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5A_701/2017 (f) du 14.05.2018 – destiné à la publication – « Amitié sur Facebook » avec une partie à la procédure : le juge ne doit pas se récuser

Arrêt du Tribunal fédéral 5A_701/2017 (f) du 14.05.2018, destiné à la publication

 

Consultable ici : https://bit.ly/2Ha5DVK

Communiqué de presse du TF du 01.06.2018 consultable ici : https://bit.ly/2HesuQo

 

« Amitié sur Facebook » avec une partie à la procédure : le juge ne doit pas se récuser

 

Le seul fait qu’un juge soit « ami » sur Facebook avec une partie à la procédure ne constitue pas un motif de récusation. En l’absence d’autres indices, on ne peut en tirer l’existence d’un lien d’amitié propre à fonder l’apparence de prévention d’un juge. Le Tribunal fédéral rejette le recours d’une mère valaisanne.

En 2016, sur requête du père, l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte (APEA) d’une commune valaisanne avait, entre autres mesures, institué l’autorité parentale conjointe sur un enfant né hors mariage. La mère requit ultérieurement l’annulation de la décision de l’APEA, motif pris que son président aurait été « ami » sur Facebook avec le père de l’enfant. Le Tribunal cantonal valaisan rejeta cette requête.

Le Tribunal fédéral rejette le recours de la mère. Selon la Constitution fédérale et la Convention européenne des droits de l’homme, toute personne a droit à ce que sa cause soit tranchée par un juge impartial et exempt de préjugé ou de parti pris. Pour qu’un juge doive se récuser, il n’est pas nécessaire qu’il soit effectivement prévenu. Il suffit que, selon une appréciation objective, les circonstances donnent l’apparence d’une prévention ou fassent redouter une activité partiale. Pour des relations amicales, une certaine proximité allant au-delà du fait de se connaître ou de se tutoyer est requise (consid. 4.4). Une « amitié » sur Facebook ne renvoie pas encore à des relations d’amitié au sens traditionnel. Pour fonder une « amitié Facebook », un sentiment réciproque d’affection ou de sympathie n’est pas forcément nécessaire. Certes, le cercle des « amis Facebook » peut aussi comprendre des personnes avec lesquelles on entretient régulièrement des relations dans la vie réelle ; peuvent toutefois également en faire partie des gens que l’on qualifierait uniquement de simples connaissances ou des individus avec lesquels on ne partage qu’un intérêt commun pour un domaine particulier et uniquement sur le réseau social. Selon des études récentes, à partir de plus de 150 « amis Facebook », il faut par ailleurs aussi compter avec des personnes avec lesquelles on n’entretient aucune relation ou que l’on ne connaît même pas (consid. 4.5). Par conséquent, en l’absence d’autres indices, une « amitié Facebook » ne permet pas à elle seule de conclure à l’existence d’une relation d’amitié propre à fonder une apparence de prévention. De telles circonstances supplémentaires font défaut dans le cas concret (consid. 4.6).

 

 

Arrêt 5A_701/2017 consultable ici : https://bit.ly/2Ha5DVK

Communiqué de presse du TF du 01.06.2018 consultable ici : https://bit.ly/2HesuQo

 

 

8C_538/2017 (f) du 30.11.2017 – Opposition tardive – Restitution du délai – Empêchement non fautif nié – 41 LPGA / Preuve de la capacité de discernement – 16 CC

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_538/2017 (f) du 30.11.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2DJtIBb

 

Opposition tardive – Restitution du délai – Empêchement non fautif nié / 41 LPGA

Preuve de la capacité de discernement / 16 CC

 

Par décision du 02.12.2016, l’assurance-accidents a supprimé, avec effet au 01.01.2017, les prestations qu’elle allouait à l’assuré pour les suites d’un accident survenu le 17.07.2015.

L’envoi postal recommandé de la décision n’ayant pas été retiré à l’issue du délai de garde, l’assurance-accidents a envoyé le 06.01.2017 une deuxième notification sous pli simple en informant l’assuré que cet envoi ne modifiait pas le délai de recours légal et qu’une éventuelle opposition devait donc être formée dans les 30 jours à compter de la date de notification du premier envoi.

Le 06.02.2017, l’assuré s’est opposé oralement à la décision. Il a fait valoir que depuis l’accident il n’arrivait plus à gérer son quotidien et qu’il avait par ailleurs perdu son trousseau de clés, de sorte qu’il n’avait que récemment eu accès à sa boîte aux lettres et pris connaissance de la décision litigieuse.

Par décision sur opposition du 10.02.2017, l’assureur-accidents a déclaré l’opposition irrecevable pour cause de tardiveté.

Par courriel du 11.02.2017, la médecin traitant, spécialiste en médecine interne, a fait parvenir à l’assureur-accidents un avis médical, daté du 10.02.2017, dont il ressort que l’assuré avait du mal à gérer seul ses affaires. Il souffrait de multiples troubles depuis son accident et les personnes qui l’assistaient habituellement n’avaient pas pu lui prêter leur concours pour contester la décision dès lors qu’elles étaient absentes durant le délai d’opposition.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/535/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2IDiySa)

La juridiction cantonale a retenu qu’en raison d’une capacité de discernement en partie altérée au moment de la notification de la décision, l’assuré avait été empêché, sans faute de sa part, de former opposition contre cette décision ou de charger un tiers d’agir à sa place. Elle s’est fondée sur les observations du médecin traitant du 10.02.2017, dont il ressortait qu’avant son accident l’assuré était en bonne forme habituelle et qu’il souffrait désormais de céphalées, vertiges, troubles de la concentration et du comportement ainsi que d’hypersomnie. Il se trouvait en outre « actuellement » en grande difficulté pour gérer ses affaires car son épouse – qui l’assistait habituellement – était en suivi médical en Espagne depuis la fin du mois de décembre 2016 et le couple d’amis qui l’aidait également dans ses démarches administratives était absent pour une période de deux à trois mois. Le tribunal cantonal a considéré qu’étant en présence d’un empêchement non fautif au sens de l’art. 41 LPGA, le délai d’opposition devait être restitué à l’assuré.

Par jugement du 26.06.2017, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Restitution du délai – Empêchement non fautif – 41 LPGA

Par maladie mentale (en tant que cause pouvant altérer la capacité d’agir raisonnablement selon l’art. 16 CC) il faut entendre des troubles psychiques durables et caractérisés, ayant sur le comportement extérieur du sujet des conséquences évidentes, qualitativement et profondément déconcertantes pour un profane averti (ATF 117 II 231 consid. 2a in fine p. 233/234; voir aussi l’arrêt 9C_209/2012 du 26 juin 2012 consid. 3.3). La preuve de la capacité de discernement pouvant se révéler difficile à apporter, la pratique considère que celle-ci doit en principe être présumée, sur la base de l’expérience générale de la vie. Cette présomption n’existe toutefois que s’il n’y a pas de raison générale de mettre en doute la capacité de discernement de la personne concernée, ce qui est le cas des adultes qui ne sont pas atteints de maladie mentale ou de faiblesse d’esprit, à savoir des états anormaux suffisamment graves pour altérer effectivement la faculté d’agir raisonnablement en relation avec l’acte considéré. Pour ces derniers, la présomption est inversée et va dans le sens d’une incapacité de discernement (ATF 134 II 235 consid. 4.3.3 p. 240 et les références).

 

Il convient d’admettre que les rapports médicaux présents au dossier – dont aucun ne fait état d’une incapacité de discernement – ne décrivent pas des troubles qui, par leur gravité, étaient susceptibles d’empêcher l’assuré de contester la décision pendant toute la durée du délai d’opposition de 30 jours.

De plus, l’assuré a été en mesure, durant ce même délai, de requérir par téléphone la transmission de ses trois dernières fiches de salaire à l’assurance-accidents. On peut donc admettre qu’il était capable de procéder à des actes de gestion administrative sans être empêché par son état de santé déficient (cf. arrêt 5A_896/2012 du 10 janvier 2013 consid. 3.4).

Au demeurant, après avoir pris connaissance de la décision litigieuse, il s’est rendu dans les locaux de l’assurance-accidents afin de s’y opposer. Cette circonstance tend à démontrer qu’il était capable de saisir la portée d’une telle décision, qu’il avait compris la nécessité de s’y opposer et était conscient qu’il devait agir dans un délai de 30 jours, la lettre du 06.01.2017 ayant probablement été reçue le lendemain, au plus tôt. Comme l’a indiqué l’assureur-accidents, cette communication ne faisait toutefois pas partir un nouveau délai d’opposition (cf. arrêt 5A_332/2016 du 17 août 2016 consid. 2.2.3 et les références citées).

Contrairement à ce qu’a retenu la juridiction cantonale, on ne peut donc pas déduire du rapport médical du médecin traitant que les deux interventions auprès de l’assurance-accidents ne constituaient que des manifestations sporadiques de lucidité. Enfin, et en tout état de cause, l’état de santé de l’assuré ne l’empêchait pas de recourir à temps aux services d’un tiers. L’allégation selon laquelle les proches qui l’assistaient habituellement dans ses démarches administratives étaient absents durant toute la durée du délai d’opposition ne repose sur aucun élément de preuve concret.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, annule le jugement cantonal et confirme la décision sur opposition.

 

 

Arrêt 8C_538/2017 consultable ici : http://bit.ly/2DJtIBb

 

 

Code de procédure civile (Amélioration de la praticabilité et de l’applicabilité) – Procédure de consultation

Code de procédure civile (Amélioration de la praticabilité et de l’applicabilité) – Procédure de consultation

 

Rapport explicatif relatif à la modification du code de procédure civile du 02.03.2018 consultable ici : http://bit.ly/2oInGw4

 

Le 02.03.2018, le Conseil fédéral a chargé le DFJP de réaliser une procédure de consultation relative à la modification du code de procédure civile (amélioration de la praticabilité et de l’applicabilité) auprès des cantons, des partis politiques, des associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne, des associations faîtières de l’économie qui œuvrent au niveau national et des autres milieux intéressés. Le délai de consultation dure jusqu’au 11.06.2018.

Le projet met en œuvre la motion 14.4008 (Adaptation du Code de procédure civile) ainsi que d’autres interventions parlementaires et contient les modifications qui s’imposent sur la base d’un examen des expériences faites par la pratique. Il s’agit notamment d’une adaptation des dispositions régissant les frais, afin de faciliter l’accès à la justice. Le projet vise en outre à simplifier la coordination des procédures, à étendre le champ d’application de la procédure de conciliation et à clarifier ou préciser d’autres points de la loi. D’autre part, une nouvelle réglementation en matière d’action des organisations et la création d’une procédure de transaction de groupe permettront de faciliter la mise en œuvre collective de droits découlant de dommages collectifs et combleront ainsi une lacune dans la protection juridique.

 

Condensé

Le code de procédure civile est en vigueur depuis sept ans. De façon générale, du point de vue de tous les cercles professionnels concernés et de toutes les parties prenantes, il a démontré son adéquation à la pratique. La présente révision vise à accroître encore son efficacité par des modifications ciblées. Il s’agit notamment d’une adaptation des dispositions régissant les frais, qui facilitera l’accès à la justice. L’avant-projet vise en outre à simplifier la coordination des procédures, à étendre le champ d’application de la procédure de conciliation et à clarifier ou préciser d’autres points de la loi. D’autre part, une nouvelle réglementation en matière d’action des organisations et la création d’une procédure de transaction de groupe faciliteront la mise en œuvre collective de droits découlant de dommages collectifs ou de dommages dispersés et combleront ainsi une lacune dans la protection juridique. Le présent projet de révision, qui réalise plusieurs mandats parlementaires, renforcera les moyens de mise en œuvre du droit privé.

 

Contexte

L’entrée en vigueur, le 1er janvier 2011, du code de procédure civile (CPC) a permis d’unifier et de codifier la procédure civile au niveau national. Après sept ans, le CPC fait maintenant partie du quotidien des tribunaux, des avocats et des justiciables. Par la motion 14.4008, le Parlement a chargé le Conseil fédéral d’examiner son adéquation à la pratique et de présenter un projet de loi sur ce point. D’autres interventions parlementaires ont également demandé des modifications du CPC. À la suite du rapport du Conseil fédéral de juillet 2013 sur l’exercice collectif des droits, la motion 13.3931 a demandé l’élaboration d’un projet qui vise à développer les instruments existants et à créer de nouveaux instruments d’exercice collectif des droits, permettant de faire valoir conjointement des dommages dispersés et collectifs.

 

Contenu du projet

L’ensemble des cercles professionnels et des parties prenantes consultés ont estimé que, de façon générale, le CPC avait fait ses preuves dans la pratique. Les faiblesses ponctuelles constatées doivent toutefois être éliminées par des adaptations ciblées, afin d’améliorer encore son applicabilité. Dans ce cadre, ses principes établis doivent être préservés, tout comme l’autonomie cantonale en matière d’organisation de la justice.

 

Suppression des obstacles financiers

L’avant-projet prévoit une division par deux des avances de frais et une adaptation des règles concernant la répartition des frais, pour répondre à l’une des critiques principales à ce jour tout en préservant la souveraineté cantonale en matière de tarif des frais.

 

Renforcement de la mise en œuvre collective des droits

En exécution d’une intervention parlementaire et de propositions antérieures du Conseil fédéral, l’avant-projet élargit les possibilités d’exercice collectif des droits, afin de combler une lacune en matière de protection juridique. Dans ce but, il instaure une procédure générale de transaction de groupe permettant une résolution collective et consensuelle des litiges. Il adapte par ailleurs l’action des organisations que l’on connaît aujourd’hui, l’étendant aux prétentions en réparation des dommages collectifs et, dans une certaine mesure, des dommages dispersés. Les actions des organisations des lois spéciales seront harmonisées. Parallèlement, l’exercice collectif des droits par l’intermédiaire d’actions individuelles sera facilité et donc encouragé.

 

Simplification de la coordination des procédures

L’avant-projet facilite la coordination des prétentions et des décisions, via l’adaptation des dispositions relatives à la consorité, à l’appel en cause, au cumul d’actions et à la demande reconventionnelle. Il ne sera plus obligatoire que les prétentions soient soumises au même type de procédure, ce qui facilitera l’exercice coordonné des droits dans de nombreux cas.

 

Renforcement de la procédure de conciliation

La procédure de conciliation, qui a démontré son efficacité, sera renforcée sur certains points. Elle s’appliquera à davantage de litiges et l’autorité de conciliation pourra soumettre une proposition de jugement dans de plus nombreux cas.

 

Autres adaptations ponctuelles

D’autres adaptations ponctuelles permettront d’améliorer la sécurité et la clarté du droit et d’accroître l’applicabilité du CPC. Il s’agira notamment de codifier les apports jurisprudentiels importants du Tribunal fédéral. Certaines autres modifications visent à combler des lacunes ou à remédier à des défauts constatés. Le traitement des actes adressés à un tribunal ou à une autorité incompétente sera plus favorable au justiciable.

 

L’avant-projet institue par ailleurs un droit pour les juristes d’entreprise de refuser de collaborer, suite à une intervention parlementaire en ce sens. Enfin, la Confédération et les cantons devront établir une statistique nationale dans le domaine de la justice civile.

 

 

 

Rapport explicatif relatif à la modification du code de procédure civile du 02.03.2018 consultable ici : http://bit.ly/2oInGw4

Projet de modification du CPC consultable ici : http://bit.ly/2FmdQtp

 

 

L’accès aux tribunaux devrait être facilité

L’accès aux tribunaux devrait être facilité

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.12.2017 consultable ici : http://bit.ly/2jT9mOI

 

L’argent ne devrait plus bloquer l’accès aux tribunaux. Les sénateurs ont tacitement accepté mercredi une motion du conseiller aux Etats Claude Janiak (PS/BL) visant à réduire les avances de frais judiciaires.

 

Les frais de procédure sont devenus tels que seules les personnes aisées peuvent recourir à la justice. La classe moyenne et les PME ne peuvent plus se lancer dans des procès en matière de construction, de responsabilité civile, de succession ou de loyer, fait valoir le socialiste.

Ce système n’écarte pas les procédures mal fondées, mais plutôt les personnes n’ayant pas les moyens de payer les avances. L’assistance judiciaire gratuite ne suffit pas car elle n’est accordée qu’aux personnes ne disposant pas, ou tout juste, du minimum vital. La classe moyenne n’y a pas accès.

Le bénéficiaire de cette assistance court quand même un risque financier: même s’il est dispensé des frais judiciaires et des honoraires d’avocat, il doit malgré tout payer les dépens à la partie qui obtient gain de cause.

Le Conseil national doit encore se prononcer. En cas de « oui », le Conseil fédéral, qui est d’accord avec le texte, devra réduire les avances de frais judiciaires lors de son prochain examen du code de procédure civile.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 13.12.2017 consultable ici : http://bit.ly/2jT9mOI

 

 

8C_37/2016 (d) du 08.07.2016 – «Reformatio in peius»: en cas de décision de renvoi non conforme, le recours peut être retiré également a posteriori

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2016 (d) du 08.07.2016

 

Arrêt du TF consultable ici : http://bit.ly/2wPksJ2

 

 

Un Tribunal cantonal est tenu, avant de rendre une décision de renvoi, d’accorder la possibilité de retrait du recours lorsque la décision de renvoi vise à annuler une décision d’octroi de rente (menace de «reformatio in peius»). Si le Tribunal omet de donner à la partie recourante l’occasion de retirer son recours et que celle-ci se retrouve au final moins bien lotie, elle peut retirer son recours initial également a posteriori.

 

Nous renvoyons le lecteur au résumé de l’arrêt fait par Inclusion Handicap, paru in Droit et Handicap 9/2017, consultable ici : http://bit.ly/2yiuQwO

 

 

 

9C_231/2017 (f) du 31.05.2017 – Revenu d’invalide – Abattement sur le salaire statistique (ESS) – 16 LPGA / Pouvoir d’appréciation du Tribunal cantonal

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_231/2017 (f) du 31.05.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eFP7VC

 

Revenu d’invalide – Abattement sur le salaire statistique (ESS) / 16 LPGA

Pouvoir d’appréciation du Tribunal cantonal

 

Assurée, mère de trois enfants (nés en 2000, 2002 et 2007), a travaillé comme nettoyeuse à temps partiel (40%) du 09.05.2000 au 14.02.2014. Elle a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 22.04.2015, précisant qu’elle avait débuté une formation d’architecte d’intérieur le 26.02.2013.

Le médecin du service médical régional (SMR) de l’assurance-invalidité a diagnostiqué – avec répercussion sur la capacité de travail – un lupus (avec atteintes articulaire, musculaire et hématologique) et un syndrome de Sjögren secondaire ; l’assurée pouvait exercer une activité professionnelle adaptée à 50% dès août 2015.

L’instruction a été complétée par une enquête économique sur le ménage, laquelle a mis en évidence un empêchement de 25% dans l’accomplissement des travaux habituels dans le ménage. En application de la méthode mixte de l’évaluation de l’invalidité, l’office AI a rejeté la demande de prestations, au motif que le degré d’invalidité (15%) était insuffisant pour donner droit à des prestations. Pour la part « active », l’office AI a tenu compte d’un abattement de 10% sur le salaire résultant de l’Enquête de l’Office fédéral de la statistique sur la structure des salaires (ESS), en raison de la nature des limitations fonctionnelles présentées par l’assurée (difficultés aux tâches manuelles, difficultés de déplacement, diminution de la vitesse de travail, fatigabilité et diminution de la concentration).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/125/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2w2q7Kz)

Par jugement du 20.02.2017, admission du recours par le tribunal cantonal en application de la méthode ordinaire d’évaluation de l’invalidité, octroyant à l’assurée une demi-rente d’invalidité dès le 01.10.2015. S’agissant de l’abattement sur le salaire statistique, les juges cantonaux ont considéré que la déduction opérée par l’administration (10%) ne tenait pas suffisamment compte de l’importance des limitations et qu’une déduction de 15% apparaissait mieux appropriée à la situation, sans pour autant prendre en compte des facteurs de réduction supplémentaires

 

TF

L’office recourant ne conteste plus devant le Tribunal fédéral le fait que l’intimée aurait vraisemblablement exercé une activité professionnelle à plein temps sans atteinte à la santé.

Abattement sur le salaire statistique

Il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d’une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb p. 323). La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent par conséquent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité, autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79).

L’étendue de l’abattement du salaire statistique dans un cas concret constitue une question typique relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit, soit a commis un excès positif ou négatif de son pouvoir d’appréciation ou a abusé de celui-ci, notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 72).

Selon le TF, la juridiction cantonale pouvait sans arbitraire et sans excéder son pouvoir d’appréciation conférer un poids supplémentaire aux limitations fonctionnelles retenues par l’office AI. Dans ces conditions, l’appréciation globale qui a conduit l’autorité précédente à retenir un abattement de 15% n’apparaît pas comme le résultat de l’exercice d’un pouvoir d’appréciation contraire au droit.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_231/2017 consultable ici : http://bit.ly/2eFP7VC

 

 

9C_155/2017 (f) du 01.06.2017 – Nouvelle contestation après jugement de renvoi / 107 al. 2 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_155/2017 (f) du 01.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2iZpjVO

 

Nouvelle contestation après jugement de renvoi / 107 al. 2 LTF

 

Assuré employé d’une société dès le 01.11.1996, d’abord à plein temps, puis à 60% dès le 01.03.2002. A ce titre et dès cette date, il a été affilié à la Fondation de prévoyance B.__ SA (ci-après: la Fondation).

L’office AI a octroyé à l’assuré une demi-rente d’invalidité dès le 01.03.2002, puis un quart de rente dès le 01.12.2002. Cette prestation a été confirmée à l’issue d’une procédure de révision en 2008.

L’assuré a requis la révision de son droit à une rente d’invalidité en mai 2011. Le 01.07.2012, il a débuté une nouvelle activité à mi-temps auprès de la société D.__ AG. L’office AI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité dès le 01.05.2011, puis une demi-rente dès le 01.08.2011.

Le recours formé par la Fondation a été rejeté ; le TF a précédemment admis partiellement le recours de dite Fondation, renvoyant la cause à la cour cantonale pour qu’elle complète l’instruction et rende une nouvelle décision concernant le droit de l’assuré à une rente de l’assurance-invalidité à compter de cette date (arrêt 9C_33/2016 du 16.08.2016).

 

Procédure cantonale (arrêt AI 226/16 ap. TF – 19/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2xLyKv8)

Des certificats de salaire de l’assuré produits par la société D.__ AG, la juridiction cantonal a constaté que le salaire en cause s’élevait à 75’400 fr. par année (5’800 fr. x 13, entre le 1 er juillet 2012 et le 28 février 2014), puis à 99’840 fr. (7’680 fr. x 13, dès le 1 er mars 2014).

La société D.__ AG a attesté que son employé devait mettre à sa disposition un bureau, un dépôt, ainsi qu’une connexion internet, prestations dont la valeur mensuelle s’élevait à 1’300 fr. Les premiers juges ont considéré qu’il n’y avait par ailleurs pas lieu de déduire ce montant mensuel, dont ils n’avaient trouvé aucune trace dans le contrat de travail et qui n’apparaissait pas plausible.

Par jugement du 19.01.2017, admission du recours de la Fondation par le tribunal cantonal, réformant la décision de l’office AI, en ce sens que l’assuré a droit à une rente entière d’invalidité du 01.05.2011 au 31.07.2011, à une demi-rente d’invalidité du 01.08.2011 au 30.09.2013 et à un quart de rente d’invalidité du 01.10.2013 au 31.05.2014. A partir du 01.03.2014 (avec effet au 01.06.2014), la comparaison des revenus aboutissait à un degré d’invalidité de 31%, soit à un taux insuffisant pour maintenir le droit à une rente d’invalidité.

 

TF

Revenu sans invalidité

Le jugement attaqué a été rendu à la suite de l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral. Dans un tel cas, l’autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l’arrêt du Tribunal fédéral ; son pouvoir d’examen est limité par les motifs de l’arrêt de renvoi (art. 107 al. 2 LTF), en ce sens qu’elle est liée par ce qui a déjà été tranché définitivement par le Tribunal fédéral ainsi que par les constatations de fait qui n’ont pas été critiquées devant lui ; des faits nouveaux ne peuvent être pris en considération que sur les points qui ont fait l’objet du renvoi, lesquels ne peuvent être ni étendus, ni fixés sur une base juridique nouvelle.

Saisi d’un recours contre la nouvelle décision cantonale, le Tribunal fédéral est aussi lié par son arrêt de renvoi ; il ne saurait se fonder sur les motifs qu’il avait écartés ou qu’il n’avait pas eu à examiner, faute pour les parties de les avoir invoqués dans la précédente procédure de recours, alors qu’ils pouvaient – et devaient – le faire. La portée de l’arrêt de renvoi dépend donc du contenu de cet arrêt en relation avec les mémoires de recours et de réponse qui avaient été déposés: le procès doit parvenir un jour à sa fin et les parties – aussi bien la partie recourante que la partie intimée – doivent soulever tous les griefs qu’ils souhaitent voir traités de façon que le Tribunal fédéral soit en mesure de rendre une décision finale qui clôt le litige (cf. ATF 135 III 334 consid. 2 p. 335; 131 III 91 consid. 5 p. 93; arrêt 9C_53/2015 du 17 juillet 2015 consid. 2.1).

Dans son arrêt de renvoi (9C_33/2016), le TF a, sur recours de la Fondation, examiné le droit de l’assuré à une demi-rente de l’assurance-invalidité au-delà du 01.08.2011. Pour la période courant à partir du 01.10.2013, il a tout d’abord jugé qu’il n’y avait pas lieu de s’écarter du dernier salaire réalisé avant l’atteinte à la santé de l’assuré, que les premiers juges avaient arrêté à 132’605 fr. (valeur 2000). Compte tenu du renchérissement intervenu entre 2000 (indice: 106,4 points) et 2012 (indice: 115,5 points), ce revenu correspondait à 143’946 fr. (valeur 2012). Pour ce qui était du revenu avec invalidité, le TF a retenu que la juridiction cantonale avait renoncé à tort à lever l’incertitude qui pesait sur le versement de primes de la part de l’employeur. Ainsi qu’elle l’a d’ailleurs rappelé dans l’arrêt attaqué, la cour cantonale était dès lors invitée, sur renvoi du Tribunal fédéral, à réexaminer et à fixer uniquement le revenu d’invalide, ce qu’elle a fait.

En critiquant le revenu sans invalidité de 143’946 fr. retenu par les premiers juges, l’assuré s’en prend à un aspect du litige qui a déjà été tranché par le Tribunal fédéral. L’arrêt de renvoi n’impliquait en particulier nullement le droit pour l’assuré de faire administrer de nouvelles preuves sur le montant du revenu sans invalidité ; les faits sur lesquels il se fonde pour dénoncer « une erreur de calcul » auraient déjà pu et dû être invoqués dans la précédente procédure de recours. Faute pour l’assuré d’avoir fait valoir ces éléments précédemment, il ne peut y revenir dans la présente procédure.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_155/2017 consultable ici : http://bit.ly/2iZpjVO

 

 

9C_54/2017 (f) du 02.06.2015 – Avance de frais à la juridiction cantonale – Restitution d’un délai de paiement / 41 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_54/2017 (f) du 02.06.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/2iYu69O

 

Avance de frais à la juridiction cantonale – Restitution d’un délai de paiement / 41 LPGA

 

Dans le cadre d’un recours que l’assurée avait formé contre une décision de l’office AI, le Tribunal administratif du canton de Berne lui avait imparti un délai supplémentaire échéant le 27.09.2016 pour verser l’avance de frais.

Par jugement du 30.09.2016, la juridiction cantonale a déclaré le recours irrecevable car l’avance de frais avait été versée tardivement, le 28.09.2016.

Le 04.10.2016, l’assurée a demandé au Tribunal administratif d’annuler son jugement du 30.09.2016 et de lui restituer le délai de paiement de l’avance de frais.

Le Tribunal administratif bernois a constaté que le mandataire avait donné l’ordre de virement bancaire de l’avance de frais le 27.09.2016 à 17h11, lequel portait la date d’exécution du jour suivant. Il a considéré que les motifs invoqués par le mandataire de l’assurée, singulièrement la communication du décès de son ex-beau-frère le matin même à 11 heures, ne constituaient pas un motif de restitution du délai. Le mandataire devait savoir qu’un ordre de virement ordinaire donné par e-banking le 27.09.2016, a fortiori à 17h11, portant la date d’exécution du 28.09.2016, ne serait pas exécuté le 27. D’autres possibilités existaient, en particulier le versement de l’avance à un guichet postal, par l’avocat ou un auxiliaire de l’étude.

La demande de restitution du délai et de révision a été rejetée par jugement du 01.12.2016.

 

TF

Selon l’article 41 LPGA, si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d’agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les 30 jours à compter de celui où l’empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l’acte omis.

Par empêchement non fautif d’accomplir un acte de procédure, il faut comprendre non seulement l’impossibilité objective ou la force majeure, mais également l’impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou une erreur excusable. La maladie ou l’accident peuvent, à titre d’exemples, être considérés comme un empêchement non fautif et, par conséquent, permettre la restitution d’un délai de recours, s’ils mettent la partie recourante ou son représentant légal objectivement ou subjectivement dans l’impossibilité d’agir par soi-même ou de charger une tierce personne d’agir en son nom dans le délai (ATF 119 II 86 consid. 2 p. 87; 112 V 255; voir également arrêts 9C_209/2012 du 26 juin 2012 consid. 3.1 et 8C_767/2008 du 12 janvier 2009 consid. 5.3.1).

La jurisprudence admet également que le décès d’un proche puisse constituer un empêchement non fautif d’agir à temps et justifier une restitution du délai s’il survient peu avant l’échéance de celui-ci (arrêts 1C_293/2010 du 21 juin 2010 consid. 2; 1P.319/1998 du 8 février 1999 in RDAT 1999 II n° 8 p. 32).

Contrairement à ce que soutient l’assurée, son mandataire n’a pas été empêché, au sens de l’art. 41 LPGA, d’accomplir l’acte de procédure dans le délai fixé. En effet, nonobstant les circonstances pénibles auxquelles il a été confronté, le mandataire a pu donner un ordre de virement bancaire le 27.09.2016 à 17h11, démontrant qu’il était en mesure de gérer la situation. Sachant à ce moment-là, ou devant savoir, que cette voie était sans issue puisque l’ordre ne pouvait être exécuté que le lendemain, soit après l’échéance du délai fixé par la juridiction cantonale, il aurait été loisible au mandataire d’y renoncer et de se rendre encore le jour même à un guichet postal afin d’y effectuer un versement en espèces.

On ajoutera que la partie recourante qui donne un ordre de virement d’une avance de frais le dernier jour du délai où le transfert doit être effectué, à peine d’irrecevabilité du recours, supporte le risque d’une mauvaise exécution de l’ordre par l’institut financier (cf. arrêt 2C_1096/2013 du 19 juillet 2014 consid. 3). Ainsi, dans l’éventualité où un ordre de virement transmis le 27.09.2016 n’aurait pas été exécuté le jour même, les circonstances évoquées par l’assurée n’auraient eu aucune incidence sur l’issue du litige. Il s’ensuit que la demande de restitution du délai a été rejetée à juste titre.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_54/2017 consultable ici : http://bit.ly/2iYu69O

 

 

Le Conseil fédéral veut renforcer le rôle de juridiction suprême du Tribunal fédéral

Le Conseil fédéral veut renforcer le rôle de juridiction suprême du Tribunal fédéral

 

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 06.09.2017 consultable ici : http://bit.ly/2f60J0S

 

Lors de sa séance du 06.09.2017, le Conseil fédéral a pris acte des résultats de la consultation concernant la révision de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF). Ce projet vise à rééquilibrer la charge de travail de la juridiction suprême de la Confédération. Lors de la consultation, les propositions ont été majoritairement bien accueillies. Le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police d’élaborer un message.

 

En 2013, dans son rapport d’évaluation de la réforme de l’organisation judiciaire, entrée en vigueur en 2007, le Conseil fédéral avait identifié plusieurs améliorations souhaitables de la liste d’exceptions de la LTF. Sont énumérés dans cette liste les domaines dans lesquels le recours au Tribunal fédéral est exclu, c’est-à-dire où les instances précédentes statuent définitivement. Elle présente aujourd’hui deux défauts : d’un côté, toutes les questions juridiques de principe ne peuvent pas être portées devant le Tribunal fédéral ; de l’autre, elle n’évite pas que celui-ci soit parfois saisi de cas de peu d’importance.

Fort de ces constatations, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de justice et police d’élaborer un projet de révision de la LTF qui permette de rééquilibrer, sous ces deux aspects, la charge de travail de la juridiction suprême de la Confédération. Il s’agit d’admettre le recours au Tribunal fédéral dès lors qu’il soulève une question juridique de principe ou porte, pour d’autres motifs, sur un cas particulièrement important et ce, même si ce recours relève de la liste d’exceptions ou si la valeur litigieuse minimale n’est pas atteinte. Le Tribunal fédéral sera par ailleurs déchargé des affaires de moindre importance.

Le recours constitutionnel subsidiaire sera maintenu, divers participants à la consultation ayant rejeté l’idée de l’abolir. Ce recours permet à une personne de saisir le Tribunal fédéral en invoquant une violation de ses droits constitutionnels par une décision cantonale, même si cette décision relève de la liste d’exceptions de la LTF ou si la valeur litigieuse n’est pas atteinte. Il garantit que les décisions cantonales qui touchent des droits fondamentaux ne puissent pas être attaquées directement devant la Cour européenne des droits de l’homme.

Aucune nouvelle possibilité de recours au Tribunal fédéral ne sera créée dans le domaine de l’asile, afin de garantir la célérité de la procédure.

 

 

Communiqué de presse du Conseil fédéral du 06.09.2017 consultable ici : http://bit.ly/2f60J0S

Rapport de l’OFJ du 04.08.2017 « Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) – Synthèse des résultats de la consultation » consultable ici : http://bit.ly/2wII0So

Rapport de l’OFJ du 04.11.2015 « Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) – Rapport explicatif » consultable ici : http://bit.ly/2gMSkTM

Projet de modification de la LTF soumis à la consultation : http://bit.ly/2gPku0J

Rapport sur les résultats de l’évaluation de la nouvelle organisation judiciaire fédérale du 30.10.2013 (FF 2013 8143) consultable ici : http://bit.ly/2xQOKfr

 

 

8C_312/2016 (f) du 13.03.2017 – Frais de l’expertise judiciaire mis à charge – à tort – de l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 (f) du 13.03.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2sS7ifr

 

Frais de l’expertise judiciaire mis à charge – à tort – de l’AI

 

Assurée, associée-gérante de deux Sàrl, exploite en cette qualité un magasin de sport et dispensait également des cours de plongée, entre autres activités, avant de subir plusieurs accidents au cours des années 2009 et 2010, pris en charge par l’assurance-accidents LAA. Dépôt d’une demande AI en raison d’une double hernie discale, opérée le 14.05.2010 selon Cloward avec exérèse des deux hernies et mise en place de deux cages. Dans la procédure opposant l’assurée à son assureur-accidents, une expertise pluridisciplinaire a été réalisée, où la capacité de travail a été considérée comme nulle en ce qui concernait les activités de plongée mais comme totale dans une activité adaptée.

L’office AI a nié le droit de l’assurée à des mesures professionnelles en raison d’un manque d’intérêt de sa part. En outre, il a refusé de lui allouer une rente d’invalidité, au motif que le taux d’invalidité (de 36% si des mesures de réorganisation de l’entreprise étaient exigibles et de 18% dans le cas contraire) n’était pas suffisant pour ouvrir droit à cette prestation.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/256/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2rSSbD8)

La cour cantonale a ordonné la mise en œuvre d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire. Les deux spécialistes en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur ont considéré que la capacité de travail était nulle dans toute activité. Le spécialiste en neurologie a, pour sa part, a retenu une capacité de travail de 25% dans une activité adaptée.

Par jugement du 24.03.2016, admission du recours par le tribunal cantonal qui a, en outre, mis les frais de l’expertise judiciaire à la charge de l’office AI.

 

TF

Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3 p. 501 s.), les frais qui découlent de la mise en œuvre d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d’observation médicale de l’assurance-invalidité (COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la charge de l’assurance-invalidité. En effet, lorsque l’autorité judiciaire de première instance décide de confier la réalisation d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire à un COMAI parce qu’elle estime que l’instruction menée par l’autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l’ATF 137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l’autorité administrative qui aurait dû, en principe, mettre en œuvre cette mesure d’instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces conditions, les frais de l’expertise ne constituent pas des frais de justice au sens de l’art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l’art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par l’assurance-invalidité.

Cette règle, qu’il convient également d’appliquer dans son principe aux expertises judiciaires mono- et bidisciplinaires (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4 p. 357), ne saurait entraîner la mise systématique des frais d’une expertise judiciaire à la charge de l’autorité administrative. Encore faut-il que l’autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l’expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d’instruction administrative. En d’autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l’instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2 p. 265 s.). Tel est notamment le cas lorsque l’autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu’elle a laissé ouverte une ou plusieurs questions nécessaires à l’appréciation de la situation médicale ou lorsqu’elle a pris en considération une expertise qui ne remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la valeur probante de ce genre de documents (voir par exemple arrêt 8C_71/2013 du 27 juin 2013 consid. 2). En revanche, lorsque l’autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d’une expertise qui répondait aux réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d’une expertise judiciaire ordonnée par l’autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d’une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 précité consid. 4.4 p. 502).

En l’espèce, l’office AI aurait dû procéder à des investigations complémentaires au niveau médical. En entreprenant aucune démarche dans ce sens, il a laissé ouverte une question nécessaire à l’appréciation de l’état de santé de l’assurée. Aussi, la cour cantonale pouvait-elle mettre à sa charge les frais de l’expertise judiciaire sans violer le droit fédéral.

 

 

Arrêt 8C_312/2016 consultable ici : http://bit.ly/2sS7ifr