Avis du Conseil fédéral – Initiatives parlementaires Exonérer les enfants du paiement des primes d’assurance-maladie / LAMal. Révision des catégories de primes enfants, jeunes et jeunes adultes

Avis du Conseil fédéral du 12.10.2016 – Initiatives parlementaires Exonérer les enfants du paiement des primes d’assurance-maladie / LAMal. Révision des catégories de primes enfants, jeunes et jeunes adultes

 

Paru in FF 2016 7729, consultable ici : http://bit.ly/2ezYC6J

 

1 Contexte

Le rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) fait suite à deux initiatives parlementaires: «Exonérer les enfants du paiement des primes d’assurance-maladie» (10.407), déposée le 8 mars 2010 par la conseillère nationale Ruth Humbel (PDC, AG), et «LAMal. Révision des catégories de primes enfants, jeunes et jeunes adultes» (13.477), déposée le 12 décembre 2013 par le conseiller national Stéphane Rossini (PS, VS). Le 18 février 2011, la CSSS-N a décidé de donner suite à la première, la CSSS-E se ralliant à cette décision le 6 septembre 2011. Le 15 octobre 2014, la CSSS-N a décidé de donner suite à la seconde et la CSSS-E a pris la même décision le 17 novembre 2014.

Ces initiatives parlementaires visant toutes deux à alléger la charge financière des familles, la CSSS-N a chargé sa sous-commission «LAMal» de les examiner de manière conjointe, puis d’élaborer un avant-projet. La CSSS-N l’a adopté le 23 octobre 2015 avec des propositions de minorité, puis a mis le texte en consultation auprès des cantons et d’autres organisations du 23 novembre 2015 au 15 mars 2016. Forte des résultats de cette consultation, la CSSS-N a modifié le projet lors de sa séance du 7 juillet 2016, puis a adopté un projet d’acte avec des propositions de minorité.

 

2 Avis du Conseil fédéral

Le projet d’acte concerne la modification de quatre articles. À ce sujet, le Conseil fédéral se prononce comme suit.

 

2.1 Compensation des risques entre les enfants (art. 16, al. 5, LAMal)

À l’heure actuelle, la LAMal ne précise pas s’il faut tenir compte des enfants dans la compensation des risques. Le Conseil fédéral a donc pu préciser dans l’ordonnance du 12 avril 1995 sur la compensation des risques dans l’assurance-maladie (OcoR) que les enfants ne sont pas pris en compte dans la compensation des risques. En l’espèce, les assurés de moins de 18 ans sont considérés comme des enfants (art. 61, al. 3, LAMal).

L’avant-projet prévoyait d’introduire une compensation des risques entre les enfants. Une minorité a souhaité exclure les enfants de la compensation des risques, à savoir inscrire dans la loi la réglementation en vigueur fondée sur l’OCoR.

Lors de la consultation, neuf cantons, la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), la fédération d’assureurs-maladie Curafutura, plusieurs associations de consommateurs et d’autres organisations se sont déclarés favorables à l’introduction d’une compensation des risques entre les enfants. Six cantons, les associations d’assureurs Santésuisse et RVK (fédération des petits et moyens assureurs-maladie) et plusieurs organisations s’y sont opposés, Santésuisse ayant fait valoir que les primes perçues pour les enfants sont déjà conformes au risque, tandis que RVK a relevé que les enfants constituaient un groupe de risque homogène. Certains participants ont également avancé que l’introduction d’une compensation des risques entre les enfants entraînerait des coûts sans apporter de réels bénéfices.

Se fondant sur les résultats de la consultation, la CSSS-N a décidé d’exclure expressément les enfants de l’effectif des assurés déterminant pour la compensation des risques. Une minorité s’est toutefois déclarée en faveur de l’introduction d’une compensation des risques entre les enfants. Nul n’a cependant contesté le fait de calculer une telle compensation séparément de celle entre les adultes.

Dans son rapport, la CSSS-N souligne au ch. 2.3 que les coûts des prestations nettes sont aussi répartis différemment entre les enfants, selon le groupe de risque (âge, sexe, séjour en hôpital au cours de l’année précédente). Elle précise que si l’on considère la variabilité relative des prestations nettes au sein des classes de risque en fonction de l’âge ou du sexe, celle-ci n’est pas moins importante pour les enfants que pour les adultes. La fédération d’assureurs Curafutura indique également, dans sa prise de position, qu’il existe aussi différentes structures de risque entre les enfants. Elle juge donc opportun d’introduire une compensation des risques pour cette catégorie d’assurés, d’autant que d’autres différences entre les structures de risque des assureurs-maladie devront être répercutées à l’avenir dans la compensation des risques. De plus, compte tenu de l’affinement de la compensation des risques chez les adultes opéré ces dernières années, on peut craindre que les assureurs ne soient davantage tentés de ne plus assurer que les bons risques chez les enfants. Pour ces raisons, le Conseil fédéral estime que l’introduction d’une compensation des risques entre les enfants, calculée séparément de celle entre les adultes, constituerait une option envisageable.

Toutefois, étant donné qu’un affinement de la compensation des risques entre les adultes est en cours, le Conseil fédéral estime qu’il est judicieux, d’en tirer des enseignements avant d’aller plus loin. Aussi renonce-t-il à émettre une proposition sur la modification de la présente disposition.

 

2.2 Allégement de la compensation des risques pour les jeunes adultes et les assurés âgés de 26 à 35 ans (art. 16a LAMal)

Le droit en vigueur prévoit une compensation des risques entre tous les assurés adultes, spécifiant que sont réputés adultes les assurés âgés de plus de 18 ans (art. 61, al. 3, LAMal).

L’avant-projet prévoyait un allégement de la compensation des risques pour les assurés âgés de 19 à 35 ans. Une minorité a proposé de limiter l’allégement aux jeunes adultes, à savoir les assurés qui ont plus de 18 ans mais n’ont pas encore atteint l’âge de 25 ans (art. 61, al. 3, LAMal). La majorité des cantons, les fédérations d’assureurs Curafutura et RVK, la majorité des membres de Santésuisse, plusieurs associations de consommateurs et de fournisseurs de prestations ainsi que d’autres participants étaient favorables à cette proposition de minorité.

La CSSS-N a décidé de s’en tenir à son avant-projet. Une des propositions de minorité a également été déposée à l’identique une nouvelle fois.

Le Conseil fédéral se félicite de l’allégement pour les jeunes adultes. Bien souvent, les assurés de cette classe d’âge sont encore en formation: ils ne disposent de ce fait que de moyens financiers modestes et dépendent financièrement de leurs parents. Pour alléger la charge financière des jeunes adultes et de leurs parents, il convient donc de ne plus les faire participer à la compensation des risques que de manière limitée. Cet allégement doit inciter les assureurs à proposer à ces assurés des primes plus basses, ainsi qu’à faire en sorte que la hausse des primes qui intervient lors du passage de la catégorie des enfants à celle des jeunes adultes ne soit plus aussi marquée.

Néanmoins, le Conseil fédéral rejette le projet d’acte, dans la mesure où celui-ci prévoit aussi un allégement pour les assurés âgés de 26 à 35 ans. Selon la LAMal, les primes des adultes de 26 ans et plus sont fixées indépendamment de leur âge. Les assurés plus jeunes fournissent ainsi une contribution de solidarité en faveur des assurés plus âgés, qui occasionnent en moyenne des coûts plus élevés. La création de cette nouvelle catégorie d’âge remettrait en question le principe de la prime unique, indépendante de l’âge, pour les adultes âgés de 26 ans et plus. Elle constituerait un précédent pour l’introduction de catégories d’âge supplémentaires et l’instauration d’un système fondé sur le risque. Les assurés de cette tranche d’âge ont généralement achevé leur formation et sont ainsi en mesure de gagner leur vie et de payer leurs primes. La catégorie d’âge des 26 à 35 ans compte également des assurés qui gagnent confortablement leur vie et n’ont pas d’enfants. Ils n’ont donc pas besoin de cet allégement, qui ferait au surplus augmenter davantage les primes des assurés de plus de 35 ans. Or ces derniers sont fréquemment parents et ils ne pourraient que difficilement supporter une hausse de leur charge financière. Le Conseil fédéral est d’avis que le rééquilibrage social doit continuer de se faire via le système de la réduction des primes. Celui-ci permet en effet d’apporter une aide ciblée aux ménages de condition économique modeste.

C’est pourquoi le Conseil fédéral soutient la proposition de minorité II, qui prévoit un allégement limité aux assurés âgés de 19 à 25 ans.

 

2.3 Détermination de primes plus basses (art. 61, al. 3, LAMal)

À l’heure actuelle, l’assureur est tenu de fixer pour les enfants une prime plus basse que celle pour les adultes. Il est autorisé à le faire pour les jeunes adultes.

L’avant-projet et le projet d’acte entendent faire obligation à l’assureur de fixer des primes plus basses également pour les jeunes adultes et les assurés âgés de 26 à 35 ans et de veiller à un échelonnement par catégorie d’âge. Lors de la consultation, une partie des membres de Santésuisse a demandé le retrait de cette obligation afin de préserver leur liberté entrepreneuriale.

Pour les raisons évoquées au ch. 2.2, le Conseil fédéral salue l’obligation qui est faite aux assureurs de fixer pour les jeunes adultes des primes plus basses que pour les autres adultes. Comme il s’oppose à la création de la nouvelle catégorie d’âge des 26 à 35 ans, il rejette aussi l’obligation de fixer des primes inférieures pour ces assurés.

Le Conseil fédéral soutient donc ici aussi la proposition de minorité II, qui fait obligation aux assureurs de fixer des primes plus basses pour les jeunes adultes (de 19 à 25 ans) sans créer de nouvelle catégorie d’âge.

 

2.4 Augmentation de la réduction des primes (art. 65, al. 1bis, LAMal)

Les cantons doivent actuellement, pour les bas et moyens revenus, réduire d’au moins 50% les primes des enfants et des jeunes adultes en formation.

L’avant-projet prévoyait d’élever à 80% la réduction minimale imposée. Dans le cadre de la consultation, la quasi-totalité des cantons et plusieurs organisations se sont prononcés contre une telle augmentation.

Sur la base de ces résultats, la CSSS-N a décidé d’imposer cette majoration uniquement pour les enfants dans le projet d’acte, les cantons ne devant plus être soumis à aucune obligation en matière de réduction des primes s’agissant des jeunes adultes en formation.

Dans son rapport, la CSSS-N souligne la charge financière que représentent les primes de l’assurance obligatoire des soins pour les familles (ch. 2.1). Cette charge étant à la fois élevée et croissante ces dernières années, elle propose de l’alléger après avoir examiné plusieurs solutions (ch. 3).

Le Conseil fédéral se félicite lui aussi que les cantons soient tenus de réduire de 80% au moins les primes des enfants pour les bas et moyens revenus. La demande d’exonérer les enfants du paiement des primes d’assurance-maladie, exprimée dans l’initiative parlementaire 10.407, pourra ainsi être en partie satisfaite. Dans son rapport, et plus particulièrement dans son commentaire de l’art. 65, al. 1bis, la CSSS-N part du principe que l’allégement prévu de la compensation des risques pour les jeunes adultes devrait permettre aux cantons de réaliser quelque 65 à 70 millions de francs d’économies. Dans ce même rapport, elle évalue à environ 80 millions de francs le surcoût pour les cantons lié à une augmentation à 80% de la réduction des primes des enfants pour les bas et moyens revenus. Ces charges sont certes plus importantes que les économies estimées, mais étant donné que les cantons disposent d’une marge de manœuvre relativement importante sur les modalités concrètes de la réduction des primes, et peuvent par exemple définir comme ils l’entendent la notion de «moyens revenus», le Conseil fédéral juge que la majoration proposée par la CSSS-N est raisonnable. Les familles à bas et moyens revenus pourront ainsi bénéficier d’une aide supplémentaire.

La minorité III propose d’obliger les cantons à aussi réduire de 80% au moins les primes des jeunes adultes en formation. Le Conseil fédéral refuse d’imposer aux cantons cette obligation supplémentaire et la charge qui en découle.

La minorité IV propose d’imposer aux cantons uniquement de réduire de 50% au moins la prime des enfants et des jeunes adultes, comme le prévoit le droit en vigueur. Étant donné que l’allégement prévu de la compensation des risques pour les jeunes adultes devrait permettre aux cantons de réaliser des économies au titre de la réduction des primes, le Conseil fédéral considère qu’ils doivent utiliser les fonds ainsi dégagés pour les enfants.

Le Conseil fédéral s’oppose en outre à une suppression de l’obligation faite aux cantons de réduire d’au moins 50% les primes des jeunes adultes en formation pour les bas et moyens revenus. Dans son rapport, et plus particulièrement dans son commentaire de l’art. 65, al. 1bis, la CSSS-N part du principe que la réduction des primes pour les jeunes adultes qui ne sont pas en formation baissera de 20 à 25% par rapport à la prime moyenne du fait de l’allégement prévu de la compensation des risques. Les cantons pourront ainsi réaliser des économies. Le droit en vigueur étant maintenu, il n’en découle en outre aucune charge supplémentaire pour les cantons. Pour les ménages à bas et moyens revenus, le passage de la catégorie des enfants à celle des adultes ne doit occasionner qu’une hausse limitée des primes pour les assurés en formation. C’est pourquoi le Conseil fédéral propose de maintenir l’obligation qu’ont les cantons, en vertu du droit actuel, de réduire d’au moins 50% les primes des jeunes adultes en formation pour les bas et moyens revenus.

 

3 Propositions du Conseil fédéral

Art. 16a et 61, al. 3

Le Conseil fédéral soutient la proposition de la minorité II.

Art. 65, al. 1bis

Pour les bas et moyens revenus, les cantons réduisent de 80% au moins les primes des enfants et de 50% au moins celles des jeunes adultes en formation.

 

 

Avis du Conseil fédéral du 12.10.2016, paru in FF 2016 7729, consultable ici : http://bit.ly/2ezYC6J

 

Cf. également :

Le Conseil fédéral salue l’allégement des primes enfants et jeunes adultes

Initiatives parlementaires – Exonérer les enfants du paiement des primes d’assurance-maladie / LAMal. Révision des catégories de primes enfants, jeunes et jeunes adultes

 

4A_179/2016 (f) du 30.08.2016 – Accident de la circulation scooter contre enfant de presque 5 ans souffrant d’hyperactivité – 59 al. 2 LCR – 60 LCR / Responsabilité de la mère du blessé l’ayant confié à sa jeune sœur de 9 ans – 302 CC

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_179/2016 (f) du 30.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2emeh8W

 

Accident de la circulation scooter contre enfant de presque 5 ans souffrant d’hyperactivité – 59 al. 2 LCR – 60 LCR

Responsabilité de la mère du blessé l’ayant confié à sa jeune sœur de 9 ans – 302 CC

 

Le 04.04.2011 en début d’après-midi, X.__ conduisait un scooter en direction du village d’Anières. Sur le trottoir longeant la chaussée à sa droite, les enfants B.__, âgé de quatre ans et onze mois, et sa sœur C.__, âgée de neuf ans, marchaient dans la même direction. Le cadet est alors inopinément descendu du trottoir et le scootériste l’a heurté à la vitesse d’environ 60 km/h ; cet enfant a subi d’importantes lésions corporelles.

B.__ souffrait d’hyperactivité, soit d’une activité motrice augmentée, désordonnée et impulsive. Sa famille était très récemment immigrée en Suisse et il n’avait reçu aucune leçon d’éducation routière. Au moment de l’accident, il se rendait à l’école. Sa mère l’accompagnait habituellement; ce jour-là, en raison d’un empêchement, elle l’avait confié à C.__.

Au lieu de l’accident, des signaux limitaient la vitesse des véhicules à 60 km/h.

 

TF

Le scootériste X.__ ne prétend pas que sa responsabilité soit atténuée par une faute personnelle du jeune B.__. Il admet qu’un enfant de cinq ans manque à peu près totalement de la capacité de discernement nécessaire à un piéton confronté au trafic routier, et que cet enfant est donc insusceptible d’un comportement fautif (cf. Roland Brehm, La responsabilité civile automobile, 2 e éd., 2010, n° 511 p. 199). En revanche, il soutient que la mère du blessé a commis une faute en faisant accompagner son fils par sa fille aînée, alors que celle-ci, âgée de neuf ans, manquait elle aussi d’une capacité de discernement et d’anticipation suffisante, et qu’elle n’était donc pas en mesure d’assurer la sécurité de son frère.

A teneur de l’art. 302 al. 1 CC concernant les effets de la filiation, les père et mère ont notamment le devoir de favoriser et de protéger le développement corporel, intellectuel et moral de leur enfant. Dans le contexte de la garde de l’enfant, cette règle impose aux père et mère de veiller à sa sécurité physique. Ils assument envers lui une position de garant et la violation de leurs devoirs engage leur responsabilité délictuelle selon l’art. 41 CO (cf. Cyril Hegnauer, Haften die Eltern für das Wohl des Kindes ?, RDT 2007 p. 167, 168; le même auteur, in Commentaire bernois, 1997, n° 29 ad art. 272 CC; Felix Schöbi, Die Haftung der Eltern für das Wohl des Kindes, in Aus der Werkstatt des Rechts, 2006, p. 97, 101). Les père et mère sont notamment responsables de veiller à la sécurité de l’enfant dans le trafic routier (Brehm, op. cit., n° 664 p. 262). La Cour de justice se réfère erronément à l’art. 333 CC qui ne concerne pas la responsabilité du chef de la famille envers un enfant vivant dans son ménage, mais sa responsabilité envers des tiers par suite d’actes dommageables commis par cet enfant (Brehm, ibid.; Isabelle Wildhaber, in Commentaire bâlois, 5e éd., n° 8 ad art. 333 CC).

Sur la route en question, la circulation des piétons avoisine celle de véhicules dont la vitesse peut atteindre 60 km/h. En raison de son jeune âge, du manque de discernement correspondant et de son hyperactivité, B.__ ne pouvait pas parcourir seul l’itinéraire qui le conduisait à l’école par cette artère; il devait impérativement y être accompagné d’une personne capable d’assurer sa sécurité et, en particulier, de lui imposer un comportement approprié à la situation.

Agée de neuf ans, sa sœur était vraisemblablement capable de cheminer seule sur le trottoir de cette route, sans risque d’accident excédant celui encouru par quiconque dans la même situation. En revanche, on ne saurait présumer qu’elle jouît des moyens intellectuels et physiques de surveiller et diriger efficacement un autre enfant dans cette même situation, de surcroît atteint d’hyperactivité. Son frère cadet avait au contraire besoin d’un encadrement particulièrement ferme et attentif. Dans ces conditions, sa mère devait l’accompagner elle-même ou le confier à une autre personne adulte, avertie du comportement turbulent de cet enfant. Dans les considérants de son arrêt, la Cour de justice retient avec raison que la mère, en confiant son fils à C.__, n’a « pas entièrement satisfait à ses devoirs de surveillance » et qu’elle a par-là commis une faute.

La répartition entre les deux coresponsables doit s’accomplir en considération du risque inhérent à l’emploi d’un scooter, de la faute du scootériste et de la faute de la mère ; ce sont les trois causes significatives de l’accident (cf. ATF 132 III 249 consid. 3.1 p. 252/253). Le scootériste répond de ce risque et de sa propre faute.

La mère de B.__ était empêchée d’accompagner elle-même son fils en raison d’un « rendez-vous ». Dans cette situation, quelle que fût la cause de l’empêchement, il s’imposait de confier l’enfant à une autre personne adulte, connaissant ce bambin ou avertie de son comportement remuant, et capable d’assurer l’encadrement nécessaire.

Les deux fautes en présence doivent être tenues pour graves et à peu près équivalentes. Compte tenu du risque inhérent à l’emploi du scooter, il convient d’imputer la responsabilité de l’accident au scootériste à hauteur de 70% et à la mère à hauteur de 30% (cf. Brehm, op. cit, n° 601 p. 238), conformément aux conclusions soumises au Tribunal fédéral.

 

Le TF admet partiellement le recours du scootériste.

 

 

Arrêt 4A_179/2016 consultable ici : http://bit.ly/2emeh8W

 

 

9C_237/2016 (f) du 24.08.2016 – Méthode d’évaluation de l’invalidité – Comparaison en pourcent – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_237/2016 (f) du 24.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eeQ1Ez

 

Méthode d’évaluation de l’invalidité – Comparaison en pourcent – 16 LPGA

Incapacité de travail se confondant avec l’incapacité de gain

 

TF

Selon la jurisprudence (cf. arrêt 9C_225/2016 du 14 juillet 2016 consid. 6.2.2 et 6.2.3), il est possible de fixer la perte de gain d’un assuré directement sur la base de son incapacité de travail en faisant une comparaison en pour-cent. Cette méthode constitue une variante admissible de la comparaison des revenus basée sur des données statistiques: le revenu hypothétique réalisable sans invalidité équivaut alors à 100%, tandis que le revenu d’invalide est estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux valeurs exprimant le taux d’invalidité (arrêts 8C_628/2015 du 6 avril 2016 consid. 5.3.5 et 8C_211/2013 du 3 octobre 2013 consid. 4.1 in SVR 2014 UV n° 1 p. 1; Meyer/Reichmuth, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3ème éd. 2014, n. 35 s. ad art. 28a LAI). L’application de cette méthode se justifie lorsque le salaire sans invalidité et celui avec invalidité sont fixés sur la base des mêmes données statistiques, lorsque les salaires avant et/ou après invalidité ne peuvent pas être déterminés, lorsque l’activité exercée précédemment est encore possible (en raison par exemple du contrat de travail qui n’a pas été résilié), ou encore lorsque cette activité offre de meilleures possibilités de réintégration professionnelle (en raison par exemple d’un salaire sans invalidité supérieur à celui avec invalidité; arrêts 9C_100/2010 du 23 mars 2010 consid. 2.1, 9C_310/2009 du 14 avril 2010 consid. 3.2 et 8C_294/2008 du 2 décembre 2008 consid. 6.4.1).

Comme l’ont retenu les premiers juges ( arrêt AI 203/12 – 44/2016 du 2 février 2016), les conditions étaient réunies pour procéder à une comparaison en pour-cent. En effet, l’assurée était en mesure de reprendre l’activité qui était la sienne avant la survenance de l’atteinte à la santé – l’office AI ayant retenu une capacité de travail de 60% dès le 2 juin 2007 dans l’activité habituelle, puis de 100% dès le 11 mars 2009. L’assurée a par ailleurs effectivement repris cette activité après l’accident survenu le 25 mars 2007 à 60% dès le 1er juin 2007. Le fait que son employeur l’a ultérieurement licenciée (avec effet au 31 mai 2008) n’a pas d’incidence sur le choix de la méthode à appliquer pour calculer le taux d’invalidité puisque l’assurée avait déjà repris son ancienne activité en 2007. Elle a en outre conservé un éventail relativement large de possibilités de réintégration sur un marché du travail similaire à celui dans lequel se trouvait son activité de représentante et dont les revenus concernés auraient ainsi été fondés sur les mêmes données statistiques. En tout état de cause, il serait difficile de chiffrer les revenus de l’assurée avec et sans invalidité, le salaire de cette dernière se composant à raison de 50% d’une part fixe et de 50% d’une part variable en fonction des commissions perçues.

Dans la mesure où l’assurée était incapable de poursuivre son activité habituelle à raison de 40% mais a continué son activité à un taux de travail réduit, la perte de gain ne pouvait que correspondre à la diminution de rendement. L’incapacité de travail se confondait ainsi avec l’incapacité de gain. C’est dès lors à bon droit que la juridiction cantonale a fixé le taux d’invalidité à 40% sans analyse des revenus mais en procédant à la comparaison en pour-cent.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_237/2016 consultable ici : http://bit.ly/2eeQ1Ez

 

 

9C_232/2016 (f) du 01.09.2016 – Incessibilité des prestations – 22 LPGA / Versement des arriérés de la rente AI à la caisse de prévoyance, à titre de tiers ayant fait une avance – 85bis RAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_232/2016 (f) du 01.09.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eg9CEt

 

Incessibilité des prestations – 22 LPGA

Versement des arriérés de la rente AI à la caisse de prévoyance, à titre de tiers ayant fait une avance – 85bis RAI

 

Le 10.05.2000, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office AI. Le 30.04.2014, la caisse de compensation a informé les tiers ayant fait des avances à l’assuré que celui-ci avait droit à des paiements rétroactifs de l’assurance-invalidité et les a invités à lui communiquer le cas échéant le montant dont ils demandaient le remboursement. Le 19.05.2014, la caisse de prévoyance a fait valoir un montant de 32’246 fr. 90, portant sur la période du 01.01.2008 au 30.06.2014, pour laquelle elle avait versé une rente d’invalidité à l’assuré.

L’office AI a octroyé une demi-rente à compter du 01.07.2014. Il lui a par la suite reconnu le droit à une demi-rente du 01.01.2000 au 30.06.2014 ; il a fixé le montant total de l’arriéré de rentes dû en faveur de l’assuré à 70’509 fr.. Selon un décompte auquel renvoie la décision, le montant à verser à titre de compensation en faveur de la caisse de prévoyance s’élevait à 29’101 fr. 60, sous déduction de l’impôt à la source par 2’910 fr.

 

TF

Selon l’art. 22 LPGA, le droit aux prestations est incessible; il ne peut être donné en gage. Toute cession ou mise en gage est nulle. Les prestations accordées rétroactivement par l’assureur social peuvent en revanche être cédées à l’employeur ou à une institution d’aide sociale publique ou privée dans la mesure où ceux-ci ont consenti des avances (let. a) ou à l’assureur qui a pris provisoirement à sa charge des prestations (let. b).

Les employeurs, les institutions de prévoyance professionnelle, les assurances-maladie, les organismes d’assistance publics ou privés ou les assurances en responsabilité civile ayant leur siège en Suisse qui, en vue de l’octroi d’une rente de l’assurance-invalidité, ont fait une avance peuvent exiger, en vertu de l’art. 85bis al. 1, 1ère phrase, RAI, qu’on leur verse l’arriéré de cette rente en compensation de leur avance et jusqu’à concurrence de celle-ci. Selon l’alinéa 2 de cette disposition, sont considérées comme une avance les prestations librement consenties, que l’assuré s’est engagé à rembourser, pour autant qu’il ait convenu par écrit que l’arriéré serait versé au tiers ayant effectué l’avance (let. a), ainsi que les prestations versées contractuellement ou légalement, pour autant que le droit au remboursement, en cas de paiement d’une rente, puisse être déduit sans équivoque du contrat ou de la loi (let. b).

Les avances librement consenties selon l’art. 85bis al. 2 let. a RAI supposent le consentement écrit de la personne intéressée pour que le créancier puisse en exiger le remboursement. Dans l’éventualité de l’art. 85bis al. 2 let. b RAI, le consentement n’est pas nécessaire; celui-ci est remplacé par l’exigence d’un droit au remboursement « sans équivoque ». Pour que l’on puisse parler d’un droit non équivoque au remboursement à l’égard de l’AI, il faut que le droit direct au remboursement découle expressément d’une norme légale ou contractuelle (ATF 136 V 381 consid. 5.1.1 p. 388; 135 V 2 consid. 6.1.2 p. 9; 133 V 14 consid. 8.3 p. 21).

Contrairement à ce qu’a retenu la juridiction cantonale, le cas d’espèce n’est pas comparable à celui qui a donné lieu à l’arrêt 9C_287/2014. Dans cette affaire, la personne concernée ne s’en prenait pas aux considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles les conditions de l’art. 85bis RAI étaient réalisées. Cette cause constituait un cas d’application de la jurisprudence d’après laquelle le bien-fondé de la prétention en restitution que l’assurance perte de gain en cas de maladie fait valoir à titre de surindemnisation doit, en cas de litige, être tranché dans une procédure opposant l’assurance et l’assuré (consid. 4.3 de l’arrêt 4A_24/2012 du 30 mai 2012, non publié aux ATF 138 III 411; arrêt I 296/03 du 21 octobre 2004 consid. 4.2).

Dans le cas d’espèce, l’assuré affirmait que les conditions de l’art. 85bis RAI pour le versement des arriérés de la rente d’invalidité à la caisse de prévoyance, à titre de tiers ayant fait une avance, n’étaient pas réalisées. Il soutenait en particulier que le droit au remboursement des prestations de la caisse de prévoyance ne découlait ni de la loi ni du règlement de prévoyance. Or le versement en mains de tiers présuppose le consentement écrit de la personne concernée ou un droit non équivoque au remboursement à l’égard de l’AI.

 

Le TF accepte le recours de l’assuré, annule le jugement attaqué et renvoie la cause à la juridiction cantonale pour qu’elle entre en matière sur le recours déposé par l’assuré le 22.05.2015, puis rende une nouvelle décision.

 

 

Arrêt 9C_232/2016 consultable ici : http://bit.ly/2eg9CEt

 

 

9C_905/2015 (f) du 29.08.2016 – Expertise médicale et troubles psychosomatiques/ syndrome douloureux somatoforme persistant – 44 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_905/2015 (f) du 29.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eCc2gj

 

Expertise médicale et troubles psychosomatiques/ syndrome douloureux somatoforme persistant – 44 LPGA

 

TF

Selon la jurisprudence, la reconnaissance d’une invalidité ouvrant le droit à une rente en raison d’un trouble somatoforme douloureux suppose au préalable qu’un diagnostic psychiatrique relevant de ce champ pathologique ait été posé selon les règles de l’art (ATF 141 V 281 consid. 2 p. 285).

En règle générale, il n’appartient pas au juge de remettre en cause le diagnostic retenu par un médecin et de poser de son propre chef des conclusions qui relèvent de la science et des tâches du corps médical. Il convient bien plutôt pour celui qui entend faire réexaminer le point de vue médical sur lequel s’est fondé l’administration ou le juge de mettre en évidence des éléments objectivement vérifiables – de nature notamment clinique ou diagnostique – qui auraient été ignorés dans le cadre de l’appréciation et qui seraient suffisamment pertinents pour remettre en cause le bien-fondé de celui-ci ou en établir le caractère incomplet (voir arrêt 9C_855/2015 du 2 mai 2016 consid. 4.3).

Dans le cas d’espèce, le volet psychiatrique de l’expertise réalisée apparaît effectivement lacunaire. L’anamnèse quotidienne rapportée par l’expert psychiatre décrivait une qualité de vie relativement préservée avec des interactions sociales importantes (famille, amis), description qui contrastait avec celles opérées par l’expert rhumatologue et l’expert généraliste. Quant à l’anamnèse médicale, elle ne tenait à l’évidence pas compte de l’ensemble des pièces médicales versées au dossier. Afin de motiver l’exclusion du diagnostic de trouble somatoforme, l’expert psychiatre a par ailleurs affirmé – de manière péremptoire et sans autre forme de discussion – que le tableau clinique ne comportait pas de plaintes intenses et de signes de détresse. Ce constat était d’autant moins compréhensible au regard d’autres constatations de l’expertise. En se prononçant sur l’intensité des plaintes et l’absence de signes de détresse, l’expert s’est référé aux critères diagnostics du ch. F45.40 (syndrome douloureux somatoforme persistant) de la CIM-10, sans toutefois intégrer dans sa réflexion les multiples plaintes douloureuses mentionnées dans les autres volets de l’expertise, où il est fait mention de douleurs constantes, nocturnes comme diurnes, avec une intensité entre 50 et 80 sur 100, ainsi que de douleurs constantes mais fluctuant selon les jours, avec paresthésies.

 

Dans la mesure où ce constat était par ailleurs en porte-à-faux avec les avis médicaux précédemment exprimés et l’octroi d’une allocation pour impotent, il appartenait à l’expert d’expliciter de manière détaillée son point de vue et les raisons pour lesquelles il ne partageait pas l’avis de ses confrères. En présence d’un tableau algique sans corrélation avec les atteintes somatiques objectives, le travail d’expertise exigeait en outre de l’intéressé qu’il s’exprime sur les causes d’une telle divergence, en prenant notamment position sur une éventuelle exagération des symptômes, voire une simulation.

 

Le TF accepte le recours de l’assurée, renvoyant la cause à la juridiction cantonale pour la mise en œuvre d’une nouvelle expertise psychiatrique.

 

 

 

Arrêt 9C_905/2015 consultable ici : http://bit.ly/2eCc2gj

 

 

8C_595/2015 (f) du 23.08.2016 – Causalité adéquate pour les troubles psychiques additionnelles à une atteinte à la santé physique pour un accident de gravité moyenne – 6 LAA / Agression par 3 individus – atteinte oculaire – catégorie moyenne stricte

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_595/2015 (f) du 23.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2e2J87N

 

Causalité adéquate pour les troubles psychiques additionnelles à une atteinte à la santé physique pour un accident de gravité moyenne / 6 LAA

Agression par 3 individus – atteinte oculaire – catégorie moyenne stricte

 

Assuré travaillant comme aide-cuisinier dans un snack bar a été agressé le 06.05.2012 vers 22h30 par trois individus qui l’ont frappé à la tête au moyen d’une bouteille, d’une boucle de ceinture et d’une barre à mine (rapport de police). Quelques heures après l’agression, il a été emmené aux urgences où les médecins ont posé les diagnostics suivants: TCC, plaie du front, hématome arcade et périorbitaire, atteinte à l’œil droit avec atteinte du globe oculaire et du nerf optique non exclue, fracture des os propres du nez. Les médecins spécialistes en ophtalmologie ont diagnostiqué une contusion oculaire droite avec hyphéma, hématovitré, œdème de Berlin (œdème rétinien), rupture choroïdienne para-papillaire. Ils ont procédé à un lavage de chambre antérieure de l’œil droit le 14.05.2012.

Depuis le 24.08.2012, l’assuré est suivi en raison d’un état de stress post-traumatique et d’un épisode dépressif moyen sans syndrome somatique.

Par décision du 20.06.2013, confirmée sur opposition le 01.04.2014, l’assureur-accidents a mis un terme, avec effet au 01.04.2013, au droit de l’assuré à des prestations en raison de ses troubles psychiques. Elle a considéré en résumé qu’il n’existait pas de lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques persistants à cette date et l’accident du 06.05.2012.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 29.06.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Causalité adéquate pour les troubles psychiques additionnelles à une atteinte à la santé physique

En vue de juger du caractère adéquat du lien de causalité entre un accident et une affection psychique additionnelle à une atteinte à la santé physique, il faut d’abord classer les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement: les accidents insignifiants, ou de peu de gravité; les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour procéder à cette classification, il convient non pas de s’attacher à la manière dont l’assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d’un point de vue objectif, sur l’événement accidentel lui-même (ATF 140 V 356 consid. 5.3 p. 360; 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140, 403 consid. 5c/aa p. 409). Sont déterminantes les forces générées par l’accident et non pas les conséquences qui en résultent ou d’autres circonstances concomitantes qui n’ont pas directement trait au déroulement de l’accident, comme les lésions subies par l’assuré ou le fait que l’événement accidentel a eu lieu dans l’obscurité (Frésard/Moser-Szeless, L’assurance-accidents obligatoire, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 3 e éd. 2016, p. 934 n° 122).

 

Classement de l’accident – gravité moyenne

Les premiers juges ont classé l’événement du 06.05.2012 dans la catégorie des accidents de gravité moyenne, sans qu’il se situe à la limite des accidents graves ou insignifiants. Se référant à quatre arrêts du Tribunal fédéral où des agressions avaient été qualifiées d’accidents de gravité moyenne à la limite des accidents graves (arrêts U 382/06 du 6 mai 2008; U 36/07 du 8 mai 2007; U 9/00 du 28 août 2001, in RAMA 2001 n° U 440 p. 350; U 226/02 du 13 juin 2003), la juridiction cantonale a considéré que les circonstances de l’événement du 06.05.2012 ne s’en rapprochaient pas. En effet, l’assuré avait été frappé par des compatriotes qu’il avait qualifiés d’amis, avec lesquels il avait passé la soirée à s’enivrer plus que de raison avant que la situation ne dégénérât pour des motifs obscurs.

Les circonstances de l’accident ne sont pas clairement établies. Cela étant, même si l’assuré a été frappé au moyen d’objets susceptibles de causer des lésions importantes, il convient de relever qu’il a été en mesure de se relever rapidement et d’appeler son collègue de travail, lequel n’a pas immédiatement jugé nécessaire de l’emmener à l’hôpital. Enfin, l’assuré a principalement été atteint à l’œil droit, soit un organe particulièrement sensible. Quant aux autres lésions, il n’apparaît pas qu’elles auraient nécessité une intervention chirurgicale ou un traitement médical particulier. Compte tenu de l’ensemble de ces circonstances, on peut conclure que la violence de l’agression n’était pas telle qu’il faille classer l’agression dans la catégorie supérieure des accidents de gravité moyenne.

Gravité ou de la nature particulière des lésions physiques

Le TF ne revient pas sur l’admission du critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques (cf. à propos de ces critères ATF 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140, 403 consid. 5c/aa p. 409). La cour cantonale a considéré ce critère comme rempli au vu de la perte fonctionnelle de l’œil droit dont l’acuité visuelle se limitait à la numération digitale à un mètre. Le TF précise que dans le cas d’une perte totale de la fonction d’un œil sans rémission possible, il a été jugé que le critère de la gravité de la lésion ne revêtait pas une intensité suffisante pour admettre à lui seul un lien de causalité adéquate avec des troubles psychiques (arrêt 8C_935/2012 du 25 juin 2013 consid. 4.4; au sujet de la perte fonctionnelle d’un œil voir aussi U 233/06 du 2 février 2007 consid. 5.3; U 343/04 du 10 août 2005 consid. 2.2.3).

 

Caractère particulièrement impressionnant de l’accident

A tout accident de gravité moyenne est associé un certain caractère impressionnant, lequel ne suffit pas pour admettre l’existence du critère en question (arrêts U 287/97 du 20 novembre 1998 consid. 3b/cc, in RAMA 1999 n° U 335 p. 207 ss.; plus récemment 8C_560/2015 du 29 avril 2016 consid. 4.4.1).

En l’espèce, l’assuré et ses agresseurs ont passé la soirée ensemble à consommer une quantité excessive d’alcool puis se sont mis à se disputer pour des motifs que l’on ignore. Dans ces conditions, on ne saurait retenir que l’agression de nuit par plusieurs personnes a eu un caractère particulièrement impressionnant ou dramatique, quand bien même l’assuré a été frappé au moyen d’objets potentiellement dangereux. En outre, l’existence de lésions graves n’est pas déterminante pour l’examen du caractère particulièrement dramatique ou impressionnant d’un accident, la nature et la gravité de la lésion étant un critère en soi (cf. arrêt 8C_935/2012 du 25 juin 2013 consid. 4.3.1; arrêt U 233/06 du 2 février 2007 consid. 5.3).

 

Durée anormalement longue du traitement médical

L’assuré a subi deux opérations de l’œil les 24.01.2013 et 14.10.2013. Même en admettant que ces opérations étaient susceptibles d’apporter une amélioration de l’état de santé de l’assuré, elles ne rendraient pas anormalement longue la durée du traitement médical.

En effet, l’aspect temporel n’est pas seul décisif. Sont également à prendre en considération la nature et l’intensité du traitement (arrêt 8C_1007/2012 consid. 5.4.3 et les arrêts cités). A cet égard, les deux interventions dont se prévaut l’assuré ont été pratiquées en ambulatoire et il n’apparaît qu’elles aient entraîné une longue convalescence. A titre de comparaison, ce critère n’a pas non plus été reconnu dans le cas d’un traitement d’environ deux ans et demi, consistant principalement en deux opérations, espacées dans le temps et suivies chacune d’un séjour dans un centre de réadaptation (arrêt 8C_755/2012 du 23 septembre 2013 consid. 4.2.3).

 

Les autres critères

La question est restée indécise par le TF, dans la mesure où, en plus des critères examinés plus hauts, aucun des autres critères n’est rempli. Dans tous les cas, une baisse de rendement durable de 20% seulement n’est pas suffisante pour remplir le critère relatif à l’incapacité de travail due aux lésions somatiques (a contrario voir par exemple arrêt 8C_116/2009 du 26 juin 2009 consid. 4.6).

 

Il s’ensuit qu’un voire deux critères seulement sont réalisés, sans toutefois revêtir une intensité particulière. Le lien de causalité adéquate entre l’accident et les troubles psychiques peut être nié à compter du 01.04.2013.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_595/2015 consultable ici : http://bit.ly/2e2J87N

 

 

9C_730/2015 (d) du 27.04.2015 – publication prévue – Prise en charge médicament – Traitement au Myozyme pris en charge

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_730/2015 (d) du 27.04.2015, destiné à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/2e3j8y3

 

Prise en charge médicament – Traitement au Myozyme pris en charge

25 LAMal – 32 LAMal – 43 LAMal – 52 LAMal – 34 OAMal – 64 OAMal

 

La caisse maladie CPT devra prendre en charge une facture de 370’000 francs pour un traitement au Myozyme, l’un des médicaments les plus chers sur le marché. Le Tribunal fédéral (TF) a rejeté le recours de l’assurance, en procès avec une patiente atteinte de la maladie de Pompe.

 

Il y a six ans, le TF avait catégoriquement exclu le remboursement de ce médicament pour soigner cette maladie héréditaire, qui se traduit notamment par une dégénérescence musculaire. Il avait donné tort à la patiente et jugé que le coût de ce traitement était disproportionné.

Entre-temps, le Myozyme a fait son entrée sur la liste des spécialités. Sa prise en charge pour une période de douze mois doit être remboursée pour autant qu’elle respecte des conditions drastiques.

 

Complexité sans précédent

Selon les spécialistes de la question, les limitations posées au remboursement du médicament sont les plus longues et les plus complexes jamais élaborées pour la prise en charge d’un traitement par une caisse maladie.

Suite à l’admission du Myozyme sur la liste des spécialités, en novembre 2011, l’assurée avait réitéré sa demande de prise en charge du traitement à ce médicament. Elle s’était heurtée à un nouveau refus de sa caisse maladie, qui s’était opposée au paiement d’une ardoise de 370’000 francs pour un traitement d’une année.

Contrainte par la justice saint-Galloise de passer à la caisse, la CPT avait recouru au TF, qui a confirmé son obligation de remboursement. Dès lors qu’un médicament figure sur la liste des spécialités, l’assureur n’a qu’une possibilité réduite de remettre en question son efficacité ou son économicité, souligne Mon Repos.

 

Prolongement sous conditions

Le veto de la CPT enfreint l’obligation légale de prise en charge imposée aux assureurs. Ceux-ci ne peuvent recourir ni contre l’admission d’un médicament dans la liste des spécialités, ni contre son prix.

En l’espèce, conformément aux conditions subordonnant l’admission du Myozyme sur la liste des spécialités, les résultats concrets d’un traitement ne pourraient avoir une incidence que si la patiente décidait de poursuivre le traitement au terme de la période de douze mois à la charge de caisse. (arrêt 9C_730/2015 du 16 septembre 2016) (ats)

 

 

Arrêt 9C_730/2015 consultable ici : http://bit.ly/2e3j8y3

 

 

9C_929/2015 (f) du 10.08.2016 – Frais d’expertises judiciaires ne constituent pas des frais de justice / 69 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_929/2015 (f) du 10.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2eaeVHa

 

Frais d’expertises judiciaires ne constituent pas des frais de justice / 69 al. 1bis LAI

 

TF

Les frais d’expertises judiciaires ne constituent pas des frais de justice au sens de l’art. 69 al. 1bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l’art. 45 LPGA qui, le cas échéant, peuvent être mis à la charge de l’assurance-invalidité (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3 p. 502; arrêt 9C_803/2013 du 13 février 2014 consid. 4.1

Les décisions préjudicielles et incidentes, dont celles sur les frais et dépens, contre lesquelles un recours immédiat est exclu ou n’a pas été utilisé, n’entrent en force qu’avec la décision finale au fond ; jusqu’à ce moment-là, elles ne sont pas exécutoires et ne valent pas titre de mainlevée définitive (ATF 135 III 329 consid. 1.2.1 p. 332 et la référence; arrêt 9C_722/2013 du 15 janvier 2015 consid. 5). Faute de préjudice irréparable, le recours dirigé contre le prononcé accessoire sur les frais d’expertise est par conséquent irrecevable.

Le sort du présent recours ne préjuge pas de celui de la répartition des frais de l’expertise judiciaire lorsque la décision finale sera rendue (cf. arrêt 9C_567/2008 du 30 octobre 2008 consid. 4.2). En effet, lorsqu’une décision rendue à la suite d’un jugement de renvoi n’est plus contestée, la question de la répartition des frais qui avait fait l’objet de ce jugement peut être directement déférée au Tribunal fédéral dans le délai de recours prévu à l’art. 100 LTF en liaison avec l’art. 60 LPGA (arrêt 2C_309/2015 du 24 mai 2016 consid. 1.3, destiné à la publication dans le Recueil officiel). Concrètement, cela signifie que le recourant pourra contester le ch. 5 du dispositif du jugement cantonal du 11.11.2015 devant le Tribunal fédéral soit de manière indépendante dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision qu’il rendra à la suite de cet arrêt de renvoi, soit avec le nouveau jugement cantonal si sa décision est déférée à l’instance cantonale.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_929/2015 consultable ici : http://bit.ly/2eaeVHa

 

 

Arrêt de la CrEDH Vukota-Bojić c. Suisse (en) du 18.10.2016 – Surveillance illicite d’une victime d’accident de la route par une compagnie d’assurances contraire à son droit à la vie privée

Arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme Vukota-Bojić c. Suisse (no 61838/10) (en) du 18.10.2016

 

Arrêt consultable ici : Vukota-Bojić c. Suisse

Communiqué de presse de la CrEDH consultable ici : Arrêt Vukota-Bojić c. Suisse – Surveillance illicite par une compagnie d’assurance   

 

La surveillance illicite d’une victime d’accident de la route par une compagnie d’assurances était contraire à son droit à la vie privée

 

Dans son arrêt de Chambre, rendu le 18.10.2016 dans l’affaire Vukota-Bojic c. Suisse (requête no 61838/10), la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CrEDH) dit, par six voix contre une, qu’il y a eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée) de la Convention européenne des droits de l’homme et, à l’unanimité, qu’il y a eu non-violation de l’article 6 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne.

 

Victime d’un accident de la route, Mme Vukota-Bojić demanda par la suite une pension d’invalidité. Dans le cadre d’un litige avec son assureur [ndr: assurance-accidents LAA] quant au montant de cette pension, après plusieurs années de contentieux, ce dernier lui demanda de passer un autre examen médical de manière à évaluer à nouveau son état de santé, ce qu’elle refusa. À la suite de cela, il engagea des détectives privés afin de la mettre sous surveillance en secret. Les preuves ainsi recueillies furent produites au cours d’un procès ultérieur, qui se solda par la diminution du montant des prestations offertes à Mme Vukota-Bojić. Cette dernière estimait que cette surveillance était contraire à son droit au respect de sa vie privée et que ces preuves n’auraient pas dû être admises au cours du procès.

La Cour a jugé que, l’assureur [ndr: assureur LAA] étant regardé comme une entité publique en droit suisse, son action avait engagé la responsabilité de l’État sur le terrain de la Convention. Elle a également estimé que, bien qu’elle eût été conduite dans des lieux publics, la surveillance secrète litigieuse avait porté atteinte à la vie privée de Mme Vukota-Bojić, les enquêteurs ayant collecté et stocké des données de manière systématique et les ayant utilisées à des fins précises. De plus, cette mesure n’avait pas été prévue par la loi, les dispositions de droit suisse sur lesquelles elle était fondée étant insuffisamment précises. En particulier, elles n’indiquaient pas clairement à quel moment et pendant quelle durée la surveillance pouvait être conduite, ni selon quelles modalités les données ainsi recueillies pouvaient être stockées et consultées. Il y avait donc eu violation de l’article 8.

La Cour a également jugé que l’utilisation des preuves obtenues au moyen de la surveillance dans le litige qui opposait Mme Vukota-Bojić à son assureur n’a pas rendu le procès inéquitable. Cette dernière avait dûment eu la possibilité de contester les preuves ainsi recueillies et les juridictions internes avaient motivé leurs décisions autorisant l’admission de ces pièces.

 

Principaux faits

La requérante, Savjeta Vukota-Bojić, est une ressortissante suisse née en 1954 et habitant à Opfikon (Suisse). En août 1995, elle fut heurtée par une moto et tomba sur le dos. On diagnostiqua initialement chez elle un traumatisme cérébral et un éventuel traumatisme crânien, et elle passa plusieurs examens médicaux qui se soldèrent par des conclusions contradictoires sur son aptitude au travail.

Sur la base de ces rapports, l’assureur de Mme Vukota-Bojić estima que le droit de celle-ci à des allocations journalières devait prendre fin dès le mois d’avril 1997. Cette décision fut annulée par le Tribunal des assurances sociales de Zurich, qui ordonna la conduite d’une enquête complémentaire. Les rapports qui en résultèrent conclurent que Mme Vukota-Bojić souffrait d’un dysfonctionnement cérébral qui avait été causé par son accident. Parallèlement, le 21 mars 2002, l’autorité locale en matière d’assurance sociale lui avait accordé une pension d’invalidité complète.

Le 14 janvier 2005, l’assureur décida à nouveau que l’assurance n’octroierait plus aucune allocation à Mme Vukota-Bojić. Le Tribunal des assurances sociales invalida là encore cette décision, à la suite de quoi l’assureur invita Mme Vukota-Bojić à passer un nouvel examen médical, ce qu’elle refusa. L’assureur décida dès lors de la faire surveiller en secret par des détectives privés, afin de faire la lumière sur son état de santé. La surveillance fut conduite à quatre dates différentes et dura à chaque fois plusieurs heures. Les détectives suivirent Mme Vukota-Bojić dans des lieux publics sur de longues distances. Un rapport de surveillance fut dressé.

Sur la base de ce rapport, l’assureur confirma sa décision que l’assurance n’octroierait plus aucune allocation à Mme Vukota-Bojić. En avril 2007, un neurologue désigné par lui, le Dr H., rédigea un avis d’expert anonyme qui concluait qu’elle n’était invalide qu’à 10%. L’assureur décida d’accorder à Mme Vukota-Bojić des allocations journalières et une pension à hauteur de ce taux.

Mme Vukota-Bojić forma un recours contre les décisions de l’assureur mais, dans un arrêt du 29 mars 2010, le Tribunal fédéral estima que l’assureur avait été fondé à demander à Mme Vukota-Bojić un nouvel examen médical, que la surveillance était légale et que l’avis du Dr H. était convaincant sur la question du droit de cette dernière à des allocations. Mme Vukota-Bojić demanda des clarifications à cette juridiction, mais en vain.

 

Décision de la Cour

Article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale)

La Cour estime que la surveillance mise en place par l’assureur s’analyse en une violation du droit à la vie privée de Mme Vukota-Bojić. Elle constate tout d’abord que, l’assureur étant un acteur d’un régime d’assurance public, considéré en droit interne comme une entité publique, son action est imputable à l’État.

De plus, bien que la surveillance ait été seulement conduite dans des lieux publics, l’article 8 § 1 était applicable étant donné que les enquêteurs ont agi de manière systématique, qu’ils ont compilé des données permanentes sur Mme Vukota-Bojić et que celles-ci ont été sollicitées afin de régler un litige en matière d’assurance. Il y a donc eu ingérence dans la vie privée de Mme Vukota-Bojić.

De plus, cette ingérence n’était pas « prévue par la loi » comme le prescrit l’article 8 § 2. Si la législation suisse permettait bien aux compagnies d’assurances de prendre les « mesures d’enquête nécessaires » et de recueillir les « informations nécessaires » en cas de réticence d’un assuré à livrer des informations, ces dispositions étaient insuffisamment précises. En particulier, elles n’indiquaient pas à quel moment et pendant quelle durée la surveillance pouvait être conduite ni ne prévoyaient des garanties contre les abus, par exemple des procédures à suivre lorsque les compagnies stockent, consultent, examinent, utilisent, communiquent ou détruisent des informations. Il en avait résulté un risque d’accès et de divulgation non autorisés d’informations.

La surveillance de Mme Vukota-Bojić était donc contraire à l’article 8.

 

Article 6 (droit à un procès équitable)

La Cour juge que la production au prétoire des preuves recueillies au moyen de la surveillance, ainsi que de l’avis d’expert du Dr H. fondé sur ces pièces, n’était pas contraire à l’article 6. Considérée dans son ensemble, la procédure a été conduite équitablement. Mme Vukota-Bojić a eu la possibilité de contester l’admissibilité du rapport de surveillance et des preuves y associées, et le Tribunal fédéral a motivé sa décision autorisant leur admission. De plus, les données recueillies au moyen de la surveillance et l’avis du Dr H. n’étaient pas les seules preuves sur lesquelles la décision du Tribunal fédéral était fondée, celui-ci ayant également souligné l’existence d’autres rapports médicaux contradictoires.

 

Satisfaction équitable (article 41)

La Cour dit que la Suisse doit verser à la requérante 8 000 euros (EUR) pour dommage moral, et 15 000 EUR pour ses frais et dépens.

 

Opinion séparée

Le juge Dedov a exprimé une opinion dissidente dont le texte se trouve joint à l’arrêt.

 

L’arrêt n’existe qu’en anglais.

 

L’arrêt de la CrEDH du 18 octobre 2016 sera définitif, au sens de l’art. 44 ch. 2 CEDH :

a) lorsque les parties déclarent qu’elles ne demanderont pas le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre ; ou

b) trois mois après la date de l’arrêt, si le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre n’a pas été demandé ; ou

c) lorsque le collège de la Grande Chambre rejette la demande de renvoi formulée en application de l’article 43.

 

 

Arrêt du TF 8C_629/2009 du 29 mars 2010 (cas LAA) : http://bit.ly/2ejDLEu

Arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme Vukota-Bojić c. Suisse (no 61838/10) (en) du 18.10.2016 consultable ici : http://bit.ly/2egKCMa

 

Communiqué de presse du Greffier de la Cour du 18.10.2016 sur l’arrêt Vukota-Bojić c. Suisse (no 61838/10)

 

Annonce d’arrêts et décisions, communiqué de presse du Greffier de la Cour du 13.10.2016

 

 

9C_467/2016 (f) du 09.08.2016 – Assurance-maladie – Droit d’option – ALCP – Règlement (CEE) n° 1408/71

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_467/2016 (f) du 09.08.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2dV1cSA

 

Assurance-maladie – Droit d’option – ALCP – Règlement (CEE) n° 1408/71

 

A.__, ressortissante française domiciliée en France, a débuté une activité lucrative salariée en Suisse le 01.10.1989 ; elle est titulaire d’un permis G (personne autorisée à venir travailler en Suisse en zone frontalière). Le 17.06.2002, le Service de l’assurance-maladie du canton de Genève (ci-après: le SAM) l’a informée des modalités d’exercice du droit d’option entre l’affiliation à l’assurance-maladie suisse et la couverture maladie française. En cas d’option pour le régime français d’assurance, il lui incombait de compléter le formulaire de déclaration correspondant, muni des documents requis, et de le renvoyer au SAM dans les trois mois; son attention était attirée sur le fait que son choix serait irrévocable durant son activité professionnelle en Suisse. A.__ a opté pour le système d’assurance-maladie de son pays de résidence le 08.07.2002.

Le 20.04.2015, A.__ a demandé au SAM de l’affilier au régime suisse d’assurance-maladie, en indiquant notamment que les conditions permettant l’exercice du droit d’option avaient changé, la contraignant dorénavant à rejoindre la couverture maladie universelle (CMU) française. Le SAM a rejeté sa demande d’affiliation.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/426/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2ewCLy9)

L’assurée avait dûment manifesté sa volonté de rester assurée auprès du système français d’assurance-maladie en 2002. Le seul fait que la législation française avait changé et lui imposait dorénavant de s’affilier à la CMU ne lui permettait pas d’exercer à nouveau un droit d’option. Contrairement à ce qu’alléguait l’assurée, le droit d’option pour les frontaliers résidant en France était par ailleurs déjà mis en œuvre et acquis en juin 2002.

Par jugement du 30.05.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Invoquant une violation du droit de l’Union européenne, l’assurée affirme qu’elle a été amenée par une présentation fallacieuse de la situation juridique à exercer en juillet 2002 un droit d’option qui n’était pas applicable. Elle ne pouvait en effet valablement opter pour le système français d’assurance le 08.07.2002 alors que cette possibilité n’a concrètement été reconnue par le Comité mixte UE-Suisse que par décision n° 2/2003 du 15.07.2003 (RO 2004 1277) portant modification de l’annexe II (sécurité sociale) de l’ALCP avec effet au 01.06.2002. Elle soutient que cette décision ne pouvait par ailleurs pas valider a posteriori la démarche du SAM, car le principe de la protection de la confiance légitime s’opposait à ce qu’un tel acte soit appliqué rétroactivement.

En l’occurrence, au moment de la déclaration du 08.07.2002, les autorités française et suisse avaient d’un commun accord arrêté des modalités pratiques permettant de rendre effectif le droit d’option réservé par l’ALCP et les règlements communautaires auxquels il renvoyait sans attendre la décision formelle du Comité mixte UE-Suisse (cf. Lettre d’information de l’OFAS n° 2167470/1 aux cantons du 28 juin 2002 concernant les ordonnances AELE). Dans l’intérêt des travailleurs frontaliers qui résidaient en France mais étaient occupés en Suisse, il s’agissait en particulier de leur permettre de déposer une demande d’exemption de l’assurance-maladie suisse dans le délai de trois mois prévu par le règlement (CEE) n° 1408/71 (voir Annexe VI Suisse ch. 3 point b au règlement n° 1408/71 dans sa version modifiée par l’Annexe II de l’ALCP).

Certes, la déclaration du 08.07.2002 a produit des effets sous l’empire d’une réglementation qui est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 01.06.2002. L’assurée a toutefois obtenu la dérogation qu’elle souhaitait en 2002, en vertu d’une assurance claire et sans équivoque donnée par le SAM (courrier du 17.06.2002), et pouvait escompter qu’aucune atteinte ne fût portée à la situation juridique correspondante. En ce sens, le volte-face de l’assurée ne mérite pas protection sous l’angle des règles de la bonne foi. Quoi qu’il en soit, la décision n° 2/2003 du Comité mixte UE-Suisse n’a fait que codifier la pratique en vigueur au moment de la déclaration de l’assurée du 08.07.2002. La rétroactivité (improprement dite) qu’elle contient ne prête pas le flanc à la critique (cf. ATF 140 V 154 consid. 6.3.2 p. 163; arrêt 2C_1017/2011 du 8 mai 2012 consid. 7.1 et la référence).

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_467/2016 consultable ici : http://bit.ly/2dV1cSA