9C_643/2017 (f) du 26.01.2018 – Restitution de prestations indûment touchées – 35a al. 1 LPP / Versement anticipé non pris en compte dans le calcul des rentes versées – Réduction des prestations omise / Examen de la bonne foi dans la phase en relation avec la remise de l’obligation de restituer

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_643/2017 (f) du 26.01.2018

 

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Restitution de prestations indûment touchées / 35a al. 1 LPP

Versement anticipé non pris en compte dans le calcul des rentes versées – Réduction des prestations omise

Examen de la bonne foi dans la phase en relation avec la remise de l’obligation de restituer

 

Assuré, né en septembre 1948, a conclu avec la Confédération suisse, représentée par la Caisse fédérale d’assurance (CFA), le 05.02.2001, un contrat de versement anticipé pour l’encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, portant sur un montant de 100’000 fr.; le versement est intervenu le 24.02.2001. La réduction des prestations de prévoyance résultant de ce versement figurait dans le contrat.

Conformément à une convention du 19.05.2010 relative à la retraite anticipée selon le plan social de la Confédération, l’assuré a été mis au bénéfice d’une retraite anticipée au 31.12.2010. La caisse de pensions Publica lui a alloué mensuellement une rente de vieillesse selon le plan social de 2’795 fr. 60 dès le 01.01.2011, ainsi que deux rentes pour enfant de 465 fr. 95 chacune et une rente transitoire de 2’320 fr., soit 6’047 fr. 50. En raison de la suppression de la rente transitoire, les prestations se montaient à 3’727 fr. 50 depuis le 01.10.2013.

Le 28.01.2015, en raison de son divorce, l’assuré a demandé à la caisse de pension de lui indiquer le montant de la prestation acquise avant son mariage célébré le 20.12.2001. Dans ce cadre, l’institution de prévoyance lui a fait savoir, le 26.05.2015, qu’elle avait constaté une erreur dans la prestation de sortie comptabilisée au moment du départ à la retraite, laquelle était de 300’607 fr. 40 au lieu de 443’978 fr. 60, découlant du fait que le versement anticipé de 100’000 fr. n’avait pas été porté correctement au débit du compte de prévoyance. Cette erreur s’était répercutée sur les prestations de vieillesse qui, adaptées dès le 01.07.2015, se montaient à 2’626 fr. 70 par mois, soit une rente de vieillesse de 1’970 fr. et deux rentes pour enfant de 328 fr. 35 chacune. Le trop-perçu entre le 01.01.2011 et le 30.06.2015, au total 59’443 fr. 20, devait lui être remboursé. L’assuré a invoqué sa bonne foi et contesté son obligation de rembourser.

 

Procédure cantonale

Le 17.12.2015, la caisse de pension a saisi le Tribunal cantonal des assurances d’une demande de remboursement des prestations de vieillesse indûment perçues dirigée contre l’assuré.

Par jugement du 18.07.2017, admission du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant l’assuré débiteur de la caisse de pension de la somme de 59’443 fr. 20, avec intérêts moratoires au taux de 2,75% du 17.12.2015 au 31.12.2015, 2,25% du 01.01.2016 au 31.12.2016, et 2% au minimum dès le 01.01.2017.

 

TF

Les rentes qui font l’objet de la demande en restitution n’ont pas été versées par la Confédération, ancien employeur de l’assuré, mais par la caisse de pension, cela dans le cadre de la prévoyance professionnelle régie par la LPP et les dispositions réglementaires. Le montant de la rente n’a pas été déterminé de manière définitive par la convention du 19.05.2010, celle-ci précisant que « [p]our les montants définitifs des rentes, seules les directives édictées par les assurances sociales sont applicables en cas de rentes ». Aussi, la caisse de pension était-elle tenue de calculer le montant des rentes selon les dispositions de la LPP et ses règlements, les montants indiqués dans la convention n’étant pas définitifs en ce sens qu’elle ne pouvait pas les modifier en cas d’erreur. Dans la mesure où la caisse de pension a versé des rentes trop élevées, elle est ainsi fondée à les réclamer, conformément aux règles instaurées par la LPP.

A cet égard, selon l’art. 35a al. 1 LPP, les prestations touchées indûment doivent être restituées. La restitution peut ne pas être demandée lorsque le bénéficiaire était de bonne foi et serait mis dans une situation difficile. D’après l’art. 72 al. 1 RPEC (règlement de prévoyance pour les personnes employées et les bénéficiaires de rentes de la Caisse de prévoyance de la Confédération), la personne qui accepte une prestation de Publica à laquelle elle n’a pas droit doit la rembourser avec les intérêts (annexe 1, ch. 4). A teneur de l’art. 72 al. 2 RPEC, Publica peut renoncer partiellement ou totalement au remboursement des prestations en présence de cas de rigueur ou pour des raisons d’économie administrative. La Commission de la caisse définit les modalités dans un règlement sur les cas de rigueur.

On doit admettre qu’une partie des rentes ont été indûment perçues, c’est-à-dire sans cause juridique valable. En effet, les montants des rentes ont été établis sur des bases erronées, dès lors que le versement anticipé de 100’000 fr. opéré en 2001 dans le cadre de l’acquisition d’un logement, qui aurait dû conduire à une réduction des prestations (cf. art. 30c al. 4 LPP), n’a pas été pris en considération dans le calcul des rentes. Il s’ensuit que la demande en remboursement du 17.12.2015 est fondée à juste titre sur les art. 35a al. 1 LPP, première phrase, et 72 al. 1 RPEC, étant précisé qu’il s’agit ici de rétablir une situation conforme au droit, indépendamment de toute faute de l’assuré ou de l’existence d’un éventuel dommage que la caisse de pensions aurait pu subir par l’erreur de comptabilisation des avoirs de libre passage lors de leur transfert en 2003. Dans ce contexte, le financement du plan social dont l’assuré avait jadis bénéficié de la part de l’employeur, de même que la capitalisation de Publica au début de son activité opérationnelle en 2003, n’ont aucune incidence sur l’issue du litige. Seul compte le fait que le bénéficiaire a reçu des rentes plus élevées auxquelles il avait droit si elles avaient été d’emblée fixées selon un état de fait établi correctement et une application correcte du droit.

 

Le grief tiré de la bonne foi de l’assuré ne lui est d’aucun secours, dans la mesure où dans le cadre de la restitution de prestations des assurances versées à tort, elle ne joue un rôle que dans une seconde phase, en relation avec la remise de l’obligation de restituer. Selon la jurisprudence rendue sur l’art. 25 LPGA, ou l’art. 47 al. 1 aLAVS, la bonne foi cède le pas sur le principe de la légalité : la restitution intervient dès qu’un versement a été fait sans cause juridique (ATF 122 V 134 consid. 2e p. 139; arrêt 9C_496/2009 du 10 juillet 2009 consid. 3; cf. ULRICH MEYER, Die Rückerstattung von Sozialversicherungsleistungen, in: Ausgewählte Schriften, Thomas Gächter (éd.), 2013, p. 145).

En tout état de cause, la caisse de pension devra examiner, conformément au consid. 4 du jugement attaqué (p. 15), s’il peut être renoncé à la restitution de tout ou partie du montant de 59’443 fr. 20 perçu à tort du 01.01.2011 au 30.06.2015, cela aux conditions de l’art. 72 al. 2 RPEC, ainsi que du règlement de Publica concernant les cas de rigueur, en relation avec l’art. 35a al. 1 LPP, seconde phrase.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_643/2017 consultable ici

 

 

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