatiques. Un CT-scan cérébral et un angio-CT des troncs supra-aortiques pratiqués le 22.07.2017 n’ont pas mis en évidence de lésion traumatique cranio-cervicale visible.

L’assurance-accidents a confié la mise en œuvre d’une expertise neurologique à un spécialiste en neurologie, qui a constaté un examen neurologique parfaitement normal, relevant néanmoins un tableau de contractures musculaires douloureuses, une labilité émotionnelle, des phénomènes d’ordre neurovégétatif et des troubles du sommeil d’ordre psychophysiologique entrant dans le cadre d’un état de stress chronique. Sur le plan psychiatrique, l’assurée est suivie par un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, depuis le 08.02.2013, en raison notamment d’un état de stress post-traumatique.

L’assurance-accidents a nié le droit de l’assurée à des prestations d’assurance pour les suites de l’accident du 02.12.2012, au motif qu’il n’existait pas de lien de causalité au moins probable entre cet événement et les troubles présentés par l’assurée. En revanche, elle prenait en charge les suites de l’accident du 19.07.2013 jusqu’au 31.03.2016, considérant que les troubles subsistant au-delà de cette date étaient exclusivement de nature maladive.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.11.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Séquelles physiques en lien de causalité avec l’accident du 02.12.2012

Sur le plan médical, il est établi que l’assurée a attendu le 28.12.2012 avant de consulter son médecin traitant, lequel a attesté une incapacité de travail en raison d’un burn-out. Cela étant, on ne peut pas retenir que l’accident du 02.12.2012 aurait justifié l’incapacité de travail attestée à compter du 28.12.2012, bien que le praticien ait mentionné une accentuation des crampes et des douleurs en raison de celui-ci dans son rapport du 14.01.2013. Par ailleurs, il ressort des rapports médicaux du médecin-traitant que l’assurée souffrait déjà de nombreuses affections avant l’événement litigieux (vertiges rotatoires, cervicoscapulalgies bilatérales, discopathies cervicales, troubles statiques, déconditionnement musculaire).

Quant à la hernie discale décelée par une IRM lombaire du 08.03.2013 et opérée le 09.04.2013, aucun médecin ne l’a expressément attribuée à l’accident du 02.12.2012. Certes, le spécialiste en médecine physique et réadaptation consulté a considéré qu’elle était très probablement due à l’événement en cause. Il n’en reste pas moins qu’il motive cette appréciation uniquement par l’absence de problèmes rachidiens antérieurs à l’accident du 02.12.2012 « hormis un bref épisode de lombalgies aigües et modérées en 2004 » et par l’apparition immédiate de la symptomatologie douloureuse, ce qui est insuffisant pour établir un lien de causalité naturelle avec l’accident du 02.12.2012 (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc »; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb p. 341 s.; arrêt 8C_331/2015 du 21 août 2015 consid. 2.2.3.1, in SVR 2016 UV n° 18 p. 55). On rappellera en outre que selon l’expérience médicale, pratiquement toutes les hernies discales s’insèrent dans un contexte d’altération des disques intervertébraux d’origine dégénérative, un événement accidentel n’apparaissant qu’exceptionnellement, et pour autant que certaines conditions particulières soient réalisées, comme la cause proprement dite d’une telle atteinte; une hernie discale peut être considérée comme étant due principalement à un accident lorsque celui-ci revêt une importance particulière, qu’il est de nature à entraîner une lésion du disque intervertébral et que les symptômes de la hernie discale (syndrome vertébral ou radiculaire) apparaissent immédiatement, entraînant aussitôt une incapacité de travail (arrêt 8C_746/2018 du 1er avril 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). Or en l’espèce, ces conditions ne sont manifestement pas remplies.

Pour le reste, on ne voit pas que les « tensions rachidiennes » soient constitutives de séquelles physiques organiques; quant aux brèves réponses du médecin traitant à un questionnaire soumis par la protection juridique de l’assurée – dans lesquelles il soutient que les troubles actuels, soit au 27.05.2016, seraient en lien de causalité certain avec l’accident du 02.12.2012 « en raison de l’accentuation des douleurs et des crampes dans un contexte de myogélose global » -, elles ne répondent pas aux critères jurisprudentiels en matière de valeur probante des rapports médicaux (cf. ATF 134 V 231 consid. 5.1 p. 232 et l’arrêt cité) et ne sont pas suffisamment étayées.

En conclusion, il n’est pas possible de déduire des rapports susmentionnés un lien de causalité entre l’accident du 02.12.2012 et les atteintes dont l’assurée a souffert ultérieurement sur le plan somatique.

 

Lien de causalité adéquate entre l’accident du 19.07.2013 et ses troubles persistant au-delà du 31.03.2016

En matière de lésions du rachis cervical par accident de type « coup du lapin », de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral sans preuve d’un déficit fonctionnel organique, l’existence d’un lien de causalité naturelle entre l’accident et l’incapacité de travail ou de gain doit en principe être reconnue en présence d’un tableau clinique typique présentant de multiples plaintes (maux de têtes diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc.; ATF 134 V 109 consid. 9 p. 122 ss).

Pour l’examen de la causalité adéquate, selon la jurisprudence, la situation dans laquelle les symptômes, qui peuvent être attribués de manière crédible au tableau clinique typique, se trouvent toujours au premier plan doit être distinguée de celle dans laquelle l’assuré présente des troubles psychiques qui constituent une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique caractéristique habituellement associé aux traumatismes en cause :

  • Dans le premier cas, cet examen se fait sur la base des critères particuliers développés pour les cas de traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale, de traumatisme analogue à la colonne cervicale ou de traumatisme cranio-cérébral, lesquels n’opèrent pas de distinction entre les éléments physiques et psychiques des atteintes (cf. ATF 134 V 109 consid. 10.3 p. 130; 117 V 359 consid. 6a p. 367).
  • Dans le second cas, il y a lieu de se fonder sur les critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident, c’est-à-dire en excluant les aspects psychiques (cf. ATF 134 V 109 précité consid. 9.5 p. 125 s.; 127 V 102 consid. 5b/bb p. 103 et les références; 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140 et 403 consid. 5c/aa p. 409).

En l’occurrence, les juges cantonaux confirmé la présence d’un tableau clinique caractéristique habituellement associé aux traumatismes de type « coup du lapin ». Pour l’examen de la causalité adéquate, ils se sont fondés sur les critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident, c’est-à-dire en excluant les aspects psychiques, considérant (implicitement) que l’assurée présentait des troubles psychiques constituant une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique. Dans le cadre de cet examen, ils ont qualifié l’événement du 19.07.2013 d’accident de gravité moyenne, à la limite inférieure de cette catégorie, et ont considéré qu’aucun critère n’était réalisé.

L’application des critères en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident et la qualification en tant qu’accident de gravité moyenne à la limite inférieure de la catégorie ne sont pas contestées par l’assurée et n’apparaissent pas critiquables au vu des rapports du psychiatre traitant, d’une part, et des déclarations de l’assurée et du rapport biomécanique, d’autre part. En cas d’accidents de gravité moyenne à la limite des accidents de peu de gravité, il faut un cumul de quatre critères au moins parmi les sept consacrés par la jurisprudence ou que l’un des critères se manifeste avec une intensité particulière (arrêt 8C_249/2018 du 12 mars 2019 consid. 5.1, in SVR 2019 UV n° 27 p. 99). Il y a dès lors lieu d’examiner ci-après si et dans quelle mesure les différents critères sont réalisés.

En ce qui concerne le critère de la durée anormalement longue du traitement médical, les juges cantonaux ont constaté que l’assurée avait été astreinte à porter une collerette en mousse durant trois jours et à suivre un traitement antalgique; elle avait régulièrement consulté le médecin traitant, qui lui avait prescrit du repos, des séances de physiothérapie et la prise d’un relaxant musculaire. L’assurée se prévaut du suivi chiropratique, du suivi psychiatrique et d’autres traitements (acupuncture, cures thermales, réflexothérapies, massages, etc.). L’aspect temporel n’est pas seul décisif dans l’examen du critère en cause. Sont également à prendre en considération la nature et l’intensité du traitement; à cet égard, la prise de médicaments antalgiques et la prescription de traitements par manipulations même pendant une certaine durée ne suffisent pas à fonder ce critère (arrêt 8C_1007/2012 du 11 décembre 2013 consid. 5.4.3 et les arrêts cités). En l’espèce, la nature des traitements invoqués par l’assurée n’implique pas une intensité suffisante pour admettre la réalisation du critère. Quant au suivi psychiatrique, il n’est pas déterminant, dès lors que l’examen des critères applicables lorsque des troubles psychiques constituent une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique se fait précisément en excluant les aspects psychiques.

L’assurée invoque de nombreuses difficultés et des complications importantes au regard des troubles apparus à la suite de ses trois accidents de la circulation. On ne voit toutefois pas en quoi les atteintes dont elle se prévaut (exacerbation des syndromes cervico-vertébral et post-commotionnel, réactivation des symptômes liés à l’état de stress post-traumatique, douleurs au niveau de l’oreille droite, etc.) constitueraient des difficultés apparues dans le processus de guérison et des complications importantes. On rappellera en outre qu’il convient de faire abstraction des troubles non objectivables et en particulier des troubles psychiques (cf. arrêt 8C_612/2019 du 30 juin 2020 consid. 3.3.5 et les arrêt cités).

Le critère du degré et de la durée de l’incapacité de travail due aux lésions physiques ne peut pas non plus être retenu en l’espèce, dans la mesure où l’assurée était déjà en incapacité totale de travail avant l’accident du 19.07.2013. On notera en outre que le psychiatre traitant de l’assurée a attesté une incapacité de travail totale pour raison psychique depuis début 2013.

Enfin, les douleurs physiques persistantes doivent être relativisées étant donné que les troubles psychiques exerçaient déjà une influence prépondérante sur l’état de l’assurée. Même en admettant la réalisation de ce critère, il ne revêt pas à lui seul une intensité suffisante pour admettre l’existence d’un lien de causalité adéquate.

Quant aux autres critères (les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l’accident, la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, les erreurs dans le traitement médical), ils n’entrent pas en considération et ne sont d’ailleurs pas invoqués par l’assurée.

 

Examen de la causalité adéquate en cas d’accidents successifs

L’assurée soutient ensuite que la question de la causalité adéquate – telle qu’elle vient d’être traitée – devrait être examinée globalement, à savoir en tenant compte également des suites des accidents de 2009 et de 2012. En effet, les trois accidents auraient touché la même partie du corps, à savoir le rachis, et ne pourraient plus être distingués les uns des autres sur le plan de la symptomatologie douloureuse et de l’incapacité de travail.

Selon la jurisprudence, lorsqu’à la suite de deux ou plusieurs accidents apparaissent des troubles psychiques, l’existence d’un lien de causalité adéquate doit en principe être examinée en regard de chaque accident considéré séparément. Cette règle s’applique en particulier dans les cas où les accidents ont porté sur différentes parties du corps et ont occasionné des atteintes diverses. Le Tribunal fédéral a jugé que le principe d’un examen séparé de la causalité adéquate vaut également dans les cas où la personne assurée a subi plus d’un accident ayant entraîné un traumatisme du type « coup du lapin » ou un traumatisme analogue. Il n’a cependant pas écarté qu’il soit tenu compte de la survenance d’atteintes successives à une même partie du corps dans l’examen des critères jurisprudentiels lorsque les conséquences des différents événements ne peuvent pas être distinguées les unes des autres sur le plan des symptômes douloureux et/ou de l’incapacité de travail. Cette circonstance est à considérer dans le cadre de l’appréciation des critères de la gravité et la nature des lésions, du degré et de la durée de l’incapacité de travail, respectivement du traitement médical (arrêt 8C_1007/2012 du 11 décembre 2013 consid. 5.1 et les références citées). En effet, il ne s’agit pas d’additionner les faits mais de procéder à une appréciation globale des circonstances seulement si la nature du critère à considérer le permet. Aussi le critère des circonstances particulièrement dramatiques ou impressionnantes entourant l’événement accidentel doit-il, comme ce critère l’indique, être examiné séparément pour chaque accident et ne saurait être admis du seul fait que le recourant a été victime de deux accidents successifs dans un intervalle de temps rapproché (arrêt 8C_1007/2012 précité consid. 5.2).

En l’espèce, l’accident du 02.12.2012 n’a pas provoqué de traumatisme de type « coup du lapin » ou un traumatisme analogue. Même si l’on effectuait un examen du caractère adéquat du lien de causalité entre l’accident de 2013 et les troubles de l’assurée persistant au-delà du 31.03.2016, en prenant en considération l’accident de 2009, on ne pourrait pas non plus admettre l’existence d’un tel lien. En effet, l’assurée se prévaut des traitements antalgique et de physiothérapie mis en œuvre à la suite de l’accident de 2009, soit des traitements qui ne sont pas particulièrement pénibles, ni invasifs, de sorte que le critère de la durée anormalement longue du traitement médical demeure exclu. Il en va de mêmes du critère relatif au degré et à la durée de l’incapacité de travail, au vu des diverses périodes d’incapacité de travail consécutives à l’accident de 2009 invoquées par l’assurée (100 % du 19.01.2009 au 01.02.2009, 50 % du 02.02.2018 au 08.02.2009, 100 % du 02.11.2009 au 30.11.2009 et 20 % du 07.06.2010 au 31.08.2011; pour des exemples où le critère a été admis, voir arrêt 8C_249/2018 du 12 mars 2019 consid. 5.2.7 et les arrêts cités). Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l’assurée, la gravité particulière des lésions n’est pas donnée du seul fait d’avoir subi plusieurs accidents de type « coup du lapin ». Encore faut-il qu’un nouveau traumatisme affecte une colonne vertébrale déjà très endommagée (arrêt 8C_508/2008 du 22 octobre 2008 consid. 5.4), ce qui n’est pas établi en l’espèce. S’agissant des autres critères jurisprudentiels invoqués par l’assurée (caractère particulièrement impressionnant de l’accident de 2009 et douleurs physiques persistantes), il apparaît d’emblée exclu qu’ils puissent revêtir une intensité particulière permettant d’admettre le lien de causalité adéquate litigieux. En effet, par rapport à l’accident de la circulation survenu en 2009, l’assurée se prévaut essentiellement d’une peur intense pour sa propre vie et celle d’autrui. Or l’examen du caractère particulièrement impressionnant d’un accident se fait sur la base d’une appréciation objective des circonstances de l’espèce et non en fonction du ressenti subjectif de l’assuré, en particulier de son sentiment d’angoisse (cf. arrêts 8C_96/2017 du 24 janvier 2018 consid. 5.1, in SVR 2018 UV n° 21 p. 74). Quant aux douleurs physiques persistantes, l’assurée se contente de se référer aux éléments développés dans son précédent grief, sans exposer en quoi un examen global aboutirait à un résultat différent.

 

Frais d’établissement d’un rapport médical

La juridiction cantonale a rejeté la demande de l’assurée au motif que les pièces au dossier étaient probantes et permettaient de trancher le litige et que la causalité adéquate était une question de droit et échappait ainsi à l’appréciation des médecins.

Aux termes de l’art. 45 al. 1 LPGA, les frais de l’instruction sont pris en charge par l’assureur qui a ordonné les mesures ; à défaut, l’assureur rembourse les frais occasionnés par les mesures indispensables à l’appréciation du cas ou comprises dans les prestations accordées ultérieurement. Selon la jurisprudence, les frais d’une expertise privée peuvent être inclus dans les dépens mis à la charge de l’assureur social lorsque cette expertise était nécessaire à la résolution du litige (ATF 115 V 62 consid. 5c p. 63; arrêts 8C_61/2016 du 19 décembre 2016 consid. 6.1 in fine, in SVR 2017 UV n° 19 p. 63).

En l’espèce, même si le médecin s’est prononcé sur l’intrication des trois accidents et leur impact sur la survenance des troubles et a établi le diagnostic de syndrome post-commotionnel en lien avec l’accident de 2009, il n’en reste pas moins que son rapport médical, établi à la demande à l’assurée, n’a pas joué un rôle déterminant dans la résolution du litige. Dans ces conditions, la juridiction cantonale était fondée à refuser de mettre les frais d’établissement du rapport en cause à la charge de l’assurance-accidents.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_810/2019 consultable ici

 

 

4A_547/2019 (f) du 09.07.2020 – Responsabilité des collectivités publiques cantonales – Responsabilité médicale – 61 al. 1 CO / Illicéité – Consentement éclairé du patient – Absence de certitude scientifique et devoir d’information du médecin

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_547/2019 (f) du 09.07.2020

 

Consultable ici

 

Responsabilité des collectivités publiques cantonales – Responsabilité médicale / 61 al. 1 CO

Illicéité – Consentement éclairé du patient – Absence de certitude scientifique et devoir d’information du médecin

 

Depuis son enfance, A.__ (ci-après : le lésé ou le patient), né en 1966, titulaire d’un CFC de mécanicien-électricien et d’un diplôme d’ingénieur ETS, souffre d’une épilepsie temporale gauche résistante aux traitements médicamenteux. Ce trouble se manifestait par des crises invalidantes avec des pertes de conscience à une fréquence de trois à quatre fois par mois. Le lésé avait toutefois toujours effectué son activité professionnelle normalement.

A partir de 1997, le lésé, qui était suivi par le Prof. D.__ de l’Hôpital X.__, a souhaité se soumettre à une évaluation pré-chirurgicale. Celle-ci a eu lieu lors d’une hospitalisation à l’hôpital Z.__et le Prof. E.__, alors neurochirurgien à l’hôpital X.__ comptant parmi les spécialistes mondiaux du traitement de l’épilepsie, y a collaboré. Les examens neuropsychologiques réalisés dans ce cadre révèlent notamment des troubles mnésiques en modalité verbale, un défaut du mot ponctuel, une difficulté de calculation et des troubles mnésiques sur matériel verbal fluctuant.

Le lésé a fait une crise d’épilepsie ayant nécessité une brève hospitalisation aux urgences du de l’hôpital X.__ le 03.07.1998.

Entre juillet et septembre 1998, deux entretiens ont eu lieu avec le lésé : lors du premier, qui réunissait le lésé, son amie et le Prof. D.__, le lésé a pu poser des questions sur l’indication d’une intervention chirurgicale; les risques opératoires lui ont été exposés; le lésé a déclaré comprendre la nécessité d’une intervention, mais a préféré l’envisager fin 1998 ou début 1999; lors du second entretien, qui s’est tenu avec le lésé, sa compagne, ses parents et les Prof. D.__ et E.__, le lésé a souhaité une intervention plus précoce en raison de la survenue récente de crises épileptiques avec chutes.

S’agissant des risques de l’opération, les informations suivantes lui ont été communiquées: en principe, 1% de risque d’infection, 1% de risque d’hémorragie et 2% de risque de complications neurologiques, le risque minimal étant dès lors de 4%. Il s’agissait d’une évaluation globale, fondée sur les statistiques des grandes études mondiales de l’époque, qui tenait compte tant des risques vitaux que des risques à la santé.

Le lésé a finalement opté pour l’opération en raison de la récidive de ses crises d’épilepsie.

Il est établi que le lésé n’a pas été informé spécifiquement d’ un risque de séquelles cognitives et neuropsychologiques (soit des atteintes qui entravent les fonctions courantes du cerveau, comme les troubles de la mémoire, de la concentration et de l’acquisition).

Ayant pris connaissance du résultat des évaluations pré-chirurgicales et, après les entretiens menés avec ses médecins, le lésé a pris la décision de se soumettre à l’amygdalo-hippocampectomie sélective gauche qui lui avait été proposée.

Le 02.10.1998, le lésé a été opéré par le Prof. E.__.

Durant les premières années qui ont suivi l’opération, le lésé n’a plus eu de crises d’épilepsie et il a cessé de prendre son traitement épileptique le 22.10.2001. L’opération a par contre été suivie de troubles au niveau du langage et de la compréhension, d’une certaine faiblesse de l’hémicorps droit ainsi que d’une amputation du champ visuel vers la partie supérieure droite.

Depuis l’opération, le lésé a été en incapacité totale de travail, notamment en raison de difficultés de concentration et de mémorisation, de troubles d’organisation et de planification, de troubles de compréhension orale et de difficultés de rédaction en français.

Par décision du 09.08.2000, l’office AI a admis un degré d’invalidité du lésé de 80% dès le 01.09.1999, relevant notamment que celui-ci présentait de graves troubles mnésiques, des difficultés de compréhension et une importante fatigabilité. Il a également été observé que le lésé avait changé de personnalité depuis l’opération : il ne parvenait plus à maîtriser ses émotions, paniquait devant tout imprévu et se distinguait par une émotivité à fleur de peau; dans les contacts avec les tiers, il devait faire de gros efforts de concentration, il n’arrivait plus à suivre une conversation à plusieurs et se mettait à l’écart, donnant l’impression d’être de trop.

 

Procédures cantonales

Le lésé et la Fondation B.__ (ci-après : la fondation) ont ouvert action contre l’Etat de Vaud (le lésé ayant été opéré par le Prof. E.__, alors neurochirurgien à l’hôpital X.__) le 11.06.2006.

Deux expertises ont été mises en œuvre (Prof. F.__, médecin-chef en neurochirurgie à l’Hôpital universitaire de Bâle, rapport du 28.03.2011 et Prof. G.__, neurologue à l’Hôpital d’instruction des Armées du Val de Grâce à Paris, rapport du 10.12.2012). Par jugement du 28.05.2018, rejet des conclusions des demandeurs par la Cour civile.

 

Par arrêt du 26.09.2019 (consultable ici), rejet par la Cour d’appel civile des appels interjetés par chacun des demandeurs et confirmation du jugement entrepris.

 

TF

Responsabilité des collectivités publiques cantonales

La responsabilité des collectivités publiques cantonales, des fonctionnaires et des employés publics des cantons à l’égard des particuliers pour le dommage qu’ils causent dans l’exercice de leur charge est en principe régie par les art. 41 ss CO, mais les cantons sont libres de la soumettre au droit public cantonal en vertu des art. 59 al. 1 CC et 61 al. 1 CO (ATF 128 III 76 consid. 1a; 127 III 248 consid. 1b).

Lorsque le canton adopte une réglementation, la responsabilité de la collectivité publique et de ses agents est donc soumise au droit public cantonal. Si celle-ci renvoie aux dispositions du Code des obligations, celui-ci s’applique à titre de droit cantonal supplétif (ATF 126 III 370 consid. 5).

Le canton de Vaud a fait usage de cette faculté en édictant la loi du 16 mai 1961 sur la responsabilité de l’État, des communes et de leurs agents (ci-après: LRECA/VD; RS 170.11). Cette loi règle la réparation des dommages causés illicitement ou en violation de devoirs de service dans l’exercice de la fonction publique cantonale ou communale (art. 1, 3 et 4 LRECA/VD). A la différence du droit privé qui subordonne la responsabilité aquilienne à une faute (art. 41 CO), le texte de l’art. 4 LRECA/VD n’exige, pour engager la responsabilité de l’État, qu’un acte objectivement illicite, un dommage et un lien de causalité entre l’un et l’autre (arrêt 4A_132/2014 du 2 juin 2014 consid. 2.1 et les arrêts cités). L’art. 8 LRECA/VD prévoit, en outre, que les dispositions du Code des obligations relatives aux obligations résultant d’actes illicites sont, au surplus, applicables par analogie à titre de droit cantonal supplétif.

Il en résulte que le Tribunal fédéral n’examine la question de l’illicéité de l’intervention chirurgicale que sous l’angle de l’arbitraire (art. 106 al. 2 LTF; arrêt 4A_453/2014 du 23 février 2015 consid. 3.1 et les arrêts cités).

 

Illicéité

En matière de responsabilité médicale, l’illicéité peut reposer sur deux sources distinctes :

  • la violation des règles de l’art, d’une part, et
  • la violation du devoir de recueillir le consentement éclairé du patient, d’autre part.

Devant le Tribunal fédéral, les recourants ne contestent pas que l’opération a été menée selon les règles de l’art et il n’y a donc pas lieu de s’y arrêter. Ils reprochent par contre aux juges cantonaux d’avoir retenu que le lésé avait donné son consentement éclairé à l’amygdalo-hippocampectomie qu’il a subie le 02.10.1998.

 

Consentement éclairé du patient

L’exigence d’un consentement éclairé se déduit directement du droit du patient à la liberté personnelle et à l’intégrité corporelle, qui est un bien protégé par un droit absolu (ATF 133 III 121 consid. 4.1.1 p. 128 et les arrêts cités). Le médecin qui fait une opération sans informer son patient ni en obtenir l’accord commet un acte contraire au droit et répond du dommage causé, que l’on voie dans son attitude la violation de ses obligations de mandataire ou une atteinte à des droits absolus et, partant, un délit civil. L’illicéité d’un tel comportement affecte l’ensemble de l’intervention et rejaillit de la sorte sur chacun des gestes qu’elle comporte, même s’ils ont été exécutés conformément aux règles de l’art (ATF 133 III 121 consid. 4.1.1 p. 128 et les arrêts cités).

Une atteinte à l’intégrité corporelle, à l’exemple d’une intervention chirurgicale, est illicite à moins qu’il n’existe un fait justificatif (ATF 133 III 121 consid. 4.1.1 p. 128 et les arrêts cités). Dans le domaine médical, la justification de l’atteinte réside le plus souvent dans le consentement du patient; pour être efficace, le consentement doit être éclairé, ce qui suppose de la part du praticien de renseigner suffisamment le malade pour que celui-ci donne son accord en connaissance de cause (ATF 133 III 121 consid. 4.1.1 p. 129 et les arrêts cités).

Le devoir d’information du médecin résulte également de ses obligations contractuelles, comme le confirment la doctrine et une jurisprudence constante (ATF 133 III 121 consid. 4.1.2 p. 129 et les arrêts cités).

Le médecin doit donner au patient, en termes clairs, intelligibles et aussi complets que possible, une information sur le diagnostic, la thérapie, le pronostic, les alternatives au traitement proposé, les risques de l’opération, les chances de guérison, éventuellement sur l’évolution spontanée de la maladie et les questions financières, notamment relatives à l’assurance (ATF 133 III 121 consid. 4.1.2 p. 129 et les arrêts cités). Des limitations voire des exceptions au devoir d’information du médecin ne sont admises que dans des cas très précis, par exemple lorsqu’il s’agit d’actes courants sans danger particulier et n’entraînant pas d’atteinte définitive ou durable à l’intégrité corporelle, s’il y a une urgence confinant à l’état de nécessité ou si, dans le cadre d’une opération en cours, il y a une nécessité évidente d’en effectuer une autre (ATF 133 III 121 consid. 4.1.2 p. 129 et les arrêts cités).

La portée du devoir d’information du médecin (y compris sur les risques de l’opération) est fonction de l’état de la science médicale. On ne saurait (logiquement) imposer au médecin de donner au patient des renseignements qui ne sont pas encore compris dans cet état (sur ce critère généralement utilisé en lien avec le devoir de diligence du médecin, cf. arrêt 4C.345/1998 du 29 mars 1999 consid. 4b; ATF 120 II 248 consid. 2c et les références; 93 II 19 consid. 2).

C’est au médecin qu’il appartient d’établir qu’il a suffisamment renseigné le patient et obtenu le consentement éclairé de ce dernier préalablement à l’intervention (ATF 133 III 121 consid. 4.1.3 p. 129 et les arrêts cités; sur le consentement hypothétique du patient, cf. ATF 133 III 121 consid. 4.1.3 p. 130 et les arrêts cités).

 

Dans le cas d’espèce, on ne peut suivre les recourants lorsqu’ils affirment que la cour cantonale a sombré dans l’arbitraire en refusant d’admettre un risque spécifique de séquelles neuropsychologiques en 1998. La décision prise par les juges précédents sur ce point s’appuie sur les deux expertises judiciaires : en effet, tant l’expert suisse (Prof. F.__ de Bâle) que l’expert français (Prof. G.__ de Paris) ont confirmé qu’un tel risque spécifique n’avait pas encore été retenu par la science médicale à la fin des années nonante.

L’expert suisse a implicitement admis que le risque de provoquer une atteinte comme celle survenue chez le patient se situait « autour de 1-2% (…) en accord avec les données de la littérature scientifique et l’expérience de [son] centre », étant ici précisé que le pourcentage évoqué vise les risques généraux, alors identifiés, d’infection, d’hémorragie et de complications neurologiques.

Quant à l’expert français, il n’a pas non plus individualisé le risque neuropsychologique, mais a considéré qu’il était englobé dans le pourcentage des séquelles majeures alors connues. Il a explicitement relevé que les publications scientifiques évoquant le risque spécifique et significatif de troubles neuropsychologiques, notamment la diminution des performances mnésiques post-opératoires, étaient postérieures à l’opération litigieuse.

On ne peut même pas dire, comme le font les recourants, qu’à la fin des années 1990 le risque spécifique était « identifié » (ce qui sous-entend que seul le degré exact du risque restait à discuter). Selon les constatations cantonales, le débat était en effet beaucoup plus large (et son issue incertaine) puisque, pour certains scientifiques, il n’y avait « pas de séquelles possibles » si l’hippocampe était atrophié, alors que pour d’autres, « c’était possible ».

 

Absence de certitude scientifique et devoir d’information du médecin

Au moment de procéder à la subsomption, les recourants reviennent – au moins implicitement – sur l’application des conditions fondant le consentement éclairé du patient. Renvoyant à l’ATF 132 II 305, ils insistent sur le fait que l’ « absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives ». Ils tentent ainsi de dresser un parallèle entre ce précédent publié (qui avait pour objet la concrétisation, par les autorités compétentes, du principe de précaution dans le cadre de la gestion de la crise dite de « la vache folle ») et le devoir d’information du médecin (préalable nécessaire au consentement du patient) pour en inférer que, le risque lié aux atteintes neuropsychologiques étant déjà débattu en 1998, le médecin devait en informer son patient.

Il n’y a pas lieu d’examiner la légitimité du parallèle préconisé par les recourants puisque, même si on l’admettait (par hypothèse), ceux-ci ne pourraient rien en tirer : dans le précédent auquel ils renvoient, le Tribunal fédéral a certes rappelé le devoir des autorités compétentes d’agir « même en cas d’incertitude scientifique », mais il a ajouté que cela ne valait que pour les mesures qui « paraiss[ai]ent propres » à prévenir la propagation de l’épizootie « d’après l’état de la science et de l’expérience » (ATF 132 II 305 consid. 4.3 p. 321). Si on tente un parallèle avec le cas d’espèce, force est de constater que, à la fin des années 1990, le milieu médical n’avait pas encore les connaissances,  » d’après l’état de la science et de l’expérience « , pour prescrire aux chirurgiens de fournir aux patients (qui projetaient de se soumettre à une intervention chirurgicale du type amygdalo-hippocampectomie) une information sur le risque spécifique d’atteintes neuropsychologiques (ce risque n’étant pas identifié spécifiquement). Partant, le renvoi à ce précédent n’est d’aucun secours aux recourants.

 

L’absence d’acte illicite scelle le sort du recours, l’illicéité étant une condition nécessaire de la responsabilité médicale.

 

Le TF rejette les recours du lésé et de la Fondation.

 

 

Arrêt 4A_547/2019 consultable ici

 

 

Initiative parlementaire « Supprimer les droits de timbre par étapes et créer des emplois » (projet 2) / Rapport de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national

Initiative parlementaire Supprimer les droits de timbre par étapes et créer des emplois (projet 2) / Rapport de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national

 

Rapport du 17.08.2020 paru in FF 2020 8397 le 17.11.2020

 

Condensé

Le présent projet constitue la seconde partie de la mise en œuvre de l’initiative parlementaire déposée le 10 décembre 2009 intitulée «Supprimer les droits de timbre par étapes et créer des emplois» (09.503).

Déjà approuvé par le Conseil national et suspendu au sein du Conseil des Etats, un premier texte élaboré séparément (projet 1) porte sur la suppression du droit de timbre d’émission sur le capital propre. Le présent projet (projet 2) se concentre lui sur la suppression partielle du droit de timbre de négociation et de celui sur les primes d’assurance. Il propose, d’une part, l’abolition du droit de timbre de négociation sur les titres suisses et les obligations étrangères avec durée résiduelle inférieure à un an, d’autre part, la suppression du droit de timbre sur les primes d’assurance-vie.

Estimées sur la base des recettes pour les années 2015–2019, les pertes fiscales s’élèvent à 219 millions de francs par an.

Alors qu’elle était contenue dans les avant-projets envoyés en procédure de consultation, l’abolition du droit de timbre de négociation sur le reste des titres étrangers et de celui sur les primes d’assurance de choses et de patrimoine n’est pas prévue par le présent projet: la commission a en effet suspendu le traitement de l’avant-projet de loi y relatif dans l’attente du message du Conseil fédéral sur l’impôt anticipé.

Les avis divergent au sein de la commission quant à la nécessité de supprimer partiellement le droit de timbre de négociation et celui sur les primes d’assurance.

La majorité de la commission estime nécessaire de supprimer, du moins dans l’immédiat partiellement, le droit de timbre de négociation et celui sur les primes d’assurance afin de garantir l’attractivité de la place financière suisse et de favoriser la croissance économique en cette période économique difficile. Elle souligne en effet que les droits de timbre prétéritent l’allocation optimale des ressources. Par ailleurs, elle estime que le droit de timbre de négociation ne respecte pas le principe constitutionnel de la capacité économique. Enfin, la majorité soutient que l’effet positif sur la croissance compensera sur le long terme une bonne partie des pertes de recettes engendrées, dont l’ampleur reste par ailleurs modérée.

La minorité de la commission propose de ne pas entrer en matière sur le projet, même si une partie de la minorité aurait en premier lieu préféré sa suspension jusqu’à la publication par le Conseil fédéral du nouveau plan financier présentant la marge de manœuvre financière.

La minorité juge qu’au vu de la crise du coronavirus et des dépenses publiques considérables qu’elle a provoquées, il n’est pas responsable du point de la politique financière de se priver, même uniquement partiellement, des recettes découlant de ces droits de timbre. La minorité rappelle par ailleurs que d’autres réformes fiscales, et notamment celle relative à la suppression de la pénalisation fiscale du mariage, sont bien plus urgentes et devront également être financées. La minorité doute d’ailleurs que l’abolition des droits de timbre ait un effet aussi bénéfique sur la croissance et l’emploi que celui escompté par la majorité.

 

 

Rapport du 17.08.2020 paru in FF 2020 8397 le 17.11.2020

Projet de modification de la loi fédérale sur les droits de timbre (projet 2) paru in FF 2020 8439