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8C_832/2017 (f) du 13.02.2018 – Plausibilité de l’accident – 4 LPGA – 6 LAA / Constatations de fait et appréciation du juge pénal ne lient pas le juge des assurances sociales

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_832/2017 (f) du 13.02.2018

 

Consultable ici : http://bit.ly/2G2jizs

 

Plausibilité de l’accident / 4 LPGA – 6 LAA

Constatations de fait et appréciation du juge pénal ne lient pas le juge des assurances sociales

 

Assuré, né en 1955, employé administratif, a déclaré le 02.08.2016, via son employeur, qu’une dame lui avait porté un coup de couteau sur le pectoral droit en juin 2016, occasionnant une coupure du thorax. Après avoir été examiné, les médecins ont fait état d’une contusion thoracique antérieure T4-T5 et constaté un érythème d’environ 3×4 cm avec légère tuméfaction en regard du pectoral droit, bord interne du mamelon et une dermabrasion d’environ 0.5 cm, sans effraction cutanée franche, ni saignement actif.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a refusé d’allouer ses prestations au motif que l’assuré n’avait pas rendu plausible que les éléments d’un accident étaient réunis.

Parallèlement, l’assuré a déposé une plainte pénale pour voies de fait contre la dame susmentionnée, l’accusant d’être l’auteure du coup de couteau. Le Ministère public a rendu le 15.12.2016 une ordonnance de non-entrée en matière, considérant que l’enquête n’avait pas permis de confirmer les accusations et qu’il n’existait dès lors pas de soupçon suffisant pour une mise en accusation.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont considéré que l’assuré n’avait pas rendu plausible l’événement annoncé à son assureur-accidents. Les faits décrits ne reposaient sur aucun élément concret et étaient en contradiction avec les preuves matérielles récoltées par l’autorité pénale et les premières constatations des médecins. Ils n’ont ainsi pas jugé nécessaire de mener d’autres investigations.

Par jugement du 24.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Il incombe à celui qui réclame des prestations de l’assurance-accidents de rendre plausible que les éléments d’un accident sont réunis. S’il ne satisfait pas à cette exigence, en donnant des indications incomplètes, imprécises ou contradictoires, qui ne rendent pas vraisemblable l’existence d’un accident, l’assurance n’est pas tenue de prendre en charge le cas (ATF 116 V 136 consid. 4b p. 140 et les références).

Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales n’est certes pas lié par les constatations de fait et l’appréciation du juge pénal. Il ne s’en écarte cependant que si les faits établis au cours de l’instruction pénale et leur qualification juridique ne sont pas convaincants, ou s’ils se fondent sur des considérations spécifiques du droit pénal qui ne sont pas déterminantes en droit des assurances sociales (ATF 125 V 237 consid. 6a p. 242; voir aussi les arrêts 8C_392/2017 du 26 octobre 2017 consid. 7.2 et 8C_788/2016 du 20 novembre 2017 consid. 5.1).

Selon le TF, la juridiction précédente était fondée à considérer que l’assuré n’avait pas rendu plausible l’événement annoncé à son assureur-accidents.

Les faits établis au cours de l’instruction pénale s’avèrent convaincants : d’après les éléments recueillis, il n’existait aucun document ni aucun témoin permettant de corroborer les dires de l’assuré. La dame incriminée avait formellement contesté l’entier des allégations de l’intéressé et avait pu expliquer en détail son emploi du temps au moment des faits. Il paraissait en outre invraisemblable que celle-ci ait agressé l’assuré, dès lors que selon un rapport de la section d’identité judiciaire (SIJ), au moins deux coups distincts et perpendiculaires auraient été nécessaires pour reproduire la découpe présente sur la chemise de l’assuré, alors que celui-ci avait indiqué n’en avoir reçu qu’un seul. A ce propos, les explications fournies par l’assuré pour contester l’interprétation de la SIJ sont dénuées de toute pertinence.

De surcroît, ses déclarations lors de son audition du 22.08.2016 apparaissent contradictoires. Il se disait incapable de se souvenir du moindre détail concernant la description de son agresseur, notamment de la main dans laquelle celui-ci aurait tenu le couteau, mais pouvait en revanche certifier que la dame incriminée tenait dans sa main, en plus d’un couteau, une chainette munie de plusieurs crochets. L’assuré avait en outre donné ce jour-là des informations dont il n’avait pas fait mention le jour de sa prétendue agression. D’autre part, comme le relève le Ministère public dans son ordonnance, le constat de coups et blessures du 15.06.2016 ne mettait en évidence aucune lésion qui aurait pu être causée par un couteau, notamment aucune coupure ou blessure sanglante, ce qui n’est pas compatible avec la description que l’intéressé a faite de son agression et jette également le discrédit sur ses déclarations.

Vu ce qui précède, l’existence d’un accident au sens de l’art. 6 al. 1 LAA n’apparaît pas vraisemblable au degré requis par la jurisprudence. C’est à bon droit que la juridiction précédente a nié le droit de l’assuré aux prestations de l’assurance-accidents. Elle pouvait en outre, par appréciation anticipée des preuves, renoncer à procéder à d’autres investigations ou à suspendre la procédure.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_832/2017 consultable ici : http://bit.ly/2G2jizs

 

 

8C_229/2016 (f) du 09.11.2016 – Causalité naturelle pour troubles oculaires – rechute – 6 LAA – 11 OLAA / Vraisemblance prépondérante d’une érosion cornéenne – Fardeau de la preuve

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_229/2016 (f) du 09.11.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2kiCNMj

 

Causalité naturelle pour troubles oculaires – rechute – 6 LAA – 11 OLAA

Vraisemblance prépondérante d’une érosion cornéenne – Fardeau de la preuve

 

Assuré, travaillant en qualité d’électricien, a ainsi déclaré l’accident survenu le 25.06.2012 : « un fil électrique en tournant m’a blessé l’œil ». Les diagnostics de débris au canthus interne et de blépharite ont été posés par les médecins de l’hôpital ophtalmique. Le traitement consistait en un rinçage, un traitement antibiotique et une hydratation de l’œil.

Le 19.03.2013, l’assuré a informé l’assurance-accidents qu’il avait toujours des problèmes au niveau de son œil gauche. Dans un rapport du 12.02.2015, l’ophtalmologue-traitant a posé le diagnostic de probable érosion cornéenne gauche suite à l’accident du 25.06.2012. Sous la rubrique « Evolution », il a notamment indiqué: « pas d’érosion constatée objectivement ». La spécialiste de la division médecine des assurances a indiqué, le 17.03.2015, que l’on ne pouvait envisager de maladie à caractère récidivant en l’espèce puisqu’il n’y avait pas d’érosion de la cornée, mais uniquement une irritation provoquée par des particules étrangères. La problématique oculaire de l’assuré était en revanche attribuable à la blépharite, soit une inflammation chronique au bord des paupières. Par conséquent, il n’y avait pas de lien de causalité entre les troubles de l’assuré, constitutifs de la rechute déclarée, et l’événement accidentel initial.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a refusé d’allouer des prestations pour les troubles oculaires ayant fait l’objet d’un traitement chez l’ophtalmologue-traitant.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 95/15 – 21/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2iTlnFn)

Par arrêt du 04.02.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Les premiers juges ont estimé que les renseignements médicaux au dossier étaient suffisants et probants pour conclure qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre l’accident et les troubles de l’œil gauche réannoncés.

En cas de rechute ou de séquelle tardive, l’obligation de l’assureur-accidents de répondre de la nouvelle atteinte à la santé n’est pas donnée du seul fait que l’existence d’un lien de causalité naturelle entre l’atteinte initiale et un accident a été reconnue. Les conséquences de l’absence de preuve d’un tel lien entre la nouvelle atteinte et l’accident doivent être supportées par l’assuré qui requiert des prestations de l’assurance-accidents pour ladite atteinte (RAMA 1994 n° U 206 p. 328 consid. 3b; arrêt de l’ancien Tribunal fédéral des assurances U 192/06 du 10 avril 2007, consid. 3.3).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_229/2016 consultable ici : http://bit.ly/2kiCNMj

 

 

8C_895/2011 (f) du 07.01.2013 – Rechute – 11 OLAA / Coiffe des rotateurs – causalité naturelle / Lésion possible – vraisemblance prépondérante

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_895/2011 (f) du 07.01.2013

 

Consultable ici : http://bit.ly/1QmOPIP

 

Rechute – 11 OLAA

Coiffe des rotateurs – causalité naturelle / Lésion possible – vraisemblance prépondérante

 

Faits

D., né en 1955, travaillait comme monteur-électricien. Le 11 novembre 1999, au cours d’une manœuvre de déplacement d’un câble à fibres optiques, le manchon avait glissé du chemin de câbles et était venu heurter l’épaule droite de l’assuré. Incapacité de travail dès le 24 janvier 2000. Arthro-IRM le 19 janvier 2000, qui a mis en évidence un important remaniement sous-chondral ainsi qu’une tuméfaction de l’articulation acromio-claviculaire droite dont l’origine pouvait être traumatique, mais pas de déchirure de la coiffe des rotateurs ni de signe en faveur d’une déchirure des bourrelets glénoïdiens. Traitement conservateur. Reprise du travail 100% dès le 28 février 2000. L’assurance-accidents a clôturé le cas à cette date après que l’assuré a été vu par le médecin d’arrondissement de l’assurance-accidents.

Le 6 juillet 2009, annonce de rechute de l’accident du 11 novembre 1999, avec incapacité de travail totale. Une artho-IRM de l’épaule droite a montré une arthrose acromio-claviculaire. Arthroscopie le 28 juin 2010 : lésion de la coiffe des rotateurs aux dépens du tiers supérieur du sub-scapulaire, une tendinopathie du long chef biceps et un conflit sous-acromial. Appréciation du 17 janvier 2011 du médecin d’arrondissement : pas de relation de causalité probable entre les troubles constatés en 2009 et l’accident initial du 11 novembre 1999.

Décision du 18.01.2011 et DSO du 24.02.2011 : refus de prendre en charge la rechute.

 

Notion de la rechute en LAA

Selon la jurisprudence, il y a rechute lorsqu’une atteinte présumée guérie récidive, de sorte qu’elle conduit à un traitement médical ou à une (nouvelle) incapacité de travail. Les rechutes se rattachent par définition à un événement accidentel. Corrélativement, elles ne peuvent faire naître une obligation de l’assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s’il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l’intéressé et l’atteinte à la santé causée à l’époque par l’accident assuré (ATF 118 V 293 consid. 2c p. 296 et les références; RAMA 1994 n° U 206 p. 327 consid. 2).

 

Causalité naturelle et vraisemblance prépondérante

Le docteur L, qui a opéré l’assuré, a déclaré qu’une lésion de la coiffe des rotateurs à l’épaule droite pouvait être vue chez l’assuré aussi bien sur le cliché IRM réalisé en janvier 2000 que sur celui de juillet 2009. Il s’agissait toutefois d’une « constatation subtile », ce qui expliquait qu’elle était passée inaperçue. Une évolution lente de la lésion tendineuse était tout à fait possible. Chez une personne de moins de 55 ans, une lésion à la coiffe des rotateurs résultait généralement d’un traumatisme. A ses yeux, l’accident tel qu’il avait été décrit était susceptible de causer une telle atteinte. Sur la question de l’existence du lien de causalité, le docteur L. a répondu qu’un tel lien était possible à 50%. Il a également précisé que l’arthrose n’était pas responsable des douleurs ni de l’incapacité de travail.

Le premier médecin-traitant a observé qu’il avait peut-être posé le diagnostic initial de contusion de l’épaule droite un peu à la légère. L’arthrose était vraisemblablement due à l’accident initial puisque l’assuré ne présentait pas d’arthrose à l’épaule gauche. Le médecin traitant a également souligné que son patient lui avait confié avoir régulièrement souffert de son épaule droite depuis la survenance de l’accident.

Le médecin d’arrondissement a exprimé l’avis qu’une atteinte (partielle) de la coiffe des rotateurs sur le premier cliché IRM n’était ni établie ni exclue. Le fait que l’assuré avait déclaré être asymptomatique lors de l’examen médical final en mars 2000 et qu’il n’avait plus consulté pour des problèmes d’épaule jusqu’en 2009 ne correspondait pas à l’évolution généralement observée chez des patients souffrant d’une rupture traumatique du sous-scapulaire. Enfin, une contusion directe de l’épaule n’était pas le type de mécanisme propre à générer une rupture du tendon du sous-scapulaire.

Pour la lésion de la coiffe des rotateurs, l’on ne peut que constater que parmi les avis médicaux figurant au dossier, aucun ne va dans le sens d’une admission d’un tel rapport de causalité. Même le docteur L., qui disposait en tant que chirurgien traitant d’une connaissance exhaustive du cas de l’assuré, n’a pas abouti à la conclusion que la relation de causalité entre l’atteinte en cause et l’accident initial atteignait le seuil de la vraisemblance prépondérante. Il a dit qu’elle était possible, ce qui ne suffit pas pour fonder la responsabilité de l’assureur-accidents. En ce qui concerne l’origine de l’arthrose constatée sur l’IRM de 2009, cette atteinte restant sans conséquences invalidantes, l’assuré ne saurait prétendre de prestations d’assurance à ce titre.

 

 

Arrêt 8C_895/2011 consultable ici : http://bit.ly/1QmOPIP

 

 

8C_959/2011 (f) du 19.12.2012 – Causalité naturelle et adéquate – 6 LAA / Accident de type coup du lapin (HWS) sans tableau clinique – Possibilité ou vraisemblance prépondérante des lésions somatiques

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_959/2011 (f) du 19.12.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/20F8mij

 

Causalité naturelle et adéquate – 6 LAA

Accident de type coup du lapin (HWS) sans tableau clinique – Possibilité ou vraisemblance prépondérante des lésions somatiques

 

Faits

Le 26.06.2007, assuré – infirmier de métier – a été victime d’un accident, alors qu’il était passager avant d’un véhicule qui est sorti de la route et a heurté un pilier de béton à faible allure. Il s’est cogné au pare-brise et a subi une entorse cervicale bénigne, ainsi qu’un traumatisme crânien simple, sans perte de connaissance. Après examen par IRM 2 mois après : forte suspicion d’atteinte des ligaments inter-épineux D1-D2 et éventuellement des étages adjacents. L’assuré a suivi des séances de physiothérapie et d’ostéopathie. Il a été entièrement incapable de travailler depuis le 20.10.2007.

Par décision du 28.11.2008, confirmée par DSO du 03.06.2009, l’assurance-accidents a supprimé le droit de l’assuré à des prestations à partir du 01.12.2008, motif pris de l’absence d’un lien de causalité entre l’accident du 26.06.2007 et la symptomatologie douloureuse subsistant après le 30.11.2008.

 

Procédure cantonale

Expertise neurologique et orthopédique réalisée. Par jugement du 16.11.2011, la juridiction cantonale a réformé la décision sur opposition du 3 juin 2009 en ce sens que l’assureur-accidents est tenu d’allouer ses prestations au-delà du 30.11.2008 pour les suites de l’accident du 26.06.2007.

 

TF

Deux types de lésions subies par l’assuré ont été relevés, à savoir une hernie discale en D2-D3 et une lésion ligamentaire dans le complexe inter-épineux D1-D2. En ce qui concerne la hernie discale, la juridiction cantonale a considéré que l’ensemble des avis médicaux recueillis convergeaient en ce sens qu’un lien entre cette lésion et l’accident est seulement possible, ce qui ne suffit pas pour établir l’existence d’un rapport de causalité naturelle au degré de la vraisemblance prépondérante.

Pour ce qui a trait à la lésion ligamentaire inter-épineuse en D1-D2, les médecins-experts (expertise judiciaire) ont attesté que la lésion ligamentaire était probablement d’origine traumatique. Invités par le tribunal cantonal à se déterminer sur un rapport d’IRM du 20.11.2008, lequel n’avait pas été versé au dossier soumis aux experts, ceux-ci ont indiqué que la lésion ligamentaire inter-épineuse était effectivement guérie sur le vu du compte-rendu de l’IRM. Cependant, ils ont ajouté que l’assuré souffrait toujours de douleurs à la charnière cervico-dorsale et à la région dorsale haute, lesquelles pouvaient « être mises en lien de causalité » avec l’accident du 26.06.2007. La juridiction cantonale a inféré de cet avis médical qu’un lien de causalité naturelle et adéquate entre les lésions ligamentaires persistant après le 30.11.2008 et l’accident était établi.

Le fait que, selon les experts, la symptomatologie douloureuse peut « être mise en lien de causalité » avec l’accident ne fait apparaître un tel lien que comme une hypothèse possible ou envisageable parmi d’autres éléments de fait. Cela ne suffit toutefois pas pour considérer le lien de causalité comme établi au sens de la jurisprudence ci-dessus exposée. Quant à l’argument invoqué par l’assuré dans sa réponse au recours, selon lequel le verbe « pouvoir » dont se sont servis les experts n’a pas été utilisé pour exprimer une probabilité ou une éventualité, mais dans le sens de la capacité d’établir un lien de causalité, il n’est d’aucun secours pour l’intéressé. S’il était en effet apte à entraîner la symptomatologie douloureuse, l’accident ne constitue néanmoins qu’une cause envisageable parmi d’autres causes possibles et qui, partant, n’apparaît pas comme la plus probable.

 

Conclusion

L’existence d’un lien de causalité naturelle entre la symptomatologie douloureuse subsistant après le 30.11.2008 et l’accident doit être niée et l’assureur LAA était fondé à supprimer le droit de l’assuré à des prestations de l’assurance-accidents à partir du 01.12.2008.

 

 

Arrêt 8C_959/2011 consultable ici : http://bit.ly/20F8mij