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9C_303/2022 (f) du 31.05.2023 – Rente d’invalidité AI limitée dans le temps pour un assuré âgé de plus de 55 ans – 16 LPGA – 17 LPGA / Examen du besoin de mesures d’ordre professionnel

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_303/2022 (f) du 31.05.2023

 

Consultable ici

 

Rente d’invalidité AI limitée dans le temps pour un assuré âgé de plus de 55 ans / 16 LPGA – 17 LPGA

Examen du besoin de mesures d’ordre professionnel

 

Assuré, né en 1965, a travaillé en dernier lieu comme vendeur dans un grand centre commercial (du 01.07.2008 au 31.08.2019). En arrêt de travail depuis le 18.06.2018, il s’est soumis à une intervention chirurgicale en août 2018 (arthrodèse L4-L5) et en mars 2019 (reprise d’arthrodèse avec ablation et remplacement d’une vis du pédicule L5 droit). Le 19.10.2018, il a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité.

L’office AI a pris en charge les frais d’une mesure d’orientation professionnelle (évaluation des compétences et du potentiel). L’office AI a ensuite versé à son dossier l’expertise médicale réalisée à la demande de l’assureur perte de gain en cas de maladie. Dans un rapport rendu le 30.09.2019, le spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur a conclu que l’assuré ne pouvait plus exercer son activité habituelle, mais disposait d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Par décision du 20.07.2021, l’office AI a octroyé à l’assuré une rente entière de l’assurance-invalidité du 01.06.2019 au 30.11.2019.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 333/21 – 148/2022 – consultable ici)

Par jugement du 10.05.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 2.2
Le bien-fondé d’une décision d’octroi, à titre rétroactif, d’une rente limitée dans le temps doit être examiné à la lumière des conditions de révision du droit à la rente (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1; 125 V 413 consid. 2d et les références). Aux termes de l’art. 17 al. 1 LPGA, dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.

 

Consid. 4.2
A l’inverse de ce que prétend tout d’abord l’assuré, les conclusions du médecin-expert, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur mandaté par l’assurance perte de gain maladie, sont tout à fait compréhensibles, l’expert ayant dûment motivé les diagnostics retenus et leur répercussion sur la capacité de travail. Quant aux algies des membres inférieurs, la juridiction cantonale a constaté sans arbitraire que ces douleurs ne pouvaient pas être expliquées sur un plan objectif, l’expert indiquant qu’il n’y avait aucun signe clinique en faveur d’une souffrance radiculaire aiguë ou d’une compression radiculaire. De plus, si l’expert a certes mentionné que ces douleurs pouvaient être « le reflet d’une certaine surcharge psychogène », la juridiction cantonale a considéré à juste titre que cette seule hypothèse ne suffisait pas à rendre nécessaire une expertise psychiatrique. Les médecins traitants ne suggéraient en effet aucune atteinte à la santé psychique à caractère invalidant dans leurs différents avis et l’assuré n’avait de son côté débuté aucun suivi psychiatrique.

Par ailleurs, la juridiction cantonale n’a pas négligé l’avis des médecins traitants, mais a expliqué les raisons pour lesquelles les constatations des médecins traitants ne commandaient pas de s’écarter de l’évaluation de l’expert. A cet égard, mise à part la référence à la divergence d’opinions entre ses médecins traitants, d’une part, et le médecin-expert, d’autre part, l’assuré ne fait état d’aucun élément concret susceptible de remettre en cause les conclusions médicales suivies par les juges cantonaux, ni de motifs susceptibles d’établir le caractère arbitraire de leur appréciation. De plus, en se limitant à citer des extraits des rapports des médecins traitants, qui mettraient selon lui en évidence une aggravation de son état de santé, l’assuré ne s’en prend pas de manière suffisante à l’appréciation des juges cantonaux sur l’absence de péjoration. En l’absence d’éléments objectifs en faveur d’une telle péjoration, la juridiction cantonale n’avait pas à ordonner une nouvelle expertise orthopédique. Enfin, en ce qui concerne les limitations fonctionnelles, la juridiction cantonale a, quoi qu’en dise l’assuré, tenu compte de l’ensemble des restrictions mises en évidence sur un plan objectif par l’expert et confirmées par le médecin auprès du Service médical régional ; tant l’absence de marche que la position fixe prolongées dont se prévaut l’assuré font partie des limitations retenues.

 

Consid. 5.1
L’assuré reproche ensuite à la juridiction cantonale de ne pas s’être assurée qu’il pouvait se réadapter par lui-même, compte tenu de son âge (plus de 55 ans), avant l’examen de son droit à une rente d’invalidité. Il en déduit qu’il aurait droit à un abattement de 20% sur le revenu avec invalidité.

Consid. 5.2
Selon la jurisprudence, il existe des situations dans lesquelles il convient d’admettre que des mesures d’ordre professionnel sont nécessaires, malgré l’existence d’une capacité de travail médico-théorique. Il s’agit des cas dans lesquels la réduction ou la suppression, par révision (art. 17 al. 1 LPGA) ou reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), du droit à la rente concerne une personne assurée qui est âgée de 55 ans révolus ou qui a bénéficié d’une rente pendant quinze ans au moins. Cette jurisprudence qui est également applicable lorsque l’on statue sur la limitation et/ou l’échelonnement en même temps que sur l’octroi de la rente (ATF 145 V 209 consid. 5), ne signifie pas que la personne assurée peut se prévaloir d’un droit acquis; il est seulement admis qu’une réadaptation par soi-même ne peut, sauf exception, être exigée d’elle en raison de son âge ou de la durée du versement de la rente. Dans de telles situations, les organes de l’assurance-invalidité doivent vérifier dans quelle mesure l’assuré a besoin de la mise en oeuvre de mesures d’ordre professionnel, même si ce dernier a recouvré une capacité de travail et indépendamment du taux d’invalidité qui subsiste (cf. arrêts 9C_211/2021 du 5 novembre 2021 consid. 3.1; 9C_276/2020 du 18 décembre 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

Dans un arrêt postérieur à la décision entreprise, le Tribunal fédéral a précisé qu’en cas d’allocation à titre rétroactif d’une rente limitée dans le temps – tout comme lors de la révision selon l’art. 17 LPGA du droit à une rente existante (cf. ATF 141 V 5) -, les organes de l’assurance-invalidité doivent se fonder sur le moment du prononcé de la décision de l’office AI pour déterminer si l’âge de référence de 55 ans est atteint (ATF 148 V 321 consid. 7.3).

Consid. 5.3
Dans la mesure où l’assuré, né en 1965, avait plus de 55 ans au moment où l’office AI s’est prononcé le 20 juillet 2021, il avait droit à ce que le besoin de mesures de réadaptation soit examiné.

A cet égard, selon les faits constatés par la juridiction cantonale, l’office AI a mis en place une mesure d’orientation avec évaluation des compétences et du potentiel (du 05.02.2019 au 07.03.2019). Il en ressortait que l’assuré disposait de ressources pour sa réadaptation professionnelle, laquelle ne nécessitait pas d’exigences particulières au vu des cibles professionnelles adaptées à ses limitations fonctionnelles. De plus, par communication du 19.10.2020, l’office AI avait pris en charge le coût d’une mesure d’aide au placement, afin de tenir compte du besoin de l’assuré d’être accompagné dans sa reconversion professionnelle. Dès lors que l’assuré ne conteste pas les faits établis et les déductions de la juridiction cantonale, il n’y a pas lieu de revenir sur l’appréciation selon laquelle l’assuré était en mesure de se réadapter par soi-même compte tenu de son âge. En tant que celui-ci entend en déduire un abattement sur son revenu avec invalidité, il se prévaut d’une circonstance étrangère aux conditions prévues par la jurisprudence sur ce point (cf. sur les motifs de l’abattement, ATF 148 V 174 consid. 6.3; 126 V 75 consid. 5b/bb). Mal fondé, le grief doit être rejeté.

 

Consid. 6.2
Le revenu avec invalidité doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de la personne assurée. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant notamment de l’ESS (ATF 139 V 592 consid. 2.3). Il convient alors de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1 de l’ESS, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b), étant précisé que, depuis l’ESS 2012, il y a lieu d’appliquer le tableau TA1_skill_ level (ATF 142 V 178).

Consid. 6.3
En l’espèce, l’assuré fait valoir que son revenu avec invalidité aurait dû être déterminé en se référant aux données de l’ESS relative à une activité dans l’industrie alimentaire. Ce faisant, il ne met en évidence aucun élément qui justifierait de s’écarter du salaire de référence auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des tâches physiques ou manuelles simples, tous secteurs confondus, de la table TA1_tirage_skill_level de l’ESS. Cette valeur statistique s’applique en effet à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle est trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers (arrêts 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_692/2015 du 23 février 2016 consid. 3.1 et la référence).

Par ailleurs, le marché équilibré du travail pris en considération dans le domaine de l’assurance-invalidité (à ce sujet, voir arrêt 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3 et les références) offre un éventail suffisamment large d’activités légères, dont on doit admettre qu’un nombre significatif d’entre elles sont accessibles à l’assuré sans aucune formation préalable particulière et compatibles avec les limitations fonctionnelles décrites par l’expert.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_303/2022 consultable ici

 

9C_308/2021 (f) du 07.03.2022 – But et notion des mesures de reclassement – 17 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_308/2021 (f) du 07.03.2022

 

Consultable ici

 

But et notion des mesures de reclassement – 17 LAI

Le droit à des mesures de reclassement ne confère pas aux assurés le libre choix d’une nouvelle profession / Pas de droit à une formation d’un niveau supérieur à celui de l’ancienne activité

 

Assuré, séparé et père de deux enfants nés en 2000 et 2005, est titulaire d’un CFC de menuisier, ainsi que d’un diplôme de maître menuisier, obtenus en 1988 pour le premier et en 1993 pour le second. Depuis 2005, il est habilité à exercer comme expert d’examen de fin d’apprentissage.

En incapacité de travail (due à des polyarthrites et un syndrome des tunnels carpiens) depuis le 21.10.2015, il a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 03.03.2016. Il y indiquait exercer la profession de menuisier indépendant à un taux de 93% et d’expert pour l’État de Vaud à raison de 7%.

Après que l’assuré eut bénéficié de diverses mesures d’ordre professionnel, l’office AI lui a refusé une rente d’invalidité, motif pris que l’incapacité de gain de 5,9% était inférieure au taux de 40% ouvrant le droit à cette prestation. Le calcul du taux d’invalidité se fondait sur un revenu sans invalidité de 60’876 fr. 25 et un revenu d’invalidité de 57’265 fr. 50.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 212/20-131/2021 – consultable ici)

Par jugement du 23.04.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

[le présent résumé n’aborde que la notion des mesures de reclassement (consid. 7)]

Consid. 7.1
S’agissant des mesures de reclassement au sens de l’art. 17 LAI, la cour cantonale a constaté que l’office AI avait pris en charge une formation d’enseignant pour l’enseignement à moins de 50% des branches professionnelles dans les écoles professionnelles, ainsi qu’une formation de dessin assisté par ordinateur. Grâce à ces formations, le revenu d’invalide de l’assuré – tel que provenant de son activité au service de l’État – rapporté à un plein temps était déjà supérieur à celui qu’il percevrait sans atteinte à la santé. Les mesures de reclassement avaient ainsi offert à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité et il n’appartenait pas aux organes de l’assurance-invalidité de lui offrir une formation d’un niveau supérieur.

Consid. 7.2
L’assuré conteste percevoir un revenu d’invalide qui, rapporté à un plein temps, est supérieur à ce qu’il percevrait sans atteinte à la santé. Il rappelle que, s’il exerce provisoirement un remplacement comme enseignant à environ 50%, il s’agit d’une situation temporaire. En outre, la formation entreprise auprès de l’IFFP (Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle) lui permettrait uniquement d’enseigner à un taux « inférieur de 30% ». C’est pourquoi il demande à pouvoir suivre une formation PIRACEF (formation romande des professionnels de l’enseignement des activités créatrices) d’une durée de trois à quatre ans, afin d’obtenir un DAS (Diploma of advanced studies); puis il devra encore effectuer un CESED (complément d’études en sciences de l’éducation) d’une durée de deux à trois ans. Grâce à ces formations comme enseignant, il pourrait réaliser un revenu d’invalide de 57’265 fr.

Consid. 7.3
Selon l’art. 17 al. 1 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Par reclassement, la jurisprudence entend l’ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle générale, l’assuré n’a droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas. En particulier, l’assuré ne peut prétendre une formation d’un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l’invalidité sont telles que seule une formation d’un niveau supérieur permet de mettre à profit d’une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé. Enfin, si les préférences de l’intéressé quant au choix du genre de reclassement doivent être prises en considération, elles ne sauraient toutefois jouer un rôle déterminant (ATF 139 V 399 consid. 5.4; 130 V 488 consid. 4.2 et les références).

Consid. 7.4
En l’espèce, comme l’ont constaté les juges cantonaux, l’assuré a déjà bénéficié de mesures de reclassement, notamment par la prise en charge d’une formation d’enseignant (à moins de 50%) auprès des écoles professionnelles. En tant que l’assuré soutient que cette formation ne lui permettrait que d’exercer à un taux de 30%, son argumentation est purement appellatoire et elle n’est pas étayée. En outre, le fait qu’elle ne lui permettrait pas non plus d’exercer dans les écoles obligatoires – sauf en l’absence de personnel qualifié – n’apparaît pas déterminant. En effet, il ressort de la jurisprudence susmentionnée que le droit à des mesures de reclassement ne confère pas aux assurés le libre choix d’une nouvelle profession et que ces mesures n’ont pas pour vocation de leur offrir une position économique et professionnelle supérieure par rapport à l’ancienne activité. La cour cantonale n’a donc pas violé le droit en rejetant les conclusions formulées sur ce point par l’assuré.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_308/2021 consultable ici

 

8C_405/2021 (f) du 09.11.2021 – Revenu d’invalide après réadaptation comme aide-comptable

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 (f) du 09.11.2021

 

Consultable ici

Cf. nos remarques et commentaires en fin d’article

 

Revenu d’invalide après réadaptation comme aide-comptable / 16 LPGA

Abattement sur le salaire statistique (examen de l’âge [53 ans] et des années de service)

 

Assurée, aide familiale à 80% depuis le 01.09.2002. Le 17.10.2007, elle a chuté dans les escaliers, se blessant principalement à l’épaule droite. Par décision, confirmée sur opposition le 03.02.2010, l’assurance-accidents a mis un terme à ses prestations d’assurance avec effet au 30.09.2009.

Le 11.11.2008, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après: l’OAI).

Le 02.02.2010, en traversant la chaussée, l’assurée a heurté le bord d’un trottoir et a fait une chute, entraînant diverses contusions, dont à l’épaule droite. Elle a été licenciée avec effet au 31.08.2010. Par décision, confirmée sur opposition le 28.01.2011, l’assurance-accidents a mis fin au traitement médical dès le 18.02.2010 et à l’indemnité journalière à partir du 15.03.2010.

L’assurée a recouru contre la décision sur opposition du 28.01.2011 devant le tribunal cantonal. L’instance cantonale a mandaté le professeur C.__, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique. Par arrêt du 27.03.2013, la cour cantonale a partiellement admis le recours de l’assurée et a annulé la décision de l’assureur-accidents du 28.01.2011. Se fondant sur le rapport d’expertise du professeur C.__, elle a retenu que les troubles de l’épaule droite étaient en lien de causalité avec les deux événements accidentels des 17.10.2007 et 02.02.2010 et que l’assurée avait droit à des prestations de la part de l’assureur-accidents au-delà du 14.03.2010.

L’assurée a bénéficié d’un reclassement professionnel de l’assurance-invalidité. Dans ce cadre, elle a suivi une formation qui a pris fin le 30.04.2014 et a débouché sur l’obtention d’un certificat d’aide-comptable.

Après mise en œuvre une expertise pluridisciplinaire, l’OAI a, par décision du 16.04.2019, l’OAI, mis l’assurée au bénéfice d’une demi-rente d’invalidité dès le 01.08.2014, puis d’une rente entière à partir du 01.11.2015 en raison d’une pathologie psychiatrique.

Le 17.04.2019 et le 13.05.2019, l’assurée a communiqué cette décision à l’assurance-accidents et lui a demandé de statuer sur son droit aux prestations.

Par décision, confirmée sur opposition le 03.04.2020, l’assurance-accidents a refusé d’octroyer une rente d’invalidité à l’assurée, au motif que la comparaison des salaires sans (80’279 fr. 05) et avec invalidité (77’444 fr. 60) faisait apparaître un taux d’invalidité de 6,6%, inférieur au seuil de 10% ouvrant le droit à une rente. Elle lui a en revanche alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 12’600 fr., correspondant à 10% du montant maximum du gain annuel assuré à l’époque de l’accident.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/380/2021 – consultable ici)

La juridiction cantonale n’a pas remis en cause la stabilisation de l’état de santé de l’assurée au mois de juin 2012, ni sa capacité de travail entière, sans baisse de rendement, dans une activité adaptée, telle qu’une activité de bureau ou d’aide-comptable, sous réserve d’effort répété à hauteur de l’épaule ou au-dessus ainsi que du port de charges supérieures à 5 kilos.

S’agissant du revenu sans invalidité, les juges cantonaux ont considéré qu’il y avait lieu de se fonder sur le salaire que l’assurée aurait perçu en 2010, avant la survenance de son deuxième accident, soit un montant de 64’223 fr. 25 à 80% (selon les informations fournies par l’ancien employeur) et de l’indexer – après l’avoir converti à 100% (80’279 fr. 05) – jusqu’en 2014, année de naissance d’un éventuel droit à la rente, dès lors que les mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité avaient pris fin le 30.04.2014 (cf. art. 19 al. 1, 1e phrase, LAA). Il en résultait un salaire sans invalidité de 81’407 fr. 80.

En ce qui concerne le revenu d’invalide, la cour cantonale a considéré que l’assureur-accidents s’était fondé à juste titre sur les salaires statistiques ressortant de l’ESS, mais qu’il aurait dû retenir non pas la table T17 (salaire mensuel brut selon les groupes de professions, l’âge et le sexe – secteur privé et secteur public ensemble) de l’ESS 2016, mais la table TA1_skill_level (salaire mensuel brut selon les branches économiques, le niveau de compétences et le sexe – secteur privé) de l’ESS 2014, au vu de la naissance d’un éventuel droit à la rente au mois de juin 2014. Selon la cour cantonale, la table T17 (auparavant TA7) n’entrait pas en considération lorsque la personne assurée n’avait pas accès au secteur public. Or il ressortait du rapport de réadaptation professionnelle de l’OAI que l’assurée avait bénéficié d’un reclassement professionnel et avait obtenu un certificat d’aide-comptable, lequel attestait les compétences acquises dans le domaine de la comptabilité en entreprise uniquement. La maîtrise de la comptabilité dans un service public nécessitait une formation spécifique dont ne disposait pas l’assurée, de sorte qu’il était peu probable qu’elle puisse être engagée au sein d’une entité publique.

La cour cantonale s’est référée, dans la table TA1_skill_level de l’ESS 2014, au salaire mensuel auquel peuvent prétendre les femmes dans la branche « activités juridiques et comptables » (ligne 69-71) avec niveau de compétences 2. Elle a considéré que la branche en question comprenait les services comptables et de tenue de livres, comme la vérification des comptes, la préparation des états financiers et la tenue des livres à teneur de la nomenclature générale des activités économiques (Nomenclature générale des activités économiques [NOGA 2008] publiée par l’OFS, notes explicatives, p. 191), soit les tâches dans lesquelles l’assurée avait été formée d’après le rapport final à l’atelier du 26.11.2012 au 01.02.2013, ainsi que selon la note interne de l’OAI du 07.05.2014 relative au bilan de la mesure au sein du service de comptabilité E.__. Le salaire mensuel était de 6067 fr., montant que la cour cantonale a ensuite adapté à l’horaire de travail moyen dans la branche concernée (41,4 heures par semaine), ce qui aboutissait à un revenu d’invalide de 6279 fr. par mois (ou 75’348 fr. par année). A l’instar de l’assurance-accidents, les juges cantonaux n’ont procédé à aucun abattement sur le salaire d’invalide.

Ainsi, pour la cour cantonale, le taux d’invalidité – résultant de la comparaison des revenus sans invalidité (81’407 fr. 80) et avec invalidité (75’348 fr.) – s’élevait à 7,44%, arrondi à 7%, comme retenu par l’assurance-accidents.

Par jugement du 27.04.2021, admission (très) partielle du recours par le tribunal cantonal (intérêts moratoires de 5% l’an sur l’indemnité pour atteinte à l’intégrité de 12’600 fr., dès le 01.05.2016).

 

TF

Revenu d’invalide

Le revenu d’invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l’assuré. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d’invalide peut notamment être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS; ATF 129 V 472 consid. 4.2.1; 126 V 75 consid. 3b/bb).

Sans contester le recours à la table TA1_skill_level de l’ESS 2014 et le niveau de compétences 2 pour déterminer son revenu d’invalide, l’assurée invoque une mauvaise application du droit fédéral en tant que la cour cantonale s’est fondée sur le salaire de référence des branches 69-71 « Activités juridiques, comptables, de gestion, d’architecture, d’ingénierie » (6067 fr. par mois) plutôt qu’à la valeur statistique médiane figurant à la ligne « total » (4808 fr. par mois).

Lorsque les tables ESS sont appliquées, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1, à la ligne « total secteur privé »; on se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la valeur médiane ou centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b), étant précisé que, depuis l’ESS 2012, il y a lieu d’appliquer le tableau TA1_skill_level et non pas le tableau TA1_b (ATF 142 V 178; arrêts 8C_46/2018 du 11 janvier 2019 consid. 4.4 et 8C_228/2017 du 14 juin 2017 consid. 4.2.2). Lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l’assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières; cette faculté reconnue par la jurisprudence concerne les cas particuliers dans lesquels, avant l’atteinte à la santé, l’assuré concerné a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et où une activité dans un autre domaine n’entre pratiquement plus en ligne de compte. Il y a en revanche lieu de se référer à la ligne « total secteur privé » lorsque l’assuré ne peut plus raisonnablement exercer son activité habituelle et qu’il est tributaire d’un nouveau domaine d’activité pour lequel l’ensemble du marché du travail est en principe disponible (arrêts 8C_471/2017 du 16 avril 2018 consid. 4.2; 9C_142/2009 du 20 novembre 2009 consid. 4.1 et 9C_237/2007 du 24 août 2007 consid. 5.1, non publié à l’ATF 133 V 545).

En l’occurrence, la juridiction cantonale a constaté qu’avant son atteinte à la santé, l’assurée avait exercé diverses activités professionnelles dans des domaines aussi variés que la photographie, la bijouterie, comme aide-vétérinaire, puis dans les services d’aide et de soins à domicile (en tant qu’aide familiale). Après son second accident survenu en 2010, l’assurée avait en outre effectué un stage de découverte par le biais de l’assurance-chômage, suivi d’une formation de secrétariat du 14.03.2012 au 25.05.2012 et avait acquis un certificat avec mention. Selon la cour cantonale, il y avait lieu d’admettre que l’assurée disposait d’une certaine capacité d’adaptation sur le plan professionnel susceptible, le cas échéant, de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge.

Compte tenu de ce qui précède, force est de constater qu’avant son atteinte à la santé, l’assurée ne s’est pas cantonnée à un seul domaine pendant de nombreuses années. Avant la survenance de son premier accident en octobre 2007, l’assurée n’exerçait en qualité d’aide familiale que depuis cinq ans et avait exercé diverses autres activités. L’assurée ne se trouve dès lors pas dans la situation particulière dans laquelle elle aurait travaillé de nombreuses années dans le même domaine d’activités avant son atteinte à la santé et où une activité dans un autre domaine n’entrerait pratiquement plus en ligne de compte, conditions pourtant requises par la jurisprudence pour s’écarter de la valeur médiane (« total secteur privé ») des salaires statistiques et se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (en l’occurrence le secteur 3 [services]), voire d’une branche particulière (en l’occurrence celle des « activités juridiques et comptables »). Pour cette raison déjà, la référence au salaire statistique d’une branche particulière apparaît contraire au droit.

En tout état de cause, il découle des notes explicatives de la nomenclature (NOGA 2008) que les activités juridiques et comptables visées par la ligne 69-71 de la table TA1 de l’ESS 2014 auxquelles s’est référée la cour cantonale requièrent un niveau de formation élevé et apportent aux utilisateurs des connaissances et compétences spécialisées. Or l’assurée ne dispose pas d’un diplôme de comptable, mais seulement d’un certificat d’aide-comptable obtenu après une formation effectuée par le biais d’un atelier chez D.__ du 26.11.2012 au 01.02.2013 puis d’un stage auprès de E.__ du 01.05.2013 au 31.10.2013. Par conséquent, le fait de se référer à cette branche d’activités ne reflète nullement sa réelle capacité de gain mais a bien plutôt pour effet de la pénaliser sur le plan salarial par rapport aux autres assurés dans une situation comparable. C’est dès lors en violation du droit fédéral que la cour cantonale ne s’est pas fondée, pour déterminer le revenu d’invalide de l’assurée, sur la valeur médiane (« total secteur privé ») du salaire statistique issu de la table TA1, niveau de compétences 2.

 

Abattement

Savoir s’il convient de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison des circonstances du cas particulier constitue une question de droit que le Tribunal fédéral peut revoir librement, tandis que l’étendue de l’abattement justifié dans un cas concret constitue une question typique relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit (ATF 146 V 16 consid. 4.2; 137 V 71 consid. 5.1).

Il convient de relever à titre préliminaire que l’appréciation de l’assurance-invalidité ne lie pas l’assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3).

Selon la jurisprudence, l’âge d’un assuré ne constitue pas per se un facteur de réduction du salaire statistique. Autrement dit, il ne suffit pas de constater qu’un assuré a dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Le Tribunal fédéral a insisté sur ce point et a affirmé que l’effet de l’âge combiné avec un handicap doit faire l’objet d’un examen dans le cas concret, les possibles effets pénalisants au niveau salarial induits par cette constellation aux yeux d’un potentiel employeur pouvant être compensés par d’autres éléments personnels ou professionnels tels que la formation et l’expérience professionnelles de l’assuré concerné (voir l’arrêt 8C_439/2017 du 6 octobre 2017, dans lequel il a été jugé, à propos d’un assuré ayant atteint 62 ans à la naissance du droit à la rente, qu’il n’y avait pas d’indices suffisants pour retenir qu’un tel âge représentait un facteur pénalisant par rapport aux autres travailleurs valides de la même catégorie d’âge, eu égard aux bonnes qualifications professionnelles de celui-ci). En l’occurrence, l’assurée était âgée de 53 ans au moment de la naissance d’un éventuel droit à la rente. Il appert par ailleurs qu’avant la survenance de son premier accident, l’assurée avait travaillé dans des domaines variés et accompli plusieurs stages, de sorte qu’on peut admettre qu’elle dispose d’une certaine capacité d’adaptation sur le plan professionnel susceptible, le cas échéant, de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge.

Quant à un éventuel handicap, il se présente sous la forme de limitations fonctionnelles (prohibition du port régulier de charges supérieures à 5 kg et d’effort répété à hauteur de l’épaule ou au-dessus). Toutefois, les experts mis en œuvre par l’OAI ont jugé que ces restrictions étaient parfaitement compatibles avec l’activité d’aide-comptable dans laquelle l’assurée avait été réadaptée, dès lors qu’elle pouvait exercer cette activité à plein temps, sans diminution de rendement.

Enfin, les années de service auprès de l’ancien employeur de l’assurée ne constituent pas un élément susceptible d’avoir un effet sur le montant du salaire auquel celle-ci pourrait prétendre sur le marché du travail. Au moment de la survenance de son second accident le 02.02.2010, l’assurée travaillait pour la Fondation B.__ depuis sept ans et demi, ce qui n’est pas une durée assez longue, en règle générale, pour bénéficier de conditions particulières liées à l’ancienneté, même pour une employée qualifiée du niveau de compétences 2 se trouvant en situation de réintégration professionnelle (voir l’arrêt 8C_610/2017 du 3 avril 2018, dans lequel aucun abattement n’a été appliqué sur le salaire d’invalide pour un assuré ayant travaillé comme chauffeur de bus au service du même employeur pendant neuf ans au moment de son accident et qui a ensuite bénéficié d’un reclassement professionnel d’aide-comptable).

Compte tenu de ce qui précède, la juridiction cantonale n’a pas violé le droit en ne procédant à aucun abattement sur le salaire statistique.

 

Pour déterminer le revenu sans invalidité (sic [il s’agit du revenu d’invalide]) de l’assurée, il convient dès lors de se fonder sur le revenu médian de 4808 fr. de la table TA1 (ESS 2014, total secteur privé) pour une femme avec un niveau de compétences 2. Adapté à la durée hebdomadaire normale de travail en 2014 (41,7 heures), ce montant doit être porté à 5012 fr. 34 (4808 x 41,7 / 40) par mois, soit à 60’148 fr. par année, ce qui représente le revenu d’invalide déterminant en 2014.

Par conséquent, le revenu d’invalide de 60’148 fr., comparé au revenu sans invalidité de 81’407 fr. 80 retenu par la juridiction cantonale et non contesté par l’assurée, aboutit à un taux d’invalidité de 26,11% ([81’407.80 – 60’148] / 81’407.80), arrondi à 26% (ATF 130 V 121 consid. 3.2), lequel ouvre le droit à une rente d’invalidité du même taux (art. 18 al. 1 LAA) à compter du 1er mai 2014.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assurée, réformant le jugement cantonal en ce sens que l’assurée a droit à une rente d’invalidité fondée sur un taux de 26% à compter du 01.05.2014.

 

 

Arrêt 8C_405/2021 consultable ici

 

 

Remarques et commentaires :

Cet arrêt appelle à quelques commentaires et réflexions. Nous sommes surpris par le raisonnement quant au revenu d’invalide.

L’assurée a bénéficié de mesures AI, lui permettant d’acquérir un certificat d’aide-comptable. La formation délivrée comprenait la journalisation des écritures, l’établissement du bilan, l’établissement du compte d’exploitation de plusieurs entreprises issues de diverses branches, la passation des écritures de bouclement et de clôture, la gestion des salaires et des assurances sociales, la comptabilisation des opérations et factures assujetties à la TVA, y compris son décompte trimestriel, la familiarisation et l’utilisation du logiciels Crésus, ainsi que la tenue d’une comptabilité sur la base de pièces justificatives réelles (jugement cantonal ATAS/380/2021 du 27.04.2021, p. 12). Du stage réalisé, l’assurée avait pu participer aux écritures de bouclement, à la résolution des comptes, aux actifs/passifs transitoires, à la clôture annuelle et à l’ouverture d’une année de compte (dito).

Des constatations cantonales, il ressort que l’assurée a été mise au bénéfice d’un reclassement par l’OAI par le biais d’une formation d’aide-comptable du 26.11.2012 au 01.02.2013, avec obtention d’un certificat d’aide-comptable, d’une formation pratique d’aide-comptable/assistante administrative du 01.05.2013 au 31.10.2013, d’une adaptation du poste sur le lieu de stage, d’une prolongation de la formation pratique du 01.11.2013 au 30.04.2014 ainsi que d’une formation sur WinBiz. Lors du bilan le 06.05.2014, l’entreprise avait considéré que l’assurée était pleinement employable dans l’activité d’aide-comptable. (jugement cantonal ATAS/380/2021 du 27.04.2021, p. 13).

Ainsi, après 17 mois de mesures AI, l’intéressée est capable, sous la supervision d’un comptable, de tenir la comptabilité courante d’une entreprise de l’ouverture des comptes jusqu’à la préparation des documents de clôture.

Par ailleurs, comme le relève lui-même le Tribunal fédéral, les experts mis en œuvre par l’OAI ont jugé que ces restrictions étaient parfaitement compatibles avec l’activité d’aide-comptable dans laquelle l’assurée avait été réadaptée, dès lors qu’elle pouvait exercer cette activité à plein temps, sans diminution de rendement.

Dans l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_610/2017 du 03.04.2018, l’assuré avait, lui aussi, été mis au bénéfice d’une formation d’aide-comptable, réalisée également à Genève. L’intéressé a obtenu un diplôme d’aide-comptable au mois de février 2015 puis il a bénéficié d’un stage pratique d’aide-comptable auprès du service de comptabilité des B.__ du 02.03.2015 au 31.08.2015. Pour déterminer le revenu d’invalide, l’assurance-accidents puis la cour cantonale se sont référés à la ligne 69-71 du tableau TA1, niveau de compétences 2, hommes, de l’ESS 2014 (arrêt 8C_610/2017 consid. 4.1). Le Tribunal fédéral a rejeté l’argument de l’assuré recourant pour l’utilisation de la branche « activités de service administratif sans activités liées à l’emploi » avec niveau de compétences 1 (ligne 77, 79-82 du tableau TA1 ESS) au lieu de la branche « activités juridiques, comptables de gestion » avec niveau de compétences 2 (ligne 69-71 du tableau TA1 ESS). Le TF a confirmé l’utilisation de la ligne 69-71 et conclu qu’on on ne voit pas pourquoi l’intéressé, au bénéfice d’un diplôme d’aide-comptable et après un stage pratique accompli auprès du service de comptabilité des B.________ du 02.03.2015 au 31.08.2015, serait cantonné à des tâches physiques ou manuelles simples relevant du niveau de compétence 1 (arrêt 8C_610/2017 consid. 4.3).

Dans l’arrêt 8C_405/2021 qui nous occupe aujourd’hui, la situation est similaire à celle ayant fait l’objet de l’arrêt 8C_610/2017. Au bénéfice d’une formation et d’un certificat d’aide-comptable, il semble correct de se référer à la ligne 69-71 englobant les activités comptables (branche économique 692000 selon NOGA08). Les juges cantonaux ont par ailleurs motivé les motifs les ayant conduits à prendre la ligne 69-71 et non la ligne 77,79-82 « Activités de services admin. (sans 78) » (jugement cantonal ATAS/380/2021 du 27.04.2021, consid. 14c).

La référence au parcours professionnel hétéroclite de l’assurée n’a pas sa place dans le cadre de la détermination après une formation réussie mise en œuvre par l’AI. Ce raisonnement peut se tenir pour le revenu sans invalidité (si ce dernier doit être déterminé sur la base de l’ESS). Le consid. 6.5 du présent arrêt (mention de « revenu sans invalidité » au lieu de « revenu d’invalide ») trahit peut-être la confusion entre les deux raisonnements.

Quant au niveau de compétences 2, il se justifie dans le revenu ESS comme aide-comptable (2 = tâches pratiques telles que le traitement de données et les tâches administratives).

En revanche, ce niveau de compétences ne se justifie pas si le revenu ESS est calculé sur la base de la ligne « Total », puisqu’il est fait abstraction des mesures AI octroyées dans la comptabilité. A la lecture de l’arrêt, il n’apparaît pas de son parcours professionnel antérieur que l’assurée pourrait mettre en valeur des connaissances particulières. Il aurait été alors plus logique de retenir, avec la ligne « Total », le niveau de compétences 1.

En résumé, les conclusions de la cour cantonale relatives au revenu d’invalide (tant l’utilisation du tableau TA1_skill_level de l’ESS 2014 que celle de la ligne 69-71) ne semblent pas critiquables.

 

Proposition de citation : 8C_405/2021 (f) du 09.11.2021 – Revenu d’invalide après réadaptation comme aide-comptable, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2022/01/8C_405-2021)

 

 

9C_211/2021 (f) du 05.11.2021 – Octroi d’une rente AI limitée dans le temps pour un assuré de plus de 55 ans / Examen de mesures de réadaptation préalablement à l’octroi d’une rente d’invalidité limitée dans le temps

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_211/2021 (f) du 05.11.2021

 

Consultable ici

 

Octroi d’une rente AI limitée dans le temps pour un assuré de plus de 55 ans

Examen de mesures de réadaptation préalablement à l’octroi d’une rente d’invalidité limitée dans le temps

 

Assuré, né en 1959, a été mis au bénéfice d’une rente entière d’invalidité par l’office AI du 01.05.2019 au 29.02.2020.

 

Procédure cantonale (arrêt AI/299/20 – 73/2021 – consultable ici)

Par jugement du 09.03.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon la jurisprudence, dûment rappelée par les juges cantonaux, il existe des situations dans lesquelles il convient d’admettre que des mesures d’ordre professionnel sont nécessaires, malgré l’existence d’une capacité de travail médico-théorique. Il s’agit des cas dans lesquels la réduction ou la suppression, par révision (art. 17 al. 1 LPGA) ou reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), du droit à la rente concerne une personne assurée qui est âgée de 55 ans révolus ou qui a bénéficié d’une rente pendant quinze ans au moins. Cette jurisprudence qui est également applicable lorsque l’on statue sur la limitation et/ou l’échelonnement en même temps que sur l’octroi de la rente (ATF 145 V 209 consid. 5), ne signifie pas que la personne assurée peut se prévaloir d’un droit acquis; il est seulement admis qu’une réadaptation par soi-même ne peut, sauf exception, être exigée d’elle en raison de son âge ou de la durée du versement de la rente. Dans de telles situations, l’office de l’assurance-invalidité doit vérifier dans quelle mesure l’assuré a besoin de la mise en œuvre de mesures d’ordre professionnel, même si ce dernier a recouvré une capacité de travail et indépendamment du taux d’invalidité qui subsiste (cf. arrêt 9C_276/2020 du 18 décembre 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

Il est constant que l’assuré, qui a été mis au bénéfice d’une rente entière d’invalidité du 01.05. 2019 au 29.02.2020 alors qu’il était âgé de plus de 55 ans, appartient à la catégorie d’assurés dont il convient de présumer qu’ils ne peuvent en principe pas entreprendre de leur propre chef tout ce que l’on peut raisonnablement attendre d’eux pour tirer profit de leur capacité résiduelle de travail.

Or en l’espèce, comme le fait valoir à juste titre l’assuré, ni l’office AI, ni, à sa suite, la juridiction cantonale, n’a procédé à un examen convaincant de sa situation pour nier son droit à des mesures de réadaptation préalablement à l’octroi d’une rente d’invalidité limitée dans le temps. Il ne suffit pas, pour fonder une situation exceptionnelle au sens de la jurisprudence, où l’assuré âgé de plus de 55 ans est apte à se réadapter par soi-même, de mentionner les exemples d’activités adaptées à l’état de santé de celui-ci donnés par l’office AI, qui ne nécessitent pas de formation particulière. L’examen de la nécessité de mesures d’ordre professionnel doit en effet être effectué malgré l’existence d’une capacité de travail médico-théorique, en fonction des circonstances concrètes (voir aussi arrêt 9C_92/2016 du 29 juin 2016 consid. 5.1).

Par ailleurs, en se référant à la « longue expérience professionnelle » de l’assuré, la juridiction cantonale ne fait pas état de circonstances qui permettraient de renoncer à évaluer la nécessité de mettre en place des mesures d’ordre professionnel. Elle n’a en effet pas tenu compte que cette expérience professionnelle était en réalité limitée à un secteur particulier, puisque l’assuré avait toujours travaillé en tant que boulanger depuis l’obtention de son certificat fédéral de capacité (CFC) dans ce domaine en 1978. De plus, la durée de l’éloignement du marché du travail n’apparaît pas déterminante dans les situations où une rente est octroyée rétroactivement pour une période limitée dans le temps (cf. arrêt 8C_80/2020 du 19 mai 2020 consid. 3.1).

En définitive, en considérant qu’il était concevable que l’assuré pût reprendre du jour au lendemain une activité lucrative à 100% sans qu’il fût nécessaire de mettre préalablement des mesures destinées à l’aider à se réinsérer dans le monde du travail, la juridiction de première instance a violé le droit en ne faisant pas une application correcte de la jurisprudence fédérale. En conséquence, il convient de renvoyer le dossier à l’office AI afin qu’il examine concrètement les besoins objectifs de l’assuré à ce propos. Ce n’est qu’à l’issue de cet examen et de la mise en œuvre d’éventuelles mesures de réintégration sur le marché du travail que l’administration pourra définitivement statuer sur la suppression de la rente entière d’invalidité.

 

Le TF admet le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_211/2021 consultable ici

 

 

9C_44/2021 (f) du 23.09.2021 – Octroi dans le même temps d’une rente entière puis d’une demi-rente AI pour une assurée de plus de 55 ans / Examen du besoin de mesures de réadaptation avant la diminution du droit à une rente entière à une demi-rente

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_44/2021 (f) du 23.09.2021

 

Consultable ici

 

Octroi dans le même temps d’une rente entière puis d’une demi-rente AI pour une assurée de plus de 55 ans

Examen du besoin de mesures de réadaptation avant la diminution du droit à une rente entière à une demi-rente

 

Assurée, née en 1960 et infirmière de profession, a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité en avril 2015. Après avoir notamment diligenté une expertise auprès d’un spécialiste en médecine interne générale et en rhumatologie et d’un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, l’office AI a reconnu le droit de l’assurée à un quart de rente dès le 01.05.2016.

 

Procédure cantonale (arrêt 608 2019 207 – consultable ici)

Par jugement du 14.12.2020, admission partielle du recours par le tribunal cantonal, réformant la décision en ce sens que l’assurée a droit à une rente entière d’invalidité du 01.05.2016 au 10.10.2017, puis à une demi-rente d’invalidité.

 

TF

Est seul litigieux en instance fédérale le point de savoir si la juridiction cantonale était en droit de remplacer la rente entière d’invalidité qu’elle a allouée à l’assurée depuis le 01.05.2016 par une demi-rente dès le 11.10.2017, sans avoir au préalable examiné la nécessité de mettre en œuvre des mesures de réadaptation.

Selon la jurisprudence, il existe des situations dans lesquelles il convient d’admettre que des mesures d’ordre professionnel sont nécessaires, malgré l’existence d’une capacité de travail médico-théorique. Il s’agit des cas dans lesquels la réduction ou la suppression, par révision (art. 17 al. 1 LPGA) ou reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), du droit à la rente concerne une personne assurée qui est âgée de 55 ans révolus ou qui a bénéficié d’une rente pendant quinze ans au moins. Cette jurisprudence qui est également applicable lorsque l’on statue sur la limitation et/ou l’échelonnement en même temps que sur l’octroi de la rente (ATF 145 V 209 consid. 5), ne signifie pas que la personne assurée peut se prévaloir d’un droit acquis; il est seulement admis qu’une réadaptation par soi-même ne peut, sauf exception, être exigée d’elle en raison de son âge ou de la durée du versement de la rente. Dans de telles situations, l’office de l’assurance-invalidité doit vérifier dans quelle mesure l’assuré a besoin de la mise en œuvre de mesures d’ordre professionnel, même si ce dernier a recouvré une capacité de travail et indépendamment du taux d’invalidité qui subsiste (cf. arrêt 9C_276/2020 du 18 décembre 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

L’assurée, née en février 1960, avait 55 ans révolus tant au moment où les juges cantonaux lui ont reconnu le droit à une rente entière d’invalidité du 01.05.2016 au 10.10.2017, puis à une demi-rente d’invalidité (le 14.12.2020), qu’à celui à partir duquel la réduction du droit à la rente a été fixée (en octobre 2017), si bien que la question de savoir à quel moment la condition afférente à l’âge doit être remplie (date de la limitation du droit à la prestation, date à laquelle la décision a été rendue, ou date où les constatations médicales déterminantes figurent au dossier) peut en l’espèce être laissée ouverte (comme déjà dans l’ATF 145 V 209 consid. 5.4 in fine et les arrêts 8C_648/2019 du 4 juin 2020 consid. 5.1 et 9C_574/2019 du 16 octobre 2019 consid. 3.2, notamment).

L’assurée a donc droit à ce que le besoin de mesures de réadaptation soit examiné avant la diminution de son droit à une rente entière à une demi-rente. Cet examen n’a pas été effectué par la juridiction cantonale. En particulier, toute constatation sur l’exigibilité d’une réadaptation par soi-même (exceptionnelle) fait défaut. La cause doit dès lors être renvoyée à l’office AI pour qu’il vérifie l’octroi de mesures d’ordre professionnel à l’assurée.

 

Le TF admet le recours de l’assurée et annule le jugement cantonal en tant qu’il porte sur la diminution du droit à la rente à partir du 11.10.2017. La cause est renvoyée à l’office AI pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

 

 

Arrêt 9C_44/2021 consultable ici

 

 

9C_846/2018 (f) du 29.11.2019 – Droit à une mesure de réadaptation déterminée de l’AI – Appropriée au but de réadaptation – Elément objectif de la mesure et aptitude subjective de la personne assurée / Effet suspensif retiré à un recours dirigé contre une décision de révision qui supprime une rente

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_846/2018 (f) du 29.11.2019

 

Consultable ici

 

Droit à une mesure de réadaptation déterminée de l’AI – Appropriée au but de réadaptation – Elément objectif de la mesure et aptitude subjective de la personne assurée

Conditions matérielles posées par le droit fédéral à l’octroi d’une mesure de réadaptation d’ordre professionnel niées

Effet suspensif retiré à un recours dirigé contre une décision de révision qui supprime une rente

 

Assuré, ressortissant portugais né en 1956, a travaillé en Suisse entre 1982 et 1994, en dernier lieu comme chauffeur-livreur. Il s’est vu délivrer par l’AI une rente entière d’invalidité dès le 01.03.1995, au motif que son état de santé psychique était incompatible avec l’exercice d’une activité professionnelle (décisions des 14.04.1997 et 06.11.1997). Le droit à cette prestation a été maintenu en 2004 (communication du 01.07.2004).

L’Office AI pour les assurés résidant à l’étranger (ci-après : l’office AI), à qui le dossier avait été transmis après le départ de l’assuré pour le Portugal fin avril 2005, a soumis le prénommé à une expertise pluridisciplinaire auprès d’un centre d’observation médicale de l’AI (COMAI).

La décision du 15.01.2009, concernant la suppression de la rente entière d’invalidité, avec effet au 01.03.2009, a été annulée (recours au TAF puis au TF [9C_368/2010]). La décision du 09.06.2011, niant le droit de l’assuré à des mesures de réadaptation d’ordre professionnel, au motif que celui-ci n’était plus assuré à l’AVS/AI, et maintenant qu’il n’avait pas droit à une rente d’invalidité depuis le 01.03.2009, a été annulée par le TAF, la cause étant renvoyée à l’office AI pour compléter l’instruction du dossier conformément aux considérants.

Reprenant l’instruction de la cause, l’office AI a mis l’assuré au bénéfice de mesures d’observation d’ordre professionnel (du 27.04.2015 au 22.05.2015). Par décision du 01.02.2016, l’office AI n’a pas donné suite à la demande de l’assuré du 18.12.2015 tendant à la reprise du versement d’une rente entière d’invalidité. Par décision du 31.05.2016, l’office AI ensuite nié le droit du prénommé à une rente d’invalidité au-delà du 28.02.2009 et rejeté la requête tendant à l’octroi de mesures de réadaptation d’ordre professionnel. Il a également retiré l’effet suspensif à un éventuel recours.

 

Procédure cantonale (arrêt C-1422/2016 + C-4322/2016 – consultable ici)

L’assuré a déféré les décisions des 01.02.2016 et 31.05.2016 au Tribunal administratif fédéral (TAF), qui a joint les causes.

Par jugement du 05.11.2018, le TAF a admis le recours contre la décision du 31.05.2016, réformé cette décision en ce sens que le droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité est reconnu dès le 01.03.2009, puis « retourné » le dossier à l’office AI afin qu’il reprenne le versement de la rente et procède au paiement des arriérés de rente et des intérêts moratoires dus. S’agissant du recours contre la décision du 01.02.2016, le TAF a constaté qu’il était devenu sans objet et radié la cause du rôle.

 

TF

A titre préliminaire : le Tribunal fédéral n’a pas tranché la question de l’aptitude subjective de l’assuré à des mesures de réadaptation d’ordre professionnel dans l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral du 31.01.2011 (cause 9C_368/2010). Au contraire, il a renvoyé expressément la cause à l’office AI pour que celui-ci examine dans quelle mesure l’assuré était en mesure de tirer profit de sa capacité de travail et qu’il prenne le cas échéant – sous réserve de la réalisation des conditions matérielles du droit à la prestation et de la collaboration de l’intéressé (art. 21 al. 4 LPGA) – les mesures nécessaires à la réintégration de celui-ci dans le circuit économique, puis statue à nouveau sur la révision de la rente d’invalidité (arrêt 9C_368/2010 précité consid. 5.4).

 

Le droit à une mesure de réadaptation déterminée de l’assurance-invalidité présuppose qu’elle soit appropriée au but de réadaptation poursuivi par l’assurance-invalidité, et cela tant objectivement en ce qui concerne la mesure que subjectivement en rapport avec la personne de l’assuré. En effet, une mesure de réadaptation ne peut être efficace que si la personne à laquelle elle est destinée est susceptible, partiellement au moins, d’être réadaptée. Partant, si l’aptitude subjective de réadaptation de l’assuré fait défaut, l’administration peut refuser de mettre en œuvre une mesure ou y mettre fin (arrêts 9C_474/2013 du 20 février 2014 consid. 6.3; I 552/06 du 13 juin 2007 consid. 3.1 et les références).

Les juges du TAF ont exposé les motifs pour lesquels le déconditionnement de l’assuré, résultant de son âge et d’une longue période d’inactivité professionnelle, ne pouvait pas lui être imputé. On ne saurait en effet reprocher à un assuré qui bénéficiait en 2009 d’une rente entière d’invalidité depuis près de quinze années d’éprouver des doutes sur sa capacité à transposer ses compétences dans une nouvelle activité professionnelle. Selon les faits constatés par le TAF, l’assuré ne s’est cependant pas limité à invoquer des doutes liés à la durée de son éloignement du marché du travail et à son âge. Lors du stage d’observation professionnelle, il a au contraire indiqué de manière claire qu’il ne pouvait « plus travailler dans quelque activité que ce soit » et présenté selon les maîtres de réadaptation un discours plus axé sur son avenir de retraité que sur une quelconque reconversion professionnelle. Reprenant le discours qu’il avait déjà tenu lors de l’expertise pluridisciplinaire, il a de plus cherché à convaincre ses interlocuteurs du danger pour son intégrité physique causé par ses problèmes veineux en cas de reprise d’une activité professionnelle, voulant absolument leur montrer ses plaies (ulcères variqueux).

Certes, les maîtres de réadaptation des établissements B.________ admettent la nécessité de mesures de réadaptation d’ordre professionnel. Ils ont cependant pris en compte le manque de motivation de l’assuré dans le seul contexte d’une nouvelle mesure d’évaluation et d’orientation professionnelle. Or, lors des examens menés au COMAI, l’assuré appréciait déjà ses capacités fonctionnelles au niveau de celui d’une personne paraplégique. Aussi, les médecins du COMAI suspectaient déjà en 2008 que les chances de succès d’une mesure de nouvelle réadaptation seraient minces en raison des singularités de la personnalité de l’assuré (psychorigidité assez marquée), qui avaient contribué à l’adoption d’une identité d’invalide (arrêt de renvoi 9C_368/2010 précité consid. 5.4). L’assuré s’est de plus expressément opposé aux conclusions des maîtres de réadaptation, indiquant qu’il ne pouvait plus travailler dans quelque activité que ce soit, qu’il souffrait en permanence et qu’il avait dû prendre beaucoup sur lui pour arriver à suivre le stage dans son intégralité. Le fait que l’assuré a pleinement collaboré à la procédure ne change par conséquent rien au fait qu’il a toujours eu la conviction de ne plus pouvoir travailler et qu’il n’a nullement montré qu’il cherchait à se reconstruire et à se réinsérer professionnellement. Aussi, comme le soutient l’office AI, le succès de mesures de réadaptation d’ordre professionnel apparaissait d’emblée irréaliste dès 2008.

Au vu des éléments qui précèdent, les conditions matérielles posées par le droit fédéral à l’octroi d’une mesure de réadaptation d’ordre professionnel n’étaient pas réalisées en 2009, faute d’aptitude subjective de l’assuré à la réadaptation. Il n’y a dès lors pas matière à examiner la suite de l’argumentation des parties qui portent sur la possibilité (ou non) d’octroyer de telles mesures de réadaptation après que la personne concernée a quitté la Suisse pour s’installer dans un pays de l’Union européenne. En tout état de cause, l’administration n’a pas à prendre en charge le coût d’une mesure de réadaptation qui apparaissait d’emblée irréaliste en 2009.

 

En tant que l’assuré s’emploie ensuite à démontrer dans sa réponse qu’il n’est plus en mesure de travailler en raison de son âge (60 ans en 2016), il s’écarte des considérants de l’arrêt de renvoi. En effet, le Tribunal fédéral a retenu dans l’arrêt du 31.01.2011 que le TAF s’était écarté sans motif valable du résultat de l’expertise du COMAI, alors même que celle-ci revêtait pleine valeur probante et n’était pas remise en cause par les autres pièces médicales versées au dossier. Il a jugé que l’état de santé de l’assuré s’était amélioré et qu’il pouvait désormais exercer à 100% une activité adaptée aux limitations fonctionnelles décrites par les médecins. D’un point de vue médical, la situation a dès lors été définitivement tranchée dans l’arrêt de renvoi du 31.01.2011. Aussi, il est établi que l’état de santé de l’assuré s’était amélioré en 2008, lui permettant d’un point de vue médico-théorique de travailler à 100% dans une activité adaptée.

 

Lorsque l’effet suspensif est retiré à un recours dirigé contre une décision de révision qui supprime une rente, ce retrait perdure en cas de renvoi de la cause à l’administration, également pendant la procédure d’instruction jusqu’à la notification de la nouvelle décision (ATF 129 V 370; arrêt 8C_451/2010 du 11 novembre 2010 consid. 4.3, publié in SVR 2011 IV n° 33 p. 96). A ce propos, le Tribunal fédéral a rappelé que le renvoi pour instruction complémentaire ne signifiait pas nécessairement que les constatations originelles étaient fausses mais seulement que celles-ci ne pouvaient être confirmées sur la base des documents disponibles. Si les résultats de l’instruction complémentaire infirmaient au moins partiellement le contenu de la décision originelle (par exemple quant à la date de l’amélioration de la capacité de travail justifiant la modification du droit survenue postérieurement à ce qui avait été retenu dans la première décision, toutes les autres conditions demeurant identiques), il ne saurait par conséquent être question de faire remonter la suppression ou la réduction des prestations à une époque où les conditions pour le faire n’étaient pas remplies. Il apparaît donc que l’élément distinctif déterminant consiste dans le moment auquel survient le changement notable de circonstances influençant le droit aux prestations au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (arrêt 9C_288/2010 du 22 décembre 2010 consid. 4.2).

En l’espèce, l’assuré ne pouvait prétendre à l’octroi de mesures de nouvelle réadaptation d’ordre professionnel en 2009, faute d’aptitude subjective. Le TAF n’était par conséquent pas en droit de maintenir le droit accessoire de l’assuré à une rente d’invalidité tant et aussi longtemps qu’une telle mesure ne fût pas mise en place. Conformément aux conclusions prises par l’office AI dans le recours, la décision de suppression de la rente d’invalidité doit être entérinée avec effet au 01.03.2009, soit au premier jour du deuxième mois qui a suivi la notification de la décision du 15.01.2009 (art. 88bis al. 2 let. a RAI).

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annule le jugement du TAF et confirme la décision du 31.05.2016 de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_846/2018 consultable ici

 

 

9C_689/2018 (f) du 08.02.2019 – Revenu sans invalidité – Eléments du salaire à prendre en compte – Revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires sur plusieurs années – 16 LPGA / Droit au reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_689/2018 (f) du 08.02.2019

 

Consultable ici

 

Revenu sans invalidité – Eléments du salaire à prendre en compte – Revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires sur plusieurs années / 16 LPGA

Droit au reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Perception d’un salaire élevé en raison de responsabilités « de chef d’équipe » ne justifie pas la prise en charge par l’AI d’une formation supérieure

 

Assuré, né en 1959, a travaillé comme étancheur depuis avril 2008. Le 15.10.2015, son employeur a résilié les rapports de service avec effet au 31.12.2015. Le 27.10.2015, l’assuré a chuté et tapé ses deux genoux contre le bord d’une dalle. Le cas a été pris en charge par l’assurance-accidents. Le 11.05.2016, l’assuré a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité.

Dans le cadre de l’instruction de la demande, l’office AI a notamment fait verser à son dossier celui de l’assurance-accidents. Les médecins de la Clinique romande de réadaptation (CRR) de Sion ont diagnostiqué – avec effet sur la capacité de travail – des gonalgies bilatérales, avec lésions dégénératives des ménisques et des lésions chondrales aux deux genoux (prédominant au compartiment fémoro-patellaire, de grade IV) ; l’assuré ne pouvait plus exercer son activité habituelle d’étancheur depuis le 27.10.2015. Selon les médecins, l’assuré pouvait en revanche travailler à 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles (accroupissements, activités contraignantes pour les genoux, équilibre et port de charge limité à un niveau moyen de 15-25 kg).

Par décision, l’office AI a, en se fondant sur un degré d’invalidité de 17%, nié le droit de l’assuré à des prestations de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 161/17 – 248/2018 – consultable ici)

Les juges cantonaux ont retenu, pour le revenu d’invalide, un montant de 63’636 fr. 50 correspondant au salaire réalisé en 2016 par un homme exerçant à plein temps des tâches physiques ou manuelles simples dans le secteur privé (ESS 2014, tableau TA1, niveau 1, horaire usuel de travail de 41,7 heures, puis adaptation à l’évolution des salaires jusqu’en 2016), avec un taux d’abattement de 5%. Ils ont comparé ce montant au revenu sans invalidité de 77’117 fr. 76, fondé sur la moyenne des revenus inscrits sur le compte individuel AVS de l’assuré durant les années 2009 à 2014 (après adaptation à l’évolution des salaires jusqu’en 2016) et qui correspondaient aux décomptes de salaire produits par l’assuré ; le degré d’invalidité s’élevait à 17% (17,48%). L’assuré n’avait dès lors pas droit à une rente d’invalidité ou à des mesures de réadaptation d’ordre professionnel. Qui plus est, de telles mesures n’avaient pas lieu d’être dès lors que l’exercice d’activités ne nécessitant pas de formation particulière était à la portée de l’assuré, sans qu’un préjudice économique important ne subsistât.

Par jugement du 13.08.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité

Les différents revenus invoqués par l’assuré incluent, selon les décomptes de salaire produits, des prestations d’assurance en cas d’accident et de maladie ou d’invalidité, voire des allocations familiales. Or ces montants ne doivent pas être compris dans le revenu provenant d’une activité lucrative conformément à l’art. 6 al. 2 let. b et f RAVS, en lien avec les art. 28 al. 1 2ème phrase LAI et art. 25 al. 1 RAI. L’assuré ne peut dès lors rien tirer en sa faveur de sa lecture sélective des décomptes de salaire et du compte individuel AVS.

L’assuré ne s’en prend ensuite pas concrètement au raisonnement qui a conduit les premiers juges à retenir que les conditions posées par la jurisprudence pour fixer le revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires étaient réunies (à ce sujet, voir arrêt 9C_771/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.6.1 et les références). En particulier, il ne conteste pas les constatations cantonales selon lesquelles sa rémunération des années 2009 à 2014 était soumise à des fluctuations importantes. Contrairement à ce que requiert l’assuré, on ne saurait dans ces circonstances se fonder pour le calcul de son revenu sans invalidité sur les salaires perçus les deux années qui ont précédé la survenance de son atteinte à la santé. Seule la prise en compte de ses salaires réalisés pendant une période plus longue – soit sur une valeur moyenne calculée sur plusieurs années – permet de pondérer les facteurs variables de la rétribution dans le temps et reflète ainsi sa situation économique concrète. Il n’y a dès lors pas lieu de s’écarter du montant de 77’117 fr. 76 retenu par la juridiction cantonale à titre de revenu sans invalidité.

 

Droit au reclassement dans une nouvelle profession – 17 LAI

Le litige porte exclusivement sur le droit de l’assuré à un reclassement au sens de l’art. 17 LAI.

Selon l’art. 17 al. 1 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Par reclassement, la jurisprudence entend l’ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle générale, l’assuré n’a droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas. En particulier, l’assuré ne peut prétendre une formation d’un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l’invalidité sont telles que seule une formation d’un niveau supérieur permet de mettre à profit d’une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé (ATF 139 V 399 consid. 5.4 p. 403). Le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement est une diminution de la capacité de gain de 20% environ (ATF 139 V 399 consid. 5.3 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références).

L’assuré ne peut prétendre une formation d’un niveau supérieur à celui de son activité habituelle d’étancheur, sauf circonstances qui ne sont pas réalisées en l’espèce. En particulier, s’il affirme avoir bénéficié d’une formation d’un niveau universitaire à l’étranger dans les années 1970, les organes de l’assurance-invalidité n’ont pas pour tâche de le placer dans une position économique et professionnelle plus favorable que celle qu’il occupait directement avant son atteinte à la santé. L’assuré n’a ainsi droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas (ATF 139 V 399 consid. 5.4 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références). On ne saurait dès lors suivre l’assuré lorsqu’il demande à ce que l’office AI prenne en charge une formation alors qu’il avait travaillé comme étancheur sans être au bénéfice d’un titre professionnel, tel un certificat fédéral de capacité. Le fait que son employeur lui avait versé un salaire élevé en raison de ses responsabilités « de chef d’équipe » ne justifie pas la prise en charge par l’assurance-invalidité d’une formation supérieure à celle mise en œuvre jusqu’alors. Qui plus est, il ne prétend pas qu’une telle mesure permettrait d’atteindre un succès durable et important, compte tenu de la durée probable de la vie professionnelle après la période de formation (art. 8 al. 1bis 2ème phrase LAI; ATF 132 V 215 consid. 4.5.3 p. 231 et 4.5.4 p. 232). Dans ces circonstances, un reclassement dans une nouvelle profession serait dépourvu de l’efficacité recherchée par le législateur (art. 8 et 17 al. 1 LAI; ATF 124 V 108 consid. 2a p. 109).

Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de se prononcer plus avant sur les critiques de l’assuré quant à l’abattement sur le revenu d’invalide fixé par la juridiction cantonale. Même si l’assuré présentait une invalidité de plus de 20%, cela ne suffirait pas à lui ouvrir le droit à un reclassement dans une nouvelle profession.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_689/2018 consultable ici

 

 

La réforme de l’AI doit optimiser la réinsertion professionnelle

La réforme de l’AI doit optimiser la réinsertion professionnelle

 

Communiqué de presse du Parlement du 06.03.2019 consultable ici

 

L’AI doit améliorer les chances sur le marché du travail des jeunes et des personnes souffrant de maladie psychique. Le National s’est lancé mercredi 06.03.2019 dans une réforme d’optimisation à laquelle il risque d’ajouter des mesures d’économies jeudi 07.03.2019.

Le projet s’inscrit dans une lignée d’autres visant à faciliter la réinsertion professionnelle des rentiers et ainsi réduire les coûts de l’assurance. L’AI ne devant plus avoir de dettes d’ici à 2031 selon les dernières prévisions, le gouvernement n’a pas inclus de grandes mesures d’économie dans sa copie, ce dont la gauche s’est réjouie.

La droite n’a pas renversé la vapeur mercredi, mais la Chambre du peuple n’a pas eu le temps de traiter plusieurs mesures d’austérités proposées par sa commission préparatoire. Elle examinera jeudi matin une réduction des rentes pour enfants et l’introduction d’un système de rentes linéaires à la place des quatre échelons de rente actuels.

En attendant, le National a soutenu des mesures visant à faciliter la réinsertion professionnelle des jeunes et des personnes atteints dans leur santé psychique. Pour favoriser la détection précoce, les mineurs pourront faire l’objet d’une communication auprès de l’AI dès 13 ans. Le signalement est aussi prévu pour les personnes menacées d’être en incapacité de travail.

Les jeunes en orientation ou formation professionnelle pourront de leur côté bénéficier de mesures médicales visant directement l’insertion dans la vie active jusqu’à l’âge de 25 ans. Le couperet tombe jusqu’ici à 20 ans. Les mesures de réinsertion professionnelle tout comme les conseils et suivis seront étendus dans le temps.

L’AI va réorienter les formations financées et baisser les indemnités journalières versées de manière à inciter les jeunes à trouver un travail. Les rentes seront réduites au salaire des apprentis, mais elles seront versées plus vite. Cela doit assurer une certaine égalité de traitement avec les jeunes apprentis pas à l’AI, a expliqué Philippe Nantermod (PLR/VS).

 

Maladies rares

L’AI devra également rembourser les frais médicaux de certaines maladies congénitales rares, même si l’efficacité des mesures médicales ne peut pas encore être démontrée scientifiquement. Le traitement d’autres maladies moins graves sera en revanche désormais pris en charge par l’assurance maladie.

La Chambre du peuple a refusé d’autoriser le Conseil fédéral à introduire une liste de mesures médicales non prises en charge. Dans le viseur du gouvernement, les frais d’ergothérapie et la physiothérapie. Mais cela pourrait aller plus loin, pas question de lui laisser les mains libres, a expliqué Maya Graf (Verts/BL).

Les coûts des mesures médicales de l’AI ont augmenté de plus de 90% depuis 2001, a rappelé le ministre des assurances sociales Alain Berset. Un meilleur encadrement des mesures médicales a été demandé par le Contrôle fédéral des finances, a-t-il ajouté. En vain.

 

Frais de voyage inchangés

Le National a par ailleurs refusé par 122 voix contre 53 de tailler dans le remboursement des frais de déplacements. Une minorité PLR/UDC voulait là aussi repêcher une mesure d’économie coulée par le Parlement avec une précédente réforme de l’assurance.

L’AI n’est de loin pas tirée d’affaire financièrement, a justifié Regine Sauter (PLR/ZH). Cela toucherait les familles ayant des enfants handicapés qui supportent déjà de lourdes charges, ont fustigé les partis de centre droit et la gauche. De plus, seuls 6 millions de francs pourraient être économisés. Il ne vaut pas la peine de détériorer la situation des familles.

 

Experts indépendants

La Chambre du peuple a encore inscrit dans la loi une obligation d’indépendance pour les experts. Le Conseil fédéral devra édicter des critères pour l’autorisation d’expertises médicales et instituer une commission réunissant tous les milieux concernés afin de surveiller de manière générale les expertises.

C’est de la surréglementation, a critiqué Thomas Weibel (PVL/ZH) au nom d’une minorité. La pratique actuelle a fait ses preuves et doit être maintenue, a-t-il ajouté. Le soutien du PBD, de l’UDC et d’une partie du PLR n’a pas suffi.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 06.03.2019 consultable ici

 

 

9C_58/2017 (f) du 03.08.2017 – Mesures d’ordre professionnelle – Reclassement dans une nouvelle profession – 17 LAI / Revenu provenant d’une activité lucrative d’une certaine importance économique avant la survenance de l’invalidité – 6 al. 2 RAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_58/2017 (f) du 03.08.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2w2IKhN

 

Mesures d’ordre professionnelle – Reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Revenu provenant d’une activité lucrative d’une certaine importance économique avant la survenance de l’invalidité / 6 al. 2 RAI

 

Assuré, né en 1991, a présenté le 08.10.2014 une demande de prestations auprès l’office AI. En 2011, alors qu’il suivait un apprentissage de peintre en bâtiment, il s’est blessé à la cheville gauche lors d’une partie de football. Il a interrompu son apprentissage le 28.06.2013. Le 17.04.2014, il a subi une arthroscopie de la cheville gauche. Estimant que l’assuré avait retrouvé une capacité de travail entière dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles à partir du 01.12.2014 et que, de ce fait, il ne subissait pas de perte de gain, l’office AI a rejeté par décision la demande de prestations tant pour le droit à une rente d’invalidité que pour le droit au reclassement dans une nouvelle profession.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/987/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2eBM9Oa)

S’agissant du droit à une mesure de reclassement, les premiers juges ont constaté que l’assuré avait dû interrompre son apprentissage à la suite des séquelles de son accident. Un reclassement devait permettre à l’assuré d’améliorer sa capacité de gain. La juridiction cantonale a en outre considéré que l’intéressé remplissait également les conditions pour bénéficier du reclassement grâce à son aptitude favorable à être reclassé.

Par jugement du 28.11.2016, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision attaquée et renvoyant le dossier à l’office AI pour nouvelle décision au sens des considérants, en particulier pour qu’il mette en œuvre le reclassement de l’assuré.

 

TF

Selon l’art. 17 al. 1 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée.

Le droit au reclassement présuppose que l’assuré ait obtenu, avant la survenance de l’invalidité, un revenu provenant d’une activité lucrative d’une certaine importance économique (ATF 129 V 119 consid. 2.2 p. 120; MICHEL VALTERIO, Droit de l’assurance-vieillesse et survivants et de l’assurance-invalidité, 2011, p. 451 n. 1682). Ainsi, l’art. 6 al. 2 RAI prévoit que lorsqu’une formation initiale a dû être interrompue en raison de l’invalidité de l’assuré, une nouvelle formation professionnelle est assimilée à un reclassement, seulement si le revenu acquis en dernier lieu par l’assuré durant la formation interrompue était supérieur à l’indemnité journalière prévue par l’art. 23 al. 2 LAI. Selon cette dernière disposition, l’indemnité de base s’élève à 30% du montant maximum de l’indemnité journalière fixée à l’art. 24 al. 1 LAI pour l’assuré qui a atteint l’âge de 20 ans et qui aurait entrepris une activité lucrative après avoir terminé sa formation s’il n’avait pas été invalide. Le but de l’art. 6 al. 2 RAI est, entre autres objectifs, de distinguer le reclassement de la formation professionnelle initiale au sens de l’art. 16 LAI (MICHEL VALTERIO, op. cit., p. 452 n. 1685).

Le montant maximum de l’indemnité journalière était en 2013, date de l’interruption de l’apprentissage suivi par l’assuré, de 346 fr. par jour (art. 22 al. 1 de l’ordonnance sur l’assurance-accidents [OLAA] auquel renvoient les art. 23 al. 2 et 24 al. 1 LAI).

Or il ressort du contrat d’apprentissage que son salaire horaire lors de la deuxième année d’apprentissage s’élevait à 8 fr. 65 par heure, pour 41 heures par semaine. Ce montant correspond à un salaire journalier de 70 fr. 93, auxquels on doit ajouter 8,33% pour les vacances, soit 76 fr. 84. Ce montant est inférieur au 30% du montant maximum de l’indemnité journalière, soit 103 fr. 80. La condition prévue à l’art. 6 al. 2 RAI n’étant pas remplie, l’assuré n’a pas droit aux mesures de reclassement.

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annulant le jugement cantonal en ce sens que l’assuré n’a pas droit aux mesures de reclassement.

 

 

Arrêt 9C_58/2017 consultable ici : http://bit.ly/2w2IKhN

 

 

Plus de 20 000 personnes réintégrées

Plus de 20 000 personnes réintégrées

 

Communiqué de presse de la Conférence des Offices AI du 23.02.2016 consultable ici : http://bit.ly/1T3YiLk

 

L’an dernier, les offices AI ont placé plus de 20 000 personnes atteintes dans leur santé sur le marché primaire du travail. Ce résultat dépasse celui de l’année précédente. Il vaut la peine d’intervenir à un stade précoce.

 

Si la réinsertion des rentiers représente un grand défi pour les offices AI, la réadaptation de personnes ne touchant pas encore de rente est un franc succès. La nouvelle enquête effectuée par la Conférence suisse des offices AI (COAI) auprès des 26 offices AI cantonaux le montre. L’an dernier, les efforts déployés par les employeurs et les offices AI ont permis à 20 119 personnes atteintes dans leur santé de conserver leur emploi ou d’en décrocher un nouveau. « Les offices AI ont ainsi légèrement dépassé le résultat de l’année précédente (19 578 placements) », souligne le président de la COAI Jean-Philippe Ruegger. « On voit que le travail d’intervention précoce des employeurs et des offices AI permet d’éviter l’octroi de rentes. De plus en plus d’employeurs sont prêts à donner une perspective de réinsertion professionnelle à des personnes atteintes dans leur santé. De nombreuses entreprises font la démonstration que l’impératif de rentabilité et l’engagement social ne sont pas antinomiques. C’est une bonne nouvelle. Ceci dit, il reste un travail de sensibilisation important à accomplir. Nous poursuivrons nos efforts », précise-t-il. Les offices AI mettent à disposition des employeurs qui le souhaitent l’aide nécessaire et des instruments efficaces. Sur les 20 119 personnes réadaptées l’an dernier, 10 570 sont des personnes qui ont été maintenues en emploi, 1791 des personnes qui ont transférées à un autre poste au sein de leur entreprise et 6984 des personnes qui ont été placées auprès d’un nouvel employeur. En revanche, le bilan est plus mitigé s’agissant des personnes qui ont bénéficié avec succès de l’aide au placement suite à la révision de leur rente (774). La statistique ne tient pas compte des personnes placées pour une formation ou un stage.

Quotas superflus

Les succès obtenus grâce à l’action conjointe des offices AI et des employeurs montrent que des quotas de personnes handicapées dans les entreprises sont superflus. Aux yeux de la COAI, les engagements effectués uniquement dans le but d’atteindre un certain quota ne constituent pas une bonne base pour des rapports de travail fructueux et durables. « La volonté générale des entreprises d’assumer leur responsabilité sociale est un facteur beaucoup plus important », dit Jean-Philippe Ruegger.

 

 

 

Communiqué de presse de la Conférence des Offices AI du 23.02.2016 consultable ici : http://bit.ly/1T3YiLk