Archives de catégorie : Assurance-vieillesse AVS

9C_799/2018 (f) du 21.02.2019 – Ajournement de la rente de vieillesse AVS – Demande de réparation – 78 LPGA / Rappel quant à la recevabilité du recours au TF / Pas de violation de l’obligation de renseigner et de conseiller de la caisse AVS – 27 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_799/2018 (f) du 21.02.2019

 

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Ajournement de la rente de vieillesse AVS – Demande de réparation / 78 LPGA

Rappel quant à la recevabilité du recours au TF

Pas de violation de l’obligation de renseigner et de conseiller de la caisse AVS / 27 LPGA

 

Assuré, né en 1946, père de quatre enfants, a exercé la profession de médecin indépendant. Le 07.09.2011, l’assuré a déposé une demande de rente de vieillesse de l’AVS, dont il a requis l’ajournement pour une durée de cinq ans. Le 29.11.2011, la caisse lui a confirmé l’ajournement de sa rente et l’a informé qu’il pouvait à tout moment en demander le versement.

Le 23.09.2015, l’assuré a présenté une demande de rente de survivant à la caisse AVS à la suite du décès de son épouse survenu en 2014. La caisse a alloué une rente d’orphelin de mère à un des enfants, d’un montant mensuel de 550 fr. (2014), puis de 552 fr. (2015).

Au terme de la période d’ajournement, soit à compter du 01.10.2016, la caisse AVS a octroyé à l’assuré une rente ordinaire mensuelle de vieillesse de 3’040 fr. La caisse AVS a alloué à l’orphelin une rente pour enfant liée à la rente du père, également à partir du 01.10.2016; le montant mensuel de cette prestation, 1’134 fr., tenait compte du supplément pour ajournement ainsi que de la réduction pour plafonnement en cas de concours de rentes d’orphelin et de rentes pour enfant. A la suite de la suppression de la rente pour enfant, lequel avait atteint l’âge de 25 ans, la caisse a alloué à l’assuré une rente ordinaire mensuelle de vieillesse de 3’316 fr. depuis le 01.06.2017.

Entretemps, le 10.04.2017, l’assuré a adressé à la caisse AVS une demande en réparation du dommage. Il a soutenu que la caisse n’avait pas respecté son devoir d’information et de conseil à propos de l’incidence de l’ajournement de sa rente de vieillesse sur le versement des rentes pour ses quatre enfants encore à charge au 01.10.2011. La caisse AVS a rejeté la demande.

 

Procédure cantonale (arrêt AVS 34/17 – 44/2018)

La juridiction cantonale a admis que l’assuré ne pouvait ignorer, à la lumière des explications fournies dans le formulaire « Demande de rente de vieillesse », que les bénéficiaires d’une rente de vieillesse avaient droit à une rente complémentaire pour chacun de leurs enfants de plus de 18 ans qui accomplissait une formation jusqu’au terme de celle-ci, mais au plus tard jusqu’à son 25ème anniversaire. Elle en a déduit que l’assuré, en décidant d’ajourner sa rente de vieillesse et, partant, de renoncer aux rentes pour enfant, avait agi en connaissance de cause. De surcroît, les premiers juges ont constaté que l’assuré n’avait pas produit de pièces laissant supposer que l’un ou l’autre de ses enfants se trouvait à ce moment-là en formation, si bien qu’on ne pouvait pas reprocher à la caisse AVS d’être restée passive.

Les juges cantonaux ont constaté que l’assuré n’avait pas déposé de demande auprès de sa propre caisse d’allocations familiales afin d’obtenir le versement de telles prestations.

Par jugement du 02.10.2018, rejet de la demande en réparation du dommage au sens de l’art. 78 LPGA par le tribunal cantonal.

 

TF

Rappel quant à la recevabilité

Le recours en matière de droit public contre un jugement statuant sur la responsabilité d’une caisse de compensation fondée sur l’art. 78 LPGA n’est recevable que si la valeur litigieuse atteint la somme de 30’000 francs (art. 85 al. 1 let. a LTF; ATF 134 V 138), ou s’il existe une question juridique de principe (art. 85 al. 2 LTF). Le montant litigieux devant la dernière instance cantonale est déterminant (art. 51 al. 1 let. a LTF) et l’autorité cantonale de dernière instance doit le mentionner dans son arrêt (art. 112 al. 1 let. d LTF). Lorsque les conclusions ne tendent pas au paiement d’une somme d’argent déterminée, le Tribunal fédéral fixe la valeur litigieuse selon son appréciation (art. 51 al. 2 LTF). Ce contrôle d’office ne supplée toutefois pas au défaut d’indication de la valeur litigieuse : il n’appartient pas en effet au Tribunal fédéral de procéder lui-même à des investigations pour déterminer cette valeur, si elle ne résulte pas d’emblée des constatations de la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF) ou d’autres éléments ressortant du dossier (cf. arrêt 5A_621/2007 du 15 août 2008 consid. 1.2). L’assuré doit ainsi indiquer, conformément à l’art. 42 al. 1 et 2 LTF, les éléments suffisants pour permettre au Tribunal de céans d’estimer aisément la valeur litigieuse, sous peine d’irrecevabilité (ATF 136 III 60 consid. 1.1.1 p. 62 et les références; JEAN-MAURICE FRÉSARD, Commentaire de la LTF, 2e éd., n° 6 ad art. 51).

 

Responsabilité de la caisse AVS au sens de l’art. 78 LPGA

L’assuré soutient avoir subi un préjudice par la non-perception de rentes pour enfant en raison d’une violation de l’art. 27 al. 2 LPGA qu’il impute à la caisse AVS. La question est de savoir si celle-ci a engagé sa responsabilité au sens de l’art. 78 LPGA en raison d’une omission fautive, singulièrement si l’on pouvait raisonnablement exiger de sa part qu’elle attirât l’attention de l’assuré sur le fait que l’ajournement de la rente de vieillesse avait pour effet d’ajourner simultanément les rentes pour enfant.

Le Tribunal fédéral rappelle que, sur la base des explications précises dans le formulaire de rente, l’assuré savait que le droit à une rente pour enfant supposait que celui-ci accomplît une formation et qu’il avait dès lors renoncé au versement de rentes pour enfant en parfaite connaissance de cause. A cet égard, le questionnaire d’annonce est effectivement clair et la caisse AVS pouvait partir de l’idée que l’assuré ne demandait pas de rentes pour enfant parce qu’ils n’étaient pas en formation, puisque l’assuré n’a présenté aucun contrat d’apprentissage ou attestation d’un établissement d’enseignement (documents mentionnés comme devant être joints à la demande de rente). La caisse n’avait donc pas à l’interpeller à ce sujet, en l’absence de tout élément – qu’il aurait appartenu à l’assuré de fournir – qui aurait permis de penser que les enfants de l’assuré pouvaient prétendre des rentes pour enfant complémentaires à celle, seule requise, de leur père. L’information relative à l’ajournement de la caisse AVS n’était donc pas erronée.

La caisse AVS ignorait en 2011 que l’un des enfants suivait une formation au-delà de sa majorité, sans que cette méconnaissance puisse lui être reprochée. L’information en cause n’est apparue qu’en lien avec la demande de rente pour orphelin de mère déposée le 23.09.2015, dans le cadre de laquelle la caisse intimée a apparemment reçu une attestation d’études, la demande de rente ayant été vérifiée le 29.09.2015.

Le Tribunal fédéral conclut que la caisse AVS n’a pas violé son obligation de renseigner et de conseiller (art. 27 LPGA), aussi bien à l’époque où l’assuré avait déposé une demande de rente de vieillesse et requis son ajournement (en 2011), qu’à l’occasion de l’instruction de la demande de rente d’orphelin (en 2015).

A défaut d’acte illicite, la juridiction cantonale était en droit de considérer que la demande en réparation (art. 78 LPGA) était infondée.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_799/2018 consultable ici

 

 

9C_743/2017 (f) du 16.03.2018 – Calcul de la rente de vieillesse – 29bis ss LAVS / Rectification du compte individuel – 30ter LAVS – 141 al. 3 RAVS / Prise en considération de cotisations supplémentaires

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_743/2017 (f) du 16.03.2018

 

Consultable ici

 

Calcul de la rente de vieillesse / 29bis ss LAVS

Rectification du compte individuel / 30ter LAVS – 141 al. 3 RAVS

Prise en considération de cotisations supplémentaires

 

Par décision du 22.01.2015, la Caisse suisse de compensation (ci-après: la CSC) a alloué une rente de vieillesse à l’assuré, né en 1948 et domicilié en Italie. Le montant en a été fixé à 532 fr. par mois à compter du 01.06.2013, puis à 534 fr. dès le 01.01.2015. Cette prestation était établie sur la base d’une durée de cotisations de 10 années entières (de 2003 à 2012), de l’échelle de rente 10, et d’un revenu annuel moyen déterminant de 150’870 fr.

L’assuré s’est opposé à cette décision, en indiquant qu’il avait travaillé de décembre 1977 à décembre 2014 au service de B.__ SA. A l’issue de ses investigations menées notamment auprès de l’ancien employeur et de la Caisse interprofessionnelle AVS de la Fédération des Entreprises Romandes, la CSC a rejeté l’opposition par décision du 13 juillet 2015.

 

Procédure cantonale (arrêt du TAF C-5517/2015 – consultable ici)

Les juges du Tribunal administratif fédéral (TAF) ont constaté que le compte individuel de l’assuré ne comportait pas de cotisations pour la période courant de décembre 1977 à décembre 2002. Ils ont considéré que l’assuré n’avait pas prouvé que des cotisations sociales à l’AVS auraient été retenues sur ses revenus pour la période en cause, l’employeur ayant indiqué que l’assuré n’était pas assujetti à l’AVS durant cette période et qu’il n’avait dès lors pas retenu de cotisations. Pour le TAF, il n’y avait pas lieu de déterminer si l’assuré aurait ou non dû être affilié aux assurances sociales suisses pour cette période, car de telles cotisations ne pouvaient de toute manière plus être exigées ni payées, compte tenu de l’art. 16 al. 1 LAVS.

Par ailleurs, le TAF a constaté que l’employeur de l’assuré n’avait pas retenu de cotisations à l’AVS durant la période 1977 à 2002. Le TAF disposait des déclarations écrites de l’ancien employeur qui avait indiqué n’avoir pas retenu de cotisations à l’AVS puisqu’il estimait que ses collaborateurs n’étaient pas soumis à cette assurance sociale jusqu’en 2003. L’employeur avait précisé que les montants indiqués dans les champs correspondants des certificats de salaires, en 1993 et 2002, ne représentaient à proprement parler pas des cotisations à l’AVS ou à la prévoyance professionnelle, mais des contributions à une forme de prévoyance privée et volontaire qu’il avait mise en place, ce qui était connu des employés.

Par jugement du 01.09.2017, rejet du recours par le TAF.

 

TF

Les revenus de l’activité lucrative obtenus par un salarié et sur lesquels l’employeur a retenu les cotisations légales sont inscrits au compte individuel de l’intéressé, même si l’employeur n’a pas versé les cotisations en question à la caisse de compensation (art. 30ter al. 2 LAVS en vigueur depuis le 1er janvier 1997, correspondant à l’ancien art. 138 al. 1 RAVS en vigueur jusqu’au 31 décembre 1996; arrêt H 11/69 du 1er avril 1969, in RCC 1969 p. 545).

Reprenant les constatations de l’instance inférieure, le Tribunal fédéral conclut que, dès lors que la rétention de cotisations à l’AVS par l’employeur n’est pas établie ni même rendue vraisemblable pour les années 1977 à 2002, il n’est pas possible de rectifier les inscriptions figurant sur le compte individuel de l’assuré, car les conditions pour ce faire prévues par l’art. 30ter al. 2 LAVS, respectivement l’ancien art. 138 al. 1 RAVS, ne sont pas réalisées.

 

La rectification du compte individuel au sens de l’art. 141 al. 3 RAVS s’étend à toute la durée de cotisations de l’assuré et porte donc également sur les années de cotisations pour lesquelles des cotisations ne peuvent plus être payées, selon l’art. 16 al. 1 LAVS. Toutefois, l’art. 141 al. 3 RAVS ne donne à la caisse de compensation que la compétence de corriger d’éventuelles erreurs d’écritures, et non pas d’effectuer des corrections matérielles en tranchant des questions de droit de fond. De même, l’inscription de cotisations prescrites est également possible aux conditions de l’art. 30ter LAVS, selon lesquelles l’employeur doit avoir retenu les cotisations légales mais ne les a pas versées à la caisse. Cette situation particulière – à laquelle s’ajoute, selon la jurisprudence, celle d’une convention sur le salaire net – doit toutefois être établie sans équivoque. S’il n’est pas clair que l’employeur a effectivement retenu les cotisations sur le salaire, une correction du compte individuel n’est pas possible (arrêt H 11/69 du 1er avril 1969, in RCC 1969 p. 545).

En dehors des situations particulières visées par les art. 30ter LAVS et 141 al. 3 RAVS, les cotisations dont le montant n’a pas été fixé par voie de décision dans un délai de cinq ans à compter de la fin de l’année civile pour laquelle elles sont dues ne peuvent plus être exigées ni versées (art. 16 al. 1, première phrase, LAVS). Même si l’argumentation de l’assuré, selon laquelle il aurait dû être affilié à l’AVS pour les années en cause, était bien fondée, les cotisations y relatives ne pourraient de toute façon plus être exigées et versées à l’AVS.

Dans ces circonstances, dès lors qu’une correction matérielle du compte individuel de l’assuré ne peut être réalisée dans le cadre du présent litige qui l’oppose à la caisse de compensation, la question de l’éventuelle obligation d’assujettissement de l’assuré à l’AVS pour les années 1977 à 2002 en application de l’art. 5 let. b et c de la convention bilatérale italo-suisse peut rester indécise. Le Tribunal fédéral n’a pas non plus à se prononcer sur la question d’une éventuelle responsabilité de l’employeur. Ce point ne pourrait être clarifié que devant le juge civil.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_743/2017 consultable ici

 

 

Arrêt de la CJUE C‑372/18 du 14.03.2019 – Revenus du patrimoine de résidents français affiliés au régime de sécurité sociale suisse ne peuvent pas être soumis à des contributions de sécurité sociale en France

Arrêt de la CJUE C‑372/18 du 14.03.2019

 

Arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne consultable ici et communiqué de presse disponible ici

 

Les revenus du patrimoine de résidents français affiliés au régime de sécurité sociale suisse ne peuvent pas être soumis à des contributions sociales visant à financer des prestations de sécurité sociale en France.

M. et Mme Raymond Dreyer sont des résidents fiscaux français affiliés au régime de sécurité sociale suisse, M. Dreyer ayant effectué sa carrière professionnelle en Suisse. En 2016, l’administration fiscale française a assujetti les époux Dreyer, au titre de revenus du patrimoine perçus en France au cours de l’année 2015, à des contributions et prélèvements affectés, notamment, à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Considérant que les prestations gérées par cet organisme et financées par les contributions et prélèvements en cause sont des prestations de sécurité sociale, les époux Dreyer ont contesté, devant la justice française, leur assujettissement à ces contributions et prélèvements, estimant que, puisqu’ils sont déjà affiliés au régime de sécurité sociale suisse, ils n’ont pas à contribuer au financement du régime de sécurité sociale français. En effet, le règlement de l’Union sur la coordination des systèmes de sécurité sociale 1 dispose que les personnes auxquelles il est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre, la Suisse étant considérée à cet égard comme un État membre.

Saisie du litige opposant les époux Dreyer à l’administration fiscale française, la Cour administrative d’appel de Nancy (France) a exprimé des doutes sur la nature des prestations financées par les contributions et prélèvements affectés à la CNSA. Elle demande donc à la Cour de justice si ces prestations, à savoir l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la prestation compensatoire du handicap (PCH), peuvent être considérées comme des prestations de sécurité sociale.

Dans son arrêt du 14.03.2019, la Cour rappelle qu’une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où, d’une part, elle est octroyée aux bénéficiaires en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels, sur la base d’une situation légalement définie (première condition), et où, d’autre part, elle se rapporte à l’un des risques visés par le règlement en cause (seconde condition).

La Cour rappelle également que la prise en compte des ressources du bénéficiaire aux seules fins du calcul du montant effectif des prestations sur la base de critères objectifs et légalement définis n’implique pas une appréciation individuelle des besoins personnels de ce bénéficiaire. Tel est le cas, selon la Cour, de l’APA et de la PCH, étant donné que la prise en compte des ressources du bénéficiaire ne concerne que les modalités de calcul de ces prestations, ces dernières devant être octroyées lorsque le demandeur remplit, indépendamment du niveau de ses ressources, les conditions qui ouvrent le droit aux prestations.

Dans ce contexte, la Cour précise que la nécessité d’évaluer, aux fins de l’octroi de l’APA et de la PCH, le degré de perte d’autonomie ou de handicap du demandeur n’implique pas non plus une appréciation individuelle des besoins personnels de ce demandeur. En effet, l’évaluation de la perte d’autonomie et du handicap est effectuée par un médecin ou un professionnel d’une équipe médico-sociale ou par une équipe pluridisciplinaire au regard de grilles, de listes et de référentiels prédéfinis, c’est à-dire à partir de critères objectifs et légalement définis qui, dès lors qu’ils sont remplis, ouvrent le droit à la prestation correspondante.

Enfin, la Cour considère que, dès lors qu’il résulte à la fois de son arrêt du 14.03.2019 et des constatations de la juridiction de renvoi que les deux conditions précitées sont remplies et que l’APA et la PCH sont des « prestations de sécurité sociale », il n’y a pas lieu de vérifier si ces deux prestations sont des « prestations spéciales en espèces à caractère non contributif » au sens du règlement, la Cour ayant déjà jugé que ces deux notions s’excluent mutuellement.

 

 

Communiqué de presse de la Cour de justice de l’Union européenne du 14.03.2019 disponible ici

Arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne C‑372/18 du 14.03.2019 consultable ici

Demande de décision préjudicielle présentée par la cour administrative d’appel de Nancy (France) le 07.06.2018 consultable ici

 

 

Stabilisation de l’AVS : réforme incontestée mais divergences quant au contenu

Stabilisation de l’AVS : réforme incontestée mais divergences quant au contenu

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 20.02.2019 consultable ici

 

Lors de sa séance du 20.02.2019, le Conseil fédéral a pris connaissance des résultats de la consultation sur le projet de stabilisation de l’AVS (AVS 21). Les participants reconnaissent la nécessité et l’urgence de réformer le 1er pilier, mais divergent sur les moyens d’y parvenir. Le Département fédéral de l’intérieur soumettra au Conseil fédéral un projet de message pour AVS 21 jusqu’à fin août 2019 au plus tard.

Les participants à la consultation soutiennent les grandes lignes de la réforme AVS 21 et s’accordent sur la nécessité de maintenir le niveau des prestations. Les avis divergent toutefois sur les moyens d’y parvenir. Une majorité des participants à la consultation s’exprime de manière favorable sur le relèvement de l’âge de référence de 64 à 65 ans pour les femmes. Cependant, à gauche de l’échiquier politique ainsi que pour les organisations représentant les intérêts des femmes, un tel relèvement est exclu tant que l’égalité salariale n’est pas atteinte.

Deux variantes de mesures de compensation pour les générations de femmes proches de la retraite ont été soumises à la consultation : un modèle à 400 millions d’une part, prévoyant des taux de réduction de la rente favorables en cas d’anticipation de la retraite, et un modèle à 800 millions d’autre part, comprenant en plus une adaptation de la formule des rentes pour les femmes qui poursuivent leur activité jusqu’à l’âge de 65 ans, permettant d’augmenter la rente vieillesse. Si la nécessité de prévoir des mesures de compensation au relèvement de l’âge de référence des femmes est largement reconnue, aucune des deux variantes n’est clairement plébiscitée dans la consultation.

 

Retraite flexible entre 62 et 70 ans

Les mesures visant à permettre une retraite flexible entre 62 ans et 70 ans et les incitations à travailler au-delà de 65 ans récoltent, de façon générale, des avis plutôt favorables. Des critiques quant à leur efficacité, à leur complexité ainsi qu’au fait qu’elles profiteraient surtout aux salaires moyens à hauts ont notamment été émises. Pour certaines associations faîtières de l’économie et organisations patronales, ces mesures ne sont pas prioritaires. La Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) et l’Union des villes suisses estiment que ces mesures incitatives sont positives mais nécessitent en parallèle des efforts pour intégrer ou maintenir les seniors sur le marché du travail ; un avis que partagent aussi certains cantons.

 

Financement additionnel

La nécessité d’un financement additionnel n’est pas contestée et l’utilisation de la TVA est, de façon générale, largement saluée par les participants à la consultation. Une majorité est favorable à un relèvement de la TVA, mais les avis divergent quant à son ampleur. Les partis bourgeois, les organisations de l’économie et les institutions de prévoyance notamment jugent l’augmentation de la TVA trop forte, alors que les partis de gauche et les syndicats seraient plutôt favorables à une combinaison de diverses sources de financement. Dans tous les cas, l’opinion selon laquelle l’ampleur du financement de l’AVS doit être réévaluée par le Conseil fédéral en cas d’aboutissement de la loi relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA) a été largement exprimée lors de la consultation.

 

Prochaines étapes

Le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de l’intérieur de lui soumettre une note de discussion aussi rapidement que possible après la votation du 19 mai 2019, mais au plus tard fin juin 2019. Sur cette base, il adoptera le message concernant AVS 21 d’ici fin août 2019. Le message tiendra compte tant des résultats de la consultation que de l’issue de la votation populaire sur la RFFA.

Dans le cadre de la RFFA, nombre de cantons prévoient de réduire les impôts des entreprises afin de rester attrayants. Les mesures fiscales de la Confédération et des cantons se traduiront à court terme par des pertes estimées à 2 milliards de francs par an. Comme compensation sociale, l’AVS recevra environ 2 milliards de francs supplémentaires par an.

Selon les dernières estimations, en cas d’acceptation de la RFFA, l’augmentation de la TVA dans le cadre de la réforme AVS 21 serait limitée à 0,7 point de pourcentage, à la place de 1,5 point. Cependant, même si le projet RFFA est accepté, la réforme de l’AVS reste nécessaire afin de stabiliser ses finances.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 20.02.2019 consultable ici

Résumé des résultats de la consultation (Rapport de consultation) disponible ici

 

 

Le Conseil fédéral recommande d’accepter le projet de réforme fiscale et de financement de l’AVS

Le Conseil fédéral recommande d’accepter le projet de réforme fiscale et de financement de l’AVS

 

Communiqué de presse du 18.02.2019 consultable ici

 

La votation populaire sur la loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA) aura lieu le 19.05.2019. Pour le Conseil fédéral, le projet offre une solution équilibrée à deux problèmes urgents. Lors de leur conférence de presse commune du 18.02.2019, le président de la Confédération, Ueli Maurer, et le conseiller fédéral Alain Berset ont présenté les arguments en faveur de ce projet, qui préserve les emplois et les recettes fiscales tout en renforçant l’AVS.

La prospérité de la Suisse repose sur deux piliers essentiels: une fiscalité des entreprises compétitive à l’échelle internationale et une prévoyance vieillesse fiable. Or des réformes doivent être menées rapidement dans ces deux domaines. La fiscalité des entreprises doit être revue pour maintenir l’attrait de la place économique suisse et répondre aux exigences internationales. Et l’AVS a besoin de ressources supplémentaires pour pouvoir payer des rentes de plus en plus nombreuses.

Le nouveau projet tient compte des critiques formulées à l’encontre de deux projets rejetés en 2017: les exigences des villes et des communes ont été prises en considération, et l’équilibre entre charges supplémentaires et allégements fiscaux a été amélioré. Le financement additionnel de l’AVS constitue une compensation sociale aux allégements fiscaux accordés aux entreprises.

 

Encouragement de l’innovation

Le nouveau système fiscal est plus équitable: à l’avenir, les entreprises seront toutes fondamentalement soumises aux mêmes règles d’imposition. Par rapport à aujourd’hui, les entreprises actives à l’échelle internationale qui bénéficient actuellement d’une imposition privilégiée verront, d’une manière générale, leur charge fiscale augmenter légèrement, tandis que les autres entreprises payeront globalement moins d’impôts. Cette réforme permet à la Suisse de préserver les emplois et les recettes fiscales et de continuer à figurer parmi les pays les plus attrayants pour les entreprises innovantes. En outre, le projet promeut la recherche et le développement, ce qui profitera aussi au pôle scientifique suisse. Il accroîtra la charge fiscale des actionnaires. Enfin, les règles applicables à l’imposition des dividendes et au remboursement de capital seront plus strictes qu’aujourd’hui.

 

Compensation entre échelons étatiques

La suppression pure et simple des actuels privilèges fiscaux accordés aux entreprises actives à l’échelle internationale réduirait l’attrait de la place économique suisse. C’est pourquoi de nombreux cantons prévoient d’abaisser leur impôt sur le bénéfice pour toutes les entreprises. La Confédération, qui tire profit de cantons attrayants sur le plan économique, relèvera la part des cantons aux recettes de l’impôt fédéral direct de 17% à 21,2%. Quant aux cantons, ils indemniseront les villes et les communes de manière appropriée pour les éventuelles répercussions des réformes cantonales.

 

Diminution des recettes estimée à 2 milliards de francs

À court terme, les mesures fiscales entraîneront une diminution des recettes estimée à 2 milliards de francs par année pour la Confédération, les cantons et les communes. Cette somme comprend les baisses d’impôts prévues par les cantons, lesquelles ne font cependant pas partie du projet de réforme fiscale et de financement de l’AVS. Comme le montre une étude de l’Administration fédérale des contributions concernant les effets dynamiques de la réforme sur l’évolution des recettes, à moyen et long termes, les recettes sont plus élevées en cas d’acceptation de la réforme qu’en cas de rejet.

 

2 milliards de plus pour l’AVS

Si le projet est accepté, l’AVS recevra quelque 2 milliards de plus par an à partir de 2020. Elle disposera ainsi rapidement des recettes supplémentaires dont elle a urgemment besoin pour garantir les rentes. La situation financière de l’AVS se dégrade à vue d’œil. Actuellement, les recettes courantes ne suffisent déjà plus à couvrir les dépenses. Cette situation s’aggravera encore avec le départ à la retraite des personnes nées durant les années à forte natalité, la génération dite des baby-boomers, et avec l’augmentation de l’espérance de vie.

 

Conséquences d’un rejet

Renoncer à abolir les privilèges fiscaux entraînerait une insécurité juridique pour les entreprises actives à l’échelle internationale. La Suisse devrait alors s’attendre à ce que d’autres pays prennent des mesures de rétorsion, qui nuiraient à notre économie. Sans mesures pour l’AVS, les problèmes financiers s’aggraveraient rapidement et devraient être résolus entièrement dans le cadre de la prochaine réforme de l’AVS.

La réforme constitue un bon compromis. Elle contribue à la bonne santé des finances publiques de la Confédération, des cantons et des communes, garantit des places de travail attrayantes et renforce l’AVS. L’ensemble de la population suisse en profite. C’est pourquoi le Conseil fédéral et le Parlement recommandent d’accepter le projet.

 

Projet de réforme AVS 21

Le Conseil fédéral prépare actuellement une importante réforme de l’AVS, intitulée AVS 21, dont l’objectif est de garantir l’équilibre financier de l’AVS et de préserver le niveau des rentes AVS. Si la RFFA est acceptée le 19.05.2019, le Conseil fédéral modifiera la réforme AVS 21 en conséquence. Cette réforme restera nécessaire même si la RFFA est acceptée, parce que celle-ci ne couvre qu’une partie des besoins de financement de l’AVS. Le Conseil fédéral prévoit de soumettre le projet AVS 21 au Parlement encore en 2019.

 

 

 

Communiqué de presse du 18.02.2019 consultable ici

Récapitulatif des mesures de la réforme fiscale et du financement de l’AVS disponible ici

Feuille d’information Réforme fiscale et financement de l’AVS (RFFA) consultable ici

Conséquences du projet RFFA sur la stabilisation de l’AVS (AVS 21) consultable ici

Questions et réponses concernant la RFFA consultables ici

 

 

9C_381/2018 (f) du 06.12.2018 – Cotisations AVS de chauffeurs de nationalité portugaise d’une entreprise suisse de transports nationaux et internationaux / Applicabilité de la LAVS – Règl. CE 1408/71

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_381/2018 (f) du 06.12.2018

 

Consultable ici

 

Cotisations AVS de chauffeurs de nationalité portugaise d’une entreprise suisse de transports nationaux et internationaux

Applicabilité de la LAVS – Règl. CE 1408/71

 

La société E.__ Sàrl (ci-après: la société), inscrite au Registre du commerce du canton de Vaud en février 2005, avait pour but les transports nationaux et internationaux en tout genre, l’affrètement, l’exploitation d’entrepôts, ainsi que le commerce de tout véhicule utilitaire et toute activité en relation avec le domaine des transports. A des périodes diverses, ses associés gérants étaient les époux C.__ et A.__, ainsi que leurs fils B.__ et D.__. La société a été affiliée en tant qu’employeur à la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS (ci-après: la caisse) avec effet au 01.07.2005.

Le 12.03.2008, le Service de l’emploi du canton de Vaud a informé la caisse qu’un contrôle effectué auprès de la société avait mis en évidence qu’elle n’avait pas prélevé de charges sociales en 2007 pour sept ressortissants portugais qu’elle avait employés comme chauffeurs.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont considéré que l’art. 14bis par. 1 du Règlement n° 1408/71 n’était pas applicable en l’espèce, puisque l’activité exercée en Suisse par les chauffeurs portugais concernés remplissait les critères d’une activité salariée. S’ajoutait à cela le fait que les recourants n’avaient pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante que lesdits chauffeurs avaient effectivement versé des cotisations sociales à titre d’indépendants ou de salariés au Portugal, ni même qu’ils étaient affiliés à un système de sécurité sociale européen.

Rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

La question de savoir si une personne est un travailleur ou un indépendant au sens des art. 13 ss du Règlement n° 1408/71 doit être résolue en fonction du droit national de l’Etat dans lequel l’activité respective a été exercée (ATF 139 V 297 consid. 2.3 p. 301 s.). Il n’existe pas de définitions conventionnelles autonomes du « travailleur salarié », « travailleur non salarié » ou de l' »activité salariée » et de l' »activité non salariée » dans le sens de notions indépendantes de droit communautaire, mais ce sont les définitions et notions du droit national correspondantes qui sont déterminantes (ATF 138 V 533 consid. 5.2 p. 541 s. avec les références aux arrêts pertinents de la CJCE [aujourd’hui, CJUE]).

Par conséquent, c’est à juste titre que la juridiction cantonale a qualifié les rémunérations perçues par les chauffeurs portugais en Suisse pour l’activité exercée à la demande de E.__ Sàrl à l’aune des dispositions de la LAVS suisse.

 

Aux termes de l’art. 14 par. 2 du Règlement n° 1408/71, « la personne qui exerce normalement une activité salariée sur le territoire de deux ou plusieurs Etats membres est soumise à la législation déterminée comme suit:

  1. a) la personne qui fait partie du personnel roulant ou naviguant d’une entreprise effectuant, pour le compte d’autrui ou pour son propre compte, des transports internationaux de passagers ou de marchandises par voies ferroviaire, routière, aérienne ou batelière et ayant son siège sur le territoire d’un Etat membre est soumise à la législation de ce dernier Etat. Toutefois:
  2. i) (…)
  3. ii) la personne occupée de manière prépondérante sur le territoire de l’Etat membre où elle réside est soumise à la législation de cet Etat, même si l’entreprise qui l’occupe n’a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire; (…) « .

En l’espèce, selon les contrats passés entre la société et les chauffeurs portugais sur lesquels s’est fondée la juridiction cantonale (intitulés « Prestations de service » ou « Contrat de travail »), l’activité exercée consistait « en la conduite de camions poids lourds exclusivement pour des transports internationaux ». Les personnes concernées faisaient dès lors partie du personnel roulant d’une entreprise effectuant des transports internationaux de marchandises qui avait son siège en Suisse, tandis que leur activité effectuée pour le compte de celle-ci relevait d’une activité salariée (selon le droit suisse). En vertu de l’art. 14 par. 2 let. a du Règlement 1408/71, elles étaient dès lors soumises à la législation de l’Etat dans lequel l’entreprise qui les employait avait son siège, soit la Suisse.

L’application de l’exception de l’art. 14 par. 2 let. a sous ii du Règlement n° 1408/71 aurait supposé que les chauffeurs portugais en cause fussent occupés de manière prépondérante sur le territoire portugais (lieu de leur résidence selon les allégations des recourants) par E.__ Sàrl. Ladite exception vise en effet l’occupation prépondérante du personnel roulant sur le territoire de l’Etat de résidence effectuée pour le compte de l’entreprise de transports internationaux employant ledit personnel (cf. HEINZ-DIETRICH STEINMEYER, in Europäisches Sozialrecht, 4e éd. 2005, n° 24 s. ad art. 14 Règlement 1408/71, p. 191), une autre activité exercée pour un employeur différent ou à titre indépendant n’étant pas déterminante. Selon la conception du Règlement n° 1408/71, ce sont les rapports de travail (« Beschäftigungsverhältnis ») qui sont en principe déterminants pour le rattachement à la législation nationale, la résidence ne constituant qu’un point de rattachement exceptionnel (STEINMEYER, op. cit., n° 25 ad art. 14 Règlement 1408/71, p. 191 s.).

Les recourants n’ont jamais prétendu que l’activité exercée pour le compte de E.__ Sàrl par les personnes concernées l’avait été de manière prépondérante au Portugal. Ils ont affirmé que les chauffeurs étaient occupés de manière prépondérante sur le territoire de l’Etat sur lequel ils résidaient en raison d’une activité indépendante exercée sur le sol portugais, sans se prévaloir des rapports de travail liant la société aux personnes concernées. Cette activité indépendante – à supposer qu’elle fût avérée – n’est pas déterminante pour justifier l’exception de l’art. 14 par. 2 let. a sous ii du Règlement n° 1408/71. Il ne suffit pas non plus, à cet égard, d’alléguer « des missions ponctuelles en Suisse pour une durée inférieure à trois mois », alors que le contrôle effectué par la caisse de compensation avait mis en évidence une activité très régulière pour le compte de E.__ Sàrl sur des périodes excédant les prétendus trois mois. Est par conséquent applicable le principe de la soumission à la législation de l’Etat dans lequel se trouve le siège de l’entreprise, soit la législation suisse.

 

Le TF rejette le recours de A._, B._, C._ et D._.

 

 

Arrêt 9C_381/2018 consultable ici

 

 

8C_310/2018 (f) du 18.12.2018 – Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité – 16 LPGA / Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT / Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité – 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_310/2018 (f) du 18.12.2018

 

Consultable ici

 

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité / 16 LPGA

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité / 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

 

Assuré, né en 1965, travaillant en qualité de peintre en bâtiment, a été victime d’une entorse de la cheville droite à la suite d’un accident survenu sur un chantier le 17.10.2014. Dans la déclaration de sinistre, l’employeur a précisé que le salaire de base contractuel (brut) de l’intéressé s’élevait à 26 fr. par heure, montant qui ne comprenait ni les indemnités pour vacances et jours fériés, ni d’autres suppléments éventuels (13ème salaire, gratification, etc.). Quant au taux d’occupation, il était irrégulier et s’élevait à quatre heures par semaine, ce qui correspondait à 10% d’un horaire de travail à plein temps (40 heures).

Le 06.11.2014, l’employeur a informé l’assurance-accidents que l’indemnité pour les jours fériés et le 13ème salaire s’élevait à 8,33%. Le 11.11.2014, l’assuré a informé l’assureur que le taux d’occupation et l’horaire de travail annoncés par l’employeur dans la déclaration d’accident étaient erronés. Il a joint à son envoi un décompte de salaire relatif au mois d’octobre 2014, lequel faisait état d’un revenu brut de 2’146 fr., montant qui correspondait à septante-six heures de travail à 26 fr. et dix indemnités forfaitaires à 17 fr. Quant au droit aux vacances brut, il s’élevait à 10,64% de 1’976 fr. Le 27.04.2015 l’assuré a fait parvenir à l’assureur LAA d’autres décomptes de salaire pour 2013 et 2014.

Par jugement du 19.12.2016, le Tribunal des Prud’hommes a condamné l’employeur à verser à l’assuré des arriérés de salaire pour la période du 03.10.2013 au 17.10.2014, soit un montant brut de 47’941 fr. 55 (436,80 h x 24 fr. 65 du 3 octobre au 31 décembre 2013 et 1’392,30 h x 26 fr. 70 du 1er janvier au 17 octobre 2014). S’y ajoutaient, pour la même période, le droit à cinq semaines de vacances annuelles (10,64% de 47’941 fr. 55), le droit à un treizième salaire (8,33% de 47’941 fr. 55), ainsi que des indemnités forfaitaires (234,5 jours à 17 fr.). Le tribunal a considéré que l’assuré n’était pas parvenu à prouver qu’il effectuait un travail à plein temps, son temps de travail devait être fixé à 39 heures hebdomadaires ou 7,8 heures par jour, ce qui correspondait à la durée minimale de travail qui pouvait être fixée par une entreprise au regard de la convention collective.

Par décision du 06.03.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a nié le droit de l’assuré à une indemnité pour atteinte à l’intégrité, ainsi qu’à une rente d’invalidité au motif que le taux d’incapacité de gain (8,4%) était insuffisant pour ouvrir droit à une telle prestation.

L’assureur LAA a déterminé le revenu sans invalidité selon la formule suivante : (26,7 + [8,33% x 26,7]) x 40 (heures) x 52 (semaines) : 12 (mois) = 5’013,51. Il a ensuite porté ce montant à 5’068 fr. 66 pour tenir compte de l’évolution nominale des salaires (1,1%). En ce qui concerne le montant du salaire horaire, l’assureur s’est référé à la classe salariale B de la Convention collective de travail du second œuvre romand 2011 (ci-après: CCT-SOR).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/178/2018 – consultable ici)

La cour cantonale a, dans un premier temps, considéré que le salaire horaire brut de 26 fr. payé par l’employeur en 2013 et en 2014, ne tenait pas compte des sommes nettes (non déclarées) que l’assuré indiquait avoir déjà reçues en parallèle et que le nombre d’heures de travail déclarées mensuellement ne correspondait pratiquement jamais à un 10%. En ce qui concerne le salaire horaire, la cour cantonale a considéré que l’assuré appartenait à la classe salariale B au plus tard à partir du 01.01.2014, ce qui correspondait, pour le canton de Genève, à un salaire horaire minimum de 26 fr. 70, montant augmenté de 30 centimes pour les travailleurs des classes CE, A, B et C à partir du 01.03.2016. La cour cantonale a tenu compte d’un salaire horaire de 27 fr., d’un treizième salaire (8,33%), d’une indemnité pour cinq semaines de vacances (10,64%), d’une indemnité pour neuf jours fériés (3,96%) et elle a fixé à 62’416 fr. le salaire annuel en 2016 selon la formule : (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 40 (heures) x (52 – 5 [semaines]).

Dans un second temps, la cour cantonale a procédé à une parallélisation du revenu de 62’416 fr. et du salaire statistique usuel de la branche, soit 69’982 fr. Constatant que ce revenu usuel de la branche dépassait de plus 5% le salaire qu’aurait réalisé l’assuré dans son dernier emploi en 2016 (62’416 fr.), les juges cantonaux ont parallélisé les revenus à comparer à concurrence de la part qui excédait le taux minimal déterminant de 5%, ce qui donne en l’occurrence un revenu sans invalidité de 66’483 fr. 20 (69’982 fr. 30 – [5% x 69’982 fr. 30]).

Par jugement du 06.03.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision et reconnaissant le droit à une rente d’invalidité de 16% à partir du 01.01.2017.

 

TF

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité

Dans l’arrêt 8C_520/2016 du 14 août 2017 consid. 4.3.2, le taux de 3,58% correspondait bien à 9 jours fériés par année mais, à la différence de la présente affaire où l’assuré avait droit à 5 semaines de vacances, soit 25 jours, l’assuré bénéficiait de 7,3 semaines de vacances, soit 36,5 jours par année. Or, compte tenu de 5 semaines de vacances et sur la base de la méthode de calcul de la cour cantonale, 9 jours fériés par année correspondent bel et bien à un taux de 3,96%. Cela étant, le calcul du revenu sans invalidité doit néanmoins être rectifié afin de ne pas tenir compte deux fois des jours fériés et être porté à 60’116 fr. au lieu de 62’416 fr., selon la formule: (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 8 (heures) x 226 jours ouvrés (52 [semaines] x 5 [jours ouvrés] – 25 [jours de vacances] – 9 [jours fériés]).

 

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

La jurisprudence n’exige pas que le revenu sans invalidité dépasse le minimum CN/CCT. Il suffit qu’il ne soit pas inférieur au salaire moyen tel que l’entend la jurisprudence en matière de parallélisation des revenus à comparer (cf. arrêts 8C_721/2017 du 26 septembre 2018 consid. 3.4.2; 8C_537/2016, déjà cité, consid. 5).

En l’espèce, le revenu sans invalidité de l’assuré (60’116 fr.) correspondant au salaire minimum selon la CCT-SOR, il n’y a pas lieu de paralléliser les revenus à comparer par une majoration du revenu sans invalidité. Il n’est pas décisif, au regard de la jurisprudence, que les salaires prévus dans une CCT peuvent être situés plus ou moins en-dessous des salaires moyens de la branche concernée.

 

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité

Le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s’ils représentent un élément important de la rémunération du travail (art. 5 al. 2 LAVS). Selon l’art. 9 RAVS, les frais généraux sont les dépenses résultant pour le salarié de l’exécution de ses travaux ; le dédommagement pour frais encourus n’est pas compris dans le salaire déterminant (al. 1) ; ne font pas partie des frais généraux les indemnités accordées régulièrement pour le déplacement du domicile au lieu de travail habituel et pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel ; ces indemnités font en principe partie du salaire déterminant (al. 2).

Selon l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR, dans sa teneur au 01.01.2017, les déplacements de l’atelier aux chantiers occasionnant des frais supplémentaires pour le travailleur donnent droit à différentes indemnités. Pour le canton de Genève uniquement, l’art. 23 al. 2 CCT-SOR dispose qu’une indemnité forfaitaire par jour de travail de 17 fr. 50, respectivement 18 fr. dès le 01.01.2018, de transport professionnel, de repas pris à l’extérieur et d’outillage est due à tous les travailleurs ; elle est destinée à couvrir totalement ou partiellement les frais subis par les travailleurs.

Il ressort de l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR que les indemnités prévues servent à couvrir les frais supplémentaires subis par le travailleur en raison des déplacements de l’atelier aux chantiers et des repas pris en dehors du domicile. Elles ne constituent donc pas des indemnités allouées régulièrement au salarié pour ses déplacements de son domicile au lieu de son travail habituel, ni des indemnités pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel. C’est pourquoi elles représentent incontestablement des indemnités pour frais encourus non comprises dans le salaire déterminant (art. 9 RAVS). Le fait que dans le canton de Genève, le remboursement de ces frais supplémentaires est réglé de manière forfaitaire à l’art. 23 al. 2 CCT-SOR ne change rien. Sur ce point, les faits de la présente affaire sont ainsi comparables à la situation jugée dans l’arrêt 8C_964/2012, quoi qu’en pense l’assuré.

Il n’y a pas lieu d’ajouter au revenu sans invalidité, déterminant pour la comparaison des revenus, l’indemnité forfaitaire allouée en vertu de l’art. 23 ch. 2 CCT-SOR.

 

En conséquence, le TF retient, au titre du revenu sans invalidité, un salaire de 60’116 fr. Le revenu d’invalide de 55’704 fr. n’étant pas contesté, on obtient un taux d’invalidité de 7%, soit un taux insuffisant pour ouvrir droit à une rente.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents et annule le jugement cantonal.

 

 

Arrêt 8C_310/2018 consultable ici

 

 

9C_641/2017 (d) du 16.10.2018 – Cotisation AVS – Reconsidération, revenu de membres d’une autorité, frais généraux, qualification des contributions versées à un parti / 53 al. 2 LPGA – 7 let. i RAVS – 9 RAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_641/2017 (d) du 16.10.2018

 

Arrêt consultable ici

Jurisprudence du Tribunal fédéral relative au droit des cotisations AVS – Sélection de l’OFAS – no 67 disponible ici

 

Reconsidération, revenu de membres d’une autorité, frais généraux, qualification des contributions versées à un parti / 53 al. 2 LPGA – 7 let. i RAVS – 9 RAVS

 

Seuls les frais généraux effectifs sont déductibles (consid. 8.1 – 8.3) ; les contributions versées à un parti politique (impôts sur les partis) n’en font pas partie (consid. 9.1).

 

À la demande d’un parlementaire cantonal, la caisse de compensation (recourante) a, pour la période de cotisations 2010 – 2013, requalifié en salaire déterminant une partie des revenus qui ont été traités comme des indemnité pour frais généraux, en déduisant toutefois les contributions versées au parti, et a réclamé les cotisations subséquentes. Le Tribunal cantonal d’assurances sociales a considéré que cela était contraire au principe de la non-rétroactivité, ce que la recourante a contesté devant le Tribunal fédéral (consid. A).

La révision des décisions formellement passées en force est admise à la lumière de l’art. 53, al. 2, LPGA (reconsidération : erreur manifeste, rectification d’une importance notable), car ces décisions sont con-traires à la jurisprudence. En effet, une ville est en principe redevable de cotisations sur les jetons de présence des membres du conseil municipal (arrêt H 274/03). En outre, l’employeur doit au moins dé-montrer de manière crédible que les frais généraux allégués ont bien été engagés et, s’il n’est pas possible de prouver les montants dans des cas individuels, les frais généraux doivent être estimés (notamment RCC 1983 p. 310 consid. 2) (consid. 5.1, 8.1 – 8.3).

Étant donné que les contributions aux partis politiques (impôts sur les partis) sont volontaires pour l’exercice du mandat resp. pas absolument nécessaires, que leur montant varie et qu’elles ne sont pas reconnues en droit fiscal comme frais professionnels ou frais d’acquisition du revenu (ce dernier élément n’est cependant, en principe, pas liant), elles ne doivent pas être considérées comme des frais généraux déductibles, contrairement à la position de la recourante (consid. 9.1).

Le Tribunal fédéral considère que la décision sur opposition de la recourante est correcte, à l’exception de la qualification des contributions versées au parti. La recourante devra attirer l’attention du canton de Zurich sur la reformatio in peius et sur la possibilité de retirer le recours (consid. 9.2).

 

 

Arrêt 9C_641/2017 consultable ici

 

 

Assurances sociales : ce qui va changer en 2019

Assurances sociales : ce qui va changer en 2019

 

Article de Mélanie Sauvain paru in CHSS n° 4 consultable ici

 

Plusieurs nouvelles dispositions entreront en vigueur en 2019 dans les assurances sociales suisses. Le présent article en donne un aperçu, ainsi que des principaux chantiers en cours. Il est basé sur les informations disponibles mi-novembre 2018.

 

Changements en 2019

1er pilier

Adaptation des rentes AVS/AI et des PC : les rentes AVS et AI seront adaptées à l’évolution des prix et augmenteront en 2019. La rente minimale passera de 1175 à 1185 francs par mois ; la rente maximale (durée complète de cotisation) de 2350 à 2370 francs par mois. Le montant des prestations complémentaires, destinées à couvrir les besoins vitaux, augmentera également, de 19 290 à 19 450 francs par an pour les personnes seules, de 28 935 à 29 175 francs pour les couples et de 10 080 à 10 170 francs pour les orphelins. Les allocations pour impotent seront également adaptées. Côté cotisations, le montant de la contribution minimale AVS/AI/APG pour les indépendants et les personnes sans activité lucrative passera de 478 à 482 francs par an. Celui de la cotisation minimale dans l’AVS/AI facultative, de 914 à 922 francs. La dernière augmentation des rentes AVS/AI avait eu lieu en 2015. En principe, le Conseil fédéral examine tous les deux ans la nécessité de les adapter.

Contribution fédérale aux PC : le mois de référence pour calculer la part fédérale aux coûts des prestations complémentaires (PC) sera modifié dès le 1er janvier 2019. Le mois de mai de l’année en cours, et non plus le mois de décembre de l’année précédente, sera pris comme référence pour calculer le rapport entre la couverture du minimum vital au sens strict et les frais supplémentaires imputables à un séjour en home. Cette modification permettra de tenir compte, pour l’année où les prestations sont dues, des éventuels changements apportés par les cantons à leur législation et qui influencent le calcul (par exemple une hausse des taxes journalières dans les institutions). La part fédérale de la Confédération en 2018 sera encore fixée selon le droit en vigueur.

Fonds de compensation AVS/AI/APG : dès le 1er janvier 2019, les fonds de compensation de l’AVS, de l’AI et du régime des APG seront administrés par un seul établissement de droit public sous la désignation « compenswiss ». Il s’agit de la 2e étape de la mise en vigueur de la nouvelle loi sur les fonds de compensation.

Prévoyance professionnelle

Taux d’intérêt minimal : le taux d’intérêt minimal dans la prévoyance professionnelle (PP) obligatoire reste fixé à 1 % en 2019. Le Conseil fédéral n’a pas suivi la Commission fédérale LPP qui lui recommandait de l’abaisser à 0,75 %. Il a en revanche utilisé, comme la commission, un nouveau mode de calcul pour fixer la rémunération minimale des avoirs de vieillesse relevant du régime obligatoire de la PP. La nouvelle formule repose, pour l’essentiel, sur le même principe que la précédente, mais tient davantage compte de l’évolution du moment. Désormais, le taux actuel des obligations de la Confédération à dix ans servira de base, au lieu de la moyenne à long terme de ces obligations à sept ans. En outre, l’évolution des autres possibilités de placement – que constituent les actions, les obligations et l’immobilier – sera un peu mieux prise en compte. Cette formule adaptée affichait fin septembre 2018 un taux de 1,03 %. Le taux d’intérêt minimal ne concerne que les avoirs relevant du domaine obligatoire du 2e pilier. Pour le reste, les instituts de prévoyance sont libres de fixer une autre rémunération. Le taux de 1 %, en vigueur depuis 2017, est le plus bas de l’histoire de la prévoyance professionnelle suisse.

Adaptation des montants limites : dès 2019, la déduction de coordination dans le régime obligatoire de la prévoyance professionnelle sera relevée de 24 675 à 24 885 francs ; le seuil d’entrée de 21 150 à 21 330 francs. Dans le cadre de la prévoyance individuelle liée (pilier 3a), la déduction fiscale maximale autorisée sera augmentée. Elle passera à 6826 francs (contre 6768 aujourd’hui) pour les personnes possédant un 2e pilier et à 34 128 francs (contre 33 840) pour celles qui n’en ont pas.

Cotisation des personnes au chômage : le taux de cotisation LPP pour les chômeurs passera de 1,5 à 0,25 % dès le 1er janvier 2019. La diminution des sinistres ces dernières années et la solidité du taux de couverture permettent de réduire la cotisation sur le salaire journalier coordonné des personnes au chômage. Cette modification de l’ordonnance sur la prévoyance professionnelle obligatoire des chômeurs permet de décharger le fonds de l’assurance-chômage et les concernés de quelque 20 millions de francs par an. Les chômeurs assurés sont couverts contre les risques de décès et d’invalidité par l’intermédiaire de la Fondation institution supplétive LPP.

Adaptation des rentes de 2015 : les rentes de survivants et d’invalidité de la prévoyance professionnelle obligatoire (LPP) ayant pris naissance en 2015 seront adaptées pour la première fois à l’évolution des prix le 1er janvier 2019. Le taux d’augmentation est de 1,5 %. Les rentes ayant commencé à être versées avant 2015 ne sont pas modifiées.

 

Assurance-maladie

Hausse des primes maladie : en 2019, la prime moyenne de l’assurance obligatoire des soins augmentera de 1,2 %. Si les primes des plus de 25 ans et des enfants augmentent en moyenne de 2,4 %, celles des jeunes adultes diminueront, de 15,6 % en moyenne. Cette baisse fait suite à une décision du Parlement qui a accepté en 2016 d’alléger de 50 % la compensation des risques pour les 19-25 ans. Cet allégement est financé par une hausse de la compensation des risques chez les plus de 25 ans. Il faut noter que pour la première fois, le calcul de la hausse moyenne annuelle ne se base pas sur la prime standard, soit la prime valable pour les adultes avec une franchise de 300 francs et la couverture accidents. Celle-ci ne représente en effet que quelque 20 % des primes effectives. Pour son calcul, l’OFSP utilise désormais la prime moyenne, soit celle qui prend en compte toutes les primes versées en Suisse, peu importe l’âge, la franchise ou le modèle de prime choisis.

Maîtrise des coûts de la santé : diverses mesures pour freiner la hausse des coûts de la santé ont été décidées ou sont en cours d’élaboration. Parmi elles figurent la baisse du prix de centaines de médicaments, préparations originales ou génériques, ainsi que d’autres produits remboursés par l’AOS, comme les bandelettes de test pour la glycémie. Ces baisses des prix interviendront ou sont intervenues dès décembre 2018. Dans le même but, un certain nombre de prestations stationnaires vont de leur côté être converties en prestations ambulatoires dès le 1er janvier 2019. Six groupes d’intervention ne seront pris en charge par l’assurance obligatoire que s’ils sont réalisés en ambulatoire. Sont concernées les opérations unilatérales des veines variqueuses des jambes, les interventions pour hémorroïdes, les opérations unilatérales de hernies inguinales, les interventions au niveau du col utérin ou de l’utérus, les arthroscopies du genou (dont les opérations du ménisque), ainsi que les opérations sur des amygdales et des végétations adénoïdes. Le potentiel de transferts du stationnaire vers l’ambulatoire est estimé à environ 33 000 cas par année, avec des économies pour les cantons de quelque 90 millions de francs.

Accès aux produits thérapeutiques : la loi révisée sur les produits thérapeutiques entre en vigueur le 1er janvier 2019. Elle prévoit notamment un assouplissement des conditions de remise des médicaments en vue de simplifier l’automédication. Les compétences des pharmaciens seront davantage mises à profit, puisqu’ils pourront remettre plus facilement certains médicaments disponibles sans ordonnance, mais également d’autres soumis jusqu’ici à une ordonnance (par exemple, des antihistaminiques contre le rhume des foins). Les procédures d’autorisation de mise sur le marché seront en outre simplifiées, en particulier pour les médicaments qui ont déjà reçu une homologation de pays appliquant des procédures analogues à la Suisse. Une autorisation simplifiée sera aussi appliquée aux produits relevant de la médecine complémentaire et la phytothérapie. La nouvelle loi contient aussi des dispositions pour améliorer la transparence et la surveillance du marché. Les exigences en matière de pharmacovigilance, à savoir le monitorage des effets indésirables des médicaments, seront renforcées. Cela permettra d’avoir plus d’informations sur les risques probables ou déjà identifiés des produits thérapeutiques.

Médicaments pédiatriques : le développement de médicaments destinés aux enfants sera encouragé. Les fabricants bénéficieront à l’avenir d’une protection renforcée contre les imitations pendant 10 ans dans le cadre de la loi révisée sur les produits thérapeutiques. D’autres incitations pour développer des médicaments spécialement pour les enfants figureront de leur côté dans la loi révisée sur les brevets et son ordonnance qui entrent également en vigueur le 1er janvier 2019. Aujourd’hui, faute de médicaments mis au point spécifiquement pour les enfants, les pédiatres prescrivent souvent des produits pour lesquels aucun essai clinique n’a été réalisé et qui n’ont pas été autorisés pour ce groupe de la population. Désormais, les fabricants qui réalisent des études pédiatriques sur leurs médicaments et démontrent les possibilités d’utilisation chez l’enfant obtiennent une prolongation de six mois de la protection de leurs brevets. Cette prolongation dite pédiatrique a pour but de compenser en partie les coûts supplémentaires de recherche et de développement.

Moratoire prolongé : en attendant un nouveau système de régulation, l’actuel moratoire sur l’ouverture de cabinets médicaux sera prolongé de deux ans supplémentaires, jusqu’en juin 2021. Cette prorogation doit éviter une lacune dans la limitation des admissions de nouveaux médecins à la charge de l’assurance-maladie de base, et surtout empêcher une augmentation massive du nombre de praticiens sur le marché. Le moratoire avait été mis en place de 2001 à 2011. Mais il avait dû être réinstauré en 2013, sa levée ayant entraîné un afflux de nouveaux médecins et une hausse des coûts de la santé. Le Parlement débat actuellement d’une révision partielle de la LAMal pour réguler l’admission des fournisseurs de prestations, censée remplacer le moratoire. Le projet prévoit notamment de transférer du Conseil fédéral aux cantons la compétence de fixer le nombre maximal de médecins par spécialité.

 

Politique sociale et de la santé

Lutte contre la pauvreté : l’engagement de la Confédération pour prévenir et lutter contre la pauvreté se poursuivra à l’issue du Programme national idoine arrivé à échéance le 31 décembre 2018. La Confédération, les cantons, les villes, les communes et des organisations de la société civile continueront à mener des activités communes jusqu’en 2024 dans le cadre de la Plateforme nationale contre la pauvreté (voir dossier de CHSS 4/2018, pp. 7-40).

Don d’organes : le plan d’action « Plus d’organes pour des transplantations » a été prolongé jusqu’en 2021. Débuté en 2013, il visait à accroître le nombre de donneurs d’organes, concrètement de 13,7 personnes par million d’habitants en 2013 à 20 donneurs par million d’habitants fin 2018. Cet objectif chiffré n’a pas été atteint, mais les effets positifs des mesures prises dans le cadre de ce plan sont bien visibles puisque, depuis son lancement, il y a chaque année en moyenne davantage de donneurs que l’année précédente, avec un pic en 2017. Des améliorations ont en outre été apportées dans des domaines comme la formation du personnel médical, la gestion de la qualité ou les ressources des hôpitaux.

 

Principaux chantiers 2019

Stabilisation de l’AVS

Une nouvelle réforme de l’AVS (AVS 21) a été mise en consultation courant 2018 qui prévoit notamment une flexibilisation de la retraite, une hausse de l’âge de la retraite des femmes avec des compensations, ainsi qu’un financement additionnel pour l’AVS. Le Conseil fédéral devrait transmettre son message sur le sujet dans la 2e moitié de 2019. Pour ce faire, il tiendra compte du sort réservé à la Loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA), qui sera soumise en votation le 19 mai 2019 si le référendum aboutit. Cette loi prévoit que pour chaque franc perdu en recettes fiscales à cause de la nouvelle imposition des entreprises, un franc serait versé à l’AVS.

 

Développement continu de l’AI

Le projet Développement continu de l’AI devrait être traité par le Parlement durant l’année 2019. La révision prévoit une série de mesures destinées aux trois groupes-cibles : enfants, jeunes et personnes atteintes dans leur santé psychique. L’accent est notamment mis sur la formation professionnelle et les mesures de réadaptation. Le projet vise aussi à améliorer la coordination entre les acteurs (offices AI, médecins, employeurs, etc.) et le système de calcul des rentes AI.

 

Franchises dans la LAMal

La question des franchises dans l’assurance obligatoire des soins occupera le Parlement dans le cadre de plusieurs débats distincts. Un projet transmis par le Conseil fédéral au Parlement prévoit par exemple d’adapter le montant des franchises à l’évolution des coûts : concrètement, toutes les franchises des assurés adultes augmenteraient de 50 francs dès que les coûts de la santé dépasseraient un certain seuil. Les parlementaires devront aussi dire s’ils souhaitent obliger les assurés à conserver la même franchise à option durant trois ans afin de les empêcher d’en changer en cas de souci de santé. Une initiative parlementaire en ce sens a été acceptée par les commissions des deux Chambres. Le Conseil fédéral recommande son rejet. Enfin, une motion en cours de discussion prévoit de relever la franchise minimale de 300 à 500 francs.

 

Réglementation du cannabis

Un projet de révision de la loi sur les stupéfiants devrait être mis en consultation d’ici à l’été 2019 pour faciliter l’accès au cannabis médical. En Suisse, près de 3000 personnes ont reçu un traitement à base de cannabis en 2017. Ce produit permet de soulager les douleurs – liées à l’âge, à une maladie dégénérative ou à un cancer – là où d’autres traitements ont échoué. L’accès aux thérapies à base de cannabis est toutefois aujourd’hui compliqué, notamment en raison des autorisations exceptionnelles nécessaires. La nouvelle législation devrait prévoir une levée de l’interdiction de circulation du cannabis médical et régler la question du remboursement de ces thérapies. La question de légaliser ou non la consommation du cannabis à des fins récréatives reste de son côté complètement ouverte. Dans le cadre de ce débat, il est prévu d’autoriser des essais pilotes – limités dans le temps, à certains lieux et en nombre de participants – afin de connaître les effets d’autres modèles de réglementation sur la consommation et sur le marché noir. Le message sur l’adaptation de la loi sur les stupéfiants en ce sens devrait être transmis au Parlement en 2019.

 

Article de Mélanie Sauvain paru in CHSS n° 4 consultable ici

 

 

Uber & Co : Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » – Avis du Conseil fédéral

Uber & Co : Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » – Avis du Conseil fédéral

 

Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » consultable ici

Avis du Conseil fédéral du 21.11.2018 consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé d’adapter les ordonnances pertinentes du droit des assurances sociales afin que les déclarations de parties concordantes soient prises en compte dans la qualification d’une activité lucrative comme activité salariée ou comme activité indépendante.

 

Développement

Les autorités d’exécution du domaine des assurances sociales qualifient souvent les prestataires de services de salariés, contre leur gré. Les actifs travaillant sur des plateformes numériques aussi bien que les prestataires de l’économie traditionnelle tels que les chauffeurs de taxi ou les psychologues sont souvent rangés dans ce cadre juridique contraignant.

L’absurde, dans cette situation, c’est que cette pratique conduit les personnes concernées à bénéficier d’une plus mauvaise protection sociale en Suisse qu’à l’étranger. Plusieurs entreprises ne proposent pas de formations continues ou d’assurances contre certains risques sociaux en Suisse parce que le risque est trop grand au regard du droit des assurances sociales, et donc au regard du droit du travail.

Je charge donc le Conseil fédéral de prendre les dispositions nécessaires, par voie de modification d’ordonnances, afin que les institutions d’assurances sociales prennent dorénavant en compte, outre les critères actuels (intégration organisationnelle et risque entrepreneurial), le critère consistant à déterminer s’il existe une concordance de vues entre les parties sur la nature indépendante de l’activité. Comme les autres critères continueraient de s’appliquer, la volonté des parties ne serait déterminante que dans les cas limites.

Dans son rapport « Conséquences de la numérisation sur l’emploi et les conditions de travail : risques et opportunités » du 8 novembre 2017 (p. 65), le Conseil fédéral a déjà présenté les grandes lignes de cette mesure et souligné qu’elle mérite d’être examinée.

Une telle mesure améliorerait la sécurité du droit, renforcerait l’autonomie des parties et augmenterait en définitive la protection des personnes concernées.

 

Avis du Conseil fédéral du 21.11.2018

Le 8 novembre 2017, le Conseil fédéral a adopté le rapport « Conséquences de la numérisation sur l’emploi et les conditions de travail : opportunités et risques » en réponse aux postulats Reynard (15.3854 « Automatisation. Risques et opportunités ») et Derder (17.3222 « Economie numérique. Identifier les emplois de demain et la manière de stimuler leur émergence en Suisse »), et il a chargé le DFI, au vu des progrès de la numérisation, d’examiner conjointement avec le DEFR, le DFJP et le DFF la nécessité ainsi que les avantages et les inconvénients d’un assouplissement dans le domaine des assurances sociales, et de présenter dans un rapport des solutions possibles d’ici fin 2019. Ce rapport montrera s’il y a lieu de développer encore le cadre juridique et, le cas échéant, de quelle manière. Il s’agirait alors de conserver les points forts de la pratique actuelle de qualification en tant qu’activité lucrative indépendante ou salariée, tout en améliorant les conditions générales permettant l’apparition de modèles commerciaux innovants. Dans le même temps, il faudra examiner les moyens d’empêcher qu’une protection sociale insuffisante des personnes employées ne se traduise par des risques de précarisation et de transfert des charges sur la collectivité.

Dans le cadre des options à examiner, le rapport étudiera diverses propositions, par exemple la possibilité de laisser, à certaines conditions, le choix de la qualification juridique de l’activité à la personne qui l’exerce, ou de tenir compte de la déclaration commune des parties dans la qualification de l’activité lucrative en tant qu’indépendante ou salariée. Par ailleurs, en raison de l’adoption du postulat du groupe libéral-radical (17.4087 « Société numérique. Etudier la création d’un nouveau statut de travailleur ») par le Conseil national le 19 septembre 2018, il s’agira d’examiner aussi s’il est nécessaire de créer un nouveau statut d’indépendant pour les « travailleurs de plateforme », en en exposant les avantages et les inconvénients.

L’examen des options et l’élaboration du rapport sont en cours. Seule une analyse approfondie des besoins des intéressés ainsi que du cadre juridique montrera s’il y a lieu de prendre des mesures et, si oui, lesquelles. Au vu des discussions en cours, il n’est pour le moment pas judicieux de demander au Conseil fédéral d’adopter une réglementation spécifique.

 

Proposition du Conseil fédéral du 21.11.2018

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » consultable ici