Initiative parlementaire « Surveillance de l’assurance-maladie. Garantir la protection de la personnalité » – Rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des Etats

Initiative parlementaire 16.411 « Surveillance de l’assurance-maladie. Garantir la protection de la personnalité » – Rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des Etats

 

Paru in FF 2019 5177 disponible ici

 

La loi fédérale sur la transmission de données des assureurs dans l’assurance obligatoire des soins (AOS) vise à préciser à quelles fins les assureurs sont tenus de transmettre des données à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) et sous quelle forme ils doivent le faire (données agrégées ou données par assuré). Elle précise en outre que l’OFSP est responsable de garantir l’anonymat des assurés.

Depuis 2014, l’OFSP collecte auprès des assureurs des données anonymisées concernant tous les assurés de l’AOS (Efind). Le formulaire Efind1 sert à la collecte de données démographiques, et le formulaire Efind2 à la collecte de données relatives aux primes et aux coûts des traitements. L’OFSP utilise ces données pour exécuter les tâches qui lui sont assignées en vertu de la loi sur la surveillance de l’assurance-maladie (LSAMal) et pour surveiller l’évolution générale des coûts dans l’AOS. Par ailleurs, l’OFSP prévoyait déjà à l’époque trois autres relevés, portant sur les coûts par prestataire (Efind3), les médicaments (Efind5) et les moyens et appareils (Efind6), qui devaient lui permettre de surveiller l’évolution des coûts par type de prestations et par fournisseur de prestations, d’analyser de manière approfondie les effets de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) et d’examiner plus en détail la qualité et le caractère économique des prestations.

Le présent acte modificateur unique vise à ce que les bases légales régissant la transmission de données des assureurs soient précisées dans la LAMal et dans la LSAMal. Des dispositions formulées de manière plus précise seront gages d’une meilleure sécurité juridique et garantiront que la proportionnalité sera respectée lors de la collecte de données.

La commission entend préciser les bases légales régissant les relevés de données que l’OFSP effectue auprès des assureurs et, ce faisant, améliorer la sécurité du droit. En outre, elle veut veiller au respect du principe de proportionnalité : l’OFSP ne doit collecter que les données adéquates et nécessaires à l’exercice de ses tâches et dont on peut raisonnablement exiger la livraison de la part des assureurs.

Le projet de la commission se fonde sur les principes suivants:

  • Afin de clarifier les choses sur le plan législatif et d’éliminer la confusion provoquée par le fait que la LSAMal est en partie explicitée dans l’OAMal (art. 35, al. 2, LSAMal et art. 28 OAMal; cf. ch. 2.2), la collecte des données dont l’OFSP a besoin doit être régie dans la LSAMal et l’OSAMal pour ce qui est de la surveillance des assureurs, et dans la LAMal et l’OAMal pour ce qui est des tâches assignées à l’OFSP par la LAMal.
  • La collecte et le traitement des données doivent être effectués sous une forme agrégée. Plus les données des assurés seront synthétisées sans pour autant en réduire trop fortement le contenu informatif, moins il y aura de risque d’identification.
  • Si des données agrégées ne sont pas suffisantes pour accomplir une tâche et que les données nécessaires ne peuvent pas être obtenues autrement, l’OFSP doit pouvoir collecter des données individuelles anonymisées. Les tâches concernées doivent être décrites dans la loi le plus clairement possible. A titre subsidiaire, le Conseil fédéral peut être autorisé à définir ces tâches et les données à collecter par voie d’ordonnance.

Les données devront être transmises sous une forme agrégée. Si des données agrégées ne sont pas suffisantes pour que l’OFSP puisse accomplir les tâches qui lui sont assignées et que des données individuelles anonymisées ne peuvent pas être obtenues autrement, les assureurs seront tenus de transmettre à l’OFSP les données par assuré nécessaires à l’exécution des tâches suivantes :

  • surveiller l’évolution des coûts par type de prestations et par fournisseur de prestations et élaborer les bases de décision pour les mesures visant à maitriser l’évolution des coûts (art. 21, al. 2, let. a, LAMal) ;
  • effectuer une analyse des effets de la loi et de ses dispositions d’exécution et préparer les bases de décision en vue d’une révision de la loi et de ses dispositions d’exécution (art. 21, al. 2, let. b, LAMal);
  • évaluer la compensation des risques (art. 21, al. 2, let. c, LAMal);
  • accomplir les tâches de surveillance prévues par la LSAMal (art. 35, al. 2, LSAMal).

Le projet de la majorité de la commission prévoit que l’OFSP pourrait poursuivre les relevés de données Efind1 et Efind2 et les compléter avec Efind3 (collecte de données relatives aux coûts par type de prestations et prestataire). Cet avant-projet ne prévoit par contre aucune base légale pour les relevés de données Efind5 et Efind6, chose que propose une minorité de la commission (art. 21, al. 2, let. d).

 

 

Rapport de la CSSS-E du 16.05.2019, paru in FF 2019 5177 (06.08.2019) consultable ici

Projet de la Loi fédérale sur la transmission de données des assureurs dans l’assurance obligatoire des soins, paru in FF 2019 5209, consultable ici

 

 

9C_724/2018 (d) du 11.07.2019, destiné à la publication – Prestations de l’assurance-invalidité en cas de toxicomanie : changement de jurisprudence

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 (d) du 11.07.2019, destiné à la publication

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral du 05.08.2019 disponible ici

Arrêt consultable ici

 

Prestations de l’assurance-invalidité en cas de toxicomanie : changement de jurisprudence

 

Le Tribunal fédéral change sa jurisprudence concernant le droit à des prestations de l’assurance-invalidité en cas de toxicomanie. Comme pour toutes les autres maladies psychiques, il convient désormais de clarifier au moyen d’une grille d’évaluation normative et structurée si la dépendance à des substances addictives diagnostiquée par des spécialistes influe sur la capacité de travail de la personne concernée.

 

Selon la jurisprudence constante jusqu’à présent du Tribunal fédéral, les toxicomanies primaires en tant que telles ne justifiaient en principe pas la reconnaissance d’une invalidité au sens de la loi. Une toxicomanie n’était pertinente dans l’assurance-invalidité que lorsqu’elle engendrait une maladie ou occasionnait un accident ou lorsque la dépendance résultait d’une maladie. Cette jurisprudence partait somme toute du principe que la personne dépendante était elle-même responsable de son état et que toute dépendance pouvait sans autre être traitée par un sevrage.

Le Tribunal fédéral parvient dans la présente décision à la conclusion que sa pratique antérieure ne peut plus être maintenue, notamment à la suite d’un examen approfondi des connaissances médicales. Du point de vue médical, une dépendance correspond clairement à un phénomène ayant caractère de maladie. Il s’impose dès lors, comme pour les autres troubles psychiques à l’examen spécifique desquels s’appliquent des critères objectifs, de se poser la question de savoir si la personne concernée peut malgré l’affection diagnostiquée médicalement exercer à plein temps ou à temps partiel une activité (adaptée). C’est pourquoi la jurisprudence développée à ce propos doit être modifiée en ce sens que, dans l’assurance-invalidité, toute pertinence ne puisse plus être d’emblée niée à un syndrome de dépendance ou à un trouble d’utilisation de substances addictives diagnostiqué irréfutablement par des spécialistes. Il s’agit, comme pour toutes les autres maladies psychiques, de déterminer selon une grille d’évaluation normative et structurée (à cet égard, ATF 141 V 281, communiqué de presse du Tribunal fédéral du 17 juin 2015) si, et le cas échéant jusqu’à quel point, un syndrome de dépendance diagnostiqué par des spécialistes influence dans le cas examiné la capacité de travail.

Evidemment, l’obligation de diminuer le dommage s’applique aussi en cas de syndrome de dépendance. Il peut par exemple être exigé de la personne concernée une participation active à des traitements médicaux raisonnables. Si celle-ci ne se conforme pas à son obligation de diminuer le dommage et permet ainsi le développement de son état pathologique, un refus ou une réduction des prestations est possible.

Dans le cas concret, le Tribunal fédéral admet le recours d’un homme dépendant de benzodiazépines et d’opioïdes qui avait vainement requis une rente de l’assurance-invalidité. Le Tribunal fédéral est parvenu à la conclusion que l’expertise psychiatrique réalisée sur la personne concernée, de laquelle résultait une incapacité de travail due à une toxicomanie, remplissait les exigences d’une évaluation normative et structurée. Comme une augmentation progressive de la capacité fonctionnelle par la poursuite du suivi thérapeutique (entre autres avec la délivrance contrôlée d’opioïdes) est exigible après un sevrage progressif des benzodiazépines, sans que cela ne soit cependant possible dans un délai déterminé ainsi que cela a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, le droit à une rente de l’assurance-invalidité est, au préalable, ouvert. Le droit aux prestations de cet homme devra, par voie de révision, être réexaminé par l’office AI en temps opportun après la mise en œuvre de la thérapie.

 

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral du 05.08.2019 disponible ici

Arrêt 9C_724/2018 consultable ici

 

 

8C_684/2018 (f) du 17.04.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Bonne foi de l’assuré accordée

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_684/2018 (f) du 17.04.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer / 25 LPGA

Bonne foi de l’assuré accordée

 

Assuré, né en 1966, a été licencié, avec effet au 31.03.2012, de son emploi de livreur, exercé à 50%. Parallèlement à cette activité, l’intéressé exerçait celle de concierge à un taux de 25% pour le compte de la Société C.__. Le 09.02.2012, il a déposé une demande d’indemnité de chômage en indiquant être disposé à travailler à un taux de 50%. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert du 01.04.2012 au 31.03.2014.

A la demande du gestionnaire en charge du dossier auprès de la caisse de chômage, l’assuré a fait parvenir à cette dernière, le 10.04.2012, une copie de son contrat de travail de conciergerie ainsi que les fiches de salaire y afférentes pour les mois de février et mars 2012. Par pli du 11.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a en outre invité l’assuré à lui faire parvenir le formulaire « confirmation d’inscription » remis par l’Office régional de placement (ORP), avec un taux de 75%. Il justifiait sa requête par ces termes écrits ultérieurement à la main et figurant au bas de cette lettre: « cet assuré avait un emploi à 50% + un autre à 25% qui continue ». Par courriel du 17.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a confirmé à la conseillère en placement de l’assuré que ce dernier devait être inscrit à 75%. Le 19.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a informé l’assuré que son gain assuré avait été fixé à 3’805 fr. et son indemnité journalière à 140 fr. 30 brut. Sur les formulaires « Indications de la personne assurée » (IPA) d’avril à décembre 2012, l’assuré a indiqué avoir travaillé au service de E.__. De janvier 2013 à juillet 2013, il a mentionné avoir œuvré pour le compte de F.__ SA puis, dès le mois de février 2013 jusqu’en juillet 2013, il a déclaré avoir travaillé pour la société G.__.

A la suite d’une révision du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) des 8-10 juillet 2013, la caisse de chômage a invité la société C.__ [employeur de l’activité de concierge] à lui transmettre les formulaires « Attestation de gain intermédiaire » concernant l’assuré pour les mois d’avril 2012 à juin 2013 ainsi qu’une copie des fiches de salaire pour la même période. Par décision, la caisse de chômage a réclamé à l’assuré la restitution de 15’476 fr. 05, correspondant au montant des prestations versées en trop en raison de « la non-prise en considération de [son] emploi mensuel provenant de [son] activité de concierge non professionnel à 25% ainsi que [des] vacances et 13ème salaire auprès de la société G.__ ».

Dans une première procédure, la décision de la caisse de chômage a été confirmée (arrêt 8C_689/2016 du 5 juillet 2017).

Le 03.08.2017, l’assuré a déposé une demande de remise de l’obligation de restituer. Le Service de l’emploi du canton de Vaud (SDE) a refusé d’accorder la remise, au motif que l’assuré ne pouvait pas se prévaloir de sa bonne foi.

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 86/18 – 156/2018 – consultable ici)

En substance, la cour cantonale a retenu que l’assuré avait également fait régulièrement mention de son activité pour le compte de la société C.__ lors d’entretiens à l’ORP. En omettant d’inscrire cette activité dans les formulaires IPA, l’assuré avait pu être amené à comprendre – que ce soit de son propre chef ou sur la base d’indications (erronées) fournies par l’administration – que ces formulaires ne concernaient que les activités entreprises après le chômage, à l’exclusion de son activité de concierge conservée à 25%. Dans tous les cas, la caisse ne pouvait pas considérer les formulaires IPA de manière isolée en faisant abstraction des indications données par l’assuré lors de l’exercice du droit à l’indemnité.

Par jugement du 29.08.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, la cause étant renvoyée au SDE pour complément d’instruction au sens des considérants et nouvelle décision.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 9C_638/2014 du 13 août 2015 consid. 4.1).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. On parlera de négligence grave lorsque l’ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (cf. ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181). On peut attendre d’un assuré qu’il décèle des erreurs manifestes et qu’il en fasse l’annonce à la caisse (cf. arrêt 9C_189/2012 du 21 août 2012 consid. 4 et les références). En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s.; 112 V 97 consid. 2c p. 103; 110 V 176 consid. 3c p. 180). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223; 102 V 245 consid. b p. 246).

En l’espèce, on doit admettre avec la cour cantonale qu’en omettant d’inscrire son activité de concierge dans les formulaires IPA, l’assuré a commis une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner. En effet, l’assuré a annoncé tant à l’ORP qu’à la caisse qu’il exerçait une activité de concierge à 25%. Celle-ci avait d’ailleurs admis, lors de la procédure fédérale précédente – portant sur la question de la restitution – avoir commis une erreur en omettant de faire une notice de rappel dans le dossier de l’assuré, selon laquelle celui-ci conservait son emploi de concierge (cf. arrêt 8C_689/2016 du 5 juillet 2017). Partant, si l’assuré était certes tenu d’indiquer cette activité dans les formulaires IPA, la caisse disposait néanmoins de toutes les indications nécessaires au dossier concernant la poursuite de l’emploi au sein de la société C.__ pour déterminer correctement le droit à l’indemnisation. L’assuré a raisonnablement pu penser que l’emploi de concierge qu’il exerçait déjà à 25% avant son inscription au chômage était considéré comme un gain accessoire et n’était pas pris en considération dans l’indemnisation, celle-ci ne portant que sur la disponibilité restante de 75%. Un indice sérieux dans ce sens réside dans le fait qu’il a dûment indiqué chaque mois tous les autres emplois réalisés à titre de gains intermédiaires. Par ailleurs, il sied de préciser qu’entre le mois d’avril 2012 et le mois de juin 2013, l’assuré a exercé, en sus de son emploi au sein de la société C.__, plusieurs activités en gains intermédiaires à un taux variable pour le compte d’employeurs différents et qu’il a reçu des indemnités journalières de la caisse dont le montant a varié chaque mois de manière considérable. Au demeurant, le fait que la caisse a demandé à l’assuré deux mois après son inscription à 50% d’augmenter le taux d’activité recherché à 75% a pu créer une confusion chez ce dernier.

Vu ce qui précède, la cour cantonale a retenu à juste titre que l’omission de l’assuré ne constituait pas une négligence grave de nature à exclure sa bonne foi.

 

Le TF rejette le recours du Service de l’emploi.

 

 

Arrêt 8C_684/2018 consultable ici

 

 

Entrée en vigueur le 01.09.2019 de la convention de sécurité sociale conclue avec le Kosovo

Entrée en vigueur le 01.09.2019 de la convention de sécurité sociale conclue avec le Kosovo

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 29.07.2019 consultable ici

 

La convention de sécurité sociale conclue avec le Kosovo entre en vigueur le 01.09.2019. Elle coordonne les systèmes de sécurité sociale des deux États contractants dans les domaines vieillesse, décès et invalidité et règle notamment le versement des rentes à l’étranger.

Sur le fond, la convention correspond aux conventions de sécurité sociale déjà conclues par la Suisse et elle est conforme aux standards internationaux. La nouvelle convention coordonne en particulier les systèmes de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité des États contractants, à savoir l’AVS et l’AI pour la Suisse. Elle garantit une large égalité de traitement des assurés et règle le versement des rentes à l’étranger. La convention pose en outre les bases de la collaboration en matière de lutte contre les abus.

Les ressortissants du Kosovo peuvent à nouveau percevoir des rentes de l’AVS et de l’AI lorsqu’ils résident à l’étranger. Ils peuvent demander le versement des rentes à condition de ne pas avoir obtenu, après le 01.04.2010, le remboursement de leurs cotisations. Les droits ne sont ouverts qu’à partir de l’entrée en vigueur de la convention et ne peuvent pas l’être rétroactivement.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 29.07.2019 consultable ici

Informations pratiques disponibles sur le site de l’OFAS

Convention de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République du Kosovo et Arrangement administratif (texte provisoire) disponible ici

 

 

Remplacement du Tarmed : Le TARDOC a été remis au Conseil fédéral

Le TARDOC a été remis au Conseil fédéral

 

Communiqué de presse du 12.07.2019 consultable ici

 

Après plus de trois ans et demi de travaux, la nouvelle structure tarifaire ambulatoire TARDOC de l’organisation tarifaire commune ats-tms SA est prête. Elle remplacera le TARMED. Les partenaires tarifaires, la FMH et curafutura, ont remis le TARDOC au Conseil fédéral pour approbation en vue d’une entrée en vigueur au 01.01.2021.

 

Depuis 2004, les prestations médicales ambulatoires sont facturées avec le TARMED, qui reprend toutes les prestations ambulatoires du médecin. Le TARMED est désormais dépassé et sa révision était devenue inévitable.

Qu’est-ce qui est nouveau ?

Il s’est avéré extrêmement difficile d’élaborer une structure tarifaire acceptable et susceptible de faire le consensus entre les partenaires tarifaires. Les modèles de coûts utilisés ont été adaptés au niveau actuel de la médecine, de la technique médicale et des coûts de personnel d’aujourd’hui. La durée de traitement des différentes prestations a été actualisée. Les progrès de la médecine et les avancées technologiques ont réduit le temps de nombreux examens et ouvert la voie à de nouvelles prestations. La professionnalisation rapide du personnel paramédical de ces 20 dernières années s’est aussi traduite par de nouvelles prestations, inexistantes dans le TARMED actuel. La structure tarifaire a donc été simplifiée. Les prestations purement stationnaires ont été supprimées et le catalogue de prestations réduit de 4600 à près de 2700 positions. Enfin, les règles d’application et de facturation ont été redéfinies en concertation avec les sociétés de discipline médicale.

Quelles sont les prochaines étapes ?

La FMH et curafutura ont remis la structure tarifaire TARDOC au Conseil fédéral. La CTM n’est pas tenue de déposer une demande.

La FMH et curafutura adhèrent au principe de la neutralité des coûts conformément à l’article 59c, al. 1, let. c OAMal. Les fournisseurs de prestations et les assureurs ont toutefois une approche différente sur la manière de mettre en œuvre la transition neutre en termes de coûts entre le TARMED et le TARDOC. Les deux versions diffèrent uniquement sur le nombre de points tarifaires.

La structure tarifaire TARDOC peut être consultée sur le lien suivant : https://tardoc.ats-tms.ch/

 

À propos d’ats-tms SA

ats-tms SA a été fondée en 2016 avec l’objectif d’élaborer une structure tarifaire révisée des prestations médicales ambulatoires et de poursuivre son développement en continu. Elle réunit l’association des assureurs-maladie curafutura, la Fédération des médecins suisses (FMH) et la Commission des tarifs médicaux LAA (CTM).

 

 

Communiqué de presse du 12.07.2019 consultable ici

 

 

8C_606/2018 (f) du 12.06.2019 – Aide financière accordée par l’aide sociale – Versement du rétroactif des allocations familiales – Interprétation par le TF d’une norme cantonale sous l’angle de l’arbitraire

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2018 (f) du 12.06.2019

 

Consultable ici

 

Aide financière accordée par l’aide sociale – Versement du rétroactif des allocations familiales / 22 LPGA – 29 de la loi [du canton de Fribourg] sur l’aide sociale (LASoc; RSF 831.0.1)

Interprétation par le TF d’une norme cantonale sous l’angle de l’arbitraire

 

A.__ et B.__, ressortissante érythréenne dont la demande d’asile avait été refusée, ont emménagé ensemble dans le logement du prénommé au mois de juillet 2007. A cette époque, B.__ était au bénéfice de prestations d’aide sociale allouées par ORS Service AG, organisme d’encadrement des requérants d’asile et des réfugiés (ci-après: ORS). Deux enfants sont nés de cette union: C.__, en 2008 et D.__, en 2010. ORS a alloué des prestations d’aide sociale à la mère et aux deux enfants jusqu’au 17.10.2012 – date à laquelle la reconnaissance formelle des enfants par leur père est intervenue. Le 06.05.2013, B.__ a quitté le logement de A.__ avec les deux enfants et a bénéficié de prestations allouées par ORS jusqu’à ce qu’elle reçoive son autorisation de séjour, le 13.06.2013. Dès le 01.08.2013, elle a obtenu des prestations du Service de l’aide sociale de la Ville de Fribourg (SASV). Au mois de février 2014, B.__ et les enfants sont retournés vivre avec A.__ et les parents se sont mariés le 17.10.2014.

Le 08.03.2013, A.__ a saisi la caisse de compensation d’une demande tendant à l’octroi d’allocations familiales pour ses deux enfants, avec effet rétroactif au 30.09.2008. Par décision, partiellement réformée sur opposition les 19.01.2016 et 28.01.2016, la caisse de compensation a reconnu le droit de A.__ aux allocations familiales pour ses deux enfants et a réparti le versement rétroactif des allocations entre ORS, le SASV et l’intéressé. Ainsi, elle a indiqué que des montants de 9’430 fr. en faveur de C.__ et de 7’360 fr. en faveur de D.__ devaient être versés à ORS. En outre, un montant de 490 fr. par enfant devait être versé au SASV pour les mois d’août et septembre 2013. Quant à A.__, il bénéficiait à titre rétroactif de 5’360 fr. pour chacun des enfants, ainsi que de l’allocation de naissance d’un montant de 1’500 fr. pour D.__.

Saisie d’une demande de l’intéressé tendant à la reconsidération de la décision du 28.01.2016, en ce sens que l’intégralité des allocations familiales et l’allocation de naissance lui soient versées, la caisse de compensation a rendu une décision sur opposition par laquelle elle a confirmé sa décision du 28.01.2016.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont examiné le cas sous l’angle des art. 9 LAFam et 12 de la loi [du canton de Fribourg] sur les allocations familiales dans sa version entrée en vigueur le 01.01.2013 (LAFC; RSF 836.1). Ils ont considéré que les art. 9 LAFam et 12 LAFC n’étaient pas applicables. En effet, il n’était pas établi et il n’y avait pas de risque que l’éventuel versement à l’assuré des allocations familiales dues pour les périodes en question pourrait ne pas servir à couvrir des frais d’entretien des deux enfants auxquels ces prestations étaient destinées. La caisse de compensation ne pouvait dès lors pas se fonder sur ces dispositions pour décider de verser les allocations familiales en cause à ORS et au SASV en lieu et place de l’assuré.

En revanche, la cour cantonale a appliqué l’art. 29 de la loi [du canton de Fribourg] sur l’aide sociale (LASoc; RSF 831.0.1). Plus particulièrement, la juridiction cantonale s’est référée à l’al. 4 de cette disposition [Le service social qui accorde une aide matérielle à titre d’avance sur les prestations des assurances ou de tiers tenus de verser des prestations est subrogé dans les droits du bénéficiaire, jusqu’à concurrence de l’aide matérielle accordée.]. Elle a constaté que pour les périodes respectives de juin 2009 à octobre 2012 et d’août à septembre 2013, ORS et le SASV avaient alloué des prestations d’aide matérielle en faveur des enfants C.__ et D.__ et pris également en charge directement leurs primes d’assurance-maladie. Il n’était par ailleurs pas contesté que le droit aux allocations familiales pour les deux enfants portait notamment sur ces deux périodes. Vu cette concordance temporelle et le constat que les deux types de prestations étaient destinées à permettre d’assurer l’entretien des deux enfants prénommés (concordance matérielle), les prestations octroyées au titre de l’aide sociale constituaient, au sens de l’art. 22 al. 2 LPGA, des avances sur les allocations familiales qui devaient être perçues ultérieurement. ORS et le SASV, en tant qu’autorités d’assistance, bénéficiaient donc de la subrogation instituée par l’art. 29 al. 4 LASoc. En effet, ce qui était déterminant, ce n’était pas à qui les allocations et avances matérielles étaient versées mais leur objet, en l’occurrence la couverture des frais d’entretien des enfants.

Selon la cour cantonale, la caisse de compensation était en droit de verser à ORS et au SASV les allocations familiales en faveur des deux enfants pour les périodes respectives de juin 2009 à octobre 2012 et d’août à septembre 2013. Cette mesure s’inscrivait dans le sens même de la subrogation légale prévue à l’art. 29 al. 4 LASoc qui a pour but de garantir aux autorités d’aide sociale le remboursement indirect des prestations d’aide matérielle qu’elles allouent à titre d’avance sur des montants à verser ultérieurement par des assurances sociales.

Par jugement du 05.07.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assuré fait valoir que la subrogation n’était pas applicable, car il est l’ayant droit aux allocations familiales. La mère (et l’autorité prétendument subrogée) n’avait pas un droit à faire valoir à son encontre au titre des allocations familiales.

Sauf exceptions non pertinentes en l’espèce (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), on ne peut invoquer la violation du droit cantonal ou communal en tant que tel devant le Tribunal fédéral (art. 95 LTF a contrario). Il est néanmoins possible de faire valoir que son application consacre une violation du droit fédéral, en particulier la protection contre l’arbitraire (art. 9 Cst.) ou la garantie d’autres droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n’examine alors de tels moyens que s’ils sont formulés conformément aux exigences de motivation qualifiée prévues à l’art. 106 al. 2 LTF (ATF 142 V 577 consid. 3.2 p. 579 et la référence). L’assuré doit en particulier indiquer précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation (voir par ex. arrêt 2D_42/2018 du 11 mars 2019 consid. 2).

Appelé à revoir l’interprétation d’une norme cantonale sous l’angle de l’arbitraire, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d’un droit certain. En revanche, si l’application de la loi défendue par l’autorité cantonale n’apparaît pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution – même préférable – paraît possible. En outre, pour qu’une décision soit annulée au titre de l’arbitraire, il ne suffit pas qu’elle se fonde sur une motivation insoutenable; encore faut-il qu’elle apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 113 consid. 7.1 p. 124).

L’objection soulevée ici par l’assuré n’a pas échappé à la juridiction cantonale qui a estimé – à tort ou à raison, la question peut demeurer indécise – qu’elle ne faisait pas obstacle à l’application de la subrogation prévue à l’art. 29 al. 4 LASoc. L’assuré – qui ne soulève pas le grief d’arbitraire ni n’invoque ici une autre garantie d’ordre constitutionnel – ne formule aucun argument qui satisfasse aux exigences précitées de motivation. Il ne démontre en tout cas pas en quoi l’interprétation – peut-être discutable – par les premiers juges de la disposition en question serait insoutenable.

 

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_606/2018 consultable ici

 

 

1C_394/2018 (f) du 07.06.2019 – Principe de publicité de la justice – 6 par. 1 CEDH – 14 Pacte ONU II – 30 al. 3 Cst. / Liberté d’information – 16 al. 3 Cst. / Publication des arrêts cantonaux genevois

Arrêt du Tribunal fédéral 1C_394/2018 (f) du 07.06.2019

 

Consultable ici

 

Principe de publicité de la justice / 6 par. 1 CEDH – 14 Pacte ONU II – 30 al. 3 Cst.

Liberté d’information / 16 al. 3 Cst.

Publication des arrêts cantonaux genevois

 

Le 17.01.2017, une avocate au barreau de Genève a demandé au Tribunal correctionnel, dans le cadre d’une défense d’office qui lui avait été confiée, l’accès à toutes les décisions et ordonnances rendues par le Tribunal pénal durant les dix dernières années. Le Secrétariat général du pouvoir judiciaire a refusé la requête d’accès, en précisant que celle-ci ne pouvait porter que sur les décisions au fond rendues par le Tribunal de police, le Tribunal correctionnel et le Tribunal criminel, à l’exclusion des décisions du Tribunal des mesures de contrainte (Tmc) et du Tribunal d’application des peines et des mesures (Tapem). Les prononcés en question représentaient environ 1200 décisions par année, et leur anonymisation représentait un travail disproportionné. L’accès à des décisions déterminées restait possible.

A la demande de l’avocate, le Préposé cantonal à la protection des données et à la transparence (le Préposé) a recommandé au Tribunal pénal d’autoriser l’intéressée à consulter dans ses locaux l’intégralité des décisions et ordonnances, en vertu des principes de publicité et de transparence.

Par décision du 04.09.2017, le Tribunal pénal s’est écarté de cette recommandation et a derechef refusé l’accès à l’intégralité des décisions prises depuis 2007. En l’occurrence, la remise de toute la jurisprudence sur dix ans imposerait d’anonymiser quelque 22’000 décisions, ce qui représentait un travail disproportionné pour lequel le Tribunal pénal ne disposait pas du personnel suffisant. La possibilité de consulter les jugements non anonymisés, moyennant un engagement de confidentialité, était réservée aux recherches académiques.

Par arrêt du 05.06.2018 (arrêt ATA/550/2018 – consultable ici), la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours formé contre cette décision. L’art. 20 de la loi cantonale sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles (LIPAD, RS/GE A 2 08) prévoyait l’accessibilité des arrêts et décisions entrés en force sous forme caviardée (al. 4), ainsi que la publication de ces décisions « dans la mesure où la discussion et le développement de la jurisprudence le requièrent » (al. 5). Les juridictions devaient ainsi admettre les demandes de consultation portant sur des décisions précises, sauf si le travail en résultant était réellement disproportionné, mais aucune des dispositions précitées n’imposait une publication de l’intégralité de la jurisprudence des tribunaux pénaux. La consultation des décisions non caviardées, moyennant un engagement de confidentialité, était exclue, car réservée aux recherches scientifiques. Confirmant le refus du Tribunal pénal, la cour cantonale a cependant considéré que l’avocate ne pouvait prétendre consulter au siège de l’autorité l’intégralité de la jurisprudence pénale car celle-ci représentait près de 22’000 décisions et le travail de caviardage sur un nombre aussi important de documents serait disproportionné au sens de l’art. 26 al. 1 et 5 LIPAD. De plus, l’on ne pouvait reprocher au tribunal de ne pas avoir anonymisé à l’avance ses décisions. Il n’y avait pas de violation du principe d’égalité des armes par rapport au Ministère public qui, en qualité de partie, se voyait notifier l’ensemble des décisions du Tribunal pénal.

 

TF

Les art. 6 par. 1 CEDH, 14 Pacte ONU II et 30 al. 3 Cst. (ce dernier s’appliquant à l’ensemble des procédures judiciaires) garantissent le principe de publicité de la justice. Il s’agit d’un principe fondamental de l’Etat de droit permettant à quiconque de s’assurer que la justice est rendue correctement en préservant la transparence et la confiance dans les tribunaux et en évitant l’impression que des personnes puissent être avantagées ou au contraire désavantagées par les autorités judiciaires (ATF 139 I 129 consid. 3.3 p. 133; 137 I 16 consid. 2.2 p. 19; SAXER/THURNHEER, Basler Kommentar StPO, Bâle 2014, n° 40 ad art. 69 CPP). Le principe de publicité protège ainsi d’une part les parties impliquées directement dans une procédure en garantissant, à travers la publicité des débats et du prononcé, un traitement correct de leur cause; il permet, d’autre part et plus généralement, d’assurer la transparence de la justice afin de permettre au public de vérifier de quelle manière les procédures sont menées et la jurisprudence est rendue (ATF 143 I 194 consid. 3.1 p. 197; 139 I 129 consid. 3.3 p. 133 ss).

Le principe de publicité concrétise également, dans le domaine de la procédure judiciaire, la liberté d’information garantie à l’art. 16 al. 3 Cst. qui permet le libre accès aux sources généralement accessibles que sont notamment les débats et les décisions judiciaires. Les décisions des tribunaux – comprenant la composition du tribunal, l’exposé des faits, les considérants en droit et le dispositif – doivent en général être accessibles et leur consultation n’est pas soumise à l’existence d’un intérêt particulier (ATF 139 I 129 consid. 3.6; arrêt 1C_123/2016 précité consid. 3.5.2), hormis dans certains cas concernant notamment les ordonnances de classement (ATF 137 I 16; 134 I 286). La jurisprudence entend ainsi en principe par décision judiciaire les arrêts à caractère final, soit le résultat de la procédure judiciaire dès son achèvement (ATF 139 I 129 consid. 3.3), sans limitation aux arrêts entrés en force (arrêt 1C_123/2016 précité consid. 3.5.1 et 3.9). Cette obligation de publicité peut être réalisée de diverses manières telles que la mise à disposition publique des jugements, leur publication dans des recueils officiels, leur diffusion sur Internet ainsi que leur consultation sur demande; ces différentes formes de publicité peuvent être combinées (arrêt 1C_123/2016 précité consid. 3.5.1, 3.6). Le droit de consulter les décisions judiciaires n’est toutefois pas absolu; il peut être limité afin de protéger des intérêts personnels (notamment des parties à la procédure) ou publics. Les jugements peuvent ainsi être anonymisés ou caviardés dans une mesure qui doit être déterminée au cas par cas (ATF 139 I 129 consid. 3.6; 133 I 106 consid. 8.3 p. 108).

Toutefois, il ne ressort pas des arrêts susmentionnés, en particulier l’arrêt 1C_123/2016, que les tribunaux auraient de manière générale l’obligation de publier l’intégralité de leur jurisprudence sur papier ou sur Internet. L’arrêt précité concerne au demeurant non pas la publication systématique de la jurisprudence, mais la remise anonymisée de deux jugements particuliers. Sous l’angle du principe de publicité, la mise à disposition des jugements au greffe de la juridiction est suffisante, avec la possibilité le cas échéant d’en faire une copie anonymisée (ATF 139 I 129 consid. 3.3 p. 134 et les arrêts cités; arrêt 1C_290/2015 du 15 octobre 2015 consid. 3.2.3; HÜRLIMANN/KETTIGER, Zugänglichkeit zu Urteilen kantonaler Gerichte: Ergebnisse einer Befragung, in Justice-Justiz-Giustizia 2018/2 p. 1-2).

En matière de procédure pénale, le législateur a posé à l’art. 69 CPP quelques normes découlant du principe de publicité concernant en premier lieu la publicité des débats. Cette disposition ne règle cependant pas exhaustivement la portée du principe de publicité en droit pénal (SAXER/THURNHEER, Basler Kommentar StPO, Bâle 2014, n° 4 ad art. 69 CPP). Elle prévoit que les débats de première instance et d’appel, de même que la notification orale des jugements sont publics, à l’exception des délibérations (al. 1). Lorsque, dans ces cas, les parties ont renoncé à un prononcé en audience publique ou qu’une ordonnance pénale a été rendue, les personnes intéressées peuvent consulter les jugements et les ordonnances pénales (al. 2). L’art. 69 al. 3 CPP définit les exceptions au principe de publicité; il n’y est toutefois pas envisagé tous les aspects de la consultation des décisions pénales du point de vue de la protection de la personnalité.

La Confédération et les cantons sont évidemment libres d’instituer une politique de communication allant au-delà des obligations constitutionnelles rappelées ci-dessus (arrêt 1C_290/2015 précité consid. 3.4.2). La pratique des autorités des différents cantons en matière d’accès à la jurisprudence est ainsi très variable. Une partie d’entre eux (dont Genève) ne donne accès, sur Internet, qu’aux arrêts des instances supérieures, alors qu’une minorité met également en ligne les jugements de première instance; certains cantons prévoient par ailleurs la remise de jugements, sur demande. La politique d’anonymisation varie également d’un canton à l’autre. Les objections à la publication sur Internet reposent essentiellement sur des considérations d’ordre financier, notamment en rapport avec la nécessité d’anonymiser rétroactivement un grand nombre de décisions. Dans ce domaine, la situation évolue toutefois rapidement (HÜRLIMANN/KETTIGER, loc. cit.).

L’art. 20 al. 4 LIPAD se rapporte au droit général d’accès à la jurisprudence; il n’impose pas une publication ou une mise en ligne des arrêts, mais uniquement leur mise à disposition au siège du Tribunal ou d’un service spécial. Quant à l’art. 20 al. 5 LIPAD, il doit être lu en rapport avec l’art. 61 de la loi genevoise d’organisation judiciaire (LOJ, RS/GE E 2 05) et concerne la publication des décisions de principe, dont la sélection est du ressort de la juridiction concernée.

Sur le vu de ce qui précède, le droit cantonal n’impose pas non plus aux juridictions pénales de première instance (Tribunal de police, Tribunal correctionnel et Tribunal criminel) de publier systématiquement l’intégralité de leurs jugements, sur papier ou sur Internet, dans la mesure où ceux-ci sont suffisamment accessibles au siège de ces juridictions. En revanche, sauf à violer l’interdiction de l’arbitraire, on ne peut comprendre le droit cantonal genevois autrement que comme autorisant en principe l’accès public à toutes les décisions judiciaires visées.

 

La position de l’autorité cantonale se heurte aux principes rappelés ci-dessus: le principe de la publicité de la justice et, en général, le principe de l’information, tels qu’ils sont définis par le droit fédéral et par le droit cantonal, exigent en effet que l’ensemble des décisions rendues au fond par les tribunaux soit, à tout le moins, mis à disposition du public. Il s’agit là d’une obligation de résultat, et les difficultés liées à l’anonymisation d’un très grand nombre de décisions ne sauraient y faire échec. Les tribunaux disposaient selon le droit cantonal d’un délai de deux ans échu au mois de mars 2004 pour procéder à l’anonymisation des jugements susceptibles d’être consultés, et l’écoulement du temps ne fait qu’accroître les difficultés évoquées par les instances cantonales, de sorte qu’une consultation élargie de la jurisprudence ne serait en définitive jamais possible. Les autorités genevoises doivent ainsi mettre en œuvre sans retard les moyens nécessaires à la réalisation de l’obligation de publicité telle qu’elle découle clairement du droit cantonal. Tant que cette obligation n’est pas satisfaite, l’autorité n’aura d’autre choix que de tolérer la consultation des décisions au siège du tribunal concerné.

Cela étant, il n’en demeure pas moins qu’il y a lieu de protéger la personnalité des parties aux procédures (art. 20 al. 4 et 26 al. 2 let. g LIPAD; ATF 139 I 129 consid. 3.6 p. 136), à laquelle l’atteinte la moins grave possible doit être portée (principe de la proportionnalité, art. 36 al. 3 Cst.). Afin de garantir ce droit fondamental tout en permettant la mise en œuvre du principe de publicité dans le contexte actuel particulier du canton de Genève décrit ci-dessus, soit sans imposer un travail d’anonymisation actuellement disproportionné (cf. ATF 142 II 324 consid. 3.5 p. 337 concernant la loi fédérale sur la transparence), il y a lieu, en l’état, de poser quelques conditions à l’exercice du droit de consulter. On peut ainsi exiger de la requérante, d’une part, qu’elle précise raisonnablement l’objet de sa demande de consultation et, d’autre part, qu’elle prenne un engagement de confidentialité, une consultation de très nombreuses décisions judiciaires par une avocate ou un magistrat judiciaire s’apparentant à une recherche scientifique.

Au vu des principes rappelés ci-dessus, l’on ne voit pas pourquoi cette possibilité de consultation serait réservée aux recherches académiques alors qu’une recherche élargie de jurisprudence effectuée par un avocat ou un magistrat peut également comporter un intérêt légitime. Les avocats étant par ailleurs déjà tenus au secret professionnel, la portée d’un tel engagement de confidentialité ne saurait leur échapper. La formulation de cet engagement pourra le cas échéant être adaptée à une recherche effectuée par un avocat.

Enfin, il y a lieu de préciser que si l’avocate désire obtenir copie de certaines décisions, celles-ci devront être anonymisées. Au terme de sa recherche, l’avocate devra donc sélectionner – toujours au regard du but poursuivi – un nombre raisonnable de décisions, afin de ne pas engendrer de travail disproportionné, la perception d’un émolument étant réservée.

 

Le TF admet le recours de l’avocate, annule l’arrêt attaqué et renvoie la cause au tribunal pénal pour nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 1C_394/2018 consultable ici

 

 

Cf. également l’arrêt 1C_225/2019 du 27.06.2019 portant sur la même problématique dans un cas similaire, également à Genève.

 

 

9C_738/2018 (f) du 07.03.2019 – Evaluation de l’invalidité par l’institution de prévoyance / Non-notification de la décision par l’office AI à l’institution de prévoyance / Rupture du lien de connexité temporelle

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_738/2018 (f) du 07.03.2019

 

Consultable ici

 

Evaluation de l’invalidité par l’institution de prévoyance

Non-notification de la décision par l’office AI à l’institution de prévoyance

Rupture du lien de connexité temporelle

 

Assuré a déposé sa demande AI le 24.02.2012. Il indiquait notamment dans le formulaire de demande travailler comme aide-peintre en bâtiments, être incapable d’exercer son métier depuis le 27.10.2011 et être assuré par la Caisse de retraite professionnelle de l’industrie vaudoise de la construction (ci-après: la caisse).

L’assuré a été licencié pour le 30.06.2012. Il a été mis au bénéfice de mesures d’ordre professionnel qui ont finalement conduit à son engagement depuis le 21.05.2014 en qualité de peintre en bâtiments à 80%. A ce titre, il était assuré par Retraites Populaires Fondation de prévoyance (ci-après: la fondation). Le médecin du Service médical régional de l’office AI (SMR) a déduit du dossier que l’intéressé disposait d’une capacité de travail de 90% dans son activité habituelle et toute activité adaptée. L’administration a dès lors nié le droit à une rente, motif pris d’un taux d’invalidité de 10% (décision du 04.12.2014).

L’assuré s’est à nouveau annoncé à l’office AI le 30.01.2015. Il l’informait en particulier qu’il était en arrêt maladie depuis le 27.10.2014 et qu’il avait été licencié pour le 31.01.2015 dans la mesure où l’entreprise dans laquelle il travaillait cessait toute activité. Après les investigations et mesures habituelles, l’office AI a retenu une capacité totale de travail dans une activité adaptée avec une baisse de rendement de 40%. Elle a reconnu le droit de l’assuré à une demi-rente à partir du 01.01.2016, fondée sur un taux d’invalidité de 51% (décision du 18.10.2016).

L’assuré a requis des prestations de la caisse et de la fondation à réitérées reprises. Les deux institutions de prévoyance ont refusé de prester.

 

Procédure cantonale

Le 26.07.2017, l’assuré a ouvert une action contre les deux institutions de prévoyance.

Le tribunal cantonal a considéré que les deux institutions de prévoyance étaient liées par les appréciations de l’office AI dans la mesure où elles reprenaient dans leurs règlements la notion d’invalidité prévalant en matière d’assurance-invalidité et n’avaient pas contesté les décisions administratives. La cour cantonale a déduit des décisions AI, ainsi que des pièces médicales que si l’assuré souffrait en 2012 voire même plus tôt de certaines pathologies, celles-ci ne s’étaient détériorées et n’avaient acquis un caractère invalidant qu’au début 2015 alors que l’assuré était déjà affilié à la fondation.

Par jugement du 18.09.2018, le tribunal cantonal a admis l’action de l’assuré en tant qu’elle visait la fondation mais l’a rejetée en tant qu’elle visait la caisse. Il a dès lors condamné la fondation à servir à l’intéressé une demi-rente d’invalidité depuis le 07.03.2016 sous réserve d’une éventuelle surindemnisation.

 

TF

Le Tribunal fédéral relève au préalable que, contrairement à ce que la juridiction cantonale a constaté, la première décision rendue par l’office AI n’a pas été notifiée à la fondation. La seconde l’a en revanche bien été. Elle n’a cependant pas été contestée.

Les offices AI doivent transmettre leurs décisions de rente à toutes les institutions de prévoyance entrant en considération, soit à toutes celles qui sont susceptibles de devoir à leur tour accorder des prestations, pour qu’elles puissent exercer le droit de recours dont elles disposent à l’encontre desdites décisions. Lorsqu’elles n’ont pas été intégrées à la procédure, ces institutions ne sont pas liées par l’évaluation de l’invalidité effectuée par les organes de l’assurance-invalidité (ATF 129 V 73 consid. 4 p. 73 ss; 150 consid. 2.5 p. 156 s.) et peuvent procéder à leur propre estimation, indépendamment même du point de savoir si leurs règlements reprennent la notion d’invalidité de l’assurance-invalidité (arrêt B 58/03 du 6 mai 2004 consid. 3.2). En revanche, si la décision de l’office AI a été notifiée à une institution de prévoyance qui entre en considération et dont le règlement reprend la notion d’invalidité de l’assurance-invalidité mais qui n’a pas exercé son droit de recours, cette institution est en principe liée par l’évaluation de l’invalidité à laquelle ont procédé les organes de l’assurance-invalidité, sauf si cette estimation paraît d’emblée insoutenable (ATF 129 V 150 consid. 2.5 p. 156 s.; arrêt 9C_442/2015 du 13 octobre 2015 consid. 4.2 et 4.3).

 

La fondation n’était pas liée par l’évaluation de l’invalidité réalisée par l’office AI telle qu’elle ressortait de la décision du 04.12.2014. L’absence de notification de la décision permettait à la fondation d’examiner librement la situation prévalant à cette époque. Elle ne pouvait en revanche s’écarter de l’appréciation à laquelle avaient procédé les organes de l’assurance-invalidité dans leur décision du 18.10.2016 que si cette appréciation apparaissait d’emblée insoutenable. C’est ce à quoi l’institution de prévoyance s’est concrètement attachée en ne niant pas le droit de l’assuré à une rente d’invalidité de la prévoyance professionnelle mais en considérant seulement au terme d’une appréciation des pièces figurant au dossier que l’incapacité de travail dont la cause était à l’origine de l’invalidité remontait au mois d’août 2010 déjà. Dans ces circonstances, le tribunal cantonal ne pouvait se contenter de renvoyer aux décisions prises par l’office AI et d’écarter les griefs de la fondation au motif que ces décisions constataient la survenance au début de l’année 2015 du caractère invalidant (au sens de la loi l’assurance-invalidité) de pathologies existant de longue date, et liaient les deux institutions de prévoyance. La cour cantonale aurait dû analyser librement l’ensemble du dossier médical et déterminer la date à laquelle était survenue l’incapacité de travail déterminante au sens de l’art. 23 let. a LPP, son évolution et l’existence éventuelle d’une rupture du lien de connexité temporelle. A cet égard, les rapports médicaux tels que cités par la juridiction cantonale semblent mettre en évidence une incapacité de travail déterminante au sens de la prévoyance professionnelle depuis octobre 2011, dont le taux s’est progressivement amélioré sans pour autant qu’une capacité totale de travail soit atteinte.

On rappellera que l’incapacité de travail s’évalue dans ce contexte en fonction de la diminution de rendement fonctionnel dans le métier exercé précédemment et est pertinente si elle s’élève à 20% au moins (ATF 144 V 58 consid. 4.4 p. 62 s.). De surcroît, la connexité temporelle entre l’incapacité de travail survenue durant le rapport de prévoyance et l’invalidité ultérieure n’est interrompue que lorsqu’une capacité de travail de plus de 80% dans une activité lucrative adaptée existe durant plus de trois mois (ATF 144 V 58 consid. 4.5 p. 63). En conséquence, la question d’une éventuelle rupture du lien de connexité n’apparaît nullement secondaire, si bien qu’il lui incombait de se prononcer de manière circonstanciée sur ce point.

 

Le TF admet le recours de l’institution de prévoyance, annule le jugement cantonal et renvoie la cause pour nouveau jugement.

.

 

 

Arrêt 9C_738/2018 consultable ici

 

 

9C_16/2019 (f) du 17.04.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Obligation de communiquer les activités exercées – 31 al. 1 LPGA – 77 RAI / Bonne foi de l’assuré niée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 (f) du 17.04.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer / 25 LPGA

Obligation de communiquer les activités exercées / 31 al. 1 LPGA – 77 RAI

Bonne foi de l’assuré niée en raison de la négligence grave

 

Par décision, l’office AI a supprimé la rente d’invalidité dont bénéficiait l’assuré avec effet rétroactif au 01.06.2006. Cette décision a été confirmée par les instances cantonale et fédérale de recours (cf. arrêt 9C_107/2017 du 08.09.2017).

L’office AI a réclamé par décision du 22.12.2015 à l’assuré le remboursement de la somme de 179’524 fr. représentant les prestations versées à tort du 01.12.2010 au 31.10.2015.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1028/2018 – consultable ici)

Selon les constatations de la cour cantonale, l’assuré avait non seulement omis d’indiquer à l’office AI qu’il avait repris une activité, mais il avait de plus nié exercer une activité accessoire dans les questionnaires de révision en 2006, 2011 et 2014.

La cour cantonale a considéré qu’un assuré ne pouvait pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, constituait une modification de sa situation susceptible d’entraîner la suppression de la prestation et que le bénéficiaire avait dès lors l’obligation de l’annoncer. A tout le moins, l’assuré devait s’en douter et se renseigner auprès de l’office AI. Pour les juges cantonaux, la négligence dont a fait preuve l’assuré n’a pas été simplement légère, mais a revêtu un caractère de gravité suffisant pour que la condition de la bonne foi ne puisse être considérée comme étant réalisée.

Par jugement du 06.11.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 8C_510/2018 du 12 mars 2019 consid. 3).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s. avec les renvois).

Il y a négligence grave quand un ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181; SYLVIE PÉTREMAND, Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, ch. 63 ss ad art. 25). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223 avec les renvois).

 

Les assurés sont tenus de communiquer les activités exercées, au sens des art. 31 LPGA et 77 RAI, en tout temps. Chaque assuré doit annoncer immédiatement toute modification de la situation susceptible d’entraîner la suppression, une diminution ou une augmentation de la prestation allouée, singulièrement une modification du revenu de l’activité lucrative, de la capacité de travail ou de l’état de santé lorsqu’il est au bénéfice d’une rente d’invalidité. Pareille obligation est d’ailleurs mentionnée dans la décision d’octroi initial de la rente et à l’occasion de chaque révision de cette prestation.

En l’espèce, il n’appartenait pas à l’assuré de choisir les activités qu’il devait annoncer à l’office AI. Il ne devait en effet pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, était susceptible d’entraîner une nouvelle appréciation de ses capacités de travail et de gain, pouvant aboutir le cas échéant à une modification de la rente, ce qui s’est d’ailleurs produit à l’issue de l’instruction du cas (cf. arrêt 9C_107/2017 précité, consid. 5.1 et 5.2). Pareille obligation d’annoncer valait tout particulièrement en raison de ses attributions légales d’associé gérant président de la société B.__ Sàrl (cf. art. 810 CO), ainsi que de l’aide qu’il apportait à son épouse dans le cadre de la gestion de son entreprise. En taisant l’exercice de telles activités, la négligence de l’assuré a revêtu un caractère de gravité suffisant pour exclure la bonne foi, de sorte que l’une des conditions cumulatives pour autoriser la remise de l’obligation de restituer fait défaut (cf. art. 25 al. 1 LPGA).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_16/2019 consultable ici

 

 

8C_605/2018, 8C_639/2018 (f) du 22.05.2019 – Délimitation de l’objet du litige dans le cadre d’un recours au tribunal cantonal / Différentiation entre l’objet de la contestation et l’objet du litige / Pas de lien de connexité entre le droit à une rente d’invalidité et le droit à une IPAI – Entrée en force partielle de la décision

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_605/2018, 8C_639/2018 (f) du 22.05.2019

 

Consultable ici

 

Délimitation de l’objet du litige dans le cadre d’un recours au tribunal cantonal

Différentiation entre l’objet de la contestation et l’objet du litige

Pas de lien de connexité entre le droit à une rente d’invalidité et le droit à une IPAI – Entrée en force partielle de la décision

 

Assuré, né en 1957, menuisier d’atelier, a subi le 24.12.2010 une lésion transfixiante de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche lors d’une chute survenue alors qu’il promenait son chien. Il a repris son activité professionnelle dès le 09.02.2011 à hauteur de 70% en raison de la persistance des douleurs. Le 07.06.2011, il a été victime d’une tendinopathie rupturée antéro-supérieure de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite lors d’une chute sur son lieu de travail.

Après instruction et examens par le médecin-conseil, le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) découlant de l’accident a été estimé à 25%. S’agissant de la capacité de travail, l’assuré disposait d’une capacité de travail nulle dans son ancienne activité, mais entière et sans baisse de rendement dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles suivantes: pas de port de charges de plus de 3-4 kg, aucun soulèvement de charges en dessus de l’horizontale ou avec les bras tendus, ni de mouvements de rotation répétitifs, pas de travail avec des machines générant des vibrations et pas d’utilisation d’échafaudages.

Par décision confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a alloué à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 20% à partir du 01.01.2017, ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 25%.

 

Procédure cantonale

L’assuré a déféré la décision au tribunal cantonal, en concluant à l’octroi d’une rente basée sur un taux d’invalidité de 65%.

Par jugement du 30.07.2018, la cour cantonale a partiellement admis le recours, en reconnaissant le droit de l’assuré à une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 35%. Elle a confirmé la décision sur opposition pour le surplus.

 

TF

Invoquant la violation de l’art. 61 let. d LPGA et une constatation erronée des faits (art. 97 al. 2 LTF), l’assurance-accidents reproche à la juridiction cantonale d’avoir modifié à la hausse le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité de 25% à 35% alors que cette question n’était plus litigieuse. Elle fait en effet valoir que par son recours, l’assuré avait délimité l’objet de la contestation devant la juridiction cantonale à la question du droit à la rente uniquement; il n’avait pris aucune conclusion sur l’IPAI et avait expressément conclu à l’annulation partielle de la décision sur opposition et à l’octroi d’une rente basée sur un taux d’invalidité de 65%. Aussi, la juridiction cantonale avait-elle statué sur un point non litigieux, non soumis à son autorité, sans lien avec l’objet du litige et entré en force, de sorte que son jugement doit être annulé sur ce point. L’assurance-accidents soutient au demeurant que si la cour cantonale entendait dépasser le cadre fixé par les conclusions des parties en modifiant à la hausse le taux de l’indemnité, au détriment de l’assureur-accidents, elle devait dans tous les cas lui donner l’occasion de se déterminer. En omettant de le faire, elle avait violé son droit d’être entendue.

L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui – dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision – constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige (ATF 131 V 164 consid. 2.1 p. 164; 125 V 413 consid. 1b et 2 p. 414 et les références citées). Les questions qui – bien qu’elles soient visées par la décision administrative et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation – ne sont plus litigieuses, d’après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s’il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (ATF 122 V 242 consid. 2a p. 244; 117 V 294 consid. 2a p. 295; 112 V 97 consid. 1a p. 99; 110 V 48 consid. 3c p. 51 et les références; voir également ATF 122 V 34 consid. 2a p. 36).

En l’occurrence, en statuant – par sa décision confirmée sur opposition – sur le droit à une rente d’invalidité d’une part, et le droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’autre part, l’assurance-accidents a statué sur deux rapports juridiques distincts sans lien de connexité (cf. notamment arrêt 8C_451/2009 du 18 août 2010 consid. 1.2). Dans la mesure où le recours formé par l’assuré devant la juridiction cantonale ne portait que sur la question de la rente, à l’exclusion de la question de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, la décision litigieuse était entrée en force sur ce point et les premiers juges ne pouvaient pas examiner cette question de leur propre chef. En étendant la procédure à la question de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, la juridiction cantonale a par conséquent violé le droit fédéral.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_605/2018, 8C_639/2018 consultable ici