Archives de catégorie : Assurance-accidents LAA

8C_499/2014 (f) du 12.08.2015 – Rente d’invalidité LAA / Accidents successifs – Mesures de reclassement AI interrompu pour des accidents – fixation du revenu d’invalide – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_499/2014 (f) du 12.08.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1QFzvri

 

Rente d’invalidité LAA

Accidents successifs – Mesures de reclassement AI interrompu pour des accidents – fixation du revenu d’invalide / 16 LPGA

Revenu d’invalide selon ESS – niveau de qualification 3

 

Assuré, né en 1967, titulaire d’un certificat d’aptitude professionnelle (CAP) et d’un brevet d’études professionnelles (BEP) en électromécanique, obtenus en France. Il travaille en suisse en qualité de monteur en piscines. L’assuré a été victime de trois accidents : déchirure du ligament luno-pyramidal lors de la pratique de jiu-jitsu (16.03.1999) ; entorse de la cheville gauche (stade I à II) à la suite d’une chute (29.05.2005) ; rupture complète du LCA en retenant sa moto (31.07.2006). Axa a pris en charge les suites de ces accidents et a confié une expertise au Dr C.__, spécialiste en chirurgie orthopédique.

Mise en œuvre par l’office AI d’une mesure de reclassement professionnel d’une durée de deux ans sous la forme d’une formation de technicien du bâtiment et d’un stage pratique en entreprise (1ère phase de la mesure : du 09.04.2008 au 31.03.2009). Interruption de cette mesure en raison de quatre nouveaux accidents : entorse de la cheville droite (26.06.2008) ; torsion de la cheville droite et traumatisme de l’épaule droite (26.03.2009) ; contusions cervico-claviculaires (26.07.2009) ; contusions dorsales (04.01.2010).

Décision d’Axa LAA : allocation d’une rente d’invalidité de 30% dès le 01.11.2010.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/673/2014 – consultable ici : http://bit.ly/1ROJVaz)

Complément d’expertise confié au spécialiste en chirurgie orthopédique, Dr C.__.

Par jugement du 30.05.2014, admission du recours par le tribunal cantonal et octroi d’une rente d’invalidité de 40% dès le 01.11.2010.

 

TF

Selon l’art. 18 al. 1 LAA, l’assuré a droit à une rente d’invalidité s’il est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident. Est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée (art. 8 al. 1 LPGA).

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s’effectue, en règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1 p. 30; voir également SVR 2010 IV n° 11 p. 35 [9C_236/2009] consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, la diminution de la capacité de gain doit être déterminée de la manière la plus concrète possible. Aussi, le revenu d’invalide doit-il être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de la personne assurée (ATF 135 V 297 consid. 5.2 p. 301; 129 V 472 consid. 4.2.1 p. 475). En l’absence d’un revenu effectivement réalisé, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base des statistiques salariales (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb p. 76 ss).

Le point de savoir si les tables de salaires statistiques sont applicables et, le cas échéant, quelle table est déterminante est une question de droit (ATF 132 V 393 consid. 3.3 p. 399; SVR 2009 IV n° 34 p. 95 [9C_24/2009] consid. 1.2) que le Tribunal fédéral examine d’office (art. 106 al. 1 LTF). En effet, le choix du niveau de qualification professionnelle (1+2, 3 ou 4), en tant que facteur entrant dans la détermination du gain d’invalide sur la base des statistiques salariales (cf. ATF 124 V 321), se fonde sur l’expérience générale de la vie et constitue dès lors une question de droit que le Tribunal fédéral peut revoir librement (SVR 2009 IV n° 34 p. 95, déjà cité; arrêt 9C_110/2009 du 23 décembre 2009 consid. 4.2).

In casu, le reclassement professionnel en qualité de technicien en bâtiment qui aurait dû se dérouler sur une période totale d’environ deux ans a été interrompu (du 26 juin jusqu’à l’automne 2008), puis abandonné définitivement au mois de mars 2009, soit après onze mois. Toutefois, les événements à l’origine de l’interruption puis de l’abandon définitif de ce reclassement ne sont pas en relation avec les suites des accidents (survenus en 1999, 2005 et 2006) dont Axa LAA doit répondre. Il y a donc lieu d’établir le niveau de qualification professionnelle déterminant pour fixer le taux d’invalidité de l’assuré en se fondant sur la situation qui eût été la sienne si la mesure professionnelle avait été menée à terme. Il apparaît que sa formation et son expérience professionnelles lui conféraient dans le secteur administratif de la gestion d’immeubles des connaissances préalables, sur le vu desquelles on ne saurait considérer que l’intéressé, dans ce domaine, ne pourrait exercer que des tâches non qualifiées, n’impliquant pas de formation particulière (cf. arrêts 9C_444/2010 du 20 décembre 2010 consid. 2.3 et 9C_963/2008 du 27 mai 2009 consid. 3.5).

L’assureur LAA était fondée à tenir compte d’un niveau de qualification 3 (connaissances professionnelles spécialisées) pour fixer le revenu d’invalide déterminant pour la comparaison des revenus.

 

Le TF admet le recours de l’assureur-accidents.

 

 

Arrêt 8C_499/2014 consultable ici : http://bit.ly/1QFzvri

 

 

Une perspective plutôt qu’une rente

Grâce à l’initiative « Réintégration professionnelle » de la Suva, 180 travailleurs victimes d’un accident ont bénéficié d’une nouvelle perspective professionnelle au cours des cinq dernières années. La Suva a recherché des entreprises prêtes à leur proposer un poste de travail approprié, épargnant ainsi jusqu’ici 30 millions de francs de rentes.

 

Article paru in Sécurité sociale CHSS 1/2016, p. 8 ss, de Gabriela Hübscher

 

Sécurité sociale CHSS 2016-1 – Une perspective plutôt qu’une rente

 

8C_414/2014 (f) du 22.09.2015 – Parallélisation des revenus à comparer – 16 LPGA / Revenu sans invalidité nettement inférieur au salaire moyen de la branche

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_414/2014 (f) du 22.09.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/21N1qjO

 

Parallélisation des revenus à comparer – 16 LPGA

Revenu sans invalidité nettement inférieur au salaire moyen de la branche

 

Assurée travaillant dès le 21.08.2007 en qualité d’opératrice à l’étampage, par l’entremise d’une entreprise de placement de personnel. Le 21.01.2008, elle a chuté dans les escaliers et a percuté une vitre qui s’est brisée, se blessant au niveau du coude. Décision du 18.03.2009 : pleine capacité de travail dans son activité d’étampeuse ; fin du versement des indemnités journalières dès le 16.03.2009.

Rechute annoncée le 15.02.2011, avec interruption de l’activité de sommelière en raison de douleurs au membre supérieur droit. Expertise médicale confiée à un spécialiste FMH en chirurgie orthopédique : capacité de travail nulle dans les anciennes activités (industrie et restauration) ; capacité de travail pleine et entière dans une autre activité, sans port de charges avec le membre supérieur droit ni mouvements répétitifs de flexion-extension du coude et/ou de prosupination et à condition que le membre supérieur droit ne soit pas utilisé en permanence durant toute la journée comme c’est le cas dans des travaux fins d’établi.

Décision du 09.01.2013, confirmée sur opposition le 21.02.2013 : pas de droit à une rente d’invalidité et octroi d’une IPAI de 5%. Se fondant sur un choix de descriptions de postes de travail (DPT), l’assureur-accidents a considéré que l’assurée pouvait réaliser un salaire à tout le moins égal, si ce n’est supérieur, à celui qu’elle aurait perçu sans l’accident, que ce soit lors de la stabilisation initiale de son état de santé en 2009 ou en 2012.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 02.04.2014, rejet du recours par le tribunal cantonal. S’écartant des DPT sur lesquelles s’était fondée l’assurance-accidents pour calculer le revenu d’invalide, la juridiction cantonale s’est référée aux statistiques salariales, sans tenir compte du fait que dans l’activité exercée avant son atteinte à la santé, l’assurée percevait un salaire nettement inférieur au salaire moyen de la branche. Taux d’invalidité maximum : 6.43%, arrondi à 6 % pour 2009.

 

TF

L’assurée conteste le montant du revenu sans invalidité retenu par la juridiction cantonale en faisant valoir qu’il ne tient pas compte du fait que son revenu était très nettement inférieur au revenu moyen dans l’industrie horlogère. Elle se réfère pour la première fois à la jurisprudence relative au parallélisme des revenus à comparer (ATF 135 V 297; 134 V 322).

L’application des principes exposés par la jurisprudence à ce sujet suppose que le revenu (sans invalidité) effectivement réalisé par l’assuré soit notablement inférieur à la moyenne, c’est-à-dire inférieur d’au moins 5 % au salaire statistique usuel dans la branche (ATF 135 V 297 consid. 6.1.2 p. 302). Le revenu nettement inférieur peut alors justifier un parallélisme des revenus à comparer, lequel doit porter seulement sur la part qui excède le taux déterminant de 5 %. En pratique, le parallélisme des revenus à comparer peut être effectué soit au regard du revenu sans invalidité en augmentant de manière appropriée le revenu effectivement réalisé ou en se référant aux données statistiques, soit au regard du revenu d’invalide en réduisant de manière appropriée la valeur statistique (ATF 135 V 297 consid. 6.1.3. p. 304; 134 V 322 consid. 4.1 p. 326).

L’art. 99 LTF n’interdit pas de présenter une nouvelle argumentation juridique, à la condition toutefois qu’elle se fonde sur des faits constatés dans la décision attaquée (ATF 136 V 362 consid. 4.1 p. 336; 134 III 643 consid. 5.3.2 p. 651). La parallélisation invoquée peut s’opérer à partir des faits constatés par la juridiction cantonale. Il n’appartient cependant pas au Tribunal fédéral, en première et unique instance, de se prononcer sur l’argumentation présentée par l’assurée.

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et renvoie la cause à la Cour des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura.

 

 

Arrêt 8C_414/2014 consultable ici : http://bit.ly/21N1qjO

 

 

8C_311/2015 (f) du 22.01.2016 – Revenu sans invalidité – Abattement sur le salaire statistique – 16 LPGA / Assistance judiciaire – contestation du taux d’abattement vouée à l’échec – 64 al. 1 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_311/2015 (f) du 22.01.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1TYhIjG

 

Revenu sans invalidité – Abattement sur le salaire statistique – 16 LPGA

Assistance judiciaire – contestation du taux d’abattement vouée à l’échec – 64 al. 1 LTF

 

Assuré, né en 1959, travaillant en dernier lieu en qualité de chauffeur-logisticien à plein temps. Il a été victime de plusieurs accidents, dès 2003, touchant le genou droit. Le 28.09.2011, alors qu’il déchargeait des palettes, l’assuré a glissé d’un camion-grue et s’est rattrapé à la ridelle de celui-ci. Le 25.01.2012, il a subi une acromioplastie et une réinsertion transosseuse du sus-épineux.

Examen final, le 27.06.2013, par le médecin d’arrondissement, qui a retenu les limitations fonctionnelles suivantes : pas de port de charges répété du membre supérieur droit (MSD) au corps de plus de 10 kilos, pas de port de charges répété de plus de 5 kilos du MSD éloigné du corps et sans mouvement répétitif de rotations interne et externe contre résistance de plus de 5 kilos et sans mouvement au-dessus du niveau des épaules. Les limitations fonctionnelles découlant des séquelles au niveau du genou droit consistaient en l’absence de longs déplacements en terrain régulier, pas de fréquents déplacements en terrain irrégulier, pas d’escaliers de manière fréquente, pas de travaux à genoux ou accroupis, pas de travaux nécessitant la marche avec des charges de plus de 15 kilos. Dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assuré, l’exigibilité était totale.

Décision, confirmée sur opposition le 28.05.2014 : octroi, dès le 01.01.2014, d’une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 19% et une indemnité pour atteinte à l’intégrité calculée sur la base d’un taux de 20%.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 65/14 – 22/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1oUVALb)

Par jugement du 23.03.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Abattement sur le salaire statistique

Les premiers juges ont considéré que le taux de 10% retenu par l’intimée tenait suffisamment compte de l’âge de l’assuré (près de 55 ans au moment de la comparaison des revenus) et de ses limitations fonctionnelles. Un abattement plus élevé n’était pas indiqué dès lors qu’il n’y avait pas lieu de retenir des problèmes particuliers d’adaptation. L’assuré avait été en mesure de changer d’entreprise et de se plier à de nouvelles contraintes émanant d’employeurs différents. Par ailleurs, on ne pouvait prendre en compte des difficultés linguistiques dans le cas d’un assuré arrivé en Suisse en 1981 et y ayant vécu de nombreuses années. Quant à l’absence de formation professionnelle certifiée et à la scolarité limitée, les premiers juges ont rappelé que ce défaut n’avait pas entravé l’assuré dans ses recherches d’emploi avant d’être atteint dans sa santé. Ces motifs sont pertinents. En l’espèce, l’assuré ne démontre pas à satisfaction de droit en quoi la cour cantonale aurait exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit.

 

Assistance judiciaire

L’assuré a présenté une demande d’assistance judiciaire. Au vu de la jurisprudence et des motifs énoncés par les premiers juges pour justifier un taux d’abattement maximum de 10%, les conclusions du recours apparaissaient d’emblée vouées à l’échec, de sorte que la demande d’assistance judiciaire est rejetée (art. 64 al. 1 LTF a contrario).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_311/2015 consultable ici : http://bit.ly/1TYhIjG

 

 

8C_307/2015 (f) du 08.10.2015 – Incapacité de travail totale préexistante pour maladie et accident avec nouvelle incapacité de travail – Droit à l’indemnité journalière – 16 LAA / Causalité outrepassante

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_307/2015 (f) du 08.10.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/21dvOOK

 

Incapacité de travail totale préexistante pour maladie et accident avec nouvelle incapacité de travail – Droit à l’indemnité journalière – 16 LAA

Causalité outrepassante

 

Assurée, née en 1956, travaillant en qualité d’aide de cuisine depuis le 15.08.2001, est en incapacité de travail à 100% pour cause de maladie à partir du 01.05.2007. Elle a perçu des indemnités journalières de l’assurance perte de gain maladie jusqu’au 31.03.2008, date de la résiliation du contrat de travail.

Le 08.10.2007, l’assurée a été victime d’une chute dans un trolleybus, à la suite d’un freinage brusque. Par déclaration d’accident-bagatelle LAA du 10.06.2008, l’ex-employeur de l’assurée a informé l’assureur-accidents que le 12.12.2007, l’assurée avait été victime d’une chute, en glissant sur la chaussée.

Par des décisions séparées du 02.06.2009, l’assureur-accidents a mis fin, d’une part, au droit de l’assurée à des « prestations à court terme (traitement médical) » pour les suites de l’accident du 08.10.2007 et, d’autre part, a nié le droit de celle-ci à des prestations pour les suites de l’accident du 12.12.2007. Se fondant sur l’avis de son médecin-consultant, spécialiste en chirurgie orthopédique, elle a considéré que dans les deux cas il n’existait pas de lien de causalité naturelle entre les événements accidentels et les troubles actuels de l’assurée.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 1/13 – 21/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1QZx4pe)

Par jugement du 23.03.2015, rejet du recours en tant qu’il portait sur le droit à des indemnités journalières et à une rente d’invalidité et renvoi de la cause à l’assurance-accidents pour complément d’instruction et nouvelle décision sur le droit éventuel de l’assurée à la prise en charge des frais de traitement et à une indemnité pour atteinte à l’intégrité.

 

TF

On parle de causalité outrepassante, lorsqu’après un événement dommageable se produisent de nouveaux faits, qui auraient entraîné le même dommage si celui-ci n’était pas déjà survenu. Dans ce cas, la cause subséquente ne peut plus avoir d’incidence ni sur la survenance ni sur l’étendue du dommage (voir Franz Werro, La responsabilité civile, 2 e éd. 2011, p. 63 s.; Thomas Probst, La causalité aujourd’hui, in Les causes du dommages, 2007, p. 20 s.).

La juridiction cantonale n’a pas nié le lien de causalité entre les accidents et les troubles de l’assurée. Se référant à la notion de causalité outrepassante, elle a toutefois considéré qu’un accident ne pouvait pas entraîner une incapacité de travail auprès d’une personne déjà dépourvue de toute capacité de travail. Aussi bien a-t-elle nié le droit de l’assurée aux indemnités journalières. Ces considérations sont pertinentes. En effet, depuis le mois de mai 2007, l’assurée était en incapacité de travail entière et durable dans son activité habituelle, en raison notamment de lombo-pseudo-sciatalgies chroniques et de troubles dégénératifs du rachis lombaire, ce qu’elle ne conteste pas. Dans ces conditions, force est de constater que les accidents des 08.10.2007 et 12.12.2007 n’ont pas provoqué une incapacité de travail supérieure à celle résultant des affections préexistantes. A cet égard, le fait que l’assurée a reçu des indemnités pour perte de gain en cas de maladie d’une assurance privée n’est pas décisif.

 

Le TF est rejeté.

 

 

Arrêt 8C_307/2015 consultable ici : http://bit.ly/21dvOOK

 

 

Remarque : la recommandation de la Commission ad hoc n° 13/85 (révision totale du 17 novembre 2008) et son annexe reprennent ce principe. L’annexe permet d’expliquer de manière compréhensible cette notion par un schéma.

 

8C_55/2015 (f) du 12.02.2016 – Droit au traitement médical – 10 LAA – 21 LAA / Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA / Usage « hors étiquette » d’un médicament / Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_55/2015 (f) du 12.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1pnGf6s

 

Droit au traitement médical / 10 LAA – 21 LAA

Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA

Usage « hors étiquette » d’un médicament

Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

 

Assuré, mécanicien sur machines textiles, victime, le 27.08.2007, d’une chute du haut d’une machine et d’une blessure à la main droite. L’évolution a été défavorable, marquée par une algodystrophie du 5ème rayon de la main droite et d’une capsulite rétractile de l’épaule gauche.

A partir d’avril 2009, l’assuré a bénéficié, à intervalles réguliers de trois mois, un traitement médical sous la forme de perfusions de médicaments antalgiques, en particulier de kétamine (médicament Ketalar®), visant à élever le seuil douloureux. Ce traitement a eu un bénéfice certain.

Par décision du 11.02.2011, l’assureur-accidents a octroyé à l’assuré une rente fondée sur un degré d’invalidité de 22% dès le 01.01.2010 ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 6%. L’assuré s’est opposé à cette décision, demandant entre autre la continuation de la prise en charge du traitement à la kétamine. Dans une nouvelle décision du 23.10.2012, l’assurance-accidents a partiellement admis l’opposition en ce sens qu’elle a prolongé le versement de l’indemnité journalière jusqu’au 31.10.2010 et fixé la naissance du droit à la rente au 01.11.2010.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 25.11.2014, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA

En se référant à l’arrêt U 252/01 de l’ancien Tribunal fédéral des assurances, la cour cantonale a considéré que le droit éventuel de l’assuré à la prise en charge du traitement litigieux devait être examiné à l’aune de l’art. 10 al. 1 LAA. Dans cet arrêt, l’ancien TFA avait été saisi d’un recours interjeté par un assuré contre le refus de l’assureur-accidents (confirmé en dernière instance cantonale) de prendre en charge une opération chirurgicale au titre de l’art. 21 al. 1 LAA, à un moment où une procédure parallèle sur le droit à la rente de cet assuré était encore pendante devant le tribunal cantonal. La cour fédérale a retenu que tant que la décision de rente n’était pas entrée en force, la rente ne pouvait être considérée comme fixée au sens de l’art. 21 al. 1 LAA. En effet, le juge appelé à se prononcer sur la décision de rente pourrait retenir que la poursuite du traitement médical était susceptible d’apporter une amélioration sensible de l’état de santé de l’assuré, ce qui aurait pour effet de différer la fixation de la rente au sens de l’art. 19 al. 1 LAA. C’est pourquoi, l’assureur-accidents – et le juge en cas de recours – devait examiner le bien-fondé de la demande de prise en charge de l’opération chirurgicale selon les conditions de l’art. 10 al. 1 LAA.

En l’espèce, ce sont les mêmes juges dans la même procédure qui avaient à traiter de tous les aspects du droit aux prestations de l’assuré. Dès lors que la cour cantonale a confirmé la stabilisation de l’état de santé de celui-ci au 01.11.2010 ainsi que le passage à la rente à cette date – ce qui n’était au demeurant pas contesté par l’assuré -, on ne voit pas d’obstacle à considérer que la rente est fixée au sens de l’art. 21 al. 1 LAA même si la décision de rente n’est pas encore formellement entrée en force parce que l’intéressé a conclu à la reconnaissance d’un degré d’invalidité supérieur à celui fixé par cette décision.

 

Droit au traitement médical – 10 LAA – 21 LAA

L’assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l’accident, à savoir notamment au traitement ambulatoire dispensé par le médecin, ainsi qu’aux médicaments et analyses ordonnés par celui-ci (art. 10 al. 1 let. a et b LAA). Le traitement médical n’est alloué qu’aussi longtemps que sa continuation est susceptible d’apporter une sensible amélioration de l’état de santé de l’assuré. Il cesse dès la naissance du droit à la rente (art. 19 al. 1, 2ème phrase, LAA). Lorsque la rente a été fixée, les prestations pour soins et remboursement de frais (art. 10 à 13 LAA) sont accordées à son bénéficiaire aux conditions énumérées à l’art. 21 al. 1 LAA, soit notamment lorsqu’il a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (let. c). Ainsi, les conditions du droit à la prise en charge des frais de traitement médical diffèrent selon que l’assuré est ou n’est pas au bénéfice d’une rente (ATF 116 V 41 consid. 3b p. 45).

La cour cantonale a retenu que le traitement à la kétamine permettait de soulager passagèrement les douleurs chroniques de l’assuré sans toutefois apporter d’amélioration sensible de son état de santé. Partant, l’assurance-accidents n’avait pas à en assumer la prise en charge au titre de l’art. 10 al. 1 LAA postérieurement au 31.12.2010. A cela s’ajoutait que l’injection, à faibles doses, du médicament Ketalar® pour élever le seuil douloureux en cas de syndrome douloureux chronique correspondait à un usage « hors étiquette » de ce médicament dont l’indication autorisée est l’induction d’une anesthésie générale. Or une telle utilisation du médicament ne donnait pas lieu à un remboursement dans l’assurance-maladie obligatoire et il devait en aller de même dans l’assurance-accidents. Enfin, de l’aveu même de la Doctoresse F.__, il ne s’agissait pas d’une thérapie scientifiquement reconnue, ce qui justifiait également que l’assurance-accidents ne la prenne pas en charge.

 

Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

Il est admis en jurisprudence comme en doctrine que le traitement médical doit être scientifiquement reconnu pour être pris en charge par l’assurance-accidents: l’assuré n’a pas droit à la prise en charge de traitements expérimentaux, pas plus que l’assureur ne saurait lui imposer de tels traitements (voir ATF 123 V 53 consid. 2b/bb p. 59; RAMA 2000 n° U 395 p. 317 consid. 5a, U 160/98; Jean-Maurice Frésard/Margit Moser-Szeless, L’assurance-accidents obligatoire (avec des aspects de l’assurance-militaire), in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd. 2016, p. 969 n° 198; Alexandra Rumo-Jungo, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, 4ème éd. 2012, ad. art. 54 LAA, p. 244; Alfred Maurer, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2ème éd. 1989, p. 291). A cet égard, l’assureur-accidents s’inspire en principe de la jurisprudence relative à l’assurance-maladie (critère de l’efficacité posé par l’art. 32 al. 2 LAMal). Une méthode de traitement est considérée comme éprouvée par la science médicale, c’est-à-dire réputée scientifiquement reconnue, si elle est largement admise par les chercheurs et les praticiens (ATF 123 V 53 consid. 2b/aa p. 58). Quant à la prise en charge des médicaments, l’art. 71 al. 2 OLAA (RS 832.202) prévoit qu’ils sont remboursés par les assureurs d’après les listes qui ont été établies conformément à l’art. 52 al. 1 de la LAMal.

En l’espèce, le médicament Ketalar® et le spray nasal à la kétamine ne figurent pas sur la liste des spécialités établie par l’Office fédéral de la santé publique. D’autre part, il ressort des articles scientifiques produits que l’injection intraveineuse de kétamine à faibles doses pour combattre la douleur en est encore à un stade expérimental même si quelques études ont montré une certaine efficacité dans le traitement des douleurs à prédominance neuropathique grâce à la propriété de la kétamine de bloquer les récepteurs NMDA (acide-N-méthyl-D-aspartique). Il y est également relevé que la kétamine a des effets secondaires et qu’il subsiste de nombreuses interrogations liés à l’utilisation de cet agent analgésique puissant en dehors de son usage médical premier qui est l’induction d’une anesthésie générale. On ne peut donc considérer qu’il s’agit d’un traitement scientifiquement éprouvé et reconnu.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_55/2015 consultable ici : http://bit.ly/1pnGf6s

 

 

8C_252/2012 (f) du 30.11.2012 – Accident en état d’ébriété, avec drogues (cannabis, lidocaïne, atropine et midazolam), sans ceinture de sécurité, vitesse inadaptée / Assuré décédé – réduction pour délits – 37 al. 3 LAA / Taux d’alcoolémie moyen à retenir – Rappel de la jurisprudence / Réduction prestations survivants conforme au droit international

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_252/2012 (f) du 30.11.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/1UYeFql

 

Accident en état d’ébriété, avec drogues (cannabis, lidocaïne, atropine et midazolam), sans ceinture de sécurité, vitesse inadaptée

Assuré décédé – réduction pour délits – 37 al. 3 LAA

Taux d’alcoolémie moyen à retenir – Rappel de la jurisprudence

Réduction prestations survivants conforme au droit international

 

Faits

Assuré victime d’un accident de la circulation le 17.04.2010, placé dans un coma médicamenteux. En raison de la mort cérébrale du patient, les médecins ont coupé le soutien ventilatoire de l’assuré qui est décédé le 05.05.2010.

Du rapport de police, il ressort que l’assuré circulait en état d’ébriété, seul à bord de son automobile sur une route sèche, sans avoir attaché sa ceinture de sécurité. Il a perdu la maîtrise de son véhicule qui roulait à une vitesse inadaptée au tracé de la route. Une expertise toxicologique des échantillons d’urine et de sang prélevés le jour même a révélé la présence de cannabis et d’éthanol (taux compris entre 1,05 et 2,22 g pour mille au moment de l’événement). En outre, des substances telles que la lidocaïne, l’atropine et le midazolam ont été mises également en évidence dans les échantillons biologiques. Dans un rapport complémentaire du 04.06.2010, la gendarmerie a conclu à une faute dans la conduite d’un véhicule automobile, au motif que le conducteur était incapable de conduire en raison de la consommation de stupéfiants.

L’assureur LAA rend une décision le 25.06.2010, tenant compte d’une réduciton de 50% en raison de la gravité des infractions commises par l’assuré (conduite en état d’ébriété, défaut du port de la ceinture de sécurité et vitesse inadaptée aux circonstances, ainsi qu’aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité).

 

Par jugement du 09.02.2012, la juridiction genevoise a partiellement admis le recours et a fixé à 40% la réduction des prestations allouées aux survivants. Taux de réduction confirmé par le TF.

 

Art. 37 al. 3 LAA et 21 LPGA

L’art. 37 al. 3 LAA contient une double dérogation à l’art. 21 LPGA. En premier lieu, la LAA permet une réduction des prestations allouées à l’assuré ou aux survivants en cas de crime ou de délit non intentionnel. En second lieu, quand l’assuré décédé a lui-même commis un crime ou un délit, les prestations en espèces pour les survivants peuvent être réduites de moitié au plus (voir ATF 134 V 277 consid. 2.4 p. 280). Ces dérogations à la LPGA ont été voulues par le législateur, qui entendait maintenir le régime des sanctions instauré par l’ancien art. 37 al. 3 LAA. Par ces dérogations, il avait en vue, principalement, les accidents causés par un conducteur pris de boisson. Cette intention ressort de manière non équivoque du rapport de la Commission du Conseil national de la sécurité sociale et de la santé du 26 mars 1999 (FF 1999 p. 4168). A ce sujet, en effet, la commission s’est exprimée en ces termes (p. 4346; cf. aussi ATF 134 V 277 consid. 3.3 p. 282):

« L’art. 37, al. 3, LAA règle la réduction en cas d’accident en relation avec la commission d’un délit ou d’une infraction. Cette disposition s’écarte de plusieurs manières de l’art. 27 LPGA: d’une part, elle couvre également les cas survenant en présence d’un délit commis par négligence et, d’autre part, les réductions prévues touchent également les proches. Le principal cas d’application est la conduite en état d’ébriété » (cf. aussi ATF 134 V 277 consid. 3.3 p. 282).

 

Taux de réduction en cas d’alcoolémie

Avant l’entrée en vigueur (le 01.01.2005) du nouvel art. 91 al. 1 LCR, l’ancien Tribunal fédéral des assurances avait maintes fois confirmé la pratique des assureurs-accidents, notamment la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents, qui faisait dépendre le taux de réduction du degré d’alcoolémie selon l’échelle suivante: entre 0,8 et 1,2‰, la réduction est de 20% ; elle augmente de 10% pour chaque 0,4‰ d’alcoolémie supplémentaire (ATF 120 V 224 consid. 4c p. 231; RAMA 1996, no U 263 p. 284 consid. 4, 1995 no U 208 p. 24 consid 3a). L’abaissement du taux limite d’alcoolémie à 0,5 gramme pour mille n’a pas modifié cette pratique et la jurisprudence rendue à son propos reste donc valable (Jean-Maurice Frésard/Margit Moser-Szeless, L’assurance-accidents obligatoire, in: Soziale Sicherheit, SBVR. vol. XIV, n° 314 p. 935).

 

Réduction selon 37 al. 3 LAA et conventions internationales

S’agissant d’un accident non professionnel, les conventions internationales ne sont pas applicables (Convention OIT n° 128 et Code Européen de Sécurité sociale).

 

Réduction des prestations de survivants selon 37 al. 3 LAA

Une sévérité moindre ne se justifie pas. Si l’assuré doit pourvoir à l’entretien de proches auxquels son décès ouvrirait droit à une rente de survivant ou s’il décède des suites de l’accident, les prestations ne peuvent être réduites que de moitié au plus. Il s’agit d’un privilège dit « pour proches » en ce sens que la réduction ne peut dépasser la moitié, lors même que la gravité de la faute aurait justifié un refus de prestations ou une réduction supérieure à ce taux (Ghélew/Ramelet/Ritter, Commentaire de la loi sur l’assurance-accidents [LAA], Lausanne 1992, p. 147 s.). Sous cet angle, il est déjà tenu compte du fait que les survivants ne sont pas à l’origine du comportement délictueux.

 

Taux d’alcoolémie – prise en compte du taux moyen

L’existence d’un écart entre l’alcoolémie minimale et maximale est inhérent au système, la prise de sang ne pouvant forcément qu’être effectuée un certain temps après le moment déterminant. Selon la jurisprudence rendue en matière pénale, lorsque l’analyse de sang a pu être effectuée à satisfaction scientifique, le juge ne saurait s’en écarter. En particulier, il est tenu de respecter le cadre défini par l’analyse, autrement dit les valeurs minimale et maximale d’alcoolémie qu’elle fixe. En revanche, aucune disposition légale n’impose en elle-même au juge de retenir l’alcoolémie la plus faible mentionnée dans l’analyse (cf. ATF 129 IV 290 consid. 2.7 p. 295). Quand il s’agit de fixer le taux d’alcoolémie de l’assuré en matière de réduction des prestations il est admissible de se fonder sur un taux moyen, en l’absence d’indications plus précises, notamment d’éléments de fait ressortant d’un jugement pénal (cf. arrêt U 394/05 du 10 novembre 2006 consid. 3.3).

 

 

Arrêt 8C_252/2012 consultable ici : http://bit.ly/1UYeFql

 

 

8C_897/2011 (f) du 22.11.2012 – Travail principal (maçon) et activité accessoire (sur appel) / Revenu sans invalidité (y.c. activité accessoire) – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_897/2011 (f) du 22.11.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Q5aawe

 

Travail principal (maçon) et activité accessoire (sur appel) / Revenu sans invalidité (y.c. activité accessoire) – 16 LPGA

 

Assuré œuvrant comme maçon (activité principale) exerçant également une activité accessoire du 15.12.2006 au 30.04.2007.

Accident survenu le 15.02.2007, où l’assuré a glissé sur la neige; en se rattrapant sur les bras, il s’est blessé à l’épaule droite. Evolution a été défavorable. Plusieurs tentatives de reprise du travail dans une activité mieux adaptée auprès de l’employeur principal ont échoué.

Octroi par la Suva d’une rente d’invalidité (invalidité 20%) dès 01.02.2011 et une IPAI de 17.5%. Le degré d’invalidité résultait de la comparaison du revenu sans invalidité de 69’862 fr. avec le revenu dans une activité adaptée exigible à 100% de 56’167 fr. fixé sur la moyenne des salaires résultant de cinq descriptions de postes de travail (DPT), en tant que collaborateur de production, ouvrier de brasserie et caissier. Par DSO du 07.06.2011, le montant du gain annuel assuré a été porté à 72’234 fr. au lieu de 69’736 fr.

 

Recours auprès de le tribunal cantonal (jugement du 25.10.2011).

 

TF

S’agissant du revenu sans invalidité, le TF rappelle que les revenus obtenus dans l’exercice d’activités accessoires sont pris en compte dans la fixation du revenu sans invalidité, si l’on peut admettre que l’intéressé aurait, selon toute vraisemblance, continué à percevoir des gains accessoires s’il était resté en bonne santé. La prise en compte de ces gains accessoires intervient sans égard au rendement et au temps consacré pour leur obtention. Elle s’étend donc aux revenus obtenus dans une activité accomplie en supplément d’un emploi exercé dans les limites d’un horaire de travail normal. A la différence du revenu d’invalide, la question de l’exigibilité ne joue pas de rôle pour la détermination du revenu sans invalidité. Pour savoir si un revenu accessoire doit être pris en compte, seul est décisif le lien entre l’atteinte à la santé et la cessation de l’activité s’y rapportant (arrêts U 66/02 du 2 novembre 2004 consid. 4.1.2, in RAMA 2005 n° U 538 p. 112, U 130/02 du 29 novembre 2002 consid. 3.2.1, in RAMA 2003 n° U 476 p. 107 et 8C_452/2009 du 26 janvier 2010 consid. 4.3 et les références).

Des pièces au dossier, il s’avère que l’activité exercée à titre accessoire découlait d’un contrat de travail de durée déterminée et que l’activité accessoire n’a été exercée que quelques mois, à des taux d’occupation variables. Le TF rejoint l’appréciation de la juridiction précédente, dans le sens où l’activité s’exerçait sur appel, sans obligation de la part de l’employeur de fournir du travail. L’activité ne présente pas de caractère régulier ; rien ne laissait supposer au degré de vraisemblance requise qu’il aurait pu à l’avenir compter sur de nouveaux engagements.

Le TF confirme le revenu sans invalidité fixé à 69’862 fr. par l’assureur LAA et confirmé par la juridiction cantonale.

 

 

Arrêt 8C_897/2011 consultable ici : http://bit.ly/1Q5aawe

 

 

8C_926/2011 (f) du 07.12.2012 – Rente d’invalidité LAA – Capacité de travail exigible sur un marché équilibré du travail – 16 LPGA / Force contraignante de la décision de l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_926/2011 (f) du 07.12.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/1ol1Uff

 

Rente d’invalidité LAA – Capacité de travail exigible sur un marché équilibré du travail – 16 LPGA

Force contraignante de la décision de l’AI

 

Faits

Un jardinier et chef d’équipe a fait une chute d’une échelle d’une hauteur de trois mètres, le 05.10.1998, occasionnant une fracture du péroné droit. En 1999, une arthroscopie met en évidence une importante lésion ostéo-cartilagineuse. La symptomatologie a évolué vers une arthrose de l’articulation tibio-astragalienne.

Expertise médicale confiée au Dr W.__, spéc. FMH en chirurgie orthopédique. Diagnostics retenus : arthrose tibio-astragalienne, arthrose sous astragalienne débutante, suspicion de canal lombaire étroit, obésité avec BMI à 37 ; seuls les deux premiers diagnostics étaient en rapport avec l’accident de 1998. CT dans son métier habituel : 50% avec certaines limitations. CT exigible : aucune incapacité de travail dans les professions de réceptionniste/téléphoniste (il convenait toutefois de tenir compte du fait que l’assuré avait arrêté sa scolarité à 11 ans), gardien de musée (dans un poste assis), employé de régie (dans un poste à l’interne, sans visite d’appartements) et surveillant de parking, tandis que les activités de commis administratif, préposé au guichet et employé dans une compagnie d’assurances n’étaient exigibles qu’à 75% vu la limitation existant pour le temps passé debout.

Entre 2006 et 2008, trois nouvelles interventions chirurgicales dont la pose d’une prothèse totale (17.10.2006).

Entre-temps, l’OAI GE lui a reconnu, par décision du 23.04.2008, le droit à une demi-rente d’invalidité dès le 01.09.2005, puis à une rente entière à compter du 01.01.2006.

A la demande de l’assurance-accidents, le médecin-expert spéc. en orthopédique a réexaminé l’assuré. Constatations d’une évolution défavorable après mise en place de la prothèse; le handicap est désormais indéniable. CT dans le métier de jardinier : nulle. CT exigible : entière dans une profession respectant toutes les limitations fonctionnelles constatées.

Décision du 03.02.2010 : IPAI de 25%. Décision du 12.04.2010 : rente d’invalidité de 27%.

RM de la doctoresse P.________, spéc. FMH en chirurgie orthopédique et médecin traitant : activité de jardinier plus exigible ; CT dans une activité adaptée : 50%, voire 75%.

Opposition de l’assuré contestant la quotité de la rente. DSO : rectification de la première décision, portant le taux d’invalidité à 29%.

 

Procédure cantonale

Le tribunal cantonal a admis le recours de l’assuré et annulé la DSO. Elle a reconnu le droit à une rente d’invalidité de 100% à partir du 01.02.2010.

 

TF

Capacité de travail exigible sur un marché équilibré du travail

Lorsqu’il s’agit d’examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA en liaison avec l’art. 1 al. 1 LAA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s’ensuit que pour évaluer l’invalidité, il n’y a pas lieu d’examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s’il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l’offre de la main d’œuvre (VSI 1998 p. 293, I 198/97 consid. 3b et les références). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Ainsi, on ne peut parler d’une activité exigible au sens de l’art. 16 LPGA, lorsqu’elle ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu’elle n’existe pratiquement pas sur le marché général du travail ou que son exercice suppose de la part de l’employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (RCC 1991 p. 329, I 350/89 consid. 3b; RCC 1989 p. 328, I 329/88 consid. 4a; arrêt 9C_713/2009 du 22 juillet 2010, consid. 3.2). A la lumière de ces considérations, il y a lieu de déterminer dans chaque cas de manière individuelle si l’assuré est encore en mesure d’exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Ni sous l’angle de l’obligation de diminuer le dommage, ni sous celui des possibilités qu’offre un marché du travail équilibré aux assurés pour mettre en valeur leur capacité de travail résiduelle, on ne saurait exiger d’eux qu’ils prennent des mesures incompatibles avec l’ensemble des circonstances objectives et subjectives (arrêts 9C_313/2007 du 8 janvier 2008, consid. 5.2; I 537/03 du 16 décembre 2003, consid. 3.1).

 

Exigences quant à la limitation de pouvoir alterner les positions et d’éviter de longs déplacements

Expert mandaté par l’assurance-accidents et médecin-traitant parlent en faveur d’une CT exigible. Il ressort de ces constatations médicales qu’une activité s’exerçant principalement en position assise, permettant d’alterner les positions et ne requérant pas de longs déplacements (en raison de l’utilisation de cannes) reste exigible. Si les limitations fonctionnelles peuvent de prime abord sembler importantes, elles représentent les mesures d’épargne somme toute pas inhabituelles dans ce cas. Au demeurant, elles ne requièrent pas des aménagements ou des concessions irréalistes de la part de l’employeur.

Il existe sur le marché du travail un éventail suffisamment large d’activités simples et légères, ne nécessitant aucune formation particulière, dont on doit convenir qu’un nombre significatif sont adaptées au handicap de l’intimé, notamment dans des activités de contrôle, de surveillance, de bureau et de l’industrie légère. On rappellera au demeurant qu’il n’y a pas lieu, dans ce contexte, d’examiner dans quelle mesure la situation concrète du marché du travail permettrait à l’intimé de retrouver un emploi (ATF 134 V 64 consid. 4.2.1 p. 70; 110 V 273 consid. 4b p. 276).

 

CT exigible dans le cas d’espèce

Les activités de gardien, surveillant de musée ou gardien de parking, envisagées par le docteur W.________ en 2005, restent exigibles. Dans la même mesure, les professions de huissier, réceptionniste/téléphoniste, employé de bureau sont également adaptées. Si l’on peut se poser la question de l’adéquation de ces dernières au profil professionnel de l’assuré, il y a toutefois lieu de relever que celui-ci n’a pas toujours exercé un travail manuel; avant son arrivée en Suisse, il a également travaillé durant six ans comme gérant d’une entreprise de production de poussins. En outre, le docteur W.________ l’a jugé apte à remplir des tâches administratives (de planification, gestion et établissement de devis), en retenant une capacité de travail résiduelle dans l’activité de jardinier sédentaire.

 

Force contraignante de la décision de l’OAI

L’évaluation de l’invalidité par l’OAI GE n’a pas de force contraignante pour l’assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3 p. 368). Au vu du rapport succinct du SMR, sur lequel se fonde la décision AI, il ne peut être établi (au degré de vraisemblance requise) que seules les séquelles liées à l’accident de 1998, à l’exclusion des autres atteintes (lombalgies, obésité, syndrome d’apnées du sommeil), ont motivé la décision d’octroi d’une rente et son maintien lors des révisions ultérieures.

 

Conclusion

Le recours de l’assurance-accidents admis. Cause renvoyée à la juridiction cantonale pour nouvelle décision.

 

 

Arrêt 8C_926/2011 consultable ici : http://bit.ly/1ol1Uff

 

 

8C_826/2011 (f) du 17.12.2012 – Traumatisme cranio-cérébral (TCC) suite à une chute de 2,8 m / Troubles psychiques apparus peu de temps après – Causalité adéquate – 6 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_826/2011 (f) du 17.12.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/1SEb8jJ

 

Traumatisme cranio-cérébral (TCC) suite à une chute de 2,8 m

Troubles psychiques apparus peu de temps après – Causalité adéquate – 6 LAA

Classification de la gravité de l’accident – rappel de la casuistique des chutes d’une certaine hauteur (consid. 6.2)

 

Faits

Assuré de 42 ans, arrivé en Suisse en mai 2004, travaillant comme ouvrier en bâtiment depuis le 01.07.2004. Le 27.07.2004, à son lieu de travail, il a fait une chute de 2,8 mètres sur le sol en béton. Score Glasgow de 7, intubé sur place et héliporté à l’Hôpital. Diagnostic posé de syncope d’étiologie inconnue suivie d’une chute ayant entraîné une commotion cérébrale. Les examens pratiqués n’ont révélé aucun signe de lésion traumatique. Transfert le lendemain au Centre hospitalier où il s’est plaint de cervicalgies et de maux de tête importants. Il y a séjourné jusqu’au 13.08.2004.

Du 16.08.2004 au 24.08.2004, l’assuré a derechef été hospitalisé pour des tendances suicidaires. Du 24.08.2004 au 14.09.2004, il a accompli un séjour à la CRR. Les médecins de cet établissement ont fait état d’une symptomatologie douloureuse invariable et de troubles comportementaux (apathie, adynamie) difficilement explicables par le seul traumatisme initial. Ils ont retenu, au premier plan, un trouble de l’adaptation avec réaction dépressive nécessitant une prise en charge psychiatrique.

Expertise neuropsychologique. Conclusion de l’expertise : l’assuré présentait des troubles neuropsychologiques atypiques s’intégrant dans un tableau psychique complexe sans lien de causalité avec l’accident. Décision le 02.04.2009 : fin de l’obligation de prester dès le 01.04.2009, confirmé par DSO du 09.07.2009.

 

TF

Confirmation par le TF que l’assuré a été victime d’un TCC sans substrat organique associé. Il apparaît toutefois que son état a été très vite influencé par des troubles psychiques importants.

Pas un seul des avis médicaux n’établit que la symptomatologie manifestée par l’assuré appartient exclusivement ou, du moins, de façon prépondérante au tableau caractéristique habituellement associé à un TCC. On doit bien plutôt en déduire que l’assuré a développé de manière précoce des problèmes d’ordre psychique qui constituent une atteinte à la santé distincte indépendante du traumatisme initial, ce qui justifie l’application des critères en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident (voir ATF 134 V 109 consid. 9.5 p. 125 s.).

 

Degré de gravité d’un accident

Le degré de gravité d’un accident s’apprécie d’un point de vue objectif, en fonction de son déroulement; il ne faut pas s’attacher à la manière dont la victime a ressenti et assumé le choc traumatique (cf. ATF 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140 et 403 consid. 5c/aa p. 409; Jean-Maurice Frésard/Margit Moser-Szeless, L’assurance-accidents obligatoire, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 2ème éd., no 89 ss). Sont déterminantes les forces générées par l’accident et non pas les conséquences qui en résultent. La gravité des lésions subies – qui constitue l’un des critères objectifs définis par la jurisprudence pour juger du caractère adéquat du lien de causalité – ne doit être prise en considération à ce stade de l’examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l’accident (arrêt 8C_77/2009 du 4 juin 2009 consid. 4.1.1 et les références citées).

 

Casuistique tirée de la jurisprudence en matière de chutes d’une certaine hauteur :

  • considérées comme faisant partie de la limite supérieure des accidents de gravité moyenne : chutes qui se sont produites d’une hauteur entre 5 et 8 mètres et qui ont entraîné des lésions osseuses relativement sévères (voir les arrêts publiés à la RAMA 1999 n° U 330 p. 122 consid. 4b/bb et RAMA 1998 n° U 307 p. 448 consid. 3a).
  • catégorie des accidents de gravité moyenne : cas de chutes d’une hauteur d’environ 3 mètres (voir notamment les arrêts 8C_305/2011 du 6 mars 2012, 8C_855/2009 du 21 avril 2010. Dans l’arrêt 8C_584/2007 du 9 septembre 2008 : assuré électricien monteur est tombé d’environ 3 à 4 mètres sur le sol après avoir subi une électrisation et a été trouvé pratiquement inconscient dans une petite mare de sang

Dans le cas d’espèce : chute d’une hauteur de 2,8 mètres, pas pleinement conscient au moment où il a chuté, donc tombé au sol de manière incontrôlée, le fait qu’il n’y a pas eu de lésion physique associée au TCC permet de considérer que les forces en jeu n’étaient pas telles qu’il faille aboutir à une appréciation différente de la situation (comme par exemple dans le cas ayant donné lieu à l’arrêt 8C_584/2010). Il y a lieu de ranger cet événement dans la catégorie des accidents de gravité moyenne stricto sensu.

 

Causalité adéquate entre des troubles psychiques et un accident de gravité moyenne

Les critères objectifs posés par la jurisprudence en la matière doivent se cumuler ou revêtir une intensité particulière (ATF 129 V 402 consid. 4.4.1 p. 407; 129 V 177 consid. 4.1 p. 183 ss; 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140 et 403 consid. 5c/aa p. 409).

In casu : aucun critère retenu. Causalité adéquate niée dès 31.03.2009. DSO confirmée.

 

 

Arrêt 8C_826/2011 consultable ici : http://bit.ly/1SEb8jJ