Archives par mot-clé : Restitution

9C_643/2017 (f) du 26.01.2018 – Restitution de prestations indûment touchées – 35a al. 1 LPP / Versement anticipé non pris en compte dans le calcul des rentes versées – Réduction des prestations omise / Examen de la bonne foi dans la phase en relation avec la remise de l’obligation de restituer

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_643/2017 (f) du 26.01.2018

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées / 35a al. 1 LPP

Versement anticipé non pris en compte dans le calcul des rentes versées – Réduction des prestations omise

Examen de la bonne foi dans la phase en relation avec la remise de l’obligation de restituer

 

Assuré, né en septembre 1948, a conclu avec la Confédération suisse, représentée par la Caisse fédérale d’assurance (CFA), le 05.02.2001, un contrat de versement anticipé pour l’encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, portant sur un montant de 100’000 fr.; le versement est intervenu le 24.02.2001. La réduction des prestations de prévoyance résultant de ce versement figurait dans le contrat.

Conformément à une convention du 19.05.2010 relative à la retraite anticipée selon le plan social de la Confédération, l’assuré a été mis au bénéfice d’une retraite anticipée au 31.12.2010. La caisse de pensions Publica lui a alloué mensuellement une rente de vieillesse selon le plan social de 2’795 fr. 60 dès le 01.01.2011, ainsi que deux rentes pour enfant de 465 fr. 95 chacune et une rente transitoire de 2’320 fr., soit 6’047 fr. 50. En raison de la suppression de la rente transitoire, les prestations se montaient à 3’727 fr. 50 depuis le 01.10.2013.

Le 28.01.2015, en raison de son divorce, l’assuré a demandé à la caisse de pension de lui indiquer le montant de la prestation acquise avant son mariage célébré le 20.12.2001. Dans ce cadre, l’institution de prévoyance lui a fait savoir, le 26.05.2015, qu’elle avait constaté une erreur dans la prestation de sortie comptabilisée au moment du départ à la retraite, laquelle était de 300’607 fr. 40 au lieu de 443’978 fr. 60, découlant du fait que le versement anticipé de 100’000 fr. n’avait pas été porté correctement au débit du compte de prévoyance. Cette erreur s’était répercutée sur les prestations de vieillesse qui, adaptées dès le 01.07.2015, se montaient à 2’626 fr. 70 par mois, soit une rente de vieillesse de 1’970 fr. et deux rentes pour enfant de 328 fr. 35 chacune. Le trop-perçu entre le 01.01.2011 et le 30.06.2015, au total 59’443 fr. 20, devait lui être remboursé. L’assuré a invoqué sa bonne foi et contesté son obligation de rembourser.

 

Procédure cantonale

Le 17.12.2015, la caisse de pension a saisi le Tribunal cantonal des assurances d’une demande de remboursement des prestations de vieillesse indûment perçues dirigée contre l’assuré.

Par jugement du 18.07.2017, admission du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant l’assuré débiteur de la caisse de pension de la somme de 59’443 fr. 20, avec intérêts moratoires au taux de 2,75% du 17.12.2015 au 31.12.2015, 2,25% du 01.01.2016 au 31.12.2016, et 2% au minimum dès le 01.01.2017.

 

TF

Les rentes qui font l’objet de la demande en restitution n’ont pas été versées par la Confédération, ancien employeur de l’assuré, mais par la caisse de pension, cela dans le cadre de la prévoyance professionnelle régie par la LPP et les dispositions réglementaires. Le montant de la rente n’a pas été déterminé de manière définitive par la convention du 19.05.2010, celle-ci précisant que « [p]our les montants définitifs des rentes, seules les directives édictées par les assurances sociales sont applicables en cas de rentes ». Aussi, la caisse de pension était-elle tenue de calculer le montant des rentes selon les dispositions de la LPP et ses règlements, les montants indiqués dans la convention n’étant pas définitifs en ce sens qu’elle ne pouvait pas les modifier en cas d’erreur. Dans la mesure où la caisse de pension a versé des rentes trop élevées, elle est ainsi fondée à les réclamer, conformément aux règles instaurées par la LPP.

A cet égard, selon l’art. 35a al. 1 LPP, les prestations touchées indûment doivent être restituées. La restitution peut ne pas être demandée lorsque le bénéficiaire était de bonne foi et serait mis dans une situation difficile. D’après l’art. 72 al. 1 RPEC (règlement de prévoyance pour les personnes employées et les bénéficiaires de rentes de la Caisse de prévoyance de la Confédération), la personne qui accepte une prestation de Publica à laquelle elle n’a pas droit doit la rembourser avec les intérêts (annexe 1, ch. 4). A teneur de l’art. 72 al. 2 RPEC, Publica peut renoncer partiellement ou totalement au remboursement des prestations en présence de cas de rigueur ou pour des raisons d’économie administrative. La Commission de la caisse définit les modalités dans un règlement sur les cas de rigueur.

On doit admettre qu’une partie des rentes ont été indûment perçues, c’est-à-dire sans cause juridique valable. En effet, les montants des rentes ont été établis sur des bases erronées, dès lors que le versement anticipé de 100’000 fr. opéré en 2001 dans le cadre de l’acquisition d’un logement, qui aurait dû conduire à une réduction des prestations (cf. art. 30c al. 4 LPP), n’a pas été pris en considération dans le calcul des rentes. Il s’ensuit que la demande en remboursement du 17.12.2015 est fondée à juste titre sur les art. 35a al. 1 LPP, première phrase, et 72 al. 1 RPEC, étant précisé qu’il s’agit ici de rétablir une situation conforme au droit, indépendamment de toute faute de l’assuré ou de l’existence d’un éventuel dommage que la caisse de pensions aurait pu subir par l’erreur de comptabilisation des avoirs de libre passage lors de leur transfert en 2003. Dans ce contexte, le financement du plan social dont l’assuré avait jadis bénéficié de la part de l’employeur, de même que la capitalisation de Publica au début de son activité opérationnelle en 2003, n’ont aucune incidence sur l’issue du litige. Seul compte le fait que le bénéficiaire a reçu des rentes plus élevées auxquelles il avait droit si elles avaient été d’emblée fixées selon un état de fait établi correctement et une application correcte du droit.

 

Le grief tiré de la bonne foi de l’assuré ne lui est d’aucun secours, dans la mesure où dans le cadre de la restitution de prestations des assurances versées à tort, elle ne joue un rôle que dans une seconde phase, en relation avec la remise de l’obligation de restituer. Selon la jurisprudence rendue sur l’art. 25 LPGA, ou l’art. 47 al. 1 aLAVS, la bonne foi cède le pas sur le principe de la légalité : la restitution intervient dès qu’un versement a été fait sans cause juridique (ATF 122 V 134 consid. 2e p. 139; arrêt 9C_496/2009 du 10 juillet 2009 consid. 3; cf. ULRICH MEYER, Die Rückerstattung von Sozialversicherungsleistungen, in: Ausgewählte Schriften, Thomas Gächter (éd.), 2013, p. 145).

En tout état de cause, la caisse de pension devra examiner, conformément au consid. 4 du jugement attaqué (p. 15), s’il peut être renoncé à la restitution de tout ou partie du montant de 59’443 fr. 20 perçu à tort du 01.01.2011 au 30.06.2015, cela aux conditions de l’art. 72 al. 2 RPEC, ainsi que du règlement de Publica concernant les cas de rigueur, en relation avec l’art. 35a al. 1 LPP, seconde phrase.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_643/2017 consultable ici

 

 

8C_226/2019 (f) du 15.11.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Condition de l’importance notable – 25 LPGA – 95 LACI / Notion du salaire pris en considération comme gain assuré – Indemnités de trajet – 23 al. 1 LACI / Frais de déplacement au sens des art. 5 al. 2 LAVS et 9 al. 2 RAVS / Délai d’attente – 18 al. 1bis LACI – 6a al. 3 OACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_226/2019 (f) du 15.11.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Condition de l’importance notable / 25 LPGA – 95 LACI

Notion du salaire pris en considération comme gain assuré – Indemnités de trajet / 23 al. 1 LACI

Frais de déplacement au sens des art. 5 al. 2 LAVS et 9 al. 2 RAVS

Délai d’attente / 18 al. 1bis LACI – 6a al. 3 OACI

 

Assurée, née en 1973, mère de deux enfants, a occupé un poste de maître opticien pour B.__ SA à un taux d’activité de 50%, puis de 60%, du 01.09.2014 au 31.12.2017, date à laquelle a pris effet son licenciement. En parallèle, elle travaillait comme opticienne diplômée auprès de C.__ Sàrl à raison de quelques heures par mois. Pour cette activité, elle percevait, en sus de son salaire horaire, une indemnité de 65 fr. « par trajet », sur laquelle étaient également prélevées les cotisations sociales usuelles.

Le 04.12.2017, en raison de la perte de son activité principale, l’assurée s’est inscrite à l’office régional de placement, en indiquant être disposée à travailler à un taux d’activité de 60%. Elle a requis une indemnité de chômage à partir du 01.01.2018.

Selon un décompte de prestations du 14.02.2018, la caisse de chômage a alloué à l’assurée une indemnité nette de 3319 fr. 15 pour le mois de janvier 2018, en tenant compte d’un gain assuré de 4724 fr. et d’un gain intermédiaire brut de 375 fr. Le 05.03.2018, elle a transmis à l’assurée un nouveau décompte, rectifiant le précédent en ce sens que l’indemnité nette était fixée à 2498 fr. 70, compte tenu d’un gain assuré de 4827 fr., d’un gain intermédiaire brut de 505 fr. et d’un délai d’attente de cinq jours.

Par décision du 15.03.2018, confirmée sur opposition, la caisse de chômage a réclamé à l’assurée la restitution de 820 fr. 45, correspondant aux indemnités versées en trop pour le mois de janvier. La caisse de chômage a expliqué qu’elle avait omis dans un premier temps de prendre en compte les indemnités de trajet dans le calcul du gain assuré. Après rectification, le gain assuré mensuel avait été fixé à 5096 fr. par mois. Le gain assuré passant de 4988 fr. à 5096 fr., cela génère un délai d’attente de cinq indemnités journalières. Comme l’assurée avait cotisé sur la base d’un taux d’activité de 63,35% (60% auprès de B.__ SA et 3,35% auprès de C.__ Sàrl) et recherchait une activité à un taux de 60%, le gain assuré devait être réduit proportionnellement conformément à la perte de travail à prendre en considération. Aussi la caisse de chômage parvenait-elle à un résultat (arrondi) de 4827 fr. (5096 / 63,35 x 60).

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 96/18 – 28/2019 – consultable ici)

Pour la cour cantonale, les indemnités de trajet ne devaient pas être prises en compte dans le calcul du gain assuré. En effet, pour autant qu’ils ne soient pas versés durant les vacances, les suppléments pour inconvénients de service ne devaient pas être considérés comme un revenu déterminant pour le calcul du gain assuré. Comme l’indemnité de trajet n’était en l’espèce pas versée pendant les vacances, elle ne devait pas faire partie du gain assuré. Il en allait de même si on la considérait comme une indemnité de frais. En définitive, de l’avis de la cour cantonale, le premier décompte ne prêtait pas le flanc à la critique, de sorte que les prestations allouées sur cette base n’étaient pas indues. Les conditions d’une restitution de prestations n’étaient donc pas réalisées.

Par jugement du 19.02.2019, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, auquel renvoie l’art. 95 al. 1 LACI, les prestations indûment touchées doivent être restituées (première phrase). L’obligation de restituer suppose que soient réunies les conditions d’une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d’une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA; caractère sans nul doute erroné de la décision et importance notable de la rectification) de la décision par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 p. 260; 138 V 426 consid. 5.2.1 p. 431; 130 V 318 consid. 5.2 p. 320 et les références).

 

Selon l’art. 23 al. 1, 1ère phrase, LACI, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’AVS qui est obtenu normalement au cours d’un ou de plusieurs rapports de travail durant une période de référence, y compris les allocations régulièrement versées et convenues contractuellement, dans la mesure où elles ne sont pas des indemnités pour inconvénients liés à l’exécution du travail.

Le salaire pris en considération comme gain assuré se rapproche de la notion de salaire déterminant au sens de l’art. 5 al. 2 LAVS, mais ne se recouvre pas exactement avec celui-ci, comme cela ressort du terme « normalement » (« normalerweise » ; « normalmente ») utilisé à l’art. 23 al. 1 LACI (arrêt 8C_479/2014 du 3 juillet 2015 consid. 3.2; BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n° 8 ad art. 23 LACI). Certains montants perçus par le salarié, certes soumis à cotisation, n’entrent pas dans la fixation du gain assuré. Il en va ainsi notamment de la rémunération des heures supplémentaires (ATF 129 V 105), de l’indemnité de vacances (à certaines conditions: ATF 130 V 492 consid. 4.2.4 p. 497), des gains accessoires (art. 23 al. 3 LACI; ATF 126 V 207) ou des indemnités pour inconvénients liés aux travail ou en raison de frais occasionnés par le travail (art. 23 al. 1, première phrase, LACI; arrêts 8C_72/2015 du 14 décembre 2015; C 118/87 du 2 mai 1988).

 

Selon la législation sur l’AVS, à laquelle renvoie l’art. 23 al. 1 LACI, le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé; il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s’ils représentent un élément important de la rémunération du travail (art. 5 al. 2 LAVS). L’art. 9 al. 1 RAVS exclut du salaire déterminant le dédommagement pour les frais généraux encourus, à savoir les dépenses résultant pour le salarié de l’exécution de ses travaux. Selon l’art. 9 al. 2 RAVS, ne font pas partie des frais généraux les indemnités accordées régulièrement pour le déplacement du domicile au lieu de travail habituel et pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel; ces indemnités font en principe partie du salaire déterminant.

Les frais de déplacement au sens de l’art. 9 al. 2 RAVS concernent uniquement le déplacement du domicile au lieu de travail habituel. Une indemnité visant à compenser les déplacements professionnels à partir du siège de l’employeur et à dédommager les collaborateurs pour les inconvénients découlant d’une dépréciation accrue des voitures privées utilisées sur des chantiers ne tombe pas sous le coup de cette disposition et ne fait donc pas partie du salaire déterminant (cf. arrêt 8C_964/2012 du 16 septembre 2013 consid. 4.3.2; voir aussi arrêt 8C_310/2018 du 18 décembre 2018 consid. 7.4 à propos d’une indemnité servant notamment à couvrir les frais supplémentaires subis par le travailleur en raison des déplacements de l’atelier aux chantiers).

 

En l’espèce, l’indemnité de trajet était de 65 fr. par jour travaillé et n’était pas versée pendant les vacances. Le jugement attaqué ne donne pas davantage d’indications sur le trajet visé par l’indemnité. Il est toutefois constant que l’indemnité avait trait au déplacement entre le domicile de l’assurée et son lieu de travail. Partant, sur le plan de l’AVS, l’indemnité de trajet versée par l’employeur de l’assurée pour les jours travaillés fait sans conteste partie du salaire déterminant, en vertu de l’art. 9 al. 2 RAVS.

S’il est vrai que le gain assuré en matière d’assurance-chômage ne se recouvre pas exactement avec le salaire déterminant en matière d’AVS, l’ancien Tribunal fédéral des assurances a toutefois exclu du gain assuré par l’assurance-chômage des indemnités pour des repas qui ne tombaient pas sous le coup de l’art. 9 al. 2 RAVS (arrêt C 220/00 du 3 mai 2001 consid. 3c). Par la suite, le Tribunal fédéral a tenu un raisonnement comparable en ce qui concernait une allocation en remboursement de frais fixes incluant le remboursement de frais de véhicule, laquelle n’entrait pas non plus dans le champ d’application de l’art. 9 al. 2 RAVS (arrêt 8C_290/2014 du 20 mars 2015 consid. 3). A contrario, si les frais de déplacements (ou de repas) tombent sous le coup de l’art. 9 al. 2 RAVS – comme en l’espèce -, leur dédommagement doit en principe être pris en compte dans le calcul du gain assuré par l’assurance-chômage, conformément à la règle générale de l’art. 23 al. 1, 1ère phrase, LACI. A cela s’ajoute que l’indemnité de trajet en cause peut être considérée comme du salaire normalement obtenu dans la mesure où elle est allouée d’emblée pour chaque jour travaillé. En outre, elle n’a pas pour objet de compenser des inconvénients liés à l’exécution du travail, au sens de l’art. 23 al. 1 LACI. En effet, les frais de déplacement du domicile au lieu de travail ne sont pas liés à l’exécution du travail qui incombe à l’assurée. Par conséquent, l’absence de versement de l’indemnité pendant les vacances, sur laquelle s’est fondée la cour cantonale, ne constitue pas un critère pertinent en l’espèce (sur l’utilité de ce critère cf. arrêts 8C_72/2015 du 14 décembre 2015 consid. 4.3; 8C_370/2008 du 29 août 2009 consid. 3.2). La juridiction cantonale ne pouvait donc pas exclure l’indemnité de trajet du gain assuré.

 

En ce qui concerne enfin le délai d’attente, c’est à juste titre que la caisse de chômage l’a fixé en tenant compte du gain assuré « non réduit ». En effet, la réduction proportionnelle de l’indemnité de chômage visait à tenir compte de la perte de travail partielle. En revanche, le point de savoir si un assuré doit ou non être soumis à un délai d’attente s’apprécie indépendamment de la perte de travail à prendre en considération. Le Conseil fédéral a exempté certains groupes d’assurés du délai d’attente – notamment les assurés qui ont une obligation d’entretien envers des enfants de moins de 25 ans et dont le gain assuré se situe en dessous de 60’000 fr. par an – afin d’éviter des cas de rigueur (art. 18 al. 1bis LACI en relation avec l’art. 6a al. 3 OACI). Si, dans ce contexte, l’on pouvait tenir compte d’un gain assuré réduit en fonction de la perte de travail à prendre en considération, les assurés dont la perte de travail n’est que partielle seraient privilégiés par rapport à ceux dont la perte est totale. Par exemple, dans le cas d’espèce, l’assurée serait exemptée du délai d’attente (4827 fr. x 12), alors qu’elle y serait soumise si elle avait perdu ses deux emplois (5096 fr. x 12).

 

En conclusion, la caisse de chômage était fondée à rectifier son décompte de prestations et à demander la restitution des prestations versées en trop en raison de son erreur de calcul du gain assuré. Quant à la condition de l’importance notable, elle est remplie en l’espèce, dès lors que la somme de 820 fr. 45 réclamée représente près d’un tiers de l’indemnité de janvier 2018 (sur laquelle porte l’obligation de restitution) et que la caisse de chômage s’est rapidement rendu compte de son erreur (cf. arrêt C 205/00 du 8 octobre 2002 consid. 5, non publié in ATF 129 V 110 et les arrêts cités; voir aussi MARGIT MOSER-SZELESS, in Commentaire romand, Loi sur la partie générales des assurances sociales, 2018, n° 84 ad art. 53 LPGA).

 

Le TF admet le recours du SECO, annule le jugement cantonal et confirme la décision sur opposition de la caisse de chômage.

 

 

Arrêt 8C_226/2019 consultable ici

 

 

9C_110/2019 (f) du 22.07.2019 – Restitution de prestations complémentaires indûment touchées – 25 LPGA / Calcul de la prestation complémentaire pour un assuré résidant dans un home – 10 LPC / Prise en compte de l’allocation pour impotent dans le calcul des revenus déterminants / Prise en charge par la LAMal d’une partie des coûts des prestations de soins fournis par les EMS – Prestations de soins au sens de l’art. 7 OPAS

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_110/2019 (f) du 22.07.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations complémentaires indûment touchées / 25 LPGA

Calcul de la prestation complémentaire pour un assuré résidant dans un home / 10 LPC

Prise en compte de l’allocation pour impotent dans le calcul des revenus déterminants

Prise en charge par la LAMal d’une partie des coûts des prestations de soins fournis par les EMS – Prestations de soins au sens de l’art. 7 OPAS

 

Assuré, né en 1936 et marié, est au bénéfice d’une rente AVS. Il séjourne depuis le mois de février 2016 dans un établissement médico-social (EMS), reconnu d’utilité publique. A partir du mois d’octobre 2016, la caisse cantonale de compensation (ci-après : la caisse) lui a alloué des prestations complémentaires d’un montant de 2’067 fr. par mois (décision du 12.09.2016). Le 12.12.2016, la caisse a lui a reconnu le droit à une allocation pour impotent de degré moyen dès le 01.01.2017.

Par décision du 24.11.2017, confirmée sur opposition, la caisse a demandé à l’assuré la restitution d’un montant de 6’468 fr. correspondant aux prestations complémentaires versées en trop du 01.01.2017 au 30.11.2017. En bref, elle a considéré que l’intéressé ne lui avait pas annoncé toucher une allocation pour impotent depuis janvier 2017, de sorte que cette prestation n’avait à tort pas été prise en considération dans le calcul des prestations complémentaires ; aussi devait-elle reconsidérer « ses précédentes décisions » et fixer à nouveau les prestations en cause à 1’479 fr. par mois depuis le 01.01.2017, la différence d’avec les prestations versées devant être restituée par l’ayant droit.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.01.2019, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

 

Restitution de prestations indûment touchées

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. L’obligation de restituer les prestations accordées implique que soient réunies les conditions d’une reconsidération (cf. art. 53 al. 2 LPGA) ou d’une révision procédurale (cf. art. 53 al. 1er LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (ATF 130 V 318 consid. 5.2 p. 319 sv.). Conformément à l’art. 53 al. 2 LPGA, l’assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition entrées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable.

 

Calcul de la prestation complémentaire pour un assuré résidant dans un home

La prestation complémentaire annuelle (art. 3 al. 1 let. a LPC) correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants (art. 9 al. 1 LPC). Les allocations pour impotent des assurances sociales ne sont pas prises en compte (art. 11 al. 3 let. d LPC). Si la taxe journalière d’un home ou d’un hôpital comprend les frais de soins en faveur d’une personne impotente, l’allocation pour impotent de l’AVS, de l’AI, de l’assurance militaire ou de l’assurance-accidents sera prise en compte comme revenus (art. 15b OPC-AVS/AI).

Selon l’art. 10 al. 2 let. a, première et deuxième phrases, LPC, pour les personnes qui vivent en permanence ou pour une longue période dans un home ou dans un hôpital (personnes vivant dans un home ou un hôpital), les dépenses reconnues comprennent la taxe journalière; les cantons peuvent fixer la limite maximale des frais à prendre en considération en raison du séjour dans un home ou dans un hôpital.

Pour l’année 2017, le Conseil d’Etat de la République et canton de Neuchâtel a fixé à 122 fr. 80 la taxe d’hébergement dans les EMS, soit la limite maximale à prendre en considération en raison du séjour dans un tel établissement. Cette taxe est augmentée, en cas de séjour dans un EMS reconnu LAMal, de la participation au coût des soins à charge des résidents fixé dans l’arrêté y relatif.

Pour l’année 2017, le Conseil d’Etat de la République et canton de Neuchâtel a fixé le « prix de pension » pour l’EMS en question à 157 fr. 60 pour une chambre à deux lits et à 172 fr. 60 pour une chambre à un lit. Toujours pour l’année 2017, la part à charge des résidents des tarifs journaliers des soins de longue durée au sens de l’art. 25a LAMal dispensés en EMS a été fixée à 21 fr. 60 par jour pour les « autres degrés de soins » (supérieurs au degré de soins 3) par le Conseil d’Etat neuchâtelois.

 

Prise en compte de l’allocation pour impotent dans le calcul des revenus déterminants

L’introduction de l’exception au principe selon lequel l’allocation pour impotent n’est pas prise en compte dans le calcul des revenus déterminants pour fixer le montant de la prestation complémentaire remonte à l’entrée en vigueur, le 1er janvier 1987, de la deuxième révision de la loi du 19 mars 1965 sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 19 mars 1965 (aLPC). Cette révision a entrainé des modifications de l’ordonnance du 15 janvier 1971 sur les prestations complémentaires à l’AVS/AI (OPC, puis OPC-AVS/AI; RS 831.301). En particulier, l’art. 1a OPC a été adapté pour régler le calcul des prestations complémentaires lorsqu’il s’agit de personnes demeurant dans des homes ou des établissements hospitaliers. Cette modification faisait suite à celle de l’art. 3 al. 4 let. e aLPC quant à la déduction des « frais de home » du revenu déterminant et de l’art. 3 al. 4bis, 2ème phrase, aLPC, selon lequel le Conseil fédéral précise notamment « les frais de home » qui peuvent être déduits (Modification de la LPC du 4 octobre 1985 [2e révision de la LPC], RO 1986 699).

Aux termes de l’art. 1a al. 5 OPC, « si la taxe journalière du home ou de l’établissement hospitalier comprend également les frais de soins en faveur d’une personne impotente, l’allocation pour impotent de l’AVS, de l’AI ou de l’assurance-accidents ainsi que la contribution aux soins spéciaux au sens de l’art. 20, 1er alinéa, LAI seront ajoutées au revenu » (Modification de l’OPC du 16 juin 1986, entrée en vigueur le 1er janvier 1987; RO 1986 1204 s.). Selon les explications de l’OFAS, l’allocation pour impotent de l’assurance sociale est ajoutée au revenu si la taxe journalière du home comprend également les frais de soins. Lorsqu’un home facture séparément le montant de cette allocation, ces frais ne sont pas pris en compte, de même que l’allocation (Commentaires sur les modifications de l’OPC, in RCC 1986 p. 391 s.).

Ce n’est que lors de la troisième révision de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 1998 (RO 1997 2952, 2960), que la compétence du Conseil fédéral de déterminer à quelles conditions les allocations pour impotent (alors de l’AVS ou de l’AI) doivent être prises en compte comme revenu a été expressément inscrite dans la loi (art. 3c al. 3 aLPC; Modification de la LPC du 20 juin 1997, RO 1997 2952, 2955 s.). Il s’agissait de maintenir l’exception au principe d’une non-prise en compte de l’allocation pour impotent à titre de revenu, qui reposait sur la compétence accordée par l’art. 3 al. 4bis aLPC au Conseil fédéral de préciser les frais de home qui pouvaient être déduits (Message du Conseil fédéral concernant la troisième révision de la LPC [3e révision PC] du 20 novembre 1996; FF 1997 I 1137, ch. 221, p. 1154 et ch. 62, p. 1162). Cette compétence est désormais prévue à l’art. 11 al. 4 LPC, tandis que les conditions de la prise en considération des allocations pour impotent des assurances sociales sont définies par l’art. 15b OPC-AVS/AI (qui a repris la règle de l’art. 1a al. 5 OPC-AVS/AI à la suite de la 3ème révision de la LPC [Modification de l’OPC-AVS/AI du 26 novembre 1997, entrée en vigueur le 1er janvier 1998; RO 1997 2952, 2964]).

L’allocation pour impotent est allouée aux personnes qui sont impotentes au sens de l’art. 9 LPGA, soit celles qui, en raison d’une atteinte à la santé, ont besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne. Il s’agit d’une prestation en espèces dont le montant est déterminé en fonction des besoins personnels concrets d’aide et de surveillance déterminant le degré de gravité de l’impotence (léger, moyen ou grave; cf. art. 42ter LAI et art. 37 RAI), indépendamment des coûts effectifs des prestations de tiers et de l’étendue réelle de ces prestations. L’allocation pour impotent a pour fonction de couvrir les coûts supplémentaires des prestations d’assistance nécessitées par l’impotence et ne sert pas à la couverture des besoins vitaux. Elle ne doit donc en principe pas être prise en considération à titre de revenu déterminant dans le calcul des prestations complémentaires. L’art. 15b OPC-AVS/AI (en relation avec l’art. 11 al. 4 LPC) prévoit cependant une exception à ce principe lorsque l’application de celui-ci conduirait en quelque sorte à une double couverture des coûts de l’impotence. Il s’agit des situations dans lesquelles les frais de l’assistance due à l’impotence entrent dans le calcul des prestations complémentaires en tant que dépenses reconnues au sens de l’art. 10 LPC. Tel est le cas pour une personne qui séjourne dans un home (au sens de la LPC) et bénéficie d’une allocation pour impotent, lorsque les coûts des prestations du home en raison de l’impotence surviennent de manière régulière et lui sont facturées – en tant que composante de la taxe journalière – de manière forfaitaire.

Pour la « taxe journalière » mentionnée à l’art. 10 al. 2 let. a LPC, aucune distinction n’est faite entre la part de la taxe journalière qui couvre les coûts des besoins vitaux et du logement et la part qui repose sur les prestations d’assistance liées à l’impotence. Si, dans une telle situation, l’allocation pour impotent n’était pas prise en compte comme revenu, les coûts de l’impotence seraient doublement couverts, premièrement par le biais de cette allocation et deuxièmement par le biais des prestations complémentaires, sur la base de la taxe journalière. Le but de l’art. 15b OPC-AVS/AI est donc d’éviter un cumul indésirable de prestations: les prestations complémentaires sont « réduites » dans la mesure où l’allocation pour impotent de la personne résidant dans un home est comptée comme revenu, lorsque la taxe journalière doit également couvrir les coûts des prestations d’assistance nécessaires liées à l’impotence (sur l’ensemble de la question, RALPH JÖHL/PATRICIA USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3ème éd. 2016, p. 1917 n° 230). Du moment que les coûts pour les soins de la personne impotente sont compris dans la taxe journalière du home, l’allocation pour impotent doit être prise en considération en tant que revenu (STEFAN WERLEN, Der Anspruch auf Ergänzungsleistungen und deren Berechnung, 1995, p. 238 s.).

 

Prise en charge par la LAMal d’une partie des coûts des prestations de soins fournis par les EMS

Depuis l’introduction du nouveau régime de financement des soins, le 1er janvier 2011 (Loi fédérale du 13 juin 2008 sur le nouveau régime de financement des soins [RO 2009 3517]), les assureurs-maladie prennent en charge une partie des coûts des prestations de soins fournis par les EMS à hauteur d’un forfait déterminé en fonction du besoin en soins du résident (art. 25a al. 1 et 3 LAMal en relation avec les art. 33 let. b OAMal, art. 7 al. 1 let. c et al. 2 et art. 7a al. 3 OPAS). Les assureurs-maladie doivent verser 9 fr. par jour pour 20 minutes de soins, soit 108 fr. au maximum (niveau 12 de soins « plus de 220 minutes de soins requis »). Conformément à l’art. 25a al. 5 LAMal (dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2018), seul au maximum 20 % de ce montant, soit 21 fr. 60 par jour (20 % de 108 fr.), peuvent être facturés aux résidents au titre des soins définis à l’art. 7 al. 2 OPAS; il incombe aux cantons de régler le financement résiduel des soins (sur ce point, ATF 144 V 280).

Les soins prévus par l’art. 7 OPAS comprennent aussi les « soins de base généraux pour les patients dépendants, tels que (…) aider aux soins d’hygiène corporelle et de la bouche, aider le patient à s’habiller et à se dévêtir, ainsi qu’à s’alimenter. » (art. 7 al. 2 let. c OPAS). Or ce type de soins, à l’inverse des prestations selon l’art. 7 al. 2 let. a et b OPAS, comprend des mesures qui sont en relation directe avec l’impotence du patient, dès lors qu’elles servent à aider ou à surveiller la personne impotente pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne. Selon la jurisprudence, même si l’allocation pour impotent de l’AVS/AI et les prestations de soins de l’assurance-maladie obligatoire prévues à l’art. 7 al. 2 OPAS sont de nature foncièrement différente – la première étant une prestation en espèces calculée indépendamment du coût effectif des services fournis par des tiers mais en fonction du degré d’impotence, tandis que les secondes sont des prestations en nature sous la forme d’un remboursement tarifaire des frais effectifs occasionnés par les soins administrés -, les prestations comprenant les soins de base de l’art. 7 al. 2 let. c OPAS se recoupent avec celles qui sont couvertes par l’allocation pour impotent. Les soins de base comprennent cependant aussi des mesures liées à la (seule) maladie, tandis que l’allocation pour impotent sert également à couvrir les coûts de prestations de tiers qui ne font pas partie des prestations de soins de l’assurance-maladie, comme l’établissement ou l’entretien de contacts avec l’entourage. Un cumul des prestations de soins de base au sens de l’art. 7 al. 2 let. c OPAS et de l’allocation pour impotent est donc admissible, sous réserve d’une surindemnisation; celle-ci n’entre pas en considération du moment que le montant de l’allocation pour impotent est moins élevé que l’ensemble des coûts dus à l’impotence et supportés par la personne assurée (arrêts 9C_886/2010 du 10 juin 2011 consid. 4 et 9C_43/2012 du 12 juillet 2012 consid. 2; ATF 125 V 297 consid. 5 p. 304 ss; 127 V 94 consid. 3 et 4 p. 96 ss; cf. aussi GEBHARD EUGSTER, Krankenversicherung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3ème éd. 2016, p. 522 n° 380).

 

Sous l’angle des prestations complémentaires, il y a lieu de constater que l’assistance couverte par l’allocation pour impotent ne se recoupe que partiellement avec les prestations de soins au sens de l’art. 7 OPAS, de sorte qu’on ne saurait admettre, de manière générale, que la participation au coût des soins à charge de la personne assurée au sens de l’art. 25a LAMal correspond aux prestations fournies par le personnel de l’EMS en raison de l’impotence.

En d’autres termes, une partie de l’assistance apportée en l’espèce à l’assuré par le personnel de l’EMS correspond à des prestations de soins qui ne sont pas prises en charge par l’assurance-maladie (ni par l’assuré, à raison de 20 % au maximum). On peut parler, à cet égard, de prestations d’assistance, qui comprennent les prestations de soins en EMS qui ne sont pas couvertes par l’assurance-maladie et ne ressortissent pas non plus aux prestations d’hôtellerie, lesquelles recouvrent toutes les prestations de l’EMS liées à l’hébergement (sur l’ensemble des prestations fournies et facturées aux résidents des EMS en Suisse, voir le Rapport de la Surveillance des prix [SPR], décembre 2018 [consulté sous https://www.preisueberwacher.admin.ch, sous Thèmes, Homes médicalisés], ci-après Rapport SPR, p. 2 ss).

Du point de vue des tarifs des EMS fixés par le canton de Neuchâtel, on constate que la réglementation cantonale ne fait pas de distinction entre la taxe liée aux prestations d’hôtellerie et la taxe relative à l’assistance, mais fixe un tarif de séjour global (cf. aussi, Rapport SPR, p. 6 ch. 4). En effet, la prestation socio-hôtelière de base comprend toutes les prestations fournies aux résidents par les EMS, hormis les prestations journalières LAMal et les prestations spécifiques, conformément aux art. 18, 20 et 21 de la loi de la République et canton de Neuchâtel sur le financement des établissements médico-sociaux du 28 septembre 2010 (RSN 832.20; LFinEMS).

Le « prix de pension » de 172 fr. 60 par jour pour la Résidence B.__ SA, en chambre individuelle, couvre donc également certaines prestations d’assistance liées à l’impotence de l’intimé qui sont fournies par le personnel de l’EMS (et ne relèvent pas de l’assurance-maladie obligatoire). Par conséquent, les frais de l’assistance due à l’impotence sont comprises de manière forfaitaire dans la taxe journalière et sont, de ce fait, prises en compte dans le calcul des prestations complémentaires en tant que dépenses reconnues, tout comme, du reste, les prestations journalières LAMal au sens de l’art. 25a LAMal. Aussi, l’allocation pour impotent allouée à l’intimé depuis le 01.01.2017 doit-elle être, en contrepartie considérée exceptionnellement comme un revenu, en application de l’art. 15b OPC-AVS/AI.

L’allocation pour impotent devait être prise en considération dans le calcul des prestations complémentaires de l’assuré pour la période courant depuis le 01.01.2017, de sorte que celui-ci a perçu des prestations en trop entre cette date et le 30.11.2017, à hauteur d’un montant qui n’est pas contesté en tant que tel. La caisse de compensation était donc en droit d’en demander la restitution, conformément à l’art. 25 al. 1, 1ère phrase, LPGA.

 

C’est le lieu de préciser que le point de savoir si l’assuré a violé son obligation de renseigner quant au versement de l’allocation pour impotent n’a aucune influence sur l’issue du présent litige, l’obligation de restituer des prestations complémentaires en cas de versement ultérieur d’une prestation considérée comme un revenu n’étant pas liée à une violation de l’obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2 p. 139; arrêt 8C_689/2016 du 5 juillet 2017 consid. 3.1). Cette question joue en revanche un rôle pour la remise de l’obligation de restituer au sens de l’art. 25 al. 1, 2ème phrase, LPGA, qui doit faire l’objet d’une procédure séparée (arrêt 8C_804/2017 du 9 octobre 2018 consid. 2 in fine et les arrêts cités). Il appartiendra à la caisse de la trancher en premier lieu, pour autant que l’assuré lui demande en temps voulu la remise de son obligation de restituer à la suite du présent arrêt (cf. art. 4 al. 3 OPGA).

 

Le TF admet le recours de la caisse cantonale de compensation, annule le jugement cantonal et confirme la décision sur opposition de la caisse de compensation.

 

 

Arrêt 9C_110/2019 consultable ici

 

 

8C_684/2018 (f) du 17.04.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Bonne foi de l’assuré accordée

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_684/2018 (f) du 17.04.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer / 25 LPGA

Bonne foi de l’assuré accordée

 

Assuré, né en 1966, a été licencié, avec effet au 31.03.2012, de son emploi de livreur, exercé à 50%. Parallèlement à cette activité, l’intéressé exerçait celle de concierge à un taux de 25% pour le compte de la Société C.__. Le 09.02.2012, il a déposé une demande d’indemnité de chômage en indiquant être disposé à travailler à un taux de 50%. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert du 01.04.2012 au 31.03.2014.

A la demande du gestionnaire en charge du dossier auprès de la caisse de chômage, l’assuré a fait parvenir à cette dernière, le 10.04.2012, une copie de son contrat de travail de conciergerie ainsi que les fiches de salaire y afférentes pour les mois de février et mars 2012. Par pli du 11.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a en outre invité l’assuré à lui faire parvenir le formulaire « confirmation d’inscription » remis par l’Office régional de placement (ORP), avec un taux de 75%. Il justifiait sa requête par ces termes écrits ultérieurement à la main et figurant au bas de cette lettre: « cet assuré avait un emploi à 50% + un autre à 25% qui continue ». Par courriel du 17.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a confirmé à la conseillère en placement de l’assuré que ce dernier devait être inscrit à 75%. Le 19.04.2012, le gestionnaire de la caisse de chômage a informé l’assuré que son gain assuré avait été fixé à 3’805 fr. et son indemnité journalière à 140 fr. 30 brut. Sur les formulaires « Indications de la personne assurée » (IPA) d’avril à décembre 2012, l’assuré a indiqué avoir travaillé au service de E.__. De janvier 2013 à juillet 2013, il a mentionné avoir œuvré pour le compte de F.__ SA puis, dès le mois de février 2013 jusqu’en juillet 2013, il a déclaré avoir travaillé pour la société G.__.

A la suite d’une révision du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) des 8-10 juillet 2013, la caisse de chômage a invité la société C.__ [employeur de l’activité de concierge] à lui transmettre les formulaires « Attestation de gain intermédiaire » concernant l’assuré pour les mois d’avril 2012 à juin 2013 ainsi qu’une copie des fiches de salaire pour la même période. Par décision, la caisse de chômage a réclamé à l’assuré la restitution de 15’476 fr. 05, correspondant au montant des prestations versées en trop en raison de « la non-prise en considération de [son] emploi mensuel provenant de [son] activité de concierge non professionnel à 25% ainsi que [des] vacances et 13ème salaire auprès de la société G.__ ».

Dans une première procédure, la décision de la caisse de chômage a été confirmée (arrêt 8C_689/2016 du 5 juillet 2017).

Le 03.08.2017, l’assuré a déposé une demande de remise de l’obligation de restituer. Le Service de l’emploi du canton de Vaud (SDE) a refusé d’accorder la remise, au motif que l’assuré ne pouvait pas se prévaloir de sa bonne foi.

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 86/18 – 156/2018 – consultable ici)

En substance, la cour cantonale a retenu que l’assuré avait également fait régulièrement mention de son activité pour le compte de la société C.__ lors d’entretiens à l’ORP. En omettant d’inscrire cette activité dans les formulaires IPA, l’assuré avait pu être amené à comprendre – que ce soit de son propre chef ou sur la base d’indications (erronées) fournies par l’administration – que ces formulaires ne concernaient que les activités entreprises après le chômage, à l’exclusion de son activité de concierge conservée à 25%. Dans tous les cas, la caisse ne pouvait pas considérer les formulaires IPA de manière isolée en faisant abstraction des indications données par l’assuré lors de l’exercice du droit à l’indemnité.

Par jugement du 29.08.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, la cause étant renvoyée au SDE pour complément d’instruction au sens des considérants et nouvelle décision.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 9C_638/2014 du 13 août 2015 consid. 4.1).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. On parlera de négligence grave lorsque l’ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (cf. ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181). On peut attendre d’un assuré qu’il décèle des erreurs manifestes et qu’il en fasse l’annonce à la caisse (cf. arrêt 9C_189/2012 du 21 août 2012 consid. 4 et les références). En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s.; 112 V 97 consid. 2c p. 103; 110 V 176 consid. 3c p. 180). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223; 102 V 245 consid. b p. 246).

En l’espèce, on doit admettre avec la cour cantonale qu’en omettant d’inscrire son activité de concierge dans les formulaires IPA, l’assuré a commis une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner. En effet, l’assuré a annoncé tant à l’ORP qu’à la caisse qu’il exerçait une activité de concierge à 25%. Celle-ci avait d’ailleurs admis, lors de la procédure fédérale précédente – portant sur la question de la restitution – avoir commis une erreur en omettant de faire une notice de rappel dans le dossier de l’assuré, selon laquelle celui-ci conservait son emploi de concierge (cf. arrêt 8C_689/2016 du 5 juillet 2017). Partant, si l’assuré était certes tenu d’indiquer cette activité dans les formulaires IPA, la caisse disposait néanmoins de toutes les indications nécessaires au dossier concernant la poursuite de l’emploi au sein de la société C.__ pour déterminer correctement le droit à l’indemnisation. L’assuré a raisonnablement pu penser que l’emploi de concierge qu’il exerçait déjà à 25% avant son inscription au chômage était considéré comme un gain accessoire et n’était pas pris en considération dans l’indemnisation, celle-ci ne portant que sur la disponibilité restante de 75%. Un indice sérieux dans ce sens réside dans le fait qu’il a dûment indiqué chaque mois tous les autres emplois réalisés à titre de gains intermédiaires. Par ailleurs, il sied de préciser qu’entre le mois d’avril 2012 et le mois de juin 2013, l’assuré a exercé, en sus de son emploi au sein de la société C.__, plusieurs activités en gains intermédiaires à un taux variable pour le compte d’employeurs différents et qu’il a reçu des indemnités journalières de la caisse dont le montant a varié chaque mois de manière considérable. Au demeurant, le fait que la caisse a demandé à l’assuré deux mois après son inscription à 50% d’augmenter le taux d’activité recherché à 75% a pu créer une confusion chez ce dernier.

Vu ce qui précède, la cour cantonale a retenu à juste titre que l’omission de l’assuré ne constituait pas une négligence grave de nature à exclure sa bonne foi.

 

Le TF rejette le recours du Service de l’emploi.

 

 

Arrêt 8C_684/2018 consultable ici

 

 

9C_16/2019 (f) du 17.04.2019 – Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Obligation de communiquer les activités exercées – 31 al. 1 LPGA – 77 RAI / Bonne foi de l’assuré niée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 (f) du 17.04.2019

 

Consultable ici

 

Restitution de prestations indûment touchées – Remise de l’obligation de restituer / 25 LPGA

Obligation de communiquer les activités exercées / 31 al. 1 LPGA – 77 RAI

Bonne foi de l’assuré niée en raison de la négligence grave

 

Par décision, l’office AI a supprimé la rente d’invalidité dont bénéficiait l’assuré avec effet rétroactif au 01.06.2006. Cette décision a été confirmée par les instances cantonale et fédérale de recours (cf. arrêt 9C_107/2017 du 08.09.2017).

L’office AI a réclamé par décision du 22.12.2015 à l’assuré le remboursement de la somme de 179’524 fr. représentant les prestations versées à tort du 01.12.2010 au 31.10.2015.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1028/2018 – consultable ici)

Selon les constatations de la cour cantonale, l’assuré avait non seulement omis d’indiquer à l’office AI qu’il avait repris une activité, mais il avait de plus nié exercer une activité accessoire dans les questionnaires de révision en 2006, 2011 et 2014.

La cour cantonale a considéré qu’un assuré ne pouvait pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, constituait une modification de sa situation susceptible d’entraîner la suppression de la prestation et que le bénéficiaire avait dès lors l’obligation de l’annoncer. A tout le moins, l’assuré devait s’en douter et se renseigner auprès de l’office AI. Pour les juges cantonaux, la négligence dont a fait preuve l’assuré n’a pas été simplement légère, mais a revêtu un caractère de gravité suffisant pour que la condition de la bonne foi ne puisse être considérée comme étant réalisée.

Par jugement du 06.11.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l’obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c p. 53; arrêt 8C_510/2018 du 12 mars 2019 consid. 3).

Selon la jurisprudence, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre sa bonne foi. Il faut bien plutôt que le requérant ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d’emblée lorsque les faits qui conduisent à l’obligation de restituer – comme par exemple une violation du devoir d’annoncer ou de renseigner – sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, le bénéficiaire peut invoquer sa bonne foi lorsque l’acte ou l’omission fautifs ne constituent qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 s. avec les renvois).

Il y a négligence grave quand un ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181; SYLVIE PÉTREMAND, Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, ch. 63 ss ad art. 25). L’examen de l’attention exigible d’un ayant droit qui invoque sa bonne foi relève du droit et le Tribunal fédéral revoit librement ce point (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223 avec les renvois).

 

Les assurés sont tenus de communiquer les activités exercées, au sens des art. 31 LPGA et 77 RAI, en tout temps. Chaque assuré doit annoncer immédiatement toute modification de la situation susceptible d’entraîner la suppression, une diminution ou une augmentation de la prestation allouée, singulièrement une modification du revenu de l’activité lucrative, de la capacité de travail ou de l’état de santé lorsqu’il est au bénéfice d’une rente d’invalidité. Pareille obligation est d’ailleurs mentionnée dans la décision d’octroi initial de la rente et à l’occasion de chaque révision de cette prestation.

En l’espèce, il n’appartenait pas à l’assuré de choisir les activités qu’il devait annoncer à l’office AI. Il ne devait en effet pas ignorer que l’exercice d’une activité, quelle qu’elle fût, était susceptible d’entraîner une nouvelle appréciation de ses capacités de travail et de gain, pouvant aboutir le cas échéant à une modification de la rente, ce qui s’est d’ailleurs produit à l’issue de l’instruction du cas (cf. arrêt 9C_107/2017 précité, consid. 5.1 et 5.2). Pareille obligation d’annoncer valait tout particulièrement en raison de ses attributions légales d’associé gérant président de la société B.__ Sàrl (cf. art. 810 CO), ainsi que de l’aide qu’il apportait à son épouse dans le cadre de la gestion de son entreprise. En taisant l’exercice de telles activités, la négligence de l’assuré a revêtu un caractère de gravité suffisant pour exclure la bonne foi, de sorte que l’une des conditions cumulatives pour autoriser la remise de l’obligation de restituer fait défaut (cf. art. 25 al. 1 LPGA).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_16/2019 consultable ici

 

 

LPGA : Mesures plus dures contre les abus

LPGA : Mesures plus dures contre les abus

 

Communiqué de presse du Parlement du 05.06.2019 consultable ici

 

Les assurances sociales pourront bloquer la rente d’une personne qui a émigré pour échapper à la prison. Le Conseil national a balayé mercredi la dernière divergence dans la révision d’une loi ciblant les abus.

Le point en suspens portait sur une formulation plus ou moins stricte. La Chambre du peuple a finalement accepté la version moins restrictive du Conseil des Etats. Le texte indiquera que le paiement des prestations « peut » être suspendu. Initialement, le National voulait une suspension automatique du paiement des prestations.

La révision complète les mesures contre les abus concrétisées par la votation de novembre dernier sur les détectives privés. Les prestations pourront être suspendues à titre provisionnel s’il y a des motifs sérieux de soupçonner que l’assuré perçoit une prestation indue ou s’il a manqué à son obligation de renseigner.

Les assurances le font déjà, mais les tribunaux ne s’accordaient pas sur le sujet, faute de base légale claire. Les prestations en espèces pourront aussi être bloquées si l’assuré retarde indûment l’exécution de la mesure ou de la peine à laquelle il a été condamné.

Le paiement de la rente pourra être suspendu même si l’assuré échappe à la prison en quittant la Suisse. Plus question que le Tribunal fédéral condamne la Suisse parce que l’assuré n’était pas encore en train de purger sa peine.

 

Délai revu

Les prestations indûment touchées continueront à devoir être restituées. Mais l’assurance aura généralement trois ans au lieu d’un pour le demander à partir du moment où elle découvre le pot aux roses. Le délai actuel s’est avéré souvent trop court en cas d’investigations poussées.

L’assureur pourra par ailleurs mettre à la charge de l’assuré les frais supplémentaires occasionnés par une surveillance si l’assuré a obtenu une prestation en fournissant sciemment des indications fausses ou d’une autre manière illicite.

Hormis la prévoyance professionnelle non concernée par la réforme, toutes les assurances sociales pourront nouvellement imposer des frais de justice si les lois les concernant le prévoient. Sinon, le tribunal pourra faire passer à la caisse la partie qui agit de manière téméraire ou fait preuve de légèreté.

Le dispositif doit alléger la charge des tribunaux cantonaux en réduisant les incitations à recourir contre les jugements et la durée des procédures.

 

 

Communiqué de presse du Parlement du 05.06.2019 consultable ici

 

 

8C_585/2018 (f) du 22.02.2019 – Demande de restitution d’allocations familiales indûment touchées – 25 LPGA / Délai de péremption

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_585/2018 (f) du 22.02.2019

 

Consultable ici

 

Demande de restitution d’allocations familiales indûment touchées / 25 LPGA

Délai de péremption

 

Dès le mois de janvier 2009, A.A.__, né en 1955, a perçu une allocation de formation professionnelle pour son fils B.A.__, né le 03.09.1992. Cette prestation était allouée par le service cantonal d’allocations familiales du canton de Genève (SCAF).

Parallèlement, le 08.10.2013, l’office de l’assurance-invalidité (OAI) a informé le fils B.A.__ qu’il acceptait de prendre en charge les coûts supplémentaires d’une formation professionnelle initiale du 01.09.2013 au 31.08.2016. Par décision du 29.10.2013, l’OAI lui a accordé une indemnité journalière de 103 fr. 80. Le 28.01.2016, l’OAI a annulé et remplacé la précédente décision par une décision octroyant l’indemnité journalière du 01.09.2013 au 31.12.2015.

Par décision du 02.02.2016, confirmée sur opposition, le SCAF a demandé à A.A.__ la restitution des prestations versées indûment du 01.09.2013 au 31.01.2016, soit un montant de 11’600 fr. Le SCAF a constaté que durant cette période le prénommé n’avait pas droit à l’allocation pour formation professionnelle dès lors que son fils B.A.__ était au bénéfice d’indemnités journalières de l’OAI correspondant à un revenu mensuel largement supérieur au plafond mensuel du revenu de l’enfant ouvrant droit à l’allocation pour formation professionnelle (2’320 fr. par mois).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/618/2018 – consultable ici)

Le tribunal cantonal a retenu que le SCAF avait eu connaissance du versement des indemnités journalières allouées par l’OAI au fils du recourant le jour où il avait reçu la copie de la décision de l’OAI du 28.01.2016. Aucun indice ne permettait en effet d’établir qu’il en avait eu connaissance avant. La décision de l’OAI du 08.10.2013 avait certes été transmise en copie à la caisse cantonale genevoise de compensation (CCGC). On ne pouvait cependant pas partir du principe que la caisse avait transmis une copie de cette décision au SCAF. Il n’y avait en effet pas de communication automatique entre ces deux établissements autonomes dont les tâches étaient très différentes. Bien plus encore, si des données pouvaient être échangées entre ces organismes, elles ne pouvaient l’être que sur demande, en raison de l’obligation pour les personnes chargées de l’application des lois sur les assurances sociales, de son contrôle et de sa surveillance, de garder le secret à l’égard des tiers. Aussi, les juges cantonaux ont-ils constaté qu’en rendant sa décision de restitution le 02.02.2016, le SCAF avait largement agi dans le délai d’un an dès la connaissance du fait déterminant.

Par jugement du 28.06.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Le droit de demander la restitution s’éteint un an après le moment où l’institution a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation (art. 25 al. 2, première phrase, LPGA). Il s’agit de délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d’office (ATF 140 V 521 consid. 2.1 p. 525).

Selon la jurisprudence, le délai de péremption relatif d’une année commence à courir dès le moment où l’administration aurait dû connaître les faits fondant l’obligation de restituer, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle. L’administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde – quant à son principe et à son étendue – la créance en restitution à l’encontre de la personne tenue à restitution (ATF 140 V 521 consid. 2.1 p. 525 et les références). Si l’administration dispose d’indices laissant supposer l’existence d’une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires. A défaut, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où elle aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle. Dans tous les cas, le délai de péremption commence à courir immédiatement s’il s’avère que les prestations en question étaient clairement indues (arrêt 9C_454/2012 du 18 mars 2013 consid. 4 non publié in ATF 139 V 106 et les références).

 

Les constatations de la cour cantonale sur ce que les parties savaient ou ne savaient pas à un certain moment relèvent d’une question de fait (arrêt 9C_112/2011 du 5 août 2011 consid. 3, résumé in RSAS 2012 p. 67), que le Tribunal fédéral examine avec un pouvoir limité.

L’assuré se limite à affirmer que le SCAF avait manifestement reçu une copie de la décision de l’OAI du 08.10.2013 sans apporter ne serait-ce qu’un indice dans ce sens. Une telle allégation, qui n’est corroborée par aucun élément au dossier, ne suffit pas à démontrer le caractère arbitraire ou manifestement inexact des constatations de la juridiction cantonale. On peut donc retenir, à l’instar des premiers juges, que c’est lorsqu’il a reçu la copie de la décision de l’OAI du 28.01.2016 que le SCAF a eu connaissance du fait déterminant fondant l’obligation de restitution et qu’il a dès lors agi en temps utile en réclamant la restitution des prestations par décision du 02.02.2016.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_585/2018 consultable ici

 

 

8C_804/2017 (f) du 09.10.2018 – Demande de restitution en matière d’assurance-chômage – Remise de l’obligation de restituer – 25 LPGA / Compensation et minimum vital de l’assuré selon 93 LP

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_804/2017 (f) du 09.10.2018

 

Consultable ici

 

Demande de restitution en matière d’assurance-chômage / 25 LPGA

Remise de l’obligation de restituer

Compensation et minimum vital de l’assuré selon 93 LP

 

Assuré, né en 1973, s’est inscrit auprès de l’Office régional de placement de Lausanne (ORP) comme demandeur d’emploi le 21.12.2015. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur du 21.12.2015 au 20.12.2017.

Par décision du 07.02.2017, la caisse cantonale de chômage a suspendu son droit à l’indemnité pour une durée de 16 jours indemnisables dès le 22.07.2016. Il était reproché à l’assuré, qui avait fait contrôler son chômage durant le mois de juillet 2016, de n’avoir pas annoncé un gain intermédiaire qu’il avait obtenu en travaillant du 07.07.2016 au 21.07.2016. Par une autre décision, du 07.02.2017, la caisse lui a réclamé la restitution d’un montant de 5’172 fr. 80 qu’elle estimait avoir versé à tort en vertu de décomptes de prestations rectifiés.

Le 26.04.2017, la caisse a rendu une troisième décision, par laquelle elle annulait et remplaçait sa décision du 07.02.2017 relative à la restitution. Concernant le décompte de juillet 2016, l’assuré devait rembourser le montant de 2’958 fr. perçus à tort pour ce mois. En outre, 16 jours de suspension avaient été imputés sur le décompte du mois d’août 2016, de sorte que l’intéressé n’avait droit qu’à 1’065 fr. 40 sur le montant de 3’280 fr. 20 initialement versé. La différence, par 2’214 fr. 80, devait, également, être remboursée. Le montant sujet à restitution s’élevait donc à 5’172 fr. 80 (2’958 fr. + 2’214 fr. 80). La caisse a en outre opéré compensation avec des indemnités dues pour les mois de janvier, février et mars 2017 (respectivement 852 fr. 60, 2’856 fr. 80 et 1’463 fr. 40).

Représenté par son curateur, l’assuré a formé opposition à cette décision. Il contestait la compensation opérée par la caisse en faisant valoir qu’elle portait atteinte à son minimum vital. Il demandait la restitution des sommes prélevées à titre de compensation, afin de pouvoir payer ses loyers en souffrance. La caisse a rejeté l’opposition par décision du 22.05.2017.

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 101/17 – 186/2017 – consultable ici)

Par arrêt du 16.10.2017, admission du recours par le tribunal cantonal et annulation de la décision en tant qu’elle portait sur la compensation du montant à restituer de 5’172 fr. 80 avec des indemnités de chômage dues à l’assuré pour les mois de janvier, février et mars 2017.

 

TF

Sous réserve des cas relevant de l’art. 55 LACI (indemnité en cas d’insolvabilité), la demande de restitution en matière d’assurance-chômage est régie par l’art. 25 LPGA. Selon l’art. 25 al. 1, première phrase, LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. L’assuré concerné peut demander la remise de l’obligation de restituer, lorsque la restitution des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, le mettrait dans une situation difficile (cf. art. 25 al. 1, deuxième phrase, LPGA). Le destinataire d’une décision de restitution qui entend la contester dispose en réalité de deux moyens qu’il convient de distinguer de façon claire: s’il prétend qu’il avait droit aux prestations en question, il doit s’opposer à la décision de restitution dans un délai de 30 jours; en revanche, s’il admet avoir perçu indûment des prestations, mais qu’il invoque sa bonne foi et des difficultés économiques qu’il rencontrerait en cas de remboursement, il doit présenter une demande de remise. Dans la mesure où la demande de remise ne peut être traitée sur le fond que si la décision de restitution est entrée en force, la remise et son étendue font l’objet d’une procédure distincte (cf. art. 4 al. 2 OPGA ; arrêt 8C_589/2016 du 26 avril 2017 consid. 3.1; 8C_130/2008 du 11 juillet 2008 consid. 2.2; 8C_602/2007 du 13 décembre 2007 consid. 3).

En dehors de l’art. 20 al. 2 LPGA sur l’interdiction de la compensation en cas de versement des prestations en mains de tiers (avec l’exception de l’art. 20 al. 2, deuxième phrase, LPGA), la LPGA ne contient pas de norme générale sur la compensation. Ce mode d’extinction des créances est donc régi par les dispositions des lois spéciales (ATF 138 V 402 consid. 4.2 p. 405), en l’occurrence par l’art. 94 al. 1 LACI. Selon cette disposition, les restitutions et les prestations dues en vertu de la présente loi peuvent être compensées les unes par les autres ainsi que par des restitutions et des rentes ou indemnités journalières dues au titre de l’AVS, de l’assurance-invalidité, de la prévoyance professionnelle, de la loi du 25 septembre 1952 sur les allocations pour perte de gain, de l’assurance-militaire, de l’assurance-accidents obligatoire, de l’assurance-maladie, ainsi que des prestations complémentaires de l’AVS/AI et des allocations familiales légales. La compensation ne doit toutefois pas entamer le minimum vital de l’assuré, tel que fixé par l’art. 93 LP. Cette règle vaut pour toutes les institutions d’assurance sociale (voir par exemple ATF 138 V 402 précité; 138 V 235 consid. 7.2 p. 246; 136 V 286 consid. 6.1 p. 291; 131 V 249 consid. 1.2 p. 252; arrêt 8C_130/2008 précité consid. 2.3 [à propos de l’assurance-chômage]; BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n° 6 ad art. 94 LACI; MOOR/POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3e éd. 2011, p. 103 s., THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3e éd. 2016, p. 2292 n. 86). Cette exigence est à rapprocher de l’art. 125 ch. 2 CO, selon lequel ne peuvent être éteintes par compensation les créances dont la nature spéciale exige le paiement effectif entre les mains du créancier, tels que les aliments ou le salaire absolument nécessaires à l’entretien du créancier et de sa famille. En cas de versement rétroactif de prestations périodiques, la limite de compensation relative au minimum vital doit être examinée pour la même période, soit pour l’espace de temps dans lequel le versement rétroactif des prestations est destiné (ATF 138 V 402 déjà cité; arrêt 9C_1015/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.3).

Sur le plan procédural, l’extinction de la créance en restitution par voie de compensation ne peut intervenir, aux conditions requises, qu’une fois qu’il a été statué définitivement sur la restitution et sur une éventuelle demande de remise de l’obligation de restituer. L’opposition et le recours formés contre une décision en matière de restitution ont un effet suspensif (DTA 1990 no 1 p. 13 consid 1; arrêt 8C_130/2008 précité consid. 3.2; RUBIN, op. cit., n° 7 ad art. 94 LACI). Une compensation immédiate ferait perdre à l’assuré la possibilité de contester la restitution et, le cas échéant, de demander une remise de l’obligation de restituer (DTA 1977 no 19 p. 90; RUBIN, op. cit., n° 7 ad art. 94 LACI).

Une remise de l’obligation de restituer n’entre toutefois pas en considération dans la mesure où cette obligation peut être éteinte par compensation avec des prestations d’autres assurances sociales, soit lorsque des prestations déjà versées sont remplacées par d’autres prestations, dues à un autre titre, et que la compensation intervient entre ces prestations conformément au principe de concordance temporelle. Dans cette éventualité, la fortune de l’intéressé astreint à l’obligation de restituer ne subit aucun changement qui le mettrait dans une situation difficile, de sorte que la question de la remise n’a pas à être examinée (ATF 127 V 484 consid. 2b p. 487; RUBIN, op. cit., n° 13 ad art. 94 LACI). On est toutefois en dehors de ce cas de figure en l’espèce.

Dans le cas d’espèce, il n’y a pas lieu de s’écarter des principes ci-dessus exposés, qui découlent de la LPGA, applicable à l’assurance-chômage, sauf exceptions non pertinentes en l’espèce (cf. art. 1er LACI), ainsi que de l’art. 94 LACI et de la jurisprudence en matière de compensation, laquelle a une portée générale dans l’assurance sociale. C’est en vain, en particulier, que le SECO, recourant, se prévaut du but qui serait propre aux indemnités de chômage et qui justifierait, à ses yeux, une compensation immédiate et sans condition avec des prestations en cours. Dans d’autres branches de l’assurance sociale également, les prestations ne visent pas la seule couverture des besoins absolument vitaux. C’est le cas, notamment, des indemnités journalières (voir par ex. les art 23 LAI et 17 LAA) qui sont accordées en remplacement d’un revenu, à l’instar des indemnités de chômage (art. 22 LACI). Quant au caractère temporaire des prestations, il n’est pas non plus spécifique aux indemnités de chômage (par exemple les indemnités journalières de l’assurance-accidents ou de l’assurance-maladie sont également des prestations à caractère temporaire). Les difficultés de recouvrement invoquées ne sont pas plus importantes pour les organes de l’assurance-chômage que pour les administrations chargées de l’application d’autres régimes d’assurance sociale. Elles ne sauraient donc justifier, en dérogation à une jurisprudence, une compensation immédiate de la créance de la caisse (sur ces divers points, voir l’arrêt (8C_130/2008 déjà cité consid. 3.3). Enfin la question de savoir si, sous certaines conditions (par exemple une attitude ouvertement dilatoire pouvant être constitutive d’un abus de droit), un retrait de l’effet suspensif par la caisse serait admissible n’a pas à être examinée ici. En effet, même en admettant que la caisse pût retirer l’effet suspensif au recours de l’assuré, elle devait, en toutes hypothèses, tenir compte du minimum vital.

Pour autant, le jugement attaqué ne saurait sans plus être confirmé.

L’assuré n’a pas contesté la décision de restitution. Il a au contraire admis explicitement le bien-fondé de la créance en remboursement de la caisse dans son opposition à la décision du 26.04.2017, ainsi que dans son recours à l’autorité cantonale. Il n’a pas non plus demandé une remise de l’obligation de restituer, bien que son attention fût attirée sur cette possibilité (voir ch. 7 de la décision sur opposition). Ses griefs portaient uniquement sur la compensation opérée par la caisse. Dans ces conditions, c’est à tort que la juridiction cantonale a annulé purement et simplement la décision sur opposition du 22.05.2017 en tant qu’elle portait sur la compensation du montant à restituer de 5’172 fr. 80 avec des indemnités de chômage pour les mois de janvier, février et mars 2017. L’objet du litige portait, précisément et uniquement, sur la question de la compensation. A ce stade de la procédure, une compensation était en principe possible, pour autant qu’elle ne portât pas atteinte au minimum vital de l’intéressé.

Ni la caisse de chômage ni le premier juge ne se sont prononcés sur cette question. Il convient, dès lors, d’annuler le jugement attaqué, ainsi que la décision sur opposition, et de renvoyer la cause à la caisse pour qu’elle détermine si une compensation est possible au regard des restrictions découlant du minimum vital fixé par l’art. 93 LP.

 

Le TF admet partiellement le recours du SECO, annule le jugement et la décision, renvoie la cause à la caisse de chômage pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

 

 

Arrêt 8C_804/2017 consultable ici

 

 

9C_644/2017 (f) du 19.01.2018 – Incarcération de l’assuré – 21 al. 5 LPGA / Obligation de restituer la rente versée à tort – 25 al. 1 LPGA / Remise de l’obligation de restituer – Bonne foi de l’assuré acceptée

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_644/2017 (f) du 19.01.2018

 

Consultable ici

 

Incarcération de l’assuré – 21 al. 5 LPGA / Obligation de restituer la rente versée à tort – 25 al. 1 LPGA

Remise de l’obligation de restituer – Bonne foi de l’assuré acceptée

 

Assuré, né en 1981, a été mis au bénéfice d’une rente entière de l’assurance-invalidité à partir du 01.09.2001, ainsi que de prestations complémentaires à compter du 01.12.2006.

Par décision du 25.07.2014, l’office AI a suspendu le versement de la rente dès le 01.09.2013, en raison d’une incarcération intervenue le 15.05.2013. L’administration a ensuite exigé la restitution d’un montant de 18’720 fr. correspondant aux rentes versées à tort entre le 01.09.2013 et le 31.08.2014. A la suite de la demande formée pour son compte par son curateur, l’assuré s’est vu accorder la remise de l’obligation de restituer, excepté pour la période allant du 01.09.2013 au 30.09.2013 où sa bonne foi a été niée. La caisse de compensation a aussi exigé la restitution des prestations complémentaires versées indûment dès le 01.09.2013, avant d’accorder la remise partielle de ce paiement.

L’assuré a été une nouvelle fois incarcéré, à compter du 25.08.2015. A la suite de l’annonce de cet événement par un courrier de son curateur daté du 31.08.2015, l’office AI a suspendu le versement de la rente à compter du 01.09.2015 (décision du 18.03.2016) et a demandé la restitution des prestations allouées à tort dès cette date et jusqu’au 31.03.2016, pour un montant de 10’969 fr. Il a rejeté la demande de remise, au motif que la condition de la bonne foi n’était pas remplie. La caisse de compensation a également suspendu le versement des prestations complémentaires, exigé la restitution des prestations versées à tort et refusé d’accorder la remise de l’obligation de restituer.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont d’abord constaté que faute d’avoir fait l’objet d’une contestation de l’assuré, la décision portant sur la restitution de la rente à compter du 01.09.2015 (décision du 31.03.2016) était entrée en force, si bien qu’il n’y avait pas lieu de revenir sur son bien-fondé. Ils ont ensuite examiné si la condition afférente à la bonne foi de l’assuré nécessaire à l’obtention d’une remise de l’obligation de restituer (art. 25 al. 1 LPGA) était réalisée en l’espèce. Ils sont parvenus à la conclusion que tel était le cas, considérant que l’assuré, par le biais de son curateur, avait fait preuve de toute l’attention que sa situation personnelle permettait raisonnablement d’exiger de lui et qu’il ne s’était dès lors rendu coupable d’aucune négligence. L’instance cantonale a donc admis le recours de l’assuré, annulé la décision et, dans la mesure où cette dernière ne portait pas sur la seconde condition cumulative posée par l’art. 25 al. 1 LPGA (soit, sur le critère de la situation difficile), renvoyé la cause à l’administration pour instruction complémentaire sur ce point et nouvelle décision.

Par jugement du 19.07.2017, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

A teneur de l’art. 25 al. 1 LPGA, la restitution de prestations indûment touchées ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile. Selon la jurisprudence relative à la disposition légale précitée, l’ignorance, par le bénéficiaire des prestations, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. (ATF 138 V 218 consid. 4 p. 220 et 112 V 97 consid. 2c p. 103; arrêt 9C_496/2014 du 22 octobre 2014 consid. 3.1). Il y a négligence grave quand un ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d’une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d p. 181). Le comportement et le degré de connaissance du curateur est opposable à l’assuré (ATF 112 V 97 consid. 3b p. 104; arrêt 9C_496/2014 du 22 octobre 2014 consid. 3.1).

La jurisprudence distingue entre la bonne foi en tant que manque de conscience, de la part de l’intéressé, d’agir contrairement au droit et la question de savoir s’il peut invoquer la bonne foi dans les circonstances données ou s’il aurait dû, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait exiger de lui, reconnaître l’irrégularité juridique qui s’est produite. Alors que la présence ou le défaut de conscience d’agir contrairement au droit relève d’une question de fait, qui ne peut être examinée par le Tribunal fédéral que sous l’angle de l’art. 105 al. 2 LTF, l’examen de l’attention exigible constitue une question de droit qui peut être revue librement, dans la mesure où il s’agit d’examiner si l’intéressé peut invoquer sa bonne foi au vu des circonstances de fait données (ATF 122 V 221 consid. 3 p. 223; voir aussi arrêt 9C_496/2014 du 22 octobre 2014 consid. 3.2).

 

En l’espèce, seule est litigieuse devant le TF la question de savoir si un défaut de diligence peut être reproché à l’assuré. A cet égard, conformément à ce qu’ont relevé les premiers juges, le curateur a informé l’administration de la détention préventive de son pupille le 31.08.2015, soit le jour même où il a lui-même eu connaissance de ce fait; il l’a, au demeurant, renseignée par la suite, spontanément et à plusieurs reprises, au sujet de l’évolution de la situation (courriel du 19.11.2015 et courrier du 26.01.2016 notamment). Bien que dûment informée de l’incarcération et de la situation de l’assuré par l’intermédiaire de son curateur, l’administration avait cependant continué à verser la rente jusqu’au 31.03.2016, sans aucune réserve.

Le fait que l’assuré avait été incarcéré une première fois en 2013 ne suffit pas pour admettre qu’il aurait dû se rendre compte que la continuation du paiement des prestations était indue. En effet, d’une part, dans la mesure où la précédente décision de restitution ne portait pas sur les trois premiers mois de l’incarcération, l’assuré était fondé à en déduire qu’il en irait de même s’il venait à être à nouveau incarcéré; cela vaut d’autant plus que ladite décision ne comportait aucune motivation sur l’obligation de restitution ni aucune référence à une base légale, de sorte qu’il n’en ressortait pas pourquoi la restitution n’était due que pour une partie de la période de détention. Au demeurant, lors de la première procédure, le curateur avait apparemment en vain sollicité des informations sur le sort de la rente de son pupille sans que l’office AI ne l’informe sur ce point.

En outre dans la mesure où la bonne foi avait été admise dans le cadre de l’incarcération qui avait débuté le 15.05.2013, et qu’une remise partielle avait été accordée à la suite de l’annonce de cet événement faite par le biais du curateur au mois d’octobre 2013 (soit, un mois après la nomination du curateur, le 01.09.2013), ce dernier pouvait de bonne foi partir de l’idée qu’en informant l’administration de la nouvelle incarcération de son pupille (survenue le 25.08.2015) le jour où il avait lui-même eu connaissance de ce fait (soit, le 31.08.2015), il satisfaisait à son obligation d’annoncer et ne s’exposait pas à une éventuelle restitution; en 2013, en effet, sa bonne foi n’avait été niée que pour le mois de septembre 2013 et admise pour toute la période de versement postérieure. Par ailleurs, le fait que la caisse de compensation avait rendu une décision reconnaissant le droit de l’assuré à des prestations complémentaires pour la période du 01.08.2015 au 31.10.2015, le 18.12.2015, soit à une date où elle était avisée de l’incarcération de ce dernier, ne pouvait également que renforcer l’assuré dans son idée que le versement n’était pas indu.

Au vu de ce qui précède, c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le curateur avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour annoncer en temps utile les faits susceptibles d’entraîner une suspension du droit à la rente, comme l’exigent les art. 31 LPGA et 77 RAI et donc, qu’il avait fait preuve de la diligence requise.

A l’inverse de ce que prétend finalement l’office AI recourant, ce résultat n’a pas pour conséquence « qu’aucune restitution de la rente perçue pendant la durée de la détention préventive ne pouvait intervenir si l’assuré en informe l’office AI ». La bonne foi de l’assuré résulte en effet de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce que la juridiction cantonale a apprécié à satisfaction de droit, en particulier au regard de l’absence, qu’elle a constatée, de toute information donnée par l’office recourant au curateur quant aux conséquences d’une détention sur une éventuelle restitution des prestations, et des différentes interventions du curateur pour renseigner l’administration sur l’évolution de la procédure pénale.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_644/2017 consultable ici

 

 

8C_689/2016 (f) du 05.07.2017 – Restitution imputable à une faute de la caisse de chômage – 25 LPGA / Péremption du droit de demander la restitution – 25 al. 2 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_689/2016 (f) du 05.07.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2E6pEzd

 

Restitution imputable à une faute de la caisse de chômage / 25 LPGA

Péremption du droit de demander la restitution / 25 al. 2 LPGA

 

Assuré, livreur à un taux d’activité de 50%, qui est licencié le 25.01.2012 avec effet au 31.03.2012, pour des motifs économiques. Parallèlement à cette activité, il exerçait celle de concierge à un taux de 25% pour le compte de la Société C.__. Le 09.02.2012, il a déposé une demande d’indemnité de chômage en indiquant être disposé à travailler à un taux de 50%. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert du 01.04.2012 au 31.03.2014.

A la demande du gestionnaire en charge du dossier auprès de la caisse de chômage, l’assuré a fait parvenir, le 10.04.2012, une copie de son contrat de travail de conciergerie ainsi que les fiches de salaire y afférentes pour les mois de février et mars 2012. Par pli du 11.04.2012, le gestionnaire a en outre invité l’assuré à lui faire parvenir le formulaire « confirmation d’inscription » avec un taux de 75%. Il justifiait sa requête par ces termes écrits ultérieurement à la main et figurant au bas de cette lettre : « cet assuré avait un emploi à 50% + un autre à 25% qui continue ».

A la suite d’une révision du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) des 08.07.2013-10.07.2013, la caisse de chômage a invité la société C.__ à lui transmettre les formulaires « Attestation de gain intermédiaire » concernant l’assuré pour les mois d’avril 2012 à juin 2013 ainsi qu’une copie des fiches de salaire pour la même période. Par décision du 27.11.2013, confirmé sur opposition, elle a réclamé à l’assuré la restitution de 15’476 fr. 05, correspondant au montant des prestations versées en trop en raison de « la non-prise en considération de [son] emploi mensuel provenant de [son] activité de concierge non professionnel à 25% ».

 

Procédure cantonale (arrêt ACH 58/14 – 163/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2GCczw0)

Le premier juge a retenu que la caisse de chômage savait que l’intimé effectuait un travail de concierge à raison de 25%, respectivement n’entendait requérir l’aide de l’assurance que pour compenser sa perte d’emploi à 50% et que c’était à la demande du gestionnaire de la caisse que l’inscription avait été modifiée pour être portée à 75%. Toujours selon le premier juge, c’était le gestionnaire qui avait demandé à l’assuré de lui faire parvenir son contrat de travail ainsi que les attestations de salaire y afférentes relatifs à son emploi de concierge. Enfin, l’instruction avait permis d’établir que c’était en mains dudit gestionnaire qu’étaient parvenues les IPA durant tout le délai d’indemnisation de l’assuré. Le premier juge a considéré qu’il n’y avait pas lieu de douter de la bonne foi de l’assuré, ce dernier pouvant raisonnablement penser que son emploi conservé à 25% était considéré comme un gain accessoire échappant à la logique de l’indemnisation, celle-ci ne portant que sur la disponibilité restante de 75% dans le cadre de laquelle il avait dûment annoncé les gains intermédiaires réalisés. En procédant chaque mois à l’examen des IPA tout en requérant systématiquement les pièces afférentes aux gains intermédiaires déclarés, le gestionnaire de la caisse ne pouvait ignorer, toujours selon la juridiction cantonale, l’emploi et la rémunération de concierge conservés à 25%. Il disposait en outre de toutes les pièces utiles à cet égard, de sorte qu’en vouant au cas de son assuré l’attention requise par les circonstances, il disposait des éléments qui fondaient l’indu, dans son principe et sa quotité. Dans ces circonstances, le premier juge a retenu que le comportement du gestionnaire ne procédait pas d’une simple erreur de calcul, mais bien d’un comportement qui justifiait de fixer le début du délai au moment où le gestionnaire aurait été en mesure de rendre une décision de restitution s’il avait fait preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger de lui. Au vu du dossier que le gestionnaire de la caisse de chômage avait constitué, lequel comprenait les pièces afférentes à l’emploi de concierge qu’il avait réclamées, le premier juge a considéré que le délai de péremption avait commencé à courir immédiatement, soit dès les premiers versements d’indemnités, entre avril et juin 2012. En attendant le mois de novembre 2013 pour réclamer à l’assuré le remboursement des prestations versées indûment, la caisse avait laissé la créance se périmer.

Par jugement du 09.09.2016, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Aux termes de l’art. 25 al. 1, 1ère phrase, LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. Selon la jurisprudence, cela implique que soient réunies les conditions d’une reconsidération (cf. art. 53 al. 2 LPGA) ou d’une révision procédurale (cf. art. 53 al. 1 LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (ATF 130 V 318 consid. 5.2 p. 320). En ce qui concerne plus particulièrement la révision, l’obligation de restituer des prestations indûment touchées et son étendue dans le temps ne sont pas liées à une violation de l’obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e p. 139). Il s’agit simplement de rétablir l’ordre légal, après la découverte du fait nouveau.

 

Péremption du droit de demander la restitution

En vertu de l’art. 25 al. 2, première phrase, LPGA, le droit de demander la restitution s’éteint un an après le moment où l’institution a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Il s’agit de délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d’office (ATF 140 V 521 consid. 2.1 p. 525).

Selon la jurisprudence, le délai de péremption relatif d’une année commence à courir dès le moment où l’administration aurait dû connaître les faits fondant l’obligation de restituer, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 140 V 521 précité consid. 2.1 p. 525; 139 V 6 consid. 4.1 p. 8). L’administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde – quant à son principe et à son étendue – la créance en restitution à l’encontre de la personne tenue à restitution (ATF 140 V 521 déjà cité consid. 2.1 p. 525; 111 V 14 consid. 3 p. 17). Si l’administration dispose d’indices laissant supposer l’existence d’une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires. A défaut, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où elle aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle. Dans tous les cas, le délai de péremption commence à courir immédiatement s’il s’avère que les prestations en question étaient clairement indues (arrêt 9C_454/2012 du 18 mars 2013 consid. 4 non publié in ATF 139 V 106 et les références).

Cependant, lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai d’une année le moment où l’erreur a été commise par l’administration, mais le moment auquel celle-ci aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle) se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l’attention requise. En effet, si l’on plaçait le moment de la connaissance du dommage à la date du versement indu, cela rendrait souvent illusoire la possibilité pour l’administration de réclamer le remboursement de prestations allouées à tort en cas de faute de sa part (ATF 124 V 380 consid. 1 p. 383; arrêt 8C_968/2012 du 18 novembre 2013 consid. 2.2).

En l’espèce, il ressort de la décision de restitution que la caisse n’a pas pris en considération le revenu mensuel fixe de 1’554 fr. 60 provenant de l’activité de concierge à 25%. Il est en outre établi que la caisse a eu connaissance du contrat de travail de conciergerie de l’intimé ainsi que de ses fiches de salaire y afférentes pour les mois de février et mars 2012. Elle ne s’est cependant pas rendue compte, au moment où elle a commencé à verser les prestations de chômage au mois d’avril 2012, qu’il y avait également lieu de tenir compte du gain intermédiaire réalisé dans l’activité de concierge pour calculer les indemnités de chômage auxquelles l’assuré avait droit. Ceci peut s’expliquer, en partie tout au moins, par le fait que l’assuré n’avait pas mentionné ce gain intermédiaire sur les formulaires IPA. Ce n’est que dans un deuxième temps, à savoir au moment où elle a pris connaissance du rapport de contrôle du SECO, des 08.07.2013-10.07.2013, que la caisse de chômage a remarqué son erreur initiale et qu’elle a interpellé la société C.__. Aussi, en réclamant la restitution des prestations par sa décision du 27.11.2013, la caisse a-t-elle respecté le délai d’une année à compter du moment où elle a eu connaissance des faits ayant fondé sa demande de restitution.

 

Bonne foi

Même en admettant que l’administration ait pu induire en erreur, cela ne justifierait pas que l’on renonce à la restitution des prestations versées à tort. En effet, rien n’indique que l’assuré aurait pris des dispositions qu’il ne pourrait plus modifier sans subir de préjudice. Le seul fait d’avoir dépensé des prestations pécuniaires perçues de bonne foi ne constitue pas, en soi, un acte de disposition irrévocable dont pourrait se prévaloir un assuré en invoquant le droit constitutionnel à la protection de la bonne foi (cf. arrêt 8C_796/2007 du 22 octobre 2008 in DTA 2009 86 consid. 3.1 et les références citées).

 

Le TF admet le recours de la caisse de chômage, annule le jugement cantonal et confirme la décision de la caisse de chômage.

 

 

Arrêt 8C_689/2016 consultable ici : http://bit.ly/2E6pEzd