Archives de catégorie : Assurance-invalidité AI

9C_638/2018 (f) du 07.02.2019 – Capacité de travail exigible pour un assuré âgé de 58 ans – 16 LPGA – 28a al. 1 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_638/2018 (f) du 07.02.2019

 

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Capacité de travail exigible pour un assuré âgé de 58 ans / 16 LPGA – 28a al. 1 LAI

 

TF

Le moment où la question de la mise en valeur de la capacité (résiduelle) de travail pour un assuré proche de l’âge de la retraite sur le marché de l’emploi doit être examinée correspond non pas à celui de la date du prononcé de la décision de l’office AI mais à celui auquel il a été constaté que l’exercice (partiel) d’une activité lucrative était médicalement exigible (ATF 138 V 457 consid. 3.3 p. 461 et consid. 3.4 p. 462).

Dans le cas d’espèce, au moment déterminant, l’assuré était âgé de 58 ans. Quoi qu’en dise ce dernier, il n’avait dès lors pas encore atteint l’âge à partir duquel le Tribunal fédéral admet qu’il peut être plus difficile de se réinsérer sur le marché du travail (ATF 143 V 431 consid. 4.5.2 p. 433).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré sur ce point.

 

 

Arrêt 9C_638/2018 consultable ici

 

 

8C_84/2018 (f) du 01.02.2019 – Revenu d’invalide selon ESS – 16 LPGA – 28a LAI / Pas d’abattement sur le salaire statistique en raison de la diminution de rendement

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_84/2018 (f) du 01.02.2019

 

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Revenu d’invalide selon ESS / 16 LPGA – 28a LAI

Pas d’abattement sur le salaire statistique en raison de la diminution de rendement

 

 

TF

Pour évaluer le degré d’invalidité, partant procéder à une comparaison des revenus, sont déterminantes les circonstances qui prévalaient au moment de la naissance éventuelle du droit à la prestation d’assurance, ainsi que les modifications éventuelles survenues jusqu’au moment de la décision litigieuse qui ont des conséquences sur le droit à cette prestation (voir ATF 129 V 222; 128 V 174). Il convient par conséquent de procéder à une nouvelle comparaison des revenus chaque fois qu’il est admis qu’un changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité est survenu.

Dans le cas d’espèce, la comparaison des revenus déterminants est effectuée en prenant pour référence l’année 2008.

Après mise en œuvre d’une expertise judiciaire, les médecins-experts ont conclu que l’assuré bénéficiait d’une pleine capacité de travail dans une activité professionnelle assise comportant de très courts déplacements en terrain régulier avec des chaussures orthopédiques adaptées, sans prise de charges, avec une baisse de rendement de l’ordre de 20% pour pouvoir, occasionnellement, surélever les jambes en fonction de l’apparition d’œdèmes, ce qui n’était pas le cas le jour de l’expertise, mais semblait être le cas dans différents documents médicaux (jugement cantonal, Faits, lit. d).

En 2008, l’assuré avait 48 ans, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’effectuer un abattement à raison de l’âge. Quant à la nécessité de faire des pauses fréquentes, il s’agit d’une circonstance dont les experts judiciaires ont déjà tenu compte dans leur évaluation de la capacité de travail résiduelle de l’assuré, ce qui les a conduit à reconnaître une diminution de rendement de 20%. Elle ne saurait par conséquent non plus justifier un abattement, ce qui reviendrait à prendre en considération le même facteur deux fois (voir les arrêts 8C_878/2014 du 27 janvier 2015 consid. 5.2.5 et 8C_498/2012 du 6 septembre 2012 consid. 3.1).

Les difficultés en lien avec les questions de limitations fonctionnelles et le handicap ont été prises en considération dans la diminution du rendement de 20% admise dans une activité simple et répétitive qui tient déjà compte d’un vaste panel d’activités légères à moyenne (jugement cantonal, consid. 6c).

Ainsi, le Tribunal fédéral confirme le jugement cantonal en ce qui concerne l’absence de réduction sur le revenu statistique.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_84/2018 consultable ici

 

 

9C_23/2018 (f) du 15.02.2018 – Droit aux mesures de réadaptation – Reclassement dans une nouvelle profession – 17 LAI / Syndrome de dépendance à l’alcool

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_23/2018 (f) du 15.02.2018

 

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Droit aux mesures de réadaptation – Reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Syndrome de dépendance à l’alcool

 

Assuré, viticulteur indépendant, a subi le 26.03.2007 une fracture-luxation de la cheville droite. En arrêt de travail depuis lors, l’assuré a déposé une demande AI le 21.02.2008.

L’office AI a recueilli l’avis du médecin traitant, spécialiste en médecine interne générale, qui a fait état notamment d’un syndrome de dépendance à l’alcool, puis fait verser le dossier de l’assurance-accidents. Il a pris en charge les coûts d’un stage d’orientation professionnelle (du 15.03.2010 au 13.06.2010), puis d’une formation d’employé de commerce CFC (dès le 09.08.2010). Le 11.03.2011, la direction cantonale de l’enseignement post-obligatoire a, pour des raisons de santé, confirmé la rupture du contrat d’apprentissage de l’assuré dès le 28.02.2011. Par décision du 26.08.2011, l’office AI a rejeté la demande de prestations.

Le 05.04.2012, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations, au motif qu’il avait bénéficié d’un programme de sevrage alcoolique. L’office AI a pris en charge les frais d’un stage de reclassement professionnel (dès le 09.07.2012), puis derechef d’un apprentissage d’employé de commerce (dès le 01.03.2013). Après que l’assuré ne s’est pas présenté à la session d’examens en mai 2014, l’office AI a interrompu le reclassement avec effet au 31.05.2014, tandis que l’employeur a résilié le contrat d’apprentissage avec effet au 30.09.2014. L’office AI a ensuite soumis l’intéressé à une expertise psychiatrique. Dans un rapport du 05.10.2015, le spécialiste en psychiatrie et psychothérapie a diagnostiqué – sans répercussion sur la capacité de travail – un syndrome de dépendance alcoolique. Par décision, l’office AI a nié le droit de l’assuré à une rente d’invalidité et à un reclassement professionnel.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 20.11.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 17 al. 1 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Est réputé invalide au sens de l’art. 17 LAI celui qui n’est pas suffisamment réadapté, l’activité lucrative exercée jusque-là n’étant plus raisonnablement exigible ou ne l’étant plus que partiellement en raison de la forme et de la gravité de l’atteinte à la santé. Le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement est une diminution de la capacité de gain de 20 % environ (ATF 139 V 399 consid. 5.3 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références).

La juridiction cantonale a constaté que l’assuré ne supportait pas la pression des examens et qu’il sombrait souvent dans l’alcool peu avant ces échéances. L’expert psychiatre a par ailleurs mis en évidence que l’alcoolodépendance dont souffre le recourant constituait une affection primaire non constitutive d’invalidité. Aussi, le syndrome de dépendance à l’alcool n’était ni la cause ni la conséquence d’une atteinte à la santé psychique ou somatique ayant valeur de maladie (sur le caractère invalidant de la dépendance, en particulier à l’alcool, cf. ATF 124 V 265 consid. 3c p. 268; arrêts 9C_618/2014 du 9 janvier 2015 consid. 5.2-5.4 et 9C_706/2012 du 1 er juillet 2013 consid. 3.2 et les références). Il faut donc en conclure que l’assuré, qui a interrompu son reclassement professionnel dès le 05.05.2014, n’était pas apte à suivre avec succès une formation d’employé de commerce, tant objectivement que subjectivement. Il n’y avait dès lors pas lieu de poursuivre la prise en charge de cette mesure. Le droit à l’indemnité journalière devient par ailleurs caduc lorsqu’il est constaté que la mesure de réadaptation n’est plus poursuivie (art. 20quater al. 4 RAI).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_23/2018 consultable ici

 

 

9C_692/2018 (f) du 19.12.2018 – AI / Interruption notable de l’invalidité ou évolution de l’état de santé – Lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – Rechute – Survenance d’un nouveau cas d’assurance / Rappel et examen de la jurisprudence par le Tribunal fédéral

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2018 (f) du 19.12.2018

 

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Survenance du cas d’assurance – Début de l’invalidité

Interruption notable de l’invalidité ou évolution de l’état de santé – Lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – Rechute – Survenance d’un nouveau cas d’assurance

Rappel et examen de la jurisprudence par le Tribunal fédéral

 

Assurée, italienne ayant vécu à l’étranger jusqu’à son arrivée en Suisse le 04.07.2000, a requis des prestations de l’assurance-invalidité le 06.06.2013 en raison des conséquences de différents troubles psychiques (dépressif, de la personnalité borderline et bipolaire) présents depuis 1996.

Entre autres investigations médicales, l’office AI a recueilli l’avis du médecin traitant, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, puis mandaté un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, pour mise en œuvre d’une expertise. L’expert a diagnostiqué un trouble bipolaire de type II (épisode actuel de dépression moyenne sans syndrome somatique) et un trouble mixte de la personnalité (borderline – paranoïaque) présents depuis l’adolescence ainsi qu’un trouble panique ayant laissé subsister une capacité résiduelle de travail fluctuante selon les périodes: soit de 50% entre 2001 et 2002, puis totale jusqu’en octobre 2006, nulle entre octobre 2006 et mars 2012, de 50 à 100% entre avril 2012 et février 2014 et de 0 à 50% dès mars 2014.

L’office AI a considéré que l’assurée n’avait pas droit à une rente motif pris que, lors de la survenance de l’invalidité en 2001, elle ne remplissait pas les conditions d’assurance et que les maladies dont elle souffrait constituaient un seul et même cas d’assurance malgré sa capacité de travail fluctuante ; elle a en outre nié le droit de l’intéressée à des mesures de réadaptation dans la mesure où elles ne permettaient pas d’améliorer la capacité de travail.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/722/2018 – consultable ici)

Le tribunal cantonal a constaté que l’assurée ne remplissait pas les conditions d’assurance au moment de la survenance de l’invalidité en 2002. Il a aussi relevé que l’assurée avait présenté une capacité totale de travail de janvier 2003 à octobre 2006. Il a considéré que la rechute survenue consécutivement à cette longue période de rémission constituait un second cas d’assurance et que, dès lors qu’elle comptait alors plus d’une année de cotisations et était domiciliée en Suisse depuis 2000, l’assurée pouvait prétendre une rente d’invalidité. Compte tenu de la date du dépôt de la demande de prestations et de la fluctuation du taux d’incapacité de travail, il a reconnu le droit de l’assurée à une demi-rente à compter de mars 2015.

Par jugement du 22.08.2018, admission du recours par le tribunal cantonal et annulation de la décision.

 

TF

Selon le Tribunal fédéral, la juridiction cantonale a basé son raisonnement sur une ancienne jurisprudence (ATFA 1966 p. 175 [cause I 65/66] repris dans l’arrêt 9C_36/2015 du 29 avril 2015 consid. 5.2 et les références). Le Tribunal fédéral des assurances a mentionné non seulement qu’une succession de causes différentes d’invalidité entraîne naturellement autant de survenances successives de l’invalidité. Il a également retenu qu’une seule et même cause médicale peut entraîner au cours du temps plusieurs survenances de l’invalidité, en particulier lorsque cette invalidité subit des interruptions notables ou que l’évolution de l’état de santé ne permet plus d’admettre l’existence d’un lien de fait et de temps entre les diverses phases qui deviennent autant de nouveaux cas d’assurance.

Cette jurisprudence a été élaborée dans un contexte particulier. Elle visait à établir le principe de l’unité de la survenance de l’invalidité, c’est-à-dire que cette survenance ne se produisait qu’une fois et ne se renouvelait pas pour chaque groupe spécifique de prestations (ATFA 1966 p. 175 consid. 4 p. 178 ss). Cette question n’avait alors pas été définitivement tranchée dans la mesure où l’infirmité congénitale dont souffrait l’assuré, né en Suisse alors que les conditions d’assurance n’étaient pas remplies, n’avait pu ouvrir le droit à des prestations et constituer un premier cas d’assurance qu’après son inscription dans la liste de l’Ordonnance concernant les infirmités congénitales (OIC) à une date où les conditions d’assurance étaient remplies. Elle a été définitivement tranchée par l’entrée en vigueur le 1er janvier 1968 de l’art. 4 al. 2 LAI, qui prévoit désormais que l’invalidité est réputée survenue dès qu’elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération. Cette disposition consacre donc une notion relative et fonctionnelle de l’invalidité, spécifique aux prestations (ATF 130 V 343 consid. 3.3.2 p. 348).

L’éventualité d’une interruption notable de l’invalidité ou d’une évolution de l’état de santé ne permettant plus d’admettre l’existence d’un lien de fait et de temps entre les différentes phases de l’invalidité – et, par conséquent, la survenance d’un nouveau cas d’assurance – a par la suite été plusieurs fois évoquée par le Tribunal fédéral des assurances puis par le Tribunal fédéral. Néanmoins, bien qu’elle n’ait jamais été remise en cause, cette jurisprudence n’a pas été appliquée pour diverses raisons.

Ainsi, dans l’arrêt 9C_36/2015 du 29 avril 2015, bien que le Tribunal fédéral ait rappelé qu’une interruption notable de l’invalidité pouvait justifier la survenance d’un nouveau cas d’assurance (consid. 5.2), il n’a pas fait application de cette éventualité dès lors qu’il n’était pas contesté par le recourant que la nouvelle demande de prestations, constituant un nouveau cas d’assurance, reposait sur une pathologie totalement nouvelle (consid. 5). Dans l’ATF 126 V 5, compte tenu des rapports médicaux réunis, le Tribunal fédéral des assurances a nié l’existence d’interruptions notables de l’incapacité de gain qui auraient permis d’admettre l’existence depuis l’arrivée en Suisse de la personne intéressée d’un nouveau cas d’assurance (consid. 2c p. 10). Dans l’arrêt I 81/90 du 23 avril 1991, il n’a pas eu à se prononcer sur la survenance d’un nouveau cas d’assurance dans la mesure où l’aggravation de l’invalidité d’un assuré mis au bénéfice d’une rente extraordinaire soumise à limite de revenu (il ne remplissait pas les conditions d’assurance pour bénéficier d’une rente ordinaire ou d’une rente extraordinaire non soumise à limite de revenus ; let. A) justifiait le réexamen de son droit dans le cadre d’une procédure de révision de la rente octroyée (consid. 4c). En revanche, dans l’arrêt I 170/94 du 30 mai 1995, il a clairement exclu que l’aggravation d’une atteinte partiellement invalidante à la santé survenue alors que la personne intéressée ne remplissait pas les conditions d’assurance constituât un nouveau cas d’assurance (consid. 4; à ce propos, voir aussi MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3e éd. 2014, no 138 ad art. 4). Le Tribunal fédéral des assurances dans son arrêt I 54/03 du 13 janvier 2004 (consid. 3.2) et le Tribunal fédéral dans son arrêt 8C_93/2017 du 30 mai 2017 (consid. 4.3.3) ont confirmé ce point.

Dans un arrêt 8C_721/2013 du 4 mars 2014, le Tribunal fédéral a ensuite laissé ouverte la question de savoir si, dans le cadre d’une nouvelle demande de prestations fondée sur une même atteinte à la santé, le fait d’avoir recouvré temporairement une pleine capacité de travail justifiait d’admettre un nouveau cas d’assurance ; de toute façon, la personne concernée ne réalisait pas les conditions d’assurance au moment de sa nouvelle annonce (consid. 4.2). On relèvera encore que, dans l’arrêt 9C_592/2015 du 2 mai 2016, le Tribunal fédéral n’a pas eu besoin de s’exprimer sur la réalisation des conditions d’assurance peu après l’arrivée en Suisse de la personne intéressée ni sur la survenance d’un nouveau cas d’assurance dès lors que, consécutivement au dépôt de la première demande de prestations, cette personne ne présentait plus de maladie incapacitante au moment de la naissance du droit à la rente et qu’elle remplissait les conditions d’assurance lors du dépôt de la seconde demande de prestations (consid. 4.2.2 et 4.3). Dans son arrêt 9C_472/2016 du 29 novembre 2016, le Tribunal fédéral a en outre enjoint l’administration à entrer en matière sur la requête d’un assuré (auquel il avait déjà été refusé des prestations au motif qu’il ne remplissait pas les conditions d’assurance) dans la mesure où il avait rendu plausible une « aggravation » de son état de santé faisant suite à une interruption notable de l’incapacité de travail (consid. 5.3).

L’énumération de ces différentes situations met en évidence que le Tribunal fédéral considère qu’il n’y a pas d’interruption notable de l’invalidité justifiant un nouveau cas d’assurance lorsque la personne concernée présente une invalidité (partielle) qui, même si elle varie dans le temps, ne disparaît pas entièrement pendant une période donnée.

 

Eu égard à ce qui précède, il convient dès lors de déterminer si, en fonction des constatations de la juridiction cantonale, selon lesquelles l’assurée a retrouvé une capacité totale de travail de janvier 2003 à octobre 2006 après deux ans d’incapacité partielle, l’invalidité de l’assurée a subi une interruption notable. Or, le médecin-expert a bel et bien attesté une capacité totale de travail entre janvier 2003 et octobre 2006. Interrogé sur ce point particulier, il a aussi confirmé expressément son appréciation. De surcroît, l’expert a dûment motivé son point de vue. Il a décrit de manière détaillée les différents éléments anamnestiques qui avaient guidé ladite appréciation et, sur demande de l’office AI, a encore précisé ces éléments. Dans ces circonstances, il ne suffit donc pas – et il est même erroné – de prétendre comme le fait l’administration que l’amélioration de la situation ne ressortait nullement du rapport d’expertise sur lequel reposait le jugement cantonal. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient encore l’office AI, malgré le fait que l’expert a, dans son appréciation, séparé en deux périodes distinctes (2000-2002 ; 2003-2006) une seule « entité » temporelle (2000-2006), il n’en demeure pas moins qu’il a bel et bien attesté une interruption de trois ans et dix mois de l’incapacité de travail.

L’office AI ne conteste pas – en soi – le caractère notable de l’interruption de l’invalidité, qui correspond en l’occurrence à une période de trois ans et dix mois pendant laquelle l’assurée avait recouvré une pleine capacité de travail. Qu’une telle interruption soit qualifiée de notable n’est pas critiquable ne serait-ce qu’au regard de la période de cotisations nécessaire pour ouvrir le droit à une rente ordinaire, au sens de l’art. 36 al. 1 LAI.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_692/2018 consultable ici

 

 

9C_586/2018 (f) du 07.01.2019 – Révision procédurale – 53 al. 1 LPGA / Expertise médicale – Trouble factice – Faits nouveaux

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_586/2018 (f) du 07.01.2019

 

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Révision procédurale / 53 al. 1 LPGA

Expertise médicale – Trouble factice – Faits nouveaux

 

Assuré, né en 1963, serrurier de formation, occupait un poste de maître artisan chargé d’entretenir et de réparer le matériel au sein des ateliers d’une société. Le 09.09.2003, il a sollicité des prestations de l’AI en raison d’une atteinte à l’épaule droite qui l’empêchait d’exercer son métier depuis le 29.08.2002.

Après instruction habituelle et compte tenu de l’aggravation de la situation, le SMR a reconnu l’existence de différentes affections (état dépressif sévère, état de stress post-traumatique et retard mental sur le plan psychiatrique ; syndrome parkinsonien et syndrome de Meige sur le plan neurologique; status après opérations de la coiffe des rotateurs sur le plan rhumatologique) totalement incapacitantes depuis le mois de février 2006. Se fondant sur ces conclusions, l’office AI a dès lors alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité à compter du 01.02.2007. L’administration a également pris en charge les coûts concernant deux appareils acoustiques (communication du 13.08.2009).

Au terme d’une procédure de révision initiée le 22.11.2012, l’office AI a constaté l’absence d’évolution de la situation médicale de l’assuré et confirmé son droit à une rente entière (communication du 20.12.2013).

Au cours de l’instruction d’une requête d’allocation pour impotent déposée le 28.01.2014, l’intéressé a averti l’administration qu’il avait été incarcéré du 12.05.2014 au 25.07.2014. Vu les informations recueillies auprès du Ministère public, l’office AI a d’abord suspendu le versement de la rente à compter du 30.04.2015 par voie de mesures pré-provisionnelles, puis provisionnelles. Il a ensuite requis un nouvel avis des médecins traitants qui ont pour l’essentiel confirmé leurs précédentes conclusions. Il a également mandaté la Clinique romande de réadaptation (CRR) pour qu’elle réalise une expertise pluridisciplinaire (rhumatologie/médecine interne, neurologie, psychiatrie). Les experts ont diagnostiqué un trouble factice, en plus de la surdité bilatérale et du status post-opératoire de l’épaule, et un possible blépharospasme n’influençant pas la capacité de travail dans une activité adaptée.

Se référant à l’expertise, l’office AI a considéré que l’assuré avait simulé les maladies qui lui avaient permis d’obtenir des prestations, ce qui constituait selon elle un fait nouveau, qui justifiait de revenir sur l’octroi de la prestation ; elle a supprimé la rente entière avec effet rétroactif au 01.02.2007.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 192/16 – 204/2018 – consultable ici)

La juridiction cantonale a considéré que les renseignements médicaux recueillis à l’époque de la décision d’octroi de 2007 et de la communication du 20.12.2013 ne permettaient pas d’exclure que les troubles constatés initialement aient cédé le pas à un contexte de simulation. Dès lors, le trouble factice retenu par les médecins de la CRR ne constituait pas un fait nouveau légitimant une révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA. La cour cantonale a aussi relevé que le trouble factice ne justifiait pas plus une reconsidération au sens de l’art. 53 al. 2 LPGA. Elle a encore apprécié le rapport d’expertise et l’a confronté aux autres rapports médicaux récoltés. Elle en a déduit une amélioration notable de l’état de santé de l’assuré au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA et a fixé la survenance de cette amélioration au mois de février 2012 au regard du développement des activités délictueuses.

Par jugement du 12.07.2018, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, réformant la décision en ce sens que la rente entière d’invalidité était supprimée à partir du 01.02.2012.

 

TF

La révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA implique la découverte postérieure à la décision principale de faits nouveaux importants ou de nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Comme l’a déjà indiqué le Tribunal fédéral, les maladies ne peuvent être différenciées clairement les unes des autres en fonction de leurs symptômes de sorte qu’il ne serait pas judicieux de voir dans chaque modification ou correction a posteriori d’un diagnostic un motif justifiant une révision procédurale au sens de la disposition légale citée (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.3.4). Dans ce contexte, les nouveaux résultats d’examen peuvent toutefois constituer un fait nouveau et entrer en considération comme motif de révision s’ils démontrent que, dans la procédure initiale, le médecin examinateur et l’autorité compétente auraient dû exercer leur pouvoir d’appréciation d’une façon nécessairement différente et parvenir à un autre résultat (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.1 et 3.3.4; à titre d’exemple de résultats d’examen justifiant une révision procédurale, arrêt 8C_120/2017 du 20 avril 2017 consid. 2).

Or de tels éléments font défaut en l’espèce. Les médecins de la CRR ont certes relevé qu’aucune des hypothèses diagnostiques qui avaient été émises depuis dix ans et justifié l’allocation des prestations n’avait pas résisté au temps ni à l’analyse critique. Ils en ont inféré l’existence d’un trouble factice englobant les plaintes dépressives, les symptômes de l’état de stress post-traumatique, les manifestations théâtrales et histrioniques ainsi que la symptomatologie exprimée sur le versant somatique, au lieu des différents troubles retenus sur les plans psychiatrique ainsi que neurologique. Il s’agit d’une déduction reposant sur une analyse a posteriori de l’absence d’évolution de la situation médicale au regard des diagnostics posés originellement et de l’échec des traitements entrepris. A cet égard, les experts n’ont pas conclu – ou du moins pas expressément – à la présence du trouble factice dans la procédure initiale déjà. On ne retrouve nulle part dans leur rapport des conclusions indiquant clairement que l’assuré n’avait jamais présenté d’atteintes à la santé. Si leur analyse sur le plan neurologique de la composante organique, qui devait être niée ou du moins minimisée selon eux, ou de la production de certains symptômes, qu’ils qualifiaient d’artefactuelle, laisse supposer que des troubles de ce registre n’ont jamais existé, tel n’est manifestement pas le cas de leur analyse des affections psychiatriques. Les médecins de la CRR font effectivement état de leurs observations au moment de la réalisation de l’expertise, qui leur permet de nier l’existence actuelle de troubles de ce registre. Mais ils ne se prononcent aucunement sur l’évolution ou la crédibilité des pathologies diagnostiquées à l’époque (singulièrement, sur l’évolution de la gravité des épisodes dépressifs ou de la crédibilité des symptômes de l’état de stress post-traumatique tels qu’ils avaient été rapportés par les médecins traitants de l’époque).

Compte tenu des conclusions médicales, l’administration ne peut pas être suivie lorsqu’elle fait remonter les effets – ou l’absence d’effet – du trouble factice sur la capacité de travail au moment de la décision initiale déjà. Son point de vue ne trouve pas appui sur une constatation fondée sur des éléments concrets établissant que ladite décision comporterait des défauts objectifs comme l’exige la jurisprudence citée par le tribunal cantonal pour admettre l’application de l’art. 53 al. 1 LPGA (cf. ATF 127 V 353 consid. 5b p. 358).

 

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_586/2018 consultable ici

 

 

Assurances sociales : le National veut lui aussi serrer la vis contre les abus

Assurances sociales : le National veut lui aussi serrer la vis contre les abus

 

Communiqué de presse du Parlement du 14.03.2019 consultable ici

 

Les assurances sociales devraient pouvoir bloquer la rente d’un rentier ayant émigré pour échapper à la prison, et certains recours deviendront payants. Au grand dam de la gauche, le National a accepté jeudi par 132 voix contre 52 un projet ciblant les abus.

Le dossier retourne au Conseil des Etats lundi pour quelques divergences, mais les deux Chambres sont d’accord sur l’essentiel. En novembre, le peuple a soutenu à 64,7% un projet permettant aux assureurs de recourir à des détectives privés pour traquer les abus. Le projet en suspens doit compléter l’arsenal.

Les prestations pourront être suspendues à titre provisionnel s’il y a des motifs sérieux de soupçonner que l’assuré perçoit une prestation indue ou s’il a manqué à son obligation de renseigner. Les assurances le font déjà, mais les tribunaux ne s’accordaient pas sur le sujet, faute de base légale claire.

 

Paiement suspendu

Les prestations en espèces pourront aussi être bloquées si l’assuré retarde indûment l’exécution de la mesure ou de la peine à laquelle il a été condamné. Le paiement de la rente pourra être suspendu même si l’assuré échappe à la prison en quittant la Suisse. Plus question que le Tribunal fédéral condamne la Suisse parce que l’assuré n’était pas encore en train de purger sa peine.

Le National a même durci le projet en inscrivant une suspension automatique de paiement des prestations pour pertes de gain. Il a suivi par 92 voix contre 83 l’avis de l’UDC, du PDC et du PBD. « Il faut garder une marge d’appréciation », a critiqué en vain le ministre des assurances sociales Alain Berset. Les assurances n’ont déjà pas les mains libres sur le sujet, aucun assureur ne sert de prestations s’il n’est pas tenu de le faire.

Les prestations indûment touchées continueront à devoir être restituées. Mais l’assurance aura généralement trois ans au lieu d’un pour le demander à partir du moment où elle découvre le pot aux roses. Le délai actuel s’est avéré souvent trop court en cas d’investigations poussées. La gauche a tenté en vain de torpiller cette extension.

 

Frais des détectives

L’assureur pourra par ailleurs mettre à la charge de l’assuré les frais supplémentaires occasionnés par une surveillance si l’assuré a obtenu une prestation en fournissant sciemment des indications fausses ou d’une autre manière illicite.

Contrairement au Conseil des Etats, le National a refusé de préciser que les frais devaient être appropriés. Le principe de proportionnalité est déjà garanti par la Constitution, a jugé la majorité de droite.

La précision est importante, les frais peuvent aller jusqu’à 15’000 francs et la facture est difficile à contrôler, a objecté Bea Heim (PS/SO). La gauche a aussi tenté sans succès de biffer la répercussion des frais, l’UDC a échoué à introduire un automatisme.

 

Fin de la gratuité

Hormis la prévoyance professionnelle non concernée par la réforme, toutes les assurances sociales pourront nouvellement imposer des frais de justice si les lois les concernant le prévoient. Sinon, le tribunal pourra faire passer à la caisse la partie qui agit de manière téméraire ou fait preuve de légèreté.

Le dispositif doit alléger la charge des tribunaux cantonaux en réduisant les incitations à recourir contre les jugements et la durée des procédures. La gauche s’est opposée au principe, soulignant que cette pratique déjà en vigueur pour l’AI n’avait pas permis de réduire le nombre de dossiers soumis aux tribunaux cantonaux. Leur charge administrative a même augmenté, a défendu Silvia Schenker (PS/BS).

 

Référendum possible

Le National refuse par ailleurs de soustraire systématiquement au référendum facultatif les traités en matière de sécurité sociale, comme le demande le Conseil fédéral. Les sénateurs s’y étaient déjà opposés.

Il ne faudrait pas donner l’impression que le Parlement veut porter atteinte aux droits populaires relatifs à l’approbation des traités internationaux, a justifié Christian Lohr (PDC/TG) au nom de la commission. Seuls les traités standard pourraient être approuvés par le Parlement sans possibilité de référendum, a objecté la gauche.

Cela codifiera tout simplement la pratique actuelle. Cette solution a fait ses preuves, la seule différence entre ces textes est l’Etat partenaire, a soutenu Alain Berset. En vain.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 14.03.2019 consultable ici

 

 

9C_553/2018 (f) du 22.01.2019 – Notions d’invalidité – 8 LPGA – 4 LAI / Troubles post-TCC sans preuve d’un déficit organique / Evaluation de l’incapacité de travail relative aux troubles somatoformes douloureux et les affections psychosomatiques assimilées, étendus à l’ensemble des affections psychiques

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_553/2018 (f) du 22.01.2019

 

Consultable ici

 

Notions d’invalidité / 8 LPGA – 4 LAI

Troubles post-TCC sans preuve d’un déficit organique

Evaluation de l’incapacité de travail relative aux troubles somatoformes douloureux et les affections psychosomatiques assimilées (ATF 141 V 281), étendus à l’ensemble des affections psychiques (ATF 143 V 418)

 

Assurée, médecin spécialiste en dermatologie et vénéréologie et en médecine interne, a travaillé dans le service de médecine interne d’un l’hôpital depuis 2008 en qualité de cheffe de clinique à 80%, puis à 100% dès novembre 2010. Le 22.03.2011, elle a été heurtée par une voiture dans un rond-point alors qu’elle circulait à bicyclette. L’accident a entraîné une contusion du genou gauche et du genou droit, une contusion thoracique gauche, ainsi qu’un traumatisme crânio-cérébral (TCC). L’assurée s’est ensuite installée comme dermatologue indépendante à temps partiel.

Expertise médicale conjointe (entre l’assureur-accidents et l’office AI) confiée à un spécialiste en neurologie, avec volets psychiatrique et neuropsychologique. Le spécialiste en psychiatrie et psychothérapie n’a retenu aucun diagnostic psychiatrique avec ou sans effet sur la capacité de travail, celle-ci étant entière. De son côté, en se fondant notamment sur l’examen neuropsychologique, le spécialiste en neurologie a conclu que la capacité de travail de l’assurée dans son activité habituelle de dermatologue était de 50% depuis 2011 en raison de troubles de la lignée attentionnelle et de la gestion de tâches multiples, très nettement modulés par le stress et la fatigue. Le neurologue avait aussi constaté que l’évolution neurologique était normale, n’avait fait état d’aucune lésion organique, respectivement d’aucune atteinte reposant sur un substrat organique démontrable. L’office AI a encore réalisé une enquête économique pour les indépendants.

L’office AI a nié le droit de l’assurée à des prestations de l’assurance-invalidité, motif pris de l’absence d’atteinte à la santé objectivement insurmontable et propre à se répercuter sur la capacité de gain.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 281/17 – 165/2018 – consultable ici)

La juridiction cantonale a constaté que l’assurée présente un status après TCC avec commotion cérébrale (survenu le 22.03.2011), sans lésion organique objectivable (aucune anomalie au cerveau, ni de lésion neurologique), et ne souffre d’aucune atteinte psychique.

Dans le cadre de l’examen du degré de gravité fonctionnel de l’atteinte à la santé, les juges cantonaux ont constaté que l’assurée ne bénéficiait pas d’un suivi psychothérapeutique et ne prenait pas de médication. Par ailleurs, elle disposait de très bonnes ressources et avait pu développer une activité indépendante au taux de 40-50%, ce qui lui avait permis de réaliser un chiffre d’affaires de 130’000 fr. en 2013, de 236’000 fr. en 2014, puis de plus de 300’000 fr. en 2015. Parallèlement à son activité indépendante, elle conservait un emploi à 10% auprès de l’hôpital comme médecin agréé. Elle était aussi directrice de la campagne G.__ en 2016, et figurait sur le site de la Société suisse de dermatologie et vénéréologie comme membre. Dès lors que l’assurée était intégrée professionnellement et socialement et qu’il n’existait pas d’éléments plaidant en faveur d’une limitation d’activité, que ce soit dans la vie professionnelle, sociale ou familiale, la demande de prestations avait été rejetée à juste titre.

Par jugement du 07.06.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Sous l’angle du droit des assurances sociales, la jurisprudence admet qu’une atteinte subie lors d’un accident au niveau de la colonne cervicale ou de la tête puisse entraîner des troubles durables limitant la capacité de travail et de gain, même sans preuve d’un déficit fonctionnel organique (soit objectivable). De telles atteintes sont caractérisées par un tableau clinique complexe et multiple (ATF 119 V 335 consid. 1 p. 338; 117 V 359 consid. 4b p. 360), avec des plaintes de nature physique et psychique étroitement imbriquées qui ne peuvent guère être différenciées (ATF 134 V 109 consid. 7.1 p. 118). Ces principes développés dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire – et en particulier en relation avec la causalité adéquate entre l’accident et l’atteinte à la santé (cf. ATF 134 V 109; 117 V 363) – sont également déterminants pour l’assurance-invalidité. Dans ce domaine également une atteinte particulière de la colonne cervicale – ou de la tête – sans preuve d’un déficit fonctionnel organique objectivable, avec le tableau clinique complexe et multiple, typique pour ce genre de troubles, peut influencer la capacité de travail et de gain (arrêt 8C_437/2008 du 30 juillet 2009 consid. 6.3). Dans de tels cas, on ne saurait déduire directement une capacité de travail illimitée du défaut d’éléments médicaux objectivables (ATF 136 V 279 consid. 3.1 p. 280 s.). Le fait de savoir si l’atteinte en cause, qui se caractérise par l’absence de déficit fonctionnel organique objectivable, entraîne une incapacité de travail et est invalidante, se juge à l’aune de la jurisprudence relative aux troubles somatoformes douloureux et affections psychosomatiques assimilées (ATF 136 V 279 consid. 3.2.3 p. 283, qui renvoie à l’ATF 130 V 352 [aujourd’hui cf. ATF 141 V 281] et a été confirmé par l’ATF 139 V 547 consid. 7.1.2 p. 560).

Le fait que les tests neuropsychologiques effectués ont mis en évidence des troubles de cet ordre ne permet pas de retenir qu’elle souffre d’un déficit fonctionnel organique objectivable. Les différents médecins consultés n’ont pas diagnostiqué de lésion organique. La seule constatation de troubles neuropsychologiques apparus à la suite d’un TCC (« post TCC ») ne suffit pas pour établir la présence d’une atteinte organique (cf. arrêt 8C_427/2013 du 19 mars 2014 consid. 5.2). De même, la constatation médicale selon laquelle le neurologue-expert a indiqué ne pas trouver une autre cause susceptible d’expliquer la symptomatologie que l’accident du 22.03.2011 ne permet pas d’établir un substrat organique aux troubles en cause.

Les troubles sans preuve d’un déficit organique – dont font partie, sous l’angle du droit de l’assurance-invalidité, une atteinte de la colonne cervicale (traumatisme de type « coup du lapin ») ou une atteinte de la tête après un traumatisme crânio-cérébral sans déficit organique – sont attribués, en relation avec leurs effets invalidants, aux atteintes psychosomatiques sans étiologie claire pour des raisons qui tiennent à l’égalité de traitement, respectivement qu’ils sont évalués selon les règles valables par analogie pour celles-ci (cf. arrêt 8C_170/2018 du 12 septembre 2018 consid. 4.2.7).

En ce qui concerne ensuite l’appréciation de la capacité de travail de l’assurée effectuée par la juridiction cantonale à l’aune des indicateurs prévus par la jurisprudence (ATF 141 V 281 consid. 4.1.3 p. 297), l’assurée ne la critique pas concrètement. Elle se contente de soutenir que si les premiers juges ne trouvaient pas convaincantes les expertises diligentées par l’intimé, il leur appartenait « à tout le moins d’ordonner une nouvelle expertise, répondant aux nouveaux critères ou indicateurs définis en la matière, même si ceux-ci ne sont guère adaptés aux TCC ». Avec cette argumentation, elle perd cependant de vue que

La juridiction cantonale s’est fondée sur les éléments ressortant des expertises respectives des spécialistes en neurologie et psychiatrie pour suivre le schéma d’évaluation applicable en l’espèce. Dès lors qu’elle en a tiré des indications suffisantes pour se prononcer, les juges cantonaux n’avaient aucun motif d’ordonner une nouvelle expertise. Le tribunal cantonal a mis en évidence les éléments prépondérants (avant tout l’insertion tant professionnelle [activité indépendante en développement, activité accessoire et autres activités liées à la profession de dermatologue] que sociale et familiale, à laquelle on peut ajouter l’absence de tout indice d’une limitation uniforme du niveau d’activités dans tous les domaines comparables de la vie) qui conduisent à nier, du point de vue juridique, tout effet limitatif des troubles en cause sur la capacité de travail, malgré l’avis concordant du neurologue-expert et de la cheffe du Service de neuropsychologie et de neuroréhabilitation, sur une incapacité de travail de 50% dans l’activité exercée.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_553/2018 consultable ici

 

 

9C_597/2018 (f) du 18.01.2019 – Notion d’invalidité – Marché équilibré du travail – 16 LPGA / Capacité de travail exigible reconnue pour un assuré âgé d’environ 60 ans malgré de nombreuses limitations fonctionnelles mais ne visant que les mouvements répétés ou physiquement lourds

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_597/2018 (f) du 18.01.2019

 

Consultable ici

 

Notion d’invalidité – Marché équilibré du travail / 16 LPGA

Capacité de travail exigible reconnue pour un assuré âgé d’environ 60 ans malgré de nombreuses limitations fonctionnelles mais ne visant que les mouvements répétés ou physiquement lourds

 

 

Assuré, né en 1956, a exercé les métiers de chauffeur poids lourds, livreur ou machiniste. Le 18.10.2012, il a requis des prestations de l’office AI en raison des problèmes totalement incapacitants qui affectaient son membre supérieur droit.

Entre autres mesures d’instruction, l’administration a recueilli l’avis des médecins traitants. Le SMR en a déduit l’existence d’une radiculopathie C5/6 droite, déficitaire sur le plan moteur, évoluant dans le cadre de troubles dégénératifs du rachis depuis juillet 2012 et prohibant la pratique de toute activité nécessitant l’usage du bras dominant, dont celle de chauffeur. En raison cependant de doutes et d’incohérences quant à l’étiologie et l’évolution de la maladie retenue par les médecins traitants, le SMR a préconisé la mise en place d’une surveillance de l’intéressé. Les résultats obtenus l’ont amené à exclure l’existence de tout diagnostic incapacitant.

Après procédure contentieuse, l’office AI a confié la réalisation d’une expertise pluridisciplinaire. Les experts ont conclu que les divers troubles interdisent l’exercice de l’activité habituelle de chauffeur depuis juillet 2012 mais autorisant la pratique à plein temps de toute activité adaptée depuis le début 2013. Le SMR ayant entériné les conclusions des experts, l’administration a rejeté une nouvelle fois la demande.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 28.06.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assuré reproche, entre autres, au tribunal cantonal d’avoir violé le droit fédéral en niant que, âgé de soixante ans et un mois révolus (au lieu de soixante ans et deux mois à cinq jours près), il avait atteint l’âge à partir duquel la jurisprudence considère généralement qu’il n’existe plus de possibilité réaliste de mise en valeur de la capacité résiduelle de travail sur le marché équilibré du travail.

L’invalidité est une notion économique (ATF 110 V 273 consid. 4a p. 275 s.) qui s’analyse en fonction du marché équilibré du travail qui est une notion théorique et abstraite impliquant notamment un équilibré entre l’offre et la demande de main d’œuvre ainsi qu’un marché du travail structuré de telle sorte qu’il offre un éventail d’emplois diversifiés tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu’au niveau des sollicitations physiques (cf. notamment arrêt 9C_326/2018 du 5 octobre 2018 consid. 6.2 et les références).

Il n’est pas irréaliste d’admettre qu’un tel marché équilibré, et non concret, offre à un assuré âgé d’environ soixante ans disposant d’une pleine capacité de travail de réelles possibilités d’embauche dans une activité adaptée ne nécessitant pas l’utilisation répétitive du bras droit en élévation et en force, les mouvements itératifs contraignants pour le rachis dorso-lombaire en flexion/extension/ inclinaison/rotation, de travail avec des engins émettant des vibrations, le port répété de charges supérieures à quinze kilo, un engagement physique lourd, de positions agenouillées et permettant l’alternance des positions. D’autant plus que, si les limitations fonctionnelles mentionnées par les médecins du CEMed peuvent sembler nombreuses, il convient de les relativiser dans la mesure où elles ne visent que les mouvements répétés ou physiquement lourds.

 

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_597/2018 consultable ici

 

 

Le National réforme l’AI en coupant dans les rentes pour enfants – Rentes linéaires

Le National réforme l’AI en coupant dans les rentes pour enfants – Rentes linéaires

 

Communiqué de presse du Parlement du 07.03.2019 consultable ici

 

Les familles avec enfants doivent s’attendre à une baisse de leurs prestations avec la réforme de l’assurance invalidité (AI). Le National a profité jeudi d’un projet destiné à optimiser la réinsertion professionnelle jeudi pour réduire les rentes pour enfants.

Il a adopté ensuite le projet sans opposition. Toute la gauche s’est abstenue. La balle passe dans le camp du Conseil des Etats.

L’AI ne devant plus avoir de dettes d’ici à 2031 selon les dernières prévisions, le gouvernement n’avait pas inclus de grandes mesures d’économie dans sa copie, ce dont la gauche s’était réjouie mercredi. Le National a toutefois renversé la vapeur.

Il a repêché par 106 voix contre 66 la coupe des rentes pour enfants qui figurait dans une précédente réforme enterrée par le Parlement en 2013. Rebaptisée au passage « allocation parentale », l’allocation devrait s’élever à 30% au lieu de 40% de la rente du parent après un délai de transition de trois ans.

L’UDC, le PLR et une partie du centre droit ont ainsi voulu éviter que les familles concernées soient mieux loties que celles qui ne sont pas à l’AI. Ces économies sont nécessaires car l’AI est toujours endettée et les prévisions d’assainissement du Conseil fédéral sont trop optimistes, a fait valoir ce camp.

C’est un coup trop dur asséné aux parents handicapés qui ne fera que gonfler les charges des prestations complémentaires, s’est insurgée la gauche. Le Conseil fédéral y était aussi opposé. La réduction des rentes pour enfant permettra à l’AI d’économiser 112 millions de francs et à l’AVS 72 millions par an, a précisé le ministre Alain Berset.

 

Rentes linéaires

La réforme apporte un autre grand changement. Les rentes ne seront pas attribuées selon quatre échelons. Une personne invalide à 40% recevra moins d’argent qu’un invalide à 45% alors que les deux cas donnent droit à un quart de rente actuellement. Le montant maximum restera atteint avec une invalidité de 70%. Le but est d’inciter les bénéficiaires d’une rente AI à rester le plus possible dans la vie active.

Le nouveau modèle dit linéaire ne l’est pas du tout, ont fustigé la gauche et la grande majorité du PDC en réclamant le statu quo. Il créera des gagnants et des perdants, a expliqué Benjamin Roduit (PDC/VS) et n’évitera pas les effets de seuil. Une personne invalide à 69% touchera 69% d’une rente alors qu’une avec un taux d’invalidité de 70% aura droit à une rente entière.

 

Pas au-delà de 60 ans

Les actuels rentiers de plus de 60 ans ne subiront pas d’adaptation de leur rente. La gauche a tenté en vain d’abaisser la limite à 50 ans. Elle n’a pas non plus réussi à limiter l’application du nouveau système aux nouvelles rentes. Les deux propositions ont échoué à deux contre un.

La rente des personnes âgées entre 30 et 59 ans ne sera adaptée que si leur taux d’invalidité change. Les rentes des bénéficiaires de moins de 30 ans seront transposées dans le système linéaire dans les dix ans qui suivent l’entrée en vigueur de la réforme. Selon le Conseil fédéral, le modèle ne devrait ni augmenter, ni diminuer les coûts pour l’AI.

 

Non aux quotas

Les grandes entreprises ne sont par ailleurs pas obligées d’employer au moins 1% de travailleurs concernés par l’AI. La gauche, qui estimait les efforts volontaires des employeurs insuffisants, a été défaite sur cette demande par 132 voix contre 55. Cela coûtera cher et risque d’être contreproductif, a argumenté le camp bourgeois.

Mercredi, le National avait sinon largement soutenu les mesures proposées par le gouvernement pour faciliter la réinsertion professionnelle des jeunes et des personnes atteintes dans leur santé psychique, cœur de la réforme d’optimisation. Pour favoriser la détection précoce, les mineurs dès 13 ans et les personnes menacées d’incapacité de travail pourront être signalées à l’AI.

Les mesures de réinsertion tout comme les conseils et suivis seront étendus dans le temps. Pour les jeunes en formation, les indemnités journalières seront réduites au niveau du salaire des apprentis, mais versées plus vite.

L’AI devra également rembourser les frais médicaux de certaines maladies congénitales rares. Les experts auront une obligation d’indépendance et les expertises seront mieux surveillées. Le National a soutenu jeudi une meilleure coordination entre les acteurs concernés.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 07.03.2019 consultable ici

 

 

La réforme de l’AI doit optimiser la réinsertion professionnelle

La réforme de l’AI doit optimiser la réinsertion professionnelle

 

Communiqué de presse du Parlement du 06.03.2019 consultable ici

 

L’AI doit améliorer les chances sur le marché du travail des jeunes et des personnes souffrant de maladie psychique. Le National s’est lancé mercredi 06.03.2019 dans une réforme d’optimisation à laquelle il risque d’ajouter des mesures d’économies jeudi 07.03.2019.

Le projet s’inscrit dans une lignée d’autres visant à faciliter la réinsertion professionnelle des rentiers et ainsi réduire les coûts de l’assurance. L’AI ne devant plus avoir de dettes d’ici à 2031 selon les dernières prévisions, le gouvernement n’a pas inclus de grandes mesures d’économie dans sa copie, ce dont la gauche s’est réjouie.

La droite n’a pas renversé la vapeur mercredi, mais la Chambre du peuple n’a pas eu le temps de traiter plusieurs mesures d’austérités proposées par sa commission préparatoire. Elle examinera jeudi matin une réduction des rentes pour enfants et l’introduction d’un système de rentes linéaires à la place des quatre échelons de rente actuels.

En attendant, le National a soutenu des mesures visant à faciliter la réinsertion professionnelle des jeunes et des personnes atteints dans leur santé psychique. Pour favoriser la détection précoce, les mineurs pourront faire l’objet d’une communication auprès de l’AI dès 13 ans. Le signalement est aussi prévu pour les personnes menacées d’être en incapacité de travail.

Les jeunes en orientation ou formation professionnelle pourront de leur côté bénéficier de mesures médicales visant directement l’insertion dans la vie active jusqu’à l’âge de 25 ans. Le couperet tombe jusqu’ici à 20 ans. Les mesures de réinsertion professionnelle tout comme les conseils et suivis seront étendus dans le temps.

L’AI va réorienter les formations financées et baisser les indemnités journalières versées de manière à inciter les jeunes à trouver un travail. Les rentes seront réduites au salaire des apprentis, mais elles seront versées plus vite. Cela doit assurer une certaine égalité de traitement avec les jeunes apprentis pas à l’AI, a expliqué Philippe Nantermod (PLR/VS).

 

Maladies rares

L’AI devra également rembourser les frais médicaux de certaines maladies congénitales rares, même si l’efficacité des mesures médicales ne peut pas encore être démontrée scientifiquement. Le traitement d’autres maladies moins graves sera en revanche désormais pris en charge par l’assurance maladie.

La Chambre du peuple a refusé d’autoriser le Conseil fédéral à introduire une liste de mesures médicales non prises en charge. Dans le viseur du gouvernement, les frais d’ergothérapie et la physiothérapie. Mais cela pourrait aller plus loin, pas question de lui laisser les mains libres, a expliqué Maya Graf (Verts/BL).

Les coûts des mesures médicales de l’AI ont augmenté de plus de 90% depuis 2001, a rappelé le ministre des assurances sociales Alain Berset. Un meilleur encadrement des mesures médicales a été demandé par le Contrôle fédéral des finances, a-t-il ajouté. En vain.

 

Frais de voyage inchangés

Le National a par ailleurs refusé par 122 voix contre 53 de tailler dans le remboursement des frais de déplacements. Une minorité PLR/UDC voulait là aussi repêcher une mesure d’économie coulée par le Parlement avec une précédente réforme de l’assurance.

L’AI n’est de loin pas tirée d’affaire financièrement, a justifié Regine Sauter (PLR/ZH). Cela toucherait les familles ayant des enfants handicapés qui supportent déjà de lourdes charges, ont fustigé les partis de centre droit et la gauche. De plus, seuls 6 millions de francs pourraient être économisés. Il ne vaut pas la peine de détériorer la situation des familles.

 

Experts indépendants

La Chambre du peuple a encore inscrit dans la loi une obligation d’indépendance pour les experts. Le Conseil fédéral devra édicter des critères pour l’autorisation d’expertises médicales et instituer une commission réunissant tous les milieux concernés afin de surveiller de manière générale les expertises.

C’est de la surréglementation, a critiqué Thomas Weibel (PVL/ZH) au nom d’une minorité. La pratique actuelle a fait ses preuves et doit être maintenue, a-t-il ajouté. Le soutien du PBD, de l’UDC et d’une partie du PLR n’a pas suffi.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 06.03.2019 consultable ici