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1C_135/2022 (f) du 24.08.2022 – Retrait du permis de conduire – Perte de maîtrise du véhicule sur l’autoroute sur chaussée mouillée en roulant à 90-100 km/h – Rappel de la jurisprudence relative à l’aquaplaning

Arrêt du Tribunal fédéral 1C_135/2022 (f) du 24.08.2022

 

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Violation grave des règles de la circulation – Retrait du permis de conduire / 16c al. 2 let. a LCR

Perte de maîtrise du véhicule sur l’autoroute sur chaussée mouillée en roulant à 90-100 km/h / 31 al. 1 LCR – 32 al. 1 LCR

Rappel de la jurisprudence relative à l’aquaplaning

 

Selon le rapport de la gendarmerie cantonale, A.__ circulait, le 24.06.2021 vers 17h40, sur l’autoroute A12 de Lausanne en direction de Fribourg sur une chaussée mouillée et par temps pluvieux. Alors qu’elle effectuait un dépassement, à une vitesse, selon ses dires, d’environ 100 km/h, elle a perdu la maîtrise de son véhicule et a heurté la voiture qui circulait sur la voie de droite; celle-ci s’est alors déportée latéralement avant d’entrer en collision frontale avec la berme centrale. A.__ s’est immédiatement arrêtée sur la bande d’arrêt d’urgence.

Par décision du 19.08.2021, La Commission des mesures administratives en matière de circulation routière (ci-après: CMA) a prononcé le retrait du permis de conduire de A.__ pour une durée de trois mois, qualifiant l’infraction commise par l’intéressée de grave.

Ordonnance pénale du 03.12.2021 : A.__ a été reconnu coupable de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR), l’intéressée ayant perdu le contrôle de son véhicule en raison d’une vitesse inadaptée aux circonstances de la route, soit aux conditions météorologiques ainsi qu’à l’état de la chaussée. Cette ordonnance n’a pas été contestée.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 19.01.2022, le Tribunal cantonal a retenu que A.__ circulait sur la voie de dépassement de l’autoroute à une vitesse inadaptée aux conditions météorologiques (à savoir environ 100 km/h alors qu’il pleuvait et que la chaussée était détrempée); elle avait perdu la maîtrise de son véhicule, ce qui avait provoqué un accident avec la voiture qui circulait sur la voie de droite. L’autorité cantonale a considéré que l’intéressée avait violé une règle élémentaire de prudence, dont la violation, nécessairement délibérée, devait être considérée comme grave. De plus, la faute commise avait été à l’origine d’une mise en danger concrète de la circulation, le véhicule de A.__ ayant percuté la voiture qu’elle dépassait, provoquant un accident; le fait qu’il n’y ait pas eu de blessés relevait du cas fortuit et ne saurait lui profiter. Dès lors, tant la faute que la mise en danger devaient être qualifiées de graves au sens de l’art. 16c al. 2 let. a LCR.

 

TF

Consid. 2.1
A ses art. 16a à 16c, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves. Selon l’art. 16a al. 1 LCR, commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation routière, met légèrement en danger la sécurité d’autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée. Commet en revanche une infraction grave selon l’art. 16c al. 1 let. a LCR la personne qui, en violant gravement les règles de la circulation routière, met sérieusement en danger la sécurité d’autrui ou en prend le risque. Conformément à l’art. 16c al. 2 let. a LCR, le permis de conduire est retiré pour trois mois au minimum après une infraction grave. Entre ces deux extrêmes, se trouve l’infraction moyennement grave, soit celle que commet la personne qui, en violant les règles de la circulation routière, crée un danger pour la sécurité d’autrui ou en prend le risque (art. 16b al. 1 let. a LCR). Dans cette hypothèse, le permis est retiré pour un mois au minimum (art. 16b al. 2 let. a LCR).

Le législateur conçoit l’art. 16b al. 1 let. a LCR comme l’élément dit de regroupement. Cette disposition n’est ainsi pas applicable aux infractions qui tombent sous le coup des art. 16a al. 1 let. a et 16c al. 1 let. a LCR. Dès lors, l’infraction est toujours considérée comme moyennement grave lorsque tous les éléments constitutifs qui permettent de la privilégier comme légère ou au contraire de la qualifier de grave ne sont pas réunis. Tel est par exemple le cas lorsque la faute est grave et la mise en danger bénigne ou, inversement, si la faute est légère et la mise en danger grave (ATF 136 II 447 consid. 3.2). Ainsi, par rapport à une infraction légère, où tant la mise en danger que la faute doivent être légères, on parle d’infraction moyennement grave dès que la mise en danger ou la faute n’est pas légère, alors qu’une infraction grave suppose le cumul d’une faute grave et d’une mise en danger grave (cf. ATF 135 II 138 consid. 2.2.3; arrêts 1C_144/2018 du 10 décembre 2018 consid. 2.2; 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.1).

D’un point de vue objectif, il y a création d’un danger sérieux pour la sécurité d’autrui au sens de l’art. 16c al. 1 let. a LCR non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue; la réalisation d’un tel danger s’examine en fonction des circonstances spécifiques du cas d’espèce (ATF 143 IV 508 consid. 1.3; 142 IV 93 consid. 3.1; arrêts 1C_51/2021 du 4 avril 2022 consid. 2.1.1; 1C_592/2018 du 27 juin 2019 consid. 3.1). Sur le plan subjectif, l’art. 16c al. 1 let. a LCR, dont la portée est identique à celle de l’art. 90 ch. 2 LCR, exige un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c’est-à-dire une faute grave, donnée en cas de dol direct ou de dol éventuel et, en cas d’acte commis par négligence, découlant au minimum d’une négligence grossière (ATF 142 IV 93 consid. 3.1; 131 IV 133 consid. 3.2; arrêts 1C_436/2019 du 30 septembre 2019 consid. 2.1; 1C_442/2017 du 26 avril 2018 consid. 2.1; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/ MÜLLER, Code suisse de la circulation routière commenté, 4e éd. 2015, nos 1.2 ss ad art. 16c LCR). Cette condition est réalisée si l’auteur est conscient du danger que représente sa manière de conduire ou si, contrairement à ses devoirs, il ne tient pas compte du fait qu’il met en danger les autres usagers, c’est-à-dire s’il agit avec une négligence inconsciente; tel sera le cas lorsque le conducteur est inattentif, qu’il apprécie mal une situation, ou qu’il évalue mal les conséquences de son comportement. Dans un tel cas, il faut toutefois faire preuve de retenue. Une négligence grossière ne peut être admise que si l’absence de prise de conscience du danger créé pour autrui est particulièrement blâmable – notamment en méconnaissant un risque clair – ou repose elle-même sur une absence de scrupules (ATF 131 IV 133 consid. 3.2 et les réf. cit.; arrêt 1C_436/2019 du 30 septembre 2019 consid. 2.1; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, op. cit., n° 1.2.2 ad art. 16c LCR). Plus la violation de la règle de la circulation est objectivement grave, plus on admettra l’existence d’une absence de scrupules, sauf indice particulier permettant de retenir le contraire (ATF 142 IV 93 consid. 3.1).

En revanche, une faute moyennement grave au sens de l’art. 16b al. 1 let. a LCR correspond, lorsqu’aucune circonstance particulière n’exige une prudence très élevée (cf. arrêt 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.4), à une absence de prise en considération des risques d’accident, alors que ceux-ci étaient reconnaissables pour un conducteur moyen normalement prudent (cf. ATF 126 II 192 consid. 2b) et vouant toute attention à la chaussée au sens de l’art. 3 al. 1 de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR; RS 741.11; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, op. cit., n° 1.4 ad art. 16b LCR).

 

Consid. 2.2
A teneur de l’art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence. Cela signifie qu’il doit être à tout moment en mesure de réagir utilement aux circonstances (arrêt 1C_577/2018 du 9 avril 2019 consid. 2.2). Le conducteur doit vouer à la route et au trafic toute l’attention possible (cf. art. 3 al. 1 OCR), le degré de cette attention devant être apprécié au regard de toutes les circonstances, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l’heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 137 IV 290 consid. 3.6; 129 IV 282 consid. 2.2.1 et la réf. cit.; arrêt 1C_249/2021 du 17 décembre 2021 consid. 3.2).

Selon la jurisprudence, la perte de maîtrise du véhicule ne constitue pas toujours une infraction grave au sens de l’art. 16c al. 1 let. a LCR. Selon ces circonstances – en particulier selon le degré de mise en danger de la sécurité d’autrui et selon la faute de l’intéressé – l’infraction peut être qualifiée de moyennement grave au sens de l’art. 16b al. 1 let. a LCR, voire même de légère au sens de l’art. 16a al. 1 let. a LCR (arrêt 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.2 et la réf. cit.).

Selon l’art. 32 al. 1 LCR, la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu’aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Cette règle implique notamment qu’on ne peut circuler à la vitesse maximale autorisée que si les conditions de la route, du trafic et de visibilité sont favorables (ATF 121 IV 286 consid. 4b; 121 II 127 consid. 4a; cf. art. 4a OCR). En effet, s’il veut pouvoir se conformer aux règles de prudence au sens de l’art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra, avant tout, adapter sa vitesse, pour qu’elle ne constitue ni une cause d’accident ni une gêne excessive pour la circulation (BUSSY/ RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, op. cit., n° 1.1 ad art. 32 LCR).

Ont été qualifiées de fautes graves certaines pertes de maîtrise avérées alors que les conditions de circulation requéraient une attention particulière, par exemple sur une autoroute détrempée avec risque d’aquaplaning (ATF 120 1b 312 consid. 4c; arrêt 1C_249/2012 du 27 mars 2013 consid. 2.2.5). Le phénomène dit « d’aquaplaning » (dû au glissement des pneus sur un plan d’eau, sans adhérence avec le sol) et qui se manifeste surtout sur les autoroutes, est en effet assez connu pour devoir être pris en considération par tous les conducteurs et il peut déjà se produire à des vitesses inférieures à 80 km/h (ATF 120 Ib 312 consid. 4c; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, op. cit., n° 1.6 ad art. 32 LCR).

L’examen de l’adaptation de la vitesse aux circonstances, dans leur ensemble, est en principe une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner librement. Mais, comme la réponse dépend pour beaucoup de l’appréciation des circonstances locales par l’autorité cantonale, à laquelle il faut laisser une certaine latitude, le Tribunal fédéral ne s’écarte de cette appréciation que lorsque des raisons impérieuses l’exigent (ATF 99 IV 227 consid. 2; arrêts 1C_51/2021 du 4 avril 2022 consid. 2.1.2; 6B_23/2016 du 9 décembre 2016 consid. 3.1; 6B_1247/2013 du 13 mars 2014 consid. 3.1).

 

Consid. 2.4
En l’espèce,
il n’est pas contesté que A.__, en effectuant un dépassement sur l’autoroute à une vitesse d’environ 90-100 km/h, a perdu la maîtrise de son véhicule et a ainsi causé un accident avec la voiture qui circulait sur la voie de droite. Il n’est pas non plus contesté que la perte de maîtrise du véhicule a été causée par de l’aquaplaning.

A.__ admet qu’elle « avait parfaitement conscience du danger que représentait l’aquaplaning »; ainsi, si, selon ses dires, elle avait réduit sa vitesse à environ 90-100 km/h, elle avait tout de même « sans doute mal évalué ou sous-estimé l’état de la route ». Ce faisant, A.__ a mis en danger les autres usagers, si ce n’est pas déjà par dol éventuel, pour le moins en faisant preuve d’une négligence inconsciente: en effet, en plus d’avoir mal apprécié la situation, elle a aussi mal évalué les conséquences de son acte lorsqu’elle a engagé une manœuvre de dépassement à environ 90-100 km/h sur une autoroute détrempée avec risque d’aquaplaning, alors que les conditions météorologiques requéraient, dans un tel cas de figure, une attention particulière et une prudence accrue. Comme rappelé à juste titre par le Tribunal cantonal, le risque d’aquaplaning, bien connu, commande à tout conducteur prudent et respectueux des règles de la circulation routière d’adapter et même de réduire conséquemment sa vitesse en cas de fortes pluies, étant en particulier conseillé aux automobilistes de ne pas dépasser les 80 km/h (cf. supra consid. 2.2); en roulant à 90-100 km/h, A.__ a ainsi méconnu un risque clair.

Au demeurant, l’état de fait cantonal ne contient aucun élément faisant apparaître le comportement de A.__ comme moins grave. En effet, le Tribunal cantonal a relevé que la vitesse excessive ayant causé l’aquaplaning s’accompagnait, comme on l’a vu, d’une tentative de dépassement; dès lors, l’absence de prudence accrue de A.__ qui a engagé une manœuvre de dépassement en méconnaissant le risque clair d’aquaplaning à une vitesse d’environ 90-100 km/h, laquelle a engendré la perte de maîtrise du véhicule, puis l’accident, apparaissent particulièrement blâmables. Dans ce contexte et contrairement à l’avis de A.__, la situation du cas d’espèce peut se rapprocher de celles de l’ATF 120 Ib 312 et de l’arrêt 1C_249/2012 du 27 mars 2013: s’il est vrai que dans les deux affaires les recourants semblaient conduire à une vitesse de 120 km/h, cette différence ne suffit pas, à elle seule, à retenir que, dans le cas d’espèce, A.__ n’aurait pas commis de faute grave. A.__ a en effet adopté un comportement dont le caractère manifestement dangereux ne pouvait pas lui échapper. Il y a donc là, à tout le moins, une négligence grossière de sa part. Le fait que le rapport de police ne fasse pas état de pneus lisses concernant le véhicule de A.__ ne change rien à cette appréciation.

Comme rappelé par le Tribunal cantonal, dans les arrêts mentionnés plus haut il a été jugé qu’une perte de maîtrise due à une conduite inadaptée sur l’autoroute, où la circulation est toujours très rapide, malgré l’attention particulière que requiert le risque d’aquaplaning, constitue une grave mise en danger de la sécurité routière – ce qui n’est pas contesté par A.__ – et suppose une faute grave. Il existe en particulier un risque de collision avec les véhicules qui précèdent impliquant des conséquences considérables pour les personnes concernées (ATF 120 Ib 312 consid. 4c; arrêt 1C_249/2012 du 27 mars 2013 consid. 2.2.4 et 2.2.5). Vu ces éléments et compte tenu du fait que, comme susmentionné, plus la violation d’une règle de la circulation routière est objectivement grave plus cela conduit en principe à retenir une négligence grossière sur le plan subjectif, la situation du cas d’espèce diffère de celles qui ont fait l’objet des arrêts 6A.9/2004 du 23 avril 2004 et 6A.65/2003 du 27 novembre 2003, auxquels A.__ se réfère: en particulier étant donné que, dans ces arrêts, la perte de maîtrise du véhicule, due à une vitesse excessive, n’a pas eu lieu sur l’autoroute et qu’aucun aquaplaning n’a été constaté. La présente cause se distingue également de celle de l’arrêt 1C_525/2012 du 24 octobre 2013, où le Tribunal fédéral a retenu une faute moyennement grave. Bien que, dans cette affaire, la personne circulait sur l’autoroute, une forte pluie ou de l’aquaplaning – qui auraient exigé une prudence accrue – n’ont pas été constatés (cf. arrêt 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.4); de même, le recourant n’avait pas engagé une manœuvre de dépassement et n’avait pas causé d’accident avec une autre voiture.

Enfin, A.__ ne saurait tirer argument du fait que sur le plan pénal elle a été condamnée pour infraction simple selon l’art. 90 al. 1 LCR. En effet, si les faits retenus au pénal lient en principe l’autorité et le juge administratifs (ATF 139 II 95 consid. 3.2 et les arrêts cités), il en va différemment des questions de droit, en particulier de l’appréciation de la faute et de la mise en danger (arrêt 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2).

 

Consid. 2.5
Dans ces circonstances, le Tribunal cantonal n’a pas violé le droit fédéral en retenant que A.__ avait commis une infraction grave au sens de l’art. 16c al. 1 let. a LCR. Pour le surplus, A.__ ne conteste pas que, dans cette hypothèse, son permis de conduire devait lui être retiré pour une durée de trois mois en application de l’art. 16c al. 2 let. a LCR, s’agissant de la durée minimale pour une infraction grave.

 

Le TF rejette le recours de A.__.

 

Arrêt 1C_135/2022 consultable ici

 

Le Conseil fédéral adopte le message concernant la révision de la loi fédérale sur la circulation routière (environnement, conduite automatisée, Via sicura, obligation de porter un casque à vélo)

Le Conseil fédéral adopte le message concernant la révision de la loi fédérale sur la circulation routière

 

Communiqué de presse de l’OFROU du 17.11.2021 consultable ici

 

Lors de sa séance du 17 novembre 2021, le Conseil fédéral a adopté le message concernant la révision de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR) et l’a soumis au Parlement. Ce projet de révision de loi vise essentiellement à réduire les émissions de gaz à effet de serre, à améliorer la sécurité routière et à permettre la conduite automatisée.

Adopté par le Conseil fédéral le 17 novembre 2021, le message concernant la révision de la loi fédérale sur la circulation routière porte essentiellement sur les modifications suivantes :

 

Promotion de technologies respectueuses de l’environnement

Les véhicules dotés de technologies respectueuses de l’environnement sont souvent plus longs et plus lourds que les véhicules conventionnels, notamment à cause de leurs batteries ou de leur cabine aérodynamique. Afin de promouvoir les véhicules de ce type, des exceptions à la longueur maximale et aux poids maximaux prévus par la loi seront admises pour eux, de façon à ce que l’utilisation de technologies respectueuses de l’environnement n’entraîne pas une réduction de la capacité de chargement.

 

Possibilité de recourir à la conduite automatisée

Les véhicules automatisés peuvent contribuer à améliorer la sécurité routière, à fluidifier le trafic et à réduire les émissions polluantes. Ils offrent également de nouvelles possibilités pour les milieux économiques et les prestataires de services de transport. La révision de la LCR ouvrira la voie à la conduite automatisée en Suisse. Le Conseil fédéral pourra désormais déterminer dans quelle mesure les conducteurs pourront être déchargés de leurs obligations et dans quel cadre les véhicules dépourvus de conducteur, mais équipés d’un système d’automatisation, circulant sur des tronçons prédéfinis et faisant l’objet d’une surveillance pourront être admis à la circulation. Des conditions seront définies à cet effet dans la LCR. L’Office fédéral des routes (OFROU) aura la possibilité d’autoriser et de soutenir financièrement des essais avec des véhicules automatisés.

 

Adaptation des mesures du programme Via sicura

Les autorités d’exécution et les tribunaux se verront conférer une plus grande marge d’appréciation en ce qui concerne les délits de chauffard, afin de pouvoir mieux évaluer les circonstances du délit et éviter des cas de rigueur inutiles. La peine privative de liberté d’un an au minimum sera supprimée, et la durée minimale du retrait du permis de conduire sera abaissée de 24 à 12 mois. En outre, le Conseil fédéral entend remplacer l’obligation de recours des assureurs en responsabilité civile pour véhicules automobiles en un droit de recours en cas de délit de conduite malgré une incapacité ou de délit de chauffard et renoncer à l’introduction de l’éthylomètre anti-démarrage et de la boîte noire.

 

Obligation de porter un casque à vélo pour les enfants et les adolescents

Étant donné que le nombre de cyclistes victimes d’accidents graves augmente fortement dès l’âge de 12 ans et que, parallèlement, le taux de port du casque diminue à partir de cet âge, le Conseil fédéral se voit octroyer la compétence de rendre le port du casque obligatoire pour les enfants et les adolescents jusqu’à l’âge de 16 ans lorsqu’ils circulent à vélo. Cette mesure permettra d’accroître la sécurité routière de ce groupe d’usagers de la route.

 

Mise en œuvre d’interventions parlementaires

En application de la motion 13.3572 Hess, les détenteurs d’un véhicule automobile pourront désormais modifier en tout temps le poids total de ce dernier auprès du service cantonal des automobiles. Cette possibilité permettra de réagir de manière plus flexible aux réalités du marché.

En application de la motion 15.3574 Freysinger, la période probatoire pour les nouveaux conducteurs ne sera prolongée que si le permis de conduire à l’essai est retiré à son titulaire à la suite d’une infraction moyennement grave ou grave. Le permis en question ne deviendra caduc que si son titulaire commet une nouvelle infraction moyennement grave ou grave durant la période probatoire.

 

Prochaines étapes

Les modifications de la LCR vont désormais être examinées par le Parlement. Il est prévu de les mettre en vigueur de manière échelonnée à partir de 2023.

 

 

Communiqué de presse de l’OFROU du 17.11.2021 consultable ici

Message du Conseil fédéral du 17.11.2021 paru in FF 2021 3026

Projet de modification de la LCR paru in FF 2021 3027

 

Motion Buffat 20.4210 « Augmentation de la sécurité pour les cyclistes » [rendre le port du casque obligatoire pour tous les cyclistes] – Avis du Conseil fédéral

Motion Buffat 20.4210 « Augmentation de la sécurité pour les cyclistes » – Avis du Conseil fédéral

 

Consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé de proposer une modification de la loi sur la circulation routière (LCR) afin de rendre le port du casque obligatoire pour tous les cyclistes.

 

Développement

Depuis de nombreuses années, le développement du vélo dans toutes ses variantes (vélo de loisir, moyen de transport, vélo électrique) n’a cessé de prendre de l’ampleur.

Un nombre non négligeable de cyclistes roule sans casque. Avec l’arrivée des vélos électriques, la vitesse des vélos dépasse celle des cyclomoteurs.

En termes de chiffres, rien que pour 2018 ce ne sont pas moins de 27 morts en Suisse qui circulaient à vélo, dont 12 qui étaient à vélo électrique. Au niveau des blessés graves, ce sont 877 cyclistes à vélo « standard » (+7%) et 308 cyclistes à vélo électrique (+38%). La plupart des personnes tuées ou grièvement blessées le sont avec des vélos électriques de type « lent » (236 personnes vs 85 avec des vélos électriques rapides).

Je souhaite que la loi soit modifiée afin que le port du casque devienne obligatoire pour tous les cyclistes.

 

Avis du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral a proposé d’introduire une obligation générale de porter le casque pour les cyclistes en 2008, dans le cadre de la consultation sur le programme de sécurité routière Via sicura. Toutefois, les participants à la consultation ont rejeté la mesure à une large majorité. Certains ayant néanmoins laissé entendre qu’ils y seraient favorables pour les enfants, le Conseil fédéral a suggéré, dans son message, de n’imposer le port du casque qu’aux cyclistes jusqu’à quatorze ans, une limite d’âge bien acceptée par la population d’après des sondages (FF 2010 7703 ss). Le Parlement a pourtant clairement rejeté l’instauration de l’obligation de porter le casque pour les cyclistes jusqu’à quatorze ans en 2012, lors de ses délibérations sur Via sicura.

Dans le cadre de la consultation sur la révision partielle de la loi fédérale sur la circulation routière, de la loi sur les amendes d’ordre et de huit ordonnances, qui court jusqu’au 12 décembre 2020, le Conseil fédéral propose plusieurs mesures destinées à augmenter la sécurité des conducteurs de vélos électriques. Il prévoit par exemple d’imposer à ces derniers l’usage diurne des phares ou le port du casque. En outre, le Conseil fédéral questionne les participants à la consultation sur leur soutien éventuel à l’introduction de l’obligation de porter le casque pour les cyclistes jusqu’à seize ans. Il n’est cependant pas favorable à une obligation plus étendue.

 

Proposition du Conseil fédéral du 25.11.2020

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Buffat 20.4210 « Augmentation de la sécurité pour les cyclistes » consultable ici

 

 

6B_533/2020 (f) du 16.09.2020 – Conduite en état d’ébriété (taux d’alcool qualifié) – Procédure pour le contrôle de l’alcool dans l’air expiré – 10a OCCR / Différence entre éthylotest et éthylomètre / Maintien de la qualité de mesure de l’éthylomètre – Aspects techniques et sécurité métrologique

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_533/2020 (f) du 16.09.2020

 

Consultable ici

 

Conduite en état d’ébriété (taux d’alcool qualifié) – Procédure pour le contrôle de l’alcool dans l’air expiré / 10a OCCR

Différence entre éthylotest et éthylomètre

Maintien de la qualité de mesure de l’éthylomètre – Aspects techniques et sécurité métrologique

 

Le 15.07.2017, vers 2h35, alors qu’il circulait au volant d’un véhicule automobile, A.__ a été interpellé par la police dans le cadre d’un contrôle de routine. Un premier examen à l’éthylotest a été effectué sur place. Les agents ont relevé un taux d’alcool de 0,45 mg/l d’air expiré à 2h42. A.__ a ensuite été soumis à l’éthylomètre, qui a indiqué un taux de 0,46 mg/l à 3h02. Son permis de conduire a été immédiatement saisi et transmis à l’Office des véhicules cantonal.

Par ordonnance pénale du 18.09.2017, l’automobiliste a été déclaré coupable de conduite en état d’ébriété (taux d’alcool qualifié) et condamné à 12 jours-amende à 30 fr. le jour, ainsi qu’aux frais de procédure. Ensuite de son opposition à l’ordonnance pénale, de son défaut à l’audience de première instance du 15.02.2018, puis de son recours à la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal contre la décision constatant le retrait de l’opposition et rayant la cause du rôle, l’affaire a été renvoyée en première instance.

 

Procédures cantonales

Par jugement du 07.06.2019, la Juge pénale du Tribunal de première instance a notamment reconnu l’automobiliste coupable de conduite en état d’ébriété (taux d’alcool qualifié). Elle l’a condamné à 22 jours-amende à 30 fr. le jour.

Ensuite de l’appel interjeté par l’automobiliste contre ce jugement, la Cour pénale du Tribunal cantonal, par jugement du 25.02.2020, a confirmé le jugement de première instance, reconnaissant l’intéressé coupable d’avoir conduit un véhicule automobile en état d’ébriété (taux qualifié ; 0,46 mg/l). La cour cantonale a prononcé la même peine que l’autorité de première instance.

 

TF

La cour cantonale a considéré qu’elle pouvait apprécier librement les éléments de preuve dont elle disposait (art. 10 al. 2 CPP; v. aussi sur ce principe en matière d’établissement de l’ébriété : ATF 129 IV 290 consid. 2.7 p. 295; 127 IV 172 consid. 3 p. 173 ss; 123 II 97 consid. 3c/bb p. 104 ss), cependant que l’automobiliste considère que ces preuves techniques ont été administrées en violation de règles de validité et ne seraient donc pas exploitables (art. 141 al. 2 CPP). Dès lors que le juge ne peut apprécier librement que le résultat de preuves exploitables juridiquement (ATF 133 I 33 consid. 2.1 p. 36 p. s.; THOMAS HOFER, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, nos 42 et 63 ad art. 10 CPP), il convient d’examiner tout d’abord si tel était bien le cas des preuves sur lesquelles la cour cantonale a fondé sa conviction.

 

Aux termes de l’art. 141 al. 2 CPP, les preuves qui ont été administrées d’une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves. L’art. 141 al. 3 CPP prévoit en revanche que les preuves administrées en violation de prescriptions d’ordre sont exploitables. Lorsque la loi ne qualifie pas elle-même une disposition de règle de validité, la distinction entre une telle règle et une prescription d’ordre s’opère en prenant principalement pour critère l’objectif de protection auquel est censée ou non répondre la norme. Si la disposition de procédure en cause revêt une importance telle pour la sauvegarde des intérêts légitimes de la personne concernée qu’elle ne peut atteindre son but que moyennant l’invalidation de l’acte de procédure accompli en violation de cette disposition, on a affaire à une règle de validité (ATF 144 IV 302 consid 3.4.3 p. 310; 139 IV 128 consid. 1.6 p. 134; Message relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1057, p. 1163).

Il convient donc de déterminer la portée des règles dont l’automobiliste critique le non-respect.

Selon l’art. 91 LCR, est puni de l’amende quiconque conduit un véhicule automobile en état d’ébriété (al. 1 let. a). Est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire quiconque conduit un véhicule automobile en état d’ébriété et présente un taux d’alcool qualifié dans le sang ou dans l’haleine (al. 2 let. a).

L’ordonnance de l’Assemblée fédérale concernant les taux limites d’alcool admis en matière de circulation routière dispose, à son article premier, qu’un conducteur est réputé incapable de conduire pour cause d’alcool (état d’ébriété) lorsqu’il présente un taux d’alcool dans le sang de 0,5 gramme pour mille ou plus (let. a), ou un taux d’alcool dans l’haleine de 0,25 milligramme ou plus par litre d’air expiré (let. b). Selon l’art. 2 de cette ordonnance, sont considérés comme qualifiés un taux d’alcool dans le sang de 0,8 gramme pour mille ou plus (let. a), ou un taux d’alcool dans l’haleine de 0,4 milligramme ou plus par litre d’air expiré (let. b). L’art. 55 LCR prescrit que les conducteurs de véhicules, de même que les autres usagers de la route impliqués dans un accident, peuvent être soumis à un alcootest (al. 1). Une prise de sang doit être ordonnée si la personne concernée présente des indices laissant présumer une incapacité de conduire qui n’est pas imputable à l’alcool (let. a), s’oppose ou se dérobe à l’alcootest ou fait en sorte que cette mesure ne puisse atteindre son but (let. b) ou exige une analyse de l’alcool dans le sang (let. c). Une prise de sang peut être ordonnée si le contrôle au moyen de l’éthylomètre est impossible ou s’il est inapproprié pour constater l’infraction (al. 3bis). Ce dernier alinéa, entré en vigueur le 1er octobre 2016, crée la base légale permettant de reconnaître force probante à la constatation de l’ébriété par la mesure du taux d’alcool dans l’air expiré, au moyen d’un éthylomètre (Message du Conseil fédéral concernant Via sicura, le programme d’action de la Confédération visant à renforcer la sécurité routière, du 20 octobre 2010, FF 2010 7703 ss, ch. 1.3.2.16). Cela a mis fin au système de la « primauté de la prise de sang » (v. ATF 129 IV 290 consid. 2.7 p. 295).

Aux termes de l’art. 10a al. 1 OCCR, le contrôle de l’alcool dans l’air expiré peut être effectué au moyen d’un éthylotest au sens de l’art. 11 (let. a) ou d’un éthylomètre au sens de l’art. 11a (let. b). Dans cette teneur de la norme, le vocable « éthylotest », désigne ce que le texte dénommait antérieurement « éthylomètre », à la différence que cet appareil affichait, après conversion à l’aide d’un facteur 2000, l’alcoolémie exprimée en g/kg (pour-mille) de sang et non le taux d’alcool dans l’haleine exprimé en g/l d’air expiré. Selon la terminologie actuelle, l’éthylotest est un instrument de mesure qui détermine la concentration massique d’alcool dans l’air expiré et l’éthylomètre celui qui détermine et affiche, de manière redondante et dans des conditions d’échantillonnage contrôlées, la concentration massique d’alcool dans l’air expiré (art. 3 let. c et d de l’ordonnance du DFJP du 30 janvier 2015 sur les instruments de mesure d’alcool dans l’air expiré; OIAA; RS 941.210.4; v. aussi THOMAS BRIELLMANN, Atemalkoholmessung aus rechtsmedizinischer Sicht, Jahrbuch zum Strassenverkehrsrecht 2018, p. 274 ss). En cas de recours à l’éthylotest, l’art. 11 OCCR précise que le contrôle peut avoir lieu au plus tôt après un délai d’attente de 20 minutes (al. 1 let. a), ou après que la personne contrôlée s’est rincé la bouche, conformément aux indications éventuelles du fabricant de l’appareil (al. 1 let. b). Il y a lieu d’effectuer deux mesures. Si elles divergent de plus de 0,05 mg/l, il faut procéder à deux nouvelles mesures. Si la différence dépasse de nouveau 0,05 mg/l et s’il y a des indices de consommation d’alcool, il y a lieu d’effectuer un contrôle au moyen d’un éthylomètre ou d’ordonner une prise de sang (al. 2). Le résultat inférieur des deux mesures est déterminant. La personne concernée peut reconnaître celui-ci par sa signature, notamment s’il correspond, pour les personnes qui conduisaient un véhicule automobile, à 0,25 mg/l ou plus, mais moins de 0,40 mg/l (al. 3 let. a). Conformément à l’art. 11a OCCR, le contrôle effectué au moyen d’un éthylomètre peut avoir lieu au plus tôt après un délai d’attente de dix minutes (al. 1). Si l’éthylomètre décèle la présence d’alcool dans la bouche, il faut attendre au moins cinq minutes supplémentaires pour effectuer le contrôle (al. 2). Les éthylotests et éthylomètres doivent répondre aux exigences de l’Ordonnance du 15 février 2006 sur les instruments de mesure (OIMes; RS 941.210) et des prescriptions d’exécution du Département fédéral de justice et police (art. 11 al. 4 et 11a al. 3 OCCR). L’OFROU en règle le maniement (art. 11 al. 5 et 11a al. 4 OCCR).

En application de cette délégation de compétence, l’OFROU a précisé, s’il en était besoin, que les éthylotests et les éthylomètres doivent être utilisés conformément à la notice d’emploi du fabricant (art. 19 Ordonnance de l’OFROU concernant l’ordonnance sur le contrôle de la circulation routière [OOCCR-OFROU] du 22 mai 2008). Aucune déduction n’est appliquée aux valeurs affichées par ces deux types d’appareils (art. 20 OOCCR-OFROU).

Les instruments de mesure destinés à la détermination officielle de faits matériels pour lesquels le Département fédéral de justice et police a édicté dans une ordonnance les prescriptions nécessaires spécifiques (cf. OIAA précitée), sont également soumis à l’OIMes (art. 3 al. 1 let. a ch. 5 et let. b OIMes). Dite ordonnance règle, outre la mise sur le marché, les contrôles ultérieurs permettant de garantir que ces appareils continuent à répondre aux exigences fixées initialement pendant toute la durée de leur utilisation (art. 20 OIMes), soit le contrôle ultérieur de la stabilité (art. 24 OIMes). Les procédures destinées à maintenir la stabilité de mesure sont décrites dans l’Annexe 7 à l’OIMes, soit en particulier la vérification ultérieure, avec, au besoin délivrance d’un certificat de vérification ou de conformité (Annexe 7 OIMes ch. 1.3) et l’étalonnage, avec contrôle du respect des erreurs maximales tolérées et délivrance d’un certificat d’étalonnage (Annexe 7 OIMes ch. 6.3).

L’OOCCR-OFROU, de même que l’OCCR (art. 11 al. 4 et 11a al. 3 OCCR), renvoient en outre aux règles de l’OIAA, qui déterminent notamment les exigences spécifiques afférentes aux instruments de mesure d’alcool dans l’air expiré et les procédures destinées à maintenir la stabilité de mesure de ces instruments (art. 1 let. a et c OIAA). Conformément à ces règles, les éthylomètres doivent répondre aux exigences essentielles fixées à l’annexe 1 de l’OIMes et à l’annexe 3 OIAA (art. 8 OIAA), qui concernent en particulier l’étendue des mesures, les conditions de fonctionnement nominales ainsi que les erreurs maximales tolérées. Ces instruments doivent être soumis à diverses procédures destinées à assurer le maintien de la stabilité de mesure. Sur ce point, l’art. 10 OIAA renvoie également à l’OIMes et l’art. 24 al. 3 de cette dernière ordonnance réserve les règles ressortant des ordonnances sur les instruments de mesure spécifiques quant aux procédures applicables à chaque instrument de mesure ainsi que la fréquence des contrôles (art. 24 al. 3 OIMes). S’agissant des éthylomètres, en particulier, l’art. 10 OIAA soumet ces appareils à la vérification ultérieure conformément à l’annexe 7 ch. 1 OIMes (v. aussi l’annexe 4 ch. 1 OIAA), effectuée chaque année par METAS ou par un laboratoire de vérification habilité (let. a), à l’entretien (annexe 7 ch. 7 OIMes) ainsi qu’à l’ajustage (annexe 7 ch. 8 OIMes), réalisés au minimum une fois par an par une personne compétente (let. b et c). Quant au ch. 1 de l’Annexe 4 OIAA (Vérifications initiale et ultérieure), il dispose que les éthylomètres sont vérifiés dans des conditions de laboratoire. Les erreurs maximales tolérées lors de la vérification ultérieure équivalent aux deux tiers des erreurs maximales tolérées dans les conditions de fonctionnement nominales définies à l’annexe 3 ch. 4. Cette norme réserve toutefois à METAS de déterminer la procédure de vérification ultérieure au cas par cas selon le type d’instrument mesureur (ch. 1.1). La méthode de Dubowski telle qu’elle est décrite dans la recommandation OIML R 126 doit être employée pour créer des mélanges d’alcool (ch. 1.2). En cas de dysfonctionnement de l’appareil ou de doutes quant à la précision des mesures, les éthylotests et les éthylomètres ne peuvent être réutilisés qu’après avoir subi une procédure de maintien de la stabilité de mesure conformément à l’OIAA, soit un entretien au sens de l’art. 6, let. b, OIAA et un ajustage au sens de l’art. 6, let. c, OIAA pour les éthylotests (let. a), une vérification ultérieure au sens de l’art. 10, let. a, OIAA, un entretien au sens de l’art. 10, let. b, OIAA et un ajustage au sens de l’art. 10, let. c, OIAA pour les éthylomètres (let. b).

On retiendra de ce dispositif réglementaire complexe et tout au moins partiellement redondant, que l’éthylomètre doit, en plus de l’entretien et de l’ajustage, faire l’objet d’une vérification annuelle, qui doit être effectuée par METAS ou un laboratoire habilité et qu’il incombe à METAS de déterminer la procédure de vérification ultérieure des éthylomètres, au cas par cas.

 

En ce qui concerne tout d’abord l’éthylotest, l’automobiliste souligne, en particulier, qu’une seule mesure du taux d’alcool dans son haleine a été réalisée à l’aide de cet instrument, et que celui-ci avait été contrôlé le 13.07.2016 par METAS, soit plus d’une année avant la date du contrôle routier du 15.07.2017. Il en conclut que l’appareil n’aurait plus respecté les exigences réglementaires à cette date.

 

Ces développements de l’automobiliste ne convainquent pas. En effet, que l’art. 6 let. a OIAA prescrive qu’il soit procédé annuellement à un contrôle par METAS ou un laboratoire de vérification habilité ne signifie pas que cet intervalle doive impérativement être computé de quantième à quantième des mois correspondants de deux années consécutives. L’exigence d’annualité du contrôle ne serait pas manifestement méconnue si la durée de validité du certificat s’étendait à la fin du dernier mois de validité, comme cela paraît être la pratique de METAS (v. le certificat de vérification No 232-25694 du 13.07.2016, « valable jusqu’au 31 juillet 2017 »).

Quoi qu’il en soit, dès lors qu’une seule mesure a été effectuée au moyen de l’éthylotest et que le résultat était, de surcroît, supérieur à la limite au-delà de laquelle le conducteur ne peut plus reconnaître le résultat du test (cf. art. 11 al. 3 OCCR), cette question souffre de demeurer indécise, pour les motifs qui suivent.

 

La seconde mesure a été réalisée à l’aide d’un éthylomètre. Pour répondre aux critiques de l’automobiliste, la cour cantonale a constaté que l’appareil « Lion intoxilyzer®9000 », utilisé lors du contrôle du 15.07.2017, avait été étalonné le 07.03.2017 dans le laboratoire du fabricant. Elle en a conclu que la procédure suivie pour assurer le maintien de la stabilité de mesure de cet appareil répondait aux exigences fixées par l’art. 10 OIAA.

Il est, tout d’abord, constant qu’aucun certificat n’établit que l’éthylomètre utilisé lors du contrôle de l’automobiliste a fait l’objet d’un contrôle ultérieur annuel par METAS dans l’année précédant le 15.07.2017. On ignore, du reste, si une année s’était écoulée depuis la vérification initiale de cet appareil et seul figure au dossier le certificat de calibrage établi ensuite d’une réparation par le fabriquant. On ignore toutefois aussi si le laboratoire de cette entreprise britannique est habilité et si ce calibrage répond aux exigences d’un contrôle ultérieur au sens du ch. 1.1 de l’annexe 4 à l’OIAA.

La mesure effectuée à l’aide de l’éthylomètre a force probante, même pour établir un taux d’alcool qualifié, si le conducteur contrôlé ne demande pas une prise de sang. Cette conséquence doit être mise en relation avec la fiabilité des mesures offerte par l’appareil, qui découle du contrôle effectué par la machine des conditions de l’analyse (température, pression, présence d’alcool dans la bouche) et du caractère redondant de la mesure, effectuée selon deux procédés indépendants l’un de l’autre : une analyse électrochimique et une mesure optique dans l’infrarouge. Du point de vue toxicologico-forensique, le fait qu’un appareil de ce type mesure correctement l’alcool dans l’haleine et fournisse des valeurs correctes ne soulève guère de doute (BEAT HAURI, Atemalkoholbestimmung aus juristicher Sicht, Jahrbuch zum Strassenverkehrsrecht 2018, p. 260). Le résultat fourni par un éthylotest, qui n’offre pas les mêmes garanties, n’a quant à lui jamais force probante à lui seul. La valeur la plus faible de deux mesures convergentes ne peut, dans une plage de résultats déterminée (notamment pour des valeurs comprises entre 0,25 et 0,39 mg/l d’air expiré s’agissant de la conduite d’un véhicule automobile), constituer la preuve d’une infraction que si elle a été reconnue par le conducteur. A défaut, et en particulier sitôt franchi le seuil de 0,4 mg/l, il doit être fait usage de l’éthylomètre et, subsidiairement, de la prise de sang (cf. art. 11 et 12 al. 1 let. a ch. 1 et 2 OCCR; v. aussi BRIELLMANN, op. cit. p. 274).

Il faut ainsi considérer que l’introduction du contrôle de l’air expiré à titre d’élément de preuve, à laquelle les instituts de médecine légale se sont opposés (moins en raison de la fiabilité des résultats des mesures des taux d’alcool que des problèmes de corrélation entre taux d’alcool dans l’haleine et dans le sang; BRIELLMANN, op. cit., p. 274), implique l’utilisation d’appareils de mesure techniquement très développés, mesurant le taux d’alcool dans l’air expiré avec deux méthodes fondamentalement différentes, qui garantissent que le résultat soit automatiquement corrigé de l’influence de facteurs tels que la température du corps, la température ambiante et la quantité d’air expiré. La force probante du contrôle au moyen de l’éthylomètre fonde le constat officiel des faits matériels (FF 2010 p. 7733 s. ch. 1.3.2.16; v. aussi supra consid. 3.2). Cette dimension métrologique revêt ainsi une importance particulière et est en lien immédiat avec le caractère scientifique de la preuve et la fiabilité des résultats obtenus. Ce sont en effet les contrôles et calibrages réguliers par METAS qui doivent garantir la qualité des appareils et la précision des mesures (BRIELLMANN, op. cit. p. 275). Le respect des règles relatives au contrôle de la stabilité de mesure des appareils, joue ainsi un rôle matériel central et déploie ses effets en procédure pénale dès lors qu’il s’agit de garantir la force probante du résultat de l’analyse. Contrairement aux exigences relatives, par exemple, à l’établissement d’un rapport sur le déroulement du contrôle de la capacité de conduire, qui peuvent en fonction des circonstances concrètes être appréhendées comme de simples exigences de forme (cf. arrêt 6B_571/2019 du 17 juillet 2019 consid. 1.4), celles ayant trait au contrôle du maintien de la stabilité des instruments de mesure tendent notamment à créer les conditions nécessaires pour garantir la sécurité métrologique lors de la détermination de grandeurs mesurables (art. 1 let. a OIMes). La portée de telles règles excède celle de simples prescriptions d’ordre et touche à la validité même de la preuve administrée.

De manière générale, l’infraction en cause, tenant à avoir conduit un véhicule en état d’ébriété (taux d’alcool qualifié) revêt une certaine gravité. La répression de ce délit de mise en danger abstraite protège la sécurité routière et indirectement la vie et l’intégrité physique (cf. ATF 138 IV 258 consid. 3 p. 264 ss). Elle peut être punie de la privation de liberté jusqu’à trois ans ou d’une peine pécuniaire (art. 91 al. 2 LCR). Elle n’atteint donc pas le niveau de gravité d’un crime et ne constitue donc pas, de manière abstraite, une infraction grave au sens de l’art. 141 al. 2 in fine CPP (cf. arrêt 6B_1468/2019 du 1er septembre 2020 consid. 1.3.1 destiné à la publication; ATF 137 I 218 consid. 2.3.5.2). De surcroît, dans une perspective plus concrète, le taux d’alcool mesuré dans l’haleine (0,45 g/l) était, en l’espèce, encore relativement proche de la limite du cas qualifié (0,4 g/l) et la peine infligée (22 jours-amende), nonobstant le concours avec d’autres infractions, est demeurée dans les premiers degrés de l’échelle des peines pécuniaire. Cette appréciation des circonstances de l’espèce conduit ainsi également à exclure l’usage de la preuve obtenue au mépris des règles de validité.

 

La conclusion qui précède s’impose, d’une part, en ce qui concerne la mesure effectuée par éthylomètre, le maintien de la qualité de mesure de cet appareil n’étant pas démontré. Elle s’impose également quant au résultat fourni par la mesure à l’éthylotest, qui n’a été ni répétée ni reconnue par l’automobiliste et qui, de toute manière, ne constitue pas une preuve recevable au-delà du seuil du taux d’alcool qualifié dans l’haleine (cf. art. 11 al. 3 OCCR). Enfin, la réglementation relative aux appareils de mesure ne prévoit pas non plus qu’une mesure effectuée par un éthylomètre puisse être « vérifiée » par une autre mesure à l’aide d’un éthylotest et moins encore que le maintien de la qualité de mesure d’un éthylomètre puisse être contrôlé par un simple utilisateur au moyen d’un éthylotest dans les conditions d’un contrôle de police, qui ne sont pas comparables à celles d’un laboratoire de mesure. Nonobstant sa liberté d’appréciation en la matière, la cour cantonale ne pouvait ainsi appuyer son constat d’un taux d’alcool qualifié dans l’haleine de l’automobiliste, fondé sur les éléments dont elle disposait, par la constatation que les deux appareils avaient donné « un résultat peu ou prou identique ». La cour ne disposait pas non plus d’autres indices extérieurs.

Il est vrai que les éléments relevés par la cour cantonale (existence d’un certificat de calibration récent de l’éthylomètre et cohérence des mesures effectuées au moyen des deux appareils) ne parlent pas en faveur de mesures erronées, lors mêmes qu’elles ne répondent pas aux exigences réglementaires permettant de leur reconnaître force probante. En particulier, le certificat établi par le fabriquant de l’appareil après une réparation suggère que l’appareil a été calibré à cette occasion. Toutefois, savoir si ce certificat atteste bien de la conformité du maintien de la qualité de mesure avec les exigences légales suisses est une question essentiellement technique que le juge ne peut résoudre par lui-même, mais qui relève de la compétence de METAS, à qui il incombe de fixer les exigences du contrôle ultérieur des éthylomètres, qui peut reconnaître des contrôles de maintien de la stabilité de mesure effectués à l’étranger (art. 24 al. 4 OIMes) et qui peut être interpellé en cas de contestation de résultats de mesures (art. 29 OIMes). La cause n’est, dès lors, pas en état d’être jugée. Il convient de la renvoyer à la cour cantonale afin qu’elle complète l’instruction en interpellant METAS sur la question du respect des prescriptions pertinentes en matière de maintien de la qualité de la mesure de l’éthylomètre utilisé en l’espèce et l’éventuelle reconnaissance du certificat de calibrage délivré par le constructeur.

 

Le TF admet le recours de l’automobiliste (sur ce point), annule la décision cantonale en tant qu’elle déclare l’automobiliste coupable d’infraction à la LCR pour avoir conduit un véhicule automobile en état d’ébriété (taux qualifié) le 15.07.2017 et renvoie la cause à la cour cantonale afin qu’elle complète l’instruction, qu’elle se prononce à nouveau sur ce point et fixe à nouveau la peine pécuniaire.

 

 

Arrêt 6B_533/2020 consultable ici

 

 

Le Conseil fédéral met en consultation un projet de révision du droit de la circulation routière (sécurité routière pour les conducteurs de vélos électriques, conduite automatisée, adaptation des mesures du programme Via sicura)

Le Conseil fédéral met en consultation un projet de révision du droit de la circulation routière (sécurité routière pour les conducteurs de vélos électriques, conduite automatisée, adaptation des mesures du programme Via sicura)

 

Communiqué de presse de l’OFROU du 12.08.2020 consultable ici

 

Lors de sa séance du 12.08.2020, le Conseil fédéral a lancé la procédure de consultation concernant la révision partielle de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR), de la loi sur les amendes d’ordre (LAO) et de huit ordonnances. Il entend ainsi accroître la sécurité routière des conducteurs de vélos électriques, promouvoir des technologies respectueuses de l’environnement et améliorer les bases légales pour la conduite automatisée. Des mandats confiés par le Parlement seront également concrétisés, notamment l’adaptation des mesures du programme Via sicura voulue par les parlementaires.

 

Lors de sa séance du 12.08.2020, le Conseil fédéral a mis en consultation un projet de révision du droit de la circulation routière, qui comprend une adaptation de la loi fédérale sur la circulation routière et de la loi sur les amendes d’ordre ainsi que la révision de huit ordonnances.

 

Sécurité routière pour les conducteurs de vélos électriques

Au cours de ces dernières années, le nombre d’accidents graves à vélo électrique a quasiment été multiplié par cinq. Afin d’enrayer cette tendance et d’éviter des accidents, le Conseil fédéral entend accroître la sécurité en adoptant par voie d’ordonnance des mesures applicables à court terme : ainsi, tous les conducteurs de vélos électriques auront l’obligation de porter un casque et d’allumer les feux même de jour. Par ailleurs, les vélos électriques rapides devront être équipés d’un compteur afin que leurs conducteurs puissent respecter strictement les limitations de vitesse.

 

Promotion de technologies respectueuses de l’environnement

Les nouvelles technologies permettent de réduire la consommation de carburant et les émissions de gaz à effet de serre générées par le transport routier de marchandises. Parmi elles figurent non seulement des procédés de construction visant à améliorer l’aérodynamisme des véhicules, mais également l’utilisation de systèmes de propulsion électrique fonctionnant avec des batteries ou à l’hydrogène. Or, le droit en vigueur freine le recours à de telles possibilités, car l’utilisation de technologies respectueuses de l’environnement a un impact négatif sur la charge utile ou le volume de chargement des véhicules. Le Conseil fédéral souhaite donc que les longueurs maximales et les poids maximums autorisés des véhicules et ensembles de véhicules puissent être relevés à hauteur du poids ou de la longueur supplémentaire nécessaire. La capacité de chargement des véhicules ne devra pour autant pas être augmentée.

 

Conduite automatisée

Les systèmes d’assistance des véhicules se perfectionnent continuellement. À l’avenir, il sera possible de circuler à bord d’une voiture sans que le conducteur doive surveiller la conduite en permanence. Afin de pouvoir réagir rapidement à de telles évolutions, le Conseil fédéral se verra désormais attribuer la compétence, en vertu de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR), d’édicter les dispositions ad hoc par voie d’ordonnance. Les conditions cadres que le Conseil fédéral devra respecter dans l’exercice de sa compétence seront également définies. Par ailleurs, la révision permettra de créer une base légale pour que l’Office fédéral des routes (OFROU) puisse autoriser des essais avec des véhicules entièrement automatisés sur la voie publique. Les tests de ce type permettent de tirer de précieux enseignements.

Actuellement, la loi ne permet pas encore d’établir une réglementation matérielle afin de décharger le conducteur de ses devoirs de vigilance et de maîtrise du véhicule lors de l’utilisation de systèmes d’automatisation ou d’admettre à la circulation des véhicules sans conducteur sur certains parcours, compte tenu de la difficulté à prévoir les évolutions technologiques. Une législation trop restrictive pourrait freiner l’innovation et aller à l’encontre de futures adaptations découlant du droit international. La preuve d’une sécurité suffisante, nécessaire pour décharger les conducteurs de leurs devoirs de vigilance et de maîtrise du véhicule ou admettre à la circulation des véhicules sans conducteur sur certains parcours, n’a pas encore été apportée, mais dès que ce sera le cas pour certains systèmes, ceux-ci devront pouvoir être utilisés immédiatement. Étant donné que les dispositions concrètes peuvent être édictées plus rapidement par voie d’ordonnance, la délégation de compétence au Conseil fédéral permettra si nécessaire de transposer promptement dans le droit suisse des modifications opérées au niveau international et de réagir aux développements de façon adéquate.

 

Mise en œuvre d’interventions parlementaires

Motion 15.3574 Freysinger du 16 juin 2015 – Annulation du permis de conduire à l’essai

La motion 15.3574 Freysinger du 16 juin 2015 « Permis de conduire à l’essai. Pour des mesures proportionnées dans le cadre des infractions commises durant sa validité », qui a été acceptée, critique le fait que le permis de conduire à l’essai soit annulé lorsque son titulaire encourt un deuxième retrait de permis durant la période probatoire à cause d’une infraction légère (par ex. excès de vitesse de 16 km/h en agglomération). L’auteur de la motion estime que cette mesure est disproportionnée et que la réglementation en vigueur donne lieu à une inégalité de traitement dans le sens où le système en cascade sanctionne de manière plus clémente celui qui commet d’abord une infraction légère et ensuite une infraction grave que celui qui fait l’inverse. En adoptant la motion 15.3574 Freysinger, le Parlement charge le Conseil fédéral de lui présenter une modification de la LCR. Cette modification prévoira que le permis de conduire à l’essai ne deviendra caduc que si son titulaire encourt un deuxième retrait de permis durant la période probatoire à cause d’une infraction qualifiée au minimum de moyennement grave. Le Conseil fédéral a proposé d’accepter la motion le 12.08.2015.

Nouvelle réglementation proposée et justification : La période d’essai ne sera prolongée que si le permis de conduire est retiré à son titulaire durant celle-ci à la suite d’une infraction grave ou moyennement grave. À l’avenir, le permis de conduire à l’essai ne deviendra caduc que si son titulaire commet une nouvelle infraction grave ou moyennement grave durant la période probatoire. Les infractions légères commises durant la période d’essai n’entraîneront ni la prolongation de cette dernière ni l’annulation du permis de conduire.

Le fait que le permis de conduire ne soit annulé que si au moins deux infractions moyennement graves sont commises durant la période d’essai permet de mieux tenir compte du principe de proportionnalité et d’éviter des sanctions trop sévères. Une fois la période probatoire passée, une infraction légère entraîne tout au plus un mois de retrait de permis, y compris en cas de récidive. Ainsi, dans le système en cascade, l’infraction légère est moins pénalisante. Cette clémence s’appliquera également aux titulaires d’un permis de conduire à l’essai. Une infraction légère n’entraînera donc ni la prolongation de la période d’essai ni l’annulation du permis de conduire.

Pour autant, les infractions légères ne resteront pas impunies avec cette réglementation. Ainsi, les délinquants primaires encourront un avertissement, et ceux qui commettent une nouvelle infraction légère dans les deux années suivant l’avertissement, un retrait de permis d’un mois au minimum (art. 16a LCR). L’adaptation proposée permettra également de corriger un effet injuste, à savoir que l’annulation du permis de conduire peut dépendre de l’ordre dans lequel les infractions sont commises. Par conséquent, à l’avenir, le permis de conduire sera toujours annulé, que son titulaire ait d’abord commis une infraction moyennement grave puis une infraction grave ou l’inverse.

 

Adaptation des mesures du programme Via sicura

Pour répondre à une demande du Parlement, le Conseil fédéral propose également de rendre plus proportionnées les mesures à l’encontre des chauffards introduites dans le cadre du programme Via sicura et ainsi d’éviter des cas de rigueur indésirables en adaptant la LCR. Les juges disposeront d’une plus grande marge d’appréciation afin de mieux tenir compte des situations concrètes.

Actuellement, aux termes de la loi, le délit de chauffard s’applique automatiquement dès lors que l’un des excès de vitesse définis dans la LCR a été commis, et ce même s’il n’y avait aucun risque d’accident pouvant entraîner des blessures graves ou la mort ou que l’auteur des faits roulait trop vite en agglomération non pas intentionnellement mais par négligence, car il s’imaginait être hors agglomération par exemple. À l’avenir, la formulation de cette disposition devra clairement faire ressortir qu’il est impératif d’examiner le cas d’espèce même en présence d’excès de vitesse au sens de l’art. 90 al. 4 LCR ; le texte de loi reflètera ainsi la jurisprudence du Tribunal fédéral. Il s’agit de préciser que les juges pourront mieux tenir compte des circonstances du cas d’espèce et ne pas retenir le délit de chauffard si l’infraction a été commise par négligence ou s’il n’y avait pas de risque élevé d’accident pouvant entraîner des blessures graves ou la mort. Par ailleurs, il n’y aura plus de peine privative de liberté minimale. Les juges pourront décider librement de la peine qui tient compte du cas concret. De cette manière, le règlement du délit de chauffard sera harmonisé avec celui applicable en cas de mise en danger de la vie d’autrui (art. 129 CP). Toutefois, la peine maximale de quatre années de privation de liberté sera maintenue. Ainsi, les délits de chauffard demeureront un crime (art. 10 al. 2 CP). Enfin, la durée minimale de retrait du permis de conduire sera réduite de 24 à 6 mois pour les délinquants primaires. Pour autant, elle demeurera deux fois plus longue que pour une infraction grave normale, qui est passible d’un retrait du permis de conduire de trois mois au minimum (art. 16c LCR). Cette sanction pourra être alourdie en fonction de l’appréciation des autorités d’exécution cantonales, selon les circonstances concrètes de l’infraction et les antécédents du conducteur. La revendication principale de l’initiative populaire 12.053 « Protection contre les chauffards » demeure ainsi satisfaite.

 

Recours obligatoire des assureurs en responsabilité civile des véhicules automobiles

Le Parlement a entériné le recours obligatoire des assureurs en responsabilité civile (RC) des véhicules automobiles à l’été 2012 dans le cadre du programme de sécurité routière Via sicura. À l’époque, le Conseil fédéral avait proposé au Parlement d’obliger les assureurs à se retourner systématiquement contre les responsables d’accidents si ceux-ci ont occasionné des dommages par négligence grave. Il entendait ainsi éviter que les assureurs renoncent, en échange d’une faible augmentation de la prime d’assurance, à exercer un recours en cas d’accidents causés à la suite d’une négligence grave et envoient de ce fait un mauvais signal pour la sécurité routière. Le Parlement a toutefois limité l’obligation de recours aux dommages résultant d’un accident causé par un conducteur dans l’incapacité de conduire ou ayant commis un délit de chauffard (art. 65 al. 3 LCR). Le recours obligatoire est entré en vigueur le 01.01.2015.

Nouvelle réglementation proposée et justification : L’obligation de recours sera transformée en un droit de recours, comme c’était le cas auparavant, de telle sorte que les règles applicables soient celles qui prévalaient avant la mise en œuvre de Via sicura. En cas de dommages résultant d’une négligence grave, les assureurs auront ensuite la possibilité de se retourner contre le responsable de l’accident (art. 65 al. 3 du projet LCR en relation avec l’art. 14 al. 2 LCA). Cette modification permet de rendre le programme de sécurité routière Via sicura plus acceptable, sans réduire pour autant son utilité pour la sécurité routière.

 

La procédure de consultation concernant le projet de révision durera jusqu’au 12.12.2020.

 

 

Communiqué de presse de l’OFROU du 12.08.2020 consultable ici

Documents pour la consultation disponibles ici

 

 

Le Conseil fédéral adopte de nouvelles règles de la circulation routière et prescriptions en matière de signalisation

Le Conseil fédéral adopte de nouvelles règles de la circulation routière et prescriptions en matière de signalisation

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral des routes (OFROU) du 20.05.2020 consultable ici

 

Lors de sa séance du 20.05.2020, le Conseil fédéral a adopté la révision des ordonnances sur les règles de la circulation routière et sur la signalisation routière. Ces modifications concernent différents domaines. À titre d’exemple, il sera à l’avenir obligatoire de former un couloir de secours sur les autoroutes en cas de bouchons et d’appliquer le principe de la fermeture Éclair en cas de suppression de voies. En ce qui concerne la mobilité douce, les enfants auront le droit, jusqu’à l’âge de 12 ans, de rouler à vélo sur le trottoir en l’absence de piste ou de bande cyclable. Le Conseil fédéral a mis en vigueur ces modifications au 01.01.2021.

Les modifications d’ordonnances poursuivent deux objectifs : la fluidité du trafic et la sécurité routière. Ce faisant, le Conseil fédéral répond aussi à des interventions parlementaires.

 

Mesures concernant la circulation des véhicules

Lorsqu’une voie devra être fermée sur une autoroute, c’est le principe de la fermeture Éclair qui s’appliquera désormais. Les automobilistes seront tenus de laisser les véhicules roulant sur la voie coupée se rabattre sur la voie ouverte. L’objectif est ainsi d’éviter que les conducteurs se placent trop tôt sur la voie restante lors de suppressions de voies, comme c’est souvent le cas aujourd’hui. Le trafic pourra alors mieux s’écouler. Le non-respect du principe de la fermeture Éclair sera puni d’une amende d’ordre.

Par ailleurs, il sera obligatoire à l’avenir de former un couloir de secours : en cas d’embouteillages, les automobilistes devront laisser suffisamment de place pour les véhicules de secours entre la voie de gauche et la voie de droite ou, sur les routes à trois voies, entre la voie de gauche et les deux voies de droite, sans empiéter sur la bande d’arrêt d’urgence. Le non-respect de cette obligation sera puni d’une amende d’ordre.

Si le devancement par la droite de véhicules sur l’autoroute n’était autorisé jusqu’à maintenant qu’en présence de deux files parallèles, il sera également permis à l’avenir si seulement une file de véhicules s’est formée sur la voie de gauche ou, sur les autoroutes à trois voies, sur la voie du milieu. De cette manière, le trafic pourra s’écouler plus longtemps sur les deux voies. Par contre, le dépassement par la droite (déboîter sur la voie de droite et se rabattre sur la gauche juste après) reste proscrit. Une telle manœuvre sera punie d’une amende d’ordre.

 

Mesures en faveur de la mobilité douce

Les cyclistes et les conducteurs de cyclomoteurs pourront désormais tourner à droite au feu rouge, pour autant que la signalisation les y autorise. Une autre modification concerne l’utilisation des trottoirs par les enfants circulant à vélo. À ce jour, seuls les élèves de l’école enfantine ont le droit d’y pédaler. À l’avenir, les enfants pourront rouler à vélo sur le trottoir jusqu’à l’âge de douze ans, mais uniquement en l’absence de piste ou de bande cyclable. Le Conseil fédéral est conscient que la présence accrue de jeunes cyclistes sur les trottoirs est susceptible de déranger les piétons, mais cette nouvelle réglementation contribue à la sécurité routière, puisqu’elle permet d’éviter que des enfants ne se fassent percuter par des voitures.

Une autre modification permettra à l’avenir d’aménager un sas pour cyclistes au moyen d’un marquage au sol devant des installations de signaux lumineux, même en l’absence de bande cyclable. Par ailleurs, une signalisation des déviations pour la mobilité douce sera mise en place.

 

Mesures concernant les véhicules en stationnement

Pour ce qui est du stationnement, le symbole « Station de recharge » est désormais créé. Il permettra de désigner les aires de stationnement équipées d’une station de recharge pour les véhicules électriques. Les cases de stationnement disposant d’un tel équipement pourront dorénavant être peintes en vert, ce qui répond à une demande du Parlement (motion 17.4040 du Groupe vert’libéral « Zones vertes pour les véhicules électriques »). Ce marquage permettra de trouver des stations de recharge plus facilement.

Des aires de stationnement délimitées par un marquage au sol pourront désormais être réservées aux vélos au moyen du pictogramme du vélo, sans qu’une signalisation supplémentaire soit nécessaire, comme c’était le cas jusqu’ici.

Le champ d’application du signal « Parcage contre paiement » sera étendu à tous les véhicules. Ainsi, des cases de stationnement payantes pourront aussi être introduites pour les motocycles, les cyclomoteurs et les vélos électriques rapides.

 

Entrée en vigueur

Les modifications d’ordonnance entrent en vigueur le 1er janvier 2021. Elles seront parfois précisées dans des normes VSS.

 

Autres modifications en vigueur au 1er janvier 2021

Dans l’ordonnance sur les routes nationales, le Conseil fédéral a levé l’interdiction de servir et de vendre de l’alcool sur les aires de ravitaillement des autoroutes. Il répond ainsi à une motion de la Commission des transports et des télécommunications du Conseil national (17.3267).

Par ailleurs, des facilités sont introduites pour certaines voitures automobiles lourdes (dont le poids total dépasse 3500 kg) : les services de transfusion sanguine seront exemptés de l’interdiction de circuler le dimanche et la nuit, et les véhicules vétérans ne tomberont pas sous l’interdiction de circuler le dimanche.

La vitesse maximale autorisée des véhicules automobiles légers avec remorque dont le poids n’excède pas 3,5 t passera de 80 à 100 km/h, pour autant que la remorque et le véhicule tracteur soient autorisés à rouler à cette vitesse.

Une adaptation de l’ordonnance du DETEC sur les zones 30 et les zones de rencontre permettra également de déroger exceptionnellement au principe de la priorité de droite. Il sera en effet possible à l’avenir d’aménager des rues cyclables prioritaires dans ces zones. Si l’introduction d’un signal spécial « Rue cyclable » a été écartée, la rue cyclable pourra malgré tout être signalisée par le marquage au sol d’un grand pictogramme de vélo.

Les instructions du DETEC concernant les marques particulières sur la chaussée sont complétées de telle sorte qu’un marquage puisse signaler un danger lié à la circulation d’un tramway ou d’un chemin de fer routier au niveau d’un passage pour piétons. Une expérimentation menée avec le concours de villes concernées a montré que cette mesure était bénéfique pour la sécurité routière. Les instructions précitées prévoient également la possibilité de signaliser des endroits de traversée appropriés par des « empreintes de pas ». Cette marque sera apposée sur le trottoir et utilisée par exemple dans les zones 30, étant donné que des passages pour piétons ne peuvent y être peints que dans des cas exceptionnels.

 

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral des routes (OFROU) du 20.05.2020 consultable ici

Modification des règles de la circulation routière et des prescriptions en matière de signalisation (OCR, OSR, OAO, ORN), Commentaires, disponible ici

Modification des règles de la circulation et des prescriptions en matière de signalisation, Commentaires relatifs aux actes relevant de la compétence du DETEC, disponible ici

 

 

1C_548/2018 (f) du 26.03.2019 – Annulation du permis de conduire à l’essai / 15a LCR – 35a OCR / Notion d’« antécédent » – Rappel de la jurisprudence / Notion et calcul du délai de récidive

Arrêt du Tribunal fédéral 1C_548/2018 (f) du 26.03.2019

 

Consultable ici

 

Annulation du permis de conduire à l’essai / 15a LCR – 35a OCR

Notion d’« antécédent » – Rappel de la jurisprudence

Notion et calcul du délai de récidive

 

A.__ est titulaire depuis le 11.04.2007 d’un permis de conduire pour les catégories G et M. Après avoir commis une infraction moyennement grave en 2011, ce permis ainsi que celui d’élève conducteur pour véhicule automobile de la catégorie B lui ont été retirés pour une durée de 4 mois.

Le 13.06.2012, A.__ s’est vu délivrer un permis de conduire à l’essai pour les catégories B, B1, F, G et M. En date du 02.09.2012, il a conduit un véhicule automobile en état d’ébriété (alcoolémie de 1.87‰), s’est soustrait à un contrôle de la circulation et a dépassé, dans le cadre de la course-poursuite qui s’en est suivie, la vitesse maximale autorisée. Sur la base d’une expertise niant l’aptitude à la conduite de l’intéressé en raison d’une déficience d’ordre caractériel et d’une dépendance à l’alcool, l’OCRN a prononcé le 21.05.2013 un retrait de sécurité au sens de l’art. 16d al. 1 let. b et c LCR, et a fixé un délai d’attente de six mois dès la date de l’infraction grave commise le 02.09.2012.

Par décision du 27.10.2015, l’OCRN a réadmis l’intéressé à la circulation ; il a également subordonné la restitution du permis de conduire à l’essai à la réussite d’un examen de conduite théorique et pratique et a prolongé la période probatoire de celui-ci de 45 mois. En date du 10.05.2016, l’intéressé s’est vu restituer son permis de conduire à l’essai, moyennant une période probatoire prolongée jusqu’au 10.02.2020.

Le 16 octobre 2017, vers 16h15, A.__ a circulé au volant d’un véhicule de la catégorie B sur l’autoroute A1, à Courgevaux, dans un tunnel à une vitesse de 106 km/h (marge de sécurité déduite) alors que la vitesse maximale autorisée était de 80 km/h. En raison de ces faits, l’OCRN, constatant qu’il s’agissait de la seconde infraction commise durant la période probatoire justifiant un retrait, a prononcé l’annulation du permis de conduire à l’essai dont était titulaire le prénommé, en application des art. 15a al. 4 et 16a al. 1 let. a et al. 2 LCR et de l’art. 35a OCR ; l’autorité a par ailleurs retiré l’effet suspensif à un éventuel recours.

 

Procédure cantonale

Par décision du 30.05.2018, la Commission de recours contre les mesures LCR a confirmé cette mesure. En substance, elle a considéré que l’infraction commise – qualifiée de légère – devait être sanctionnée par un nouveau retrait de permis; or, dans le cas d’un conducteur titulaire d’un permis de conduire à l’essai, une telle mesure de retrait entraînait la caducité du permis provisoire en application de l’art. 15a al. 4 LCR.

 

TF

Permis de conduire à l’essai (ou permis à deux phases)

Selon l’art. 15a LCR, le permis de conduire est tout d’abord délivré à l’essai pour trois ans (al. 1). En cas de retrait du permis en raison d’une infraction, la période probatoire est prolongée d’un an ; si le retrait expire après la fin de cette période, la prolongation commence à compter de la date de restitution du permis de conduire (al. 3). Le permis de conduire à l’essai est caduc si son titulaire commet une seconde infraction entraînant un retrait (al. 4) ; cette disposition définit une présomption d’inaptitude à la conduite en cas de seconde infraction entraînant un retrait pendant la période probatoire (cf. arrêt 1C_67/2014 du 9 février 2015 consid. 4.1). Dans ce cas, le permis de conduire à l’essai est annulé en vertu de l’art. 35a al. 1 OAC. Un nouveau permis d’élève conducteur peut être délivré au plus tôt un an après l’infraction, sur la base d’une expertise psychologique attestant l’aptitude à conduire; après avoir repassé avec succès l’examen de conduite, la personne concernée obtient un nouveau permis de conduire à l’essai (art. 15a al. 5 et 6 LCR).

L’instrument du permis de conduire à l’essai (ou permis à deux phases), introduit avec la révision de la LCR entrée en vigueur le 1er décembre 2005, vise à mieux prévenir les infractions à la LCR commises par les nouveaux conducteurs – catégorie de conducteurs la plus souvent impliquée dans des accidents – et ainsi à augmenter la sécurité du trafic (ATF 136 I 345 consid. 6.1; arrêt 1C_559/2008 du 15 mai 2009 consid. 3.1; Message du 31 mars 1999 du Conseil fédéral concernant la modification de la LCR, FF 1999 IV 4106, 4108 ss et 4114).

 

Notion d’« antécédent »

Selon l’art. 16a al. 2 LCR, après une infraction légère, le permis d’élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour un mois au moins au conducteur qui a fait l’objet d’un retrait de permis ou d’une autre mesure administrative au cours des deux années précédentes. Selon l’art. 16a al. 3 LCR, l’auteur d’une infraction légère fait l’objet d’un avertissement si, au cours des deux années précédentes, le permis de conduire ne lui a pas été retiré et qu’aucune autre mesure administrative n’a été prononcée.

Dans l’ATF 141 II 220, le Tribunal fédéral a été amené à examiner si un retrait à titre préventif du permis de conduire, prononcé en application de l’art. 30 OAC à la suite d’une infraction qualifiée (ultérieurement) de grave, constituait un antécédent grave au sens de l’art. 16c al. 2 let. c LCR. Selon cette disposition, après une infraction grave, le permis de conduire est retiré pour douze mois au minimum si, au cours des cinq années précédentes, le permis a été retiré une fois en raison d’une infraction grave ou à deux reprises en raison d’infractions moyennement graves. Procédant à l’interprétation de cet article, le Tribunal fédéral a considéré que le système dit en cascade des durées minimales de retrait après une infraction grave s’appliquait indépendamment de la nature du précédent retrait de permis ; en d’autres termes, peu importait dans ce cas que le retrait précédent fût un retrait de sécurité (préventif) ou un retrait d’admonestation. Il relevait encore qu’une interprétation téléologique de cette norme amenait au même résultat et ajoutait qu’une interprétation contraire ne trouvait aucun appui dans les travaux préparatoires de la révision de la LCR entrée en vigueur le 1er janvier 2015 (cf. ATF 141 II 220 consid. 3.3.2 à 3.3.6).

Avec l’instance précédente, il y a lieu de considérer que ce raisonnement vaut mutatis mutandis pour la présente cause. En effet, selon la lettre de l’art. 16a al. 2 et 3, a contrario, LCR, le prononcé d’un retrait de permis d’une durée minimale d’un mois implique qu’un retrait de permis a été retiré (« a fait l’objet d’un retrait de permis » selon l’al. 2 et « retiré » selon l’al. 3; « entzogen » et « revocata »; cf. également ATF 136 II 447 consid. 5.3 p. 456) ou qu’une autre mesure administrative a été prononcée (« a fait l’objet (..) d’une autre mesure administrative », « verfügt » « deciso »). Comme relevé par le Tribunal fédéral dans l’ATF 141 II 220 précité, le système dit en cascade des durées minimales de retrait de permis de conduire prévu aux art. 16a et 16c LCR présuppose uniquement que le permis de conduire a été retiré, indépendamment de la nature du précédent retrait (cf. ATF 141 II 220 consid. 3.3.4). En l’occurrence, il n’y a pas lieu d’interpréter plus restrictivement la notion de précédent retrait de permis selon l’art. 16a al. 2 LCR en la limitant aux seuls retraits d’admonestation, comme le souhaiterait le recourant. Une telle interprétation se justifierait d’autant moins que les antécédents visés par l’art. 16a al. 2 LCR incluent non seulement les retraits de permis, mais également, à la différence des art. 16b al. 2 et 16c al. 2 LCR, toutes autres mesures administratives. Contrairement à ce qu’affirme le recourant, il ne ressort pas du Message du Conseil fédéral, en particulier de l’extrait qu’il invoque, que la notion « d’autres mesures administratives » s’entendrait uniquement des mesures d’admonestation. L’exclusion des retraits de sécurité, lorsqu’ils procèdent comme en l’espèce d’une infraction à la LCR, irait à l’encontre de la ratio legis des mesures introduites par la révision de la LCR qui est d’améliorer la sécurité routière en sanctionnant plus sévèrement les personnes qui ont récidivé au cours d’une période déterminée (Message précité, FF 1999 IV 4108). L’interprétation défendue par le recourant favoriserait de manière injustifiée les conducteurs qui, à la suite d’une même infraction aux règles de la LCR, se verraient infliger un retrait de sécurité et non pas un retrait d’admonestation.

L’instance cantonale a ainsi estimé à juste titre que le retrait de sécurité prononcé le 21.05.2013 (retrait de sécurité) pouvait être considéré comme un antécédent au sens de l’art. 16a al. 2 LCR.

 

Notion et calcul du délai de récidive

A.__ affirme, en se basant sur un avis doctrinal, qu’en cas de retrait de sécurité, « le délai de récidive débute non pas à la restitution du permis (lorsque le conducteur est considéré comme guéri), mais déjà à l’échéance du délai d’attente » (cf. CÉDRIC MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, n. 79.6 p. 605 s.); à suivre cet avis, le délai de récidive aurait commencé en l’espèce à courir en mars 2013, soit à l’échéance du délai de six mois débutant le 02.09.2012.

L’avis doctrinal qui considère que le délai de récidive débute à l’échéance du délai d’attente est fondé sur l’idée que ce délai « représente, pour le législateur, la partie du retrait de sécurité correspondant à la sanction de l’infraction commise » (cf. MIZEL, op. cit., n. 79.6 p. 606). Il n’y a toutefois pas lieu de suivre cette opinion. En effet, selon une jurisprudence constante en matière de circulation routière, les délais de récidive (ou délais d’épreuve; cf. Message précité, FF 1999 IV 4106, spéc. 4135) prévus par les art. 16a à 16c LCR commencent à courir à la fin de l’exécution d’un précédent retrait de permis (cf. ATF 136 II 447 consid. 5.3 p. 455 s.; arrêts 1C_520/2013 du 17 septembre 2013 consid. 2 et 3; 1C_452/2011 du 21 août 2012 consid. 3.8; 1C_180/2010 du 22 septembre 2010 consid. 2).

Or, en l’espèce, l’expiration du délai d’attente de six mois assorti au retrait de sécurité prononcé ne coïncide pas avec l’expiration de ce dernier. En principe, le retrait de sécurité dure jusqu’à ce que l’intéressé soit réadmis à la circulation après en avoir été jugé apte. Il ne fait au demeurant aucun sens de soumettre le conducteur à un délai d’épreuve tant qu’il est sous le coup d’un retrait de permis et qu’il n’a pas été jugé apte à la conduite par l’autorité compétente.

Ainsi, le retrait de sécurité a pris fin le 27.10.2015. Il en résulte que l’instance précédente a retenu, à juste titre, que l’infraction légère du 16.10.2017 avait été commise durant le délai de récidive de deux ans, constituant ainsi un cas de récidive au sens de l’art. 16a al. 2 LCR devant conduire au prononcé d’un retrait de permis de conduire.

 

Le TF rejette le recours du conducteur A.__.

 

 

Arrêt 1C_548/2018 consultable ici

 

 

6B_1131/2018 (f) du 21.01.2019 – Notion de voie publique – 1 LCR – 1 OCR / Place publique lors d’un jour de marché

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_1131/2018 (f) du 21.01.2019

 

Consultable ici

 

Notion de voie publique / 1 LCR – 1 OCR

Place publique lors d’un jour de marché

 

 

Né en 1973, X.__ travaille comme commerçant indépendant sur les marchés. Il tient en particulier un stand de service traiteur et de vente de fromages sur la place A.__. Il bénéficie d’une autorisation de circuler sur cette place.

Son casier judiciaire fait état de diverses condamnations depuis 2011, dont deux pour conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis. Le fichier ADMAS de X.__ fait état de sept retraits du permis de conduire, prononcés entre 2002 et 2014, le dernier pour une durée indéterminée.

Le 10.05.2017, X.__ s’est rendu au marché A.__ afin de tenir son stand. Plus tard dans la journée, à 15h, son activité terminée, il a pris le volant de son véhicule automobile, qui tractait une remorque, avant d’être interpellé tandis qu’il circulait sur la place A.__. Il était alors sous le coup d’une mesure de retrait du permis de conduire.

Par jugement du 27.02.2018, le Tribunal de police a condamné X.__, pour conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR), à une peine privative de liberté de 90 jours.

Par jugement du 27.08.2018, la Cour d’appel pénale a partiellement admis l’appel formé par le prénommé contre ce jugement et a réformé celui-ci en ce sens que X.__ est condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à 30 fr. le jour (arrêt AM17.010149-GALN/VFE – consultable ici).

 

TF

Selon l’article premier LCR, cette loi régit la circulation sur la voie publique ainsi que la responsabilité civile et l’assurance pour les dommages causés par des véhicules automobiles, des cycles ou des engins assimilés à des véhicules (al. 1). Les conducteurs de véhicules automobiles et les cyclistes sont soumis aux règles de la circulation sur toutes les routes servant à la circulation publique ; les autres usagers de la route ne sont soumis à ces règles que sur les routes ouvertes entièrement ou partiellement aux véhicules automobiles ou aux cycles (al. 2). L’art. 1 al. 2 OCR précise que sont publiques les routes qui ne servent pas exclusivement à l’usage privé.

Selon la jurisprudence, il y a lieu de retenir une conception large de la notion de route publique. Ainsi, les places, les ponts, les tunnels, etc. sont à considérer comme routes au sens de la LCR (ATF 86 IV 29 consid. 2 p. 31). Le facteur déterminant n’est pas de savoir si la surface de la route est en propriété privée ou publique, mais si elle est utilisée pour la circulation générale et si son usage est possible pour un groupe indéterminé de personnes, même si son utilisation est limitée (ATF 104 IV 105 consid. 3 p. 108; 101 IV 173 p. 175; arrêt 6B_1219/2016 du 9 novembre 2017 consid. 1.2).

Pour déterminer si une voie doit être qualifiée de publique au sens de la LCR – et par conséquent si cette loi y trouve application -, il convient de tenir compte de son utilisation effective. La voie est publique dès qu’elle peut être parcourue par un cercle indéterminé de personnes, cela même si son utilisation est réservée à certains buts déterminés – par exemple l’accès à une école ou à une église – puisque, même dans un tel cas, le cercle d’usagers reste indéterminé (cf. ATF 86 IV 29 consid. 2 p. 30 s.). Doit ainsi être qualifié de voie publique le parking d’un immeuble comprenant des places pour visiteurs, dès lors que celui-ci est accessible à un nombre indéterminé de personnes (cf. arrêts 6B_507/2012 du 1er novembre 2012 consid. 2.1; 6S.286/2003 du 26 septembre 2003 consid. 3.2), de même qu’une route qui, par sa situation, ne serait fréquentée que par des chasseurs, des promeneurs, des employés communaux ou des propriétaires privés, ceux-ci constituant également un cercle indéterminé de personnes (cf. arrêt 6B_847/2011 du 21 août 2012 consid. 2.5). En revanche, une voie interdite à la circulation et dont l’utilisation est subordonnée à l’obtention d’une autorisation écrite ne saurait être qualifiée de publique, dès lors qu’elle n’est accessible qu’à un cercle déterminé de personnes (cf. arrêt 6S.411/2005 du 21 mars 2006 consid. 2).

Selon la cour cantonale, il est notoire que la place A.__ est une place publique, où la circulation est interdite sauf pour les véhicules dûment autorisés, s’agissant notamment des commerçants exerçant leur activité les jours de marché.

Il n’est pas contesté que la place A.__ doive être qualifiée de « route » au sens de l’art. 1 al. 1 OCR. Une telle qualification est possible même s’agissant d’un espace destiné et réservé aux piétons (cf. BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, Code suisse de la circulation routière, commentaire, 4e éd. 2015, n° 1 ad art. 1 OCR).

L’art. 1 al. 2 OCR énonce clairement que sont publiques toutes les routes, sauf celles servant exclusivement à l’usage privé. Cette norme doit conduire à considérer qu’une place publique, librement accessible aux piétons et dont l’usage n’est nullement privé, constitue une route publique au sens de la LCR, quand bien même seul un cercle déterminé d’usagers automobiles pourrait l’emprunter. Le fait que le règlement de police de la ville de B.__ évoque l’existence de zones qui ne seraient pas soumises à la LCR mais sur lesquelles pourraient circuler des véhicules autorisés ne change rien à cette acception de la « route publique » selon l’OCR.

Partant, la cour cantonale n’a pas violé le droit fédéral en considérant que les règles de la LCR trouvaient application en l’espèce.

 

Le TF rejette le recours de X.__.

 

 

Arrêt 6B_1131/2018 consultable ici

 

 

Pour autoriser le devancement par la droite sur les autoroutes

Pour autoriser le devancement par la droite sur les autoroutes

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.06.2018 consultable ici

 

Il devrait être permis de devancer une file de véhicules par la droite sur les autoroutes et les semi-autoroutes. L’interdiction de dépasser serait en revanche maintenue. Le Conseil des Etats a approuvé mardi par 30 voix contre 8 une motion du National.

Le texte déposé par Thierry Burkart (PLR/AG) vise à mieux utiliser la voie de droite. Comme dépasser par la droite est actuellement sanctionné par le retrait du permis de conduire, de nombreux automobilistes s’abstiennent de devancer par la droite même lorsque le volume du trafic est dense.

Selon l’auteur de la motion, il faut distinguer clairement un devancement et un dépassement (contourner un véhicule pour se réinstaller dans la file), autoriser le premier et maintenir l’interdiction pour le second. Le Conseil fédéral a souscrit à la motion. De nombreux pays européens prévoient des exceptions en ce sens.

 

Pas convaincus

Une poignée de sénateurs n’étaient pas convaincus. Il n’y a pas d’élément qui permette de dire que la sécurité sera augmentée, a critiqué noté Géraldine Savary (PS/VD). Le droit en vigueur permet en outre déjà le devancement par la droite sur les tronçons servant à la présélection, sur les voies d’accélération et en cas de circulation en files parallèles.

Les opposants à la motion ont également fait valoir qu’une révision d’ordonnance relevait de la seule compétence du Conseil fédéral. Celui-ci lancera prochainement une consultation et pourra trancher à l’issue de cette dernière.

 

Fluidité du trafic

Pour la majorité, autoriser le devancement permettra d’améliorer la fluidité du trafic des tronçons les plus fréquentés. La capacité des routes nationales, qui absorbent plus de 43% du trafic individuel, pourrait être augmentée de 5 à 10%, selon des estimations de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.

Les kilomètres de bouchons actuels nuisent à l’économie, a souligné Hans Wicki (PLR/NW). Une insécurité juridique serait en outre levée, a-t-il poursuivi.

Le Tribunal fédéral se montre déjà souple dans l’application du droit, mais peu de gens le savent. L’automobiliste qui devance par la droite à vitesse constante une file de véhicules sur la gauche, où la circulation est dense et plus lente, n’enfreint ainsi pas la loi.

Il y a en outre déjà circulation en files parallèles lorsque les véhicules sur la voie rapide ne peuvent plus, en raison de la surcharge du trafic, circuler aussi rapidement que ceux qui se trouvent sur la voie de droite.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.06.2018 consultable ici

Bulletin officiel, Conseil des Etats Session d’été 2018, séance du 13.06.18 08h30 consultable ici

Motion Burkart 17.3666 « Autoriser le devancement par la droite sur les autoroutes et les semi-autoroutes. Créer la sécurité du droit en assouplissant et en clarifiant les dispositions à ce sujet » consultable ici

 

 

Abandon de la distinction entre le transport professionnel de personnes de l’usage normal des véhicules de tourisme

Abandon de la distinction entre le transport professionnel de personnes de l’usage normal des véhicules de tourisme

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.06.2018 consultable ici

 

Le Conseil des Etats a souscrit à l’unanimité à une motion du National qui vise à permettre à tous les détenteurs d’un permis de conduire une voiture de tourisme de pouvoir transporter des personnes à titre professionnel.

La distinction est jugé désuète. Eu égard en particulier à l’automatisation croissante, et bientôt totale, des véhicules, la distinction actuelle ne semble plus adaptée aux réalités actuelles.

Selon l’auteur de la motion, Philippe Nantermod (PLR/VS), l’autorisation dont doivent disposer les chauffeurs professionnels. remplit essentiellement une fonction protectionniste et fiscale. Elle induit une bureaucratie inutile et limite le marché pour les consommateurs, sans améliorer la qualité.

Des questions devront toutefois être éclaircies, comme celle de la responsabilité du chauffeur ou les conditions de travail des professionnels, a relevé le syndicaliste Paul Rechsteiner (PS/SG).

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.06.2018 consultable ici

Bulletin officiel, Conseil des Etats Session d’été 2018, séance du 13.06.18 08h30 consultable ici

Motion Nantermod 17.3924 « Permis de conduire. Mêmes véhicules, mêmes routes, même permis » consultable ici