9C_375/2021 (f) du 15.03.2022 – Assurance-invalidité – Assistance gratuite d’un conseil juridique dans la procédure administrative / 37 al. 4 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_375/2021 (f) du 15.03.2022

 

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Assurance-invalidité – Assistance gratuite d’un conseil juridique dans la procédure administrative / 37 al. 4 LPGA

 

Assurée, née en 1983, a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité en septembre 2011, rejetée par décision du 18.04.2013.

Le 03.10.2016, l’assurée a déposé une nouvelle demande de prestations, rejetée par décision du 03.06.2019. Par arrêt du 13.08.2020, le Tribunal cantonal a admis le recours de l’assurée, annulé cette décision et renvoyé la cause à l’office AI afin qu’il complète l’instruction sur le plan médical (en relation avec un syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile antérieur à la décision administrative du 03.06.2019).

Le 19.08.2020, l’assurée a sollicité de l’office AI l’octroi de l’assistance juridique administrative. Par décision du 07.12.2020, l’office AI a rejeté la demande d’assistance juridique gratuite, au motif que le degré de complexité du dossier ne nécessitait pas l’assistance d’un avocat.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 6/21 – 146/2021 – consultable ici)

La juridiction cantonale a considéré que l’assurée avait simplement tenu un discours de portée générale sur les bienfaits présumés de l’assistance d’un avocat en cas de reprise de l’instruction à la suite d’un arrêt de renvoi; l’assurée relevait que son avocat avait déjà obtenu des prononcés favorables à la suite de décisions négatives rendues par l’office AI. Les juges cantonaux ont aussi retenu qu’aucun diagnostic psychique n’avait été mis en évidence et que la capacité de jugement et de prise de décision de l’assurée n’était pas altérée. En outre, la cause ne revêtait pas un degré particulier de complexité, malgré le renvoi de la cause à l’office AI pour instruction complémentaire, car il s’agissait de procéder à une nouvelle évaluation du diagnostic d’Ehlers-Danlos susceptible de modifier les limitations fonctionnelles retenues. La question était médicale et aucune question de droit n’avait été mise en évidence; de façon plus large on se trouvait en présence d’un litige portant sur l’évaluation de la capacité de travail et sur le droit à une rente d’invalidité, soit de questions qui se posaient communément dans la plupart des procédures et qui ne comportaient intrinsèquement aucune difficulté particulière. Enfin, l’assurée avait démontré qu’elle était capable de gérer de manière autonome la plupart des questions administratives liées à ses demandes de prestations. En définitive, elle n’avait pas mis en évidence de circonstances particulières qui justifiaient une assistance par un avocat, de sorte que le rejet de la demande d’assistance juridique était fondé.

Par jugement du 06.05.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal. L’assistance judiciaire lui a été accordée pour la procédure cantonale de recours.

 

TF

Consid. 3.1
Le litige a trait au droit de l’assurée à l’assistance gratuite d’un conseil juridique dans la procédure administrative conduite par l’office intimé. Il s’agit d’une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF; arrêt 9C_13/2020 du 29 octobre 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités).

Consid. 4.2
L’assurée fait grief à la cour cantonale d’avoir nié la nécessité de l’assistance gratuite d’un conseil juridique pour la procédure administrative, au sens de l’art. 37 al. 4 LPGA. A cet égard, elle invoque la perte de temps et les frais supplémentaires qui seraient occasionnés si elle devait consulter un tiers en lieu et place de l’avocat qui avait été désigné en procédure judiciaire de recours. En ce qui concerne sa capacité à s’orienter dans la procédure, elle allègue que la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois avait reconnu son droit à bénéficier d’une telle assistance dans le cadre du litige l’opposant au Centre social régional (CSR). Quant à la complexité de la procédure, elle relève notamment que le docteur B.__, médecin au Service médical régional de l’assurance-invalidité, avait indiqué qu’elle présente une atteinte à la santé complexe. Elle ajoute que les médecins de l’Hôpital C.__ avaient aussi fait état d’un syndrome douloureux chronique complexe, d’une histoire de douleurs complexes, et relevé une anamnèse très complexe.

Consid. 5.1
L’arrêt que la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois a rendu le 18.06.2021 dans le litige qui oppose l’assurée à la Direction générale de la cohésion sociale n’est d’aucun secours à l’assurée. En effet, dans cet arrêt, les conditions d’octroi de l’assistance judiciaire énoncées à l’art. 18 al. 2 de la loi vaudoise sur la procédure administrative du 28 octobre 2008 (RS-VD 173.36) ont été examinées à la lumière du droit à l’assistance judiciaire au sens de l’art. 29 al. 3 Cst. Elles correspondent donc à celles qui sont prévues à l’art. 61 let. f LPGA et non à celles, plus strictes, dont il est question en l’espèce à l’art. 37 al. 4 LPGA.

Consid. 5.2
En ce qui concerne le critère de la complexité juridique de l’affaire, l’assurée ne met en évidence aucun élément susceptible d’établir la nécessité de l’assistance d’un avocat. En effet, comme les juges cantonaux l’ont admis à juste titre, le litige porte sur l’évaluation de la capacité de travail et sur le droit à une rente d’invalidité, soit sur des questions qui se posent communément dans de nombreuses procédures en matière d’assurance-invalidité et qui ne comportent en principe pas de difficulté particulière. A cet égard, l’assurée se prévaut de la complexité de sa situation. S’il est vrai que, sous l’angle médical, les médecins ont indiqué que l’anamnèse et l’atteinte à la santé étaient complexes, cela ne nécessite pas d’emblée l’assistance d’un avocat d’office. En effet, il incombe en premier lieu à l’administration de prendre d’office les mesures d’instruction nécessaires (cf. art. 43 LPGA), singulièrement de recueillir un avis médical circonstancié permettant aux parties de comprendre une situation médicale (en particulier lorsqu’elle est qualifiée de complexe) et à l’office AI de statuer en connaissance de cause. Certes, à la suite de l’intervention du conseil de l’assurée, la cause a été renvoyée à l’office AI pour un complément d’instruction d’ordre médical. Il ne s’agit toutefois pas d’une expertise pluridisciplinaire susceptible, le cas échéant, de soulever des difficultés d’appréciation. En soi, une mesure d’instruction sous l’angle médical n’implique pas que l’assistance prévue à l’art. 37 al. 4 LGPA doive être accordée systématiquement en cas de renvoi; admettre un automatisme à cet égard reviendrait à renoncer à tout examen de la nécessité. De plus, l’assurée ne conteste pas les constatations de la juridiction cantonale selon lesquelles elle a été en mesure de gérer de manière autonome la plupart des questions administratives liées à ses demandes de prestations et de présenter ses arguments.

Consid. 5.3
Dans ces circonstances, la nécessité de l’assistance d’un avocat pour la procédure administrative n’est pas établie. Le recours est dès lors infondé.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée. L’assistance judiciaire a été accordée.

 

 

Arrêt 9C_375/2021 consultable ici

 

9C_422/2021 (f) du 23.03.2022 – Prestations complémentaires – Dessaisissement de fortune – 17 OPC-AVS/AI (dans sa teneur jusqu’au 31.12.2020) / Détermination de la part de l’assurée sur les immeubles cédé aux enfants

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_422/2021 (f) du 23.03.2022

 

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Prestations complémentaires – Dessaisissement de fortune – 17 OPC-AVS/AI (dans sa teneur jusqu’au 31.12.2020)

Détermination de la part de l’assurée sur les immeubles cédé aux enfants

 

Assurée, née en 1938, a présenté une demande de prestations complémentaires à sa rente AVS, en novembre 2018. Par décisions du 01.03.2019, la caisse de compensation (ci-après: la caisse) a rejeté la demande. En bref, elle a considéré que pour la période courant dès le 01.11.2018, les revenus déterminants étaient supérieurs aux dépenses reconnues, en prenant notamment en considération que l’assurée s’était dessaisie sans contrepartie de biens immobiliers au profit de ses deux fils.

Le 26.09.2019, la caisse a rejeté l’opposition de l’assurée. Dans ses calculs, elle a fixé respectivement à 117’260 fr. (pour 2018) et 107’260 fr. (pour 2019) les montants de la fortune dessaisie, après déduction des dettes hypothécaires, en fonction des informations données par la commission de taxation de la commune, qui avait estimé la valeur des biens cédés en mars et septembre 2007 à 323’120 fr. et 433’400 fr. Selon la caisse, les immeubles cédés constituaient des acquêts, de sorte que la part de dessaisissement de l’assurée correspondait à la moitié de la valeur des biens.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 14.07.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.2
Il y a dessaisissement lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (ATF 140 V 267 consid. 2.2; 134 I 65 consid. 3.2; 131 V 329 consid. 4.4). Aux termes de l’art. 17 OPC-AVS/AI (RS 831.301), dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31.12.2020, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque des immeubles ne servent pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (al. 4).

Consid. 4.1
L’assurée ne conteste pas les constatations de la juridiction cantonale selon lesquelles feu son époux était inscrit au registre foncier comme propriétaire des deux parcelles objets des libéralités et qu’elle avait cédé sa part dans l’hoirie de son conjoint à ses deux fils, singulièrement à B.__ selon l’acte notarié du 03.03.1997 et à D.__ selon l’acte notarié du 05.09.2007. Elle ne s’en prend pas non plus aux considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles pour déterminer le montant de la fortune nette dont elle s’était dessaisie, il convenait de fixer non seulement la quote-part découlant de sa participation à l’hoirie, mais également sa participation à la liquidation du régime matrimonial, laquelle précédait celle de la succession. L’assurée s’en prend uniquement à la quotité de la part sur les biens cédés à ses fils, que la juridiction cantonale a fixée à deux tiers au lieu de la moitié retenue par la caisse. Elle se limite cependant à contester la modification de la répartition effectuée par le Tribunal cantonal et retenir dans ses propres calculs la « répartition validée par la caisse (…), soit 1/2 », sans faire valoir d’élément concret à l’encontre du raisonnement de la juridiction cantonale.

Toutefois, les considérations cantonales, fondées sur les règles du code civil relatives à la liquidation du régime matrimonial en vigueur jusqu’au 31.121987 (soit avant l’entrée en vigueur de la modification du Code civil suisse du 05.10.1984 [Effets généraux du mariage, régime matrimonial et successions; RO 1986 122]), en fonction de la date du décès de l’époux de l’assurée (en 1984), ainsi que sur les règles sur le partage successoral (dont en particulier l’art. 462 ch. 1 CC), reposent sur une application erronée du droit. Les premiers juges ont d’abord correctement tenu compte des (anciennes) règles sur l’union des biens, applicables à défaut de contrat de mariage ou de situation soumise au régime matrimonial extraordinaire (art. 178 aCC, en relation avec l’art. 9a al. 2 des dispositions transitoires du CC). Conformément aux art. 213 et 214 al. 1 aCC, au décès du mari, le bénéfice restant après le prélèvement de ses apports par la femme appartient pour un tiers à celle-ci ou à ses descendants et, pour le surplus, au mari ou à ses héritiers. En revanche, la juridiction cantonale a perdu de vue que selon l’art. 462 al. 1 aCC, qui a été modifié au 01.01.1988 (RO 1986 122, p. 143), le conjoint survivant peut réclamer à son choix, si le défunt laisse des descendants, l’usufruit de la moitié ou la propriété du quart de la succession. La part de l’assurée à la succession de son époux s’élevait dès lors à un quart au décès de celui-ci, moment de l’ouverture de la succession (art. 537 al. 1 CC; cf. STEINAUER, Le droit des successions, 2e éd. 2015, N 62, 104 et 852 ss). La part de l’assurée sur les immeubles cédés à ses fils s’élevait dès lors à 1/2 (1/3 [résultant de la dissolution du régime matrimonial] + [1/4 x 2/3 résultant du partage de la succession]). Par conséquent, c’est bien la quotité d’une demie prise en considération par la caisse qui se révèle conforme au droit. Ce résultat ne modifie cependant pas l’issue de la cause, comme il ressort des considérations suivantes.

Consid. 4.3
L’assurée invoque finalement en vain une violation de l’art. 17c OPC-AVS/AI, selon lequel le montant du dessaisissement en cas d’aliénation correspond à la différence entre la valeur de la prestation et la valeur de la contre-prestation. Cette disposition est entrée en vigueur au 01.01.2021 (RO 2020 599) et n’est par conséquent pas applicable en l’occurrence. Au demeurant, contrairement à ce que soutient l’assurée, les dettes hypothécaires « en vigueur en mars 1997 » ne constituent pas une contre-prestation au sens de la règle d’exécution.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_422/2021 consultable ici

 

La réadaptation prime la rente, version 2.0

La réadaptation prime la rente, version 2.0

 

Article de Fernanda Benz paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

 

Depuis 2008, l’assurance-invalidité (AI) renforce le principe selon lequel « la réadaptation prime la rente ». C’est également l’orientation adoptée par le Développement continu de l’AI, en particulier pour les jeunes et les personnes atteintes dans leur santé psychique.

Depuis 2008, le Parlement et le Conseil fédéral orientent davantage l’AI, par des révisions de la loi, vers le principe selon lequel la réadaptation prime la rente. Différentes évaluations révèlent que ces révisions ont eu des effets mesurables, mais qu’elles présentent également des lacunes. Les principaux domaines dans lesquels on constate un besoin d’amélioration sont la réadaptation des jeunes assurés et des adultes atteints dans leur santé psychique ainsi que la collaboration entre les différents acteurs impliqués (voir notamment Schmidlin/Borer 2017, Baer et al. 2015, Guggisberg et al. 2015). Le Développement continu de l’AI (DC AI) répond à ce besoin en renforçant la gestion des cas, les conseils et le suivi ainsi qu’en optimisant l’éventail de mesures de réadaptation proposées aux jeunes et aux personnes souffrant de troubles psychiques.

 

Gestion des cas

Par gestion des cas (art. 41a RAI), on entend le cadre qui relie et coordonne toutes les mesures et tous les acteurs impliqués. Depuis le 1er janvier 2022, les offices AI fournissent aux assurés un accompagnement continu tout au long de la procédure AI, soit depuis le dépôt de la demande jusqu’à trois ans au plus après la (nouvelle) réadaptation. Cela signifie que, dans certains cas, la gestion des cas commence dès l’octroi de mesures médicales aux enfants atteints d’infirmités congénitales. Indépendamment de sa date de départ, la gestion des cas par les offices AI est toujours fondée sur le principe du case management. La coordination entre employeurs, médecins et spécialistes de la formation y joue un rôle essentiel. La gestion des cas se concentre également sur les transitions, par exemple de l’école à la formation professionnelle ou de la rente à la réadaptation.

Afin d’accompagner de manière encore plus soutenue dans leur réadaptation professionnelle les jeunes et les personnes atteintes dans leur santé psychique, un système de conseils et de suivi (art. 14quater LAI) a été introduit dans le cadre du DC AI, permettant ainsi aux offices AI de renforcer leur gestion des cas. Si un suivi plus intensif s’avère temporairement nécessaire pour résoudre un problème spécifique, l’office AI peut déléguer cette tâche à un prestataire spécialisé (par ex. coach spécialisé dans un trouble donné). Les conseils et le suivi permettent à l’AI de mieux répondre aux besoins des personnes concernées.

Enfin, l’inscription dans la loi des conseils axés sur la réadaptation (art. 3a LAI) a pour objectif d’informer mieux et plus simplement les employeurs et les spécialistes de la formation concernant les possibilités de réadaptation qu’offre l’AI. Comme l’a confirmé une enquête récente (Buess/Vogel 2022), les petites et moyennes entreprises en particulier sont encore trop peu informées et n’ont pas assez de contacts avec l’AI. Or, les conseils axés sur la réadaptation sont fournis à simple titre d’information ; ils ne nécessitent pas de déposer une demande et ne doivent pas être liés à un cas spécifique.

 

Adolescents et jeunes adultes

Les transitions de l’école à la formation professionnelle et de la formation au marché du travail posent souvent des défis particuliers aux jeunes atteints dans leur santé. C’est pourquoi l’AI soutient, grâce à de nouveaux outils, les adolescents et les jeunes adultes de 13 à 25 ans qui présentent un risque d’invalidité et n’ont pas ou peu d’expérience professionnelle.

Détection et intervention précoces : les spécialistes s’accordent à dire que, chez les jeunes, les troubles psychiques devraient être identifiés et traités le plus tôt possible. Dans de nombreux cantons, il existe des services de coordination qui soutiennent les adolescents et les jeunes adultes rencontrant des problèmes lors de leur entrée dans la vie professionnelle. Depuis le 1er janvier 2022, ces services peuvent directement signaler à l’office AI les jeunes de 13 à 25 ans dans le cadre de la détection précoce (art. 3abis LAI). L’AI peut ainsi entrer plus rapidement en contact avec les personnes concernées et entreprendre les démarches nécessaires à une réadaptation professionnelle réussie. Grâce à la nouvelle possibilité de cofinancement par l’AI (art. 68bis LAI), ces services cantonaux disposent désormais de ressources en personnel plus importantes pour la détection précoce. Lorsqu’une demande à l’AI a été déposée, cette dernière doit octroyer rapidement et simplement des mesures d’intervention précoce (art. 7d LAI) afin d’éviter les interruptions de formations ou d’offres transitoires cantonales. Durant l’école obligatoire, les offices AI soutiennent les jeunes présentant un risque d’invalidité en leur proposant une orientation professionnelle spécialisée ou en les aidant à trouver une place d’apprentissage ; la formation elle-même reste du ressort du canton.

Mesures préparatoires : une partie des jeunes atteints dans leur santé ne remplissent pas encore les conditions nécessaires pour entamer une formation professionnelle initiale. À la fin de l’école obligatoire, ils peuvent donc se voir octroyer différentes mesures préparatoires en fonction de leurs besoins :

  • Les mesures de réinsertion (art. 14a LAI) visent à stabiliser la personnalité du jeune, à renforcer sa capacité de présence et de performance et à le réaccoutumer au travail quotidien.
  • Les mesures préparatoires d’orientation professionnelle (art. 15 LAI) permettent aux jeunes concernés d’essayer différentes professions concrètes dans la pratique. Ainsi, ils se familiarisent avec les exigences du métier choisi et du marché primaire du travail dans son ensemble.
  • Dans le cadre des offres transitoires cantonales spécialisées (art. 68bis LAI), les offres existantes sont cofinancées par l’AI et rendues ainsi plus accessibles aux jeunes atteints dans leur santé.
  • Lorsqu’un jeune a choisi une profession, mais qu’il n’est pas encore en mesure de commencer sa formation, la préparation ciblée (art. 16 LAI) lui permet d’acquérir les compétences manquantes.

Formation professionnelle initiale : La formation professionnelle initiale sur le marché primaire du travail constitue un élément central de la réadaptation des jeunes (art. 16 LAI). Dans toute la mesure du possible, l’office AI et le jeune concerné recherchent une place de formation professionnelle ordinaire dans une entreprise du marché primaire du travail. Si la formation n’est possible que dans un cadre protégé dans un premier temps, l’office AI peut octroyer par la suite une autre formation de niveau plus élevé sur le marché primaire du travail, pour autant que l’assuré en ait la capacité. Cette mesure vise à éviter que des jeunes ne se retrouvent dans une formation de niveau trop élevé qu’ils ne parviennent à suivre qu’avec un soutien intensif.

Par ailleurs, l’indemnité journalière de l’AI est désormais versée à l’employeur dès le début de la formation et, pour les formations au sens de la loi sur la formation professionnelle, à hauteur du salaire usuel que touchent les personnes en formation. L’employeur verse ensuite le salaire à son employé. Ainsi, les jeunes assurés sont traités sur un pied d’égalité avec leurs collègues en bonne santé. Pour les formations préparant à un travail auxiliaire ou à une activité en cadre protégé (dites formations pratiques), l’AI verse un montant prédéfini. Ces mesures de soutien doivent inciter les entreprises à former plus de jeunes atteints dans leur santé.

 

Adultes atteints dans leur santé psychique

Les maladies psychiques sont la cause la plus fréquente d’octroi d’une rente AI. Le nombre de personnes qui perdent leur capacité de gain en raison d’une telle affection reste élevé. Pour faire face à cette évolution, le DC AI a mis en place différents outils.

Les conseils axés sur la réadaptation mentionnés plus haut facilitent l’accès aux informations non seulement pour les personnes concernées, mais aussi pour leurs employeurs. De plus, grâce à la détection précoce, ces derniers peuvent annoncer plus rapidement à l’office AI les collaborateurs potentiellement atteints dans leur santé psychique ; la condition des 30 jours d’incapacité de travail en vigueur jusqu’ici a été supprimée. Ainsi, les entreprises et les assurés reçoivent un soutien avant d’en arriver à un arrêt de travail. Après le dépôt d’une demande, la gestion des cas ainsi que les conseils et le suivi permettent aux offices AI d’accompagner les assurés et leurs employeurs de façon plus soutenue, avec une meilleure continuité et à plus long terme.

Les mesures de réinsertion (art. 14a LAI) aident les assurés à retrouver leur capacité de travail restante. Étant donné que les maladies psychiques peuvent réapparaître plus tard dans la vie professionnelle, la loi révisée permet d’octroyer ces mesures à plusieurs reprises. Comme le confirment de récentes études, la réadaptation professionnelle a plus de chances de réussir lorsqu’une partie des mesures de réinsertion est effectuée sur le marché primaire du travail (Schmidlin et al. 2020). C’est pourquoi, depuis le 1er janvier 2022, celles-ci sont davantage orientées vers ce marché, prenant par exemple la forme d’un entraînement au travail.

Enfin, l’éventail de mesures de réadaptation professionnelle de l’AI a été complété par la location de services (art. 18abis LAI). Dans ce cadre, l’assuré est employé par un bailleur de services, par l’intermédiaire duquel il travaille dans une entreprise du marché primaire de l’emploi. L’AI indemnise le bailleur de services pour ses prestations, telles que la recherche d’un poste et le placement de l’assuré ou encore la gestion et le suivi administratifs des missions effectuées. Cela permet à l’employeur de faire connaissance avec un nouveau collaborateur potentiel sans engagement ni charge administrative. L’assuré, quant à lui, a la possibilité d’exercer une activité lucrative sur le marché primaire du travail, accroît ses chances de trouver un emploi et acquiert de l’expérience professionnelle.

 

La réadaptation prime la rente, version 2.0

Le DC AI améliore le travail déjà effectué par l’AI en matière de réadaptation. Avant le dépôt d’une demande, les conseils axés sur la réadaptation et la détection précoce font partie intégrante de la réadaptation 2.0. Après l’inscription à l’Al, ces mesures font place aux mesures de réadaptation optimisées et à la gestion des cas, qui inclut également des conseils et un suivi. Les mesures de réadaptation comprennent la préparation, la formation et le placement. Elles sont classées en fonction de leur rapprochement de l’entrée sur le marché primaire du travail (axe horizontal) et de leurs exigences vis-à-vis de la capacité de travail de l’assuré (axe vertical). La gestion des cas ainsi que les conseils et le suivi garantissent un accompagnement continu dès le dépôt de la demande.

Toutefois, l’optimisation des mesures ne suffit pas à assurer le succès de la réadaptation professionnelle. Celui-ci requiert également l’engagement des entreprises du marché primaire du travail ainsi que la collaboration des médecins et de tous les autres acteurs impliqués.

 

En un coup d’œil

  • Le Développement continu de l’AI optimise et complète les mesures de réadaptation professionnelle existantes de l’AI.
  • Désormais explicitement ancrée dans l’ordonnance, la gestion des cas par les offices AI gagne ainsi en importance, en continuité et en coordination.
  • La détection précoce, la préparation au marché primaire du travail et l’orientation vers ce dernier permettent quant à elles d’optimiser la réadaptation professionnelle des adolescents et des jeunes adultes atteints dans leur santé.
  • Enfin, grâce à l’intensification des conseils et du suivi, à la création de nouvelles mesures et à la flexibilisation des mesures existantes, les adultes souffrant de troubles psychiques bénéficient désormais d’un soutien plus ciblé.

 

Article de Fernanda Benz paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

«Eingliederung vor Rente 2.0» hier verfügbar

 

Assurance-accidents pour les personnes participant à des mesures de l’AI

Assurance-accidents pour les personnes participant à des mesures de l’AI

 

Article de Maya Umher paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

 

Depuis l’entrée entrée en vigueur du Développement continu de l’AI le 1er janvier 2022, la loi fédérale sur l’assurance-accidents comprend une quatrième branche d’assurance : l’assurance-accidents pour les personnes qui participent à des mesures de l’assurance-invalidité (AA AI).

Dans le cadre de la réforme « Développement continu de l’AI » (DC AI), une nouvelle couverture d’assurance-accidents a été introduite, l’AA AI, à l’intention des personnes qui travaillent dans le cadre des mesures de l’AI et dont la situation est, de ce fait, « analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail ». Cette adaptation doit permettre d’atteindre un double objectif : il s’agit, d’une part, de renforcer la sécurité juridique. Cela concerne avant tout les assurés en cours de réadaptation professionnelle et les prestataires de ces mesures. D’autre part, cette modification vise à promouvoir la réadaptation, en encourageant les employeurs à s’engager en faveur de la réinsertion des assurés sur le marché du travail.

Les bases légales de l’AA AI se trouvent dans la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (art. 11 LAI) et dans la loi fédérale sur l’assurance-accidents (art. 1a al. 1 let. c LAA), ainsi que dans les ordonnances correspondantes. Le cercle des assurés défini par la loi est composé de personnes qui participent à des mesures de l’assurance-invalidité dans un établissement ou un atelier au sens de l’art. 27 al. 1 LAI ou dans une entreprise, dès lors que leur situation est analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail.

Mais que faut-il entendre par « situation analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail » ? Cette notion trouve son origine dans la jurisprudence : lorsqu’une personne, dans un but lucratif ou de formation et sans devoir supporter de risque économique propre, exécute durablement ou provisoirement un travail pour un employeur auquel elle est plus ou moins subordonnée (cf. ATF 115 V 55), sa situation est réputée analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail.

 

Couverture d’assurance-accidents dans le cadre des mesures de réadaptation

En appliquant la condition énoncée précédemment, à savoir que la situation doit être « analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail », la pratique montre que la plupart des mesures de l’AI exécutées sans contrat de travail, d’apprentissage ou de formation remplissent les critères définis. Cela signifie que les assurés qui participent à ces mesures disposent d’une couverture d’assurance-accidents AA AI auprès de la SUVA.

Les mesures impliquant un contrat de travail, d’apprentissage ou de formation, ainsi que les mesures qui n’établissent pas de situation analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail sont exclues de la couverture AA AI. Les assurés qui participent à ce type de mesures restent assurés contre le risque d’accident par l’employeur, c’est-à-dire auprès de l’assureur-accidents de ce dernier. Dans certains cas, il peut arriver que la mesure n’établisse pas une situation analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail. L’assuré doit alors contracter une couverture d’assurance-accidents auprès de son assureur-maladie.

Lorsqu’il octroie une mesure, l’office AI compétent examine au cas par cas si les critères pour une couverture AA AI sont remplis, et informe l’assuré par écrit de son niveau de couverture en cas d’accident. Lors de l’examen préalable de la couverture AA AI, l’office AI se fonde sur un schéma décisionnel. La SUVA suit l’avis de l’office AI. Ce schéma décisionnel a été élaboré conjointement par la SUVA et l’OFAS et peut être consulté dans le «guide AA AI».

 

Collaboration entre la SUVA et les offices AI

Que se passe-t-il concrètement si un assuré est victime d’un accident durant l’accomplissement d’une mesure avec couverture AA AI ? Afin que le cas puisse être traité le plus efficacement possible et que les prestations d’assurance soient versées à temps, il est essentiel que l’assuré informe l’office AI le plus rapidement possible de l’accident. L’office AI transmet à son tour immédiatement la déclaration de l’accident à la SUVA avec toutes les informations nécessaires. Il avise également tous les acteurs concernés de l’accident (prestataire de la mesure et caisse de compensation compétente, entre autres). La SUVA examine le droit aux prestations et informe ensuite l’assuré et l’office AI du résultat de l’examen.

En principe, un assuré qui est victime d’un accident a droit aux prestations régulières de l’AA dans le cadre de l’AA AI. Ces prestations comprennent entre autres des indemnités journalières, des rentes, des indemnités pour atteinte à l’intégrité et un traitement curatif. Lors du calcul de l’indemnité journalière de l’AA ainsi que pour déterminer le gain assuré, les différentes constellations de réadaptations doivent être prises en compte. Le montant de l’indemnité journalière de l’AA est par exemple calculé de manière différente selon que l’assuré touche une rente AI, une indemnité journalière de l’AI ou aucune indemnité journalière de l’AI dans le cadre de la mesure.

En cas d’incapacité de travail prolongée de l’assuré ayant été victime d’un accident, l’office AI poursuit son accompagnement dans le cadre de la gestion de cas, tandis que la SUVA est responsable de toutes les démarches liées à l’accident. Afin de pouvoir reprendre la mesure de réadaptation de l’AI après un accident, l’échange et la coordination réciproques sont indispensables. Tout au long de cette procédure, l’intérêt de l’assuré et sa réadaptation priment.

 

En un coup d’œil

  • Les personnes qui participent à des mesures de l’AI et dont la « situation est analogue à celle qui résulterait d’un contrat de travail » sont désormais couvertes par l’assurance-accidents, AA AI.
  • La SUVA et les offices AI collaborent étroitement, aussi bien pour la déclaration de l’accident que pour la reprise de la mesure.
  • Même en cas d’incapacité de travail prolongée, l’office AI se charge de l’accompagnement de l’assuré dans le cadre de la gestion de cas, tandis que la SUVA est responsable de toutes les démarches liées à l’accident.
  • Cette nouvelle branche d’assurance renforce la sécurité juridique tant pour les assurés que pour les prestataires de mesures d’ordre professionnel. Elle encourage également la disposition des employeurs à œuvrer en faveur de l’intégration.

 

 

Article de Maya Umher paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

Unfallversicherung von Personen in Massnahmen der Invalidenversicherung, hier verfügbar

 

Nouveautés concernant les expertises médicales dans les assurances sociales

Nouveautés concernant les expertises médicales dans les assurances sociales

 

Article de Ralf Kocher paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

 

Ces dernières années, les expertises médicales ont pris une importance considérable dans la procédure d’instruction de l’AI. Le Développement de l’AI apporte plusieurs nouveautés concernant la procédure et les expertises médicales, qui sont souvent nécessaires pour déterminer si une personne a droit à des prestations.

 

Clarifier les questions en suspens

Le rôle des expertises médicales dans la procédure d’instruction de l’AI a pris une importance considérable ces dernières années. Des questions de procédure de plus en plus nombreuses ont été soulevées à l’occasion de recours, ce qui a conduit le Tribunal fédéral à rendre deux arrêts de principe (ATF 137 V 210 et 139 V 349).

Certaines questions pratiques importantes restaient malgré tout sans réponse. C’est pourquoi le Conseil fédéral a proposé, dans son message concernant le Développement continu de l’AI (FF 2017 2363), quelques adaptations dans le domaine du droit de procédure et des expertises médicales.

 

Débats au Parlement

En ce qui concerne le domaine du droit de procédure, le Parlement a suivi la demande du Conseil fédéral de renforcer la procédure d’instruction menée d’office. Des compétences claires concernant l’attribution des mandats d’expertise et des délais légaux ont par conséquent été introduits dans la procédure. Cependant, le Parlement voulait aussi améliorer la transparence dans l’attribution et la réalisation des expertises. Il a donc inscrit dans la loi que les entretiens entre l’assuré et l’expert doivent faire l’objet d’enregistrements sonores, lesquels sont conservés dans le dossier de l’assureur. De leur côté, les offices AI doivent tenir à jour et publier une liste contenant des indications sur tous les experts et centres d’expertises mandatés. Les exigences professionnelles pour les experts médicaux sont définies au niveau de l’ordonnance, et le Parlement a créé la base légale pour la mise en place d’une commission extraparlementaire chargée de veiller à la qualité des expertises médicales et d’émettre des recommandations publiques.

 

Mise en place des expertises

La procédure d’instruction menée d’office doit garantir un traitement aussi simple et rapide que possible des procédures en matière d’assurances sociales. À l’occasion du Développement continu de l’AI, les droits de participation des assurés ainsi que le rôle et les compétences des organes d’exécution ont été inscrits dans la loi pour toutes les assurances sociales. Il a ainsi été précisé que l’assureur détermine la nature et l’étendue de l’instruction nécessaire et qu’il définit le type d’expertise externe devant être sollicité (expertises monodisciplinaires, bidisciplinaires ou pluridisciplinaires, c’est-à-dire faisant appel à trois disciplines médicales ou plus). Pour les expertises monodisciplinaires et bidisciplinaires, il est de la responsabilité et de la compétence de l’assureur de déterminer à titre définitif les disciplines médicales. Pour les expertises complexes et pluridisciplinaires, c’est le centre d’expertises qui détermine les disciplines médicales.

L’assureur doit communiquer à l’assuré le nom des experts prévus. Le législateur a prévu un délai légal de dix jours pendant lequel l’assuré peut récuser un expert ou poser des questions complémentaires par écrit. L’assureur décide en dernier ressort de transmettre ou non ces questions aux experts.

 

Exigences professionnelles applicables aux experts

Afin de garantir la qualité des expertises, le Parlement a chargé le Conseil fédéral d’édicter des critères pour l’admission des experts médicaux et des experts en neuropsychologie. En ce qui concerne les compétences professionnelles, les experts doivent disposer d’un titre de médecin spécialiste, être inscrits au registre des professions médicales (MedReg), posséder une autorisation de pratiquer valable et disposer d’au moins cinq ans d’expérience clinique. Dans le domaine de la médecine des assurances, la certification de l’association Médecine d’assurance suisse (SIM) est nécessaire pour les disciplines les plus demandées.

Il est possible de déroger à ces exigences dans des situations objectivement justifiées. Le Conseil fédéral a prévu cette exception pour les médecins-chefs et les chefs de service des hôpitaux universitaires.

Les données du MedReg sont accessibles sur Internet ce qui permet de porter ces informations à la connaissance du public. Les assurés ont ainsi la garantie de pouvoir vérifier facilement et rapidement que les experts possèdent la formation universitaire, postgrade et continue nécessaire. Il est également facile de vérifier la certification SIM sur Internet.

Il peut arriver qu’une expertise soit nécessaire dans une discipline médicale qui n’est que très rarement demandée (par ex. en cas de maladie rare, d’expert à l’étranger). Dans un tel cas, il doit être possible de mandater un expert qui, bien que compétent dans sa discipline, ne remplit pas forcément toutes les conditions requises par l’ordonnance. Dans l’esprit d’une expertise consensuelle, l’assuré doit alors donner son consentement à une telle procédure.

Les experts neuropsychologues doivent remplir les exigences définies à l’art. 50b OAMal, mais aucune autre condition n’est requise.

 

Améliorer la transparence lors du choix des experts

Afin d’assurer la plus grande transparence possible lors de l’attribution des mandats d’expertise, le législateur oblige les organes d’exécution de l’AI à tenir une liste publique comprenant les informations suivantes :

  • informations concernant tous les experts et centres d’expertises mandatés, classés par domaine de spécialisation ;
  • nombre annuel de cas ayant fait l’objet d’une expertise ;
  • rémunération globale pour les expertises demandées ;
  • incapacités de travail attestées dans l’activité habituelle et dans une activité adaptée ;
  • force probante des expertises devant les tribunaux concernés.

Comme les centres d’expertises et les experts réalisent des mandats pour plusieurs offices AI, l’OFAS publiera une vue d’ensemble pour toute la Suisse, dans un souci de transparence totale. Les données seront saisies du 1er janvier au 31 décembre et publiées par les offices AI le 1er mars de l’année suivante.

 

Choix des experts

Les assureurs sont en principe libres de choisir la façon dont ils attribuent les mandats aux experts ou aux centres d’expertises. Cela signifie qu’ils peuvent choisir directement les experts et attribuer les mandats de gré à gré. Le Conseil fédéral peut néanmoins édicter des règles sur le mode d’attribution des expertises pour certaines assurances sociales.

Or, il apparaît que l’attribution aléatoire des mandats d’expertise, conjointement avec les autres prescriptions visées à l’ATF 137 V 210 (consid. 2.4, 237), apaise généralement les craintes concernant le manque d’indépendance et d’impartialité qui découlent des conditions générales des expertises. C’est pourquoi, depuis 2012, les mandats d’expertises pluridisciplinaires de l’AI sont répartis de manière aléatoire entre les quelque 30 centres d’expertises accrédités.

Pour le Conseil fédéral, la nécessité de réglementer le mode d’attribution des expertises ne s’impose actuellement que dans l’AI. Selon la complexité des questions médicales en suspens, l’AI a besoin d’une expertise impliquant deux disciplines médicales. Ces expertises bidisciplinaires imposent aux experts des exigences plus élevées que les expertises monodisciplinaires, car les deux expertises partielles doivent être fusionnées en vue de former une évaluation globale et consensuelle des conséquences de l’atteinte à la santé. De plus, comme pour les expertises pluridisciplinaires, seul un nombre limité d’experts est disponible pour ces mandats. C’est pourquoi, à l’instar des expertises pluridisciplinaires, ces expertises sont désormais attribuées dans l’AI de manière aléatoire et uniquement à des centres d’expertises ou à des équipes d’experts fixes ayant conclu une convention tarifaire avec l’AI. Cela garantit que l’attribution des mandats d’expertises bi- et pluridisciplinaires se fera uniformément de manière aléatoire et que les offices AI n’auront plus d’influence directe sur le choix des experts.

Lors d’une attribution de gré à gré d’un mandat d’expertise médicale, l’assureur désigne les experts nécessaires. L’assuré peut faire valoir des motifs de récusation ou d’autres objections à leur encontre. Lorsque de telles objections sont formulées, l’assureur doit les examiner et, dans la mesure du possible, parvenir à un consensus sur la désignation des experts dans le cadre d’une procédure de conciliation. Cette dernière peut se faire oralement ou par écrit et doit être consignée dans le dossier. Dans l’AI, une telle procédure n’est appliquée qu’en cas d’expertise monodisciplinaire.

La procédure présentée, combinée aux autres mesures prévues par la loi, notamment la liste des experts publiée par les offices AI et les exigences professionnelles minimales, permettra un choix plus transparent et plus compréhensible des experts (voir à ce sujet « Evaluation der medizinischen Begutachtung in der Invalidenversicherung », rapport d’experts du 10 août 2020 sur mandat du Département fédéral de l’intérieur (DFI).

 

Enregistrement sonore de l’entretien

Le législateur exige que les entretiens entre l’assuré et l’expert fassent l’objet d’enregistrements sonores. Dans le contexte de l’introduction de cette mesure, la citation suivante, tirée des débats au Parlement, est intéressante, car elle donne des indications sur ses motivations : « Aujourd’hui, la question de savoir ce qui a exactement été dit lors de l’expertise donne souvent lieu à des litiges juridiques de longue durée. L’enregistrement des entretiens tel que nous le proposons apporte de la clarté en la matière et protège les deux parties. Cette mesure n’est donc pas seulement dans l’intérêt de l’assuré – qui est ainsi protégé si des indications figurant dans l’expertise sont ou lui semblent être erronées –, mais aussi dans celui des experts. » (CE Bruderer Wyss, session d’automne 2019).

Le terme « entretien » est introduit dans la loi, mais n’y est pas défini. C’est pourquoi l’ordonnance précise qu’il inclut l’anamnèse et la description, par l’assuré, de l’atteinte à sa santé (ces deux termes se réfèrent à la structure déjà utilisée pour les expertises médicales dans l’AI). Les explications et déclarations personnelles de l’assuré sont placées au premier plan. L’enregistrement sonore doit garantir que les déclarations de l’assuré sont saisies correctement et reprises avec exactitude dans le rapport de l’expert.

L’assureur informe l’assuré qu’un enregistrement sera réalisé et dans quel but et qu’il a la possibilité d’y renoncer. Si l’assuré souhaite renoncer à l’enregistrement sonore de l’entretien, il doit le confirmer par écrit à l’assureur. La décision ne peut être communiquée qu’à l’assureur, ce qui évite que l’assuré se sente influencé dans son choix par l’expert.

Afin de respecter le devoir de diligence accru dans le traitement de ces données sensibles, l’enregistrement sonore ne peut être écouté que sur demande de l’assuré dans le cadre de la procédure administrative, de la procédure d’opposition, de la procédure de préavis, de la révision et de la reconsidération, de la procédure de recours cantonale et de la procédure devant le Tribunal fédéral. Il est ainsi garanti que l’enregistrement ne sera écouté qu’en cas de litige et uniquement par l’assuré lui-même, par l’assureur ayant mandaté l’expertise et par les tribunaux (tribunaux cantonaux des assurances sociales, Tribunal administratif fédéral, Tribunal fédéral) impliqués dans la procédure de recours. Les tiers disposant d’un droit de recours ne doivent pas pouvoir écouter l’enregistrement sonore. En cas de demande de consultation du dossier, l’enregistrement sonore ne doit pas être joint à l’envoi, même si la demande émane d’un autre assureur. Si l’expertise n’est pas contestée, les enregistrements sonores ne sont pas utilisés et sont donc protégés contre toute écoute par des tiers.

 

Qualité des expertises

La Suisse ne disposait jusqu’à présent d’aucune institution indépendante en charge des questions de qualité et d’assurance qualité des expertises médico-assurantielles. Ni la réalisation de ces expertises ni leur évaluation n’étaient par conséquent soumises à des exigences et des prescriptions de qualité contraignantes.

Le Parlement a chargé le Conseil fédéral d’instituer une commission extraparlementaire consacrée à cette thématique. Cette commission se penchera sur des questions relatives à la médecine des assurances, aux expertises de manière générale et, bien sûr, à leur qualité. Elle se compose d’un président et de douze membres représentant les assurances sociales, les organisations de patients et de personnes en situation de handicap, les médecins, les centres d’expertises, les neuropsychologues et les milieux scientifiques. La commission a été officiellement instituée par le Conseil fédéral en novembre 2021. Le Pr Michael Liebrenz a été nommé comme son premier président.

La commission émettra des recommandations publiques dans les domaines suivants :

  • exigences et normes de qualité pour le processus d’expertise (qualité de la procédure) ;
  • critères relatifs à l’activité et à la formation universitaire, postgrade et continue des experts (qualité des structures) ;
  • critères relatifs à l’accréditation des centres d’expertises et à leur activité (qualité des structures) ;
  • critères et outils pour l’évaluation qualitative des expertises (contrôle de la qualité) ;
  • respect des critères par les experts et les centres d’expertises (contrôle de la qualité).

 

En un coup d’œil

  • Afin d’harmoniser la réglementation pour toutes les assurances sociales, les droits de participation des assurés et le rôle des organes d’exécution dans l’examen du droit aux prestations sont désormais inscrits dans la LPGA.
  • Étant donné que c’est surtout dans l’AI qu’une intervention était nécessaire, cette question a été traitée dans le cadre du Développement continu de l’AI.
  • Les mesures d’instruction et la procédure ayant trait aux expertises médicales ont notamment fait l’objet d’une réglementation uniforme.
  • Lors de l’attribution des mandats d’expertise, l’assurance et l’assuré doivent se mettre d’accord, dans la mesure du possible, sur le choix de l’expert. Le fait que les entretiens soient enregistrés permet de renforcer la transparence dans les expertises.
  • Afin d’évaluer et de garantir la qualité des expertises, une commission extraparlementaire indépendante a été mise en place.

 

Article de Ralf Kocher paru in Sécurité sociale CHSS, juin 2022, consultable ici

Neuerungen bei medizinischen Begutachtungen in den Sozialversicherungen hier verfügbar

 

Arrêt de la CJUE C-576/20 du 07.07.2022 – Les périodes d’éducation d’enfants accomplies dans d’autres États membres doivent être prises en compte pour le calcul de la pension de vieillesse

Arrêt de la CJUE C-576/20 du 07.07.2022

 

Communiqué de presse n° 119/22 de la Cour de justice de l’Union européenne du 07.07.2022 consultable ici

Arrêt de la CJUE du 07.07.2022 consultable ici

 

Sécurité sociale des travailleurs migrants – Rente de vieillesse – Règl. (CE) no 987/2009

Calcul – Prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies dans d’autres États membres

 

La Cour de justice confirme sa jurisprudence selon laquelle l’État membre débiteur de la pension dans lequel la bénéficiaire a exclusivement travaillé et cotisé, tant antérieurement que postérieurement au transfert de sa résidence dans un autre État membre où elle s’est consacrée à l’éducation de ses enfants, doit prendre en compte ces périodes d’éducation d’enfants.

En novembre 1987, après avoir exercé une activité non salariée en Autriche, CC s’est installée en Belgique où elle a donné naissance à deux enfants, respectivement le 5 décembre 1987 et le 23 février 1990. Dès la naissance de son premier enfant, elle s’est consacrée à leur éducation, sans exercer d’emploi, sans acquérir de période d’assurance et sans percevoir de prestations au titre de leur éducation. Il en a été de même en Hongrie où elle a séjourné en décembre 1991.

À son retour en Autriche en février 1993, CC a continué à éduquer ses enfants pendant treize mois, tout en étant obligatoirement affiliée et en cotisant auprès du régime de sécurité sociale autrichien. Elle a ensuite travaillé et cotisé dans cet État membre jusqu’à son départ à la retraite.

Après avoir sollicité l’octroi d’une pension de retraite, l’office des pensions autrichien lui a reconnu ce droit par décision du 29 décembre 2017. Les périodes d’éducation d’enfants effectuées en Autriche ont été assimilées à des périodes d’assurance et prises en compte aux fins de calcul du montant de sa pension. Celles accomplies en Belgique et en Hongrie, en revanche, n’ont pas été prises en compte.

CC a contesté cette décision en faisant valoir que les périodes d’éducation d’enfants accomplies dans d’autres États membres devaient être assimilées à des périodes d’assurance sur la base de l’article 21 TFUE, qui instaure le droit à la libre circulation des citoyens de l’Union, dès lors qu’elle travaillait et était affiliée à la sécurité sociale autrichienne avant et après ces périodes.

Après le rejet de son recours en appel, CC a introduit un recours en Revision devant l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche). Ayant des doutes concernant la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies dans d’autres États membres pour le calcul de la pension de vieillesse, cette juridiction a demandé à la Cour d’interpréter une disposition du droit dérivé de l’Union [1], applicable ratione temporis en l’espèce. En effet, il ne serait pas exclu que cette disposition prévoie de manière exclusive les conditions pour une telle prise en compte, et CC ne les remplit pas : à la date à laquelle la première période d’éducation d’enfants a commencé, elle n’exerçait pas d’activité salariée ou non salariée en Autriche.

Par son arrêt, la Cour rejette le caractère exclusif de cette disposition en ce qui concerne la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies par une même personne dans différents États membres et confirme que ces périodes doivent être prises en compte, en l’espèce, au titre de l’article 21 TFUE.

 

Appréciation de la Cour

En premier lieu, la Cour conclut que, au regard de son libellé, du contexte dans lequel il s’inscrit et des objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie, l’article 44 du règlement no 987/2009 doit être interprété en ce sens qu’il ne régit pas de manière exclusive la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies par une même personne dans différents États membres.

Concernant son libellé, la Cour relève que cette disposition n’indique pas qu’elle régit cette prise en compte de manière exclusive et que si ladite disposition constitue une codification de sa jurisprudence adoptée à cet égard [2], à la date de son entrée en vigueur – l’arrêt Reichel-Albert [3] n’avait pas encore été prononcé -, les enseignements issus de ce dernier arrêt ne pouvaient donc pas être pris en compte lors de l’adoption du règlement no 987/2009 aux fins de leur codification éventuelle.

En ce qui concerne le contexte dans lequel s’inscrit l’article 44 du règlement no 987/2009, la Cour, en se référant au titre et au chapitre de ce règlement dont il relève, précise que cette disposition instaure une règle additionnelle permettant d’augmenter la probabilité pour les personnes concernées d’obtenir une prise en compte complète de leurs périodes d’éducation d’enfants et, ainsi, d’éviter, dans toute la mesure du possible, que tel ne soit pas le cas.

En ce qui concerne l’objectif du règlement no 987/2009, l’interprétation selon laquelle l’article 44 de ce règlement régirait la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies dans différents États membres de manière exclusive reviendrait à permettre à l’État membre débiteur de la pension de vieillesse d’une personne, dans lequel celle-ci a exclusivement travaillé et cotisé tant antérieurement que postérieurement au transfert de sa résidence dans un autre État membre où elle s’est consacrée à l’éducation de ses enfants, de refuser la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies par cette personne dans un autre État membre et, partant, à la désavantager au seul motif qu’elle a exercé son droit à la libre circulation. Dès lors, une telle interprétation irait à l’encontre des objectifs poursuivis par ce règlement, en particulier la finalité de garantir le respect du principe de la libre circulation, consacré à l’article 21 TFUE, et risquerait ainsi de mettre en péril l’effet utile de l’article 44 de ce règlement.

En second lieu, la Cour juge que, afin d’assurer le respect de ce principe, les enseignements de l’arrêt Reichel-Albert sont transposables à une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle la personne concernée ne remplit pas la condition d’exercice d’une activité salariée ou non salariée imposée par cette dernière disposition pour obtenir, aux fins de l’octroi d’une pension de vieillesse, la prise en compte, par l’État membre débiteur de cette pension, des périodes d’éducation d’enfants qu’elle a accomplies dans d’autres États membres. Partant, cet État membre est tenu de prendre en compte ces périodes au titre de l’article 21 TFUE, dès lors que cette personne a exclusivement travaillé et cotisé dans ledit État membre, tant antérieurement que postérieurement au transfert de sa résidence dans un autre État membre où elle a effectué lesdites périodes.

Ainsi, la Cour constate qu’il existe, à l’instar de la situation en cause dans l’arrêt Reichel-Albert, un lien suffisant entre les périodes d’éducation d’enfants accomplies par CC à l’étranger et les périodes d’assurance accomplies du fait de l’exercice d’une activité professionnelle en Autriche. Dès lors, la législation de cet État membre doit s’appliquer aux fins de la prise en compte et de la validation de ces périodes, en vue de l’octroi d’une pension de vieillesse par ce même État membre.

Si CC n’avait pas quitté l’Autriche, ses périodes d’éducation d’enfants auraient été prises en compte aux fins du calcul de sa pension de vieillesse autrichienne. Partant, à l’instar de l’intéressée dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Reichel-Albert, elle est désavantagée au seul motif qu’elle a exercé son droit à la libre circulation, ce qui est contraire à l’article 21 TFUE.

 

 

[1] Il s’agit de l’article 44, paragraphe 2, du règlement (CE) no 987/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2009, L 284, p. 1). Cet article, intitulé « Prise en compte des périodes d’éducation d’enfants », prévoit dans son paragraphe 2, que lorsque, au titre de la législation de l’État membre compétent en vertu du titre II du règlement no 883/2004, les périodes d’éducation d’enfants ne sont pas prises en compte, l’institution de l’État membre dont la législation était, conformément au titre II du règlement no 883/2004, applicable à l’intéressé du fait de l’exercice par ce dernier d’une activité salariée ou non salariée à la date à laquelle, en vertu de cette législation, la période d’éducation d’enfants a commencé à être prise en compte pour l’enfant concerné reste tenue de prendre en compte ladite période en tant que période d’éducation d’enfants selon sa propre législation, comme si l’enfant était éduqué sur son propre territoire.

[2] Voir arrêts du 23 novembre 2000, Elsen, C-135/99, et du 7 février 2002, Kauer, C-28/00 (voir aussi le communiqué de presse n° 13/02) où la Cour a établi le test du « lien étroit » ou du « lien suffisant » entre les périodes d’assurance accomplies du fait de l’exercice d’une activité professionnelle dans l’État membre à la charge duquel la personne concernée sollicite une pension de vieillesse et les périodes d’éducation d’enfants que cette personne a effectuées dans un autre État membre. La Cour a jugé que la circonstance que les personnes, qui avaient exclusivement travaillé dans l’État membre débiteur de leur pension de vieillesse, exerçaient, au moment de la naissance de leur enfant, une activité salariée sur le territoire de cet État membre permettait d’établir l’existence d’un tel lien étroit ou suffisant et que, partant, la législation dudit État membre était applicable en ce qui concerne la prise en compte des périodes d’éducation d’enfants accomplies dans un autre État membre aux fins de l’octroi d’une telle pension.

[3] Dans l’arrêt du 19 juillet 2012, Reichel-Albert, C-522/10, la Cour a jugé que l’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il fait obligation à l’institution compétente d’un premier État membre de prendre en compte, aux fins de l’octroi d’une pension de vieillesse, les périodes consacrées à l’éducation d’un enfant, accomplies dans un second État membre, comme si ces périodes avaient été accomplies sur son territoire national, par une personne qui n’a exercé des activités professionnelles que dans ce premier État membre et qui, au moment de la naissance de ses enfants, avait temporairement cessé de travailler et établi sa résidence, pour des motifs strictement familiaux, sur le territoire du second État membre.

 

RAPPEL : Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d’un litige dont elles sont saisies, d’interroger la Cour sur l’interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d’un acte de l’Union. La Cour ne tranche pas le litige national. Il appartient à la juridiction nationale de résoudre l’affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.

 

 

Communiqué de presse n° 119/22 de la Cour de justice de l’Union européenne du 07.07.2022 consultable ici

Arrêt de la CJUE du 07.07.2022 consultable ici

 

9C_154/2021 (d) du 10.03.2022 – Survenance de l’incapacité de travail dont la cause est à l’origine de l’invalidité – Connexité temporelle et matérielle / 23 LPP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_154/2021 (d) du 10.03.2022

 

Consultable ici

NB : Traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Survenance de l’incapacité de travail dont la cause est à l’origine de l’invalidité – Connexité temporelle et matérielle / 23 LPP

Conflit de compétences entre caisse de pensions et la Fondation institution supplétive

 

Assurée, né en 1976, a travaillé du 02.11.2010 au 31.05.2011 dans le cadre d’un stage professionnel suivi d’un engagement à durée déterminée auprès de l’office B.__ et, à partir du 01.06.2011, auprès de l’office C.__ de la même ville. L’institution de prévoyance professionnelle compétente durant cette période était la caisse de pension de la ville de Lucerne (ci-après : CP Ville de Lucerne). Après la résiliation des rapports de travail d’un commun accord pour fin février 2015 (accord du 15.10.2014), l’assurée a perçu des indemnités de chômage du 16.03.2015 au 13.12.2015 et était assurée pour la prévoyance professionnelle auprès de la Fondation institution supplétive LPP.

En mars 2016, l’assurée a déposé une demande AI. Après examen psychiatrique réalisé par un médecin du SMR, l’office AI a accordé à l’assurée une rente entière d’invalidité dès le 01.09.2016 (décision du 07.04.2017). A partir de cette date, la Fondation institution supplétive LPP a avancé les prestations de la prévoyance professionnelle.

 

Procédure cantonale

Le 29.11.2019, l’assurée a ouvert action contre la CP Ville de Lucerne et la Fondation institution supplétive LPP, en demandant que la CP Ville de Lucerne soit tenue de verser les prestations obligatoires et réglementaires, majorées d’un intérêt de 5% à compter de l’introduction de l’action ; à titre subsidiaire, que la Fondation institution supplétive LPP soit tenue de verser les prestations obligatoires et réglementaires, majorées d’un intérêt de 5% à compter de l’introduction de l’action ; cette dernière doit en outre être tenue, à titre de mesure provisoire, de (continuer à) avancer les prestations pendant la procédure en cours.

Par jugement du 20.01.2021, le tribunal cantonal a ordonné à la CP Ville de Lucerne de verser à l’assurée les prestations d’invalidité obligatoires et réglementaires, majorées des intérêts, conformément à l’art. 7 OLP, à compter de l’introduction de la demande ou de la date d’échéance ultérieure ; il a rejeté le recours pour le reste.

 

TF

Consid. 2.1
[…] Les expertises sur dossier peuvent également avoir valeur de preuve, dans la mesure où il existe une analyse sans faille et qu’il ne s’agit pour l’essentiel que de l’évaluation d’un état de fait médical établi en soi, c’est-à-dire que la consultation directe de la personne assurée par un médecin spécialiste passe au second plan (cf. parmi d’autres : SVR 2010 n° 46 p. 143, 9C_1063/2009 consid. 4.2.1 ; arrêts 9C_647/2020 du 26 août 2021 consid. 4.2 et 9C_524/2017 du 21 mars 2018 consid. 5.1 et les références).

Consid. 2.2
Le moment de la survenance de l’incapacité de travail déterminante pour la prévoyance professionnelle doit être établi au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références), usuel en droit des assurances sociales (arrêts 9C_52/2018 du 21 juin 2018 consid. 3.2 et 9C_96/2008 du 11 juin 2008 consid. 2.2, et leurs références). La preuve juridiquement suffisante d’une perte de capacité fonctionnelle pertinente pour le droit de la prévoyance professionnelle ne requiert pas nécessairement une incapacité de travail attestée en temps réel par un médecin. Des hypothèses professionnelles ou médicales ultérieures et des réflexions spéculatives, comme par exemple une incapacité de travail médico-théorique déterminée rétroactivement seulement après des années, ne suffisent toutefois pas (arrêt 9C_61/2014 du 23 juillet 2014 consid. 5.1 et les références). Pour suivre l’attestation médicale rétrospective de l’incapacité de travail et pouvoir renoncer à un certificat médical en temps réel, il faut au contraire que les effets négatifs de la maladie sur la capacité de travail soient documentés en temps réel (arrêts 9C_517/2020 du 28 janvier 2021 consid. 3.2 et 9C_851/2014 du 29 juin 2015 consid. 3.2 et la référence, in : SZS 2015 p. 469).

Consid. 2.3
Les constatations de l’instance précédente concernant la nature de l’atteinte à la santé (constat, diagnostic, etc.) et la capacité de travail, qui sont le résultat d’une appréciation des preuves, lient en principe le Tribunal fédéral (ATF 132 V 393 consid. 3.2). La question de fait est également celle du moment de la survenance de l’incapacité de travail dont la cause a conduit à l’invalidité (SVR 2008 LPP n° 31 p. 126, 9C_182/2007 consid. 4.1.1). En revanche, le Tribunal fédéral examine librement les éléments sur lesquels se fonde la décision à ce sujet (SVR 2009 LPP n° 7 p. 22, 9C_65/2008 consid. 2.2 ; arrêt 9C_670/2010 du 23 décembre 2010 consid. 1.2) et si celle-ci repose sur des preuves suffisantes (arrêt 9C_100/2018 du 21 juin 2018 consid. 2.3).

Consid. 3.1
L’office AI a fixé le début du délai d’attente d’un an selon l’art. 28 al. 1 let. b LAI au mois de mai 2015. Or, comme la demande de prestations AI de l’assurée n’a été déposée qu’à la mi-mars 2016, et donc tardivement (cf. art. 29 al. 1 LAI), le tribunal cantonal a nié tout lien à cet égard et a examiné librement l’obligation de la CP Ville de Lucerne de verser des prestations, ce qu’aucune partie ne conteste à juste titre (cf. p. ex. arrêt 9C_679/2020 du 9 février 2021 consid. 4).

Consid. 3.2
L’instance cantonale a considéré qu’une incapacité de travail d’au moins 20% pour raisons psychiques était survenue, au degré de la vraisemblance prépondérante, pendant le rapport de prévoyance avec la CP Ville de Lucerne. Une nouvelle évaluation psychiatrique ne n’aurait apporté que peu de résultats utiles, étant donné que le dossier contient déjà des rapports impartiaux en « temps réel » sur le comportement de l’assurée. Ensuite, la cour cantonale est partie du postulat qu’il existait un lien matériel étroit entre la problématique de santé à partir d’août 2014 et l’invalidité ultérieure. En outre, à partir de cette date, il existait, d’un point de vue médical, une incapacité de travail complètement sans interruption, de sorte qu’il fallait également admettre un lien temporel ininterrompu. En conséquence, le tribunal cantonal a admis l’obligation de la CP Ville de Lucerne de verser ses prestations.

Consid. 4.1
La conclusion centrale de l’instance cantonale, selon laquelle les résultats psychopathologiques invalidants auraient selon toute vraisemblance déjà entraîné une incapacité de travail d’au moins 20% pendant les rapports de travail avec la ville de Lucerne, repose sur une appréciation complète et détaillée du dossier. La cour cantonale a d’abord tenu compte du fait qu’une incapacité de travail attestée en temps réel était avérée et qu’elle concernait le rapport de prévoyance en question. Ainsi, selon l’établissement des faits du tribunal cantonal, l’assurée était en incapacité totale de travail dès le 28.08.2014. Le médecin traitant a expressément confirmé que l’emploi auprès de l’office C.__ avait dû être abandonné pour des raisons de santé ; une poursuite de l’activité était impossible (certificat du 20.03.2015). Le fait que des causes autres que psychiques aient été à l’origine de l’incapacité total de travail attestée par le médecin n’est ni visible ni exposé (de manière étayée) dans le recours. […] Il n’existe aucun indice valable pour que l’assurée ait retrouvé durablement une capacité de travail supérieure à 80% après la fin de ses rapports de travail avec la ville de Lucerne (à ce sujet : ATF 144 V 58 consid. 4.4).

Consid. 4.2
[…] Certes, les explications fournies dans le rapport d’examen du SMR du 11.01.2017 permettent de conclure que les travaux de construction (changement de sol) ont bien déclenché les troubles psychiatriques dans le sens où une détérioration de l’état de santé s’est produite par la suite. Cela ne permet toutefois pas d’ignorer le fait que le médecin n’a pas exclu que la maladie ait déjà eu un impact significatif sur la capacité de travail ( » […] trouble délirant développé depuis le printemps 2015 ou auparavant […]). A ce sujet, le médecin du SMR a précisé que chez l’assurée, ce n’était pas (seulement) la grande sensibilité aux odeurs, aux émissions et aux composés chimiques, apparue dans le cadre de la transformation de l’appartement, qui était frappante, mais le traitement et l’interprétation des expériences et des événements en soi, ce qui s’était déjà manifesté lors du décès de l’animal domestique ou de l’avocat. Selon le médecin, le trouble délirant (CIM-10 F22.0) qui a finalement conduit à une rente AI avec une incapacité de travail de 100% se caractérise par le fait que la patiente est gravement atteinte dans son appréciation de la réalité, qu’elle ne peut donc pas se distancier de sa perception de la réalité et qu’elle ne dispose en outre d’aucune conscience de la maladie ; à cet égard, elle réagit au contraire de manière défensive et même irascible.

Consid. 4.3
L’instance cantonale a procédé à sa propre appréciation du dossier personnel (en temps réel) et ne s’est fondée qu’en dernier lieu sur l’expertise médicale du 05.11.2019, qui intègre ces conclusions et les confirme en tous points. Le médecin-expert a exposé en détail, sur la base des inscriptions dans le dossier personnel, les parallèles entre les symptômes principaux d’un trouble délirant déjà décrits par le médecin du SMR et le comportement de l’assurée durant son emploi à la ville de Lucerne. Le début de l’incapacité de travail déterminante fixé par le médecin-expert en raison des difficultés rencontrées sur le lieu de travail correspond également à la date indiquée par le médecin traitant – fin août 2014. […] On ne voit pas non plus que la cour cantonale n’aurait pas tenu compte des principes applicables aux expertises des parties, puisque le médecin-expert a uniquement évalué la survenance rétrospective de l’incapacité de travail pertinente pour des faits médicaux établis en soi.

Consid. 4.4
En conséquence, on ne saurait reprocher à l’instance cantonale une constatation manifestement inexacte ou une appréciation des preuves juridiquement erronée en ce qui concerne la survenance de l’incapacité de travail pertinente d’au moins 20%. Le fait qu’elle ait renoncé à des investigations supplémentaires, en particulier à la demande d’expertise judiciaire, n’est pas critiquable (appréciation anticipée des preuves ; ATF 144 V 361 consid. 6.5 ; 136 I 229 consid. 5.3). Il n’y a pas non plus de violation du droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst. et art. 6 ch. 1 CEDH). La condition du lien matériel et temporel étroit entre l’incapacité de travail existant pendant le rapport de prévoyance et l’invalidité survenue ultérieurement est restée incontestée et ne donne lieu à aucune remarque.

 

Le TF rejette le recours de la caisse de pension.

 

 

Proposition de citation : 9C_154/2021 (d) du 10.03.2022, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2022/07/9c_154-2021)

 

Arrêt 9C_154/2021 consultable ici

 

La Commission des affaires juridiques du Conseil national ouvre une consultation afin d’adapter le taux de l’intérêt moratoire appliqué par la Confédération

La Commission des affaires juridiques du Conseil national ouvre une consultation afin d’adapter le taux de l’intérêt moratoire appliqué par la Confédération

 

Communiqué de presse du Parlement du 07.07.2022 consultable ici

 

La Commission des affaires juridiques du Conseil national ouvre une consultation visant à mettre en œuvre l’initiative parlementaire Regazzi 16.470 (« Aligner l’intérêt moratoire appliqué par la Confédération sur les taux du marché. Deux variantes sont proposées, l’une prévoyant un taux variable et l’autre prévoyant un taux fixe inférieur au taux actuel.

L’initiative parlementaire 16.470 a été déposée par le Conseiller national Fabio Regazzi le 29 septembre 2016. Elle propose de tenir compte de l’évolution économique dans la fixation de l’intérêt moratoire. Actuellement, le code des obligations prévoit un taux fixe à 5 pour cent qui ne tient pas compte des fluctuations des taux d’intérêt du marché. Selon l’initiative parlementaire, en comparaison avec les taux du marché actuellement pratiqués, ce taux est supérieur à la moyenne. La commission est ainsi d’avis qu’une adaptation du taux d’intérêt moratoire appliqué par la Confédération est nécessaire et a décidé par 15 voix contre 6 d’envoyer ce projet en consultation. Une minorité de la commission rejette le projet et propose de ne pas entrer en matière. Elle estime que l’évolution économique actuelle rend superflu une adaptation du taux d’intérêt moratoire appliqué par la Confédération.

La commission propose deux solutions de mises possibles dans le cadre de la consultation : une solution à taux variable et une solution à taux fixe. La solution à taux variable prévoit que le Swiss Average Rate Overnight (SARON) serve de taux d’intérêt de référence. Cependant, ce taux pouvait être très bas, voir négatif, ou au contraire très élevé, la commission a décidé de majorer ce taux de deux points de pourcentage et de déterminer une valeur minimale à 2% et une valeur maximale à 15%. Dans cette variante à taux variable, le Conseil fédéral serait chargé de fixer ce taux annuellement dans une ordonnance. La solution à taux fixe part du postulat selon lequel le droit actuel a fait ses preuves, mais que le taux actuel est trop élevé. La commission propose ainsi d’abaisser ce taux de 5% à 3%.

Le délai imparti pour la consultation court jusqu’au 28 octobre 2022. Dans le cadre de cette procédure, les Services du Parlement collaborent avec l’Office fédéral de la justice.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 07.07.2022 consultable ici

Projet mis en consultation disponible ici

Rapport explicatif de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (version provisoire) disponible ici

La Commissione degli affari giuridici del Consiglio nazionale indice una procedura di consultazione su un progetto che prevede che gli interessi di mora applicati dalla Confederazione siano in linea con i tassi di mercato, comunicato stampa disponibile qui

Die Kommission für Rechtsfragen des Nationalrates eröffnet Vernehmlassung zur Anpassung des Verzugszinssatzes des Bundes, Medienmitteilung hier verfügbar

Portage salarial et assurances sociales

Portage salarial et assurances sociales

 

Feuille d’information «Portage salarial» de l’OFAS du 30.06.2022 disponible ici

 

Le modèle du portage salarial, développé en France, est aussi de plus en plus proposé en Suisse. Il est régulièrement utilisé pour annoncer comme salariées auprès des assurances sociales des personnes qui sont en réalité indépendantes.

La personne indépendante travaille pour des clients qu’elle a elle-même recrutés (mandat, ouvrage ou prestation de service), sans être liée par des instructions, elle supporte le risque entrepreneurial et est seule responsable. L’entreprise de portage interposée, qui se charge uniquement de la facturation et de l’encaissement auprès de la clientèle, décompte les honoraires auprès des assurances sociales en tant qu’employeur fictif. Une telle pratique n’est pas conforme au droit suisse des assurances sociales et peut conduire au refus de certaines prestations.

 

Du point de vue des assurances sociales

Dans le domaine des assurances sociales, la délimitation entre l’activité salariée et l’activité indépendante est décisive, notamment pour l’affiliation à l’assurance chômage, à la prévoyance professionnelle obligatoire et à l’assurance accidents obligatoire. Les critères de délimitation déterminants ont été fixés par le Tribunal fédéral dans une jurisprudence bien établie depuis de nombreuses années. Ils sont obligatoires pour toutes les assurances sociales.

L’intégration dans l’organisation du travail, la subordination à l’entreprise de l’employeur et le fait d’être lié à lui par des instructions parlent en faveur d’une activité lucrative salariée. Le fait d’assumer un risque entrepreneurial important, notamment l’engagement de capitaux, la responsabilité, le risque d’encaissement et de perte, ainsi que le fait d’agir en son propre nom et pour son propre compte, sont des caractéristiques d’une activité lucrative indépendante. Il convient d’examiner, en fonction des circonstances concrètes de chaque cas, quels critères sont prépondérants. Les rapports de droit civil – comme la conclusion d’un contrat de travail – n’ont qu’un caractère indicatif. Les accords passés par les parties contractantes sur leur statut d’indépendant ou de salarié ne sont pas contraignants pour les assurances sociales.

Dans le cas du portage salarial, l’entreprise de portage n’est pas responsable de l’acquisition de clients, n’exerce pas de droit d’instruction sur l’exécution concrète du travail et n’assume aucune responsabilité. L’indépendant n’est pas non plus intégré dans l’organisation du travail de l’entreprise de portage, mais assume en permanence l’intégralité du risque entrepreneurial. Si l’indépendant ne parvient pas à décrocher de contrats, il ne gagne rien. Il doit en outre subvenir seul à l’exploitation de son entreprise, c’est-à-dire notamment se procurer et entretenir les locaux et l’équipement nécessaires, et il en assume lui-même la responsabilité.

Le simple fait que l’indépendant facture par l’intermédiaire de l’entreprise de portage, qu’il n’agisse souvent pas en son nom propre, mais qu’il fasse conclure le contrat avec la clientèle par l’intermédiaire de l’entreprise de portage et qu’il n’établisse pas lui-même le décompte des cotisations d’assurance sociale, ne fait pas de lui une personne salariée, ni d’ailleurs de l’entreprise de portage un employeur. Il s’agit plutôt d’un statut fictif de salarié. Du point de vue du droit des assurances sociales, les personnes qui décomptent via le portage salarial sont donc en général considérées comme des indépendants.

Si les assurances sociales constatent que des personnes qui sont effectivement indépendantes sont annoncées comme salariées, elles les traitent comme des indépendants. Cela peut par exemple conduire à un refus de prestations de l’assurance chômage.

 

 

Feuille d’information «Portage salarial» de l’OFAS du 30.06.2022 disponible ici

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 453 du 01.07.2022, « Portage salarial », disponible ici

Page « Portage salarial » sur le site de l’OFAS ici

 

Factsheet «Accompagnamento salariale» dell’UFAS del 30.06.2022, disponibile qui

Factsheet « Lohnträgerschaft » des BSV vom 30.06.2022, hier verfügbar

 

 

9C_79/2021 (f) du 04.05.2022, destiné à la publication – Péremption du droit de fixer les cotisations ensuite d’une procédure fiscale (procédure de soustraction d’impôt) plus de 10 ans après les années de cotisations concernées – 16 al. 1 LAVS – 53 al. 1 LPGA en lien avec l’art. 67 PA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_79/2021 (f) du 04.05.2022, destiné à la publication

 

Consultable ici

Paru in Jurisprudence du Tribunal fédéral relative au droit des cotisations AVS, Sélection de l’OFAS no 78, du 20.06.2022

 

Péremption du droit de fixer les cotisations ensuite d’une procédure fiscale (procédure de soustraction d’impôt) plus de 10 ans après les années de cotisations concernées / 16 al. 1 LAVS – 53 al. 1 LPGA en lien avec l’art. 67 PA

 

Le législateur fédéral a prévu à l’art. 16 al. 1 LAVS une règle spéciale permettant à l’organe d’exécution de la LAVS de fixer les cotisations AVS/AI dans les situations mentionnées jusqu’à un an après la fin de l’année civile au cours de laquelle la taxation fiscale déterminante est entrée en force. Ce délai peut excéder dix ans, selon les circonstances ; le délai absolu de 10 ans pour procéder à une révision procédurale au sens des art. 53 al. 1 LPGA et 67 PA n’y change rien (consid. 5).

L’assuré a été affilié à titre de personne exerçant une activité indépendante du 01.04.1986 au 30.09.2005. Les 28.02.2006 et 20.02.2008, la caisse de compensation a rendu des décisions de cotisations pour les années 2004 et 2005. Suite à une procédure de rappel d’impôt à la suite d’une soustraction d’impôt qui a conduit l’autorité fiscale à rendre des taxations fiscales rectificatives, la caisse de compensation a réclamé au recourant un montant supplémentaire de cotisations sociales pour les années 2004 et 2005, par décisions du 14.10.2019.

La question de la péremption du droit de réclamer, en 2019, le solde des cotisations sociales pour les années 2004 et 2005, soit plus de 10 ans après les années de cotisations concernées, est l’objet du litige devant le Tribunal fédéral.

Contrairement à ce qu’a retenu la juridiction cantonale, le Tribunal fédéral expose que la correction de la décision initiale de cotisation en raison de l’existence d’un motif de révision procédurale au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA – à savoir la taxation fiscale rectificative à la suite de la procédure de soustraction d’impôt – ne supplante pas l’institution de la péremption selon l’art. 16 al. 1 2ème phrase, LAVS. La taxation fiscale rectificative constitue uniquement la condition à laquelle la décision peut être revue. En revanche, le délai de péremption prévu par la disposition spéciale de la LAVS n’est pas évincé (consid. 5.1). Ce délai n’a pas été modifié par l’entrée en vigueur de la LPGA (consid. 5.2.2) et il n’est pas raccourci par le délai de 10 ans prévu en matière de révision procédurale au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA en relation avec l’art. 67 PA (consid. 5.3).

Ainsi, puisqu’elle a respecté le délai d’un an après la fin de l’année civile au cours de laquelle les décisions en rappel d’impôt sont entrées en force (art. 16 al. 1, 2ème phrase, LAVS), la caisse de compensation était en droit de revenir sur ses décisions formellement passées en force en raison des faits nouveaux importants découlant des décisions de taxation, même si plus de 10 ans s’étaient écoulés. La juridiction cantonale a dès lors violé le droit fédéral en considérant que le droit de la caisse de compensation de réclamer le paiement des cotisations arriérées était éteint par péremption (consid. 6).

 

 

Arrêt 9C_79/2021 consultable ici