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8C_479/2014 (f) du 03.07.2015 – Indemnité chômage – Gain assuré / Durée hebdomadaire normale de travail annoncé par l’employeur (42.5h) vs selon CCT romande du second œuvre (CCT-SOR) (41h) / Heures supplémentaires exclues du calcul du gain assuré / Reconsidération

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_479/2014 (f) du 03.07.2015

 

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Indemnité chômage – Gain assuré / 23 al. 1 LACI – 37 OACI

Durée hebdomadaire normale de travail annoncé par l’employeur (42.5h) vs selon CCT romande du second œuvre (CCT-SOR) (41h) – Interprétation des clauses normatives d’une convention collective de travail

Heures supplémentaires exclues du calcul du gain assuré

Reconsidération – Pas d’erreur manifeste / 95 al. 1 LACI – 53 al. 2 LPGA

 

Assuré a travaillé en qualité de peintre en bâtiment du 03.05.2011 au 23.12.2011 et du 02.01.2012 au 09.03.2012 dans le cadre d’un contrat de travail temporaire à plein temps, au service d’une société (ci-après : l’employeur). Le 19.03.2012, il a présenté une demande d’indemnité de chômage. L’employeur a attesté un horaire normal de travail dans l’entreprise de 42,5 heures par semaine et a indiqué que la convention collective de travail romande du second œuvre (ci-après: la CCT-SOR) était applicable.

La caisse cantonale de chômage (ci-après: la caisse) a alloué à l’assuré, à partir du 19.03.2012, une indemnité de chômage calculée sur la base d’un gain assuré de 5’704 fr. et d’un horaire de travail hebdomadaire de 42,5 heures.

A la suite d’une révision périodique effectuée par le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO), la caisse a rendu une décision, le 13.01.2014, par laquelle elle a réclamé à l’assuré la restitution d’un montant de 1’802 fr. 40, correspondant à des prestations perçues en trop durant la période du 19.03.2012 au 30.03.2012, ainsi qu’au cours des mois de mai et juin 2012 et de la période du mois d’août 2012 au mois de juin 2013. Elle a indiqué que l’indemnité de chômage aurait dû être calculée sur la base d’un gain assuré de 5’511 fr. et d’un horaire de travail hebdomadaire de 41 heures, conformément à la CCT-SOR. Compte tenu d’un montant de 177 fr. 90 déjà retenu sur les indemnités allouées au mois de juillet 2013, le montant encore à restituer s’élevait à 1’624 fr. 50.

Saisie d’une opposition, la caisse a soumis le cas au SECO, lequel a indiqué que les moyens invoqués par l’assuré n’étaient pas de nature à mettre en cause la décision de restitution des prestations. L’opposition a été rejetée par décision du 06.03.2014.

 

Procédure cantonale

Pour établir la durée hebdomadaire normale de travail, la cour cantonale s’est référée aux différents contrats de missions liant l’assuré à l’employeur, ainsi qu’à la CCT-SOR. Selon la CCT-SOR, la durée hebdomadaire moyenne de travail est de 41 heures, l’employeur ayant cependant la faculté de fixer cette durée à 45 heures au maximum (art. 12 al. 1 let. a et b). Si le nombre des heures effectuées au cours d’une une année dépasse un total de 2’132 heures (ce qui correspond à 41h hebdomadaires en moyenne) mais ne dépasse pas 2’212 heures (ce qui correspond à 42,5h hebdomadaires en moyenne), le travailleur bénéficie d’un bonus qui doit être compensé sous forme de congé ou rétribué sans supplément ; s’il est supérieur à 2’212 heures, le bonus est rémunéré ou compensé au titre des heures supplémentaires (art. 12 al. 2 let. i CCT-SOR).

Aussi, la cour cantonale a-t-elle inféré de ces dispositions que seules les heures effectuées en plus du total de 2’212 heures (ce qui correspond à 42,5h hebdomadaires en moyenne) constituent des heures supplémentaires exclues du calcul du gain assuré.

La cour cantonale a ainsi considéré que la durée hebdomadaire normale de travail de l’assuré était de 42,5h et non de 41h, comme l’a retenu la caisse, de sorte que celle-ci n’était pas fondée à considérer la différence de durée du temps de travail comme des heures supplémentaires exclues du calcul du gain assuré.

Par jugement du 21.05.2014, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision attaquée et condamnant la caisse à restituer à l’assuré les montants retenus sur les indemnités allouées à compter du mois de juillet 2013.

 

TF

Selon l’art. 23 al. 1 LACI, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’AVS qui est obtenu normalement au cours d’un ou de plusieurs rapports de travail durant une période de référence, y compris les allocations régulièrement versées et convenues contractuellement, dans la mesure où elles ne sont pas des indemnités pour inconvénients liés à l’exécution du travail (première phrase). Le Conseil fédéral détermine la période de référence et fixe le montant minimum (quatrième phrase). La période de référence pour le calcul du gain assuré est réglée à l’art. 37 OACI. Le gain assuré est calculé sur la base du salaire moyen des six derniers mois de cotisation (art. 11 OACI) qui précèdent le délai-cadre d’indemnisation (al. 1). Il est déterminé sur la base du salaire moyen des douze derniers mois de cotisation précédant le délai-cadre d’indemnisation si ce salaire est plus élevé que le salaire moyen visé à l’alinéa 1 (al. 2). La période de référence commence à courir le jour précédant le début de la perte de gain à prendre en considération quelle que soit la date de l’inscription au chômage (al. 3, première phrase). Aux termes de l’art. 37 al. 3bis OACI (dans sa teneur – applicable en l’occurrence [cf. ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 p. 220 et les arrêts cités] – valable depuis le 1er avril 2011), lorsque le salaire varie en raison de l’horaire de travail usuel dans la branche, le gain assuré est calculé conformément aux alinéas 1 à 3, mais au plus sur la moyenne annuelle de l’horaire de travail convenu contractuellement.

Le salaire pris en considération comme gain assuré se rapproche de la notion de salaire déterminant au sens de l’art. 5 al. 2 LAVS, mais ne se recouvre pas exactement avec celui-ci, comme cela ressort du terme « normalement » (« normalerweise » ; « normalmente ») utilisé à l’art. 23 al. 1 LACI (BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 8 ad art. 23). Certains montants perçus par le salarié, certes soumis à cotisation, n’entrent pas dans la fixation du gain assuré. Il en va ainsi notamment de la rémunération des heures supplémentaires (ATF 129 V 105), de l’indemnité de vacances (à certaines conditions: ATF 130 V 492 consid. 4.2.4 p. 497), des gains accessoires (art. 23 al. 3 LACI; ATF 129 V 105 consid. 3.2 p. 108; 126 V 207) ou des indemnités pour inconvénients liés aux travail ou en raison de frais occasionnés par le travail (art. 23 al. 1, 1 ère phrase, LACI; DTA 1992 n. 14 p. 140 [C 13/92] consid. 2b).

Par heures supplémentaires exclues du calcul du gain assuré, il y a lieu de comprendre non seulement les heures supplémentaires (« Überzeit ») au sens des art. 12 et 13 LTr, mais également les heures effectuées en sus de l’horaire habituel (« Überstunde »). Par temps de travail accompli en sus de l’horaire habituel, il faut comprendre l’activité accomplie en plus de la durée de travail en vigueur dans l’entreprise ou habituelle dans la branche, telle qu’elle a été fixée par le contrat individuel de travail ou la convention collective. Tant les rémunérations perçues dans l’accomplissement d’heures supplémentaires que les gains réalisés au cours d’heures effectuées en sus de l’horaire habituel ne constituent pas un salaire obtenu « normalement » au sens de l’art. 23 al. 1 LACI (ATF 129 V 105 consid. 3 p. 107 s.; 116 II 69 consid. 4a p. 70; DTA 2013 p. 68 [8C_379/2012] consid. 3.2; 2003 p. 189 [C 108/02] consid. 2).

Les clauses normatives d’une convention collective de travail s’interprètent selon les méthodes applicables aux lois (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1 p. 284; 127 III 318 consid. 2a p. 322; arrêt 4A_163/2012 du 27 novembre 2012 consid. 4.1, non publié in ATF 139 III 60). D’après la jurisprudence, la loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). On peut cependant s’écarter de cette interprétation s’il y a des raisons sérieuses de penser que le texte de la loi ne reflète pas la volonté réelle du législateur; de tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Lorsque plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d’autres dispositions; le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d’interprétation, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique (ATF 140 V 227 consid. 3.2 p. 230, 489 consid. 4.1 et les arrêts cités).

Dans le domaine de l’interprétation des dispositions normatives d’une convention collective, le Tribunal fédéral a précisé que la distinction entre les règles sur l’interprétation des lois et les règles sur l’interprétation des contrats ne doit pas être exagérée; la volonté des cocontractants et ce que l’on peut comprendre selon le principe de la bonne foi constituent également des moyens d’interprétation (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1 p. 284; 133 III 213 consid. 5.2 p. 218; arrêt 4A_163/2012 du 27 novembre 2012 consid. 4.1, non publié in ATF 139 III 60).

 

En l’espèce, il est constant que les contrats de missions liant l’assuré à l’employeur étaient soumis aux conditions de la CCT-SOR. Or, selon l’art. 12 al. 1 let. a de cette convention, la durée hebdomadaire moyenne de travail est de 41 heures. L’art. 12 al. 1 let. b CCT-SOR dispose que l’entreprise a la faculté de fixer la durée hebdomadaire de travail à 39 heures au minimum et 45 heures au maximum, du lundi au vendredi, la tranche horaire ordinaire se situant entre 06.00 heures et 22.00 heures (06.00 heures et 18.00 heures dans le canton de Genève [cf. annexe V à la CCT-SOR]). En l’occurrence, l’employeur a fait usage de cette faculté en instaurant un horaire de travail hebdomadaire de 42,5 heures. Il n’en demeure pas moins, selon une interprétation littérale et conformément au principe de la bonne foi, que l’art. 12 al. 1 let. a CCT-SOR fixe l’horaire de travail habituel hebdomadaire à 41 heures dans le secteur de la peinture dans le canton de Genève.

L’art. 12 al. 2 CCT-SOR règle les conditions applicables en cas d’instauration d’un horaire variable destiné à tenir compte des besoins économiques de l’entreprise. Celle-ci doit notamment s’acquitter d’un salaire « mensuel-constant » calculé sur la base du salaire horaire multiplié par 177,7 heures – ce qui correspond à 41 heures par semaine et 2’132 heures par année (art. 12 al. 2 let. a et c CCT-SOR). S’il justifie d’un « bonus d’heures » de plus de 2’132 heures et de moins de 2’212 heures (ce qui correspond à 42,5 heures par semaine), le travailleur a droit à une compensation sous forme d’heures de congé ou au paiement des heures, sans supplément; les heures accomplies en plus du maximum susmentionné sont considérées comme des heures supplémentaires payées ou compensées avec un supplément au sens de l’art. 16 CCT-SOR (art. 12 al. 2 let. i CCT-SOR).

Cela étant, même si le travailleur qui effectue plus de 41 heures hebdomadaires mais au maximum 42,5 heures ne perçoit pas de supplément au sens de l’art. 16 CCT-SOR, il n’en demeure pas moins que la rémunération obtenue pour les heures accomplies en plus de la durée hebdomadaire moyenne de travail de 41 heures, prévue à l’art. 12 al. 1 let. a CCT-SOR, ne constitue pas un salaire obtenu « normalement » au sens de l’art. 23 al. 1 LACI. Dans ces conditions, le gain assuré déterminant pour fixer le montant de l’indemnité de chômage allouée à compter du 19.03.2012 devait être calculé sur la base d’un horaire de travail hebdomadaire de 41 heures.

 

Selon l’art. 95 al. 1 LACI en relation avec les art. 25 al. 1 et 53 al. 2 LPGA, l’assureur peut réclamer la restitution de prestations accordées sur la base de décisions – formelles ou non – passées en force et sur lesquelles une autorité judiciaire ne s’est pas prononcée sous l’angle matériel seulement si celles-ci sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (reconsidération; cf. ATF 130 V 318 consid. 5.2 p. 319; 122 V 367 consid. 3 p. 368; 110 V 176 consid. 2a p. 179 et les références).

En l’espèce, s’il était faux de calculer l’indemnité de chômage sur la base d’une durée hebdomadaire de travail de 42,5 heures, il n’apparaît cependant pas, sur le vu des considérations qui précèdent, que cette erreur était manifeste. Aussi, la caisse n’était-elle pas fondée, par sa décision sur opposition du 06.03.2014, à réclamer les prestations allouées en trop.

 

Le TF rejette le recours du SECO.

 

 

Arrêt 8C_479/2014 consultable ici

 

 

8C_766/2018 (f) du 23.03.2020 – Gain assuré pour la rente – 15 LAA / Droit à la rente naissant plus de cinq ans après l’accident – Rappel de la notion issue de l’art. 24 al. 2 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2018 (f) du 23.03.2020

 

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Gain assuré pour la rente / 15 LAA

Droit à la rente naissant plus de cinq ans après l’accident – Rappel de la notion issue de l’art. 24 al. 2 OLAA

Adaptation du gain assuré déterminant ne doit pas se faire concrètement (évolution auprès du dernier employeur) mais en fonction de l’évolution des salaires nominaux dans le domaine d’activité antérieur – Pas de revirement de la jurisprudence

 

Assuré, agent de piste, a subi le 04.10.1995 une distorsion au genou droit en jouant au football, laquelle a nécessité une arthroscopie avec méniscectomie partielle du ménisque interne droit. Le 15.06.2008, l’assuré a été admis en urgence au service de neurochirurgie de l’hôpital C.__ où il a subi une laminectomie C4 pour tétraparésie sub C4 sur canal étroit décompensé. L’incapacité de travail de l’assuré a été totale depuis lors.

Rechute de l’accident du 04.10.1995 : douleurs et lâchages au niveau du genou droit. IRM le 10.03.2009 faisant état d’une chondrocalcinose sévère et d’une gonarthrose. Le 08.09.2009, l’assuré a subi une arthroscopie avec toilette articulaire. En raison d’une évolution difficile avec inflammation récidivante, une prothèse totale a été implantée au niveau de son genou droit le 06.05.2010.

Expertise réalisée par des médecins du service de neurologie de l’hôpital D.__ (rapport du 07.08.2015). Les experts ont constaté qu’au moment de la rechute annoncée le 10.03.2009, la capacité de travail de l’assuré dans sa profession habituelle était entière, compte tenu de la seule problématique au genou droit. Entre le 10.03.2009 et le 06.05.2010, l’évolution sur le plan neurologique avait été favorable tandis que la pathologie arthrosique de genou était devenue prépondérante par rapport aux séquelles de myélopathie cervicale. La reprise des activités n’avait pas été possible jusqu’à l’arthroplastie du genou droit le 06.05.2010. Postérieurement à ladite intervention, les experts ont retenu qu’en faisant abstraction des autres pathologies, les douleurs persistantes au niveau du genou associées à un épanchement et à une pseudolaxité empêchaient l’exercice de l’activité d’agent de sûreté à 100%. En revanche, l’exercice d’une activité adaptée était possible à 100%, à condition d’éviter l’usage intensif des escaliers, le port de charges de plus de 20 kilos, la station debout prolongée et la marche rapide ou la course.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a alloué à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 40% dès le 01.06.2010 2010 et calculée sur la base d’un gain assuré de 68’686 fr. Elle lui a en outre accordé une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 25%.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/886/2018 – consultable ici)

Le droit à la rente de l’assuré étant né le 01.06.2010, soit plus de cinq ans après l’accident du 04.10.1995, l’assurance-accidents a fait application de l’art. 24 al. 2 OLAA et retenu que le salaire déterminant était celui que l’assuré aurait réalisé du 01.06.2009 au 31.05.2010 s’il n’avait pas été victime de l’accident. Pour calculer ce revenu, elle a pris en compte les données salariales de l’assuré pour la période courant du 04.10.1994 au 03.10.1995 (année précédant l’accident initial). Selon l’extrait du livre de paie transmis par l’Office du personnel de l’Etat de Genève, la rémunération de l’assuré s’élevait alors à 58’203 fr. 90. Ce montant a ensuite été adapté à la période de calcul déterminante, soit à celle allant du 01.06.2009 au 31.05.2010. La juridiction cantonale a confirmé le montant du gain assuré de 68’686 fr.

Par jugement du 04.10.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1); est déterminant pour le calcul des rentes le salaire que l’assuré a gagné durant l’année qui a précédé l’accident (al. 2, deuxième phrase ; cf. également l’art. 22 al. 4, première phrase OLAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions sur le gain assuré pris en considération dans des cas spéciaux (al. 3). Faisant usage de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l’art. 24 OLAA sous le titre marginal « Salaire déterminant pour les rentes dans des cas spéciaux ». Lorsque le droit à la rente naît plus de cinq ans après l’accident ou l’apparition de la maladie professionnelle, le salaire déterminant est celui que l’assuré aurait reçu, pendant l’année qui précède l’ouverture du droit à la rente, s’il n’avait pas été victime de l’accident ou de la maladie professionnelle, à condition toutefois que ce salaire soit plus élevé que celui qu’il touchait juste avant la survenance de l’accident ou l’apparition de la maladie professionnelle (art. 24 al. 2 OLAA).

Selon la jurisprudence, l’art. 24 al. 2 OLAA n’est pas seulement applicable lorsque la naissance du droit à la rente est différée en raison de la prolongation du processus de guérison après un accident, mais également lorsqu’on procède pour la première fois à la fixation de la rente après plusieurs accidents invalidants et que le droit à la rente naît plus de cinq ans après le premier accident (ATF 123 V 45 consid. 3c p. 50 s.). De même, le gain assuré doit aussi être déterminé conformément à l’art. 24 al. 2 OLAA lorsqu’on procède pour la première fois à la fixation de la rente après une rechute (ou des séquelles tardives) survenue (s) plus de cinq ans après l’accident (ATF 140 V 41 consid. 6.1.2 p. 44; arrêt U 427/99 du 10 décembre 2001 consid. 3a, non publié in ATF 127 V 456; SVR 2012 UV n° 3 p. 9 consid. 3.1.2, arrêt 8C_237/2011 du 19 août 2011; arrêt U 286/01 du 8 mars 2002 consid. 2b).

Il résulte de ce qui précède que le salaire déterminant pour le droit à la rente de l’assuré est celui qu’il aurait reçu pendant l’année qui précède l’ouverture du droit à la rente (le 01.06.2010), s’il n’avait pas été victime de l’accident et de la rechute, à condition que ce salaire soit plus élevé que celui qu’il touchait avant la survenance de l’accident (le 04.10.1995). Il convient dès lors d’examiner le montant du gain assuré contesté par l’assuré.

Selon la jurisprudence, l’art. 24 al. 2 OLAA a uniquement pour but de ne pas désavantager les assurés dont le droit à la rente naît plusieurs années après l’événement accidentel par rapport à ceux qui se voient octroyer la rente plus tôt, quand une forte augmentation des salaires s’est produite dans l’intervalle (ATF 127 V 165 consid. 3b p. 173; arrêt U 308/04 du 16 janvier 2006 consid. 3.1). En revanche, il n’y a pas lieu de placer l’assuré dans la situation qui serait la sienne si l’accident était survenu immédiatement avant l’ouverture du droit à la rente. La prise en compte, au moment de la fixation du droit à la rente, de l’évolution des salaires auprès du dernier employeur irait en substance au-delà du but réglementaire. Celui-ci consiste dans l’adaptation du gain assuré à l’évolution générale des salaires, c’est-à-dire à l’évolution normale du salaire dans le domaine d’activité habituelle. Aussi faut-il écarter tout autre changement dans les conditions salariales survenu depuis l’accident ou qui aurait pu se produire si l’accident n’avait pas eu lieu, comme une promotion professionnelle ou un changement d’employeur (ATF 127 V 165 consid. 3b p. 173, 118 V 298 consid. 3b p. 303) et considérer avec retenue toute évolution du salaire dans l’entreprise qui pourrait être influencée par l’assuré ou dépendre de lui. Or la prise en compte de l’évolution des salaires nominaux dans le domaine d’activité antérieur tient compte précisément de l’évolution intervenue, tout en écartant les facteurs étrangers au but visé à l’art. 24 al. 2 OLAA. C’est pourquoi elle est le mieux à même de mettre en œuvre cette disposition réglementaire, en conformité avec le principe de l’égalité de traitement (arrêt 8C_760/2014 du 15 octobre 2015, consid. 5.3.2 et les références).

En outre, contrairement à ce que prétend l’assuré, il convient de rappeler que les bases de calcul dans le temps du gain assuré sont différentes pour l’indemnité journalière et pour la rente (art. 15 al. 2 LAA). En effet, l’indemnité journalière est calculée sur la base du salaire que l’assuré a reçu en dernier lieu avant l’accident, y compris les éléments de salaire non encore perçus et auxquels il a droit (art. 22 al. 3 OLAA). En principe, on ne tient pas compte de ce que l’assuré aurait gagné après l’accident. L’indemnité journalière ne se fonde donc pas sur un salaire hypothétique mais sur le revenu dont l’assuré victime d’un accident est effectivement privé en raison de la réalisation du risque assuré (méthode de calcul concrète ; ATF 117 V 170 consid. 5b p. 173; SVR 2006 UV n° 6 p. 20, U 357/04 du 22 septembre 2005 consid. 1.5.4; JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L’assurance-accidents obligatoire, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 3 e éd., 2016, n° 179 p. 956). Les rentes sont calculées quant à elles sur la base du salaire que l’assuré a reçu d’un ou de plusieurs employeurs durant l’année qui a précédé l’accident, y compris les éléments de salaire non encore perçus auxquels il a droit (art. 22 al. 4, première phrase, OLAA). Sont déterminants pour fixer le gain assuré le rapport de travail et les circonstances salariales qui existaient au moment de l’événement accidentel assuré, sans tenir compte des modifications du salaire qui seraient éventuellement intervenues sans l’accident (méthode de calcul abstraite; SVR 2006 UV n° 6 p. 20 consid. 1.5.4 déjà cité; JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, op. cit., n° 182 p. 956). Le Conseil fédéral a cependant apporté certains correctifs à la règle du dernier salaire obtenu avant l’accident, tant pour l’indemnité journalière que pour les rentes. C’est ainsi que selon l’art. 23 al. 8 OLAA, le salaire déterminant en cas de rechute n’est pas le dernier salaire obtenu avant l’accident mais le salaire que l’assuré recevait juste avant la rechute. Le gain assuré déterminant pour la rente peut ainsi être nettement inférieur à celui déterminant pour l’indemnité journalière dans le cas où, comme en l’espèce, il s’agit de statuer pour la première fois sur la rente en cas de rechute survenue plus de cinq ans après l’accident (DOROTHEA RIEDI HUNOLD, in: Hürzeler/Kieser [éd.], UVG, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, 2018, n° 33 ad art. 15 LAA).

Par ailleurs, l’assuré ne saurait pas non plus se fonder sur le principe d’équivalence (cf. à cet égard ATF 127 V 165 consid. 4a p. 173) pour voir son gain assuré déterminant ajusté au-dessus de l’évolution du salaire nominal. En effet, il a déjà été jugé que le principe d’équivalence n’est pas enfreint si la rente est calculée sur la base du gain assuré au moment de l’accident et adapté à l’évolution nominale des salaires jusqu’à l’ouverture du droit à la rente (arrêt U 286/01 du 8 mars 2002 consid. 3b/cc). De même, le principe d’équivalence n’est pas non plus remis en cause lorsque l’assuré a payé des primes sur un revenu plus élevé après l’accident dès lors qu’en cas de nouvel accident, c’est le salaire reçu durant l’année précédant ce dernier qui serait alors déterminant (art. 24 al. 4 OLAA; ATF 123 V 45 consid. 3a p. 49; arrêt U 286/01 précité consid. 3b/cc).

Vu ce qui précède, il n’y a pas lieu de revenir sur la jurisprudence selon laquelle l’adaptation du gain assuré déterminant pour la fixation de la rente née plus de cinq ans après l’accident (art. 24 al. 2 OLAA) ne doit pas se faire concrètement selon l’évolution des salaires auprès du dernier employeur mais en fonction de l’évolution des salaires nominaux dans le domaine d’activité antérieur.

Cela étant, le montant annuel du gain assuré fixé par l’assurance-accidents et confirmé par la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique, de sorte que le recours doit être rejeté.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_766/2018 consultable ici

 

 

8C_82/2017+8C_84/2017 (f) du 06.12.2017 – Revenu d’invalide selon l’ESS – Abattement – 16 LPGA – 18 LAA / Critère de l’âge pour d’abattement vs influence de l’âge sur la capacité de gain selon 28 al. 4 OLAA / Gain assuré pour la rente – Actionnaire – Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_82/2017+8C_84/2017 (f) du 06.12.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2FBXr19

 

Revenu d’invalide selon l’ESS – Abattement / 16 LPGA – 18 LAA

Critère de l’âge pour d’abattement vs influence de l’âge sur la capacité de gain selon 28 al. 4 OLAA

Formation et expérience professionnelle de l’assuré – Facilitation d’intégration dans une activité adaptée

Gain assuré pour la rente – Actionnaire – Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux – 15 LAA – 22 al. 2 let. c OLAA

 

Assuré, né en 1958, au bénéfice d’une formation de dessinateur industriel en constructions mécaniques, a exercé durant plusieurs années des activités de mécanicien sur machine et de monteur-électricien. Il a travaillé au service de la société B.__ SA, active dans le commerce de viande et inscrite au registre du commerce en 2010, ainsi qu’au service de la société C.__ Sàrl, active dans le même domaine et inscrite audit registre en 2012.

Le 23.07.2012, il a été renversé par une voiture alors qu’il effectuait une livraison à vélo et il a subi une fracture du plateau tibial gauche avec subluxation du genou, ainsi que plusieurs lésions ligamentaires et musculaires.

Dans la déclaration de sinistre LAA du 07.08.2012, B.__ SA a indiqué un taux d’occupation de 100% et un salaire annuel de 71’500 fr. (5’500 fr. x 13). De son côté, la Caisse suisse de compensation a établi un extrait du compte individuel selon lequel l’assuré avait perçu un revenu total de 7’200 fr. pour la période d’avril à décembre 2011 et de 10’100 fr. pour la période de janvier à juillet 2012. Le 11.06.2014, l’assureur-accidents a indiqué que l’indemnité journalière serait calculée en fonction d’un revenu annuel brut de 71’500 fr. (5’500 fr. x 13), compte tenu du salaire effectif obtenu par l’intéressé durant la période du 01.07.2012 au 23.07.2012 (4’216 fr. 60).

Par décision du 13.10.2015, confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a alloué à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 18% à compter du 01.11.2015, ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 30%. La rente d’invalidité a été calculée en fonction d’un gain assuré de 15’935 fr. 45 et compte tenu d’un taux d’abattement de 10% sur le revenu d’invalide fixé sur la base des statistiques salariales.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1056/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2B2Ryq5)

Par jugement du 16.12.2016, admission partiel du recours par le tribunal cantonal, reconnaissant le droit de l’assuré à une rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 18% et calculée sur la base d’un gain assuré de 54’860 fr.

 

TF

Abattement sur le salaire statistique – Critère de l’âge

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (cf. ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79 s.).

L’étendue de l’abattement (justifié dans un cas concret) constitue une question typique relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit, soit si elle a commis un excès positif (« Ermessensüberschreitung ») ou négatif (« Ermessensunterschreitung ») de son pouvoir d’appréciation ou a abusé (« Ermessensmissbrauch ») de celui-ci (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 72 s.; 132 V 393 consid. 3.3 p. 399), notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (cf. ATF 130 III 176 consid. 1.2 p. 180).

Contrairement au pouvoir d’examen du Tribunal fédéral, celui de l’autorité judiciaire de première instance n’est en revanche pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation), mais s’étend également à l’opportunité de la décision administrative (« Angemessenheitskontrolle »; ATF 126 V 75 consid. 6 p. 81; SVR 2017 UV n° 7 p. 21, 8C_883/2015 du 21 octobre 2016 consid. 6.2.).

L’assureur-accidents a réduit de 10% le salaire tiré de l’ESS afin de tenir compte de l’âge de l’assuré et de ses limitations fonctionnelles. L’assureur-accidents a considéré que la formation de base de l’assuré était de nature à faciliter sa reconversion, notamment dans l’exercice de tâches industrielles légères, et à l’aider à acquérir de nouvelles connaissances, de sorte que le facteur de l’âge ne justifiait pas d’effectuer un abattement supérieur à 10%.

Le taux d’abattement de 10% retenu par l’assurance-accidents a été confirmé par la cour cantonale essentiellement en raison de l’âge de l’assuré. Or, faisant usage de la délégation de compétence de l’art. 18 al. 2 LAA, le Conseil fédéral a introduit à l’art. 28 al. 4 OLAA une disposition particulière afin d’évaluer le taux d’invalidité des assurés qui ne reprennent pas d’activité lucrative après l’accident en raison de leur âge (variante I) ou dont l’âge avancé apparaît essentiellement comme la cause de la diminution de la capacité de gain (variante II). Dans ces cas, les revenus de l’activité lucrative déterminants pour l’évaluation du taux d’invalidité sont ceux qu’un assuré d’âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser. C’est pourquoi, dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral a laissé indécis le point de savoir si, dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire, le critère de l’âge constituait un critère d’abattement sur le salaire statistique ou si, dans ce domaine, l’influence de l’âge sur la capacité de gain devait être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l’art. 28 al. 4 OLAA (SVR 2016 UV n° 39 p. 131, 8C_754/2015, consid. 4.3; arrêts 8C_439/2017 du 6 octobre 2017 consid. 5.6.4; 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.2.2).

En l’espèce, ce point peut également rester indécis parce que les conditions d’un abattement en raison de l’âge ne sont pas réalisées. Pour savoir si le critère de l’âge justifie un abattement, il convient de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas concret et de procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d’appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d’invalide (ATF 126 V 75 consid. 5b/bb p. 80; SVR 2017 UV n° 7 p. 21, déjà cité, consid. 6.2.1 et les références; arrêt 8C_439/2017, déjà cité, consid. 5.6.4).

L’assuré n’expose pas en quoi sa capacité réelle d’être reclassé serait concrètement réduite en raison de son âge. Certes ses perspectives de retrouver un emploi dans le domaine du dessin industriel ne sont pas les meilleures et l’exercice des professions de mécanicien ou de monteur-électricien n’apparaît pas compatible avec son état de santé. Il n’en demeure pas moins que la formation de l’intéressé et son expérience professionnelle constituent indéniablement un avantage en terme de facilité d’intégration dans une activité adaptée comprenant des tâches physiques ou manuelles simples (voir dans ce sens SVR 2017 UV n° 7 p. 21, déjà cité, consid. 6.2.1).

Le TF confirme le taux d’abattement de 10%.

 

Gain assuré

Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Le salaire que l’assuré a gagné durant l’année qui a précédé l’accident est déterminant pour le calcul des rentes (art. 15 al. 2, seconde phrase, LAA). Sous réserve des dérogations énumérées sous lettres a à d, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 22 al. 2, 1ère phrase, OLAA). Pour la détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante, les caisses de compensation se fondent sur des données fiscales qui les lient (art. 23 RAVS).

Conformément à la délégation de l’art. 15 al. 3 LAA, le Conseil fédéral a promulgué des dispositions sur la prise en considération du gain assuré dans des cas spéciaux. Ainsi, pour les membres de la famille de l’employeur travaillant dans l’entreprise, les associés, les actionnaires ou les membres de sociétés coopératives, il est au moins tenu compte du salaire correspondant aux usages professionnels et locaux (art. 22 al. 2 let. c OLAA). Le but de cette réglementation est d’éviter que les assurés qui se trouvent dans un rapport particulier avec leur employeur et, de ce fait, perçoivent un gain inférieur à celui qu’ils pourraient réaliser normalement sur le marché du travail, ne soient désavantagés lorsqu’ils ont droit à des prestations de l’assurance-accidents (SVR 2007 UV n° 39 p. 131, 8C_88/2007, consid. 2; arrêts 8C_14/2016 du 21 décembre 2016 consid. 3.3; 8C_893/2011 du 31 mai 2012 consid. 2).

L’assureur-accidents a fixé le gain assuré pour la rente d’invalidité à 15’935 fr. 45, correspondant aux revenus déclarés par l’intéressé et effectivement perçus durant la période du 23.07.2011 au 22.07.2012, selon l’extrait du compte individuel établi par la Caisse suisse de compensation.

Le gain assuré a été fixé à 54’860 fr. par la cour cantonale. Elle a considéré que les éléments versés au dossier ne permettaient pas d’établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’intéressé était effectivement actionnaire de B.__ SA. La juridiction précédente est d’avis toutefois que le point de savoir si l’assuré était actionnaire de B.__ SA pouvait être laissé indécis, du moment que la qualité d’actionnaire ne constitue pas une condition nécessaire pour se prévaloir de la dérogation prévue à l’art. 22 al. 2 let. c OLAA.

L’assureur-accidents conteste le jugement cantonal en tant que la juridiction précédente a considéré que « la qualité d’actionnaire ne constitue pas une condition nécessaire à l’application de l’art. 22 al. 2 let. c OLAA ». Le texte clair de cette disposition réglementaire mentionne expressément les « actionnaires » lorsque l’employeur est une société anonyme.

Le TF ne partage pas le point de vue de la cour cantonale, selon lequel la qualité d’actionnaire ne constitue pas une condition nécessaire pour calculer le gain assuré selon l’art. 22 al. 2 let. c OLAA, et admettre qu’un assuré peut se prévaloir de cette réglementation en tant que directeur de la société anonyme qui l’emploie. Il n’y a pas lieu, en effet, de s’écarter du texte clair de cette disposition et d’interpréter de manière extensive le lien personnel étroit qui doit exister entre l’assuré et l’employeur lorsque celui-ci, comme en l’occurrence, est une société anonyme. Aussi n’est-il pas possible, à la lecture de ce précédent, de savoir si l’assuré, membre du conseil d’administration avec signature individuelle et directeur, était également actionnaire de la société anonyme qui l’employait.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré et admet partiellement le recours de l’assureur-accidents, annulant le jugement cantonal s’agissant du gain assuré.

 

 

Arrêt 8C_82/2017+8C_84/2017 consultable ici : http://bit.ly/2FBXr19

 

 

8C_778/2016 (f) du 01.09.2017 – Gain assuré pour l’indemnité journalière en cas de rechute – 15 LAA – 23 al. 8 OLAA / Gain assuré pour un chômeur transfrontalier (ressortissant français résidant en France) / Calcul des indemnités journalières en cas de rechute

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_778/2016 (f) du 01.09.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2hsUpkw

 

Gain assuré pour l’indemnité journalière en cas de rechute / 15 LAA – 23 al. 8 OLAA

Gain assuré pour un chômeur transfrontalier (ressortissant français résidant en France)

Calcul des indemnités journalières en cas de rechute / 23 al. 8 OLAA

 

Le 07.09.2012, l’assuré, ressortissant français et domicilié en France voisine, a été victime d’une agression lors d’un braquage commis dans une station-service en Suisse. Il travaillait alors en qualité de menuisier. Le cas a été pris en charge par l’assureur LAA.

Par lettre du 01.09.2014, l’assuré a informé l’assureur-accidents d’une « opération de la clavicule » envisagée par son médecin-traitant, en lui demandant si elle en assumerait le coût et les conséquences sur sa capacité de travail. Après avoir complété l’instruction, l’assureur-accidents a accepté de reprendre le versement des prestations en nature à titre de rechute et réservé à un examen ultérieur le droit à des indemnités journalières. À compter du 17.11.2015, l’assuré a présenté une incapacité de travail et demandé l’octroi de prestations en espèces.

Par décision du 27.04.2016, confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a fixé le montant de l’indemnité journalière à 85 fr. 80, calculé sur la base du salaire perçu juste avant le 01.09.2014, lequel était constitué d’allocations d’aide au retour à l’emploi allouées par les autorités de chômage françaises.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 74/16 – 103/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2xtX3OG)

Par jugement du 20.10.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Gain assuré pour l’indemnité journalière en cas de rechute

Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Est réputé gain assuré pour le calcul des indemnités journalières le dernier salaire que l’assuré a reçu avant l’accident (art. 15 al. 2, première phrase, LAA). Sous réserve de certaines dérogations énumérées sous lettres a à d, il s’agit du salaire déterminant au sens de la législation sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 22 al. 2, 1 ère phrase, OLAA).

Conformément à la délégation de l’art. 15 al. 3 LAA, le Conseil fédéral a promulgué des dispositions sur la prise en considération du gain assuré dans des cas spéciaux, pour l’indemnité journalière (art. 23 OLAA). Selon l’alinéa 8 de cette disposition réglementaire, le salaire déterminant en cas de rechute est celui que l’assuré a reçu juste avant celle-ci ; il ne saurait toutefois être inférieur à 10 % du montant maximum du gain journalier assuré, sauf pour les bénéficiaires de rentes de l’assurance sociale.

En l’occurrence, sous réserve de certains des cas spéciaux prévus par la loi (cf. par exemple art. 23 al. 1 OLAA), le gain assuré au sens des art. 15 LAA et 22 OLAA se fonde sur le salaire effectivement touché par l’assuré et ne se rapporte pas à un gain fictif. Il ne faut pas perdre de vue que, dans l’assurance-accidents, les indemnités journalières servent à compenser la perte de revenu d’une activité lucrative ou d’un revenu de substitution en cas d’incapacité de travail consécutive à un accident assuré (art. 16 al. 1 LAA; Message du 18 août 1976 à l’appui d’un projet de loi fédérale sur l’assurance-accidents, FF 1976 III 143, 170 ch. 342; ALFRED MAURER, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2 e éd. 1989, p. 321). Partant, contrairement à ce que soutient l’assuré, les indemnités journalières LAA auxquelles il prétend ne peuvent se fonder sur le montant des indemnités de chômage qu’il aurait hypothétiquement touchées en vertu du droit suisse. La loi ne prévoit aucune dérogation pour les chômeurs transfrontaliers.

En outre, et à juste titre, l’assuré ne remet pas en cause la compétence des autorités françaises pour le versement des prestations de chômage (voir l’ATF 142 V 590 consid. 4.3 concernant une travailleuse transfrontalière au chômage complet). Dans ces conditions, le mode de calcul des indemnités de chômage selon le droit français n’est pas pertinent pour la résolution du cas d’espèce et l’assuré ne saurait se prévaloir d’une inégalité de traitement.

Dans la mesure où il est domicilié en France, sa situation n’est pas similaire à celle d’un chômeur en Suisse. Le fait que, malgré une activité salariée en Suisse, il a perçu des prestations de chômage de la France, et donc un revenu de substitution inférieur à celui prévu dans la LACI, n’est que la conséquence de la coordination des systèmes de sécurité sociale entre la Suisse et les États membres de l’Union européenne.

 

Calcul des indemnités journalières en cas de rechute selon l’art. 23 al. 8 OLAA

Selon la jurisprudence, la loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre. Si le texte n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d’autres dispositions légales. Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d’interprétation, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; en particulier, il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s’il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 142 IV 389 consid. 4.3.1 p. 397; 139 V 250 consid. 4.1 p. 254 et les arrêts cités).

Par ailleurs, les dispositions d’exception ne doivent être interprétées ni restrictivement ni extensivement, mais conformément à leur sens et à leur but, dans les limites de la règle générale (ATF 137 V 167 consid. 3.4 p. 171; 136 V 84 consid. 4.3.2 p. 92; 130 V 229 consid. 2.2 p. 233 et les arrêts cités).

L’art. 23 al. 8 OLAA concerne le calcul des indemnités journalières en cas de rechute, à savoir lorsque se manifeste à nouveau une atteinte à la santé qui, en apparence seulement mais non dans les faits, était considérée comme guérie (ATF 123 V 137 consid. 3a p. 138 et les références; arrêt 8C_61/2016 du 19 décembre 2016 consid. 3.2, in SVR 2017 UV n° 19 p. 63). Il s’agit d’une prescription particulière qui déroge à la règle générale de l’art. 15 al. 2 LAA, concernant la période de référence pour le calcul du gain assuré. Les indemnités journalières visent à compenser une perte de gain due à une incapacité de travail. Aussi la circonstance prévue à l’art. 23 al. 8 OLAA se rapporte-t-elle directement à la survenance d’une (nouvelle) incapacité de travail. Par salaire reçu juste avant la rechute, il faut ainsi comprendre le gain réalisé juste avant l’incapacité de travail.

Dans le cas d’espèce, la cour cantonale a fixé le point de départ de la rechute au 01.09.2014, à savoir la date de la lettre de l’assuré recourant dans laquelle il questionne la CNA au sujet de la prise en charge d’une éventuelle opération. L’incapacité de travail du recourant ne s’est toutefois manifestée qu’une année plus tard environ. Entre-temps l’assuré a repris une activité salariée, de juin 2015 à novembre 2015. La date du 01.09.2014 ne se rapporte pas non plus à la reprise d’un traitement médical. Il semble même que l’opération envisagée n’a finalement pas eu lieu. Dans ces conditions, rien ne justifiait un calcul du gain assuré sur la base du revenu perçu au mois d’août 2014.

Il convient bien plutôt de prendre en considération la période précédant immédiatement l’incapacité de travail donnant droit aux indemnités en cause.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assuré et renvoie la cause à l’assurance-accidents qu’elle procède à un nouveau calcul du gain assuré. Si le nouveau calcul se révèle défavorable à l’assuré par rapport à la décision litigieuse, elle devra lui donner l’occasion de retirer son opposition (art. 12 al. 2 OPGA ; ATF 131 V 414 consid. 1 p. 416 s.).

 

 

Arrêt 8C_778/2016 consultable ici : http://bit.ly/2hsUpkw

 

 

8C_542/2016 (f) du 18.04.2017 – Gain assuré pour l’indemnité de chômage – 23 al. 1 LACI / Période de référence pour le calcul du gain – 37 OACI / Variation en raison de l’horaire de travail usuel dans la branche – secteur principal de la construction – 37 al. 3bis OACI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_542/2016 (f) du 18.04.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2pr47G2

 

Gain assuré pour l’indemnité de chômage – 23 al. 1 LACI

Période de référence pour le calcul du gain – 37 OACI

Variation en raison de l’horaire de travail usuel dans la branche – secteur principal de la construction – 37 al. 3bis OACI

 

Assuré ayant bénéficié d’un délai-cadre d’indemnisation du 01.12.2013 au 30.11.2015. L’indemnité de chômage a été calculée sur la base d’un gain assuré de 5’300 fr.

Durant la période du 01.04.2014 au 31.10.2014, il a travaillé en qualité de manœuvre dans le cadre d’un contrat de durée déterminée. Celui-ci stipulait un salaire horaire de 27 fr. 50, ainsi qu’une indemnité de vacances et un 13ème salaire. En outre, le contrat était soumis à la convention nationale du secteur principal de la construction en Suisse (ci-après: la CN), ainsi qu’à la convention nationale collective de travail du secteur principal de la construction du canton du Valais. L’assuré a requis l’octroi d’une indemnité de chômage à compter du 01.11.2014.

Par décision, confirmée sur opposition, la caisse de chômage (ci-après: la caisse) a fixé à 5’398 fr. le montant du gain assuré déterminant depuis le 01.11.2014. Se fondant sur l’art. 24 al. 2 CN, la caisse a considéré que la durée annuelle normale de travail dans le secteur principal de la construction était de 2’112 heures sans pauses – soit 40,5 heures hebdomadaires – ou de 2’174 heures y compris les pauses – soit 41,75 heures hebdomadaires -. Aussi a-t-elle calculé le montant du gain assuré de la manière suivante: 41,75 (heures hebdomadaires) : 5 (jours ouvrables) x 21,7 (jours ouvrables moyens par mois) x 27,5 (salaire horaire) x 8,33% (13ème salaire) = 5’397,93. Dans la mesure où il avait obtenu effectivement un gain plus élevé durant la période du 01.04.2014 au 31.10.2014, l’assuré avait accompli des « heures supplémentaires » dont il n’y avait toutefois pas lieu de tenir compte dans le calcul du gain assuré.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 23.06.2016, admission du recours par le tribunal cantonal, fixant à 5’733 fr. 45 le montant du gain assuré.

 

TF

Selon l’art. 23 al. 1 LACI, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’AVS qui est obtenu normalement au cours d’un ou de plusieurs rapports de travail durant une période de référence, y compris les allocations régulièrement versées et convenues contractuellement, dans la mesure où elles ne sont pas des indemnités pour inconvénients liés à l’exécution du travail (première phrase). Le Conseil fédéral détermine la période de référence et fixe le montant minimum (quatrième phrase).

La période de référence pour le calcul du gain assuré est réglée à l’art. 37 OACI. Le gain assuré est calculé sur la base du salaire moyen des six derniers mois de cotisation (art. 11 OACI) qui précèdent le délai-cadre d’indemnisation (al. 1). Il est déterminé sur la base du salaire moyen des douze derniers mois de cotisation précédant le délai-cadre d’indemnisation si ce salaire est plus élevé que le salaire moyen visé à l’alinéa 1 (al. 2). La période de référence commence à courir le jour précédant le début de la perte de gain à prendre en considération quelle que soit la date de l’inscription au chômage (al. 3, première phrase). Aux termes de l’art. 37 al. 3bis OACI (dans sa teneur – applicable en l’occurrence [cf. ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 p. 220 et les arrêts cités] – valable depuis le 01.04.2011), lorsque le salaire varie en raison de l’horaire de travail usuel dans la branche, le gain assuré est calculé conformément aux alinéas 1 à 3, mais au plus sur la moyenne annuelle de l’horaire de travail convenu contractuellement. Selon l’art. 37 al. 4 let. a OACI, le gain assuré est redéfini pour la période de contrôle suivante si, pendant le délai-cadre d’indemnisation l’assuré a exercé pendant au moins six mois consécutifs, avant de retomber au chômage, une activité soumise à cotisation pour laquelle il a reçu un salaire supérieur au gain assuré.

Aux termes de l’art. 24 al. 2 CN, le total des heures annuelles de travail déterminant s’élève à 2’112 heures (365 jours : 7 = 52,14 semaines x 40,5 heures) pour tout le territoire conventionnel. Selon l’art. 25 al. 1 CN, l’entreprise fixe la durée hebdomadaire du travail dans un calendrier à établir au plus tard en fin d’année pour l’année suivante, conformément aux dispositions de l’alinéa 2 (qui fixe la durée hebdomadaire minimale et maximale du travail); les parties contractantes fournissent des modèles élaborés par leurs soins; si l’entreprise omet d’établir un calendrier de la durée du travail et de le communiquer au personnel, le calendrier applicable sera celui de la section locale où est domiciliée l’entreprise que les commissions professionnelles paritaires locales établissent chaque année; elles peuvent si nécessaire déroger à l’alinéa 2 pour tenir compte des conditions géographiques et climatiques de leur territoire.

En l’occurrence, en l’absence d’un calendrier établi par l’employeur, l’horaire 2014 est applicable subsidiairement en vertu de l’art. 25 al. 1 CN pour définir le nombre maximum d’heures pouvant être effectuées par semaine. Le nombre d’heures de travail fixé dans l’horaire 2014 pour la période du mois de mai au mois d’octobre s’élève à 1’169,5. Quant au nombre d’heures de travail pour la période du mois de novembre au mois d’avril, il s’élève à 942,5 (2’112 [cf. art. 24 al. 2 CN] – 1’169,5).

Cette importante variation du nombre d’heures de travail entre les saisons d’été et d’hiver – typique de la branche de la construction (cf. THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Sécurité sociale, 3 ème éd., 2016, n° 384 p. 2381) – commande dès lors l’application de l’art 37 al. 3bis OACI et implique de réduire le salaire effectivement perçu durant la période déterminante jusqu’à concurrence de la moyenne annuelle de l’horaire de travail convenu contractuellement.

 

Le TF admet le recours de la caisse.

 

 

Arrêt 8C_542/2016 consultable ici : http://bit.ly/2pr47G2

 

 

8C_14/2016 (f) du 21.12.2016 – Montant de l’indemnité journalière – 23 al. 8 OLAA / Rechute comme indépendant / Détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante – 23 RAVS / Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux – 22 al. 2 let. c OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_14/2016 (f) du 21.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jFq9WT

 

Accident en 1972 – LAMA – Rechute comme indépendant en 2014

Montant de l’indemnité journalière – 23 al. 8 OLAA

Détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante – 23 RAVS / Salaire correspondant aux usages professionnels et locaux – 22 al. 2 let. c OLAA

 

Assuré qui a été victime d’un accident de la circulation en 1972, pris en charge par la CNA. Une rente d’invalidité a été allouée, fondée sur une incapacité de gain de 25% dès le 02.12.1973, de 50% à compter du 01.03.1996 et de 62% à partir du 01.03.2007. L’assuré bénéficie en outre d’une demi-rente de l’assurance-invalidité depuis le 01.05.1994. Entre-temps, l’intéressé a entrepris un apprentissage de menuisier et a obtenu un CFC en 1978. Il par la suite a fondé une entreprise en raison individuelle et a travaillé en qualité de menuisier-charpentier indépendant.

La CNA a pris en charge la rechute annoncée le 18.02.2014. De l’extrait du compte individuel, il est fait état d’un revenu annuel d’indépendant de 9’333 fr. pour l’année 2013. De son côté, l’assuré a fait valoir un gain mensuel net de 5’669 fr. La CNA a informé l’intéressé qu’il avait droit à une indemnité journalière d’un montant de 20 fr. 50 (9’333 fr. x 80 % : 365 jours) à compter du 18.02.2014, confirmé sur opposition.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 18.11.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 23 al. 8 OLAA, le salaire déterminant en cas de rechute est celui que l’assuré a reçu juste avant celle-ci; il ne saurait toutefois être inférieur à 10% du montant maximum du gain journalier assuré, sauf pour les bénéficiaires de rentes de l’assurance sociale. Dans ce sens, l’art. 21 al. 3, 2ème phrase, LAA prévoit qu’en cas de rechute et de séquelles tardives survenues après la fixation de la rente, le bénéficiaire de la rente dont le gain diminue a droit à une indemnité journalière dont le montant est calculé sur la base du dernier gain réalisé avant le nouveau traitement médical. Cette disposition permet au titulaire d’une rente partielle de l’assurance-accidents qui a mis en valeur sa capacité résiduelle de gain de percevoir, outre la rente allouée initialement, une indemnité journalière calculée sur la base de son dernier revenu avant la rechute ou la séquelle tardive (ATF 139 V 514 consid. 3.2 p. 518; arrêt 8C_1023/2008 du 1 er décembre 2009 consid. 5.4). En outre, la jurisprudence considère que le terme de « salaire » mentionné à l’art. 23 al. 8 OLAA permet de tenir compte également d’un revenu d’indépendant perçu juste avant la rechute (SVR 2010 UV n° 15 p. 57, 8C_898/2008, consid. 4.2).

Sous réserve de certaines dérogations énumérées sous lettres a à d, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 22 al. 2, 1ère phrase, OLAA). Pour la détermination du revenu provenant d’une activité lucrative indépendante, les caisses de compensation se fondent sur des données fiscales qui les lient (art. 23 RAVS). Toutefois, pour les membres de la famille de l’employeur travaillant dans l’entreprise, les associés, les actionnaires ou les membres de sociétés coopératives, il est au moins tenu compte du salaire correspondant aux usages professionnels et locaux (art. 22 al. 2 let. c OLAA). Le but de cette réglementation est d’éviter que les assurés qui se trouvent dans un rapport particulier avec leur employeur et, de ce fait, perçoivent un gain inférieur à celui qu’ils pourraient réaliser normalement sur le marché du travail, ne soient désavantagés lorsqu’ils ont droit à des prestations de l’assurance-accidents (SVR 2007 UV n° 39 p. 131, 8C_88/2007, consid. 2; arrêt 8C_893/2011 du 31 mai 2012 consid. 2).

 

La cour cantonale a fixé le gain assuré déterminant pour le calcul de l’indemnité journalière compte tenu du gain d’indépendant réalisé par l’assuré juste avant la survenance de l’incapacité entière de travail. Retenant que l’assuré ne se trouve pas dans un rapport particulier avec un employeur, puisqu’il est lui-même son propre employeur, elle a considéré qu’il ne pouvait pas se prévaloir de la dérogation prévue à l’art. 22 al. 2 let. c OLAA pour obtenir de l’assureur-accidents l’indemnisation des frais fixes et des autres charges d’exploitation conduisant à un revenu inférieur au gain réalisé, conformément aux usages professionnels, par un menuisier occupé à 50%.

 

Selon le TF, le gain assuré déterminant pour le calcul de l’indemnité journalière se fondant sur le gain réalisé par l’assuré en qualité d’indépendant, avant la survenance de l’incapacité de travail n’est pas affecté par des frais supplémentaires de remplacement ou par une éventuelle augmentation des autres charges d’exploitation liée à l’incapacité entière de travail.

Cela étant, l’assuré n’apparaît pas désavantagé par son statut d’indépendant au moment de la rechute. Pour ce motif déjà, sa situation n’a ainsi rien de comparable avec celle des assurés qui se trouvent dans un rapport particulier avec leur employeur et, de ce fait, perçoivent un gain inférieur à celui qu’ils pourraient réaliser normalement sur le marché du travail. Au demeurant, si le gain réalisé par l’intéressé dans son activité d’indépendant est modeste, cela est dû au fait que cette activité est réduite en raison de l’invalidité, laquelle ouvre d’ailleurs droit à une rente de l’assurance-accidents qui, elle, n’est pas calculée en fonction du revenu d’indépendant.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_14/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jFq9WT

 

 

8C_716/2015 (f) du 13.06.2016 – Gain assuré pour l’indemnité journalière – 15 LAA – 5 RAVS / Prestations en nature (nourriture et logement) pour un fromager d’alpage engagé pour 3 mois / Calcul du gain annuel assuré pour un contrat de travail incluant les vacances – 48 semaines vs 52 semaines

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_716/2015 (f) du 13.06.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2aU6hge

 

Gain assuré pour l’indemnité journalière / 15 LAA – 5 RAVS

Prestations en nature (nourriture et logement) pour un fromager d’alpage engagé pour 3 mois

Calcul du gain annuel assuré pour un contrat de travail incluant les vacances – 48 semaines vs 52 semaines

 

Assuré engagé par un alpage, du 19.06.2010 au 19.09.2010 en qualité de fromager. Selon le contrat de travail signé le 19.06.2010, le salaire convenu était de CHF 130.00 par jour, auquel s’ajoutait une indemnité à titre de « pension » de CHF 10.00 par jour.

Le 19.06.2010, lors de son premier jour de travail, l’assuré a été grièvement brûlé à la suite d’une explosion due à une fuite de gaz.

L’assurance-accidents a alloué une indemnité journalière de CHF 73.85 pour une incapacité totale de travail en fonction d’un salaire assuré de CHF 33’677.00, étant précisé que son activité devait être qualifiée d’irrégulière. Ce montant correspondait à une moyenne des salaires des douze derniers mois ayant précédé l’accident. Lors d’une précédente procédure du 14.01.2014 (8C_296/2013), le TF a constaté que l’activité exercée par l’assuré au service de l’alpage ne présentait pas un caractère irrégulier. La cause a été renvoyé à l’assureur-accidents pour qu’il fixe l’indemnité journalière.

Une nouvelle décision a été rendue, fixant l’indemnité journalière à CHF 79.80, en se fondant sur un salaire annuel de CHF 36’400.00.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 02.09.2015, le tribunal cantonal a partiellement admis le recours et l’a réformée en ce sens que l’indemnité journalière était fixée à CHF 81.00.

 

TF

Prestations en nature

Selon l’art. 15 LAA, les indemnités journalières et les rentes sont calculées d’après le gain assuré (al. 1). Est réputé gain assuré pour le calcul des indemnités journalières le dernier salaire que l’assuré a reçu avant l’accident (art. 15 al. 2, première phrase). Le salaire que l’assuré a reçu en dernier lieu avant l’accident correspond en règle générale au salaire mensuel, à la semaine ou à l’heure, qui est converti en gain annuel puis divisé par 365 (art. 17 al. 3 LAA en lien avec l’art. 25 al. 1 et l’annexe 2 OLAA; cf. également ATF 139 V 464 consid. 2.2 p. 467). L’indemnité journalière correspond, en cas d’incapacité totale de travail, à 80 % du gain assuré (art. 17 al. 1 LAA).

Sous réserve de diverses dérogations qui ne concernent pas le présent cas, est réputé gain assuré le salaire déterminant au sens de la législation sur l’assurance-vieillesse et survivants (art. 22 al. 2 OLAA). Selon l’art. 5 al. 2 LAVS en lien avec l’art. 7 let. f RAVS, les prestations en nature ayant un caractère régulier font partie du salaire déterminant. L’art. 11 RAVS détermine de quelle manière doivent être calculées les prestations en nature, lorsqu’elles consistent en nourriture et logement. La nourriture et le logement des personnes employées dans l’entreprise et du personnel de maison sont évalués à 33 fr. par jour (art. 11 al. 1 RAVS). Si l’employeur ne fournit qu’en partie la nourriture et le logement, un montant de 11 fr. 50 par jour est pris en compte pour le logement, le solde de 21 fr. 50 étant réparti entre les trois repas journaliers (al. 2).

En l’espèce, selon le contrat de travail, le salaire convenu était de CHF 130.00 par jour, auquel s’ajoutait un montant de CHF 10.00 par jour à titre de « pension ». Il n’est pas contesté que l’employeur fournissait la pension, toutes les prestations en nature (logement et nourriture) étaient comprises dans le montant de CHF 140.00.

Pour ce qui est du logement, l’assuré était hébergé par l’employeur, dans une habitation à proximité de la fromagerie. Ces prestations en nature font partie du salaire déterminant conformément à l’art. 5 al. 2 LAVS et viennent donc s’ajouter au salaire en espèces. Pour calculer le gain annuel assuré, il faut ainsi partir d’un salaire déterminant de CHF 130.00 par jour, auquel il y a lieu d’ajouter le montant forfaitaire de CHF 33.00 par jour (et pas seulement CHF 10.00) prévu par l’art. 11 al. 2 RAVS pour la nourriture et le logement. Le gain assuré de l’assuré se monte dès lors à CHF 163.00 par jour.

 

Vacances

Le gain annuel se calcule sur une base de 52 semaines de travail lorsque le salaire horaire n’inclut pas l’indemnité pour vacances et jours fériés (cf. annexe 2 de l’OLAA : exemple b du calcul de l’indemnité journalière ; voir aussi l’arrêt U 52/99 du 10 novembre 1999 consid. 4d). Lorsque les congés payés sont déjà inclus dans le salaire horaire ou journalier, comme cela ressort de manière explicite du contrat de travail, il faut alors multiplier le salaire hebdomadaire non pas par 52 semaines mais par 48 semaines, pour tenir compte des 4 semaines de vacances auxquelles a droit le travailleur selon la loi, respectivement selon son contrat de travail (cf. art. 329a al. 1 CO). Pour calculer le gain assuré de l’assuré retenir une durée de travail hebdomadaire de 50 heures, réparties sur 5,5 jours, de sorte qu’il convient de multiplier le salaire journalier de CHF 163.00 par 5,5 jours et par 48 semaines. On obtient un gain assuré annuel de CHF 43’032.00 et une indemnité journalière de CHF 94.30 (43’032 fr. : 365 x 80 %) pour une incapacité totale de travail.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_716/2015 consultable ici : http://bit.ly/2aU6hge

 

 

Maintien de la couverture pour l’assurance-accidents facultative

Les personnes exerçant une activité lucrative indépendante et résidant en Suisse ne sont pas concernées par l’assurance-accidents obligatoire encadrée par la loi fédérale sur l’assurance-accidents. Toutefois, elles peuvent choisir de souscrire une assurance facultative, tout comme les membres de leur famille qui collaborent à l’entreprise et qui ne sont pas assurés à titre obligatoire. Tenant compte de l’évolution des salaires, le Conseil fédéral a décidé d’adapter le gain minimum assuré dans l’assurance facultative à compter du 1er janvier 2016. Ce gain passe à 66 690 francs pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante (précédemment de 63 000 francs) et à 44 460 francs pour les membres de leur famille qui collaborent à l’entreprise (précédemment de 42 000 francs).

 

Le 5 novembre 2014, le Conseil fédéral a décidé de relever le montant maximum du gain assuré dans l’assurance-accidents à partir du 1er janvier 2016, le faisant passer de 126 000 francs à 148 200 francs. Grâce à cette décision, environ 95% des travailleurs assurés sont couverts pour le gain intégral.

Dans le cadre de l’assurance-accidents facultative, il faut atteindre un seuil minimum pour pouvoir souscrire une assurance. Jusqu’à présent, ce montant minimum du gain assuré était fixé à la moitié du montant maximum pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante et à un tiers de ce montant pour les membres de leur famille.

Après l’importante augmentation du montant maximum au 1er janvier 2016, le seuil minimum devrait être relevé dans les mêmes proportions. Toutefois, une telle augmentation réduirait le nombre de personnes pouvant bénéficier de l’assurance facultative. Pour éviter cela et maintenir la couverture d’assurance au niveau actuel, les modalités de calcul fixées par l’ordonnance sur l’assurance-accidents (art. 138 OLAA) doivent être révisées.

Les seuils ont été redéfinis à 45% du montant maximum du gain assuré pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante et à 30% de ce montant pour les membres de leur famille collaborant à cette activité. Les nouveaux montants minimum s’élèvent désormais à 66 690 francs (contre 63 000 jusqu’ici) respectivement à 44 460 francs (contre 42 000 jusqu’ici).

La modification prévue de l’ordonnance a rencontré un large soutien. La majorité des parties prenantes salue le maintien du niveau des seuils, qui permet aux groupes professionnels à bas revenus de continuer à bénéficier de leur couverture d’assurance.

 

Communiqué officiel du 18.09.2015 : http://bit.ly/1UZznF0