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Conférence des offices AI : Investir dans la réadaptation en vaut la peine

Conférence des offices AI : Investir dans la réadaptation en vaut la peine

 

Communiqué de presse de la Conférence des offices AI (COAI) du 09.08.2019 consultable ici

 

Dans son rapport publié le 09.08.2019, la Conférence des offices AI (COAI) parvient à la conclusion selon laquelle, en l’absence de mesures de réadaptation, l’endettement de l’AI serait presque deux fois plus élevé qu’aujourd’hui. Les calculs du business case figurant dans ce rapport le montrent clairement: pour assainir l’assurance-invalidité, il faut continuer d’investir dans la réadaptation professionnelle.

Trois grandes réformes ont été réalisées au sein de l’AI ces 15 dernières années, notamment afin de parvenir à un assainissement complet de l’AI d’ici à l’année 2030. Dans ce contexte, le changement de cap opéré par l’AI consistant à abandonner l’idée d’être uniquement une assurance de rentes pour devenir une assurance qui met l’accent sur la réadaptation en étendant les mesures et prestations correspondantes, a joué un rôle important. Depuis lors, différents milieux posent de manière répétée la question suivante: «Les investissements consacrés à la réadaptation professionnelle en valent-ils vraiment la peine?». Sur la base du business case, il est désormais possible de répondre à cette question.

 

Dette de l’AI nettement plus élevée en l’absence de réadaptation

Validé scientifiquement, le business case le montre clairement: pour l’AI, les investissements dans la réadaptation professionnelle en valent la peine à tous égards: tant du point de vue sociétal et de la politique sociale que sur le plan financier. Entre 2004 et 2016, l’AI a pu réaliser des économies de près de 10 milliards de francs, et ce, exclusivement par le biais de la réadaptation professionnelle. Cela correspond à des économies de plus de 750 millions de francs par année.

Afin de calculer le montant de ces économies, les prestations de rentes AI non accordées dues aux mesures de réadaptation ont été extrapolées sur la base de la durée moyenne de rente enregistrée à l’échelle suisse et capitalisées. Le total des coûts de la réadaptation a été déduit de ce montant. Les calculs effectués pour la période étudiée (de 2004 à 2016) le montrent bien: en l’absence de mesures de réadaptation, la dette de l’AI aurait été sensiblement plus élevée.

 

Scénarios d’action dans la perspective du développement continu de l’AI

Le business case analyse également l’évolution des nouvelles rentes AI pendant la même période (2004 – 2016) et parvient, ici aussi, à la conclusion selon laquelle une part significative du recul du pourcentage des nouvelles rentes des offices AI cantonaux est due à la réadaptation professionnelle et aux mesures y afférentes (plus de 15% entre 2004 et 2007; plus de 30% entre 2008 et 2016).

Avec les résultats du business case, la COAI met simultanément en discussion trois scénarios d’action possibles. Ces derniers ont pour but de montrer comment le niveau des prestations de réadaptation pourrait évoluer à l’avenir. Dans ce contexte, les moyens et ressources dont devront disposer les offices AI joueront un rôle clé. Il est en effet avéré qu’une extension de l’offre de prestations sans extension simultanée des ressources en personnel dans les offices AI ne pourra pas être mise en œuvre.

 

 

Communiqué de presse de la Conférence des offices AI (COAI) du 09.08.2019 consultable ici

Annexe 1 (graphiques) au communiqué de presse disponible ici

Annexe 2 (scénarios) au communiqué de presse disponible ici

 

 

9C_370/2019 (f) du 10.07.2019 – Revenu d’invalide selon ESS – Niveau de compétences 2 (tâches pratiques) vs niveau de compétences 3 (tâches pratiques complexes)

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_370/2019 (f) du 10.07.2019

 

Consultable ici

 

Revenu d’invalide selon ESS – Niveau de compétences 2 (tâches pratiques) vs niveau de compétences 3 (tâches pratiques complexes)

 

Assuré, né en 1965, titulaire d’un baccalauréat français, a travaillé comme développeur de bases de données du 01.01.2005 au 31.03.2011. En arrêt de travail depuis le 17.03.2010, il a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 24.09.2010.

L’office AI a pris en charge un stage d’orientation professionnelle (du 03.12.2012 au 17.03.2013), puis une formation de moniteur de conduite à partir de mai 2013. Après avoir échoué à deux reprises à un examen pratique fin 2015, l’assuré a renoncé à poursuivre cette formation. Par décision du 07.12.2017, l’office AI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 01.03.2011 au 31.03.2013 et du 01.01.2016 au 31.10.2016, ainsi que trois quarts de rente dès le 01.11.2016.

 

Procédure cantonale (NB : il ne peut pas s’agir de l’arrêt cantonal ATAS/321/2019)

Par jugement du 17.04.2019, admission du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant le droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité dès le 01.11.2016.

 

TF

Le choix du niveau de compétence est une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (ATF 143 V 295 consid. 2.4 p. 297).

Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l’Office fédéral de la statistique (OFS) par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L’accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d’assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l’ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l’expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l’ESS 2012; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3 p. 184). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l’utilisation de machines et d’appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt 8C_46/2018 du 11 janvier 2019 consid. 4.4 et les références).

En l’occurrence, la juridiction cantonale a retenu de manière convaincante que le type de travail encore à la portée de l’assuré justifiait de se fonder pour l’année 2016 sur le niveau de compétence 2 de l’ESS. L’assuré n’a tout d’abord pas obtenu un titre universitaire sanctionnant ses années d’étude à l’Université de C.__. Il n’a également pas achevé la formation de moniteur de conduite. En ce qui concerne ensuite les compétences de l’assuré, le stage d’orientation a certes mis en évidence un « potentiel d’apprentissage et de polyvalence élevé ». Les responsables du stage ont cependant soutenu la réorientation comme moniteur de conduite, laquelle constitue ordinairement une activité dans le domaine personnel des services directs aux particuliers d’un niveau de compétence 2 (voir tableau T17 de l’ESS, en relation avec le ch. 5165 de la Classification internationale type des professions [CITP-08], Moniteurs d’auto-école). Quant aux compétences linguistiques de l’assuré, même à supposer qu’il « maîtrise un niveau d’anglais supérieur » comme le prétend l’office AI, elles ne sont pas suffisantes pour justifier des connaissances adéquates pour des professions intermédiaires de la finance et de l’administration mentionnées par l’office AI.

Enfin, l’office AI s’écarte des faits constatés par la juridiction cantonale lorsqu’il affirme sans plus amples justifications que l’assuré avait accompli des tâches de direction, d’administration et qu’il possédait des connaissances très pointues du métier de l’entreprise. Cette affirmation ne suffit pas à mettre en cause les considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles l’assuré ne possède pas de qualifications professionnelles reconnues susceptibles de lui permettre d’exercer dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles des tâches pratiques complexes nécessitant un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (fonction intermédiaire technique ou non technique).

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_370/2019 consultable ici

 

 

9C_16/2019 (f) du 17.04.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Obligation de communiquer les activités exercées – 31 al. 1 LPGA – 77 RAI / Bonne foi de l’assuré niée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 (f) du 17.04.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer / 25 LPGA

Obligation de communiquer les activités exercées / 31 al. 1 LPGA – 77 RAI

Bonne foi de l’assuré niée en raison de la négligence grave

 

Par décision, l’office AI a supprimé la rente d’invalidité dont bénéficiait l’assuré avec effet rétroactif au 01.06.2006. Cette décision a été confirmée par les instances cantonale et fédérale de recours (cf. arrêt 9C_107/2017 du 08.09.2017).

L’office AI a réclamé par décision du 22.12.2015 à l’assuré le remboursement de la somme de 179’524 fr. représentant les prestations versées à tort du 01.12.2010 au 31.10.2015.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1028/2018 – consultable ici)

Selon les constatations de la cour cantonale, l’assuré avait non seulement omis d’indiquer à l’office AI qu’il avait repris une activité, mais il avait de plus nié exercer une activité accessoire dans les questionnaires de révision en 2006, 2011 et 2014.

La cour cantonale a considéré qu’un assuré ne pouvait pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, constituait une modification de sa situation susceptible d’entraîner la suppression de la prestation et que le bénéficiaire avait dès lors l’obligation de l’annoncer. A tout le moins, l’assuré devait s’en douter et se renseigner auprès de l’office AI. Pour les juges cantonaux, la négligence dont a fait preuve l’assuré n’a pas été simplement légère, mais a revêtu un caractère de gravité suffisant pour que la condition de la bonne foi ne puisse être considérée comme étant réalisée.

Par jugement du 06.11.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 8C_510/2018 du 12 mars 2019 consid. 3).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s. avec les renvois).

Il y a négligence grave quand un ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181; SYLVIE PÉTREMAND, Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, ch. 63 ss ad art. 25). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223 avec les renvois).

 

Les assurés sont tenus de communiquer les activités exercées, au sens des art. 31 LPGA et 77 RAI, en tout temps. Chaque assuré doit annoncer immédiatement toute modification de la situation susceptible d’entraîner la suppression, une diminution ou une augmentation de la prestation allouée, singulièrement une modification du revenu de l’activité lucrative, de la capacité de travail ou de l’état de santé lorsqu’il est au bénéfice d’une rente d’invalidité. Pareille obligation est d’ailleurs mentionnée dans la décision d’octroi initial de la rente et à l’occasion de chaque révision de cette prestation.

En l’espèce, il n’appartenait pas à l’assuré de choisir les activités qu’il devait annoncer à l’office AI. Il ne devait en effet pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, était susceptible d’entraîner une nouvelle appréciation de ses capacités de travail et de gain, pouvant aboutir le cas échéant à une modification de la rente, ce qui s’est d’ailleurs produit à l’issue de l’instruction du cas (cf. arrêt 9C_107/2017 précité, consid. 5.1 et 5.2). Pareille obligation d’annoncer valait tout particulièrement en raison de ses attributions légales d’associé gérant président de la société B.__ Sàrl (cf. art. 810 CO), ainsi que de l’aide qu’il apportait à son épouse dans le cadre de la gestion de son entreprise. En taisant l’exercice de telles activités, la négligence de l’assuré a revêtu un caractère de gravité suffisant pour exclure la bonne foi, de sorte que l’une des conditions cumulatives pour autoriser la remise de l’obligation de restituer fait défaut (cf. art. 25 al. 1 LPGA).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_16/2019 consultable ici

 

 

Assurance-invalidité : faits et chiffres 2018 – Maintien à un bas niveau du nombre de nouvelles rentes, succès des efforts de réadaptation professionnelle et de lutte contre les abus

Assurance-invalidité : faits et chiffres 2018 – Maintien à un bas niveau du nombre de nouvelles rentes, succès des efforts de réadaptation professionnelle et de lutte contre les abus

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 23.05.2019 consultable ici

 

En 2018, le nombre de nouvelles rentes pondérées s’est établi à 15’400, un ordre de grandeur similaire à celui des années précédentes. Le déploiement de mesures visant la réadaptation professionnelle a encore augmenté, et la lutte contre les abus a été poursuivie, malgré l’arrêt des observations décrété en août 2017.

En 2018, le nombre de rentes nouvellement octroyées en Suisse et à l’étranger s’est établi à 15’400 (rentes pondérées). Par rapport à 2003, année record où ce nombre se chiffrait à 28’200, cet indicateur a diminué de 45%, pour s’établir aujourd’hui au niveau de 2011. En janvier 2019, le nombre de rentes AI en cours était de 216’200, ce qui correspond à une baisse de 1’000 rentes pondérées (-0,5%) par rapport à l’année précédente. Par rapport au niveau record atteint en janvier 2006, la baisse est de 16%.

 

Résultats du monitoring de l’insertion professionnelle

Si, entre 2003 et 2012, le nombre de nouvelles rentes AI a diminué de moitié, le nombre de mesures visant la réadaptation professionnelle quant à lui a nettement augmenté depuis 2008 : 43’500 personnes ont eu droit à une telle mesure en 2018, soit 7% de plus qu’en 2017. Ces chiffres reflètent la transformation de l’AI d’une assurance de rentes en une assurance de réadaptation. Le monitoring de l’insertion professionnelle permet d’établir sur une période prolongée la situation des assurés ayant bénéficié de mesures de réadaptation de l’AI, s’agissant de l’exercice d’une activité lucrative, du revenu professionnel et du recours aux prestations de l’AI, de l’assurance-chômage ou de l’aide sociale. Il permet aussi de faire certaines déductions sur l’efficacité des mesures de réadaptation visant l’insertion professionnelle.

 

Lutte contre les abus dans les assurances

En 2018, l’AI a bouclé 1’930 enquêtes ouvertes pour soupçon d’abus. Pour 100 cas, une observation a été effectuée dans le cadre de l’instruction. Le soupçon a été confirmé dans 610 cas (dont 70 comprenant une surveillance), ce qui a conduit l’assurance à réduire ou à supprimer la prestation de rente en cours ou à renoncer à octroyer une rente. Il en résulte pour l’AI, par extrapolation, des économies totales de l’ordre de 146 millions de francs, pour des coûts d’environ 7,7 millions de francs. Depuis août 2017, l’AI n’ordonne plus d’observations dans le cadre de la lutte contre les abus à l’assurance ; mais parmi les cas bouclés en 2018, certains contenaient une mesure de surveillance qui avait été effectuée avant cette date. En revanche, le peuple a accepté une nouvelle base légale en novembre 2018 qui permettra aux assurances sociales de procéder de nouveau à des observations. Le Conseil fédéral n’a pas encore fixé la date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi et de l’ordonnance.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 23.05.2019 consultable ici

Fiche d’information « Le nombre de nouvelles rentes AI reste faible », 23.05.2019, disponible ici

Fiche d’information « Évolution en matière de réadaptation professionnelle », 23.05.2019, disponible ici

Fiche d’information « Lutte contre les abus dans l’AI », 23.05.2019, disponible ici

 

 

8C_139/2018 (f) du 26.03.2019 – Révision d’une rente d’invalidité – Rapport de surveillance par un bureau de détectives espagnol – 17 LPGA / Effet rétroactif de la révision en raison de la violation par l’assuré de l’obligation de renseigner – 31 al. 1 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_139/2018 (f) du 26.03.2019

 

Consultable ici

 

Révision d’une rente d’invalidité – Rapport de surveillance par un bureau de détectives espagnol / 17 LPGA

Effet rétroactif de la révision en raison de la violation par l’assuré de l’obligation de renseigner / 31 al. 1 LPGA

 

Assurée, née en 1958, travaillait depuis 1994 comme vendeuse à plein temps dans un magasin de prêt-à-porter féminin. A la suite d’un accident de la circulation survenu le 30.09.1996, au cours duquel elle a subi un traumatisme de type « coup du lapin », l’assurée a été mise au bénéfice d’une rente entière de l’assurance-invalidité à partir du 01.03.1999. Se fondant sur une expertise d’un spécialiste FMH en neurochirurgie du 13.11.2000 et son rapport complémentaire du 22.03.2002, l’assurance-accidents a octroyé à l’assurée une rente fondée sur un degré d’incapacité de gain de 100% dès le 01.01.2003 et une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 25% (cf. décision du 10.01.2003). Le 01.10.2006, l’assurée a quitté la Suisse pour s’installer en Espagne.

Informée que l’assurée prenait part à la gestion d’un restaurant à Viladrau en Espagne, l’assurance-accidents a mandaté un bureau de détectives à Barcelone. L’assurée a fait l’objet d’une mesure de surveillance les 24.07.2014, 25.07.2014, 01.08.2014 et du 22.10.2014 au 26.10.2014. Les détectives ont fourni plusieurs rapports contenant notamment des photographies librement accessibles sur internet ainsi que des photographies et vidéos prises par leurs soins. Après avoir pris connaissance du matériel d’observation, l’assurance-accidents a informé l’assurée, par lettre du 24.11.2014, qu’elle suspendait avec effet immédiat le versement de sa rente d’invalidité. L’assurée a été convoquée à un entretien dans les bureaux de l’assurance-accidents le 11.12.2014 où elle a été interrogée sur son état de santé. Les images résultant de la surveillance dont elle avait fait l’objet lui ont en outre été montrées. L’assureur-accidents a mandaté un nouveau spécialiste FMH en neurochirurgie pour apprécier le matériel d’observation et évaluer l’état de santé de l’assurée. Dans son rapport d’expertise du 26.01.2016, complété le 24.03.2016, il a notamment constaté que l’IRM cervicale réalisée le 03.03.2015 montrait une régression des protrusions discales avec une perte de la lordose cervicale. Il a également noté une contradiction entre les limitations fonctionnelles rapportées par l’assurée à l’occasion de son examen médical et lors de son audition du 11.12.2014 et le résultat des observations effectuées en juillet, août et octobre 2014. La capacité de travail de l’assurée devait être fixée à 80% au moins dans son ancienne activité de vendeuse comme dans toute activité de bureau sédentaire et légère. Les 20% d’incapacité de travail restants étaient dus aux troubles dégénératifs sans lien de causalité avec l’accident du 30.09.1996. Selon l’expert, le retour du statu quo sine ou ante pouvait être fixé au 01.09.2008, correspondant à la date d’une photo où l’on voyait l’assurée en tenue de motard, casque au bras, appuyée contre une moto.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a mis fin rétroactivement au droit à la rente d’invalidité de l’assurée avec effet au 01.09.2008 et retiré tout effet suspensif à un éventuel recours.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1183/2017 – consultable ici)

Par jugement du 21.12.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

En vertu de l’art. 17 al. 1 LPGA, si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision. Peut en particulier justifier une révision, une modification sensible de l’état de santé ou des conséquences sur la capacité de gain d’un état de santé resté en soi le même (ATF 133 V 545 consid. 6.1 p. 546; 130 V 343 consid. 3.5 p. 349 s. et les arrêts cités). En revanche, une simple appréciation différente d’un état de fait, qui, pour l’essentiel, est demeuré inchangé n’appelle pas à une révision au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (ATF 141 V 9 consid. 2.3 p. 11 et les références).

Un rapport de surveillance ne constitue pas, à lui seul, un fondement sûr pour constater les faits relatifs à l’état de santé ou la capacité de travail de la personne assurée. Il peut tout au plus fournir des points de repère ou entraîner certaines présomptions. Seule l’évaluation par un médecin du matériel d’observation peut apporter une connaissance certaine des faits pertinents (ATF 137 I 327 consid. 7.1 p. 337; arrêt 8C_434/2011 du 8 décembre 2011 consid. 4.2). Cette exigence d’un regard et d’une appréciation médicale sur le résultat de l’observation permet d’éviter une évaluation superficielle et hâtive de la documentation fournie par le détective privé (voir à ce sujet MARGIT MOSER-SZELESS, La surveillance comme moyen de preuve en assurance sociale, RSAS 57/2013 p. 129 ss, plus spécialement p. 152). L’évaluation du médecin est faite sur la base du résultat des mesures de surveillance, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner dans tous les cas une expertise médicale. Il appartient en effet à l’assureur social ou au juge d’apprécier la portée du produit d’une surveillance en fonction du principe de la libre appréciation des preuves (MOSER-SZELESS, op.cit., p. 153; voir aussi l’arrêt 8C_830/2011 du 9 mars 2012 consid. 6.5).

 

Dans sa décision initiale d’octroi de rente, l’assurance-accidents a fixé le taux d’invalidité de l’assurée à 100% en se fondant, quoi qu’en dise l’assuré, sur les seules conclusions du médecin-expert (rapport d’expertise du 13.11.2000 et rapport complémentaire du 22.03.2002). L’expert avait retenu que l’addition de toutes les limitations de l’assurée, dont une partie étaient étrangères à l’accident, rendait une amélioration de la capacité de travail difficilement envisageable. La durée, la chronicisation et l’échec de tout ce qui avait été entrepris sur le plan thérapeutique faisaient qu’une telle éventualité ne semblait pas réalisable. A la question de savoir quelles activités professionnelles l’assurée pouvait raisonnablement exercer, compte tenu de son état médical, l’expert avait répondu qu’on pouvait imaginer un travail léger, à mi-temps, permettant, sans l’imposer, de fréquents changements de position.

En ce qui concerne la situation médicale au moment de la suppression de la rente, elle est documentée par l’expertise du 26.01.2016 et son rapport complémentaire du 24.03.2016, lesquels se fondent sur le dossier médical de l’assuré, une entrevue avec cette dernière en date du 11.08.2015 et le matériel d’observation (vidéos et photos de l’assuré). L’expert a indiqué que ce que l’on voyait sur les pièces résultant de la surveillance était en contradiction avec les allégations de l’assuré, laquelle se plaignait de douleurs persistantes, tant au niveau cervical que lombaire, ainsi que de nombreuses limitations. En outre, le fait de porter un casque intégral de moto, chose qui était particulièrement difficile pour des patients souffrant d’un syndrome cervical post-traumatique, semblait ici possible et ceci à plusieurs dates différentes. Sur la base des constatations découlant des observations effectuées, l’expert a conclu à une capacité de travail de l’assurée de 80% comme vendeuse dans un magasin de vêtements (correspondant à l’activité exercée avant l’accident) ainsi que dans toute activité de bureau sédentaire et légère. En l’espèce, le médecin-expert a précisé qu’il était difficile de fixer une date à partir de laquelle le statu quo sine ou ante avait été médicalement atteint chez l’assurée car la réponse à cette question reposait avant tout sur l’observation empirique des capacités fonctionnelles de l’assuré. Il a cependant expliqué qu’il s’était fondé sur le dossier mis à sa disposition (lequel était constitué du résultat de l’observation de l’assurée mais aussi de photos antérieures à l’observation trouvées sur internet). Or, les premiers éléments documentant un status fonctionnel compatible avec une amélioration significative de l’état de santé de l’assuré (correspondant à un statu quo sine) dataient du 01.09.2008. Le médecin-expert a ainsi proposé de retenir cette date comme étant celle où l’assurée avait retrouvé une capacité de travail de 80%. Il a précisé que l’incapacité de travail de 20% était uniquement due aux troubles dégénératifs sans lien de causalité naturelle avec l’accident du 30.09.1996.

Sur le plan médical, il convient d’admettre que l’état de santé, respectivement les répercussions sur la capacité de travail de l’assuré se sont améliorées par rapport à la situation au moment de l’octroi initial de la rente d’invalidité en janvier 2003. Le médecin-expert a expliqué de manière convaincante que si l’assuré présentait certes encore des douleurs au niveau de la nuque, celles-ci ne l’empêchaient nullement d’exercer son ancienne activité de vendeuse ou tout autre activité de bureau sédentaire et légère à un taux de 80% au moins. Même si à l’époque, l’octroi de la rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 100% n’était peut-être pas justifiée dans une telle ampleur, il n’en demeure pas moins que l’état de santé de l’assuré s’est indéniablement amélioré – comme le montrent les vidéos résultant de la surveillance – et qu’il lui permet désormais d’exercer une activité professionnelle à 80% au moins.

Les conditions de l’art. 17 LPGA sont réalisées. La suppression de la rente d’invalidité est donc conforme au droit.

 

Il ressort du texte légal de l’art. 17 LPGA que la révision d’une rente en cours fondée sur un changement de circonstances s’opère « pour l’avenir ». En cas de violation de l’obligation de renseigner (cf. art. 31 LPGA), il est généralement admis que l’adaptation de la rente prend effet au moment où le devoir d’annoncer a été violé (UELI KIESER, ATSG-Kommentar, 3 e éd. 2015, n° 53 ad art. 17 LPGA et n° 21 ad art. 31 LPGA). Dans un arrêt 8C_253/2018 du 19 février 2019 destiné à la publication, le Tribunal fédéral a jugé que selon la systématique de la loi, en cas de violation de l’obligation de communiquer toute modification importante des circonstances déterminantes pour l’octroi des prestations au sens de l’art. 31 al. 1 LPGA, la diminution ou la suppression de la rente – respectivement l’obligation de restituer les prestations indues – prend effet rétroactivement au moment où s’est produit le changement de circonstances pertinent pour la révision (« ab dem Zeitpunkt der Verwirklichung des (…) Revisionstatbestandes »; voir arrêt 8C_253/2018 consid. 7.3; pour une interprétation de l’art. 17 LPGA, voir aussi MIRIAM LENDFERS, Die IVV-Revisionsnormen [Art. 86ter – 88bis] und die anderen Sozialversicherungen, in: Sozialversicherungsrechtstagung 2009, 2010, p. 39 ss, plus spécialement p. 45 s.).

Le Tribunal fédéral a noté à cet égard qu’il serait choquant qu’une personne n’ayant pas avisé, en violation du principe de la bonne foi, un changement de circonstances influençant son droit aux prestations, puisse continuer à bénéficier de telles prestations sans autres conséquences. Si tel était le cas, elle serait ainsi mieux lotie qu’une personne assurée ayant satisfait à son obligation d’aviser, ce qui contreviendrait de manière crasse au principe de l’égalité de traitement. En effet, la situation dans laquelle une personne continue à bénéficier du versement de prestations en violation de son obligation d’annoncer une modification des circonstances, n’est pas comparable à celle dans laquelle il est procédé à une révision indépendamment d’une violation de l’obligation d’aviser selon l’art. 31 al. 1 LPGA (arrêt 8C_253/2018 consid. 7.3.6 i. f). Si la solution retenue correspond à celle prévue à l’art. 88bis al. 2 let. b RAI, elle découle néanmoins de l’art. 17 al. 1 LPGA en lien avec l’art. 31 al. 1 LPGA. Une application par analogie de l’art. 88bis al. 2 let. b RAI dans le domaine de l’assurance-accidents a dès lors été expressément exclue par le Tribunal fédéral (arrêt 8C_253/2018 consid. 7.3.8).

En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise que les premiers éléments documentant un status fonctionnel de l’assurée compatible avec une amélioration significative de son état de santé dataient du 01.09.2008. Se fondant sur ces conclusions, l’assurance-accidents a supprimé la rente d’invalidité avec effet rétroactif au 31.08.2008. Cette date correspond au moment où une amélioration de l’état de santé de l’assurée a été constatée au plus tôt sur la base du matériel d’observation à disposition. Au regard de la jurisprudence précitée, la décision attaquée n’est en soi pas critiquable. On notera toutefois que l’assurance-accidents n’a pas demandé la restitution des prestations versées à tort entre le 01.09.2008 et le 30.11.2014.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_139/2018 consultable ici

 

 

9C_842/2018 (f) du 07.03.2019 – Exigences de motivation du recours – 42 LTF / Revenu d’invalide – Calcul selon l’ESS – Manière d’appliquer le facteur d’abattement – 16 LPGA / Taux d’invalidité se confondant avec le taux d’incapacité de travail

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_842/2018 (f) du 07.03.2019

 

Consultable ici

 

Exigences de motivation du recours / 42 LTF

Revenu d’invalide – Calcul selon l’ESS – Manière d’appliquer le facteur d’abattement / 16 LPGA

Taux d’invalidité se confondant avec le taux d’incapacité de travail

 

Assuré, né en 1973, informaticien, a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 29.10.2012. En se fondant sur les conclusions de l’expertise psychiatrique, l’office AI a nié le droit de l’assuré à des prestations de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1003/2018 – consultable ici)

La cour cantonale a ordonné la réalisation d’une expertise judiciaire. En substance, le spécialiste en psychiatrie et psychothérapie a retenu que l’assuré avait été dans l’incapacité de travailler de novembre 2011 à avril 2017, puis avait recouvré une capacité de travail de 50% dans son activité habituelle dès le 01.05.2017.

La juridiction cantonale a considéré que les revenus avec et sans invalidité reposaient sur les mêmes données statistiques en 2017, de sorte qu’il était superflu de les chiffrer avec exactitude. Dans la mesure où l’assuré ne pouvait travailler qu’à temps partiel et qu’il avait été éloigné du marché du travail pendant plusieurs années, elle a procédé à un abattement de 15% sur le revenu d’invalide. Il en résultait un taux d’invalidité de 65%, ce qui ouvrait le droit à l’assuré à trois quarts de rente d’invalidité dès le 01.08.2017.

Par jugement du 31.10.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, annulation de la décision, reconnaissance du droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité dès le 01.04.2013 et à trois quarts de rente d’invalidité dès le 01.08.2017. La cause a été renvoyée à l’office AI pour nouvelle décision sur mesures de réadaptation.

 

TF

Exigences de motivation du recours – 42 LTF

L’assuré soutient que le recours ne répond pas aux exigences de motivation définies à l’art. 42 al. 2 LTF. Certes succincte, la motivation du recours expose clairement sur quels points la décision entreprise est attaquée. Contrairement à ce que l’assuré semble croire, il n’est par ailleurs pas indispensable que le recourant indique expressément les dispositions légales (le numéro des articles de loi) qui auraient été, selon lui, transgressées (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 88 et les références). On ne voit pour le reste pas en quoi une requête en interprétation ou en rectification aurait dû être déposée devant la juridiction cantonale dans le cas présent. L’office AI ne se plaint en effet pas d’une formulation peu claire, incomplète, équivoque ou en elle-même contradictoire du dispositif du jugement attaqué, respectivement d’une erreur de calcul, mais d’une violation du droit matériel en relation avec l’évaluation du taux d’invalidité (au sens de l’art. 16 LPGA).

Le Tribunal fédéral entre donc en matière sur le recours.

 

Revenu d’invalide – Calcul selon l’ESS

Dans son recours, l’office AI reproche à la juridiction cantonale d’avoir cumulé le facteur d’abattement (15%) au taux d’incapacité de travail (50%). Il soutient que le facteur d’abattement devait être déduit de la part du salaire statistique que l’assuré était toujours en mesure de réaliser. Le taux d’invalidé s’élèverait dès lors à 57,5% et donnerait droit à une demi-rente d’invalidité dès le 01.08.2017.

Il n’est pas contesté entre les parties qu’en l’absence d’activité exercée par l’assuré, il convient de se référer aux données statistiques pour déterminer le taux d’invalidité et qu’en raison d’une capacité résiduelle de travail dans toute activité (50%), il faut se fonder sur les mêmes données statistiques pour déterminer les revenus avec et sans invalidité. Or, dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de chiffrer précisément les revenus avec et sans invalidité dans la mesure où le taux d’invalidité se confond avec le taux d’incapacité de travail. Même s’il n’est pas indispensable de déterminer avec précision les salaires de références, il n’en demeure pas moins que, dans cette situation, l’évaluation de l’invalidité repose sur des données statistiques. Par conséquent, une réduction supplémentaire du revenu d’invalide (abattement) est possible en fonction des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (arrêt 9C_692/2017 du 12 mars 2018 consid. 5 et les références).

En l’occurrence, la juridiction cantonale a fixé le facteur d’abattement à 15% et l’a cumulé avec le taux d’incapacité de travail de 50% pour arrêter le taux d’invalidité à 65%. Cette façon de procéder est contraire à la jurisprudence constante dès lors que l’abattement doit être appliqué au revenu d’invalide (ATF 126 V 75). Concrètement, il convient d’appliquer l’abattement de 15% à la part du salaire statistique que l’assuré est toujours susceptible de réaliser (15% de 50%, soit 7,5%), puis de déduire le résultat obtenu de ladite part salariale (50% – 7,5% = 42,5%). La différence obtenue correspond à la perte de gain effective, soit 57,5% (100% – 42,5%). Ce taux d’invalidité ouvre le droit à une demi-rente d’invalidité (art. 28 al. 2 LAI).

Le TF admet le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_842/2018 consultable ici

 

 

9C_638/2018 (f) du 07.02.2019 – Capacité de travail exigible pour un assuré âgé de 58 ans – 16 LPGA – 28a al. 1 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_638/2018 (f) du 07.02.2019

 

Consultable ici

 

Capacité de travail exigible pour un assuré âgé de 58 ans / 16 LPGA – 28a al. 1 LAI

 

TF

Le moment où la question de la mise en valeur de la capacité (résiduelle) de travail pour un assuré proche de l’âge de la retraite sur le marché de l’emploi doit être examinée correspond non pas à celui de la date du prononcé de la décision de l’office AI mais à celui auquel il a été constaté que l’exercice (partiel) d’une activité lucrative était médicalement exigible (ATF 138 V 457 consid. 3.3 p. 461 et consid. 3.4 p. 462).

Dans le cas d’espèce, au moment déterminant, l’assuré était âgé de 58 ans. Quoi qu’en dise ce dernier, il n’avait dès lors pas encore atteint l’âge à partir duquel le Tribunal fédéral admet qu’il peut être plus difficile de se réinsérer sur le marché du travail (ATF 143 V 431 consid. 4.5.2 p. 433).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré sur ce point.

 

 

Arrêt 9C_638/2018 consultable ici

 

 

8C_84/2018 (f) du 01.02.2019 – Revenu d’invalide selon ESS – 16 LPGA – 28a LAI / Pas d’abattement sur le salaire statistique en raison de la diminution de rendement

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_84/2018 (f) du 01.02.2019

 

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Revenu d’invalide selon ESS / 16 LPGA – 28a LAI

Pas d’abattement sur le salaire statistique en raison de la diminution de rendement

 

 

TF

Pour évaluer le degré d’invalidité, partant procéder à une comparaison des revenus, sont déterminantes les circonstances qui prévalaient au moment de la naissance éventuelle du droit à la prestation d’assurance, ainsi que les modifications éventuelles survenues jusqu’au moment de la décision litigieuse qui ont des conséquences sur le droit à cette prestation (voir ATF 129 V 222; 128 V 174). Il convient par conséquent de procéder à une nouvelle comparaison des revenus chaque fois qu’il est admis qu’un changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité est survenu.

Dans le cas d’espèce, la comparaison des revenus déterminants est effectuée en prenant pour référence l’année 2008.

Après mise en œuvre d’une expertise judiciaire, les médecins-experts ont conclu que l’assuré bénéficiait d’une pleine capacité de travail dans une activité professionnelle assise comportant de très courts déplacements en terrain régulier avec des chaussures orthopédiques adaptées, sans prise de charges, avec une baisse de rendement de l’ordre de 20% pour pouvoir, occasionnellement, surélever les jambes en fonction de l’apparition d’œdèmes, ce qui n’était pas le cas le jour de l’expertise, mais semblait être le cas dans différents documents médicaux (jugement cantonal, Faits, lit. d).

En 2008, l’assuré avait 48 ans, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’effectuer un abattement à raison de l’âge. Quant à la nécessité de faire des pauses fréquentes, il s’agit d’une circonstance dont les experts judiciaires ont déjà tenu compte dans leur évaluation de la capacité de travail résiduelle de l’assuré, ce qui les a conduit à reconnaître une diminution de rendement de 20%. Elle ne saurait par conséquent non plus justifier un abattement, ce qui reviendrait à prendre en considération le même facteur deux fois (voir les arrêts 8C_878/2014 du 27 janvier 2015 consid. 5.2.5 et 8C_498/2012 du 6 septembre 2012 consid. 3.1).

Les difficultés en lien avec les questions de limitations fonctionnelles et le handicap ont été prises en considération dans la diminution du rendement de 20% admise dans une activité simple et répétitive qui tient déjà compte d’un vaste panel d’activités légères à moyenne (jugement cantonal, consid. 6c).

Ainsi, le Tribunal fédéral confirme le jugement cantonal en ce qui concerne l’absence de réduction sur le revenu statistique.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_84/2018 consultable ici

 

 

9C_692/2018 (f) du 19.12.2018 – AI / Interruption notable de l’invalidité ou évolution de l’état de santé – Lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – Rechute – Survenance d’un nouveau cas d’assurance / Rappel et examen de la jurisprudence par le Tribunal fédéral

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2018 (f) du 19.12.2018

 

Consultable ici

 

Survenance du cas d’assurance – Début de l’invalidité

Interruption notable de l’invalidité ou évolution de l’état de santé – Lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – Rechute – Survenance d’un nouveau cas d’assurance

Rappel et examen de la jurisprudence par le Tribunal fédéral

 

Assurée, italienne ayant vécu à l’étranger jusqu’à son arrivée en Suisse le 04.07.2000, a requis des prestations de l’assurance-invalidité le 06.06.2013 en raison des conséquences de différents troubles psychiques (dépressif, de la personnalité borderline et bipolaire) présents depuis 1996.

Entre autres investigations médicales, l’office AI a recueilli l’avis du médecin traitant, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, puis mandaté un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, pour mise en œuvre d’une expertise. L’expert a diagnostiqué un trouble bipolaire de type II (épisode actuel de dépression moyenne sans syndrome somatique) et un trouble mixte de la personnalité (borderline – paranoïaque) présents depuis l’adolescence ainsi qu’un trouble panique ayant laissé subsister une capacité résiduelle de travail fluctuante selon les périodes: soit de 50% entre 2001 et 2002, puis totale jusqu’en octobre 2006, nulle entre octobre 2006 et mars 2012, de 50 à 100% entre avril 2012 et février 2014 et de 0 à 50% dès mars 2014.

L’office AI a considéré que l’assurée n’avait pas droit à une rente motif pris que, lors de la survenance de l’invalidité en 2001, elle ne remplissait pas les conditions d’assurance et que les maladies dont elle souffrait constituaient un seul et même cas d’assurance malgré sa capacité de travail fluctuante ; elle a en outre nié le droit de l’intéressée à des mesures de réadaptation dans la mesure où elles ne permettaient pas d’améliorer la capacité de travail.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/722/2018 – consultable ici)

Le tribunal cantonal a constaté que l’assurée ne remplissait pas les conditions d’assurance au moment de la survenance de l’invalidité en 2002. Il a aussi relevé que l’assurée avait présenté une capacité totale de travail de janvier 2003 à octobre 2006. Il a considéré que la rechute survenue consécutivement à cette longue période de rémission constituait un second cas d’assurance et que, dès lors qu’elle comptait alors plus d’une année de cotisations et était domiciliée en Suisse depuis 2000, l’assurée pouvait prétendre une rente d’invalidité. Compte tenu de la date du dépôt de la demande de prestations et de la fluctuation du taux d’incapacité de travail, il a reconnu le droit de l’assurée à une demi-rente à compter de mars 2015.

Par jugement du 22.08.2018, admission du recours par le tribunal cantonal et annulation de la décision.

 

TF

Selon le Tribunal fédéral, la juridiction cantonale a basé son raisonnement sur une ancienne jurisprudence (ATFA 1966 p. 175 [cause I 65/66] repris dans l’arrêt 9C_36/2015 du 29 avril 2015 consid. 5.2 et les références). Le Tribunal fédéral des assurances a mentionné non seulement qu’une succession de causes différentes d’invalidité entraîne naturellement autant de survenances successives de l’invalidité. Il a également retenu qu’une seule et même cause médicale peut entraîner au cours du temps plusieurs survenances de l’invalidité, en particulier lorsque cette invalidité subit des interruptions notables ou que l’évolution de l’état de santé ne permet plus d’admettre l’existence d’un lien de fait et de temps entre les diverses phases qui deviennent autant de nouveaux cas d’assurance.

Cette jurisprudence a été élaborée dans un contexte particulier. Elle visait à établir le principe de l’unité de la survenance de l’invalidité, c’est-à-dire que cette survenance ne se produisait qu’une fois et ne se renouvelait pas pour chaque groupe spécifique de prestations (ATFA 1966 p. 175 consid. 4 p. 178 ss). Cette question n’avait alors pas été définitivement tranchée dans la mesure où l’infirmité congénitale dont souffrait l’assuré, né en Suisse alors que les conditions d’assurance n’étaient pas remplies, n’avait pu ouvrir le droit à des prestations et constituer un premier cas d’assurance qu’après son inscription dans la liste de l’Ordonnance concernant les infirmités congénitales (OIC) à une date où les conditions d’assurance étaient remplies. Elle a été définitivement tranchée par l’entrée en vigueur le 1er janvier 1968 de l’art. 4 al. 2 LAI, qui prévoit désormais que l’invalidité est réputée survenue dès qu’elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération. Cette disposition consacre donc une notion relative et fonctionnelle de l’invalidité, spécifique aux prestations (ATF 130 V 343 consid. 3.3.2 p. 348).

L’éventualité d’une interruption notable de l’invalidité ou d’une évolution de l’état de santé ne permettant plus d’admettre l’existence d’un lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – et, par conséquent, la survenance d’un nouveau cas d’assurance – a par la suite été plusieurs fois évoquée par le Tribunal fédéral des assurances puis par le Tribunal fédéral. Néanmoins, bien qu’elle n’ait jamais été remise en cause, cette jurisprudence n’a pas été appliquée pour diverses raisons.

Ainsi, dans l’arrêt 9C_36/2015 du 29 avril 2015, bien que le Tribunal fédéral ait rappelé qu’une interruption notable de l’invalidité pouvait justifier la survenance d’un nouveau cas d’assurance (consid. 5.2), il n’a pas fait application de cette éventualité dès lors qu’il n’était pas contesté par le recourant que la nouvelle demande de prestations, constituant un nouveau cas d’assurance, reposait sur une pathologie totalement nouvelle (consid. 5). Dans l’ATF 126 V 5, compte tenu des rapports médicaux réunis, le Tribunal fédéral des assurances a nié l’existence d’interruptions notables de l’incapacité de gain qui auraient permis d’admettre l’existence depuis l’arrivée en Suisse de la personne intéressée d’un nouveau cas d’assurance (consid. 2c p. 10). Dans l’arrêt I 81/90 du 23 avril 1991, il n’a pas eu à se prononcer sur la survenance d’un nouveau cas d’assurance dans la mesure où l’aggravation de l’invalidité d’un assuré mis au bénéfice d’une rente extraordinaire soumise à limite de revenu (il ne remplissait pas les conditions d’assurance pour bénéficier d’une rente ordinaire ou d’une rente extraordinaire non soumise à limite de revenus ; let. A) justifiait le réexamen de son droit dans le cadre d’une procédure de révision de la rente octroyée (consid. 4c). En revanche, dans l’arrêt I 170/94 du 30 mai 1995, il a clairement exclu que l’aggravation d’une atteinte partiellement invalidante à la santé survenue alors que la personne intéressée ne remplissait pas les conditions d’assurance constituât un nouveau cas d’assurance (consid. 4; à ce propos, voir aussi MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3e éd. 2014, no 138 ad art. 4). Le Tribunal fédéral des assurances dans son arrêt I 54/03 du 13 janvier 2004 (consid. 3.2) et le Tribunal fédéral dans son arrêt 8C_93/2017 du 30 mai 2017 (consid. 4.3.3) ont confirmé ce point.

Dans un arrêt 8C_721/2013 du 4 mars 2014, le Tribunal fédéral a ensuite laissé ouverte la question de savoir si, dans le cadre d’une nouvelle demande de prestations fondée sur une même atteinte à la santé, le fait d’avoir recouvré temporairement une pleine capacité de travail justifiait d’admettre un nouveau cas d’assurance ; de toute façon, la personne concernée ne réalisait pas les conditions d’assurance au moment de sa nouvelle annonce (consid. 4.2). On relèvera encore que, dans l’arrêt 9C_592/2015 du 2 mai 2016, le Tribunal fédéral n’a pas eu besoin de s’exprimer sur la réalisation des conditions d’assurance peu après l’arrivée en Suisse de la personne intéressée ni sur la survenance d’un nouveau cas d’assurance dès lors que, consécutivement au dépôt de la première demande de prestations, cette personne ne présentait plus de maladie incapacitante au moment de la naissance du droit à la rente et qu’elle remplissait les conditions d’assurance lors du dépôt de la seconde demande de prestations (consid. 4.2.2 et 4.3). Dans son arrêt 9C_472/2016 du 29 novembre 2016, le Tribunal fédéral a en outre enjoint l’administration à entrer en matière sur la requête d’un assuré (auquel il avait déjà été refusé des prestations au motif qu’il ne remplissait pas les conditions d’assurance) dans la mesure où il avait rendu plausible une « aggravation » de son état de santé faisant suite à une interruption notable de l’incapacité de travail (consid. 5.3).

L’énumération de ces différentes situations met en évidence que le Tribunal fédéral considère qu’il n’y a pas d’interruption notable de l’invalidité justifiant un nouveau cas d’assurance lorsque la personne concernée présente une invalidité (partielle) qui, même si elle varie dans le temps, ne disparaît pas entièrement pendant une période donnée.

 

Eu égard à ce qui précède, il convient dès lors de déterminer si, en fonction des constatations de la juridiction cantonale, selon lesquelles l’assurée a retrouvé une capacité totale de travail de janvier 2003 à octobre 2006 après deux ans d’incapacité partielle, l’invalidité de l’assurée a subi une interruption notable. Or, le médecin-expert a bel et bien attesté une capacité totale de travail entre janvier 2003 et octobre 2006. Interrogé sur ce point particulier, il a aussi confirmé expressément son appréciation. De surcroît, l’expert a dûment motivé son point de vue. Il a décrit de manière détaillée les différents éléments anamnestiques qui avaient guidé ladite appréciation et, sur demande de l’office AI, a encore précisé ces éléments. Dans ces circonstances, il ne suffit donc pas – et il est même erroné – de prétendre comme le fait l’administration que l’amélioration de la situation ne ressortait nullement du rapport d’expertise sur lequel reposait le jugement cantonal. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient encore l’office AI, malgré le fait que l’expert a, dans son appréciation, séparé en deux périodes distinctes (2000-2002 ; 2003-2006) une seule « entité » temporelle (2000-2006), il n’en demeure pas moins qu’il a bel et bien attesté une interruption de trois ans et dix mois de l’incapacité de travail.

L’office AI ne conteste pas – en soi – le caractère notable de l’interruption de l’invalidité, qui correspond en l’occurrence à une période de trois ans et dix mois pendant laquelle l’assurée avait recouvré une pleine capacité de travail. Qu’une telle interruption soit qualifiée de notable n’est pas critiquable ne serait-ce qu’au regard de la période de cotisations nécessaire pour ouvrir le droit à une rente ordinaire, au sens de l’art. 36 al. 1 LAI.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_692/2018 consultable ici

 

 

9C_586/2018 (f) du 07.01.2019 – Révision procédurale – 53 al. 1 LPGA / Expertise médicale – Trouble factice – Faits nouveaux

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_586/2018 (f) du 07.01.2019

 

Consultable ici

 

Révision procédurale / 53 al. 1 LPGA

Expertise médicale – Trouble factice – Faits nouveaux

 

Assuré, né en 1963, serrurier de formation, occupait un poste de maître artisan chargé d’entretenir et de réparer le matériel au sein des ateliers d’une société. Le 09.09.2003, il a sollicité des prestations de l’AI en raison d’une atteinte à l’épaule droite qui l’empêchait d’exercer son métier depuis le 29.08.2002.

Après instruction habituelle et compte tenu de l’aggravation de la situation, le SMR a reconnu l’existence de différentes affections (état dépressif sévère, état de stress post-traumatique et retard mental sur le plan psychiatrique ; syndrome parkinsonien et syndrome de Meige sur le plan neurologique; status après opérations de la coiffe des rotateurs sur le plan rhumatologique) totalement incapacitantes depuis le mois de février 2006. Se fondant sur ces conclusions, l’office AI a dès lors alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité à compter du 01.02.2007. L’administration a également pris en charge les coûts concernant deux appareils acoustiques (communication du 13.08.2009).

Au terme d’une procédure de révision initiée le 22.11.2012, l’office AI a constaté l’absence d’évolution de la situation médicale de l’assuré et confirmé son droit à une rente entière (communication du 20.12.2013).

Au cours de l’instruction d’une requête d’allocation pour impotent déposée le 28.01.2014, l’intéressé a averti l’administration qu’il avait été incarcéré du 12.05.2014 au 25.07.2014. Vu les informations recueillies auprès du Ministère public, l’office AI a d’abord suspendu le versement de la rente à compter du 30.04.2015 par voie de mesures pré-provisionnelles, puis provisionnelles. Il a ensuite requis un nouvel avis des médecins traitants qui ont pour l’essentiel confirmé leurs précédentes conclusions. Il a également mandaté la Clinique romande de réadaptation (CRR) pour qu’elle réalise une expertise pluridisciplinaire (rhumatologie/médecine interne, neurologie, psychiatrie). Les experts ont diagnostiqué un trouble factice, en plus de la surdité bilatérale et du status post-opératoire de l’épaule, et un possible blépharospasme n’influençant pas la capacité de travail dans une activité adaptée.

Se référant à l’expertise, l’office AI a considéré que l’assuré avait simulé les maladies qui lui avaient permis d’obtenir des prestations, ce qui constituait selon elle un fait nouveau, qui justifiait de revenir sur l’octroi de la prestation ; elle a supprimé la rente entière avec effet rétroactif au 01.02.2007.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 192/16 – 204/2018 – consultable ici)

La juridiction cantonale a considéré que les renseignements médicaux recueillis à l’époque de la décision d’octroi de 2007 et de la communication du 20.12.2013 ne permettaient pas d’exclure que les troubles constatés initialement aient cédé le pas à un contexte de simulation. Dès lors, le trouble factice retenu par les médecins de la CRR ne constituait pas un fait nouveau légitimant une révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA. La cour cantonale a aussi relevé que le trouble factice ne justifiait pas plus une reconsidération au sens de l’art. 53 al. 2 LPGA. Elle a encore apprécié le rapport d’expertise et l’a confronté aux autres rapports médicaux récoltés. Elle en a déduit une amélioration notable de l’état de santé de l’assuré au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA et a fixé la survenance de cette amélioration au mois de février 2012 au regard du développement des activités délictueuses.

Par jugement du 12.07.2018, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, réformant la décision en ce sens que la rente entière d’invalidité était supprimée à partir du 01.02.2012.

 

TF

La révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA implique la découverte postérieure à la décision principale de faits nouveaux importants ou de nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Comme l’a déjà indiqué le Tribunal fédéral, les maladies ne peuvent être différenciées clairement les unes des autres en fonction de leurs symptômes de sorte qu’il ne serait pas judicieux de voir dans chaque modification ou correction a posteriori d’un diagnostic un motif justifiant une révision procédurale au sens de la disposition légale citée (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.3.4). Dans ce contexte, les nouveaux résultats d’examen peuvent toutefois constituer un fait nouveau et entrer en considération comme motif de révision s’ils démontrent que, dans la procédure initiale, le médecin examinateur et l’autorité compétente auraient dû exercer leur pouvoir d’appréciation d’une façon nécessairement différente et parvenir à un autre résultat (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.1 et 3.3.4; à titre d’exemple de résultats d’examen justifiant une révision procédurale, arrêt 8C_120/2017 du 20 avril 2017 consid. 2).

Or de tels éléments font défaut en l’espèce. Les médecins de la CRR ont certes relevé qu’aucune des hypothèses diagnostiques qui avaient été émises depuis dix ans et justifié l’allocation des prestations n’avait pas résisté au temps ni à l’analyse critique. Ils en ont inféré l’existence d’un trouble factice englobant les plaintes dépressives, les symptômes de l’état de stress post-traumatique, les manifestations théâtrales et histrioniques ainsi que la symptomatologie exprimée sur le versant somatique, au lieu des différents troubles retenus sur les plans psychiatrique ainsi que neurologique. Il s’agit d’une déduction reposant sur une analyse a posteriori de l’absence d’évolution de la situation médicale au regard des diagnostics posés originellement et de l’échec des traitements entrepris. A cet égard, les experts n’ont pas conclu – ou du moins pas expressément – à la présence du trouble factice dans la procédure initiale déjà. On ne retrouve nulle part dans leur rapport des conclusions indiquant clairement que l’assuré n’avait jamais présenté d’atteintes à la santé. Si leur analyse sur le plan neurologique de la composante organique, qui devait être niée ou du moins minimisée selon eux, ou de la production de certains symptômes, qu’ils qualifiaient d’artefactuelle, laisse supposer que des troubles de ce registre n’ont jamais existé, tel n’est manifestement pas le cas de leur analyse des affections psychiatriques. Les médecins de la CRR font effectivement état de leurs observations au moment de la réalisation de l’expertise, qui leur permet de nier l’existence actuelle de troubles de ce registre. Mais ils ne se prononcent aucunement sur l’évolution ou la crédibilité des pathologies diagnostiquées à l’époque (singulièrement, sur l’évolution de la gravité des épisodes dépressifs ou de la crédibilité des symptômes de l’état de stress post-traumatique tels qu’ils avaient été rapportés par les médecins traitants de l’époque).

Compte tenu des conclusions médicales, l’administration ne peut pas être suivie lorsqu’elle fait remonter les effets – ou l’absence d’effet – du trouble factice sur la capacité de travail au moment de la décision initiale déjà. Son point de vue ne trouve pas appui sur une constatation fondée sur des éléments concrets établissant que ladite décision comporterait des défauts objectifs comme l’exige la jurisprudence citée par le tribunal cantonal pour admettre l’application de l’art. 53 al. 1 LPGA (cf. ATF 127 V 353 consid. 5b p. 358).

 

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_586/2018 consultable ici