Archives par mot-clé : ALCP

9C_259/2016 (f) du 19.07.2016 – Droit à une rente extraordinaire AI – prestation spéciale à caractère non contributif – 39 al. 1 LAI – 42 al. 1 LAVS – ALCP / Condition d’assurance – Pas de discrimination indirecte – Confirmation de la jurisprudence

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2016 (f) du 19.07.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2bCkaxQ

 

Droit à une rente extraordinaire AI – prestation spéciale à caractère non contributif / 39 al. 1 LAI – 42 al. 1 LAVS – ALCP

Condition d’assurance – Pas de discrimination indirecte – Confirmation de la jurisprudence

 

Assurée, ressortissante française née en 1981, souffre depuis l’enfance d’une déficience mentale légère, de troubles psychiques, de troubles autistiques et d’une psychose infantile. Elle a transféré son domicile en Suisse, en mai 2013, pour y suivre ses parents. Dépôt de la demande AI le 06.09.2013. L’office AI a octroyé une allocation pour impotent de faible degré à compter du 01.05.2013 mais a dénié le droit à des mesures d’ordre professionnel, à des indemnités journalières et à une rente de l’assurance-invalidité dans la mesure où elle ne remplissait pas les conditions d’assurance.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 26.02.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon la jurisprudence publiée aux ATF 141 V 530, la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité remplit tous les critères pour qu’elle puisse être considérée comme une prestation spéciale à caractère non contributif au sens de l’art. 70 par. 2 let. a point i du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (RS 0.831.109.268.1; ci-après: règlement n° 883/2004). Cette prestation ne fait par conséquent pas partie de celles soumises au principe de la levée des clauses de résidence définie à l’art. 7 du règlement n° 883/2004 (art. 70 par. 1 et 3 du règlement n° 883/2004).

Le caractère non exportable de la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité ne dispense cependant pas les Etats membres d’en garantir l’octroi aux personnes résidant sur leur territoire, et auxquelles les dispositions du règlement n° 883/2004 sont applicables, dans les mêmes conditions qu’à leurs propres ressortissants (cf. ATF 133 V 265 consid. 5.2 p. 271). A cet égard, le Tribunal fédéral a retenu que la réglementation suisse (art. 39 al. 1 LAI en liaison avec l’art. 42 al. 1 LAVS) est directement discriminatoire, en ce sens qu’elle réserve le droit à une rente extraordinaire d’invalidité aux ressortissants suisses. Dans la mesure où une rente extraordinaire serait octroyée à un ressortissant suisse, elle doit également pour éviter une discrimination directe fondée sur la nationalité, être accordée à une personne de nationalité étrangère pouvant se prévaloir du principe d’égalité de traitement, comme si cette personne possédait la nationalité suisse (ATF 131 V 390 consid. 7.2 p. 401).

Le Tribunal fédéral s’est déjà prononcé sur la portée du principe d’égalité de traitement lorsqu’il s’agit, comme en l’espèce, d’examiner si les conditions d’octroi d’une rente extraordinaire de l’assurance-invalidité peuvent être remplies plus facilement par des ressortissants suisses que par des étrangers (ATF 131 V 390). Il a conclu que la réglementation suisse n’était pas constitutive d’une discrimination indirecte prohibée au sens de l’art. 3 par. 1 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (RO 2004 121; ci-après: règlement n° 1408/71), lequel était applicable jusqu’au 31 mars 2012 dans les relations entre la Suisse et les Etats membres de l’Union européenne. La règle d’égalité de traitement de l’art. 9 al. 2 de l’Annexe I de l’ALCP relative aux avantages sociaux, comme l’interdiction générale de discrimination de l’art. 2 ALCP, rappelée à l’art. 1 let. d ALCP, ne conduisait par ailleurs pas à un résultat plus favorable (cf. ATF 131 V 390 consid. 5.1 p. 397 et 9 p. 405).

Le Tribunal fédéral a déjà retenu le fait que les conditions de la réglementation suisse peuvent être remplies plus facilement par des ressortissants suisses que par des étrangers. Le désavantage pour une personne ne comptant pas le même nombre d’années d’assurance que les personnes de sa classe d’âge de ne pas pouvoir bénéficier d’une rente extraordinaire doit cependant être considéré comme objectivement justifié et conforme au principe de proportionnalité en vertu de la solution choisie par le législateur de l’Union européenne lui-même, de sorte qu’il ne conduit pas à une discrimination indirecte prohibée (ATF 131 V 390 consid. 7.3 p. 402). Sous l’angle du principe d’égalité de traitement, cette jurisprudence conserve toute sa pertinence au regard de l’art. 4 du règlement n° 883/2004, lequel correspond à l’art. 3 par. 1 du règlement n° 1408/71 (en ce sens, MAXIMILIAN FUCHS, in Europäisches Sozialrecht, 6 e éd. 2013, n° 2 ad art. 4 du règlement n° 883/2004).

Il s’ensuit que le principe d’égalité de traitement, tel que prévu par l’ALCP et le règlement de l’Union européenne auquel il renvoie, ne confère pas à l’assurée un droit à une rente (extraordinaire) de l’assurance-invalidité.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_259/2016 consultable ici : http://bit.ly/2bCkaxQ

 

 

8C_580/2015 (f) du 26.04.2016 – destiné à la publication – Assujettissement en LAA d’un assuré français résidant en France pensionné (retraite) en France et travaillant en Suisse (dans sa Sàrl) / Dispositions transitoires – art. 87 du règlement n° 883/2004

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_580/2015 (f) du 26.04.2016, destiné à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1TBFh4f

 

Assujettissement en LAA d’un assuré français résidant en France pensionné (retraite) en France et travaillant en Suisse (dans sa Sàrl)

Dispositions transitoires – art. 87 du règlement n° 883/2004

ALCP – Règl. CEE n° 1408/71 et règlement CE n° 883/2004

 

Assuré, de nationalité française, résidant en France, a été victime d’un accident sur son lieu de travail le 11.11.2010. Alors qu’il travaillait sur un chantier en France et qu’il était occupé à poser un carrelage mural, il a chuté d’un escabeau. Il travaillait alors pour l’entreprise B. _ Sàrl, société inscrite au registre du commerce du canton de Genève, qui a son siège à Genève et dont il était l’associé gérant. Dite société a rempli, le 30.04.2013 soit 2 ans et demi après l’événement, une déclaration de sinistre à l’intention de son assurance-accidents helvétique. Par décision du 27.03.2014, l’assureur-accidents a refusé de prendre en charge le cas au motif que l’intéressé, qui résidait en France, n’était pas soumis à la législation suisse en matière d’assurance-accidents.

Dans son opposition, l’assuré a expliqué qu’il avait atteint l’âge de la retraite en France en 2009, qu’il percevait en France une pension de retraite et qu’il avait continué à travailler comme gérant et surveillant des chantiers de B.__ Sàrl. A la suite de l’accident, il était demeuré en incapacité totale de travailler jusqu’en février 2014. Les conséquences de l’accident n’avaient pas été prises en charge par la sécurité sociale française du moment qu’il percevait déjà une pension de retraite. L’opposition a été rejetée le 08.07.2014.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/463/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1Wl334W)

Par arrêt du 23.06.2015, admission partiel du recours par le tribunal cantonal et annulation de la décision sur opposition. Le cas a été renvoyé à l’assureur-accidents pour complément d’instruction et nouvelle décision.

 

TF

Dispositions transitoires – art. 87 Règl. CE n° 883/2004

L’art. 87 du règlement n° 883/2004 renferme des dispositions transitoires pour l’application de ce règlement (l’art. 87 bis contient quant à lui des dispositions transitoires pour l’application du règlement n° 465/2012).

Le règlement n° 883/2004 (entré en vigueur pour les Etats membres de l’Union européenne le 01.05.2010) est appliqué dans les relations avec la Suisse depuis le 01.04.2012. Etant donné que la période transitoire constitue une clause de protection et vise à empêcher des changements de la législation applicable à la date d’entrée en vigueur des nouvelles règles de détermination de la législation applicable, l’art. 87 du règlement n° 883/2004 s’applique pour la totalité de la période de dix ans. Il s’ensuit que la période transitoire de dix ans expirera pour la Suisse le 31.03.2022 (voir le guide pratique de la commission administrative [pour la coordination des systèmes de sécurité sociale] sur la législation applicable dans l’Union européenne (UE), dans l’Espace économique européen (EEE) et en Suisse, 2013, p. 54, <http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=fr&catId=868>; consulté le 12.04.2016).

L’art. 87 par. 8 du règlement n° 883/04 a pour but d’éviter de nombreux changements de législations applicables lors du passage au nouveau règlement et de permettre une « transition douce » à la personne concernée au cas où il existerait un écart entre la législation applicable selon le règlement n° 1408/71 et le règlement n° 883/2004. Il maintient le statu quo pour une période transitoire, sauf changement de situation ou demande de la personne concernée. Un changement de la « situation qui a prévalu » au sens de l’art. 87 par. 8 signifie qu’après l’entrée en vigueur du règlement n° 883/2004 la situation factuelle pertinente pour déterminer la législation applicable en vertu des règles antérieures du règlement n° 1408/71 a changé et que, du fait de ce changement, la personne concernée aurait été assujettie à la législation d’un Etat membre autre que celui déterminé en dernier lieu conformément au règlement n° 1408/71. En règle ordinaire, toute nouvelle activité salariée – pour cause de changement d’employeur, de résiliation de l’un des emplois ou de changement transfrontalier de résidence – constitue un changement de la situation qui a prévalu jusqu’alors (voir BERNHARD SPIEGEL, in Europäisches Sozialrecht, op. cit., n° 23 ad art. 87 et 87a du règlement n° 883/2004; SUSANNE DERN, in VO (EG) Nr. 883/2004, 2012, n° 10 ad art. 87; ARNO BOKELOH, Die Übergangsregelungen in den Verordnungen (EG) Nr. 883/04 und 987/09, ZESAR 2011 p. 20; voir aussi le guide pratique de la commission administrative, op. cit., p. 53).

Tant le règlement n° 1408/71 (art. 13 par. 1 et 15 par. 2) que le règlement n° 883/2004 (art. 11 par. 1) posent le principe de l’unicité du droit applicable. Ce principe postule l’application de la législation d’un seul Etat membre pour l’ensemble des éventualités entrant dans le champ d’application matériel du règlement (cf. art. 4 par. 1 du règlement n° 1408/71 et art. 3 par. 1 du règlement n° 883/2004). Il vise à supprimer les inégalités de traitement et les complications qui, pour les travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l’intérieur de l’Union européenne seraient la conséquence d’un cumul partiel ou total des législations applicables (p. ex. arrêts la CJCE, devenue la CJUE, du 30 juin 2011 C-388/09 da Silva Martins, Rec. 2011 I-5737, points 53 ss; du 9 mars 2006 C-493/04 Piatkowski, Rec. 2006 I-2369, point 21; du 12 juin 1986 C-302/84 Ten Holder/Nieuwe Algemene Bedrijfsvereniging, Rec. 1986 p. 1821 points 19 ss).

Dans le cas particulier, l’assuré n’a jamais demandé à être soumis de manière générale et exclusive à la législation suisse pour la période postérieure au 01.04.2012. Le seul fait qu’il a déposé ultérieurement une demande de prestations de l’assurance-accidents suisse ne saurait être interprété comme une demande au sens de l’art. 87 par. 8 du règlement n° 883/04. Vu ses conséquences, une telle demande ne peut qu’être formulée de manière explicite et non équivoque.

D’autre part, la date déterminante à partir de laquelle l’assuré pouvait – à supposer que les conditions en fussent réalisées – opter pour la législation suisse en vertu de l’art. 87 par. 8 du règlement n° 883/2004 n’est pas celle de l’accident (11 novembre 2010), mais celle de l’entrée en vigueur de ce règlement. En effet, la première condition pour appliquer l’art. 87 par. 8 est que, du fait de l’entrée en vigueur du règlement n° 883/2004, une personne soit assujettie à la législation d’un Etat membre autre que celui déjà déterminé en vertu du règlement n° 1408/71 (voir le guide pratique de la commission administrative, op. cit., p. 52).

En l’espèce, ce n’était pas le cas. L’assuré résidait et réside toujours en France. En avril 2012, il n’exerçait plus d’activité professionnelle depuis novembre 2010 en raison d’une incapacité de travail totale. Il percevait une pension de retraite de la sécurité sociale française. Il ne pouvait de facto pas cumuler des activités salariées dans plusieurs Etats membres, de sorte que l’applicabilité de l’art. 13 par. 1 du règlement n° 883/2004 n’entrait pas en considération. Conformément à la disposition transitoire de l’art. 87 par. 8, il restait soumis, comme par le passé, à la législation française en application du règlement n° 1408/71, en raison de sa résidence en France (voir l’art. 13 par. 2 let. f du règlement n° 1408/71 et aussi l’art. 11 par 3 let. e du règlement n o 883/04; cf. HEINZ-DIETRICH STEINMEYER, op. cit., n° 35 ad art. 11 du règlement n° 883/2004, ainsi que ATF 138 V 197 consid. 5.2 p. 201 s.).

Pour être complet, on peut encore relever qu’il n’y a pas eu de changement situation postérieurement au 01.04.2012 qui aurait pu justifier l’assujettissement au nouveau règlement.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, le jugement de l’instance cantonale est annulé et la décision sur opposition est confirmée.

 

 

Arrêt 8C_580/2015 consultable ici : http://bit.ly/1TBFh4f

 

 

8C_860/2014 (f) du 11.03.2016 – proposé à la publication – Mode de calcul du montant de la rente d’invalidité – 36 LAI – 32 RAI – 29bis LAVS / Prise en compte de périodes de cotisations accomplies au Portugal – ALCP

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_860/2014 (f) du 11.03.2016, proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1TQWosX

 

Mode de calcul du montant de la rente d’invalidité – 36 LAI – 32 RAI – 29bis LAVS

Prise en compte de périodes de cotisations accomplies au Portugal – ALCP

 

Assuré né en 1952, de nationalité portugaise, ayant travaillé en Suisse depuis 1981. Depuis le 17.03.1989, il réside en Suisse de manière ininterrompue. Il a été mis au bénéfice d’une rente entière d’invalidité pour la période du 01.10.1997 au 30.04.1999, fondée sur un revenu annuel moyen de 75’978 fr., une durée de cotisations (accomplie en Suisse et au Portugal) de 22 années et 4 mois et l’échelle de rente 41.

Le 15.07.2008, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations d’invalidité. Octroi d’une demi-rente d’invalidité à compter du 01.01.2009. La rente était calculée en fonction d’un revenu annuel moyen déterminant de 57’564 fr., d’une durée de cotisations (accomplie en Suisse uniquement) de 22 années et 6 mois, entraînant l’application de l’échelle de rente 31.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1099/2014 – consultable ici : http://bit.ly/1OIfn7l)

Par jugement du 21.10.2014, la cour cantonale a admis le recours. Elle a annulé la décision attaquée et renvoyé la cause à l’office de l’assurance-invalidité « pour nouveau calcul du montant de la rente d’invalidité en tenant compte des périodes de cotisations accomplies au Portugal, puis nouvelle décision ».

 

TF

En l’espèce, le droit à la rente d’invalidité de l’assuré est né avant l’entrée en vigueur du règlement no 883/04. Ratione temporis, le présent cas doit donc être tranché à la lumière du règlement n° 1408/71, sous réserve des règles transitoires précitées pour la période postérieure au 31 mars 2012 (voir à ce sujet ARNO BOKELOH, Die Übergangsregelungen in den Verordnungen (EG) Nr. 883/04 und 987/09, ZESAR 2011 p. 18-23; BERNHARD SPIEGEL, in Europäisches Sozialrecht, 6 e éd. 2013, n° 17 p. 542 ad art. 87 et 87a; SUSANNE DERN, in VO (EG) Nr. 883/2004, 2012, n° 7 s. p. 384 ad art. 87).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue sous le régime du règlement n° 1408/71, l’art. 20 ALCP n’exclut pas qu’un assuré soit mis au bénéfice d’une disposition plus favorable d’une convention bilatérale de sécurité sociale, pour autant qu’il ait exercé son droit à la libre circulation avant l’entrée en vigueur de l’ALCP (ATF 133 V 329 précité). Le travailleur qui a exercé son droit à la libre circulation ne doit pas être pénalisé du fait des règlements communautaires par rapport à la situation qui aurait été la sienne s’il avait été régi par la seule législation nationale. La jurisprudence européenne repose aussi sur l’idée que l’intéressé était en droit, au moment où il a exercé son droit à la libre circulation, d’avoir une confiance légitime dans le fait qu’il pourrait bénéficier des dispositions de la convention bilatérale (arrêts [de la CJCE] du 5 février 2002 C-277/99 Kaske, Rec. 2002 I-1261; du 9 novembre 2000 C-75/99 Thelen, Rec. 2000 I-9399; du 9 novembre 1995 C-475/93 Thévenon, Rec. 1995 I-3813; du 7 février 1991 C-227/89 Rönfeldt, Rec. 1991 I-323).

L’ATF 133 V 329 concernait le paiement d’un complément différentiel prévu par la Convention du 3 juillet 1975 de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République française (RS 0.831.109.349.1), mais non par le droit communautaire. Ce complément était versé en cas de remplacement d’une rente d’invalidité de l’assurance-invalidité suisse (système de type A) par deux rentes de vieillesse, d’un montant total inférieur, versées l’une par la Suisse et l’autre par la France. Le complément différentiel visait à maintenir les droits garantis jusqu’alors par le versement de la rente d’invalidité suisse.

Contrairement à ce que voudraient l’office AI et l’OFAS, il ne se justifie pas de revenir sur la jurisprudence de cet arrêt ni d’en restreindre la portée à la situation spécifique (complément différentiel) visée par celui-ci.

Cela dit, le Tribunal fédéral a déjà répondu aux objections d’ordre pratique invoquées par l’OFAS (ATF 133 V 329 consid. 8.7 p. 342 s.). Certes, comme le souligne l’office, il n’est pas d’emblée évident que le calcul préconisé par les premiers juges soit plus favorable à l’assuré. Cela implique un calcul comparatif auquel ni l’administration ni la juridiction cantonale n’ont procédé en l’espèce. Il est nécessaire au préalable que l’organisme compétent selon la législation portugaise communique, sur demande de la caisse suisse, les périodes de cotisations et les périodes assimilées que l’intéressé a accomplies selon la législation portugaise et qui seraient prises en considération pour l’ouverture du droit et le calcul de la pension d’invalidité selon cette législation. Il importe aussi de connaître le montant de la rente qui serait allouée par le Portugal compte tenu des seules périodes accomplies dans ce pays.

En l’espèce, l’assuré a exercé son droit à la libre circulation avant l’entrée en vigueur de l’ALCP. C’est donc à bon droit que les premiers juges ont prescrit au recourant de tenir compte des périodes de cotisations accomplies au Portugal, étant précisé que cette solution ne sera applicable que si elle est plus favorable à l’assuré. Au besoin, le recourant tiendra compte de la réglementation transitoire.

 

Le TF rejette le recours de l’Office AI.

 

 

Arrêt 8C_860/2014 consultable ici : http://bit.ly/1TQWosX

 

 

9C_105/2016 (f) du 05.04.2016 – Droit d’option – Exemption de l’affiliation à l’assurance obligatoire des soins suisse refusée – ALCP – 2 al. 6 OAMal

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_105/2016 (f) du 05.04.2016, proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Z29iIt

 

Droit d’option – Exemption de l’affiliation à l’assurance obligatoire des soins suisse refusée – ALCP – 2 al. 6 OAMal

 

NB : je conseille vivement au praticien de lire l’arrêt du Tribunal fédéral en entier, qui comporte moult détails. Le long jugement du Tribunal cantonal est également riche d’utiles précisions.

 

A.__, ressortissante française domiciliée en France, ayant débuté une activité lucrative salariée en Suisse à partir du 19.06.2014, titulaire d’un permis G (autorisation de travail pour frontalier) depuis le 25.08.2014.

Dans un courrier du 02.09.2014, le Service de l’assurance maladie du canton de Genève (ci-après: SAM) a informé A.__ des modalités d’exercice du droit d’option entre l’affiliation à l’assurance maladie suisse et la couverture maladie française. Le 09.09.2014, A.__ a demandé au SAM d’être exemptée de l’affiliation à l’assurance maladie suisse, en indiquant être au bénéfice d’un contrat d’assurance couvrant ce risque en France, en Suisse et dans l’Union européenne souscrit le 18.06.2014. Elle précisait ne pas avoir à soumettre sa requête à la CPAM, motif pris de la nullité de plein droit de toute disposition légale, réglementaire ou conventionnelle « ne respectant pas les principes et l’esprit d’un règlement européen ».

Par décision du 22.12.2014, le SAM a refusé de dispenser A.__ de l’affiliation à l’assurance obligatoire des soins suisse. Affiliation d’office à un assureur-maladie par décision du 08.01.2015. Le SAM a par ailleurs indiqué à A.__ qu’elle pouvait encore lui transmettre dans les trente jours le formulaire dûment complété, démarche qui serait alors considérée comme une demande d’annulation de son affiliation d’office. Les oppositions ont été rejetées par le SAM le 07.04.2015.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/955/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1WBVWUd)

Par jugement du 15.12.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 11 par. 3 let. a du Règlement n° 883/2004, la personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre est, sous réserve des art. 12 à 16, soumise à la législation de cet Etat membre. Cette disposition fait du lieu de travail le critère principal de rattachement et consacre le principe de la lex loci laboris. L’Etat d’emploi est alors seul compétent en vertu du principe de l’unicité de la législation applicable prévu à l’art. 11 par. 1 du Règlement n° 883/2004, selon lequel les personnes auxquelles le règlement est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul Etat membre.

Ce principe peut être assorti d’exceptions. En effet, en application de l’art. 83 du Règlement n° 883/2004, l’Annexe XI audit règlement régit les modalités particulières d’application des législations de certains États membres. Il en ressort notamment que les personnes soumises aux dispositions légales suisses peuvent, sur demande, être exemptées de l’assurance maladie obligatoire (LAMal) en tant qu’elles résident dans l’un des États suivants et peuvent prouver qu’elles y bénéficient d’une couverture en cas de maladie: Allemagne, Autriche, France, Italie et, dans certains cas, la Finlande et le Portugal (voir également Annexe II ALCP, section A, par. 1, let. i, ch. 3b). Cette faculté est communément appelée « droit d’option » (pour la situation sous l’empire du Règlement [CE] n° 1408/71 [RO 2004 121], applicable dans les rapports entre la Suisse et les Etats membres de l’UE jusqu’au 31 mars 2012, voir ATF 135 V 339 consid. 4.3.2 p. 344).

Le droit suisse a été adapté pour tenir compte du droit d’option instauré par la réglementation européenne (cf. art. 2 al. 6 OAMal).

Jusqu’au 01.06.2002, les relations entre la Suisse et la France en matière de sécurité sociale étaient exclusivement régies par la Convention de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République française du 3 juillet 1975 (RS 0.831.109.349.1). Les travailleurs frontaliers – sur cette notion, voir l’art. 1 let. f du Règlement n° 883/2004 – n’avaient alors pas l’obligation de s’affilier à la LAMal, faute de domicile en Suisse (art. 3 LAMal), mais ils en avaient la faculté (art. 3 OAMal).

Le législateur français a mis en œuvre le droit d’option par la loi n° 2002-1487 du 20 décembre 2002 de financement de la sécurité sociale, qui a institué à cette fin l’art. L. 380-3-1 du Code de la sécurité sociale. Dans sa teneur en vigueur du 19 décembre 2008 au 31 décembre 2014, cette disposition prévoyait:

I.- Les travailleurs frontaliers résidant en France et soumis obligatoirement à la législation suisse de sécurité sociale au titre des dispositions de l’accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d’une part, et la Confédération suisse, d’autre part, sur la libre circulation des personnes, mais qui, sur leur demande, sont exemptés d’affiliation obligatoire au régime suisse d’assurance maladie en application des dispositions dérogatoires de cet accord, sont affiliés obligatoirement au régime général dans les conditions fixées par l’article L. 380-1.

II.- Toutefois, les travailleurs frontaliers occupés en Suisse et exemptés d’affiliation obligatoire au régime suisse d’assurance maladie peuvent demander à ce que les dispositions du I ne leur soient pas appliquées, ainsi qu’à leurs ayants droit, jusqu’à la fin des dispositions transitoires relatives à la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne, soit douze ans à partir de l’entrée en vigueur de l’accord du 21 juin 1999 précité, à condition d’être en mesure de produire un contrat d’assurance maladie les couvrant, ainsi que leurs ayants droit, pour l’ensemble des soins reçus sur le territoire français. Ces dispositions ne sont pas applicables aux travailleurs frontaliers, ainsi qu’à leurs ayants droit, affiliés au régime général à la date d’entrée en vigueur de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007. Les travailleurs ayant formulé une telle demande peuvent ultérieurement y renoncer à tout moment, pour eux-mêmes et pour leurs ayants droit indistinctement, et sont, à partir de la date de cette renonciation, affiliés au régime général en application des dispositions du I.

Il ressort de cette disposition que le droit de sous-option – choix du régime français d’assurance maladie avec possibilité de souscrire à une assurance maladie privée – ne pouvait être exercé que jusqu’à la fin des dispositions transitoires relatives à la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’UE, soit douze ans à partir de l’entrée en vigueur le 1er juin 2002 de l’ALCP, à savoir jusqu’au 31 mai 2014. Depuis le 01.06.2014, les travailleurs frontaliers résidant en France ne peuvent plus choisir, en cas d’option – exercée pour la première fois après cette date – en faveur du régime français d’assurance maladie, entre souscrire un contrat d’assurance maladie privée et l’assurance au régime général d’assurance maladie (CMU); ils sont désormais affiliés obligatoirement à ce régime. Les par. I et II de l’art. L. 380-3-1 du Code de la sécurité sociale français ont été jugés conformes à la Constitution française par le Conseil constitutionnel de la République française (décision n° 2015-460 QPC du 26 mars 2015, JORF n°0075 du 29 mars 2015 p. 5775, texte n° 78), lequel a indiqué que « l’atteinte portée aux conventions légalement conclues par les résidents français travaillant en Suisse qui étaient affiliés en France à un régime d’assurance privée est justifiée par le motif d’intérêt général qui s’attache à la mutualisation des risques dans le cadre d’un régime de sécurité sociale fondé sur le principe de la solidarité nationale ».

Le droit d’option constitue une dérogation au principe de la lex loci laboris (art. 11 par. 3 let. a du Règlement n° 883/2004) ainsi que du principe de l’unicité du droit applicable (art. 11 par. 1 du Règlement n° 883/2004). En instaurant le droit d’option des travailleurs frontaliers, la France a fait usage de la possibilité qui lui était offerte d’assurer sur son territoire des personnes qui y résident et qui, normalement, devraient être assurées en Suisse en raison de l’activité qu’elles y exercent, et, partant, de les libérer de l’obligation d’assurance dans cet Etat. Comme l’a rappelé à plusieurs reprises la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), il appartient à la législation de chaque Etat membre de déterminer ces conditions; celles-ci ne peuvent toutefois pas avoir pour effet d’exclure de l’application de la législation en cause les personnes auxquelles cette législation est applicable en vertu du Règlement n° 1408/71, respectivement du Règlement n° 883/2004 (arrêts de la CJUE du 3 mai 1990 C-2/89  Kits van Heijningen, Rec. 1990 I-1755, points 19 et 20 et du 4 juin 2015 C-543/13  Fischer-Lintjens, non encore publié au Recueil général, point 49 et l’arrêt  Salemink cité).

En conséquence, c’est à la France qu’il incombe de déterminer les conditions auxquelles les travailleurs frontaliers qui résident sur son territoire et souhaitent exercer leur droit d’option peuvent s’affilier à la branche « assurance maladie » du régime français de la sécurité sociale (voir LIONEL TAUXE, Assurance-maladie des travailleurs frontaliers: fin d’une solution sur mesure ou d’un privilège?, Sécurité sociale CHSS 4/2014 p. 251). En réaménageant à compter du 01.06.2014 le droit d’option de telle sorte que les travailleurs frontaliers qui demandent à être assujettis en France sont obligatoirement assurés au régime général de l’assurance maladie (CMU) et en excluant à compter de la même date la possibilité de bénéficier d’un assujettissement équivalent par le biais de la souscription d’une assurance maladie privée, l’Etat français a opéré un choix législatif qui relève de sa compétence exclusive et qui ne saurait être remis en cause par les autorités suisses. Il n’en demeure pas moins que ce choix n’a pas pour effet d’exclure les travailleurs frontaliers du champ d’application de la législation nationale (suisse) qui leur est applicable en premier lieu en vertu du Règlement n° 883/2004.

Il n’existe en effet aucune raison pour les autorités administratives suisses de s’écarter des dispositions de mise en œuvre destinées à faciliter la collaboration interinstitutionnelle convenues par la France et la Suisse au moyen de la note conjointe du 23.05.2014, comme l’a du reste retenu le Conseil fédéral à plusieurs reprises, dès lors qu’elles ne font qu’expliciter les modalités d’exercice du droit d’option entre les deux Etats (voir à ce sujet les réponses données par le Conseiller fédéral Alain Berset [BO 2014 CE 29] à l’interpellation du 12 décembre 2013 du Conseiller aux Etats Robert Cramer [13.4192 – Fin du régime particulier d’assurance-maladie pour les travailleurs suisses et français frontaliers. Une intervention du Conseil fédéral est nécessaire], ainsi que les réponses du Conseil fédéral à la motion du 17 avril 2013 du Conseiller national Luc Barthassat [13.3336 – Assurance-maladie pour les citoyens suisses vivant en France] et à l’interpellation du 20 juin 2013 du Conseiller national Markus Lehmann [13.3564 – Exercice du droit d’option en matière d’assurance-maladie. Révision de la note conjointe adoptée par la France et la Suisse]).

D’après l’art. 4 du Règlement n° 883/2004, les personnes auxquelles le présent règlement s’applique bénéficient, à moins que le présent règlement n’en dispose autrement, des mêmes prestations et sont soumises aux mêmes obligations, en vertu de la législation de tout Etat membre, que les ressortissants de celui-ci. Pour la Suisse, l’égalité de traitement ainsi définie interdit tout traitement discriminatoire dans l’application de sa propre législation entre un ressortissant de l’UE, entrant dans le champ d’application du Règlement n° 883/2004, et un citoyen suisse (voir ATF 136 V 182 consid. 7.1 p. 192 et les références). Ce principe n’a pas pour effet d’obliger les autorités suisses à traiter tous les ressortissants européens de manière identique, sans égard à la législation nationale qui leur est applicable, et de les soumettre à des règles relatives à un Etat européen avec lequel ils n’ont aucun lien et dont la législation ne leur est pas applicable en vertu du Règlement n° 883/2004. En d’autres termes, il ne permet pas à la recourante de bénéficier d’un droit qui serait reconnu à un autre ressortissant européen (par exemple allemand) en vertu des modalités d’exercice du droit d’option applicables aux personnes résidant en Allemagne, dès lors qu’elle ne réside pas dans cet Etat et que, partant, l’application du régime allemand de sécurité sociale n’entre pas en considération. Il convient en revanche de relever qu’un travailleur frontalier de nationalité suisse, résidant en France et travaillant en Suisse, est confronté au même choix que la recourante et est tenu d’exercer son droit d’option entre l’assurance obligatoire des soins suisse ou le régime général d’assurance maladie français.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_105/2016 consultable ici : http://bit.ly/1Z29iIt

 

 

9C_283/2015 (f) du 11.09.2015 – Résidence habituelle en Suisse – 13 LPGA / Rente extraordinaire de l’AI non exportable – ALCP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2015 (f) du 11.09.2015, publié 141 V 530

 

ATF 141 V 530 consultable ici : http://bit.ly/1TlPqkv

 

Résidence habituelle en Suisse – 13 LPGA

Rente extraordinaire de l’AI non exportable – ALCP

 

Assurée, ressortissante suisse, présentant à la suite une hémorragie survenue à la naissance une hémiplégie congénitale gauche, un drainage ventriculo-péritonéal ainsi qu’une épilepsie partielle, associés à un déficit intellectuel modéré et une autonomie limitée. Vivant avec ses parents en France, elle a fréquenté à compter du mois de septembre 1998 différentes écoles spécialisées situées à Genève. L’Office AI pour les assurés résidant à l’étranger a contribué aux frais de formation scolaire spéciale jusqu’au 31.12.2007. De même a-t-il pris en charge les mesures médicales liées à l’infirmité congénitale, l’octroi de moyens auxiliaires ainsi que les frais de transport entre le domicile et les écoles fréquentées par l’assurée.

L’assurée est domiciliée dans le canton de Genève depuis le 01.02.2012, à l’adresse de F.__ (qui n’est pas un des parents). Interdiction prononcée et désignation, en qualité de co-tuteurs, d’une part, ses parents, BB. __ et CB. __, pour les aspects personnel, social et médical de la mesure et, d’autre part, F.__ pour les aspects administratifs et financiers de la mesure.

L’assurée a été admise à compter du 05.11.2012 au Centre de jour du foyer G.__ en qualité d’externe (avec deux nuits de dépannage par semaine).

Décision de l’office AI : octroi, en raison d’une impotence grave, d’une allocation pour mineur dès le 01.02.2012 puis d’une allocation pour adulte à compter du 01.11.2012.

Dépôt demande MOP ou rente AI le 06.09.2013. Projet de décision du 11.03.2014 : information à l’assurée que le droit à une rente (extraordinaire) de l’AI était nié, faute pour elle de s’être constituée un domicile en Suisse. Par courrier du 01.04.2014, l’office AI a précisé que, malgré l’absence de domicile en Suisse, il n’allait pas revenir sur les décisions qu’il avait rendues en matière d’allocation pour impotent, ajoutant que le déménagement de parents résidant en France à Genève pourrait suffire à admettre que leur enfant est domicilié en Suisse et, partant, ouvrir un droit aux prestations de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/201/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1TlNEzG)

Par jugement du 16.03.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Résidence habituelle en Suisse

En vertu de l’art. 13 LPGA, le domicile correspond au domicile civil selon les art. 23 à 26 CC (al. 1), tandis que la résidence habituelle correspond au lieu où la personne concernée séjourne un certain temps même si la durée de ce séjour est d’emblée limitée (al. 2; sur le caractère autonome de ces deux notions, voir Ueli Kieser, ATSG-Kommentar, 2e éd. 2009, n° 13 ss ad art. 13 LPGA; voir également le Rapport du 27 septembre 1990 de la Commission du Conseil des Etats sur l’initiative parlementaire « Partie générale du droit des assurances sociales » [FF 1991 II 181, 245 ch. 41] et le Rapport du 26 mars 1999 de la Commission du Conseil national de la sécurité sociale et de la santé sur l’initiative parlementaire « Droit des assurances sociales » [FF 1999 4168, 4198 ch. 52]).

Au sens des art. 13 al. 1 LPGA et 23 al. 1, 1ère phrase, CC, le domicile civil de toute personne est au lieu où elle réside avec l’intention de s’y établir. La notion de domicile contient deux éléments: d’une part, la résidence, soit un séjour d’une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits et, d’autre part, l’intention de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d’un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. L’intention de se constituer un domicile volontaire suppose que l’intéressé soit capable de discernement au sens de l’art. 16 CC. Cette exigence ne doit pas être appréciée de manière trop sévère (ATF 127 V 237 consid. 2c p. 240) et peut être remplie par des personnes présentant une maladie mentale, dans la mesure où leur état leur permet de se former une volonté (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 282/91 du 21 octobre 1992 consid. 2a). Le domicile d’une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l’ensemble des circonstances. Le lieu où les papiers d’identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales constituent des indices qui ne sauraient toutefois l’emporter sur le lieu où se focalise un maximum d’éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l’intéressé (ATF 136 II 405 consid. 4.3 p. 409 et les références).

Aux termes de l’art. 23 al. 1, 2ème phrase, CC, le séjour dans une institution de formation ou le placement dans un établissement d’éducation, un home, un hôpital ou une maison de détention ne constitue en soi pas le domicile. Lors du placement dans un établissement par des tiers, on devra donc exclure régulièrement la création d’un domicile à cet endroit, l’installation dans l’établissement relevant de la volonté de tiers et non de celle de l’intéressé. Il en va en revanche autrement lorsqu’une personne majeure et capable de discernement décide de son plein gré, c’est-à-dire librement et volontairement, d’entrer dans un établissement pour une durée illimitée et choisit par ailleurs librement l’établissement ainsi que le lieu de séjour. Dans la mesure où, lors de l’entrée dans un établissement qui survient dans ces circonstances, le centre de l’existence est déplacé en ce lieu, un nouveau domicile y est constitué. L’entrée dans un établissement doit aussi être considérée comme le résultat d’une décision volontaire et libre lorsqu’elle est dictée par « la force des choses » (Zwang der Umstände), tel le fait de dépendre d’une assistance ou d’avoir des difficultés financières (ATF 134 V 236 consid. 2.1 p. 239 et la référence).

Par résidence habituelle au sens de l’art. 13 al. 2 LPGA, il convient de comprendre la résidence effective en Suisse (« der tatsächliche Aufenthalt ») et la volonté de conserver cette résidence; le centre de toutes les relations de l’intéressé doit en outre se situer en Suisse (ATF 119 V 111 consid. 7b p. 117 et la référence). La notion de résidence doit être comprise dans un sens objectif, de sorte que la condition de la résidence effective en Suisse n’est en principe plus remplie à la suite d’un départ à l’étranger. En cas de séjour temporaire à l’étranger sans volonté de quitter définitivement la Suisse, le principe de la résidence tolère deux exceptions. La première concerne les séjours de courte durée à l’étranger, lorsque ils ne dépassent pas le cadre de ce qui est généralement admis et qu’ils reposent sur des raisons valables (visite, vacances, affaires, cure, formation); leur durée ne saurait dépasser une année, étant précisé qu’une telle durée ne peut se justifier que dans des circonstances très particulières. La seconde concerne les séjours de longue durée à l’étranger, lorsque le séjour, prévu initialement pour une courte durée, doit être prolongé au-delà d’une année en raison de circonstances imprévues telles que la maladie ou un accident, ou lorsque des motifs contraignants (tâches d’assistance, formation, traitement d’une maladie) imposent d’emblée un séjour d’une durée prévisible supérieure à une année (ATF 111 V 180 consid. 4 p. 182; voir également arrêt 9C_729/2014 du 16 avril 2015 consid. 3).

In casu, il n’y a pas lieu de considérer que l’assurée a son domicile civil et sa résidence habituelle en Suisse. Les démarches entreprises par les parents de l’assurée afin de lui constituer un nouveau domicile civil en Suisse n’y changent rien. Le dépôt des papiers le 01.02.2012 auprès de l’Office cantonal de la population ne constitue toutefois qu’un indice (cf. ATF 125 III 100 consid. 3 p. 102), insuffisant en l’espèce à établir la volonté de l’assurée de faire de la Suisse le centre de ses relations personnelles. Le lieu de résidence effective de ses parents, lieu où l’assurée dormait, passait son temps libre et laissait ses effets personnels (arrêt K 34/04 du 2 août 2005 consid. 3, in SVR 2006 KV n° 12 p. 38; voir également Christian Brückner, Das Personenrecht des ZGB, 2000, n. 319 ss p. 92), demeurait l’endroit avec lequel ses liens personnels étaient les plus intenses. Il importe à cet égard peu que l’assurée passait la majeure partie de son temps éveillé au Centre de jour du foyer. C’est également pour les mêmes raisons qu’il faut considérer que la résidence habituelle de l’assurée se situait en France.

La jurisprudence a précisé que la mise sous tutelle ne crée pas un domicile au siège de l’autorité tutélaire, s’il n’en existait pas déjà un avant la mesure tutélaire (ATF 135 V 249 consid. 4.4 p. 253). Ce principe continue à s’appliquer après l’entrée en vigueur, au 01.01.2013, des nouvelles dispositions sur la protection de l’adulte, singulièrement lorsqu’est instituée une curatelle de portée générale.

 

Dispositions de l’ALCP et des règlements communautaires

Sous le titre « Levée des clauses de résidence », l’art. 7 du règlement n° 883/2004 prévoit que les prestations en espèces dues en vertu de la législation d’un ou de plusieurs Etats membres ou du présent règlement ne peuvent faire l’objet, à moins que le présent règlement n’en dispose autrement, d’aucune réduction, modification, suspension, suppression ou confiscation du fait que le bénéficiaire ou les membres de sa famille résident dans un Etat membre autre que celui où se trouve l’institution débitrice.

Selon l’art. 70 par. 1 et 3 du règlement n° 883/2004, l’art. 7 du règlement n° 883/2004 et les autres chapitres du Titre III du règlement n° 883/2004 ne s’appliquent pas aux « prestations spéciales en espèces à caractère non contributif » relevant d’une législation qui, de par son champ d’application personnel, ses objectifs et/ou ses conditions d’éligibilité, possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale (art. 3 par. 1 du règlement n° 883/2004) et d’une assistance sociale. En vertu de l’art. 70 par. 4 du règlement n° 883/2004, ces prestations sont octroyées exclusivement dans l’Etat membre dans lequel la personne intéressée réside et conformément à sa législation; ces prestations sont servies par l’institution du lieu de résidence et à sa charge.

A teneur de la let. d de l’inscription de la Suisse à l’Annexe X du règlement n° 883/2004, constituent des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif les rentes extraordinaires non contributives en faveur d’invalides qui n’ont pas été soumis, avant leur incapacité de travail, à la législation suisse sur la base d’une activité salariée ou non salariée (au sens de l’art. 39 LAI).

La mention des rentes extraordinaires de l’assurance-invalidité au titre de prestations spéciales en espèces à caractère non contributif est nouvelle, puisqu’elle ne figurait pas dans l’annexe correspondante du règlement n° 1408/71 (Annexe IIbis). Dans le cadre de la mise à jour de l’Annexe II ALCP, la Confédération suisse a expressément demandé que les rentes extraordinaires de l’assurance-invalidité soient incluses dans la liste des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif (Proposition de la Commission européenne, du 28 juin 2010, de décision du Conseil relative à la position à adopter au nom de l’Union européenne au sein du comité mixte institué par l’accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d’une part, et la Confédération suisse, d’autre part, sur la libre circulation des personnes en ce qui concerne le remplacement de l’annexe II sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, p. 5 ss, document consultable à l’adresse: http://www.eur-lex.europa.eu [n° CELEX 52010PC0333]).

Afin de justifier sa position auprès des institutions européennes, la Confédération suisse a d’abord rappelé que pour pouvoir bénéficier d’une rente ordinaire de l’assurance-invalidité suisse, les personnes assurées devaient avoir versé des contributions pendant au moins trois ans au moment de la survenance de l’incapacité de travail. Les personnes handicapées depuis la naissance ou l’enfance ne pouvaient remplir cette condition, étant donné qu’elles étaient incapables de travailler avant d’atteindre l’âge à partir duquel les contributions étaient perçues. C’est pourquoi ces personnes avaient droit à une rente spéciale correspondant au montant de la rente d’invalidité ordinaire minimale. Cette rente était octroyée aux personnes de plus de 18 ans tant qu’elles vivaient en Suisse (proposition du 28 juin 2010 précitée, p. 8 et 9).

Selon les explications données par la Confédération suisse, il se justifiait d’inclure la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité dans la liste des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif, parce qu’elle remplissait tous les critères requis pour être considérée comme une prestation spéciale à caractère non contributif au sens de l’art. 4 par. 2bis du règlement n° 1408/71 et de la jurisprudence de la CJCE y relative. Il s’agissait tout d’abord d’une prestation hybride (à caractère mixte) : d’une part, elle présentait des caractéristiques propres à la sécurité sociale en ce sens que les intéressés avaient un droit clairement défini à cette prestation et qu’elle couvrait le risque d’invalidité; d’autre part, elle s’apparentait à l’assistance sociale, en ce qu’elle ne reposait pas sur des périodes d’activité ou de cotisation et qu’elle visait à atténuer un état de besoin en assurant un revenu minimal vital à un groupe socialement défavorisé (jeunes handicapés). La rente extraordinaire était ensuite une prestation spéciale, puisqu’elle constituait une allocation de remplacement destinée aux personnes qui ne remplissaient pas les conditions d’assurance pour obtenir une rente d’invalidité ordinaire; elle était étroitement liée au contexte socio-économique en Suisse, puisqu’elle correspondait à la pension minimale dans cet Etat. Enfin, la rente extraordinaire avait un caractère non contributif, parce qu’elle n’était pas financée par des contributions, mais exclusivement par la Confédération (proposition du 28 juin 2010 précitée, p. 8).

La proposition de modification de l’Annexe II ALCP a été entérinée par le Conseil de l’Union européenne le 6 décembre 2010 (JO L 209/1 du 17 août 2011). La modification a formellement été adoptée par la décision n° 1/2012 du 31.03.2012 du Comité mixte (institué par l’accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d’une part, et la Confédération suisse, d’autre part, sur la libre circulation des personnes) remplaçant l’annexe II dudit accord sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (RO 2012 2345 et JO L 103/51 du 13.04.2012).

In casu, il n’existe aucun motif de s’écarter des considérations émises par la Suisse au cours des travaux préparatoires qui ont conduit à l’adoption de la décision n° 1/2012 du Comité mixte du 31.03.2012 quant à la qualification de prestation spéciale en espèces à caractère non contributif de la rente extraordinaire d’invalidité non contributive en faveur d’invalides qui n’ont pas été soumis, avant leur incapacité de travail, à la législation suisse sur la base d’une activité salariée.

La rente extraordinaire de l’assurance-invalidité remplit tous les critères pour qu’elle puisse être considérée comme une prestation spéciale à caractère non contributif au sens de l’art. 70 par. 2 let. a point i du règlement n° 883/2004. Dans la mesure où elle n’est allouée que lorsque le droit à une rente ordinaire de l’assurance-invalidité n’est pas ouvert faute pour la condition de la durée minimale de cotisation d’être remplie (Meyer/Reichmuth, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3e éd. 2014, n° 1 ad art. 39 LAI), elle couvre, à titre de remplacement, le risque de l’invalidité (art. 3 par. 1 let. c du règlement n° 883/2004; sur la notion de remplacement, voir aussi Maximilian Fuchs, in Europäisches Sozialrecht, 6e éd. 2013, n° 11 ad art. 70 du règlement n° 883/2004), en permettant d’assurer, pour des considérations de nature économique et sociale, un revenu minimum aux personnes invalides de naissance ou depuis l’enfance qui n’ont jamais eu l’occasion de verser des cotisations jusqu’à l’ouverture du droit à la rente.

Le TF arrive à la conclusion que la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité ne fait pas partie des prestations soumises au principe de la levée des clauses de résidence définie à l’art. 7 du règlement n° 883/2004.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

ATF 141 V 530 consultable ici : http://bit.ly/1TlPqkv

Arrêt 9C_283/2015 consultable ici : http://bit.ly/1StP769

 

 

9C_381/2015 (f) pp du 17.12.2015 – Décision en constatation – 49 al. 2 LPGA / Pas d’exportation de la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité ni de l’allocation pour impotent – ALCP

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_381/2015 (f) du 17.12.2015, proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1ZPr9lb

 

Décision en constatation / 49 al. 2 LPGA

Pas d’exportation de la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité ni de l’allocation pour impotent – ALCP

Une assurée, au bénéfice d’une rente extraordinaire de l’assurance-invalidité, d’une allocation pour impotent de l’assurance-invalidité de degré moyen et de prestations complémentaires à l’assurance-invalidité, a interpellé la caisse de compensation afin de connaître ce qu’il adviendrait de ses prestations d’assurance en cas de départ de la Suisse pour l’étranger.

A la demande de l’assurée, la caisse de compensation a constaté formellement que les prestations actuellement allouées ne lui seraient plus versées en cas de départ à l’étranger ou de domicile partagé (six mois en Suisse et six mois à l’étranger).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 30.04.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Décision en constatation

En principe, l’objet d’une demande en justice ne peut porter que sur des questions juridiques actuelles dont les conséquences touchent concrètement le justiciable. Il est cependant admis qu’une autorité puisse rendre une décision en constatation si le requérant a un intérêt digne de protection à la constatation immédiate d’un rapport de droit litigieux (art. 49 al. 2 LPGA; voir également l’art. 25 al. 2 PA en corrélation avec l’art. 5 al. 1 let. b PA). Selon la jurisprudence, un tel intérêt n’existe que lorsque le requérant a un intérêt actuel, de droit ou de fait, à la constatation immédiate d’un droit, sans que s’y opposent de notables intérêts publics ou privés, et à condition que cet intérêt digne de protection ne puisse pas être préservé au moyen d’une décision formatrice, c’est-à-dire constitutive de droits et d’obligations (ATF 132 V 257 consid. 1 p. 259 et les références). Le juge retiendra un intérêt pour agir lorsqu’une incertitude plane sur les relations juridiques des parties et qu’une constatation judiciaire sur l’existence de l’objet du rapport pourrait l’éliminer. Une incertitude quelconque ne suffit cependant pas. Il faut bien plus qu’en se prolongeant, elle empêche le demandeur de prendre ses décisions et qu’elle lui soit, de ce fait, insupportable (ATF 122 III 279 consid. 3a p. 282, 120 II 20 consid. 3 p. 22).

In casu, l’assurée a entrepris des démarches, visant à clarifier une question de droit avant de prendre une décision pouvant être pour elle lourde de conséquences sur le plan financier et disposait d’un intérêt digne de protection à procéder de la sorte. En effet, le maintien de l’incertitude sur la poursuite du versement des prestations dont elle est actuellement la bénéficiaire ne pouvait que l’entraver dans sa liberté de décision, singulièrement dans son choix de quitter ou non la Suisse. Il semble par ailleurs difficilement concevable d’exiger de sa part qu’elle quitte la Suisse, pour provoquer la suppression de ses prestations et, partant, lui permettre de contester le bien-fondé de la suppression devant le juge.

 

Rente extraordinaire de l’assurance-invalidité non soumise au principe de l’exportation des prestations

Dans un arrêt 9C_283/2015 du 11.09.2015 destiné à la publication, le Tribunal fédéral a constaté que la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité, conformément à la mention qui en est faite à la let. d de l’inscription de la Suisse à l’Annexe X du règlement n° 883/2004, est une prestation spéciale en espèces à caractère non contributif au sens de l’art. 70 par. 2 let. a point i du règlement n° 883/2004, qui n’est pas soumise au principe de l’exportation des prestations tel qu’il est défini à l’art. 7 du règlement n° 883/2004. Financée exclusivement par la Confédération suisse, la rente extraordinaire de l’assurance-invalidité remplit tous les critères pour qu’elle puisse être considérée comme telle: dans la mesure où elle n’est allouée que lorsque le droit à une rente ordinaire de l’assurance-invalidité n’est pas ouvert faute pour la condition de la durée minimale de cotisation d’être remplie, elle couvre, à titre de remplacement, le risque de l’invalidité (art. 3 par. 1 let. c du règlement n° 883/2004), en permettant d’assurer, pour des considérations de nature économique et sociale, un revenu minimum aux personnes invalides de naissance ou depuis l’enfance qui n’ont jamais eu l’occasion de verser des cotisations jusqu’à l’ouverture du droit à la rente (consid. 7.3.3 et 7.4.2).

 

Pas d’exportation de l’allocation pour impotent

Les « prestations spéciales en espèces à caractère non contributif » relevant d’une législation qui possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale et d’une assistance sociale sont, en vertu de l’art. 70 par. 4 du règlement n° 883/2004, octroyées exclusivement dans l’Etat membre dans lequel la personne intéressée réside et conformément à sa législation. Ces prestations sont servies par l’institution du lieu de résidence et à sa charge.

Il n’y a pas lieu de déroger aux principes exposés au consid. 9 de l’ATF 132 V 423, lesquels conservent aujourd’hui encore toute leur pertinence. La prise en compte par le Tribunal fédéral, singulièrement l’application du principe de l’exportation des prestations de sécurité sociale à l’allocation pour impotent auraient pour effet d’entraîner l’abrogation par la voie judiciaire d’une partie de l’Annexe II à l’ALCP. Une décision du Tribunal fédéral en ce sens contreviendrait ainsi à la volonté clairement exprimée des parties contractantes de ne pas soumettre l’allocation pour impotent au principe de l’exportation des prestations de sécurité sociale. Ceci reviendrait également à remettre en cause la nature en soi statique de l’ALCP (art. 16 al. 2 ALCP; ATF 139 II 393 consid. 4.1.1 in fine p. 398) et faire fi, au mépris du principe de respect des traités (pacta sunt servanda; art. 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969 [RS 0.111]), des règles de compétence et de procédure définies par les parties contractantes pour procéder à la révision de l’accord et de ses annexes (art. 18 ALCP; ATF 132 V 423 consid. 9.5.5. p. 442).

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_381/2015 consultable ici : http://bit.ly/1ZPr9lb

 

NB : je ne saurai que conseiller au praticien de lire le développement du TF, aux consid. 6.1 à 6.5.2, fort détaillés.

 

9C_209/2015 (d) du 14.10.2015 – proposé à la publication – Traitement d’urgence à l’étranger (France) – Quote-part à charge de l’assuré selon le droit français et non le droit helvétique

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_209/2015 (f) du 14.10.2015 – proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Ses5gm

 

Traitement d’urgence à l’étranger (France)

Quote-part à charge de l’assuré selon le droit français et non le droit helvétique

24 LAMal – 34 LAMal – 64 LAMal – ALCP – Règl. CE 883/2004 – Règl. CE 988/2009

 

Résumé tiré de Assurance Sociale Actualités 23/15 du 09.11.2015

 

Une femme domiciliée et couverte par une assurance-maladie en Suisse devra payer de sa propre poche 20% des coûts d’un traitement hospitalier d’urgence subi en France. Le Tribunal fédéral a confirmé une décision du tribunal des assurances argovien en ce sens. Dans son arrêt, le Tribunal fédéral souligne que l’octroi de prestations dans le cadre de l’entraide internationale en matière de prestations a lieu selon le système juridique du pays concerné. Les assureurs-maladie suisses n’ont pas obligation de couvrir les coûts qui ne seraient pas pris en charge par l’assurance étrangère. Le montant qu’un assuré doit supporter peut varier en fonction du pays et de ses dispositions en matière d’assurance.

 

Arrêt 9C_209/2015 consultable ici : http://bit.ly/1Ses5gm

 

 

Des frontaliers suisses peuvent rejoindre la LAMal (arrêt du 29.01.2015, ATAS/58/2015)

Un arrêt de la Cour de justice genevoise permet à une habitante de Saint-Genis de réintégrer la couverture maladie suisse

Arrêt du 29 janvier 2015, ATAS/58/2015, Chambre des assurances sociales, consultable icihttp://bit.ly/1A58w04

 

Article paru dans Tribune de Genève, 06.03.2015, 20h39 : http://bit.ly/1Exm49I

 

Cet arrêt de la Chambre des assurances-maladie promet de faire du bruit de Genève à Paris. En substance, la Cour de justice genevoise autorise une Suissesse habitant Saint-Genis-Pouilly à réintégrer la LAMal. S’appuyant sur cette jurisprudence, des milliers de Suisses résidant en France voisine pourraient suivre le mouvement.

Revenons au point de départ: l’exercice du droit d’option. Pour s’assurer, le frontalier a le choix entre le régime français et le régime suisse. Jusqu’au 1er mai 2014, il pouvait même choisir une assurance privée française. Or, cette dernière option a pris fin et a entraîné le basculement obligatoire des frontaliers assurés dans le privé vers la Sécurité sociale française. Considérant que le droit d’option n’est en principe possible qu’une seule fois et qu’il est irrévocable, il s’avérait impossible pour les frontaliers de réintégrer la LAMal. Jusqu’à ce jour…

Refus de passer à la Sécu

Refusant de passer à la Sécu et désireuse de continuer à se faire soigner à Genève, une Suissesse du Pays de Gex a donc fait recours contre le Service de l’assurance-maladie (SAM) de Genève qui refusait a priori de la réintégrer. Son argumentation étant en substance la suivante: «Je n’ai jamais exercé ce droit d’option.» Le conseiller d’Etat chargé du Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé (DEAS), Mauro Poggia, résume: «La Cour devait se prononcer sur la question suivante: prendre une assurance privée française signifie-t-il de facto que l’on a exercé son droit d’option? La Chambre administrative a dit non.»

Résultat, tous les Suisses devenus frontaliers avant l’entrée en vigueur des bilatérales en 2002 et qui n’ont donc pas fait de déclaration au SAM pourraient demander à réintégrer la LAMal. «Le fait qu’ils aient souscrit une assurance privée en France ne peut plus leur être opposé», stipule Mauro Poggia. D’autres pourraient suivre.

Pour l’Etat de Genève, qui était en droit de faire recours contre un jugement lui donnant tort, le résultat est en vérité positif. «Cette décision rejoint notre intérêt», confirme Mauro Poggia. Celui qui, en tant que député au Grand Conseil et au Conseil national, s’était battu en faveur de la réouverture du droit d’option, sourit face à ce revirement de situation. Pour cause: des milliers de Suisses frontaliers pourraient revenir à la LAMal. Un gain humain et financier! En raison du retour des primes payées par lesdits frontaliers. Mais aussi grâce au retour de cette patientèle auprès des spécialistes genevois ou dans les établissements de soins. «La perte était estimée pour les HUG entre 20 et 25 millions de francs», rappelle Mauro Poggia.

Selon le conseiller d’Etat, au-delà des conséquences financières, c’est l’accès aux soins qui remporte ici une bataille. «Dans certains secteurs, l’absence de spécialistes ou l’éloignement des hôpitaux est tel qu’il paraît logique que les habitants aient accès à des soins à Genève.» A noter, les frontaliers assurés à la Sécu sont en droit de demander le remboursement de certains soins effectués en Suisse. «Mais au prix d’un long cheminement administratif», précise Mauro Poggia.

Réactions françaises?

C’est d’ailleurs ce point qui pourrait inciter les Suisses frontaliers à revenir vers la LAMal. Mais aussi, pour certains d’entre eux, le montant de leur prime. La cotisation à la Sécu s’élève à 8% du revenu fiscal de référence. Contre une prime allant de 350 à 900 francs par mois pour la LAMal, avec une franchise obligatoire de 300 francs. Pour les gros salaires, le calcul peut valoir la peine.

Le conseiller d’Etat va plus loin: «Il n’était pas logique de fermer la porte de nos hôpitaux, de nos assurances, qui plus est à des ressortissants suisses, sous prétexte qu’ils s’étaient installés de l’autre côté de la frontière. D’autant que nombre d’entre eux ont fait ce choix par défaut, parce qu’ils n’ont pas trouvé à se loger à Genève.» Et d’ajouter: «On parle beaucoup de cette région. Et même si je viens d’un parti qui pense que l’on doit d’abord regarder ce qui se passe chez nous, on ne peut pas nier l’existence de cette région et tout à coup ériger des murs!»

Reste à savoir comment le gouvernement français réagira à cet arrêt. «J’espère que cela ne tournera pas au conflit de compétences», insiste Mauro Poggia, rappelant que «la règle de base des accords bilatéraux est d’être assuré sur son lieu de travail». (TDG)

 

Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) – actualisation de l’annexe II

L’annexe II ALCP, qui coordonne les systèmes de sécurité sociale des Etats partenaires, a été actualisée afin de permettre à la Suisse d’appliquer les mêmes règles que les Etats de l’UE. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2015.

 

Article paru dans Sécurité sociale CHSS 1/2015 (édité par l’OFAS)

ALCP – actualisation de l’annexe II – Sécurité sociale CHSS 2015-1