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9C_776/2017 (f) du 21.03.2018 – Procédure de recours au Tribunal cantonal / Dépôt d’une nouvelle demande AI vs recours contre une décision AI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_776/2017 (f) du 21.03.2018

 

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Procédure de recours au Tribunal cantonal

Dépôt d’une nouvelle demande AI vs recours contre une décision AI

 

Assuré ayant déposé une 1e demande AI en décembre 2003, qui a abouti à l’octroi d’une rente entière d’invalidité d’octobre 2003 à mars 2005. En août 2007, il a déposé une 2e demande de prestations, sur laquelle l’office AI n’est pas entré en matière.

L’assuré a présenté une 3e demande de prestations en janvier 2012, que l’office AI a rejetée par décision du 21.05.2015.

Le 10.06.2015, l’assuré a déposé une 4e demande AI. Par lettre du 18.06.2015, l’office AI l’a informé que la décision du 21.05.2015 était passée en force, et qu’il lui appartenait ainsi de lui faire parvenir tous les documents médicaux permettant de rendre plausible l’aggravation de son état de santé depuis cette décision. L’assuré ayant déposé une attestation médicale du 04.05.2015, l’office AI a transmis la demande du 10.06.2015 au tribunal cantonal le 14.07.2015, comme objet de sa compétence. L’autorité judiciaire l’a retournée à l’office AI, le 16.07.2015, considérant que rien ne permettait d’admettre que l’assuré avait l’intention de recourir contre la décision du 21.05.2015.

L’assuré a déposé une 5e demande de prestations, le 20.09.2016, sur laquelle l’office AI a refusé d’entrer en matière par décision du 25.01.2017.

 

Procédure cantonale

L’assuré a déféré la décision du 25.01.2017 au tribunal cantonal en demandant son annulation.

Dans un jugement incident du 08.06.2017 (ATAS/470/2017), Dans son jugement incident du 08.06.2017, la juridiction cantonale a retenu que l’assuré avait manifesté son désaccord avec la décision du 21.05.2015, puisqu’il avait déposé une nouvelle demande de prestations durant le délai de recours en concluant à l’octroi d’une rente. Elle a aussi relevé qu’elle n’était pas liée par la réponse de son greffe du 16.07.2015, car aucun jugement n’avait été prononcé. L’objet du litige ne consistait donc pas à savoir si l’office AI avait refusé à raison d’entrer en matière sur la demande du 20.09.2016, mais de déterminer si la décision de refus de prestations du 21.05.2015 était ou non juridiquement fondée.

Par jugement au fond du 05.10.2017 (ATAS/864/2017), elle a admis partiellement le recours dirigé contre la décision du 21.05.2015 (ch. 1 du dispositif du jugement), annulé celle-ci (ch. 2), octroyé au recourant un quart de rente d’invalidité à compter d’août 2012 (ch. 3) et rejeté le recours contre la décision du 25.01.2017 (ch. 4).

 

TF

L’office AI relève que le jugement incident du 08.06.2017 ne pouvait être déféré au Tribunal fédéral qu’avec la décision finale, faute de préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF).

En l’espèce, le Tribunal fédéral considère que l’assuré n’avait pas formellement déclaré recourir contre la décision du 21.05.2015, à teneur de laquelle sa demande de prestations déposée le 20.01.2012 était rejetée. En outre, l’assuré n’avait pas soulevé d’objections au refus de la Chambre des assurances de considérer que sa demande du 10.06.2015 ne constituait pas un recours contre la décision du 21.05.2015 (cf. lettre du greffe du 16.07.2015); il n’avait au demeurant ni requis ni obtenu la remise d’un accusé de réception au dépôt d’un recours de la part de l’autorité judiciaire, et ne s’est pas non plus enquis de l’état d’avancement d’une éventuelle procédure de recours consécutive à son écriture du 10.06.2015. On peut donc en déduire qu’il n’avait pas l’intention de recourir contre la décision du 21.05.2015, mais qu’il entendait à cette occasion présenter une nouvelle demande au sens des art. 17 LPGA et 87 RAI.

Dans ces conditions, la décision du 21.05.2015 était passée en force faute d’avoir été attaquée. Elle ne constituait donc plus l’objet de la contestation portée devant la Chambre des assurances sociales, d’autant moins que les conclusions du recours étaient dirigées uniquement contre la décision du 25.01.2017. La juridiction cantonale de recours ne pouvait donc plus examiner le mérite de la décision du 21.05.2015 ni l’annuler. Dans cette mesure, le recours en matière de droit public est bien fondé, ce qui conduit à l’annulation des ch. 1 à 3, 5 et 6 du dispositif du jugement final du 05.10.2017 et par voie de conséquence du jugement incident du 08.06.2017.

Le ch. 4 du dispositif du jugement du 05.10.2017 n’a pas été contesté, si bien que la décision du 25.01.2017 est passée en force.

 

Le TF admet le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_776/2017 consultable ici

 

 

8C_479/2016 (f) du 02.08.2017, publié 143 V 249 – Procédure cantonale – Délai supplémentaire en vue de régulariser le recours dont la motivation est insuffisante – 40 al. 3 LPGA – 60 al. 2 LPGA – 61 let. b LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_479/2016 (f) du 02.08.2017, publié 143 V 249

 

Arrêt 8C_479/2016 consultable ici

ATF 143 V 249 consultable ici

 

Procédure cantonale – Délai supplémentaire en vue de régulariser le recours dont la motivation est insuffisante / 40 al. 3 LPGA – 60 al. 2 LPGA – 61 let. b LPGA

 

Par décision du 11.02.2016, confirmée sur opposition le 05.04.2016, l’assurance-accidents a réduit avec effet au 01.10.2012 la rente d’invalidité allouée à l’assuré et lui a demandé la restitution du montant des prestations indûment versées depuis cette date.

Par lettre du 06.05.2016 (timbre postal) adressée à l’assurance-accidents, l’assuré s’est exprimé sur la décision sur opposition, faisant part de son désaccord à divers égards, en particulier sur la question de sa perte de gain. L’assurance-accidents a transmis ce courrier à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais comme objet de sa compétence.

 

Procédure cantonale

Par lettre envoyée sous pli recommandé le 24.05.2016, la juridiction cantonale a informé l’assuré que son écriture du 06.05.2016 ne satisfaisait pas aux exigences légales d’un recours, notamment en raison de l’absence de signature. Aussi lui a-t-elle imparti un délai expirant le 02.06.2016 pour déposer un recours en bonne et due forme, sous peine que son écriture soit déclarée irrecevable.

Le 01.06.2016, l’assuré a consulté un mandataire professionnel, lequel a requis le dernier jour du délai une prolongation de celui-ci au 30.06.2016, afin de pouvoir consulter le dossier de l’assurance-accidents et se déterminer valablement (fax et courrier du 02.06.2016). Par retour de fax et de courrier du même jour, la cour cantonale a rejeté la requête de prolongation, motif pris qu’il ne s’agissait pas d’un délai prolongeable. Partant, le mandataire de l’assuré lui a immédiatement renvoyé l’écriture du 06.05.2016 munie d’une signature.

La juridiction cantonale a considéré que le délai de neuf jours, expirant le 02.06.2016, pour déposer un recours en bonne et due forme laissait suffisamment de temps à l’assuré pour se renseigner auprès d’un homme de loi, indépendamment du fait qu’il avait attendu six jours avant de retirer son pli recommandé et attendu le 01.06.2016 pour consulter un avocat. La cour cantonale considéré que l’assuré n’avait pas valablement exprimé une volonté claire et inconditionnelle de recours et l’écriture n’était pas recevable, faute de motivation et conclusions cohérentes.

Par jugement du 09.06.2016, refus d’entrer en matière sur l’écriture du 06.05.2016 par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 61, première phrase, LPGA, la procédure devant le tribunal cantonal des assurances est réglée par le droit cantonal, sous réserve de l’art. 1 al. 3 PA. L’art. 61 let. b LPGA précise cependant que l’acte de recours doit contenir un exposé succinct des faits et des motifs invoqués, ainsi que les conclusions ; si l’acte n’est pas conforme à ces règles, le tribunal impartit un délai convenable au recourant pour combler les lacunes, en l’avertissant qu’en cas d’inobservation le recours sera écarté.

La règle de l’art. 61 let. b LPGA découle du principe de l’interdiction du formalisme excessif et constitue l’expression du principe de la simplicité de la procédure qui gouverne le droit des assurances sociales (arrêt 8C_828/2009 du 8 septembre 2010 consid. 6.2 et la référence; cf. UELI KIESER, ATSG-Kommentar, 3 e éd. 2015, n° 84 ad art. 61 LPGA). C’est pourquoi le juge saisi d’un recours dans ce domaine ne doit pas se montrer trop strict lorsqu’il s’agit d’apprécier la forme et le contenu de l’acte de recours. Il s’agit là d’une prescription formelle, qui oblige le juge de première instance – excepté dans les cas d’abus de droit manifeste – de fixer un délai pour corriger les imperfections du mémoire de recours (ATF 134 V 162 consid. 2 p. 163 s.; 112 Ib 634 consid. 2b p. 635; 107 V 244 consid. 2 p. 245; 104 V 178).

 

En l’occurrence, l’autorité cantonale retient que le délai supplémentaire de l’art. 61 let. b LPGA n’était pas prolongeable en se référant à la jurisprudence du Tribunal fédéral (à savoir les arrêts 8C_723/2014 du 29 octobre 2014 consid. 2.3, 9C_561/2012 du 18 juin 2013 consid. 2.1 et 2C_193/2009 du 29 août 2009 consid. 3.3). Ce faisant, elle fait une mauvaise lecture des arrêts cités, lesquels ne sont pas pertinents en l’espèce. En effet, les causes dont ils font l’objet concernaient la question d’une éventuelle restitution de délai, eu égard au fait que les écritures complétées n’avaient pas été transmises dans le délai supplémentaire imparti, sans qu’une demande de prolongation ne fût déposée avant l’expiration de ce délai. En outre, au consid. 2.3 de l’arrêt 8C_723/2014, c’est en référence au délai légal de recours de l’art. 60 al. 1 LPGA, et non au délai supplémentaire de l’art. 61 let. b LPGA, que le Tribunal fédéral évoque le caractère non prolongeable du délai. La juridiction cantonale ne pouvait dès lors se fonder sur la jurisprudence précitée pour refuser d’emblée une prolongation de délai.

Selon l’art. 40 al. 3 LPGA, applicable par analogie à la procédure devant le tribunal cantonal des assurances (art. 60 al. 2 LPGA), le délai fixé par l’assureur, respectivement par le juge de première instance, peut être prolongé pour des motifs pertinents si la partie en fait la demande. Il ne s’agit pas d’un délai légal à proprement parler, lequel ne peut pas être prolongé (cf. art. 40 al. 1 et 60 al. 2 LPGA), mais d’un délai dont la durée est laissée à l’appréciation de l’autorité. Sur le principe, un tel délai est prolongeable (arrêt I 898/06 du 23 juillet 2007 consid. 3.4 et les références; RCC 1986 p. 426 consid. 1b; voir aussi UELI KIESER, op. cit., n° 89 ad art. 61 LPGA et n° 17 ad art. 60 LPGA).

La juridiction cantonale se devait d’examiner l’existence de motifs suffisants à l’appui de la demande de prolongation du recourant et ne pouvait, dans ce contexte, faire abstraction de la date effective de notification de son ordonnance du 24.05.2016. En effet, sous réserve d’un abus de droit, le destinataire d’un acte judiciaire envoyé sous pli recommandé, à l’adresse duquel un avis de retrait a été déposé, est libre d’aller retirer l’envoi à sa convenance, à l’intérieur du délai de garde de sept jours suivant la première tentative de notification. D’ailleurs, s’agissant des délais fixés en jours, ils courent dès le lendemain de la communication de l’acte (art. 38 al. 1 LPGA), à savoir au moment du retrait de l’acte au guichet postal, dans le cas d’un acte remis contre signature dont la première tentative de distribution a été infructueuse. Ce n’est que si l’envoi n’est pas retiré dans le délai de garde, qu’il est réputé avoir été communiqué le dernier jour de ce délai (cf. art. 38 al. 2bis LPGA; ATF 119 V 89 consid. 4b/aa). En d’autres termes, lorsqu’elle accorde un délai supplémentaire pour régulariser un acte de recours au sens de l’art. 61 let. b LPGA, l’autorité cantonale doit tenir compte du fait que le destinataire bénéfice du délai de garde de sept jours pour retirer un acte remis contre signature.

En l’espèce, le recourant a retiré l’ordonnance en cause le 30.05.2016. Il ne disposait concrètement que de trois jours complets pour déposer un recours en bonne et due forme. Dans la mesure où il a mandaté un avocat le 01.06.2016, on ne saurait lui reprocher d’avoir tardé à agir. Quant à l’avocat nouvellement mandaté, il n’avait à l’évidence pas suffisamment de temps pour demander et consulter le dossier de l’assurance-accidents et rédiger un mémoire de recours jusqu’au lendemain (cf. ATF 134 V 162 consid. 6 p. 169 s.; arrêt 8C_442/2007 du 5 mai 2008 consid. 1.5).

 

Il était également contradictoire de la part de la juridiction cantonale d’impartir un délai supplémentaire au recourant pour déposer un recours en bonne et due forme puis de considérer dans son arrêt du 9 juin 2016 qu’il n’avait pas exprimé une volonté claire de recourir. À tout le moins aurait-elle dû clarifier ce point avant d’impartir le délai supplémentaire. Dans tous les cas, la volonté de recourir ne pouvait raisonnablement plus faire de doute lorsque le mandataire du recourant a requis une prolongation de ce délai pour se déterminer valablement.

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et renvoie la cause au tribunal cantonal pour nouvelle décision.

 

 

Arrêt 8C_479/2016 consultable ici

ATF 143 V 249 consultable ici

 

 

Révision de la LPGA : suspension des prestations à titre provisionnel, frais des spécialistes engagés pour lutter contre les abus et fin de la gratuité des procédures judiciaires

Révision de la LPGA : suspension des prestations à titre provisionnel, frais des spécialistes engagés pour lutter contre les abus et fin de la gratuité des procédures judiciaires

 

Communiqué de presse du Parlement du 18.09.2018 consultable ici

 

Les assurances sociales devraient pouvoir bloquer la rente d’un rentier ayant émigré pour échapper à la prison et certains recours deviendront payants. Le Conseil des Etats a soutenu mardi par 38 voix contre 2 un projet ciblant les abus. Le dossier passe au National.

 

Les prestations pourront être suspendues à titre provisionnel s’il y a des motifs sérieux de soupçonner que l’assuré perçoit une prestation indue ou s’il a manqué à son obligation de renseigner, a expliqué Primin Bischof (PDC/SO) au nom de la commission. Les assurances le font déjà, mais les tribunaux ne s’accordaient pas sur le sujet, d’où la nécessité d’une base légale claire.

Les prestations en espèces pourront aussi être bloquées si l’assuré retarde indûment l’exécution de la mesure ou de la peine à laquelle il a été condamné. Le paiement de la rente pourra être suspendu même si l’assuré échappe à la prison en quittant la Suisse. Plus question que le Tribunal fédéral condamne la Suisse parce que l’assuré n’était pas encore en train de purger sa peine.

 

Abus

Les assureurs qui ont engagé des spécialistes pour lutter contre les abus pourront se retourner contre leurs clients. Les sénateurs ont précisé que les frais à charge des assurés devront être appropriés. « La précision est bienvenue », a souligné le ministre des affaires sociales Alain Berset. Le Conseil fédéral avait d’abord proposé que l’ensemble des frais soit à la charge des assurés.

Le délai pour les demandes de restitutions de prestations indûment touchées sera prolongé à trois ans au lieu d’un. Il s’est avéré souvent trop court en cas d’investigations poussées.

 

Fin de la gratuité

Certaines procédures judiciaires devant les tribunaux cantonaux des assurances sociales seront payantes, ont décidé les sénateurs par 29 voix contre 14. Aujourd’hui, l’assujettissement aux frais n’existe que pour l’assurance invalidité, a rappelé M. Bischof.

Toutes les assurances sociales pourront nouvellement imposer des frais de justice si les lois les concernant le prévoient. Sinon, le tribunal pourra faire passer à la caisse la partie qui agit de manière téméraire ou fait preuve de légèreté. Cette différenciation permet de tenir compte des particularités des assurances, selon Alain Berset.

Le dispositif allégera la charge des tribunaux cantonaux en réduisant les incitations à recourir contre les jugements et la durée des procédures, a argumenté Pirmin Bischof.

Pascale Bruderer Wyss (PS/AG) s’est opposée en vain à cette obligation. L’expérience avec l’assurance invalidité a montré que l’introduction de procédures payantes n’a justement pas contribué à réduire le nombre de dossiers soumis aux tribunaux cantonaux, mais a contribué à augmenter la charge des cantons, a-t-elle lancé. Et Paul Rechsteiner d’ajouter que le sens du droit des assurances sociales était la gratuité.

 

Traités internationaux

Le Conseil des Etats a toutefois corrigé le projet du Conseil fédéral. Les sénateurs ont tacitement refusé d’ancrer dans la révision la pratique actuelle selon laquelle les conventions de sécurité sociale ne sont pas sujettes au référendum facultatif si elles n’engagent pas davantage la Suisse que d’autres accords internationaux comparables.

L’un des arguments évoqués est que cette délégation de compétence équivaudrait à porter atteinte aux droits populaires s’agissant de l’approbation des traités internationaux.

Pour le ministre de la santé, « la pratique actuelle a donné entière satisfaction jusqu’ici ». Et rien ne change avec la proposition du Conseil fédéral. Elle renforce même la marge de manœuvre du Parlement, a-t-il argué en vain.

 

Détectives séparés

Hormis la prévoyance professionnelle, toutes les assurances sociales sont concernées par cette révision du droit. Le recours à des détectives privés a été traité séparément par le Parlement. Et le peuple se prononcera sur ce point le 25 novembre prochain.

La loi sur la partie générale du droit des assurances sociales est entrée en vigueur en 2000. La révision d’ensemble proposée découle de la jurisprudence mais répond également à des demandes du Parlement et des autorités d’application.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 18.09.2018 consultable ici

Bulletin officiel (version provisoire), Conseil des Etats, Session d’automne 2018, Séance du 18.09.2018 consultable ici

 

 

8C_817/2017 (f) du 31.08.2018 – Décision – Opposition – 49 LPGA – 52 LPGA – 10 OPGA / Opposition tardive / Rappels jurisprudentiels pour les assurés représentés par un mandataire professionnel

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_817/2017 (f) du 31.08.2018

 

Consultable ici

 

Décision – Opposition / 49 LPGA – 52 LPGA – 10 OPGA

Opposition provisoire sur un seul objet (IPAI) – Opposition motivée ultérieure sur les deux objets de la décision (IPAI + rente) – Opposition tardive pour le second objet (rente)

Rappels jurisprudentiels pour les assurés représentés par un mandataire professionnel

 

Le 27.11.2013, l’assuré a fait une chute dans les escaliers alors qu’il travaillait sur un chantier comme aide-peintre. Il en est résulté une fracture complexe de l’articulation de la cheville droite.

Par lettre du 19.08.2016, l’assurance-accidents a informé l’assuré qu’elle mettait un terme à la prise en charge du traitement médical (hormis les soins réservés par le médecin d’arrondissement) et qu’elle verserait les indemnités journalières sur la base d’une incapacité de travail de 100% encore jusqu’au 30.11.2016. Elle déclarait également qu’elle allait examiner son droit éventuel à une rente d’invalidité. Par décision du 23.11.2016, l’assurance-accidents a alloué à l’assuré une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 20%, mais lui a refusé l’octroi d’une rente d’invalidité, au motif que la perte de gain présentée était inférieure à 10%.

Dans une lettre du 02.12.2016, la mandataire de l’assuré a informé l’assurance-accidents qu’elle défendait les intérêts de l’assuré, lequel faisait élection de domicile en ses locaux. Elle y indiquait que son mandant – dont les médecins traitants estimaient qu’il avait une atteinte à l’intégrité non pas de 20% mais de 100% – formait opposition à la décision du 23.11.2016 et que les motifs de l’opposition seraient exposés de manière plus complète une fois qu’elle serait en possession du dossier administratif et médical. Elle demandait à l’assurance-accidents de lui transmettre ce dossier et concluait à l’annulation de la décision litigieuse et à la reconnaissance d’une atteinte à l’intégrité de 100%.

Après avoir requis et reçu de la mandataire la production d’une procuration, l’assureur-accidents lui a transmis, par lettre recommandée du 13.12.2016, la copie du dossier de l’assuré sous forme de CD-Rom en la priant de l’aviser, dans un délai de 30 jours dès réception de ce document, si elle maintenait l’opposition ou si elle la retirait.

Le 16.01.2017, la mandataire a sollicité l’octroi d’un délai supplémentaire jusqu’au 28.02.2017 pour déposer sa prise de position motivée car elle n’avait pas encore reçu les réponses qu’elle attendait des médecins traitants de l’assuré, délai accordé par l’assureur-accidents.

Le 28.02.2017, la mandataire a fait parvenir à l’assureur-accidents une écriture d’opposition motivée dans laquelle elle concluait à l’annulation de la décision du 23.11.2017, à l’octroi d’une rente d’invalidité ainsi qu’à l’allocation d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité supérieure à 20%.

L’assurance-accidents a rejeté l’opposition en tant qu’elle était recevable. En particulier, elle n’est pas entrée en matière sur la conclusion de l’assuré tendant à l’octroi d’une rente d’invalidité, considérant que sur ce point, la décision du 23.11.2016 était entrée en force. En effet, dans le délai légal d’opposition, l’assuré avait seulement contesté le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité; il n’avait manifesté son désaccord par rapport au refus de rente que dans son écriture d’opposition du 28.02.2017, soit en dehors du délai d’opposition.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/918/2017 – consultable ici)

Par jugement du 16.10.2017, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, renvoyant la cause à l’assurance-accidents pour qu’elle rende une décision sur opposition sur la question du droit à la rente.

 

TF

Selon l’art. 52 LPGA, les décisions rendues en matière d’assurance sociale peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d’opposition auprès de l’assureur qui les a rendues, à l’exception des décisions d’ordonnancement de la procédure. L’art. 10 al. 1 OPGA, édicté sur la base de la délégation de compétence prévue à l’art. 81 LPGA, prévoit que l’opposition doit contenir des conclusions et être motivée. Si elle ne satisfait pas à ces exigences ou si elle n’est pas signée, l’assureur impartit un délai convenable pour réparer le vice, avec l’avertissement qu’à défaut, l’opposition ne sera pas recevable (art. 10 al. 5 OPGA).

L’opposition est un moyen de droit permettant au destinataire d’une décision d’en obtenir le réexamen par l’autorité, avant qu’un juge ne soit éventuellement saisi. Il appartient à l’assuré de déterminer l’objet et les limites de sa contestation, l’assureur devant alors examiner l’opposition dans la mesure où sa décision est entreprise (ATF 123 V 130 consid. 3a; 119 V 350 consid. 1b; arrêt U 259/00 du 18 mars 2001 in SJ 2001 II 212). C’est pourquoi la décision de l’assureur entre partiellement en force dans la mesure où elle n’est pas attaquée en procédure d’opposition (sur certains points), et ne fait pas l’objet d’un examen d’office (ATF 119 V 350 consid. 1b). Dans le cas d’une décision portant sur deux objets, il suffit néanmoins qu’il soit possible de déduire des conclusions de l’opposant interprétées au regard des griefs formulés une volonté de contester l’un et l’autre des objets (arrêt U 27/04 du 15 mars 2005 consid. 3).

Dans un arrêt récent (9C_191/2016 du 18 mai 2016), le Tribunal fédéral a rappelé que les art. 61 let. b LPGA et 10 al. 5 OPGA, qui prévoient l’octroi d’un délai supplémentaire pour régulariser un acte de recours respectivement une opposition, visent avant tout à protéger l’assuré sans connaissances juridiques qui, dans l’ignorance des exigences formelles de recevabilité, dépose une écriture dont la motivation est inexistante ou insuffisante peu avant l’échéance du délai de recours ou de l’opposition, pour autant qu’il en ressorte clairement que son auteur entend obtenir la modification ou l’annulation d’une décision le concernant et sous réserve de situations relevant de l’abus de droit (cf. ATF 134 V 162). Le Tribunal fédéral a ensuite souligné que l’existence d’un éventuel abus de droit peut être admise plus facilement lorsque l’assuré est représenté par un mandataire professionnel, dès lors que celui-ci est censé connaître les exigences formelles d’un acte de recours ou d’une opposition et qu’il lui est également connu qu’un délai légal n’est pas prolongeable. Aussi a-t-il jugé qu’en cas de représentation, l’octroi d’un délai supplémentaire en application des dispositions précitées s’impose uniquement dans la situation où l’avocat ou le mandataire professionnellement qualifié ne dispose plus de suffisamment de temps à l’intérieur du délai légal non prolongeable du recours, respectivement de l’opposition, pour motiver ou compléter la motivation insuffisante de l’écriture initiale. Il s’agit typiquement de la situation dans laquelle un assuré, qui n’est pas en possession du dossier le concernant, mandate tardivement un avocat ou un autre mandataire professionnellement qualifié et qu’il n’est pas possible à ce dernier, en fonction de la nature de la cause, de prendre connaissance du dossier et de déposer un recours ou une opposition motivés à temps. Il n’y a alors pas de comportement abusif de la part du mandataire professionnel s’il requiert immédiatement la consultation du dossier et motive ultérieurement l’écriture initiale qu’il a déposée dans le délai légal pour sauvegarder les droits de son mandant. En dehors du cas de figure décrit, le Tribunal fédéral a retenu a contrario que les conditions de l’octroi d’un délai supplémentaire en vertu des art. 61 let. b LPGA et 10 al. 5 OPGA ne sont pas données et qu’il n’y a pas lieu de protéger la confiance que le mandataire professionnel a placée dans le fait qu’un tel délai lui a été accordé (à tort).

Dans le cas dont la Cour fédérale avait à juger (arrêt 9C_191/2016 précité), la décision administrative litigieuse avait été notifiée à son destinataire le 01.04.2014 et le délai d’opposition échoyait le 16.05.2014 en tenant compte de la suspension des délais. L’avocat mandaté par l’assuré concerné avait formé une opposition non motivée le 02.04.2014 en demandant à consulter le dossier de son mandant ainsi qu’un délai supplémentaire de 30 jours pour motiver son opposition en référence à l’art. 10 al. 5 OPGA, ce qui lui avait été accordé (jusqu’au 30.05.2014). Le dossier fut communiqué à l’avocat le 10 ou le 11 avril 2014. Celui-ci déposait une opposition motivée le dernier jour du délai prolongé (le 30.05.2014). Vu le temps encore suffisant à disposition de l’avocat pour régulariser son opposition initiale à l’intérieur de délai légal, la Cour fédérale a considéré que l’administration n’avait pas respecté la ratio legis de l’art. 10 al. 5 OPGA en octroyant un délai supplémentaire au 30.05.2014, ce que le mandataire professionnel aurait dû reconnaître sachant que le délai d’opposition de 30 jours, en tant que délai légal, n’est pas prolongeable (art. 40 al. 1 LPGA). Celui-ci ne pouvait donc se prévaloir de bonne foi de l’octroi du délai prolongé à l’appui de la recevabilité de son opposition motivée. Cette écriture, parvenue à l’administration dans le délai supplémentaire accordé mais en dehors du délai légal de 30 jours, était par conséquent irrecevable. Celle, initiale, l’était également, faute de contenir une motivation.

En l’occurrence, on se trouve dans une situation similaire.

Le délai légal de 30 jours pour former opposition à la décision de l’assurance-accidents du 23.11.2016 arrivait à échéance au plus tôt le 09.01.2017. L’assuré a mandaté un défenseur, qui revêt la qualité d’un mandataire professionnellement qualifié en matière de droit des assurances sociales, pour la défense de ses intérêts dans la procédure d’opposition. Le 02.12.2016, soit à une date encore bien éloignée de l’échéance du délai légal d’opposition, la mandataire a déposé une écriture d’opposition en prenant uniquement une conclusion relative à l’indemnité pour atteinte à l’intégrité et dépourvue de grief et de conclusion sur l’aspect de la décision concernant la rente. Après avoir sollicité et obtenu de l’assurance-accidents la communication du dossier administratif et médical le 14.12.2016, il restait à la mandataire encore 26 jours avant l’échéance du délai légal, dont 10 en dehors de la période de suspension des délais, pour compléter le cas échéant les conclusions et la motivation de son écriture d’opposition initiale. Cet intervalle de temps doit être considéré comme suffisant au sens de la jurisprudence exposée ci-dessus, surtout que les exigences de motivation ne sont pas très élevées en procédure d’opposition. Il s’ensuit que la mandataire pouvait compter sur le fait qu’un délai supplémentaire lui avait été accordé jusqu’au 28.02.2017 pour indiquer à ce moment-là les points sur lesquelles la décision de l’assurance-accidents était attaquée et les motiver, alors qu’elle aurait pu le faire dans le délai légal.

Dès lors qu’il n’est pas possible de déduire de l’opposition du 02.12.2016 que l’assuré entendait contester la décision du 23.11.2016 sur ses deux objets, faute de grief et conclusion sur la question du droit à la rente, l’assurance-accidents était fondée à considérer que ladite décision était entrée en force sur ce point.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents et réforme le jugement cantonal en rejetant le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_817/2017 consultable ici

 

 

8C_298/2018 (f) du 05.07.2018 – Demande de récusation des juges cantonaux puis juges fédéraux niés / Déni de justice nié – 29 al. 2 Cst. / Témérité des recours – Démarches procédurières – Avertissement des recourants par le Tribunal fédéral

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_298/2018 (f) du 05.07.2018

 

Consultable ici

 

Demande de récusation des juges cantonaux puis juges fédéraux niés

Déni de justice nié / 29 al. 2 Cst.

Témérité des recours – Démarches procédurières – Avertissement des recourants par le Tribunal fédéral

 

Par arrêt du 03.08.2015 (ATAS/579/2015), la Chambre des assurances sociales a déclaré irrecevable un recours formé par les époux A.___ et B.___, en tant qu’il portait sur les allocations familiales versées par Unia au Service de protection des mineurs, et l’a rejeté pour le surplus.

Les époux ont déposé un acte intitulé « demande de récusation et demande de révision » contre l’arrêt susmentionné. Ces demandes ont fait l’objet de deux arrêts cantonaux, l’un sur la question de la révision (ATAS/944/2015) et l’autre sur celle de la récusation (ATAS/328/2016).

Contre le premier arrêt, les époux ont déposé une « demande de révision avec demande de récusation », laquelle a été déclarée irrecevable par décision d’une délégation des juges de la Cour de justice en matière de récusation (ci-après: l’autorité en matière de récusation) (ATAS/438/2016).

Contre la décision précitée, les époux ont déposé une « requête de récusation provisoire », déclarée irrecevable le 15.08.2016 (ATAS/623/2016), puis une « demande de révision avec un motif qui est une demande de récusation définitive », déclarée irrecevable le 27.10.2017 (ATAS/956/2017), toutes deux par l’autorité en matière de récusation.

Les époux ont déposé deux actes contre la décision du 27.10.2017. Premièrement, ils ont formé un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral, qui l’a déclaré irrecevable par arrêt du 11.01.2018 (cause 8C_883/2017). Deuxièmement, ils ont déposé une écriture intitulée « demande en révision contenant un motif qui est une demande de récusation », laquelle a été déclarée irrecevable par décision de l’autorité en matière de récusation du 20.02.2018 (ATAS/154/2018).

Dans la décision attaquée, les juges cantonaux ont constaté que la décision du 27.10.2017 n’était pas définitive lorsque les époux en ont demandé la révision. En effet, le délai de recours au Tribunal fédéral n’était pas encore échu. Aussi, la demande de révision n’était-elle pas recevable, eu égard à l’art. 80 de la loi [du canton de Genève] sur la procédure administrative (LPA; RS/GE E 5 10), en vertu duquel la voie de la révision n’est ouverte qu’aux décisions définitives.

En outre, à supposer que la décision du 27.10.2018 fût définitive, la demande de révision n’était pas fondée. En effet, le grief soulevé par les intéressés semblait se rapporter aux développements juridiques prétendument viciés et défavorables à leur thèse. Or, statuer en défaveur d’une partie n’était pas constitutif de prévention.

S’agissant du grief de déni de justice, l’autorité cantonale n’avait pas à examiner les conclusions des époux sur le fond ni à répondre à l’ensemble de leur argumentation, dès lors qu’elle a déclaré leur écriture irrecevable en raison du caractère non définitif de la décision dont ils demandaient la révision. Partant, quoi qu’en disent les époux, on voit mal comment l’examen de leurs griefs était susceptible d’entraîner l’admission de leur demande. Par ailleurs, les premiers juges ont répondu, de manière subsidiaire, à l’argumentation des époux.

Quant aux griefs suivants, ce n’est pas parce qu’ils déposent des demandes de révision et/ou de récusation que leurs actes ne répondent à aucune condition de recevabilité. En outre, il ne suffit pas d’affirmer, de manière péremptoire, que l’art. 80 LPA ne s’appliquait pas à leur demande de révision/récusation pour démontrer une application arbitraire du droit cantonal. Quoi qu’il en soit, la cour cantonale a expliqué que le motif de prévention invoquée à l’appui de la demande de révision n’était pas admissible, ce que les époux n’ont purement et simplement pas l’intention d’accepter. En se plaignant de l’absence de détermination des magistrats qu’ils estiment prévenus, les époux perdent une nouvelle fois de vue que les demandes de récusation répondent à des conditions de recevabilité et qu’il ne suffit pas de requérir la récusation d’un magistrat pour que la procédure prévue à cet effet soit d’emblée mise en œuvre (sur le sujet cf. AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la LTF, 2 e éd. 2014, n° 13-17 ad art. 36 LTF).

Dans la présente procédure, les époux demandent également la récusation des juges Maillard, Frésard et Wirthlin « en raison d’un conflit d’intérêts avec les causes 8F_3/2018 et 8C_883/2017 ». La Cour de droit social du Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de leur expliquer que la participation à une procédure antérieure devant le Tribunal fédéral ne constitue pas à elle seule un motif de récusation (art. 34 al. 2 LTF; cf. arrêt 8F_4/2017 du 3 mars 2017 et ordonnance du 31 octobre 2016 dans la cause 8F_13/2016).

 

Le TF relève enfin que l’arrêt de la Chambre des assurances sociales du 03.08.2015 a été le point de départ de nombreuses procédures, tant au niveau cantonal qu’au niveau fédéral. Selon les juges précédents, la Cour de justice a été saisie pour la cinquième fois à la suite de l’arrêt précité et a rendu cinq décisions dans des compositions de juges différentes qui ont toutes conclu à l’irrecevabilité, respectivement au rejet des requêtes déposées par les époux. Le Tribunal fédéral s’est prononcé tout autant de fois dans ce même contexte de procédures. A plusieurs reprises, il a attiré l’attention des recourants sur le caractère abusif ou procédurier de leurs écritures (cf. ordonnances et arrêts rendus dans les causes 8F_13/2016, 8F_4/2017 et 8F_3/2018). Force est de constater que les recourants ne tirent aucune leçon des mises en garde qui leur sont adressées. Dans ces conditions, les recourants sont formellement avertis que, s’ils persistent dans leurs démarches procédurières, ils s’exposeront au prononcé d’une amende d’ordre de 2’000 francs au plus, voire de 5’000 francs en cas de récidive (cf. art. 33 al. 2 LTF).

 

Le TF rejette le recours des époux.

 

 

Arrêt 8C_298/2018 consultable ici

 

 

9C_101/2018 (f) du 21.06.2018 – Paiement des frais de procédure – 63 PA – 21 PA / Transfert de l’avance de frais depuis un compte d’une banque étrangère

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2018 (f) du 21.06.2018

 

Consultable ici

 

Paiement des frais de procédure / 63 PA – 21 PA

Transfert de l’avance de frais depuis un compte d’une banque étrangère

 

Par décision du 29.09.2017, l’office AI a rejeté une demande de prestations de l’assurée, domiciliée en France.

 

Procédure cantonale

Saisi d’un recours de l’assurée, le Tribunal administratif fédéral, Cour III, l’a déclaré irrecevable au motif que l’avance de frais requise n’avait pas été acquittée dans le délai imparti (jugement du 04.01.2018).

 

TF

Selon l’art. 63 al. 4 PA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2007, applicable par renvoi de l’art. 37 LTAF), l’autorité de recours – son président ou le juge instructeur – perçoit du recourant une avance de frais équivalant aux frais de procédure présumés; elle lui impartit pour le versement de cette créance un délai raisonnable en l’avertissant qu’à défaut de paiement elle n’entrera pas en matière. Aux termes de l’art. 21 al. 3 PA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2007, identique à celle de l’art. 48 al. 4 LTF et applicable par renvoi de l’art. 37 LTAF), le délai pour le versement d’avances est observé si, avant son échéance, la somme due est versée à La Poste Suisse ou débitée en Suisse d’un compte postal ou bancaire en faveur de l’autorité.

Le moment déterminant pour constater l’observation ou l’inobservation du délai est celui auquel la somme a été versée en faveur de l’autorité à La Poste Suisse (que ce soit au guichet d’un bureau de poste ou lors d’un transfert depuis l’étranger) ou celui auquel l’ordre de paiement en faveur de l’autorité a été débité du compte postal ou bancaire du recourant ou de son mandataire (cf. Message concernant la révision totale de l’organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4096 s.). Le fait que la somme en cause n’a pas été créditée dans le délai imparti sur le compte de la juridiction concernée n’est pas décisif au regard du droit fédéral si le montant requis a effectivement été débité du compte bancaire du recourant ou de son avocat avant l’échéance du délai prévu (cf. arrêt 1F_34/2011 du 17 janvier 2012 consid. 2.3.2 in SJ 2012 I 229).

En cas de transfert de l’avance de frais depuis un compte d’une banque étrangère, il faut non seulement vérifier que le débit dudit compte a été effectué avant l’échéance fixée par l’autorité, mais aussi que dans ce même délai, l’avance a été créditée sur le compte de l’autorité ou, à tout le moins, qu’elle est entrée dans la sphère d’influence de l’auxiliaire (banque ou La Poste Suisse) désigné par celle-ci. Dans cette dernière hypothèse (entrée temporaire du montant dans la sphère d’influence de l’auxiliaire sans que le compte de l’autorité n’ait été crédité), il est par ailleurs nécessaire d’examiner à qui, du justiciable et de sa banque étrangère ou de l’autorité et de son auxiliaire, l’échec de transfert au destinataire final est imputable. S’il est établi que la cause de l’échec se trouve auprès du justiciable et/ou de sa banque étrangère, il faudra encore vérifier si l’erreur pouvait passer pour être excusable ou si, au contraire, elle a été grossière au point qu’on ne puisse s’attendre de la banque de l’autorité qu’elle se renseigne pour tenter néanmoins d’attribuer le montant au compte du destinataire final de la transaction, à savoir l’autorité créancière (cf. arrêts 9C_94/2008 du 30 septembre 2008 consid. 6 in SVR 2009 IV n° 17 p. 45; 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 6.3.3-6.3.6 et les références in RDAF 2013 II 186).

 

In casu, le délai de paiement est arrivé à échéance le 06.12.2017. L’assurée soutient avoir effectué le versement le 24.11.2017 et produit un ordre de paiement l’attestant. Sur demande du Tribunal fédéral, PostFinance a expliqué que le virement de 800 fr. avait été effectué le 24.11.2017 mais que le montant avait été rejeté dans la mesure où le numéro de compte (30-217609-6) ne correspondait pas au titulaire mentionné dans l’ordre de paiement (SwissPost au lieu de Bundesverwaltungsgericht). Comme l’a ensuite confirmé le Tribunal administratif fédéral, le n° IBAN indiqué dans l’avis d’opéré de la banque de l’assurée était correct. Elle avait en revanche indiqué La Poste suisse comme destinataire du virement.

La seule erreur commise par l’assurée et/ou par sa banque est excusable. En effet, on relèvera à cet égard que le libellé de la facture pouvait lui-même engendrer une certaine confusion dès lors qu’il mentionne à la fois un destinataire ainsi qu’une banque destinataire. On ajoutera que le n° IBAN désignait clairement l’autorité judiciaire précédente et qu’étant donné l’important trafic de paiement en faveur de cette autorité, PostFinance pouvait ou devait déjà se douter du destinataire réel du versement (cf. arrêt 9C_636/2009 du 26 novembre 2009 consid. 5). De surcroît, dans la mesure où le motif de paiement (n° de la facture) était indiqué, elle pouvait très aisément vérifier et exclure qu’elle-même était le destinataire du paiement contrairement au contenu de l’avis d’opéré.

 

Le TF admet le recours de l’assuré et annule le jugement du TAF.

 

 

Arrêt 9C_101/2018 consultable ici

 

 

9C_232/2018 (f) du 08.06.2018 – Garanties de procédure judiciaire – Composition irrégulière du tribunal – 30 al. 1 Cst. / Composition du Tribunal arbitral – 89 LAMal – 42 LaLAMal/GE

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_232/2018 (f) du 08.06.2018

 

Consultable ici

 

Garanties de procédure judiciaire – Composition irrégulière du tribunal / 30 al. 1 Cst.

Composition du Tribunal arbitral / 89 LAMal – 42 LaLAMal/GE

 

Par arrêt du 12.12.2017 (9C_778/2016), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours en matière de droit public formé par A.__ contre le jugement du Tribunal arbitral des assurances de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal arbitral) du 16.09.2016. Il a réformé le jugement en ce sens que A.__, en sa qualité de prestataire de soins, était condamnée à restituer, pour l’année 2013, la somme de 96’930 fr. à différentes caisses-maladie. Il a en outre renvoyé la cause à l’autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure antérieure.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/88/2018 – consultable ici)

Statuant le 06.02.2018, la Présidente suppléante du Tribunal arbitral a mis les frais du Tribunal et l’émolument à la charge, d’une part, de A.__ à hauteur de 5’736 fr. 80 et, d’autre part, à la charge des caisses-maladie, prises conjointement et solidairement, à hauteur de 12’210 fr. 45; elle a par ailleurs compensé les dépens.

 

TF

Selon l’art. 30 al. 1 Cst., toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce qu’elle soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Autrement dit, cette disposition confère au justiciable le droit de voir les litiges auxquels il est partie soumis à un tribunal régulièrement constitué d’après une organisation judiciaire et une procédure déterminées par un texte légal (ATF 131 I 31 consid. 2.1.2.1 p. 34; 129 V 335 consid. 1.3.1 p. 338 et les références).

Dans le domaine de l’assurance-maladie, l’art. 89 al. 1 et 4 première et deuxième phrases LAMal, prévoit que le Tribunal arbitral, compétent pour les litiges entre assureurs et fournisseurs de prestations et désigné par les cantons, se compose d’un président neutre et de représentants en nombre égal des assureurs d’une part, et des fournisseurs de prestations concernés, d’autre part. Selon la jurisprudence, la composition paritaire du Tribunal arbitral sous la présidence d’un membre neutre, prévue à l’art. 89 al. 4 LAMal, est une caractéristique essentielle de la procédure devant le Tribunal arbitral et doit être suivie par les cantons (art. 49 al. 1 Cst.). Le caractère paritaire doit être respecté par le tribunal arbitral pour toutes les décisions d’ordre matériel, y compris lorsqu’il examine l’entrée en matière sur une demande, statue sur celle-ci et la déclare irrecevable à défaut de compétence en raison de la matière; une décision rendue par un juge unique peut tout au plus être envisagée en cas de retrait de recours ou de transaction (arrêt [du Tribunal fédéral des assurances] K 139/04 du 29 mars 2006 consid. 3.3.1 non publié in ATF 132 V 303; arrêt 9C_149/2007 du 4 juin 2007 consid. 2.2.2).

L’art. 42 LaLAMal (loi [de la République et canton de Genève] du 29 mai 1997 d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie [LaLAMal; RSG J 3 05]) sur la composition du Tribunal arbitral, prévoit qu’il siège à trois juges, y compris le président; le droit cantonal ne prévoit aucune exception (cf. art. 39 à 46 LaLAMal).

La décision entreprise a été rendue par un juge unique. Comme l’admet du reste le Tribunal arbitral, elle a été prononcée dans une composition irrégulière. En effet, l’art. 42 LaLAMal prévoit que le Tribunal arbitral statue dans une composition à trois juges, ce qui est conforme au nombre minimum prévu par l’art. 89 al. 4 LAMal. Le droit cantonal ne prévoit par ailleurs aucune exception quant à une composition inférieure à trois juges. De plus, le jugement attaqué porte sur les frais et dépens et a été prononcé accessoirement à la décision sur le fond; il ne s’agit donc pas d’une décision purement formelle au sens de la jurisprudence rappelée ci-avant. Partant, le Tribunal arbitral aurait dû statuer dans une composition à trois juges. Le grief est dès lors bien fondé.

 

Compte tenu des circonstances, il n’est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 deuxième phrase LTF). Le canton de Genève versera à A.__ une indemnité de dépens (art. 66 al. 3 en relation avec l’art. 68 al. 4 LTF). Les intimées, qui s’en sont remis à justice dans une brève écriture, n’ont pas droit à des dépens.

 

Le TF admet le recours de A.__, annule le jugement du Tribunal arbitral des assurances de la République et canton de Genève et renvoie la cause à cette autorité pour nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 9C_232/2018 consultable ici

 

 

8C_283/2018 (f) du 14.06.2018 – Computation des délais / Notification de l’acte sujet à recours durant les féries judiciaires – 38 LPGA – 44 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_283/2018 (f) du 14.06.2018

 

Consultable ici

 

Computation des délais

Notification de l’acte sujet à recours durant les féries judiciaires / 38 LPGA – 44 LTF

 

Par décision du 24.08.2016, confirmée sur opposition le 28.07.2017, l’assurance-accidents a supprimé le droit de l’assurée à des prestations de l’assurance-accidents obligatoire à compter du 01.04.2014.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/153/2018 – consultable ici)

Par jugement du 21.02.2018, le tribunal cantonal a déclaré irrecevable le recours contre la décision sur opposition pour cause de tardiveté.

 

TF

La cour cantonale a constaté que le délai de recours de 30 jours a commencé à courir le 16.08.2017, soit le premier jour suivant la suspension des délais du 15 juillet au 15 août inclusivement, selon l’art. 38 al. 4 let. b LPGA, et qu’il a expiré le 14.09.2017. Aussi a-t-elle retenu qu’interjeté le 15.09.2017, le recours contre la décision sur opposition du 28.07.2017 2017 était irrecevable pour cause de tardiveté.

L’assurée conteste ce point de vue en faisant valoir que le délai de recours de 30 jours a commencé à courir le 17.08.2017 seulement, soit le deuxième jour suivant la suspension des délais. Elle se réfère pour cela à une jurisprudence du Tribunal fédéral concernant l’art. 32 al. 1 de l’ancienne loi fédérale d’organisation judiciaire (OJ), abrogée lors de l’entrée en vigueur, le 01.01.2007, de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF). Selon cette jurisprudence, lorsque la notification de l’acte sujet à recours avait lieu durant les féries judiciaires, le premier jour suivant celles-ci n’était pas compté dans la computation du délai de recours (ATF 122 V 60 consid. 1).

La jurisprudence invoquée par l’assurée est toutefois devenue obsolète à la suite de l’introduction de l’art. 44 al. 1 LTF (cf. JEAN-MAURICE FRÉSARD, Commentaire de la LTF, 2 e éd. 2014, n. 2 ad art. 44 LTF et n. 6 ad art. 46 LTF). Dans un arrêt ATF 131 V 314 consid. 4.6 qui concerne l’art. 38 al. 4 LPGA, le Tribunal fédéral a jugé en effet que lorsque l’événement qui fait courir le délai survient durant la suspension, le délai commence à courir le premier jour qui suit la fin de celle-ci.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_283/2018 consultable ici

 

 

6B_252/2017 (d) du 20.06.2018 – Responsabilité du détenteur du véhicule pour les amendes d’ordre qui lui sont infligées lorsque le conducteur effectif est inconnu

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_252/2017 (d) du 20.06.2018

 

Communiqué de presse du TF du 20.06.2018 consultable ici

 

En matière de circulation routière, il n’est pas contraire au principe de la présomption d’innocence d’infliger les amendes d’ordre au détenteur mentionné dans le permis de circulation du véhicule, lorsque le conducteur est inconnu. Toutefois, à défaut d’être suffisamment précise, la réglementation en la matière, prévue à l’article 6 de la Loi sur les amendes d’ordre (LAO), ne peut pas s’appliquer lorsque la détentrice du véhicule est une entreprise.

L’article 6 LAO prévoit que les amendes d’ordre (jusqu’à 300 francs) peuvent être infligées, si le conducteur est inconnu, au détenteur du véhicule mentionné dans le permis de circulation. Si le détenteur indique le nom et l’adresse du conducteur, ce dernier se voit remettre l’amende d’ordre. En revanche, si le conducteur du véhicule ne peut être déterminé sans efforts disproportionnés, l’amende doit être payée par le détenteur, sauf s’il établit de manière crédible que son véhicule a été utilisé contre sa volonté et qu’il n’a pu l’empêcher, bien qu’ayant fait preuve de la diligence nécessaire.

Dans le cas d’espèce, en 2014, le conducteur d’un véhicule d’entreprise a dépassé de 14 km/h la vitesse maximale autorisée à l’intérieur d’une localité. Se fondant sur l’article 6 LAO, la police cantonale obwaldienne a alors exigé de la société détentrice du véhicule le paiement d’une amende de 250 francs. Après que la société a indiqué qu’elle ne savait pas qui avait conduit le véhicule, le Ministère public l’a condamnée au paiement de l’amende par ordonnance pénale. Les autorités judiciaires cantonales ont confirmé la décision.

Lors de sa séance publique de mercredi, le Tribunal fédéral admet partiellement le recours formé par la société condamnée. Il juge que l’article 6 LAO n’est pas critiquable sous l’angle de la présomption d’innocence, qui est ancrée tant dans la Constitution fédérale (article 32 Cst.) que dans la Convention européenne des droits de l’homme (article 6 CEDH). Si la présomption d’innocence inclut notamment le « droit au silence », ce droit ne vaut toutefois pas de manière absolue. Ainsi, selon la jurisprudence récente du Tribunal fédéral et de la Cour européenne des droits de l’homme, le détenteur et le conducteur d’un véhicule motorisé doivent savoir, par leur adhésion à la législation sur la circulation routière et par l’obtention du permis de conduire, qu’ils sont tenus de respecter diverses obligations. Parmi celles-ci figure notamment un devoir de renseignement à l’égard des autorités. Ainsi, si le détenteur et le conducteur ne peuvent pas être contraints de fournir des renseignements, ils doivent néanmoins supporter les conséquences d’un refus de collaborer.

L’application de l’article 6 LAO à l’égard d’entreprises détentrices de véhicules consacre toutefois une violation du principe de la légalité, respectivement de l’adage « nulla poena sine lege » (« pas de peine sans loi »). Les dispositions générales du Code pénal (CP) sont en effet applicables à la Loi sur la circulation routière (LCR), pour autant que cette dernière ne prévoie pas de prescriptions contraires. Or, le Code pénal exclut la responsabilité pénale de l’entreprise lorsque, comme en l’espèce, l’infraction constitue une simple contravention. Dès lors que l’article 6 LAO ne se réfère pas expressément à la responsabilité de l’entreprise en qualité de détentrice du véhicule, cette disposition ne peut pas s’appliquer aux sociétés, à défaut d’une base légale suffisamment précise.

 

 

Arrêt 6B_252/2017 non encore publié sur le site du TF

Communiqué de presse du TF du 20.06.2018 consultable ici

 

 

Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) : moins d’affaires de moindre importance, une protection juridictionnelle préservée

Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) : moins d’affaires de moindre importance, une protection juridictionnelle préservée

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral de la justice (OFJ) du 15.06.2018 consultable ici

 

Lors de sa séance du 15 juin 2018, le Conseil fédéral a adopté un message concernant la révision de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF). Il propose que le Tribunal fédéral puisse être saisi d’un recours dans tous les cas particulièrement importants. En contrepartie, il sera déchargé d’affaires simples qui ne nécessitent pas d’être examinées par la juridiction suprême de la Confédération. Il pourra de la sorte utiliser ses ressources de manière plus ciblée, sans restriction de la protection juridictionnelle.

Aujourd’hui, le recours au Tribunal fédéral est exclu dans certains domaines et en dessous d’une certaine valeur litigieuse. En 2013, dans son rapport d’évaluation de la réforme de 2007 de l’organisation judiciaire, le Conseil fédéral était parvenu à la conclusion qu’il fallait modifier la liste d’exceptions. Celle-ci, qui détermine les domaines dans lesquels les instances précédentes statuent définitivement, présente deux défauts : d’un côté, toutes les questions juridiques de principe ne peuvent pas être portées devant le Tribunal fédéral ; de l’autre, celui-ci est parfois saisi de cas de peu d’importance.

 

Maintien du recours constitutionnel subsidiaire

Afin de remédier à cette situation, le Conseil fédéral propose que le recours ne soit plus totalement exclu dans les domaines couverts par la liste d’exceptions et en dessous des valeurs litigieuses limites, mais que le Tribunal fédéral puisse trancher les questions juridiques de principe et examiner les cas qui, pour d’autres motifs, sont particulièrement importants. A l’inverse, il entend décharger le Tribunal fédéral des cas mineurs. Ces mesures permettront de rééquilibrer la charge de travail de la juridiction suprême de la Confédération.

Le Conseil fédéral souhaite maintenir le recours constitutionnel subsidiaire. Ce recours permet à une personne de saisir le Tribunal fédéral en invoquant une violation de ses droits constitutionnels par une décision cantonale, même si cette décision relève de la liste d’exceptions de la LTF ou si la valeur litigieuse n’est pas atteinte. Il revêt une importance particulière dans des domaines comme les naturalisations, les marchés publics ou les rapports de travail de droit public. En le maintenant, le Conseil fédéral garantit l’accès au Tribunal fédéral même s’il ne s’agit pas d’une question juridique de principe.

 

Plus de transparence dans les motifs de l’arrêt

Le projet prévoit la prise en compte d’avis minoritaires dans les motifs de l’arrêt. Les juges dont la proposition a été écartée pourront faire adjoindre à l’arrêt un avis minoritaire motivé. Le Conseil fédéral assure de la sorte une plus grande transparence.

 

Harmonisation des motifs de recours dans tous les domaines des assurances sociales

Actuellement, toute constatation incomplète ou erronée des faits dans une décision portant sur l’octroi ou le refus de prestations en espèces de l’assurance-accidents ou de l’assurance militaire peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF). Il en va autrement dans les autres branches des assurances sociales où la constatation des faits ne peut être contestée au Tribunal fédéral que s’ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit et si la correction du vice est susceptible d’influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). L’exception concernant les prestations en espèces de l’assurance militaire et de l’assurance-accidents ne se justifie plus, ce d’autant plus qu’elle a été supprimée en matière d’assurance-invalidité. Dans l’intérêt d’alléger la charge du Tribunal fédéral, il y a lieu d’abroger les art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF dans leur teneur actuelle.

 

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral de la justice (OFJ) du 15.06.2018 consultable ici

Message relatif à la modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) (FF 2018 4713) consultable ici

Projet de modification de la LTF (FF 2018 4769) consultable ici

Communiqué de presse du Tribunal fédéral du 15.06.2018 (Le Tribunal fédéral accueille favorablement le message sur la révision de la Loi sur le Tribunal fédéral sous réserve du recours constitutionnel subsidiaire) consultable ici