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8C_196/2022 (f) du 20.10.2022 – Prise en compte d’une activité accessoire exigible dans le revenu d’invalide – Total de 50h/sem. – 16 LPGA – LTr / Assuré d’âge avancé – 28 al. 4 OLAA (variante I)

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_196/2022 (f) du 20.10.2022

 

Consultable ici

 

Prise en compte d’une activité accessoire exigible dans le revenu d’invalide – Total de 50h/sem. / 16 LPGA – LTr

Assuré d’âge avancé / 28 al. 4 OLAA (variante I)

Pas d’abattement à cause de l’âge avancé en présence d’un cas d’application de l’art. 28 al. 4 OLAA

 

Assuré, , né en 1952, a travaillé comme concierge salarié à 100%. En parallèle, il a exercé une activité accessoire de concierge salarié à temps partiel. Le 17.12.2015, il s’est fait renverser par une camionnette en traversant la route sur un passage piéton. L’assuré a subi plusieurs opérations, notamment au genou droit et au niveau de la hanche gauche avec, au final, la mise en place d’une prothèse unicompartimentale du genou droit le 28.09.2017.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a octroyé à l’assuré une IPAI de 20%; en revanche, elle lui a refusé le droit à une rente d’invalidité au motif que les séquelles accidentelles causales ne réduisaient pas de façon importante sa capacité de gain.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/147/2022 – consultable ici)

Se fondant sur les rapports des médecins-conseil de l’assurance-accidents, la cour cantonale a d’une part retenu une exigibilité de 100% dans toute activité permettant à l’assuré d’alterner les positions debout et assise, respectivement d’éviter le port de charges supérieures à 10 kg, les montées d’escaliers, les déplacements rapides et les positions agenouillées, l’activité antérieure de concierge étant quant à elle exigible à 80%. D’autre part, la cour cantonale a retenu qu’une activité accessoire à « un taux de 21.84% » était exigible en sus de l’activité principale.

Sur ces prémisses, les juges cantonaux ont évalué le taux d’invalidité en prenant en compte, pour l’activité principale, un revenu d’invalide de 67’406 fr. sur la base des données statistiques résultant de l’ESS 2016, en prenant comme salaire de référence celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives (niveau de compétence 1) dans le secteur privé (TA1_skill_level, ligne total, adapté à la durée hebdomadaire de 41.7 heures et à l’évolution des salaires jusqu’en 2018). A ce montant de 67’406 fr., ils ont ajouté un montant annuel de 14’722 fr. au titre de gain accessoire, correspondant au taux d’exigibilité de 21.84%. Ils ont ensuite opéré un abattement de 5% pour les limitations fonctionnelles en lien avec la prothèse au genou droit pour aboutir à un revenu avec invalidité de 78’022 fr.

Concernant le revenu sans invalidité, les juges cantonaux ont considéré que c’était en raison de son âge de 66 ans au moment de l’ouverture du droit à la rente que l’assuré n’avait pas repris d’activité lucrative. Ainsi, en application de l’art. 28 al. 4 OLAA, l’assurance-accidents était fondée à fixer le revenu sans invalidité en tenant compte du gain qu’un assuré d’âge moyen aurait pu réaliser, soit 82’355 fr. selon les revenus communiqués par les deux anciens employeurs, ce qui conduisait à un taux d’invalidité de 5% (arrondi). Ils ont toutefois ajouté que même si l’on devait se fonder sur le revenu sans invalidité proposé par l’assuré, soit 84’955 fr., le taux d’invalidité ne s’élèverait qu’à 8% et se révélerait donc également insuffisant pour ouvrir le droit à une rente.

Par jugement du 21.02.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5.2
Selon la jurisprudence, le revenu obtenu avant l’atteinte à la santé doit être calculé compte tenu de tous ses éléments constitutifs, y compris de ceux qui proviennent d’une activité accessoire, lorsque l’on peut admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’assuré aurait continué à percevoir de tels revenus sans l’atteinte à la santé. Ceux-ci doivent également être pris en considération dans le revenu d’invalide lorsqu’il est établi que l’assuré est toujours en mesure, sur le plan médical, de réaliser des revenus d’appoint (arrêts 8C_922/2012 du 26 février 2013 consid. 5.2; 8C_671/2010 du 25 février 2011 consid. 4.5 et 5, in: SVR 2011 IV n° 55 p. 163). De même qu’en ce qui concerne l’activité principale, il convient d’examiner sur la base des avis médicaux quelle activité accessoire est exigible au regard de l’état de santé et dans quelle mesure (arrêts 8C_765/2016 du 13 septembre 2017 consid. 4.5, in: SVR 2018 UV n° 12 p. 29; 9C_883/2007 du 18 février 2008 consid. 2.3; U 130/02 du 29 novembre 2002 consid. 3.2.1, in: RAMA 2003 n° U 476 p. 107).

Consid. 5.3
L’assuré soutient que la cour cantonale aurait fait fi des circonstances du cas d’espèce. Ainsi, l’activité de concierge serait très spécifique dès lors qu’en pratique, cette activité consisterait en une mise à disposition du temps de travail plutôt qu’en l’exercice de tâches répétitives durant tout l’horaire de travail. Cela expliquerait qu’il aurait été en mesure, en sus de son horaire habituel de travail à plein temps, de mettre à disposition d’un autre employeur quelques heures supplémentaires; à cela s’ajouterait que le cumul de ces activités n’aurait été possible qu’en raison de la très grande proximité géographique de deux sites. A l’inverse, l’essentiel des activités « simples et répétitives » recensées dans les données statistiques de l’ESS ne présenterait pas les mêmes caractéristiques, requérant un travail effectif durant la totalité de l’horaire de travail, soit plus de 50 heures par semaine, en cumulant par exemple deux activités professionnelles « ordinaires » dans le secteur industriel, ce que l’on ne saurait exiger de lui.

Consid. 5.4
L’assuré ne remet plus en question les appréciations médicales qui lui attestent une capacité de travail sans limitation horaire dans toute activité adaptée et qui constituent le fondement de la constatation de la cour cantonale concernant l’exigibilité médicale d’une activité adaptée à un taux de 121.84%. En tant qu’il fait référence aux particularités de ses activités antérieures, il ne saurait être suivi, vu que les attestations médicales se prononcent sur sa capacité de gain résiduelle après l’accident. Cependant, il fait valoir que ce taux d’activité très élevé de 121.84% correspond à une durée d’activité de plus de 50 heures par semaine. Par conséquent, il se pose la question de savoir (déjà soulevée dans l’arrêt 8C_765/2016 du 13 septembre 2017 consid. 4.6) si une telle activité accessoire était exigible au regard de la législation concernant la durée maximum de travail. L’art. 9 al. 1 LTr dispose que la durée maximale de la semaine de travail est de 45 heures pour les travailleurs occupés dans les entreprises industrielles ainsi que pour le personnel de bureau, le personnel technique et les autres employés, y compris le personnel de vente des grandes entreprises de commerce de détail (let. a) et de 50 heures pour tous les autres travailleurs (let. b). Cette durée maximale inclut d’éventuelles activités accessoires (ROLAND A. MÜLLER/CHRISTIAN MADUZ, ArG Kommentar, Arbeitsgesetz mit weiteren Erlassen im Bereich Arbeitsschutz, 8e éd. 2017, n° 13 ad Vorbemerkungen zu Art. 9-14). La lettre a regroupe le personnel technique et les employés qui sont surtout chargés de tâches dites cérébrales dans les bureaux ou à des postes de travail similaires, tels que guichets, ateliers d’essais, laboratoires, développement de programmes informatiques, services de conseil, pré-print de l’industrie graphique, etc., tandis que tombent sous la notion d’autres travailleurs de la lettre b tous ceux dont la tâche se compose principalement d’activités manuelles telles que l’artisanat, le travail auxiliaire d’ordre manuel ou la vente dans les entreprises comptant moins de 50 travailleurs (Secrétariat d’État à l’économie [SECO], Commentaire de la loi sur le travail et les ordonnances 1 et 2 d’avril 2022, p. 009-2). En admettant un taux maximal pour l’activité accessoire de 20% (menant à un total de 50 heures de travail hebdomadaires), on obtiendrait en l’occurrence un revenu accessoire de 13’481 fr. 70. Toutefois, au vu de ce qui suit, le taux d’invalidité n’atteindrait pas le seuil requis pour ouvrir le droit à une rente d’invalidité de l’assurance-accidents, de sorte que la question soulevée ci-dessus peut être laissée ouverte.

 

Consid. 6.2
Sur la base de la délégation législative de l’art. 18 al. 2 LAA, le Conseil fédéral a édicté l’art. 28 OLAA, qui contient des prescriptions particulières pour l’évaluation de l’invalidité dans des cas spéciaux. L’art. 28 al. 4 OLAA dispose que si, en raison de son âge, l’assuré ne reprend pas d’activité lucrative après l’accident ou si la diminution de la capacité de gain est due essentiellement à son âge avancé, les revenus de l’activité lucrative déterminants pour l’évaluation du degré d’invalidité sont ceux qu’un assuré d’âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser.

Consid. 6.2.1
Cette disposition vise deux situations: Premièrement, elle s’applique si l’assuré, en raison de son âge, ne reprend plus d’activité lucrative après l’accident (variante I). Les conditions de cette variante sont remplis lorsque l’assuré dispose, au terme du traitement médical, d’une capacité de travail résiduelle au moins partielle, mais ne la met plus en valeur à cause de son âge. C’est notamment le cas si l’assuré atteint l’âge légal de la retraite (arrêts 8C_209/2012 du 12 juillet 2012 consid. 5.3; 8C_452/2011 du 12 mars 2012 consid. 4.1) pendant la période entre l’accident et la fin du traitement médical (THOMAS FLÜCKIGER, in Basler Kommentar, Unfallversicherungsgesetz, 2019, n° 83 ad art. 18 LAA; MARC HÜRZELER/CLAUDIA CADERAS, in: Marc Hürzeler/Ueli Kieser [éd.], Kommentar zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, UVG, 2018, N. 41 ad art. 18 LAA; les deux avec références). La deuxième situation est celle où l’atteinte à la capacité de gain a principalement pour origine l’âge avancé de l’assuré (variante II). Cette variante est également applicable lorsque l’âge avancé n’est pas un facteur qui a une incidence sur l’exigibilité, mais qu’il est malgré tout un obstacle à la mise en valeur de la capacité résiduelle de gain, notamment parce qu’aucun employeur n’est disposé à engager un employé présentant des atteintes à la santé pour un laps de temps très court avant l’ouverture de son droit à une rente de l’AVS (arrêts 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2; 8C_799/2019 du 17 mars 2020 consid. 3.3.2; 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.2.2; 8C_346/2013 du 10 septembre 2013 consid. 4.2; 8C_806/2012 du 12 février 2013 consid. 5.2.2; HÜRZELER/CADERAS, op. cit., N. 42 ad art. 18 LAA).

Consid. 6.2.2
L’assuré qui remplit l’un ou l’autre cas de figure ne touchera alors une rente d’invalidité que dans la mesure où une telle rente serait octroyée dans les mêmes conditions à un assuré d’âge moyen présentant les mêmes capacités professionnelles et les mêmes aptitudes personnelles. Ce système repose sur la considération qu’une même atteinte à la santé peut entraîner chez une personne âgée des répercussions bien plus importantes sur la capacité de gain que chez une personne d’âge moyen pour diverses raisons (difficultés de reclassement ou de reconversion professionnels, diminution des capacités d’adaptation et d’apprentissage), alors que l’âge en tant que tel n’est pas une atteinte à la santé dont l’assureur-accidents doit répondre (ATF 122 V 418 consid. 3a; arrêt 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.1; voir également PETER OMLIN, Die Invalidität in der obligatorischen Unfallversicherung, 1995, p. 235 ss.; ANDRÉ GHÉLEW/OLIVIER RAMELET/JEAN-BABTISTE RITTER, Commentaire de la loi sur l’assurance-accidents [LAA], 1992, p. 103). Il s’agit d’empêcher l’octroi de rentes d’invalidité qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse (cf. OMLIN, op. cit., p. 249 avec les références). On rappellera que les rentes ont un caractère viager (cf. toutefois le nouvel art. 20 al. 2ter LAA, en vigueur depuis le 1er janvier 2017; cf. consid. 8.4 infra). L’âge moyen est de 42 ans ou, du moins, se situe entre 40 et 45 ans, tandis que l’âge avancé est d’environ 60 ans; il ne s’agit toutefois que d’un ordre de grandeur et non d’une limite absolue (ATF 122 V 418 consid. 1b; arrêts 8C_205/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.4; U 106/89 du 13 août 1990 consid. 4d et e, in: RAMA 1990 n° U 115 p. 389). La comparaison des revenus d’un assuré d’âge moyen comprend aussi bien le revenu sans invalidité que le revenu d’invalide (ATF 114 V 310 consid. 2 in fine; arrêt 8C_554/2017 du 4 juillet 2018 consid. 3.3.1; OMLIN, op. cit., p. 256; voir également arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2).

Consid. 6.3
L’assuré soutient pour l’essentiel qu’il n’aurait pas repris le travail à cause de la longue période de convalescence (avec plusieurs interventions chirurgicales) après l’accident, qui n’était pas encore terminée au moment où il avait atteint l’âge de la retraite. Le fait de n’avoir pas repris une activité professionnelle après l’accident serait ainsi dû, de toute évidence, aux suites de l’accident et à ses lésions, et non à son âge. Ce point de vue ne saurait toutefois être suivi. En effet, on est en l’espèce en présence d’un cas d’application de la variante I décrite ci-dessus, vu que la capacité résiduelle de gain de l’assuré dans une activité adaptée est entière, qu’il avait atteint l’âge de la retraite avant le moment de la naissance du droit à la rente et qu’il n’exerce plus d’activité lucrative. L’assuré ne peut rien déduire de l’arrêt 8C_205/2016 du 20 juin 2016 qu’il invoque, car il y avait été examiné uniquement la présence éventuelle d’une faiblesse physiologique due à l’âge limitant la capacité de travail (cf. consid. 3.4 de l’arrêt mentionné; cf. également arrêt 8C_517/2016 du 8 mai 2017 consid. 5), ce qui tombe sous la variante II. C’est donc à juste titre que la cour cantonale a appliqué l’art. 28 al. 4 OLAA et a fixé le revenu sans invalidité sur la base du gain qu’un assuré d’âge moyen aurait pu réaliser, soit 82’355 fr.

 

Consid. 7.2.1
Le revenu d’invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l’assuré. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’ESS. Aux fins de déterminer le revenu d’invalide, les salaires fixés sur la base des données statistiques de l’ESS peuvent à certaines conditions faire l’objet d’un abattement de 25% au plus (ATF 129 V 472 consid. 4.2.3; 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Une telle déduction ne doit pas être opérée automatiquement, mais seulement lorsqu’il existe des indices qu’en raison d’un ou de plusieurs facteurs, l’intéressé ne peut mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché du travail qu’avec un résultat économique inférieur à la moyenne (ATF 148 V 174 consid. 6.3; 146 V 16 consid. 4.1; 126 V 75 consid. 5b/aa).

Consid. 7.2.2
Selon la jurisprudence, la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2; 134 V 322 consid. 5.2; 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n’y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d’appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d’invalide, compte tenu de l’ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3; 126 V 75 précité consid. 5b/bb; arrêts 8C_766/2017 du 30 juillet 2018 consid. 8.3.1; 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 3.1).

Consid. 7.3
Une réduction au titre du handicap dépend de la nature des limitations fonctionnelles présentées et n’entre en considération que si, sur un marché du travail équilibré, il n’y a plus un éventail suffisamment large d’activités accessibles à l’assuré (cf. arrêts 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.1; 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.1; 8C_118/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.3.1). Contrairement à ce que soutient l’assuré, la cour cantonale n’a pas uniquement évoqué la possibilité d’alternance des positions sous le titre de limitations fonctionnelles, mais elle a également retenu qu’il ne pouvait mettre au profit sa capacité résiduelle de travail que dans des activités légères, essentiellement sédentaires. Le fait qu’elle n’a pas répété la description détaillée des activités légères exigibles (c’est-à-dire qu’il doit éviter le port des charges supérieures à 10 kg, les montées d’escaliers, les déplacements rapides et les positions agenouillées) n’est pas pertinent et ne permet pas de conclure que le raisonnement des juges cantonaux concernant l’abattement en lien avec les limitations fonctionnelles serait contraire au droit.

Consid. 7.4
Par rapport à la question de l’abattement à cause de l’âge, le Tribunal fédéral a retenu dans un arrêt récent que l’art. 28 al. 4 OLAA commande, pour atteindre son objectif, qu’on calcule le taux d’invalidité sur la base des revenus (sans et avec invalidité) hypothétiques que pourrait obtenir un assuré d’âge moyen, et que – contrairement à l’art. 16 LPGA – l’on fasse ainsi abstraction de l’incapacité de travail due à l’âge avancé de l’assuré (arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2 et 8.5; cf. ATF 114 V 310 consid. 3b; arrêt U 60/87 du 12 avril 1988 consid. 2; OMLIN, op. cit., p. 255 et 257; consid. 6.2 supra). Or, dès lors que l’on doit s’appuyer sur les valeurs salariales d’un assuré d’âge moyen, une influence pénalisante de l’âge avancé sur le salaire ne peut par définition pas entrer en ligne de compte. Il s’ensuit qu’un abattement à cause de l’âge avancé d’un assuré ne peut pas être envisagé lorsqu’on est en présence d’un cas d’application de l’art. 28 al. 4 OLAA (arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 8.5), comme c’est le cas en l’espèce. Pour cette raison, la cour cantonale était fondée à ne pas prendre en compte le facteur de l’âge avancé de l’assuré dans la fixation de l’étendue de l’abattement.

Consid. 7.5
Finalement, l’assuré invoque son manque de formation et d’expérience professionnelle ainsi que – ayant exercé depuis des années une simple activité de concierge – un manque de polyvalence et d’adaptabilité. A ce propos, on rappellera que, selon la jurisprudence, l’absence de formation et d’expérience ne joue en règle générale pas de rôle lorsque le revenu d’invalide est déterminé en référence au salaire statistique auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives du niveau de compétence 1, comme c’est le cas en l’espèce. En effet, ce niveau de compétence de l’ESS concerne une catégorie d’emplois ne nécessitant ni formation ni expérience professionnelle spécifique (cf. arrêts 8C_118/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.3.2; 8C_175/2020 du 22 septembre 2020 consid. 4.2).

Consid. 7.6
Eu égard à l’ensemble de ces circonstances, la juridiction cantonale n’a pas excédé son pouvoir d’appréciation en confirmant l’abattement de 5% appliqué par l’assurance-accidents.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 8C_196/2022 consultable ici

 

9C_300/2021 (d) du 03.05.2022 – Obligation de cotiser : assujettissement réglementaire des revenus d’activités accessoires – 2 LPP – 49 LPP – 1j al. 1 let. c OPP 2

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_300/2021 (d) du 03.05.2022

 

Arrêt 9C_300/2021 consultable ici, résumé du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

 

Obligation de cotiser : assujettissement réglementaire des revenus d’activités accessoires / 2 LPP – 49 LPP – 1j al. 1 let. c OPP 2

 

Le règlement d’une institution de prévoyance peut prévoir que les revenus tirés d’une activité accessoire inférieurs au seuil d’accès LPP soient également soumis à l’obligation de cotiser à la prévoyance professionnelle s’ils sont réalisés auprès d’un employeur qui est affilié à la même institution de prévoyance que l’employeur de l’activité exercée à titre principal.

Une personne assurée est active auprès de deux employeurs qui sont affiliés à la même institution de prévoyance. Dans son activité principale, la personne assurée est obligatoirement assurée à la prévoyance professionnelle. L’institution de prévoyance soumet désormais également à l’obligation de cotiser le revenu de l’activité exercée à titre accessoire, qui correspond à un salaire annuel de seulement 10 000 francs. Elle le fait sur la base de son règlement, lequel prévoit que tous les revenus soumis à l’AVS réalisés par une personne assurée auprès des employeurs qui lui sont affiliés sont soumis à l’obligation de cotiser. La personne assurée s’y oppose, arguant que selon l’art. 1j, al. 1, let. c, OPP 2, les salariés exerçant une activité accessoire ne sont pas soumis à l’assurance obligatoire s’ils y sont déjà assujettis pour une activité lucrative exercée à titre principal.

Le TF considère que, dans le cas présent, le revenu de l’activité accessoire est inférieur au seuil d’entrée et qu’il n’est donc pas soumis à la prévoyance obligatoire. Cependant, il relève qu’en matière de prévoyance étendue au-delà des prestations minimales, il n’existe aucune disposition impérative concernant un salaire minimum ou l’assurance des salariés au service de plusieurs employeurs (art. 49, al. 2, LPP). Contrairement à la thèse défendue par la personne assurée, l’art. 1j, al. 1, let. c, OPP 2, fondé sur l’art. 2, al. 4, LPP, n’est donc pas obligatoirement applicable. Au contraire, la LPP autorise une couverture d’assurance plus étendue que celle prévue par la loi. Dans le cadre de la prévoyance étendue au-delà des prestations minimales, une institution de prévoyance peut également assurer des revenus qui sont inférieurs au salaire minimum de la prévoyance obligatoire (prévoyance sous-obligatoire).

Le TF arrive donc à la conclusion que le règlement d’une institution de prévoyance peut soumettre à l’obligation de cotiser les revenus d’une activité accessoire qui se situent en dessous du seuil d’entrée.

 

Arrêt 9C_300/2021 consultable ici

Résumé in Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

 

9C_31/2021 (d) du 14.04.2022, publié 148 V 234 – Obligation de cotiser : activité accessoire auprès du même employeur assujettie à l’assurance obligatoire – 2 LPP – 1j al. 1 OPP 2

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_31/2021 (d) du 14.04.2022, publié 148 V 234

 

Arrêt 9C_31/2021 consultable ici, résumé du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

ATF 148 V 234 consultable ici

 

Obligation de cotiser : activité accessoire auprès du même employeur assujettie à l’assurance obligatoire / 2 LPP – 1j al. 1 OPP 2

 

Si la personne exerce une activité accessoire pour l’employeur auprès duquel son activité principale est déjà assujettie à la prévoyance professionnelle, l’activité accessoire l’est également. Dans ce cas l’art. 1j, al. 1, let. c, OPP 2 ne s’applique pas : il y a donc lieu d’additionner les salaires obtenus pour les deux activités.

Dans le cas présent, la personne était assurée à la prévoyance professionnelle pour un taux d’activité de 100%. En outre, elle exerçait des activités accessoires mineures pour le même employeur. Le Tribunal fédéral (TF) devait examiner si les rémunérations reçues pour les activités accessoires devaient être additionnées au salaire obtenu pour l’activité principale, ou s’il s’agissait d’une activité accessoire au sens de l’art. 1j, al. 1, let. c, OPP 2, qui n’est pas assujettie à l’assurance obligatoire.

Selon le TF, l’énoncé de l’art. 2, al. 1, LPP (« d’un même employeur »), indique que pour l’addition des salaires, le seul élément déterminant est de savoir si les revenus ont été réalisés auprès du même employeur. De même, selon le message sur la LPP, le seul élément déterminant est de savoir si le salaire annuel à prendre en compte a été réalisé auprès d’un seul et même employeur. La prévoyance professionnelle vise à maintenir le niveau de vie des assurés. Pour y parvenir, il importe de prendre en compte, dans la mesure du possible, tous les salaires versés. Seuls les salaires dont la saisie entraînerait une charge disproportionnée ne doivent pas être pris en compte. Dans ce cas, les frais administratifs supplémentaires seraient disproportionnés par rapport à la faible augmentation de la couverture de prévoyance.

Lorsqu’une personne salariée exerce plusieurs activités pour le même employeur, c’est en général la même institution de prévoyance qui est compétente pour toutes les activités. Selon le TF, la charge administrative supplémentaire est alors insignifiante. Il arrive donc à la conclusion que lorsque la personne assurée exerce une activité principale et une activité accessoire auprès du même employeur, l’art. 1j, al. 1, let. c, OPP 2, n’est pas applicable. En vertu de l’art. 2, al. 1, LPP, il y a donc lieu d’additionner les salaires réalisés pour les deux activités et de payer les cotisations LPP sur la somme totale.

 

Arrêt 9C_31/2021 consultable ici

ATF 148 V 234 consultable ici

Résumé in Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 160 du 10.11.2022 disponible ici

 

8C_897/2011 (f) du 22.11.2012 – Travail principal (maçon) et activité accessoire (sur appel) / Revenu sans invalidité (y.c. activité accessoire) – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_897/2011 (f) du 22.11.2012

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Q5aawe

 

Travail principal (maçon) et activité accessoire (sur appel) / Revenu sans invalidité (y.c. activité accessoire) – 16 LPGA

 

Assuré œuvrant comme maçon (activité principale) exerçant également une activité accessoire du 15.12.2006 au 30.04.2007.

Accident survenu le 15.02.2007, où l’assuré a glissé sur la neige; en se rattrapant sur les bras, il s’est blessé à l’épaule droite. Evolution a été défavorable. Plusieurs tentatives de reprise du travail dans une activité mieux adaptée auprès de l’employeur principal ont échoué.

Octroi par la Suva d’une rente d’invalidité (invalidité 20%) dès 01.02.2011 et une IPAI de 17.5%. Le degré d’invalidité résultait de la comparaison du revenu sans invalidité de 69’862 fr. avec le revenu dans une activité adaptée exigible à 100% de 56’167 fr. fixé sur la moyenne des salaires résultant de cinq descriptions de postes de travail (DPT), en tant que collaborateur de production, ouvrier de brasserie et caissier. Par DSO du 07.06.2011, le montant du gain annuel assuré a été porté à 72’234 fr. au lieu de 69’736 fr.

 

Recours auprès de le tribunal cantonal (jugement du 25.10.2011).

 

TF

S’agissant du revenu sans invalidité, le TF rappelle que les revenus obtenus dans l’exercice d’activités accessoires sont pris en compte dans la fixation du revenu sans invalidité, si l’on peut admettre que l’intéressé aurait, selon toute vraisemblance, continué à percevoir des gains accessoires s’il était resté en bonne santé. La prise en compte de ces gains accessoires intervient sans égard au rendement et au temps consacré pour leur obtention. Elle s’étend donc aux revenus obtenus dans une activité accomplie en supplément d’un emploi exercé dans les limites d’un horaire de travail normal. A la différence du revenu d’invalide, la question de l’exigibilité ne joue pas de rôle pour la détermination du revenu sans invalidité. Pour savoir si un revenu accessoire doit être pris en compte, seul est décisif le lien entre l’atteinte à la santé et la cessation de l’activité s’y rapportant (arrêts U 66/02 du 2 novembre 2004 consid. 4.1.2, in RAMA 2005 n° U 538 p. 112, U 130/02 du 29 novembre 2002 consid. 3.2.1, in RAMA 2003 n° U 476 p. 107 et 8C_452/2009 du 26 janvier 2010 consid. 4.3 et les références).

Des pièces au dossier, il s’avère que l’activité exercée à titre accessoire découlait d’un contrat de travail de durée déterminée et que l’activité accessoire n’a été exercée que quelques mois, à des taux d’occupation variables. Le TF rejoint l’appréciation de la juridiction précédente, dans le sens où l’activité s’exerçait sur appel, sans obligation de la part de l’employeur de fournir du travail. L’activité ne présente pas de caractère régulier ; rien ne laissait supposer au degré de vraisemblance requise qu’il aurait pu à l’avenir compter sur de nouveaux engagements.

Le TF confirme le revenu sans invalidité fixé à 69’862 fr. par l’assureur LAA et confirmé par la juridiction cantonale.

 

 

Arrêt 8C_897/2011 consultable ici : http://bit.ly/1Q5aawe