Archives par mot-clé : Jurisprudence

1B_75/2017 (f) du 16.08.2017 – destiné à la publication – Résultats de la surveillance par une assurance d’un fraudeur pas automatiquement inadmissibles dans une procédure pénale

Arrêt du Tribunal fédéral 1B_75/2017 (f) du 16.08.2017, destiné à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jY47jp

Source : Jurius, Une décision de Strasbourg a des effets sur la procédure pénale, in : Jusletter 25 septembre 2017  

 

 

L’observation systématique d’un présumé fraudeur ordonnée par une assurance est équivalente à une mesure de contrainte, conclut le Tribunal fédéral. Mais même si les droits fondamentaux de la personne concernée ont été bafoués, les résultats de la surveillance ne sont pas automatiquement inadmissibles dans une procédure pénale. (Arrêt 1B_75/2017)

 

Dans une décision publiée le 18 septembre 2017, le Tribunal fédéral conclut que le verdict de la Cour européenne des droits de l’homme relatif à la surveillance privée dans des cas d’accidents et d’assurances sociales a également des effets sur le droit de la procédure pénale.

En octobre 2016, la Cour européenne des droits de l’homme avait conclu qu’il n’y a pas, en Suisse, de base légale suffisante pour des surveillances privées. Elle soulignait le risque d’abus.

Dans le cas actuel, le Tribunal fédéral écrit que le droit de la procédure pénale ne prévoit pas d’observations privées. La surveillance est l’affaire du Ministère public et, pour l’enquête, celle de la police judiciaire. Si l’observation dure plus d’un mois, le Ministère public doit donner son feu vert.

Dans le cas présent, une entreprise d’assurances a fait surveiller un homme en incapacité de travail à 100% après un accident. Celui-ci avait obtenu une rente et des prestations d’assurance. Les observations avaient été effectuées à plusieurs reprises entre 2006 et 2013.

En décembre 2015, l’assurance a déposé une plainte pour escroquerie à l’assurance par métier. Le Ministère public soleurois a alors procédé à une perquisition du domicile et a saisi des appareils et des données électroniques. L’homme en question s’est opposé à la levée des scellés des appareils et à l’évaluation de ces données.

Dans sa décision, le Tribunal fédéral retient que les résultats d’une surveillance privée ne sont pas automatiquement inutilisables dans une procédure pénale. Fondamentalement, il appartient au juge de décider définitivement de l’admissibilité d’éléments de preuve.

Il importe toutefois que les résultats d’une observation servent à élucider un délit. Pour cela, il est exceptionnellement permis de recourir à des éléments de preuve obtenus de manière illégale. Ceci particulièrement lorsque ces éléments sont la seule base pour vérifier le soupçon initial.

La décision du Tribunal fédéral montre en outre que les observations ont été effectuées dans l’espace public, dans des endroits accessibles à tous. Il n’y a donc pas eu de violation grave de la sphère privée. De plus, dans ces conditions, une observation ordonnée par les autorités de poursuite pénale aurait été légale, selon les juges de Strasbourg.

 

 

Arrêt 1B_75/2017 consultable ici : http://bit.ly/2jY47jp

 

 

9C_287/2017 (f) du 22.08.2017 – Renseignements et conseils de l’assureur social – 27 LPGA / Promesse orale de l’assureur-maladie de prendre en charge les frais d’une intervention à l’étranger / Pas d’information ou promesse erronées

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_287/2017 (f) du 22.08.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2xqjWVv

 

Renseignements et conseils de l’assureur social / 27 LPGA

Promesse orale de l’assureur-maladie de prendre en charge les frais d’une intervention à l’étranger – 36 OAMal / Pas d’information ou promesse erronées

 

Assuré auprès d’Arcosana SA pour l’assurance-maladie obligatoire et auprès de CSS Assurance-maladie SA pour des assurances complémentaires. Les deux sociétés font partie du Groupe CSS, organisé sous forme de holding. Par courriel du 13.10.2014, l’assuré a indiqué à un collaborateur du Groupe CSS, qu’il avait souffert de cécité à l’œil droit lors d’un séjour en France durant l’été 2014 et avait consulté un professeur, spécialiste en ophtalmologie, établi en France. Le médecin aurait diagnostiqué une cataracte et recommandé une intervention chirurgicale des deux yeux (opérations distinctes, pratiquées à quelques semaines d’intervalles, effectuées en ambulatoire). L’assuré a demandé qu’une indemnité forfaitaire pour les deux opérations lui soit versée « de la part de CSS ». Le 21.10.2014, une collaboratrice « spécialiste en prestations Etranger » du Groupe CSS a fait savoir à l’assuré que les conditions de la prise en charge d’une intervention à l’étranger par l’assurance-maladie obligatoire n’étaient pas remplies ; il en allait de même en ce qui concernait les assurances complémentaires.

L’assureur obligatoire des soins a refusé par décision la demande de prise en charge, motif pris qu’il ne s’agissait pas d’une situation d’urgence mais d’un traitement volontaire à l’étranger et que l’intervention pouvait être pratiquée en Suisse.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 23.03.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 27 LPGA, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1). Chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations (al. 2). Le devoir de conseils de l’assureur social comprend l’obligation de rendre la personne intéressée attentive au fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l’une des conditions du droit aux prestations (ATF 131 V 472 consid. 4.3 p. 480). Les conseils ou renseignements portent sur les faits que la personne qui a besoin des conseils doit connaître pour pouvoir correctement user de ses droits et obligations dans une situation concrète face à l’assureur-maladie. Le devoir de conseils s’étend non seulement aux circonstances de fait déterminantes, mais également aux circonstances de nature juridique. Son contenu dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l’assuré, telle qu’elle est reconnaissable pour l’administration (arrêt 8C_66/2009 du 7 septembre 2009 consid. 8.3, non publié in ATF 135 V 339 ; Meyer, Grundlagen, Begriff und Grenzen der Beratungspflicht der Sozialversicherungsträger nach Art. 27 Abs. 2 ATSG, in Sozialversicherungsrechtstagung 2006, n° 35 p. 27).

Le défaut de renseignement dans une situation où une obligation de renseigner est prévue par la loi, ou lorsque les circonstances concrètes du cas particulier auraient commandé une information de l’assureur, est assimilé à une déclaration erronée de sa part qui peut, à certaines conditions, obliger l’autorité à consentir à un administré un avantage auquel il n’aurait pu prétendre, en vertu du principe de la protection de la bonne foi découlant de l’art. 9 Cst. (ATF 131 V 472 consid. 5 p. 480).

Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l’administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (a) l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard de personnes déterminées, (b) qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (c) que l’administré n’ait pas pu se rendre compte immédiatement (« ohne weiteres ») de l’inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu’il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, et (e) que la réglementation n’ait pas changé depuis le moment où l’assurance a été donnée (ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636 s. et les références citées). Ces principes s’appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante : que l’administré n’ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu’il n’avait pas à s’attendre à une autre information (ATF 131 V 472 consid. 5 p. 480).

En l’espèce, l’assuré allègue avoir décidé de se faire opérer en France en se fondant sur une promesse orale de l’assureur-maladie de prendre en charge les frais y relatifs. Le fait qu’un collaborateur du Groupe CSS lui aurait oralement indiqué lors d’un entretien téléphonique du 13.10.2014 qu’à son avis les frais lui seraient remboursés importe peu. En effet, l’assuré s’est adressé par courriel du même jour à ce collaborateur du Groupe CSS faisant référence à leur conversation téléphonique sans pourtant mentionner une quelconque promesse que ce dernier lui aurait faite quant au remboursement des frais, et demandant expressément l’accord de l’assurance-maladie quant à la prise en charge d’une indemnité forfaitaire pour les opérations proposées par le spécialiste établi en France. Par ailleurs, selon les termes employés dans son courriel (« il s’agirait de deux opérations distinctes, pratiquées à quelques semaines d’intervalles »), les interventions dont il est question n’avaient à ce moment-là manifestement pas encore eu lieu. En réponse à sa demande, la collaboratrice « spécialiste en prestations Etranger » du Groupe CSS a fait savoir à l’assuré par courriel du 21.10.2014 que les conditions prévues à l’art. 36 OAMal n’étaient pas remplies. L’assuré a donc été informé, en temps utile, de l’absence de prise en charge. Il n’avait alors pas encore subi l’opération – dont il n’a au demeurant jamais indiqué la date tout au long de la procédure – ni partant pris des dispositions auxquelles il n’aurait pas pu renoncer. Il ne s’est pas trouvé, contrairement à ce qu’il invoque, devant le fait accompli. On ne peut dès lors reprocher à la caisse-maladie de ne pas l’avoir informé correctement ou d’avoir créé une attente légitime à son égard.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_287/2017 consultable ici : http://bit.ly/2xqjWVv

 

 

9C_121/2017 (d) du 06.06.2017 – proposé à la publication – Cotisations des personnes sans activité lucrative – 10 al. 1 et 3 LAVS – 28 al. 1 RAVS – 8 Cst. – 26 al. 1 Cst. / Notion de la « condition sociale » – Calcul des cotisations sur la base de la fortune

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_121/2017 (d) du 06.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2hqzIcF

Paru in : Jurisprudence du Tribunal fédéral relative au droit des cotisations AVS, Sélection de l’OFAS n° 59, consultable ici : http://bit.ly/2fkuvPq

 

Cotisations des personnes sans activité lucrative – 10 al. 1 et 3 LAVS – 28 al. 1 RAVS – 8 Cst. – 26 al. 1 Cst.

Notion de la « condition sociale » – Calcul des cotisations sur la base de la fortune

 

Sur la base de l’art. 10 al. 1 et 3 LAVS, le Conseil fédéral a édicté l’art. 28 al. 1 RAVS. Ce dernier contient une échelle pour la détermination des cotisations. Le Tribunal fédéral a dû examiner si l’art. 28 al. 1 RAVS (dans sa version du 01.01.2013) est conforme à la loi et à la Constitution (consid. 3).

Selon le premier grief invoqué, le modèle de calcul actuel ignorerait les réflexions fondamentales sur lesquelles se fonde le modèle prévalant en 1947. De ce fait, il y aurait une inégalité de traitement entre les personnes exerçant une activité lucrative et les personnes n’exerçant pas d’activité lucrative (consid. 5.2)

Le Tribunal fédéral indique que l’art. 10 LAVS ne prescrirait pas de modèle particulier de calcul. La seule indication que la loi donne à l’autorité chargée d’édicter le règlement serait celle de fixer le calcul des cotisations selon « la condition sociale ». Le Tribunal fédéral retient que la loi ne définit pas la notion de la condition sociale. Il serait donc indubitable qu’en principe, avec l’augmentation de la fortune les cotisations devraient être plus importantes. Finalement, le Tribunal fédéral conclut que le cadre de la délégation législative n’est pas dépassé (consid. 6.1 et 6.3.1).

Notre Haute Cour rejette également le grief d’une violation du principe de l’égalité de traitement. Par rapport aux personnes exerçant une activité lucrative, il ne pourrait être question d’inégalité de traitement, étant donné que la base du calcul des cotisations est totalement différente (consid. 6.3.3)

S’agissant de la garantie de propriété, le Tribunal fédéral soulève la question si, en l’espèce, elle peut être invoquée. Il serait en effet possible de se soustraire au calcul des cotisations sur la base de la fortune en exerçant une activité lucrative. La question est laissé ouverte (consid. 6.4.2).

 

 

Arrêt 9C_121/2017 consultable ici : http://bit.ly/2hqzIcF

 

 

8C_132/2017 (f) du 05.09.2017 – Evaluation de l’invalidité d’un assuré âgé de 60 ans – 16 LPGA / Pas d’application de l’art. 28 al. 4 OLAA / Pas de force contraignante pour l’assureur LAA de l’évaluation de l’invalidité par l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_132/2017 (f) du 05.09.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2fJ2ktR

 

Evaluation de l’invalidité d’un assuré âgé de 60 ans au moment de la décision n’ayant pas de formation certifiante et des connaissances limitées en français / 16 LPGA

Pas d’application de l’art. 28 al. 4 OLAA

Pas de force contraignante pour l’assureur LAA de l’évaluation de l’invalidité par l’AI – Rappel

 

Assuré, née en 1955, travaillant depuis 1986 en qualité de monteur de stores pour le compte de son employeur. Le 17.02.2009, l’assuré a glissé sur une plaque de glace, ce qui a entraîné une incapacité de travail jusqu’au 24.02.2009. Le 15.03.2010, il a annoncé une rechute en raison d’une rupture subtotale de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite. Il a été opéré le 22.03.2010 et a repris son travail à un taux de 50% dès le 30.10.2010, puis à 100% à compter du 10.10.2010.

Le 14.02.2014, l’assuré – qui présentait une incapacité de travail de 50% depuis le 01.05.2013 – a été victime d’un accident sur son lieu de travail. Alors qu’il démontait un caisson de stores, celui-ci est tombé sur son épaule gauche, entraînant une rupture des tendons (sus et sous-épineux) de la coiffe. Il a été opéré le 18.03.2014 ; le chirurgien a également constaté une arthrose acromio-claviculaire gauche et un conflit sous-acromial gauche. L’évolution a été marquée par la persistance de douleurs et une limitation de la mobilité de l’épaule gauche. Une IRM de contrôle effectuée le 16.09.2014 a révélé l’absence de re-déchirure de la coiffe et une bonne trophicité des muscles de celle-ci, ainsi qu’un épaississement capsulo-synovial pouvant témoigner d’une capsulite rétractile. Deux tentatives de reprise du travail à 50% effectuées les 25.08.2014 et 03.11.2014 se sont soldées par des échecs.

A l’issue du second séjour à la Clinique romande de réadaptation (CRR), du 11.03.2015 au 07.04.2015, les médecins ont retenu les limitations fonctionnelles suivantes : pas de travail au-dessus du plan des omoplates, de mouvements répétitifs et de port de lourdes charges en particulier en porte-à-faux. Le pronostic de réinsertion dans une activité adaptée s’avérait défavorable en raison de facteurs non médicaux (âge ; pas de formation certifiante ; ne se voit pas retravailler un jour dans quelque activité que ce soit ; perte d’élan vital manifeste). Le médecin d’arrondissement a retenu que le cas était stabilisé, que l’assuré ne pouvait plus exercer son métier de poseur de stores, ni un métier similaire, mais qu’il était en revanche apte à travailler à 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles.

L’assureur-accident a alloué à l’assuré une rente d’invalidité d’un taux de 25%, à compter du 01.08.2015 ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 19%.

Le 15.12.2015, l’office AI a alloué à l’assuré une demi-rente d’invalidité du 01.06.2013 au 30.04.2014, puis une rente entière à compter du 01.05.2014.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 100/15 – 5/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2yAFU67)

Par jugement du 11.01.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’âge avancé d’un assuré comme facteur prépondérant à son empêchement de maintenir sa capacité de gain n’est pas pris en considération de la même manière en assurance-invalidité qu’en assurance-accidents, dans laquelle l’art. 28 al. 4 OLAA commande de faire abstraction du facteur de l’âge pour les deux termes de la comparaison des revenus (cf. ATF 122 V 418 consid. 3b p. 422; voir également, au sujet de la portée de l’âge dans le domaine de l’assurance-accidents, SVR 2016 UV n° 39 p. 131 consid. 4.3, arrêt 8C_754/2015).

La juridiction cantonale n’a pas fait application de l’art. 28 al. 4 OLAA. Elle a, en l’espèce, opéré une déduction de 15% sur le revenu d’invalide du recourant pour tenir compte des circonstances personnelles et professionnelles qui sont susceptibles d’influer sur ses perspectives salariales – dont notamment son âge – conformément à ce que prévoit la jurisprudence en cas de recours aux ESS (sur ces facteurs dont l’énumération est exhaustive voir ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79). L’assuré ne soulevant aucun grief à cet égard, l’étendue de cet abattement n’a pas à être examinée, qui n’apparaît au demeurant pas critiquable.

Quant aux autres facteurs invoqués par l’assuré, tels que son absence de formation, son parcours professionnel et ses connaissances limitées en français, ils ne sont pas pertinents dès lors qu’ils sont étrangers à la notion d’invalidité.

L’assuré reproche à la juridiction cantonale de s’être écartée du taux d’invalidité de 100% retenu par l’office AI. Le TF rappelle que, outre que l’évaluation de l’invalidité par l’assurance-invalidité n’a pas de force contraignante pour l’assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3 p. 368), l’office AI a, dans son cas, pris en considération une autre atteinte à la santé (status post cure de hernies inguinales bilatérales) en sus des seules séquelles de l’accident en question. Par ailleurs, la circonstance de l’âge avancé de l’assuré a été examinée par l’assurance-invalidité en fonction de la jurisprudence applicable dans ce domaine.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_132/2017 consultable ici : http://bit.ly/2fJ2ktR

 

 

8C_520/2016 (f) du 14.08.2017 – Calcul du revenu sans invalidité comportant des indemnités pour vacances et jours fériés – 16 LPGA / Revenu d’invalide – Utilisation des données ESS les plus récentes

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_520/2016 (f) du 14.08.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2xQEH9l

 

Calcul du revenu sans invalidité comportant des indemnités pour vacances et jours fériés / 16 LPGA

Revenu d’invalide – Utilisation des données ESS les plus récentes (ESS 2012 et non 2010 in casu)

 

TF

Revenu sans invalidité

Selon l’ancien employeur, si l’assuré avait continué en 2013 à travailler pour lui, il aurait réalisé un salaire horaire de 28 fr. 85 pour un temps de travail hebdomadaire de 40 heures. Il aurait perçu des indemnités de 14,04% pour son droit aux vacances, de 3,58% pour son droit aux jours fériés et de 8,33% pour son droit au 13ème salaire.

Un supplément de vacances de 14,04% équivaut à 7,3 semaines de vacances (7,3 = 52 x 0,1404) soit 36,5 jours. L’indemnité de 3,58% correspond à 1,86 semaine (1,86 = 52 x 0,0358), soit 9 jours. Le salaire horaire est de 33 fr. 93 (28 fr. 85 + [14,04% x 28 fr. 85] + [3,58% x 28 fr. 85]).

Lorsque le salaire horaire comprend l’indemnité de vacances et l’indemnité pour jours fériés, les jours correspondants de vacances et de congé doivent être déduits du temps de travail annuel (arrêt I 446/01 du 4 avril 2002 consid. 2b; cf. aussi arrêt 8C_193/2013 du 4 juin 2013 consid. 3.1.3).

En l’espèce, l’assuré a été effectivement rémunéré durant 214,5 jours ([52 x 5] – [36,5 + 9]) à raison de 8 heures par jour. Il en résulte un revenu annuel de 58’223 fr. (33 fr. 93 x 8 x 214,5), auquel vient s’ajouter le droit au 13ème salaire. Le revenu sans invalidité s’élève donc à 63’073 fr.

 

Revenu d’invalide

Pour fixer le revenu d’invalide à 56’627 fr. 44, la juridiction cantonale s’est fondée sur des données de l’ESS 2010. Le droit à la rente a pris naissance au 1er octobre 2013. Au moment où la décision sur opposition (avril 2015) a été rendue les données de l’ESS 2012 (publiées en octobre 2014) étaient accessibles. L’assurance-accidents, respectivement la juridiction cantonale, aurait donc dû se fonder sur les données les plus récentes (ATF 8C_228/2017 du 14 juin 2017 consid. 4 destiné à la publication).

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_520/2016 consultable ici : http://bit.ly/2xQEH9l

 

 

9C_136/2017 (f) du 21.08.2017 – Révision d’une rente d’invalidité – 17 LPGA / Suppression de la rente d’invalidité octroyée depuis 20 ans – Mise en œuvre d’éventuelles mesures de réintégration sur le marché du travail

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_136/2017 (f) du 21.08.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2xh0quQ

 

Révision d’une rente d’invalidité / 17 LPGA

Suppression de la rente d’invalidité octroyée depuis plus de 15 ans – Mise en œuvre d’éventuelles mesures de réintégration sur le marché du travail

 

Assuré, souffrant d’un status post-opération genou gauche, d’un status post-opération hernie discale L5-S1 et d’une personnalité à traits dépendants et phobiques présentant une surcharge psychogène modérée, a été mis au bénéfice d’un quart de rente d’invalidité dès le 01.11.1995, puis d’une demi-rente pour le mois de janvier 1996 et d’une rente entière dès le 01.02.1996. Cette prestation a été maintenue à l’issue de révisions successives.

En raison d’une nouvelle procédure de révision en janvier 2014, une expertise bidisciplinaire (psychiatrie et orthopédie) a été réalisée. Les médecins ont conclu à une capacité totale de travail dans une activité adaptée.

L’office AI a supprimé le droit à la rente avec effet au 01.11.2015.

 

Procédure cantonale

Comparant la situation au moment de la décision du 06.05.1998 et celle au moment de la décision litigieuse, les premiers juges ont constaté une amélioration de l’état de santé de l’assuré, notamment d’un point de vue psychique, lui permettant d’exercer désormais une activité lucrative à temps complet dans une activité adaptée.

Par jugement du 12.01.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il existe des situations dans lesquelles il convient d’admettre que des mesures d’ordre professionnel sont nécessaires, malgré l’existence d’une capacité de travail médico-théorique. Il s’agit des cas dans lesquels la réduction ou la suppression, par révision (art. 17 al. 1 LPGA) ou reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), du droit à la rente concerne une personne assurée qui est âgée de 55 ans révolus ou qui a bénéficié d’une rente pendant quinze ans au moins. Cela ne signifie pas que la personne assurée peut se prévaloir d’un droit acquis dans le cadre d’une procédure de révision ou de reconsidération; il est seulement admis qu’une réadaptation par soi-même ne peut, sauf exception, être exigée d’elle en raison de son âge ou de la durée du versement de la rente, et que la capacité de travail recouvrée doit être examinée concrètement (arrêt 9C_228/2010 du 26 avril 2011 consid. 3.3 et 3.5, in SVR 2011 IV n° 73 p. 220; voir également arrêt 9C_254/2011 du 15 novembre 2011 consid. 7).

En l’occurrence, l’office intimé et les premiers juges ont commis une violation du droit en ne faisant pas application de cette jurisprudence. Il ne ressort par ailleurs pas du dossier que l’on se trouverait en présence d’un cas exceptionnel (voir exemples cités dans les arrêts 9C_183/2015 du 19 août 2015 consid. 5 et 8C_597/2014 du 6 octobre 2015 consid. 3.2) où il y aurait lieu d’admettre que la réadaptation par soi-même puisse être exigée d’un assuré bénéficiant d’une rente depuis plus de quinze ans.

L’office AI n’a pas concrètement examiné la situation de l’assuré et la question de l’octroi éventuel de mesures de réadaptation professionnelles. En l’état, il n’apparaît à première vue pas vraisemblable que l’assuré puisse, compte tenu de son éloignement prolongé du marché du travail, reprendre du jour au lendemain une activité lucrative sans que ne soient mises préalablement en œuvre des mesures destinées à l’aider à se réinsérer dans le monde du travail.

Par conséquent, il convient de renvoyer le dossier à l’office AI afin qu’il examine concrètement les besoins objectifs de l’assuré à ce propos. Ce n’est qu’à l’issue de cet examen et de la mise en œuvre d’éventuelles mesures de réintégration sur le marché du travail que l’office AI pourra définitivement statuer sur la révision de la rente d’invalidité et, le cas échéant, supprimer le droit à la rente (voir arrêt 9C_163/2009 du 10 septembre 2010 consid. 4.1.1 et les références).

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et la décision de l’office AI et renvoie la cause à l’office AI pour instruction complémentaire.

 

 

Arrêt 9C_136/2017 consultable ici : http://bit.ly/2xh0quQ

 

 

8C_688/2016 (f) du 08.08.2017 – Troubles psychiques – Causalité naturelle – 6 LAA / TCC léger vs TCC sévère – Appréciation du rapport d’expertise médicale

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_688/2016 (f) du 08.08.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2xgdalo

 

Troubles psychiques – Causalité naturelle / 6 LAA

TCC léger vs TCC sévère – Appréciation du rapport d’expertise médicale

 

Assuré, ouvrier au service d’une entreprise de démontage, a été victime d’un accident professionnel : le 12.01.2009, alors qu’il travaillait sur un toit, il a chuté d’une hauteur de 6.5 mètres environ. La chute a provoqué une commotion cérébrale, avec fracture plurifragmentaire ouverte du nez, une fracture distale du radius droit, une fracture-luxation plurifragmentaire des métacarpiens 2 et 3 gauches, une fracture intra-articulaire disloquée de l’os capital gauche, une luxation dorsale des métacarpiens 4 et 5 gauches, une rupture ligamentaire du scaphoïde et une distorsion de la cheville gauche, nécessitant une hospitalisation jusqu’au 26 janvier 2009. L’assuré a subi plusieurs interventions chirurgicales. L’incapacité de travail était totale.

De l’expertise neurologique mise en œuvre, les diagnostics de traumatisme crânio-cérébral (TCC) sévère avec conséquences neuropsychologiques et psychologiques persistantes, d’état anxieux et dépressif et de séquelles post-traumatiques des membres supérieurs de nature orthopédique ont été posés (rapport du 28.08.2014).

Le médecin d’arrondissement de l’assurance-accidents, spécialiste FMH en chirurgie, a fait état d’une limitation fonctionnelle des deux poignets, à gauche plus qu’à droite ainsi que de difficultés à l’opposition du pouce gauche et une atrophie de la musculature intrinsèque de la main gauche. La capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle ; la capacité de travail exigible dans une activité adaptée était complète.

L’assurance-accidents a alloué une rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 12% et une IPAI d’un taux de 17,5%. L’assureur-accidents a refusé de prendre en charge une éventuelle incapacité de travail sur le plan psychique, faute d’un rapport de causalité adéquate.

 

Procédure cantonale

Un rapport d’expertise pluridisciplinaire mandatée par l’assurance-invalidité auprès du Centre d’Expertise Médicale (CEMed) a été versé au dossier de la procédure cantonale.

Se fondant sur ce rapport d’expertise, les premiers juges ont retenu que rien ne permettait de conclure à l’existence de troubles psychiques objectivables consécutifs à l’accident. Par surabondance, ils ont considéré que même si l’assuré fût atteint de troubles psychiques, la causalité adéquate entre ceux-ci et l’accident du 12.01.2009 devait de toute manière être niée à l’aune des critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident de gravité moyenne à la limite des cas graves, tel que celui dont avait été victime l’assuré.

Par jugement du 16.09.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

En ce qui concerne le diagnostic de TCC sévère posé par l’expert neurologue mandaté par l’assurance-accidents (rapport du 28.08.2014), il convient de relever qu’il n’est pas documenté. Du rapport de sortie du 4 février 2009, il ressort que l’assuré a subi une commotio cerebri, avec un score de 15 sur l’échelle de Glasgow (GCS), ce qui correspond tout au plus à un TCC léger (voir arrêts 8C_44/2017 du 19 avril 2017 consid. 4.2.1 et 8C_413/2016 du 2 septembre 2016 consid. 3.1). Or, ce traumatisme ne permettrait pas, selon les experts du CEMed, d’expliquer les troubles cognitifs mis en évidence, à savoir un ralentissement et des troubles de la mémoire. Selon les experts, il n’y avait pas de notion de coma ni de lésions cérébrales dans le dossier. De surcroît, une IRM cérébrale pratiquée en mars 2014 ne mettait pas en évidence de séquelles post-traumatiques visibles.

En fin de compte, le seul diagnostic pouvant évoquer des troubles psychiques posé par le neurologue dans son rapport du 28.08.2014 était celui d’état anxieux et dépressif. Or, l’expert-psychiatre du CEMed a retenu qu’au moment de l’expertise, aucun signe anxieux ni dépressif n’avait été observé. Il était observé un manque de motivation de l’assuré pour envisager une réinsertion qui s’expliquait par une dimension caractérielle de la personnalité préexistante à l’accident. Toujours selon les experts, si un trouble réactionnel avait existé au cours des années précédentes, il n’avait pas été incapacitant et n’était actuellement plus objectivable.

Selon le TF, c’est à juste titre que les premiers juges sont parvenus à la conclusion qu’il convenait de suivre les résultats de l’expertise du CEMed, laquelle remplit les critères jurisprudentiels en matière de valeur probante.

En l’absence d’une atteinte psychiatrique clairement établie, il n’y a pas lieu d’examiner s’il existe un lien de causalité adéquate entre les troubles de nature psychique dont se plaint le recourant et l’accident du 12.01.2009.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_688/2016 consultable ici : http://bit.ly/2xgdalo

 

 

9C_231/2017 (f) du 31.05.2017 – Revenu d’invalide – Abattement sur le salaire statistique (ESS) – 16 LPGA / Pouvoir d’appréciation du Tribunal cantonal

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_231/2017 (f) du 31.05.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eFP7VC

 

Revenu d’invalide – Abattement sur le salaire statistique (ESS) / 16 LPGA

Pouvoir d’appréciation du Tribunal cantonal

 

Assurée, mère de trois enfants (nés en 2000, 2002 et 2007), a travaillé comme nettoyeuse à temps partiel (40%) du 09.05.2000 au 14.02.2014. Elle a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 22.04.2015, précisant qu’elle avait débuté une formation d’architecte d’intérieur le 26.02.2013.

Le médecin du service médical régional (SMR) de l’assurance-invalidité a diagnostiqué – avec répercussion sur la capacité de travail – un lupus (avec atteintes articulaire, musculaire et hématologique) et un syndrome de Sjögren secondaire ; l’assurée pouvait exercer une activité professionnelle adaptée à 50% dès août 2015.

L’instruction a été complétée par une enquête économique sur le ménage, laquelle a mis en évidence un empêchement de 25% dans l’accomplissement des travaux habituels dans le ménage. En application de la méthode mixte de l’évaluation de l’invalidité, l’office AI a rejeté la demande de prestations, au motif que le degré d’invalidité (15%) était insuffisant pour donner droit à des prestations. Pour la part « active », l’office AI a tenu compte d’un abattement de 10% sur le salaire résultant de l’Enquête de l’Office fédéral de la statistique sur la structure des salaires (ESS), en raison de la nature des limitations fonctionnelles présentées par l’assurée (difficultés aux tâches manuelles, difficultés de déplacement, diminution de la vitesse de travail, fatigabilité et diminution de la concentration).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/125/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2w2q7Kz)

Par jugement du 20.02.2017, admission du recours par le tribunal cantonal en application de la méthode ordinaire d’évaluation de l’invalidité, octroyant à l’assurée une demi-rente d’invalidité dès le 01.10.2015. S’agissant de l’abattement sur le salaire statistique, les juges cantonaux ont considéré que la déduction opérée par l’administration (10%) ne tenait pas suffisamment compte de l’importance des limitations et qu’une déduction de 15% apparaissait mieux appropriée à la situation, sans pour autant prendre en compte des facteurs de réduction supplémentaires

 

TF

L’office recourant ne conteste plus devant le Tribunal fédéral le fait que l’intimée aurait vraisemblablement exercé une activité professionnelle à plein temps sans atteinte à la santé.

Abattement sur le salaire statistique

Il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d’une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb p. 323). La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent par conséquent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité, autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79).

L’étendue de l’abattement du salaire statistique dans un cas concret constitue une question typique relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit, soit a commis un excès positif ou négatif de son pouvoir d’appréciation ou a abusé de celui-ci, notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 72).

Selon le TF, la juridiction cantonale pouvait sans arbitraire et sans excéder son pouvoir d’appréciation conférer un poids supplémentaire aux limitations fonctionnelles retenues par l’office AI. Dans ces conditions, l’appréciation globale qui a conduit l’autorité précédente à retenir un abattement de 15% n’apparaît pas comme le résultat de l’exercice d’un pouvoir d’appréciation contraire au droit.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_231/2017 consultable ici : http://bit.ly/2eFP7VC

 

 

8C_685/2016 (f) du 01.06.2017 – Participation à une rixe ou à une bagarre – Réduction des prestations en espèces / 39 LAA – 49 al. 2 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_685/2016 (f) du 01.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2j0NByP

 

Participation à une rixe ou à une bagarre – Réduction des prestations en espèces / 39 LAA – 49 al. 2 OLAA

Zone de danger exclue par l’assurance

 

Par déclaration d’accident, l’employeur de l’assuré a annoncé que le 13.07.2013, le prénommé a été victime d’une agression physique par une tierce personne sur la route, au cours de laquelle il avait subi une luxation de l’épaule droite.

Par ordonnance pénale, le procureur a reconnu E.__ (l’« agresseur ») coupable de violation simple des règles de la circulation routière et de lésions corporelles simples à l’encontre de l’assuré en raison de cette agression. Cette ordonnance n’a pas été contestée. L’assuré a pour sa part contesté l’ordonnance pénale le reconnaissant coupable de violation simple des règles de la circulation routière et de voies de fait ; il a été acquitté de ces deux chefs d’accusation. S’agissant des voies de fait, le juge a constaté qu’il n’était pas exclu que le prévenu se fût contenté de se défendre.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a réduit les prestations en espèces auxquelles avait droit l’assuré de 50%, au motif que celui-ci avait été impliqué dans une bagarre.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 116/15 – 82/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2w2Bzpx)

Se fondant sur l’ordonnance pénale condamnant E.__ (l’« agresseur »), la juridiction cantonale a retenu que l’assuré avait accéléré lorsque le motocycliste était en train de le dépasser, obligeant ce dernier à accélérer encore plus afin d’achever son dépassement. Après avoir demandé à l’assuré de s’arrêter, le motard l’avait suivi sur un petit chemin agricole en impasse. Arrivés au bout de celui-ci, une altercation s’était produite entre les deux protagonistes, au cours de laquelle ils s’étaient assénés plusieurs coups de poing. Si l’assuré n’avait pas été condamné à l’issue de la procédure pénale, c’était au bénéfice du doute. Il avait cependant admis avoir klaxonné le motard après sa manœuvre de dépassement pour lui montrer son mécontentement. Alors qu’il était attendu à un mariage, l’assuré avait pris la décision de ne pas s’y arrêter mais de poursuivre sa route. Selon ses déclarations, il avait dû se décider très rapidement, sans connaître la région et avait estimé préférable de ne pas conduire le motard sur les lieux où se déroulait le mariage « ceci pour éviter que la situation ne puisse dégénérer ». Selon les premiers juges, l’assuré était dès lors bien conscient que la situation pouvait se détériorer. Il était pourtant sorti de son véhicule, au fond d’une impasse déserte, pensant que le motard s’était calmé et que la situation s’était apaisée. Or, il se trouvait en présence d’une personne qui avait manifesté son mécontentement de façon claire, qui – toujours selon les déclarations de l’assuré – lui avait reproché d’avoir voulu le tuer, avait essayé de l’arrêter sur la route et l’avait suivi en tentant de donner des coups de pieds dans la portière de sa voiture. Cela étant, il n’était pas vraisemblable que le motard se fût « apaisé ». L’attitude du motocycliste décrite par l’assuré tendait au contraire à démontrer une irascibilité croissante. La juridiction cantonale a conclu que dans ces circonstances, le recourant s’était mis dans la zone de danger exclue par l’assurance-accidents.

Par jugement du 21.06.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Édicté par le Conseil fédéral en vertu de la délégation de compétence de l’art. 39 LAA, l’art. 49 al. 2 OLAA dispose que les prestations en espèces sont réduites au moins de moitié en cas d’accident non professionnel survenu notamment en cas de participation à une rixe ou à une bagarre, à moins que l’assuré ait été blessé par les protagonistes alors qu’il ne prenait aucune part à la rixe ou à la bagarre ou qu’il venait en aide à une personne sans défense (let. a), ou encore lors de dangers auxquels l’assuré s’expose en provoquant gravement autrui (let. b).

Il y a lieu de rappeler que la notion de participation à une rixe ou à une bagarre est plus large que celle de l’art. 133 CP. Pour admettre l’existence d’une telle participation, il suffit que l’assuré entre dans la zone de danger, notamment en participant à une dispute. Peu importe qu’il ait effectivement pris part activement aux faits ou qu’il ait ou non commis une faute: il faut au moins qu’il se soit rendu compte ou ait pu se rendre compte du danger. En outre, il doit exister un lien de causalité entre le comportement de la personne assurée et le dommage survenu. Si l’attitude de l’assuré – qui doit être qualifiée de participation à une rixe ou à une bagarre – n’apparaît pas comme une cause essentielle de l’accident ou si la provocation n’est pas de nature, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, à entraîner la réaction de violence, l’assureur-accidents n’est pas autorisé à réduire ses prestations d’assurance. Il convient de déterminer rétrospectivement, en partant du résultat qui s’est produit, si et dans quelle mesure l’attitude de l’assuré apparaît comme une cause essentielle de l’accident (ATF 134 V 315 consid. 4.5.1.2 p. 320; arrêt 8C_153/2016 du 13 décembre 2016 consid. 2).

En raison du comportement agressif, voire menaçant du motard qui le poursuivait, le recourant a toutefois décidé de ne pas s’arrêter dans le village où il était attendu à un mariage. Cela tend à démontrer qu’avant même l’altercation proprement dite, l’assuré avait déjà eu conscience du risque que la situation présentait un danger pour lui. Aussi, en sortant de son véhicule sur un chemin menant à une impasse après le déroulement des faits précités, l’assuré pouvait s’attendre, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, à une réaction violente du motard. C’est précisément par ce comportement, alors qu’il aurait pu faire demi-tour, que l’assuré s’est mis dans la zone de danger exclue par l’assurance.

D’autre part, même s’il ne voulait pas s’arrêter à l’endroit où devait se dérouler la cérémonie pour éviter un esclandre en présence des personnes invitées à la fête, l’assuré aurait certainement pu s’arrêter dans un autre endroit fréquenté, de manière à dissuader son poursuivant de le frapper.

Le TF admet que l’agression dont a été victime le recourant s’est produite alors que ce dernier a eu un comportement tombant sous le coup de l’art. 49 al. 2 let. a OLAA. Par conséquent, l’assureur-accidents pouvait réduire ses prestations en espèces de moitié.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_685/2016 consultable ici : http://bit.ly/2j0NByP

 

 

9C_155/2017 (f) du 01.06.2017 – Nouvelle contestation après jugement de renvoi / 107 al. 2 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_155/2017 (f) du 01.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2iZpjVO

 

Nouvelle contestation après jugement de renvoi / 107 al. 2 LTF

 

Assuré employé d’une société dès le 01.11.1996, d’abord à plein temps, puis à 60% dès le 01.03.2002. A ce titre et dès cette date, il a été affilié à la Fondation de prévoyance B.__ SA (ci-après: la Fondation).

L’office AI a octroyé à l’assuré une demi-rente d’invalidité dès le 01.03.2002, puis un quart de rente dès le 01.12.2002. Cette prestation a été confirmée à l’issue d’une procédure de révision en 2008.

L’assuré a requis la révision de son droit à une rente d’invalidité en mai 2011. Le 01.07.2012, il a débuté une nouvelle activité à mi-temps auprès de la société D.__ AG. L’office AI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité dès le 01.05.2011, puis une demi-rente dès le 01.08.2011.

Le recours formé par la Fondation a été rejeté ; le TF a précédemment admis partiellement le recours de dite Fondation, renvoyant la cause à la cour cantonale pour qu’elle complète l’instruction et rende une nouvelle décision concernant le droit de l’assuré à une rente de l’assurance-invalidité à compter de cette date (arrêt 9C_33/2016 du 16.08.2016).

 

Procédure cantonale (arrêt AI 226/16 ap. TF – 19/2017 – consultable ici : http://bit.ly/2xLyKv8)

Des certificats de salaire de l’assuré produits par la société D.__ AG, la juridiction cantonal a constaté que le salaire en cause s’élevait à 75’400 fr. par année (5’800 fr. x 13, entre le 1 er juillet 2012 et le 28 février 2014), puis à 99’840 fr. (7’680 fr. x 13, dès le 1 er mars 2014).

La société D.__ AG a attesté que son employé devait mettre à sa disposition un bureau, un dépôt, ainsi qu’une connexion internet, prestations dont la valeur mensuelle s’élevait à 1’300 fr. Les premiers juges ont considéré qu’il n’y avait par ailleurs pas lieu de déduire ce montant mensuel, dont ils n’avaient trouvé aucune trace dans le contrat de travail et qui n’apparaissait pas plausible.

Par jugement du 19.01.2017, admission du recours de la Fondation par le tribunal cantonal, réformant la décision de l’office AI, en ce sens que l’assuré a droit à une rente entière d’invalidité du 01.05.2011 au 31.07.2011, à une demi-rente d’invalidité du 01.08.2011 au 30.09.2013 et à un quart de rente d’invalidité du 01.10.2013 au 31.05.2014. A partir du 01.03.2014 (avec effet au 01.06.2014), la comparaison des revenus aboutissait à un degré d’invalidité de 31%, soit à un taux insuffisant pour maintenir le droit à une rente d’invalidité.

 

TF

Revenu sans invalidité

Le jugement attaqué a été rendu à la suite de l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral. Dans un tel cas, l’autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l’arrêt du Tribunal fédéral ; son pouvoir d’examen est limité par les motifs de l’arrêt de renvoi (art. 107 al. 2 LTF), en ce sens qu’elle est liée par ce qui a déjà été tranché définitivement par le Tribunal fédéral ainsi que par les constatations de fait qui n’ont pas été critiquées devant lui ; des faits nouveaux ne peuvent être pris en considération que sur les points qui ont fait l’objet du renvoi, lesquels ne peuvent être ni étendus, ni fixés sur une base juridique nouvelle.

Saisi d’un recours contre la nouvelle décision cantonale, le Tribunal fédéral est aussi lié par son arrêt de renvoi ; il ne saurait se fonder sur les motifs qu’il avait écartés ou qu’il n’avait pas eu à examiner, faute pour les parties de les avoir invoqués dans la précédente procédure de recours, alors qu’ils pouvaient – et devaient – le faire. La portée de l’arrêt de renvoi dépend donc du contenu de cet arrêt en relation avec les mémoires de recours et de réponse qui avaient été déposés: le procès doit parvenir un jour à sa fin et les parties – aussi bien la partie recourante que la partie intimée – doivent soulever tous les griefs qu’ils souhaitent voir traités de façon que le Tribunal fédéral soit en mesure de rendre une décision finale qui clôt le litige (cf. ATF 135 III 334 consid. 2 p. 335; 131 III 91 consid. 5 p. 93; arrêt 9C_53/2015 du 17 juillet 2015 consid. 2.1).

Dans son arrêt de renvoi (9C_33/2016), le TF a, sur recours de la Fondation, examiné le droit de l’assuré à une demi-rente de l’assurance-invalidité au-delà du 01.08.2011. Pour la période courant à partir du 01.10.2013, il a tout d’abord jugé qu’il n’y avait pas lieu de s’écarter du dernier salaire réalisé avant l’atteinte à la santé de l’assuré, que les premiers juges avaient arrêté à 132’605 fr. (valeur 2000). Compte tenu du renchérissement intervenu entre 2000 (indice: 106,4 points) et 2012 (indice: 115,5 points), ce revenu correspondait à 143’946 fr. (valeur 2012). Pour ce qui était du revenu avec invalidité, le TF a retenu que la juridiction cantonale avait renoncé à tort à lever l’incertitude qui pesait sur le versement de primes de la part de l’employeur. Ainsi qu’elle l’a d’ailleurs rappelé dans l’arrêt attaqué, la cour cantonale était dès lors invitée, sur renvoi du Tribunal fédéral, à réexaminer et à fixer uniquement le revenu d’invalide, ce qu’elle a fait.

En critiquant le revenu sans invalidité de 143’946 fr. retenu par les premiers juges, l’assuré s’en prend à un aspect du litige qui a déjà été tranché par le Tribunal fédéral. L’arrêt de renvoi n’impliquait en particulier nullement le droit pour l’assuré de faire administrer de nouvelles preuves sur le montant du revenu sans invalidité ; les faits sur lesquels il se fonde pour dénoncer « une erreur de calcul » auraient déjà pu et dû être invoqués dans la précédente procédure de recours. Faute pour l’assuré d’avoir fait valoir ces éléments précédemment, il ne peut y revenir dans la présente procédure.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_155/2017 consultable ici : http://bit.ly/2iZpjVO