9C_36/2018 (f) du 17.05.2018 – Revenu d’invalide exigible – 16 LPGA / Exigibilité d’un changement d’activité professionnelle d’un agriculteur dans le cadre de l’obligation de diminuer le dommage

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2018 (f) du 17.05.2018

 

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Revenu d’invalide exigible / 16 LPGA

Exigibilité d’un changement d’activité professionnelle d’un agriculteur dans le cadre de l’obligation de diminuer le dommage

 

Assuré né en 1965, marié et père de quatre enfants (nés en 1989, 1991 et 2003), exploite une entreprise agricole. Sur instruction, il ressort que l’assuré souffre d’un status après rupture traumatique en 2008 de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche et non traumatique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite en 2013. Le médecin du SMR a fixé le début de l’incapacité durable de travail dans l’activité habituelle au mois de septembre 2008, et indiqué que celle-ci n’était plus exigible, bien qu’elle fût toutefois encore pratiquée par l’assuré à plein temps, avec aménagements, mais avec une diminution de rendement de l’ordre de 70%; il a en revanche conclu à une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles retenues, sans diminution de rendement.

Après une enquête économique pour les indépendants puis une enquête agricole, l’office AI a rejeté la demande de prestations. En bref, elle a considéré qu’en tenant compte des changements de production à opérer au sein de l’entreprise agricole, le taux d’invalidité de l’assuré s’élevait à 6% (5,56%; résultant de la comparaison d’un revenu d’invalide de 27’284 fr. avec un revenu sans invalidité de 28’893 fr., correspondant au revenu annuel moyen de l’exploitation pour les années 2008 à 2012 [soit 49’461 fr.], après répartition en fonction de l’aide apportée par les membres de la famille à l’entreprise). Par ailleurs, si l’intéressé subissait effectivement une incapacité de travail dans son activité habituelle d’agriculteur indépendant depuis le 19.04.2013, il présentait une pleine capacité de travail dans une activité adaptée à son état de santé, lui permettant au demeurant de réaliser un revenu plus élevé que son revenu de valide.

 

Procédure cantonale (arrêt 608 2016 245 – consultable ici)

La juridiction cantonale a examiné si un changement de profession pouvait effectivement être exigé de celui-ci, ce qu’elle a admis. En conséquence, les premiers juges ont confirmé le revenu d’invalide arrêté par l’administration en se fondant sur le tableau TA1 de l’ESS 2012, soit un revenu de 66’155 fr. 05 correspondant à l’exercice d’une activité dans l’industrie légère. Dans la mesure où ce revenu était plus élevé que le revenu annuel moyen généré par l’exploitation agricole avant la survenance de la première atteinte à la santé en 2008, ils ont nié la présence d’une invalidité. Ils ont finalement considéré que l’assuré ne pouvait pas se voir reconnaître le droit à une rente d’invalidité limitée dans le temps pour la période de transition nécessaire à la liquidation de son entreprise ou à la recherche d’un repreneur.

Par jugement du 20.11.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Dans le domaine de l’assurance-invalidité, on applique de manière générale le principe selon lequel un invalide doit, avant de requérir des prestations, entreprendre de son propre chef tout ce qu’on peut raisonnablement attendre de lui, pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité; c’est pourquoi un assuré n’a pas droit à une rente lorsqu’il serait en mesure, au besoin en changeant de profession, d’obtenir un revenu excluant une invalidité ouvrant droit à une rente. La réadaptation par soi-même est un aspect de l’obligation de diminuer le dommage et prime aussi bien le droit à une rente que celui à des mesures de réadaptation. Le point de savoir si une mesure peut être exigée d’un assuré doit être examiné au regard de l’ensemble des circonstances objectives et subjectives du cas concret. Par circonstances subjectives, il faut entendre en premier lieu l’importance de la capacité résiduelle de travail ainsi que les facteurs personnels tels que l’âge, la situation professionnelle concrète ou encore l’attachement au lieu de domicile. Parmi les circonstances objectives doivent notamment être prises en compte l’existence d’un marché du travail équilibré et la durée prévisible des rapports de travail (ATF 138 I 205 consid. 3.2 p. 209 et les références ; cf. aussi arrêt 9C_644/2015 du 3 mai 2016 consid. 4.3.1).

Dans le cas d’un assuré de condition indépendante, on peut exiger, pour autant que la taille et l’organisation de son entreprise le permettent, qu’il réorganise son emploi du temps au sein de celle-ci en fonction de ses aptitudes résiduelles. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que plus la taille de l’entreprise est petite, plus il sera difficile de parvenir à un résultat significatif sur le plan de la capacité de gain. Au regard du rôle secondaire des activités administratives et de direction au sein d’une entreprise artisanale, un transfert de tâches d’exploitation proprement dites vers des tâches de gestion ne permet en principe de compenser que de manière très limitée les répercussions économiques résultant de l’atteinte à la santé (arrêt 9C_580/2007 du 17 juin 2008 consid. 5.4). Aussi, lorsque l’activité exercée au sein de l’entreprise après la survenance de l’atteinte à la santé ne met pas pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle de l’assuré, celui-ci peut être tenu, en fonction des circonstances objectives et subjectives du cas concret, de mettre fin à son activité indépendante au profit d’une activité salariée plus lucrative (cf. arrêts 9C_578/2009 du 29 décembre 2009 consid. 4.2.4; 9C_236/2009 du 7 octobre 2009 consid. 4.3 et les références; voir également arrêt 8C_748/2008 du 10 juin 2009 consid. 4; s’agissant de la situation d’un agriculteur, voir arrêt I 38/06 du 7 juin 2006 consid. 3.2 et les références). De jurisprudence constante, ce n’est qu’à des conditions strictes que l’on peut considérer qu’un changement d’activité professionnelle, singulièrement la cessation d’une activité agricole, ne constitue pas une mesure raisonnablement exigible de l’assuré; en particulier, l’activité exercée jusqu’alors ne doit pas être poursuivie aux coûts de l’assurance-invalidité, même si l’intéressé effectue un travail d’une certaine importance économique (arrêts 9C_644/2015 du 3 mai 2016 consid. 4.3.1; 8C_413/2015 du 3 novembre 2015 consid. 3.3.1; 9C_357/2014 du 7 avril 2015, consid. 2.3.1; 9C_624/2013 du 11 décembre 2013 consid. 3.1.1; 9C_834/2011 du 2 avril 2012 consid. 4 et les références).

Le point de savoir ce qui est exigible de l’assuré afin de satisfaire à l’obligation de diminuer le dommage est un élément qui doit être examiné sur la base des circonstances existant après la survenance de l’invalidité sans attendre de voir si le résultat escompté se réalise effectivement. L’analyse doit ainsi être effectuée de manière pronostique et non pas rétrospective (cf. arrêt 9C_156/2008 du 18 novembre 2008 consid. 3.1 ; ATF 124 V 108 consid. 3b p. 111 s.; 110 V 99 consid. 2 p. 102).

La juridiction cantonale a relevé que, d’un point de vue objectif, rien ne faisait obstacle à ce que l’assuré changeât d’activité professionnelle. Âgé de 51 ans au moment de la décision litigieuse, l’assuré n’avait pas atteint l’âge à partir duquel la jurisprudence considère généralement qu’il n’existe plus de possibilité réaliste de mise en valeur de la capacité résiduelle de travail sur un marché de l’emploi supposé équilibré (cf. ATF 143 V 431 consid. 4.5.2 p. 433 et les références). Il ne semble par ailleurs pas que le choix de postes de travail exigibles fût si limité qu’il rendît très incertaine la possibilité de trouver un emploi, malgré l’absence de réelle expérience professionnelle de l’assuré dans un domaine économique autre que celui dans lequel il a toujours œuvré. La juridiction cantonale a en effet relevé que les limitations fonctionnelles de l’assuré n’étaient « pas très restrictives » et qu’il bénéficiait d’un « très large panel d’activités à choix » ; elle a au demeurant souligné que le maintien de l’activité habituelle était « clairement contre-indiqué médicalement », ce que l’assuré ne conteste pas.

Quant à l’argumentation relative à l’attachement subjectif et personnel qui lie un agriculteur à son entreprise, elle ne suffit pas non plus pour conclure à l’absence d’exigibilité d’un changement d’occupation professionnelle. Si le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de constater que le passage du statut d’agriculteur indépendant à celui de salarié constitue, dans les faits, une profonde remise en question socio-professionnelle, qui présuppose des facultés d’adaptation considérables d’un point de vue subjectif, elle a cependant aussi, dans la situation alors jugée, attaché de l’importance à la circonstance que les perspectives de revenus offertes par un changement d’activité n’étaient que légèrement plus élevées que celles liées au revenu obtenu dans l’activité agricole (cf. arrêt 9C_578/2009 du 29 décembre 2009 consid. 4.3.2), ce qui n’est précisément pas le cas en l’occurrence compte tenu du salaire d’invalide déterminé par la juridiction cantonale en fonction d’une activité adaptée dans l’industrie légère.

Le Tribunal fédéral a jugé, à plusieurs reprises, que l’attachement au domaine familial ne saurait avoir pour conséquence de nier le caractère exigible d’un changement de profession lorsque celui-ci induit une meilleure valorisation économique de la capacité de travail de l’assuré (arrêts 8C_413/2015 du 3 novembre 2015 consid. 3.3.2; 9C_834/2011 du 2 avril 2012, consid. 4 et les références). A cet égard, on relèvera au demeurant que l’exigibilité de la réinsertion dans une nouvelle activité n’oblige pas, en tant que telle, l’intéressé à quitter son domaine. Il demeure en effet libre de poursuivre son activité agricole ; dans ce cas, toutefois, il ne saurait prétendre des prestations à la charge de l’assurance-invalidité (cf. arrêt 8C_413/2015 du 3 novembre 2015 consid. 3.3.2).

Dans ces conditions, il faut admettre que c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu’il était raisonnablement exigible de l’assuré qu’il abandonnât son activité d’agriculteur indépendant au profit d’un emploi adapté à ses limitations fonctionnelles, dans lequel il était susceptible de mettre en œuvre une capacité entière de travail. Dans la mesure où l’assuré invoque comme seule perspective à ce sujet l’inscription à l’assurance-chômage, il omet que l’exigibilité de l’exercice d’une certaine activité et le revenu hypothétique en résultant sont examinés au regard du marché du travail équilibré (cf. art. 16 LPGA).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_36/2018 consultable ici

 

 

8C_657/2017 (f) du 14.05.2018 – Causalité naturelle – Valeur probante d’une expertise médicale réalisée par la Clinique Corela – 6 LAA – 44 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_657/2017 (f) du 14.05.2018

 

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Causalité naturelle – Valeur probante d’une expertise médicale réalisée par la Clinique Corela / 6 LAA – 44 LPGA

 

Assuré, né en 1964, a subi un œdème et un hématome à la main droite lors d’un déménagement, le 19.05.1992. Cet accident a été annoncé à l’assureur-accidents de l’époque. Le 17.08.1992 le prénommé a été engagé en qualité de garçon d’office dans un restaurant d’entreprise. A ce titre, il était assuré obligatoirement contre le risque d’accident auprès d’une autre assurance-accidents. Le 23.02.1996, il a chuté sur le sol et s’est blessé à la main droite alors qu’il portait une grille d’évacuation d’eau. Plusieurs interventions chirurgicales ont été réalisées en particulier une arthrodèse de l’articulation trapézo-métacarpienne droite (le 03.09.1996) et une reprise d’arthrodèse, ainsi qu’une greffe et l’ablation du matériel d’ostéosynthèse (le 26.07.2004). Le 08.05.2012, il a été procédé à une désarthrodèse de la main droite et à la mise en place d’une prothèse Pi2 à droite.

Le dossier a été la source de diverses péripéties judiciaires (dont les arrêts U 270/00 du 31.01.2001, 8C_738/2008 du 14.10.2008 et 8C_221/2012 du 04.04.2013).

L’assurance-accidents a confié une expertise à un spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, de la Clinique Corela. Se fondant sur les conclusions de l’expert, elle a rendu une décision, confirmée sur opposition, par laquelle elle a nié le droit de l’assuré à des prestations d’assurance au motif que l’existence d’un lien de causalité naturelle entre les troubles et l’accident du 23.01.1996 n’était pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante. Aussi a-t-elle supprimé le droit aux prestations avec effet ex nunc et pro futuro en renonçant à réclamer la restitution des prestations déjà allouées. L’assurance-accidents a retenu que l’intéressé n’était pas tombé sur sa main lors de sa chute et n’avait pas non plus reçu la grille d’évacuation d’eau sur cette partie du corps. En revanche il avait été victime de plusieurs accidents avant le 23.02.1996, à savoir une chute sur le poignet droit le 20.04.1992, ainsi qu’une atteinte résultant de la chute d’un objet lourd sur cette partie du corps le 19.05.1992. Les examens radiologiques effectués après ces accidents avaient révélé une fracture intra-articulaire ancienne à la base du premier métacarpien droit, consolidée en position vicieuse, ainsi qu’un remaniement arthrosique de la base du pouce droit.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/686/2017 – consultable ici)

La cour cantonale a considéré que la question du droit de l’assuré à des prestations d’assurance pour la période antérieure au 30.09.2007 était définitivement tranchée étant donné notamment les décisions de l’assurance-accidents de prise en charge de l’intervention de reprise d’arthrodèse du 26.07.2004 et d’octroi d’une indemnité journalière depuis cette date jusqu’au 30.09.2007, ainsi que les jugements de la cour cantonale, entrés en force, et les arrêts du Tribunal fédéral excluant que le statu quo sine vel ante fût atteint avant le 30.09.2007. Par ailleurs la juridiction précédente a nié toute valeur probante aux conclusions de l’expert mandaté. En premier lieu elle reproche à cet expert de s’être fondé sur une fausse prémisse en tant qu’il retient que l’assuré n’a pas subi de choc à la main droite lors de sa chute, le 23.02.1996. Au surplus l’expert mandaté ne reproduit pas les plaintes de l’assuré et ne s’est pas prononcé sur le lien de causalité entre l’accident du 23.02.1996 et l’état pathologique au moment de l’examen, ni sur le point de savoir si le statu quo sine vel ante était atteint.

Par jugement du 14.08.2017, admission du recours par le tribunal cantonal, retenant que l’avènement du statu quo sine vel ante n’était pas établi sur la base d’un avis d’expert ayant valeur probante, de sorte que l’assurance-accidents était tenue de poursuivre le versement de ses prestations.

 

TF

Valeur probante d’une expertise médicale réalisée par la Clinique Corela

Outre le fait que le rapport de l’expert ne répond pas à la question de savoir si, et le cas échéant, à quel moment le statu quo sine vel ante a été atteint, il n’est pas certain que l’on puisse accorder pleine confiance aux conclusions de cette expertise pratiquée au sein du « département expertise » de la Clinique Corela. En effet, par arrêté du 25.06.2015 le Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé de la République et canton de Genève a retiré à cet établissement l’autorisation d’exploiter une institution de santé pour une durée de trois mois. Ce retrait a été confirmé par le Tribunal fédéral en ce qui concerne du moins les départements « psychiatrie » et « expertise » de cet établissement. Le Tribunal fédéral a retenu que les expertises pratiquées auprès du département en question ont un poids déterminant pour de nombreux justiciables, de sorte que l’on peut attendre de ces expertises qu’elles soient rendues dans les règles de l’art. Il existe ainsi un intérêt public manifeste à ce que des acteurs intervenant dans des procédures administratives en tant qu’experts, et qui au demeurant facturent d’importants montants à la charge de la collectivité, rendent des expertises dans lesquelles l’administré et l’autorité peuvent avoir pleine confiance, ceux-ci n’étant le plus souvent pas des spécialistes des domaines en cause. Or de très importants manquements ont été constatés dans la gestion de l’institution de santé et en particulier des graves violations des devoirs professionnels incombant à une personne responsable d’un tel établissement. C’est pourquoi le Tribunal fédéral a jugé qu’une mesure de retrait de trois mois de l’autorisation d’exploiter le département « expertise » n’était pas contraire au droit (arrêt 2C_32/2017 du 22 décembre 2017).

A la suite de cet arrêt, la Cour de justice de la République et canton de Genève a publié un communiqué de presse aux termes duquel les assurés dont le droit à des prestations a été nié sur la base d’une expertise effectuée à la Clinique Corela ont la possibilité de demander la révision – devant l’autorité qui a statué en dernier lieu (Office cantonal de l’assurance-invalidité, CNA ou autre assurance, chambre des assurances sociales de la Cour de justice ou Tribunal fédéral) – de la décision les concernant – sans garantie quant au succès de cette démarche – dans un délai de 90 jours depuis la connaissance des faits susmentionnés. De son côté, répondant à la question de Madame la Conseillère nationale Rebecca Ruiz (question 18.5054; consultable sur le lien https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20185054), le Conseil fédéral a indiqué que les organes de l’assurance-invalidité avait renoncé à confier des mandats d’expertise à cette clinique depuis 2015 et qu’ils venaient de résilier la convention tarifaire conclue avec celle-ci.

Vu ce qui précède on ne saurait reprocher à la cour cantonale de s’être écartée – même si c’est pour d’autres motifs – des conclusions de l’expert mandaté par l’assurance-accidents et d’avoir renvoyé la cause à la recourante pour instruction complémentaire sur le point de savoir si le statu quo sine vel ante a été atteint, et le cas échéant, à quel moment.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_657/2017 consultable ici

 

 

Interpellation Häsler 18.3188 « Dépendance économique des établissements spécialisés dans l’expertise médicale »

Interpellation Häsler 18.3188 « Dépendance économique des établissements spécialisés dans l’expertise médicale »

 

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Texte déposé

Les médias romands se sont fait l’écho de l’affaire qui touche la clinique genevoise Corela (aujourd’hui Medlex), spécialisée dans l’expertise médicale pour le compte de différents assureurs (caisses-maladie, assurance-accidents, assurance-invalidité) et qui a été suspendue durant trois mois pour avoir modifié des rapports d’expertise. Le Tribunal fédéral a considéré comme établi que le responsable de l’établissement avait, de sa propre initiative, modifié au détriment des assurés plusieurs rapports d’expertise, notamment en ce qui concerne les diagnostics, ce qui a conduit à priver de rente des personnes qui auraient dû y avoir droit.

Cette affaire montre de manière caricaturale que les établissements spécialisés dans l’expertise médicale sont souvent économiquement trop dépendants des assurances. De fait, le marché de l’expertise médicale est un marché lucratif : il représentait ainsi 97% de l’activité de Corela. Or, lorsqu’un tel établissement dépend économiquement des mandats que lui confient des assureurs, il risque de se laisser aller à réaliser des rapports favorables aux assurances, ou même de simple complaisance. L’affaire de la clinique Corela n’est pas un cas isolé : le responsable du centre d’expertise ABI, qui travaille pour l’AI, a lui aussi modifié a posteriori des rapports d’expertise – ce qui n’empêche pas l’AI de continuer à confier des mandats à ABI.

Aussi prié-je le Conseil fédéral de bien vouloir répondre aux questions suivantes :

  1. Dans combien d’expertises monodisciplinaires, bidisciplinaires et pluridisciplinaires Corela était-elle impliquée ?
  2. Le Conseil fédéral a-t-il connaissance d’affaires similaires touchant d’autres experts ou d’autres établissements spécialisés dans l’expertise médicale ?
  3. Que peut-on faire pour assurer un meilleur contrôle qualitatif sur ces établissements et pour éviter que de telles affaires ne se reproduisent ?
  4. Que peut-on faire pour éviter que les établissements spécialisés dans l’expertise médicale ne deviennent financièrement dépendants des assureurs ?
  5. Serait-il envisageable que l’OFAS tienne également une liste pour les affaires monodisciplinaires et bidisciplinaires avec la possibilité de biffer les entreprises qui ont manqué à leurs obligations ?
  6. Le Conseil fédéral peut-il envisager qu’un principe aléatoire soit également mis en place pour le choix du centre lorsqu’il s’agit d’expertises monodisciplinaires ou bidisciplinaires ?
  7. Peut-il envisager que, comme c’est le cas dans d’autres domaines du droit, les centres chargés d’établir les expertises soient composés paritairement et que les assurés disposent d’un droit de regard sur leur choix ?
  8. Peut-il envisager que les conclusions des rapports d’experts fassent l’objet de relevés statistiques et qu’elles soient rendues publiques, de manière à renforcer la transparence dans le domaine de l’expertise médicale ?

 

Avis du Conseil fédéral du 23.05.2018

  1. D’après le rapport de SuisseMED@P, l’AI a confié à la clinique Corela 44 mandats d’expertise pluridisciplinaire en 2013 [rapport et annexe], 24 en 2014 [rapport et annexe] et 40 en 2015 [rapport et annexe]. Les autorités genevoises estiment que le responsable de la clinique a modifié onze expertises sans l’accord des experts qui les ont réalisées; toutefois, elles n’ont pas pu, pour des raisons de protection des données, répondre aux demandes de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) qui souhaitait obtenir des renseignements et des documents sur la procédure suivie et les assurés de l’AI concernés. La clinique a indiqué avoir réalisé respectivement 982, 753 et 828 expertises pour des assureurs privés pendant ces trois années.
  2. Le Conseil fédéral n’a pas connaissance d’autres affaires dans lesquelles des expertises pluridisciplinaires ont été modifiées sans l’accord des experts, y compris dans des instituts d’expertises médicales ABI.
  3. Sur la base de l’uniformisation des mandats d’expertise et de la structure de l’expertise introduite dans l’AI en 2018, l’OFAS élabore actuellement une nouvelle convention tarifaire prévoyant des exigences accrues en matière de qualité processuelle et structurelle des centres d’expertise. Il vérifiera le respect de ces nouveaux critères et nouvelles exigences avant la conclusion du contrat. Le nouveau tarif s’appliquera dans un an environ. En outre, dans le cadre du développement continu de l’AI (FF 2017 2363), il est prévu d’introduire en droit fédéral des critères de qualité concernant l’admission des experts médicaux qui s’appliqueront pour toutes les assurances sociales. Par ailleurs, le Conseil fédéral doit se voir octroyer la possibilité de créer ou de mandater un service indépendant chargé de l’accréditation et du contrôle des centres d’expertise ainsi que de l’assurance qualité.
  4. Le Conseil fédéral estime que le système d’attribution aléatoire des mandats d’expertise utilisé actuellement constitue une bonne solution pour garantir l’indépendance des centres d’expertise (voir postulat Fridez 14.3816). C’est également le point de vue défendu par le Tribunal fédéral (voir ATF 139 V 349). En Suisse, l’offre d’experts médicaux qualifiés reste faible comparée à la forte demande d’expertises médicales dans l’AI (5800 pluridisciplinaires, 10 400 monodisciplinaires et bidisciplinaires en 2017). Malgré des interventions auprès des cantons, seuls quatre centres d’expertise de droit public continuent à travailler pour l’AI, les 27 centres d’expertise restants étant organisés selon le droit privé.
  5. En vertu de l’article 72bis du règlement sur l’assurance-invalidité (RAI), l’OFAS ne conclut des conventions tarifaires valables dans toute la Suisse que pour les expertises pluridisciplinaires complexes. Pour les expertises monodisciplinaires et bidisciplinaires, ce sont les offices AI qui choisissent les experts médicaux et leur attribuent un mandat, sans convention tarifaire spécifique. Cela permet de répartir les expertises de manière aussi rapide et équilibrée que possible dans les régions, et de contrôler directement la qualité des expertises réalisées. Les experts fautifs ou qui ne remplissent pas les critères de qualité requis peuvent être exclus rapidement et facilement de l’attribution d’autres expertises par les offices AI. Le Conseil fédéral ne voit donc aucune nécessité d’intervenir dans ce domaine.
  6. Le Conseil fédéral estime qu’il n’est pas nécessaire de recourir au principe aléatoire pour l’attribution des expertises monodisciplinaires et bidisciplinaires. Les experts ne sont confrontés ni à un conflit d’intérêts, ni à une dépendance financière, puisqu’il s’agit d’une activité accessoire en sus de leur activité en cabinet. C’est ce que montre une étude menée dans le cadre du programme de recherche sur l’AI (PR-AI) intitulée « Ärztliche Aus-, Weiter- und Fortbildung der medizinischen Gutachterinnen und Gutachter » (2018, rapport no 5/18). Par ailleurs, le nombre d’expertises monodisciplinaires et bidisciplinaires étant nettement plus élevé que celui des expertises pluridisciplinaires (voir ch. 4), une répartition aléatoire via une plateforme comme SuisseMED@P ne serait pas réalisable (voir postulat Fridez 14.3816).
  7. Dans les assurances sociales, les procédures se fondent sur la maxime d’office. Il incombe aux assureurs de prendre d’office les mesures d’instruction nécessaires. Les droits de participation de l’assuré dans les procédures de l’AI ont été fortement consolidés au cours des dernières années, ce dernier pouvant donner son avis quant au choix des experts. Si les objections et les motifs de récusation concrets de l’assuré à l’encontre des experts sont pertinents, un autre expert est mandaté. Dans le cas contraire, l’office AI rend une décision incidente, qui peut être examinée par un tribunal indépendant (voir ip. Heim 15.4093). Le développement continu de l’AI prévoit l’adaptation de l’article 44 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) visant à introduire dans la loi les principes dégagés par la jurisprudence en matière d’expertise. La réalisation d’expertises pluridisciplinaires complexes dans un délai raisonnable nécessite une certaine infrastructure et un réseau de médecins habitués à établir des expertises dans le contexte d’une recherche de consensus entre les spécialistes impliqués. C’est la raison pour laquelle ces centres d’expertise doivent être agréés par l’OFAS (voir ch. 5). Avec plus de 5000 expertises pluridisciplinaires, il n’est en l’état pas possible d’instaurer la parité au sein de l’équipe des experts. Le Conseil fédéral est donc d’avis que les mesures actuelles et prévues suffisent pour garantir le droit de codécision des assurés.
  8. Le rapport annuel sur SuisseMED@P assure la transparence en matière de répartition des expertises pluridisciplinaires dans l’AI. En vue d’assurer une communication transparente des résultats, la qualité et le caractère concluant d’une expertise donnée ne peuvent toutefois être appréciés qu’en fonction du cas d’espèce concerné. L’expert doit pouvoir être évalué d’après chacune de ses expertises, lesquelles doivent souvent résister à l’examen d’un tribunal indépendant. Le Conseil fédéral estime qu’il n’est pas judicieux de recenser l’ensemble des résultats (incapacité de travail attestée) ni de les publier (voir ip. Heim 15.4093). Le Tribunal fédéral considère lui aussi que de telles statistiques ne sont pas déterminantes (voir ATF 8C_599/2014).

 

Chronologie

30.05.2018 : L’objet est repris.

15.06.2018 : Conseil national – Discussion reportée.

 

 

Interpellation Häsler 18.3188 « Dépendance économique des établissements spécialisés dans l’expertise médicale » consultable ici

 

 

Remarques

Nous nous permettons de sortir – pour une fois – de notre réserve pour partager quelques questions restées sans réponse.

Le 05.03.2018, le Conseil fédéral mentionnait que l’AI avait renoncé à confier des mandats d’expertise à cette clinique depuis 2015 déjà (réponse du Conseil fédéral du 05.03.2018 à la quesiton Ruiz 18.5054 « La clinique Corela a-t-elle encore la confiance de l’OFAS? »). La réponse était la même le 12.03.2018 (cf. communiqué de presse du 12.03.2018 et réponse du Conseil fédéral du 12.03.2018 à la question Bauer 18.5130 « Centre d’expertise Corela et AI. Et maintenant? »).

Or, le rapport 2015 de SuisseMED@P fait mention de 40 mandats attribués à la Clinique Corela, soit une augmentation de 166% par rapport à 2014. Ce n’est qu’à partir de 2016, que le nombre de mandats attribués tombe à zéro (cf. rapport 2016 de SuisseMED@P). L’OFAS et le Conseil fédéral ont-ils fait une erreur de date ?

La transparence, évoquée à la réponse 8 du Conseil fédéral, ne semble pas avoir été mise en pratique. Malgré nos recherches, nous n’avons pas trouvé le rapport 2017 de SuisseMED@P ; il n’est pas non plus sur la page de l’OFAS dédiée aux expertises médicales de l’AI.

Par ailleurs, si l’OFAS ne confiait plus de mandat d’expertise à cette clinique, pourquoi cette dernière était toujours un centre d’expertises pluridisciplinaires lié à l’OFAS par une convention au sens de l’art. 72bis RAI en février 2018 (cf. notre article du 26.02.2018) ? Ce n’est que le 15.03.2018 que la Clinique Corela (devenue MedLex) n’apparaît plus sur la liste des centres d’expertises pluridisciplinaires liés à l’OFAS, soit après les échos parus dans la presse.

Une autre question serait de savoir pourquoi l’OFAS ne leur confiait plus de mandat. Sauf erreur de notre part, l’OFAS ne s’est pas exprimé à ce sujet.

Cette affaire met à mal la confiance des assurés dans le système des assurances sociales. Cette affaire jette le discrédit sur les centres d’expertises et les experts médicaux. Les pistes évoquées dans le cadre du développement continu de l’AI seront-elles suffisantes pour retrouver la confiance des administrés ?

Un tel climat n’est pas non plus propice à faire naître des vocations d’expert chez les médecins. Il ne faut pas non plus perdre de vue qu’il est nécessaire de trouver une relève aux médecins experts actuellement en exercice et que la Suisse romande, en particulier, souffre d’un manque chronique de médecins experts. N’oublions pas qu’un bon médecin ne fait pas – forcément – un bon expert. Cela est d’autant plus vrai lorsque la causalité naturelle et le critère de la vraisemblance prépondérante sont au centre du mandat d’expertise.

Nous relevons encore que cela intervient dans une période où se discute également la mise en œuvre de la surveillance des assurés. Nous avons connu période plus sereine.

Nous espérons que ces quelques questions auront, un jour, une réponse de la part de l’OFAS.

 

L’inspection du travail s’avère efficace dans la prévention des risques psychosciaux

L’inspection du travail s’avère efficace dans la prévention des risques psychosciaux

 

Communiqué de presse du SECO du 21.06.2018 consultable ici

 

A l’occasion d’une action prioritaire consacrée aux risques psychosociaux, en cours depuis 2014, le Secrétariat d’Etat à l’Economie (SECO) a mesuré les effets des contrôles de l’inspection du travail dans ce domaine spécifique. L’étude a montré que les inspecteurs ont des impacts positifs sur la mise en œuvre des mesures de prévention. Elle a également révélé que les employeurs sont souvent prêts à s’investir dans de telles mesures. Ils tendent toutefois à les aborder plutôt sous l’angle du soutien aux collaborateurs et collaboratrices en difficulté. Or pour endiguer ces risques, des mesures touchant à l’organisation du travail sont également nécessaires.

 

Résumé

Contexte et objectif

Stress, harcèlement, agressions, … : de nombreux gouvernements développent des programmes d’intervention contre ces « risques psychosociaux au travail » (RPS). Plus difficiles à appréhender que d’autres nuisances professionnelles, les RPS sont un défi pour les autorités et pour les entreprises. En effet, pour les comprendre et les prévenir, il est nécessaire de se pencher sur la manière dont le travail est conçu et organisé : nature des tâches, processus de production, marge de manœuvre, information, contrôles hiérarchiques, relations sociales, charge de travail, etc. Or ces dimensions ne font traditionnellement pas partie du cœur de métier des spécialistes de la sécurité et de la santé au travail, ni des inspecteurs du travail.

Pour renforcer la prise en compte des RPS dans les démarches de prévention des risques professionnels, le Secrétariat d’Etat à l’Economie (SECO) et les inspections cantonales du travail conduisent une action prioritaire d’exécution dévolue à cette thématique. Cette action est soutenue par l’Association intercantonale pour la protection des travailleurs et par les partenaires sociaux. Par « action prioritaire », on entend une planification coordonnée des activités régulières d’inspection pendant une durée déterminée, en fonction d’objectifs précis (thème, branches). Ces objectifs sont fixés d’un commun accord entre le SECO et les cantons, en fonction d’une analyse des risques. En l’occurrence, l’action prioritaire axée sur les RPS a débuté en 2014 et se poursuit jusqu’en 2018. Dans ce cadre, le SECO a organisé des cours de formation continue pour les inspecteurs et conçu un guide d’inspection des RPS. De la documentation a été mise à disposition des entreprises, notamment via un site Internet (http://www.psyatwork.ch/). Enfin, le SECO a participé à diverses manifestations afin d’attirer l’attention des employeurs et des spécialistes de la santé et de la sécurité au travail sur ces questions. Les inspecteurs ont été invités à aborder plus systématiquement les RPS lors de leurs visites d’inspection, en informant, en sensibilisant et en conseillant les entreprises. Ils doivent également contrôler quels processus et mesures celles-ci mettent en place pour protéger leur personnel contre les atteintes à l’intégrité personnelle (discrimination, harcèlement, etc.) et pour s’assurer que les exigences du travail sont proportionnées aux capacités des salariés. En revanche, il n’appartient pas aux inspecteurs d’identifier eux-mêmes les facteurs de risques psychosociaux ; cette tâche incombe aux employeurs.

Peu d’études ont cherché à évaluer l’impact de l’intervention de l’Etat sur la prévention des RPS ; aucune n’a été effectuée pour mesurer les effets des visites d’inspection dans ce domaine. Disposer de données scientifiques permettrait d’identifier les facteurs qui facilitent ou qui font obstacle à l’action publique dans ce domaine, et ainsi d’optimiser les stratégies d’intervention. C’est la raison pour laquelle le SECO et les inspections cantonales ont convenu de réaliser une étude scientifique visant d’une part à mesurer les effets de l’action prioritaire portant sur les RPS, et d’autre part à identifier les leviers et les obstacles rencontrés par les inspecteurs dans ce domaine.

 

Résultats

25 publications ont été incluses dans la revue systématique de la documentation scientifique. Parmi celles qui contenaient des indications sur l’efficacité de l’action publique en matière de prévention des RPS, 4 ont relevé des effets positifs, 2 des effets éventuellement positifs, 4 des résultats mitigés, et 10 des effets faibles ou nuls. Seules quelques études ont fondé leurs conclusions sur des données quantitatives. Il ressort de la revue que les visites d’inspection sont plutôt efficaces à l’échelle d’une entreprise. Malgré cela, l’impact des politiques publiques au niveau du tissu économique dans son ensemble reste modeste. En effet, la complexification du monde du travail et l’augmentation des formes atypiques d’emploi, qui sont associées à des risques professionnels accrus, représentent des obstacles à l’intervention de l’Etat en matière de RPS ; elles ont notamment pour conséquence de compliquer l’accès des inspections aux entreprises et aux travailleurs. Les publications scientifiques indiquent également que le respect de la législation est un des principaux motifs d’action pour les entreprises, davantage cependant dans le domaine de la sécurité au travail que dans celui des RPS.

Les modèles de régression multivariée utilisés dans l’étude quantitative montrent que les inspections ont conduit à des améliorations statistiquement significatives (p<.05) dans plusieurs domaines, principalement la gestion de la santé et de la sécurité au travail, la disposition des employeurs à prévenir les RPS, et leurs compétences en la matière. Taille et prévention sont liées : les scores sont tendanciellement plus élevés dans les entreprises de plus de 100 collaborateurs, par rapport aux sociétés plus petites. En effet, les ressources des grandes entreprises leur permettent plus facilement de mettre en place des processus et des mesures de prévention. Les entreprises de moins de 100 personnes présentent une marge de progression plus importante ; de fait, c’est parmi elles que les effets de l’inspection se sont avérés les plus marqués. Ainsi, dans le secteur tertiaire, les entreprises inspectées et comptant moins de 100 collaborateurs ont, en comparaison avec les entreprises non inspectées, amélioré de 2.05 points (sur 12) leur score sur l’échelle de « gestion de la santé-sécurité », de 1.55 point leur score sur l’échelle de « compétences en matière de RPS », et de 0.93 point leur score sur l’échelle de « disposition à prendre des mesures ». Des résultats similaires, mais moins marqués, s’observent dans les entreprises de 100 personnes et plus. Des effets statistiquement significatifs ont également été relevés dans les entreprises de l’industrie et de la construction comptant moins de 100 employés, avec une augmentation de 1.76 point du score sur l’échelle de « compétences en matière de RPS » et de 2.43 points pour le score sur l’échelle de « disposition à prendre des mesures », en comparaison avec les sociétés non inspectées.

En comparaison avec les entreprises non inspectées, les établissements inspectés ont plus souvent mis en oeuvre certaines mesures de prévention spécifiques : charte ou règlement, clarification des rôles pour la prise en charge de ces problématiques (p<.001), adaptation des tâches pour certains employés stressés (p<.01), procédure de résolution des conflits, offre de soutien individuel en cas de difficultés, mise en place d’un système d’enregistrement des horaires (p<.05).

En revanche, l’étude n’a pas mesuré d’effet statistiquement significatif sur le score sur l’échelle de « participation du personnel en matière de santé au travail », ce qui peut s’expliquer par la difficulté à aborder ce thème et à associer des travailleurs au processus d’inspection. Aucun effet significatif n’a été mesuré non plus au niveau des mesures touchant à l’organisation ou au contenu du travail.

Enfin, l’étude qualitative et l’enquête par questionnaire auprès des inspecteurs ont mis en évidence que, les inspecteurs ont conduit leurs visites d’inspection en adoptant surtout un style incitatif plutôt que dissuasif ; ils ont abordé les RPS dans 96% des visites d’inspection, en informant les employeurs, en les sensibilisant aux conséquences de ces risques, en leur donnant des conseils sur la manière de les prévenir, et en recommandant, voire parfois en ordonnant de mettre en place des mesures.

 

Conclusion

Cette étude est une première en son genre. Les résultats témoignent de l’impact positif des visites d’inspection ; ils confortent la pertinence pour les autorités d’agir dans ce domaine, et ils délivrent un signal encourageant pour la suite. Clairement, les visites d’inspection conduisent à des changements dans les entreprises. Cependant, les propos des employeurs interrogés confirment qu’il existe encore un écart entre leurs représentations des RPS et la vision promue par les autorités. Les RPS tendent à être considérés comme des problèmes individuels, dans l’émergence desquels le travail n’aurait qu’un rôle marginal. Dans cette perspective, l’intervention de l’employeur se résume souvent à des mesures de soutien volontaires et à une gestion plus ou moins informelle des cas problématiques. De plus, il n’est pas toujours aisé pour un inspecteur d’aborder des questions qui touchent les prérogatives de gestion de l’employeur. Or la prévention des risques, y compris psychosociaux, découlant de l’organisation du travail est une obligation des employeurs, en vertu de la Loi sur le travail ; le non-respect de cette obligation peut donner lieu à des décisions de la part des autorités administratives et judiciaires, voire à des sanctions. Le Tribunal fédéral et le Tribunal administratif fédéral ont d’ailleurs rendu, ces dernières années, plusieurs décisions allant dans ce sens. Par ailleurs, les études scientifiques tendent à mettre en évidence que, pour prévenir efficacement les RPS, il convient de recourir à une approche organisationnelle, collective et participative, axée non seulement sur le soutien individuel mais aussi sur l’optimisation des conditions de travail. D’ailleurs, de nombreux employeurs interrogés ont dit prendre des mesures pour améliorer leur organisation et leur environnement de travail. Ils le font en général dans le but de renforcer leur dispositif de production, sans toujours réaliser que ces changements, selon la manière dont ils sont menés, peuvent aussi contribuer à la santé de leurs collaborateurs. Ce potentiel de prévention pourrait être davantage exploité par les entreprises.

 

Communiqué de presse du SECO du 21.06.2018 consultable ici

Rapport final – Mesure des effets de l’action prioritaire des inspections du travail sur les risques psychosociaux en entreprise consultable ici

 

8C_779/2017 (f) du 25.04.2018 – Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage / Revenu sans invalidité calculé sur la base de l’ESS (vs selon la CCT par l’assurance-accidents) – Possibilités théoriques de développement professionnel – 16 LPGA – 26 al. 2 RAI / Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_779/2017 (f) du 25.04.2018

 

Consultable ici

 

Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel / 16 LPGA – 26 al. 2 RAI

Revenu sans invalidité calculé sur la base de l’ESS (vs selon la CCT par l’assurance-accidents)

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

 

Assuré, né en 1990, a entrepris un apprentissage de maçon au mois de juillet 2006. Le 18.04.2008, au cours de sa deuxième année d’apprentissage, il a été victime d’un grave accident de la circulation à la suite duquel il a subi notamment un traumatisme cranio-cérébral et de nombreuses fractures. L’assuré a repris les cours théoriques de deuxième année d’apprentissage à partir du mois de septembre 2008, mais la reprise pratique au mois de mars 2009 a été perturbée en raison des limitations de l’intéressé. L’office AI a mis en œuvre un stage préparatoire à l’entrée en apprentissage d’agent d’exploitation au cours du printemps 2010. L’assuré a entrepris cette formation au mois de septembre suivant et a obtenu un CFC dans cette profession au mois de juin 2013.

Le Département de B.__ a engagé l’assuré à partir du 01.01.2015 en qualité de concierge auprès d’une école à un taux d’activité de 50%. Le salaire mensuel était de 2’267 fr. 40. Par ailleurs l’intéressé a été engagé à compter de la même date par la Ville de D.__ en qualité de concierge de la salle de sport de la même école à un taux d’activité de 18% environ, correspondant à 400 heures par année scolaire. Cette activité était rémunérée à raison de 32 fr. 10 par heure, treizième salaire, vacances et jours fériés compris. Pour cette activité un acompte mensuel de 1’000 fr. net était versé du mois de septembre au mois de mai à l’assuré, lequel devait établir au mois de juin le décompte effectif des heures de travail accomplies et percevoir le solde de la rémunération.

L’office AI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 01.12.2009 au 31.03.2015 (mais suspendue pendant la période durant laquelle l’intéressé a bénéficié d’indemnités journalières en raison de la mise en œuvre de mesures de réadaptation professionnelle). Dès le 01.04.2015, un quart de rente fondé sur un taux d’invalidité de 45% a été allouée.

Le revenu sans invalidité (76’766 fr. 95) a été calculé sur la base du salaire réalisable dans une activité de maçon selon l’ESS, motif pris que l’assuré aurait exercé cette profession s’il n’avait pas été victime de l’accident survenu au cours de sa deuxième année d’apprentissage. Le revenu d’invalide a été fixé à 42’316 fr. 20 (29’476 fr. 20 [part versée par l’Etat B.__: 2’267 fr. 40 x 13] + 12’840 fr. [part versée par la Ville de D.__ : 400h x 32 fr. 10 par heure]).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). L’art. 26 RAI est un cas particulier d’application de la méthode générale de la comparaison des revenus et permet de déterminer le revenu sans invalidité des assurés qui n’ont pas de formation professionnelle à cause de leur invalidité. Aux termes de l’al. 2 de cette norme d’exécution, lorsque l’assuré a été empêché par son invalidité d’achever sa formation professionnelle, le revenu qu’il pourrait obtenir s’il n’était pas invalide est le revenu moyen d’un travailleur de la profession à laquelle il se préparait.

Selon la jurisprudence, le revenu que pourrait réaliser l’assuré sans invalidité est en principe établi sans prendre en considération les possibilités théoriques de développement professionnel (lié en particulier à un complément de formation) ou d’avancement, à moins que des indices concrets rendent très vraisemblable qu’elles se seraient réalisées. Cela pourra être le cas lorsque l’employeur a laissé entrevoir une telle perspective d’avancement ou a donné des assurances dans ce sens. En revanche, de simples déclarations d’intention de l’assuré ne suffisent pas; l’intention de progresser sur le plan professionnel doit s’être manifestée par des étapes concrètes, telles que la fréquentation d’un cours, le début d’études ou la passation d’examens (arrêts 9C_221/2014 du 28 août 2014 consid. 3.2; 8C_380/2012 du 2 mai 2013 consid. 2; 8C_839/2010 du 22 décembre 2010 consid. 2.2.2.2). Ces principes s’appliquent aussi dans le cas de jeunes assurés (SVR 2010 UV n° 13 p. 52, 8C_550+677/2009, consid. 4.2). Le point de savoir si le salaire réel aurait augmenté grâce à un développement des capacités professionnelles individuelles, notamment un changement de profession, doit être établi au degré de la vraisemblance prépondérante (RAMA 2006 n° U 568 p. 67, U 87/05, consid. 2; 1993 n° U 168 p. 101, U 110/92, consid. 3b; arrêt 8C_380/2012, déjà cité, consid. 2).

L’assuré fait valoir que sans l’atteinte à la santé il aurait poursuivi sa formation après l’obtention de son CFC. Il avait en effet la ferme intention d’entreprendre une formation complémentaire de contremaître ou tout au moins de chef d’équipe. Les allégations de l’assuré ne sont toutefois pas étayées par des éléments concrets et pertinents établissant qu’il aurait poursuivi sa formation au-delà du CFC de maçon.

Certes il indique avoir fait part à plusieurs personnes de son intention de progresser sur le plan professionnel et d’avoir pris des renseignements à ce sujet. Cependant ces éléments permettent uniquement de déduire qu’il a manifesté son intérêt pour la poursuite de sa formation professionnelle. Il s’agit ainsi de simples déclarations d’intention, insuffisantes à elles seules pour que l’on puisse admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que leur auteur entendait progresser sur le plan professionnel et devenir contremaître ou chef d’équipe après avoir mené à chef sa formation de maçon. Quant au fait qu’il avait les capacités intellectuelles requises pour atteindre ses buts, il ne présage en rien quant à l’évolution effective de sa carrière professionnelle. Certes, on ne saurait exiger d’un apprenti en cours de formation initiale qu’il suive des cours de contremaître ou de technicien. Il n’en demeure pas moins qu’en dehors de ses simples déclarations d’intention l’intéressé ne se prévaut d’aucun indice concret rendant très vraisemblable que des possibilités théoriques de développement professionnel se seraient réalisées. La cour cantonale n’a dès lors pas violé le droit fédéral en confirmant le point de vue de l’office AI selon lequel le salaire réalisable dans l’activité de maçon est déterminant pour le calcul du revenu sans invalidité.

Les salaires fixés par la convention collective de travail de la construction (73’786 fr.) tiennent mieux compte des différentes catégories d’activités et, partant, sont mieux à même de respecter le principe selon lequel le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible (cf. arrêts 8C_643/2016 du 25 avril 2017 consid. 4.2; 9C_363/2016 du 12 décembre 2016 consid. 5.3.1; 8C_515/2013 du 14 avril 2014 consid. 3.2). Cependant, d’un montant inférieur au salaire statistique, ils ne sont d’aucune aide pour la thèse de l’assuré.

 

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Selon la jurisprudence des éléments de salaire dont il est prouvé que l’assuré ne peut fournir la contrepartie, parce que sa capacité de travail limitée ne le lui permet pas, ne font pas partie du revenu déterminant pour l’évaluation de l’invalidité. La preuve de l’existence d’un salaire dit « social » est toutefois soumise à des exigences sévères, car on doit partir du principe que les salaires payés équivalent normalement à une prestation de travail correspondante (ATF 141 V 351 consid. 4.2 p. 353; 117 V 8 consid. 2c/aa p. 18). Des liens de parenté ou l’ancienneté des rapports de travail peuvent constituer des indices de la possibilité d’un salaire social (arrêt 9C_371/2013 du 22 août 2013 consid. 4.1 et la référence).

En l’espèce, il n’existe toutefois aucun élément concret permettant de penser que l’assuré n’est pas en mesure de fournir la contrepartie des salaires perçus. En particulier le fait qu’il « donne entièrement satisfaction grâce aux conditions de travail adaptées » (cf. rapport final sur les mesures professionnelles de l’office AI) ne permet pas d’inférer que les rémunérations perçues par l’assuré n’équivalent pas aux prestations de travail correspondantes, bien au contraire. L’existence d’un salaire dit « social » n’apparaît dès lors pas établie au degré de la vraisemblance prépondérante.

 

Revenu d’invalide – Obligation de diminuer le dommage

Le contrat de travail prévoit un taux d’activité de 18% environ, ce qui correspond à 400 heures par année scolaire. Avec un salaire horaire convenu de 32 fr. 10, l’assuré est ainsi en mesure de réaliser un gain annuel de 12’840 fr. par année. Il lui incombait dès lors, en vertu de son obligation de diminuer le dommage, d’accomplir le nombre d’heures de travail convenues et, le cas échéant, d’en établir le décompte effectif à l’attention de son employeur, conformément au contrat de travail.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_779/2017 consultable ici

 

 

Pour le volet AA : arrêt du TF 8C_778/2017 du 25.04.2018

 

 

8C_778/2017 (f) du 25.04.2018 – Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage / Revenu sans invalidité calculé sur la base de la CCT – Possibilités théoriques de développement professionnel – 16 LPGA / Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_778/2017 (f) du 25.04.2018

 

Consultable ici

 

Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel / 16 LPGA

Revenu sans invalidité calculé sur la base de la CCT

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

 

Assuré, né en 1990, a entrepris un apprentissage de maçon au mois de juillet 2006. Le 18.04.2008, au cours de sa deuxième année d’apprentissage, il a été victime d’un grave accident de la circulation à la suite duquel il a subi notamment un traumatisme cranio-cérébral et de nombreuses fractures. L’assuré a repris les cours théoriques de deuxième année d’apprentissage à partir du mois de septembre 2008, mais la reprise pratique au mois de mars 2009 a été perturbée en raison des limitations de l’intéressé. L’office AI a mis en œuvre un stage préparatoire à l’entrée en apprentissage d’agent d’exploitation au cours du printemps 2010. L’assuré a entrepris cette formation au mois de septembre suivant et a obtenu un CFC dans cette profession au mois de juin 2013.

Le Département de B.__ a engagé l’assuré à partir du 01.01.2015 en qualité de concierge auprès d’une école à un taux d’activité de 50%. Le salaire mensuel était de 2’267 fr. 40. Par ailleurs l’intéressé a été engagé à compter de la même date par la Ville de D.__ en qualité de concierge de la salle de sport de la même école à un taux d’activité de 18% environ, correspondant à 400 heures par année scolaire. Cette activité était rémunérée à raison de 32 fr. 10 par heure, treizième salaire, vacances et jours fériés compris. Pour cette activité un acompte mensuel de 1’000 fr. net était versé du mois de septembre au mois de mai à l’assuré, lequel devait établir au mois de juin le décompte effectif des heures de travail accomplies et percevoir le solde de la rémunération.

L’assurance-accidents a alloué à l’assuré, à partir du 01.01.2015, une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 43%. Le revenu sans invalidité (73’786 fr.) a été calculé sur la base du salaire réalisable dans une activité de maçon selon la convention collective de travail de la construction, motif pris que l’assuré aurait exercé cette profession s’il n’avait pas été victime de l’accident survenu au cours de sa deuxième année d’apprentissage. Le revenu d’invalide a été fixé à 42’316 fr. 20 (29’476 fr. 20 [part versée par l’Etat B.__: 2’267 fr. 40 x 13] + 12’840 fr. [part versée par la Ville de D.__ : 400h x 32 fr. 10 par heure]).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel

Selon la jurisprudence, le revenu que pourrait réaliser l’assuré sans invalidité est en principe établi sans prendre en considération les possibilités théoriques de développement professionnel (lié en particulier à un complément de formation) ou d’avancement, à moins que des indices concrets rendent très vraisemblable qu’elles se seraient réalisées. Cela pourra être le cas lorsque l’employeur a laissé entrevoir une telle perspective d’avancement ou a donné des assurances dans ce sens. En revanche, de simples déclarations d’intention de l’assuré ne suffisent pas ; l’intention de progresser sur le plan professionnel doit s’être manifestée par des étapes concrètes, telles que la fréquentation d’un cours, le début d’études ou la passation d’examens (arrêts 9C_221/2014 du 28 août 2014 consid. 3.2; 8C_380/2012 du 2 mai 2013 consid. 2; 8C_839/2010 du 22 décembre 2010 consid. 2.2.2.2). Ces principes s’appliquent aussi dans le cas de jeunes assurés (SVR 2010 UV n° 13 p. 52, 8C_550+677/2009, consid. 4.2). Le point de savoir si le salaire réel aurait augmenté grâce à un développement des capacités professionnelles individuelles, notamment un changement de profession, doit être établi au degré de la vraisemblance prépondérante (RAMA 2006 n° U 568 p. 67, U 87/05, consid. 2; 1993 n° U 168 p. 101, U 110/92, consid. 3b; arrêt 8C_380/2012, déjà cité, consid. 2).

L’assuré fait valoir que sans l’atteinte à la santé il aurait poursuivi sa formation après l’obtention de son CFC. Il avait en effet la ferme intention d’entreprendre une formation complémentaire de contremaître ou tout au moins de chef d’équipe. Les allégations de l’assuré ne sont toutefois pas étayées par des éléments concrets et pertinents établissant qu’il aurait poursuivi sa formation au-delà du CFC de maçon. Certes il indique avoir fait part à plusieurs personnes de son intention de progresser sur le plan professionnel et d’avoir pris des renseignements à ce sujet. Cependant ces éléments permettent uniquement de déduire qu’il a manifesté son intérêt pour la poursuite de sa formation professionnelle. Il s’agit ainsi de simples déclarations d’intention, insuffisantes à elles seules pour que l’on puisse admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que leur auteur entendait progresser sur le plan professionnel et devenir contremaître ou chef d’équipe après avoir mené à chef sa formation de maçon. Quant au fait qu’il avait les capacités intellectuelles requises pour atteindre ses buts, il ne présage en rien quant à l’évolution effective de sa carrière professionnelle. Certes, on ne saurait exiger d’un apprenti en cours de formation initiale qu’il suive des cours de contremaître ou de technicien. Il n’en demeure pas moins qu’en dehors de ses simples déclarations d’intention l’intéressé ne se prévaut d’aucun indice concret rendant très vraisemblable que des possibilités théoriques de développement professionnel se seraient réalisées. La cour cantonale n’a dès lors pas violé le droit fédéral en confirmant le point de vue de l’assurance-accidents selon lequel le salaire réalisable dans l’activité de maçon est déterminant pour le calcul du revenu sans invalidité.

 

Revenu sans invalidité calculé sur la base de la CCT

Dans la mesure où ils tiennent mieux compte des différentes catégories d’activités que les statistiques salariales, les salaires fixés par la convention collective de travail de la construction sont mieux à même de respecter le principe selon lequel le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible (cf. arrêts 8C_643/2016 du 25 avril 2017 consid. 4.2; 9C_363/2016 du 12 décembre 2016 consid. 5.3.1; 8C_515/2013 du 14 avril 2014 consid. 3.2).

 

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Selon la jurisprudence des éléments de salaire dont il est prouvé que l’assuré ne peut fournir la contrepartie, parce que sa capacité de travail limitée ne le lui permet pas, ne font pas partie du revenu déterminant pour l’évaluation de l’invalidité. La preuve de l’existence d’un salaire dit « social » est toutefois soumise à des exigences sévères, car on doit partir du principe que les salaires payés équivalent normalement à une prestation de travail correspondante (ATF 141 V 351 consid. 4.2 p. 353; 117 V 8 consid. 2c/aa p. 18). Des liens de parenté ou l’ancienneté des rapports de travail peuvent constituer des indices de la possibilité d’un salaire social (arrêt 9C_371/2013 du 22 août 2013 consid. 4.1 et la référence).

En l’espèce, il n’existe toutefois aucun élément concret permettant de penser que l’assuré n’est pas en mesure de fournir la contrepartie des salaires perçus. En particulier le fait qu’il « donne entièrement satisfaction grâce aux conditions de travail adaptées » (cf. rapport final sur les mesures professionnelles de l’office AI) ne permet pas d’inférer que les rémunérations perçues par l’assuré n’équivalent pas aux prestations de travail correspondantes, bien au contraire. L’existence d’un salaire dit « social » n’apparaît dès lors pas établie au degré de la vraisemblance prépondérante.

 

Revenu d’invalide – Obligation de diminuer le dommage

Le contrat de travail prévoit un taux d’activité de 18% environ, ce qui correspond à 400 heures par année scolaire. Avec un salaire horaire convenu de 32 fr. 10, l’assuré est ainsi en mesure de réaliser un gain annuel de 12’840 fr. par année. Il lui incombait dès lors, en vertu de son obligation de diminuer le dommage, d’accomplir le nombre d’heures de travail convenues et, le cas échéant, d’en établir le décompte effectif à l’attention de son employeur, conformément au contrat de travail.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_778/2017 consultable ici

 

Pour le volet AI : arrêt du TF 8C_779/2017 du 25.04.2018

 

 

6B_252/2017 (d) du 20.06.2018 – Responsabilité du détenteur du véhicule pour les amendes d’ordre qui lui sont infligées lorsque le conducteur effectif est inconnu

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_252/2017 (d) du 20.06.2018

 

Communiqué de presse du TF du 20.06.2018 consultable ici

 

En matière de circulation routière, il n’est pas contraire au principe de la présomption d’innocence d’infliger les amendes d’ordre au détenteur mentionné dans le permis de circulation du véhicule, lorsque le conducteur est inconnu. Toutefois, à défaut d’être suffisamment précise, la réglementation en la matière, prévue à l’article 6 de la Loi sur les amendes d’ordre (LAO), ne peut pas s’appliquer lorsque la détentrice du véhicule est une entreprise.

L’article 6 LAO prévoit que les amendes d’ordre (jusqu’à 300 francs) peuvent être infligées, si le conducteur est inconnu, au détenteur du véhicule mentionné dans le permis de circulation. Si le détenteur indique le nom et l’adresse du conducteur, ce dernier se voit remettre l’amende d’ordre. En revanche, si le conducteur du véhicule ne peut être déterminé sans efforts disproportionnés, l’amende doit être payée par le détenteur, sauf s’il établit de manière crédible que son véhicule a été utilisé contre sa volonté et qu’il n’a pu l’empêcher, bien qu’ayant fait preuve de la diligence nécessaire.

Dans le cas d’espèce, en 2014, le conducteur d’un véhicule d’entreprise a dépassé de 14 km/h la vitesse maximale autorisée à l’intérieur d’une localité. Se fondant sur l’article 6 LAO, la police cantonale obwaldienne a alors exigé de la société détentrice du véhicule le paiement d’une amende de 250 francs. Après que la société a indiqué qu’elle ne savait pas qui avait conduit le véhicule, le Ministère public l’a condamnée au paiement de l’amende par ordonnance pénale. Les autorités judiciaires cantonales ont confirmé la décision.

Lors de sa séance publique de mercredi, le Tribunal fédéral admet partiellement le recours formé par la société condamnée. Il juge que l’article 6 LAO n’est pas critiquable sous l’angle de la présomption d’innocence, qui est ancrée tant dans la Constitution fédérale (article 32 Cst.) que dans la Convention européenne des droits de l’homme (article 6 CEDH). Si la présomption d’innocence inclut notamment le « droit au silence », ce droit ne vaut toutefois pas de manière absolue. Ainsi, selon la jurisprudence récente du Tribunal fédéral et de la Cour européenne des droits de l’homme, le détenteur et le conducteur d’un véhicule motorisé doivent savoir, par leur adhésion à la législation sur la circulation routière et par l’obtention du permis de conduire, qu’ils sont tenus de respecter diverses obligations. Parmi celles-ci figure notamment un devoir de renseignement à l’égard des autorités. Ainsi, si le détenteur et le conducteur ne peuvent pas être contraints de fournir des renseignements, ils doivent néanmoins supporter les conséquences d’un refus de collaborer.

L’application de l’article 6 LAO à l’égard d’entreprises détentrices de véhicules consacre toutefois une violation du principe de la légalité, respectivement de l’adage « nulla poena sine lege » (« pas de peine sans loi »). Les dispositions générales du Code pénal (CP) sont en effet applicables à la Loi sur la circulation routière (LCR), pour autant que cette dernière ne prévoie pas de prescriptions contraires. Or, le Code pénal exclut la responsabilité pénale de l’entreprise lorsque, comme en l’espèce, l’infraction constitue une simple contravention. Dès lors que l’article 6 LAO ne se réfère pas expressément à la responsabilité de l’entreprise en qualité de détentrice du véhicule, cette disposition ne peut pas s’appliquer aux sociétés, à défaut d’une base légale suffisamment précise.

 

 

Arrêt 6B_252/2017 non encore publié sur le site du TF

Communiqué de presse du TF du 20.06.2018 consultable ici

 

 

Assurance obligatoire des soins : Modification de l’OPAS

Assurance obligatoire des soins : Modification de l’OPAS

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 19.06.2018 consultable ici

 

Les montants maximaux de remboursement des bandelettes de test pour la glycémie pris en charge par l’assurance obligatoire des soins baissent une nouvelle fois. Le Département fédéral de l’intérieur a également décidé que les coûts des transplantations de cellules souches seront désormais remboursés à certains patients atteints de sclérose en plaques. La liste des analyses est, en outre, mise à jour : des positions obsolètes sont supprimées et celles faisant l’objet de plusieurs tarifications sont simplifiées.

 

Bandelettes de test pour la glycémie : nouvelle baisse des montants maximaux de remboursement

L’abaissement des montants maximaux de remboursement (MMR) des réactifs pour les tests de glycémie sera progressif : le MMR diminuera, selon la taille de l’emballage, de 10% au 1er juillet 2018. Puis une nouvelle baisse prendra effet au 1er janvier 2019, cette fois indépendamment de la taille de l’emballage. Au total, on table sur des économies de l’ordre de 10 millions de francs par an pour l’assurance obligatoire des soins (AOS). Les MMR avaient déjà été réduits de 10% le 1er janvier 2017, dans le cadre des mesures immédiates.

 

Prise en charge des coûts lors de transplantations de cellules souches et de graisse

À compter du 1er juillet 2018, l’assurance obligatoire des soins remboursera les coûts des transplantations de cellules souches réalisées dans le cadre d’une étude à l’Hôpital universitaire de Zurich en vue de traiter certains patients atteints de sclérose en plaques. La prise en charge est limitée à fin 2024 ; ce délai sera mis à profit pour évaluer l’efficacité des traitements. Sont concernées les interventions menées sur les patients atteints de la forme agressive de la maladie.

À partir du 1er juillet 2018, les transplantations de graisse prélevée sur la patiente elle-même aux fins d’une reconstruction mammaire seront également prises en charge à la condition suivante : l’intervention devra être effectuée par un spécialiste en chirurgie plastique, reconstructive et esthétique suite à une mastectomie partielle ou totale médicalement indiquée. Soumise à évaluation, cette prestation sera prise en charge jusqu’au 30 juin 2023.

 

Révision de la liste des analyses

La liste des analyses (LA) a été entièrement révisée et est entrée en vigueur le 1er juillet 2009. Vu la vitesse à laquelle évoluent les techniques d’analyse de laboratoire, la LA doit être régulièrement mise à jour. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) procède donc à une nouvelle révision de la LA (projet transAL), qui s’inscrit dans la stratégie Santé2020. Dans une première étape, prévue au 1er septembre 2018, le Département fédéral de l’intérieur (DFI) a décidé de supprimer 30 positions et d’en adapter 89 autres en fonction des connaissances scientifiques et des techniques de laboratoire actuelles.

 

Fin de la révision des chapitres sur le matériel de pansement et les appareils de mesure pour diabétiques

La révision de la liste des moyens et appareils s’est poursuivie, et les chapitres sur le matériel de pansement et les appareils de mesure pour diabétiques sont désormais clos.

 

Convertir les prestations stationnaires en prestations ambulatoires

À partir du 1er janvier 2019, six groupes d’interventions seront pris en charge par l’AOS uniquement à la condition d’être réalisés en ambulatoire. Le DFI avait déjà pris cette décision en février 2018. Les conditions particulières qui peuvent justifier une intervention dans le domaine stationnaire ont été définies en amont et figurent dans l’ordonnance sur les prestations de soins (annexe 1a). Les partenaires tarifaires sont à présent tenus de se concerter pour mettre en place les procédures de contrôle correspondantes. L’OFSP encadre les travaux.

 

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 19.06.2018 consultable ici

 

 

Lettre circulaire AI n° 375 / Moyens auxiliaires – Explications relatives au tarif pour la remise de fauteuils roulants

Lettre circulaire AI n° 375 du 19.06.2018 / Moyens auxiliaires – Explications relatives au tarif pour la remise de fauteuils roulants (en vigueur depuis le 01.01.2018)

 

Consultable ici

 

Plusieurs questions ont suivi l’introduction de la nouvelle convention tarifaire pour la remise de fauteuils roulants le 01.01.2018. Ces questions liées à sa mise en œuvre portent sur l’ordonnance médicale et sur la procédure de demande au dépôt AI. La commission paritaire tarifaire (CPT) dans laquelle siège l’OFAS s’est penchée sur ces questions au cours de ses dernières séances. Par le biais de la lettre circulaire AI n° 375, l’OFAS souhaite informer des décisions qui ont été adoptées.

 

Ordonnance médicale

En vertu de la nouvelle convention tarifaire, l’ordonnance médicale est essentielle pour la remise de fauteuils roulants. Elle doit donc être impérativement présentée pour tout nouvel appareillage. Après l’entrée en vigueur de la nouvelle convention tarifaire, les médecins spécialistes ont exprimé quelques réserves sur la structure et le contenu de ce formulaire. Celui-ci, mis au point par les parties contractantes (agents payeurs et fournisseurs de prestations), présente selon eux des insuffisances pour ce qui est de l’appareillage des enfants. Après discussion entre les parties contractantes et le corps médical, il a été décidé d’élaborer une solution transitoire pour l’appareillage des enfants.

Lors de sa séance du 30.04.2018, la CPT a approuvé un formulaire d’ordonnance raccourci pour l’appareillage des patients jusqu’à l’âge de 20 ans, formulaire qui entre immédiatement en vigueur. Le formulaire utilisé jusqu’à présent demeure valable et peut être utilisé pour les patients de tous les groupes d’âge. Autrement dit, pour l’appareillage des patients jusqu’à l’âge de 20 ans, il est possible d’utiliser le formulaire raccourci ou celui utilisé jusqu’à maintenant. Pour les patients de plus de 20 ans, seul ce dernier peut être utilisé. Les formulaires en allemand et en français sont disponibles et le seront très prochainement en italien.

Ces divergences concernant le formulaire ont entraîné des retards dans le traitement de certaines demandes. Nous vous serions reconnaissants de traiter prioritairement les demandes qui sont en attente depuis un certain temps.

 

Procédure de demande au dépôt AI

L’annexe II des remarques concernant les tarifs pour la remise des fauteuils roulants (https://www.bsvlive.admin.ch/vollzug/documents/index/category:55/lang:fre), propose un schéma présentant la procédure de remise. Suivant cette procédure, la demande au dépôt est formulée directement par le revendeur spécialisé auprès de la FSCMA. Il s’agit donc là d’un changement par rapport au contrat-cadre de 2001 régissant la remise de fauteuils roulants, qui prévoyait que les demandes au dépôt relevaient des offices AI.

Le ch. 2074 de la dernière version de la CMAI n’a, par erreur, pas été adapté et est rédigé ainsi : „Avant toute décision d’octroi, l’office AI vérifie si le dépôt peut fournir un moyen adéquat“.

Le passage de l’ancienne à la nouvelle convention tarifaire et l’absence de modification du ch. 2074 CMAI ont conduit à des différences d’ordre procédural entre les offices AI.

La CPT a décidé que la procédure à suivre serait celle de la nouvelle convention tarifaire. Toute demande au dépôt doit être formulée directement auprès de la FSCMA par le revendeur spécialisé. Il convient d’éviter tout doublon, c’est-à-dire une demande du revendeur spécialisé suivie d’une demande de l’office AI portant sur le même fauteuil roulant.

Lors de la prochaine mise à jour de la CMAI, le libellé du ch. 2074 sera modifié comme suit :

Nouvelle formulation du ch. 2074 :

Avant toute demande de prise en charge auprès de l’office AI, le fournisseur de prestations vérifie si le dépôt peut fournir un moyen auxiliaire adéquat. Le résultat de cette demande de fauteuil roulant manuel doit être clairement identifiable dans le dossier de l’office AI.

 

 

Lettre circulaire AI n° 375 du 19.06.2018 « Moyens auxiliaires – Explications relatives au tarif pour la remise de fauteuils roulants » consultable ici

 

 

Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) : moins d’affaires de moindre importance, une protection juridictionnelle préservée

Modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) : moins d’affaires de moindre importance, une protection juridictionnelle préservée

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral de la justice (OFJ) du 15.06.2018 consultable ici

 

Lors de sa séance du 15 juin 2018, le Conseil fédéral a adopté un message concernant la révision de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF). Il propose que le Tribunal fédéral puisse être saisi d’un recours dans tous les cas particulièrement importants. En contrepartie, il sera déchargé d’affaires simples qui ne nécessitent pas d’être examinées par la juridiction suprême de la Confédération. Il pourra de la sorte utiliser ses ressources de manière plus ciblée, sans restriction de la protection juridictionnelle.

Aujourd’hui, le recours au Tribunal fédéral est exclu dans certains domaines et en dessous d’une certaine valeur litigieuse. En 2013, dans son rapport d’évaluation de la réforme de 2007 de l’organisation judiciaire, le Conseil fédéral était parvenu à la conclusion qu’il fallait modifier la liste d’exceptions. Celle-ci, qui détermine les domaines dans lesquels les instances précédentes statuent définitivement, présente deux défauts : d’un côté, toutes les questions juridiques de principe ne peuvent pas être portées devant le Tribunal fédéral ; de l’autre, celui-ci est parfois saisi de cas de peu d’importance.

 

Maintien du recours constitutionnel subsidiaire

Afin de remédier à cette situation, le Conseil fédéral propose que le recours ne soit plus totalement exclu dans les domaines couverts par la liste d’exceptions et en dessous des valeurs litigieuses limites, mais que le Tribunal fédéral puisse trancher les questions juridiques de principe et examiner les cas qui, pour d’autres motifs, sont particulièrement importants. A l’inverse, il entend décharger le Tribunal fédéral des cas mineurs. Ces mesures permettront de rééquilibrer la charge de travail de la juridiction suprême de la Confédération.

Le Conseil fédéral souhaite maintenir le recours constitutionnel subsidiaire. Ce recours permet à une personne de saisir le Tribunal fédéral en invoquant une violation de ses droits constitutionnels par une décision cantonale, même si cette décision relève de la liste d’exceptions de la LTF ou si la valeur litigieuse n’est pas atteinte. Il revêt une importance particulière dans des domaines comme les naturalisations, les marchés publics ou les rapports de travail de droit public. En le maintenant, le Conseil fédéral garantit l’accès au Tribunal fédéral même s’il ne s’agit pas d’une question juridique de principe.

 

Plus de transparence dans les motifs de l’arrêt

Le projet prévoit la prise en compte d’avis minoritaires dans les motifs de l’arrêt. Les juges dont la proposition a été écartée pourront faire adjoindre à l’arrêt un avis minoritaire motivé. Le Conseil fédéral assure de la sorte une plus grande transparence.

 

Harmonisation des motifs de recours dans tous les domaines des assurances sociales

Actuellement, toute constatation incomplète ou erronée des faits dans une décision portant sur l’octroi ou le refus de prestations en espèces de l’assurance-accidents ou de l’assurance militaire peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF). Il en va autrement dans les autres branches des assurances sociales où la constatation des faits ne peut être contestée au Tribunal fédéral que s’ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit et si la correction du vice est susceptible d’influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). L’exception concernant les prestations en espèces de l’assurance militaire et de l’assurance-accidents ne se justifie plus, ce d’autant plus qu’elle a été supprimée en matière d’assurance-invalidité. Dans l’intérêt d’alléger la charge du Tribunal fédéral, il y a lieu d’abroger les art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF dans leur teneur actuelle.

 

 

Communiqué de presse de l’Office fédéral de la justice (OFJ) du 15.06.2018 consultable ici

Message relatif à la modification de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF) (FF 2018 4713) consultable ici

Projet de modification de la LTF (FF 2018 4769) consultable ici

Communiqué de presse du Tribunal fédéral du 15.06.2018 (Le Tribunal fédéral accueille favorablement le message sur la révision de la Loi sur le Tribunal fédéral sous réserve du recours constitutionnel subsidiaire) consultable ici