Archives de catégorie : Assurance-accidents LAA

8C_310/2018 (f) du 18.12.2018 – Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité – 16 LPGA / Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT / Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité – 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_310/2018 (f) du 18.12.2018

 

Consultable ici

 

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité / 16 LPGA

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité / 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

 

Assuré, né en 1965, travaillant en qualité de peintre en bâtiment, a été victime d’une entorse de la cheville droite à la suite d’un accident survenu sur un chantier le 17.10.2014. Dans la déclaration de sinistre, l’employeur a précisé que le salaire de base contractuel (brut) de l’intéressé s’élevait à 26 fr. par heure, montant qui ne comprenait ni les indemnités pour vacances et jours fériés, ni d’autres suppléments éventuels (13ème salaire, gratification, etc.). Quant au taux d’occupation, il était irrégulier et s’élevait à quatre heures par semaine, ce qui correspondait à 10% d’un horaire de travail à plein temps (40 heures).

Le 06.11.2014, l’employeur a informé l’assurance-accidents que l’indemnité pour les jours fériés et le 13ème salaire s’élevait à 8,33%. Le 11.11.2014, l’assuré a informé l’assureur que le taux d’occupation et l’horaire de travail annoncés par l’employeur dans la déclaration d’accident étaient erronés. Il a joint à son envoi un décompte de salaire relatif au mois d’octobre 2014, lequel faisait état d’un revenu brut de 2’146 fr., montant qui correspondait à septante-six heures de travail à 26 fr. et dix indemnités forfaitaires à 17 fr. Quant au droit aux vacances brut, il s’élevait à 10,64% de 1’976 fr. Le 27.04.2015 l’assuré a fait parvenir à l’assureur LAA d’autres décomptes de salaire pour 2013 et 2014.

Par jugement du 19.12.2016, le Tribunal des Prud’hommes a condamné l’employeur à verser à l’assuré des arriérés de salaire pour la période du 03.10.2013 au 17.10.2014, soit un montant brut de 47’941 fr. 55 (436,80 h x 24 fr. 65 du 3 octobre au 31 décembre 2013 et 1’392,30 h x 26 fr. 70 du 1er janvier au 17 octobre 2014). S’y ajoutaient, pour la même période, le droit à cinq semaines de vacances annuelles (10,64% de 47’941 fr. 55), le droit à un treizième salaire (8,33% de 47’941 fr. 55), ainsi que des indemnités forfaitaires (234,5 jours à 17 fr.). Le tribunal a considéré que l’assuré n’était pas parvenu à prouver qu’il effectuait un travail à plein temps, son temps de travail devait être fixé à 39 heures hebdomadaires ou 7,8 heures par jour, ce qui correspondait à la durée minimale de travail qui pouvait être fixée par une entreprise au regard de la convention collective.

Par décision du 06.03.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a nié le droit de l’assuré à une indemnité pour atteinte à l’intégrité, ainsi qu’à une rente d’invalidité au motif que le taux d’incapacité de gain (8,4%) était insuffisant pour ouvrir droit à une telle prestation.

L’assureur LAA a déterminé le revenu sans invalidité selon la formule suivante : (26,7 + [8,33% x 26,7]) x 40 (heures) x 52 (semaines) : 12 (mois) = 5’013,51. Il a ensuite porté ce montant à 5’068 fr. 66 pour tenir compte de l’évolution nominale des salaires (1,1%). En ce qui concerne le montant du salaire horaire, l’assureur s’est référé à la classe salariale B de la Convention collective de travail du second œuvre romand 2011 (ci-après: CCT-SOR).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/178/2018 – consultable ici)

La cour cantonale a, dans un premier temps, considéré que le salaire horaire brut de 26 fr. payé par l’employeur en 2013 et en 2014, ne tenait pas compte des sommes nettes (non déclarées) que l’assuré indiquait avoir déjà reçues en parallèle et que le nombre d’heures de travail déclarées mensuellement ne correspondait pratiquement jamais à un 10%. En ce qui concerne le salaire horaire, la cour cantonale a considéré que l’assuré appartenait à la classe salariale B au plus tard à partir du 01.01.2014, ce qui correspondait, pour le canton de Genève, à un salaire horaire minimum de 26 fr. 70, montant augmenté de 30 centimes pour les travailleurs des classes CE, A, B et C à partir du 01.03.2016. La cour cantonale a tenu compte d’un salaire horaire de 27 fr., d’un treizième salaire (8,33%), d’une indemnité pour cinq semaines de vacances (10,64%), d’une indemnité pour neuf jours fériés (3,96%) et elle a fixé à 62’416 fr. le salaire annuel en 2016 selon la formule : (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 40 (heures) x (52 – 5 [semaines]).

Dans un second temps, la cour cantonale a procédé à une parallélisation du revenu de 62’416 fr. et du salaire statistique usuel de la branche, soit 69’982 fr. Constatant que ce revenu usuel de la branche dépassait de plus 5% le salaire qu’aurait réalisé l’assuré dans son dernier emploi en 2016 (62’416 fr.), les juges cantonaux ont parallélisé les revenus à comparer à concurrence de la part qui excédait le taux minimal déterminant de 5%, ce qui donne en l’occurrence un revenu sans invalidité de 66’483 fr. 20 (69’982 fr. 30 – [5% x 69’982 fr. 30]).

Par jugement du 06.03.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision et reconnaissant le droit à une rente d’invalidité de 16% à partir du 01.01.2017.

 

TF

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité

Dans l’arrêt 8C_520/2016 du 14 août 2017 consid. 4.3.2, le taux de 3,58% correspondait bien à 9 jours fériés par année mais, à la différence de la présente affaire où l’assuré avait droit à 5 semaines de vacances, soit 25 jours, l’assuré bénéficiait de 7,3 semaines de vacances, soit 36,5 jours par année. Or, compte tenu de 5 semaines de vacances et sur la base de la méthode de calcul de la cour cantonale, 9 jours fériés par année correspondent bel et bien à un taux de 3,96%. Cela étant, le calcul du revenu sans invalidité doit néanmoins être rectifié afin de ne pas tenir compte deux fois des jours fériés et être porté à 60’116 fr. au lieu de 62’416 fr., selon la formule: (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 8 (heures) x 226 jours ouvrés (52 [semaines] x 5 [jours ouvrés] – 25 [jours de vacances] – 9 [jours fériés]).

 

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

La jurisprudence n’exige pas que le revenu sans invalidité dépasse le minimum CN/CCT. Il suffit qu’il ne soit pas inférieur au salaire moyen tel que l’entend la jurisprudence en matière de parallélisation des revenus à comparer (cf. arrêts 8C_721/2017 du 26 septembre 2018 consid. 3.4.2; 8C_537/2016, déjà cité, consid. 5).

En l’espèce, le revenu sans invalidité de l’assuré (60’116 fr.) correspondant au salaire minimum selon la CCT-SOR, il n’y a pas lieu de paralléliser les revenus à comparer par une majoration du revenu sans invalidité. Il n’est pas décisif, au regard de la jurisprudence, que les salaires prévus dans une CCT peuvent être situés plus ou moins en-dessous des salaires moyens de la branche concernée.

 

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité

Le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s’ils représentent un élément important de la rémunération du travail (art. 5 al. 2 LAVS). Selon l’art. 9 RAVS, les frais généraux sont les dépenses résultant pour le salarié de l’exécution de ses travaux ; le dédommagement pour frais encourus n’est pas compris dans le salaire déterminant (al. 1) ; ne font pas partie des frais généraux les indemnités accordées régulièrement pour le déplacement du domicile au lieu de travail habituel et pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel ; ces indemnités font en principe partie du salaire déterminant (al. 2).

Selon l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR, dans sa teneur au 01.01.2017, les déplacements de l’atelier aux chantiers occasionnant des frais supplémentaires pour le travailleur donnent droit à différentes indemnités. Pour le canton de Genève uniquement, l’art. 23 al. 2 CCT-SOR dispose qu’une indemnité forfaitaire par jour de travail de 17 fr. 50, respectivement 18 fr. dès le 01.01.2018, de transport professionnel, de repas pris à l’extérieur et d’outillage est due à tous les travailleurs ; elle est destinée à couvrir totalement ou partiellement les frais subis par les travailleurs.

Il ressort de l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR que les indemnités prévues servent à couvrir les frais supplémentaires subis par le travailleur en raison des déplacements de l’atelier aux chantiers et des repas pris en dehors du domicile. Elles ne constituent donc pas des indemnités allouées régulièrement au salarié pour ses déplacements de son domicile au lieu de son travail habituel, ni des indemnités pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel. C’est pourquoi elles représentent incontestablement des indemnités pour frais encourus non comprises dans le salaire déterminant (art. 9 RAVS). Le fait que dans le canton de Genève, le remboursement de ces frais supplémentaires est réglé de manière forfaitaire à l’art. 23 al. 2 CCT-SOR ne change rien. Sur ce point, les faits de la présente affaire sont ainsi comparables à la situation jugée dans l’arrêt 8C_964/2012, quoi qu’en pense l’assuré.

Il n’y a pas lieu d’ajouter au revenu sans invalidité, déterminant pour la comparaison des revenus, l’indemnité forfaitaire allouée en vertu de l’art. 23 ch. 2 CCT-SOR.

 

En conséquence, le TF retient, au titre du revenu sans invalidité, un salaire de 60’116 fr. Le revenu d’invalide de 55’704 fr. n’étant pas contesté, on obtient un taux d’invalidité de 7%, soit un taux insuffisant pour ouvrir droit à une rente.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents et annule le jugement cantonal.

 

 

Arrêt 8C_310/2018 consultable ici

 

 

8C_559/2018 (i) du 26.11.2018 – Dies a quo du délai de recours – 60 LPGA – 39 LPGA / Notification de la décision sur opposition par Courrier A Plus

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_559/2018 (i) du 26.11.2018

NB : traduction personnelle

Consultable ici

 

Dies a quo du délai de recours / 60 LPGA – 39 LPGA

Notification de la décision sur opposition par Courrier A Plus

 

Le 15.01.2014, l’assuré, né en 1981, a glissé et a tapé la région lombaire contre le bord d’une marche. Par décision du 25.11.2014, l’assurance-accidents a mis fin à son obligation de prester à compter du 01.12.2014.

Par décision du 09.11.2017, confirmée sur opposition le 02.03.2018, l’assurance-accidents a nié que les conditions d’un réexamen sont réunies. L’assureur-accidents a notifié sa décision sur opposition du 02.03.2018 au moyen du système Courrier A Plus.

 

Procédure cantonale

Sur la base de l’extrait Track & Trace, le tribunal cantonal a jugé que la décision sur l’opposition du 02.03.2018 a été envoyée le même jour et déposée le samedi 03.03.2018 à 05h55 dans la case postale du représentant de l’assuré. En conséquence, la décision sur opposition a été notifiée le 03.03.2018. Le délai de recours de 30 jours selon l’art. 38 al. 1 LPGA a commencé le dimanche 04.03.2018. Selon les premiers juges, après prise en compte de la suspension du délai au sens de l’art. 38 al. 4 LPGA, le délai a expiré le mardi 17.04.2018. Le recours envoyé le 18.04.2018 devait être considéré comme tardif.

Par jugement du 20.06.2018, le tribunal a déclaré irrecevable pour tardivité le recours du 18.04.2018.

 

TF

Conformément à l’art. 60 al. 1 LPGA, un recours doit être formé dans les 30 jours suivant la notification de la décision ou de la décision contre laquelle le recours est rejeté. Comme il s’agit d’un délai légal, il ne peut être prolongé (art. 40 al. 1 LPGA). Selon l’art. 39 al. 1 en liaison avec l’art. 60 al. 2 LPGA, le délai légal de 30 jours n’est respecté que si le recours est déposé au plus tard le dernier jour du délai au tribunal des assurances ou La Poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse. Si ce délai n’est pas utilisé, la décision administrative devient (formellement) définitive et le tribunal cantonal doit déclarer irrecevable tout recours introduit tardivement (ATF 134 V 49 consid. 2 p. 51).

Dans le système postal Courrier A Plus, l’enveloppe porte un numéro analogue à un envoi recommandé et porte l’indication A Plus. Toutefois, contrairement au courrier recommandé, le destinataire ne certifie pas que l’envoi a été reçu. En conséquence, en cas d’absence, le destinataire n’est pas informé par un accusé de réception. La notification est certifiée par voie électronique lorsque l’envoi est enregistré dans la boîte postale ou la boîte aux lettres du destinataire. Grâce au système Track & Trace de La Poste Suisse, l’historique de l’envoi peut être suivi jusqu’à son arrivée dans la sphère d’influence du destinataire. Dans ce cas, le système Track & Trace n’indique toutefois pas directement que l’enveloppe est effectivement entrée dans la sphère d’influence du destinataire, mais seulement que la Poste Suisse a certifié la livraison de l’envoi dans son système de suivi. Nous pouvons donc uniquement déduire que l’enveloppe a été déposée dans la boîte aux lettres ou la boîte postale du destinataire. En l’absence d’un certificat délivré par le système Track & Trace, on ne peut conclure qu’une personne a pris possession de l’envoi en main et encore moins qu’elle en a pris connaissance (ATF 142 III 599 consid. 2.2 p. 602 et les références).

Le Tribunal fédéral s’est déjà penché à plusieurs reprises sur le système de distribution Courrier A Plus. Dans ces cas, il a décidé que la notification déterminante pour le début du délai de recours était le dépôt de l’envoi dans la boîte aux lettres ou la boîte postale du destinataire, même si ce dépôt a eu lieu un samedi. Le fait que l’intéressé ait retiré sa correspondance le lundi suivant a été explicitement considéré comme non pertinent par le Tribunal fédéral (arrêts 2C_1126/2014 du 20 février 2015 consid. 2.2 et les références ; voir aussi arrêts 9C_90/2015 du 2 juin 2015 consid. 3.4 et 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3.2 et leurs références).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral sur le système de distribution Courrier A Plus, une erreur dans la notification postale ne doit pas être a priori exclue. Toutefois, une livraison incorrecte ne doit pas être présumée, mais peut être envisagée si, sur la base de toutes les circonstances, elle semble plausible. Elle doit être fondée sur la description des faits du destinataire, qui soulève une erreur de distribution postale, si elle est raisonnable et semble avoir une certaine probabilité, compte tenu du fait que la bonne foi du destinataire doit être présumée (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 p. 603 en référence aux arrêts 9C_90/2015 consid. 3.2 et 2C_570/2011 consid. 4.3. in StR 67/2012 p. 301). Les considérations totalement hypothétiques du destinataire, selon lesquelles l’enveloppe a été insérée dans la boîte aux lettres du voisin (ou du tiers), ne sont pas utiles à son argumentation (arrêt 9C_90/2015 consid. 3.2 et les références).

 

Dans la réponse de l’assureur du 05.06.2018 au recours, la question de son délai de réponse n’a pas été examinée. Le 13.06.2018, l’assureur-accidents a informé le tribunal cantonal que la décision sur opposition du 02.03.2018 avait été déposée dans la case postale du représentant de l’assuré le 03.03.2018. Le délai de recours, en tenant compte de la suspension des délais, avait expiré le 17.04.2018, de sorte que le recours cantonal devait être déclaré irrecevable. Le tribunal cantonal a communiqué à l’assuré ce courrier le 20.06.2018, de même que le jugement cantonal. Dans la mesure où le tribunal cantonal n’a pas permis à l’assuré de s’exprimer avant le prononcé de l’arrêt attaqué, tant sur la réponse du 05.06.2018 que sur la lettre du 13.06.2018, notamment en ce qui concerne l’opportunité du recours, il a violé le droit à être entendu. Ce faisant, la cour cantonale a empêché l’assuré d’apporter des motifs qui pourraient renverser la présomption de la correcte notification postale.

Dans le cas d’espèce, il y a violation grave du droit d’être entendu et le renvoi de l’affaire à l’autorité précédente ne constitue pas un formalisme inutile : cela conduit à l’annulation du jugement cantonal. Le tribunal cantonal doit donc garantir le droit d’être entendu de l’assuré et doit également traiter les demandes de preuves qui lui sont soumises.

 

Le TF admet le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_559/2018 consultable ici

 

 

8C_62/2018 (d) du 19.09.2018 – destiné à la publication – Traitements médicaux selon 21 al. 1 lit. c et d LAA sont des prestations durables – Applicabilité de l’art. 17 al. 2 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_62/2018 (d) du 19.09.2018, destiné à la publication

 

NB : traduction personnelle de l’arrêt

 

Consultable ici

 

Traitement médical après fixation de la rente d’invalidité

Traitements médicaux selon 21 al. 1 lit. c et d LAA sont des prestations durables – Applicabilité de l’art. 17 al. 2 LPGA

Traitements médicaux accordés dans la même décision que la rente – 21 al. 1 lit. c LAA – Révision uniquement sous l’angle de l’art. 17 al. 2 LPGA

 

Assuré, né en 1976, a été victime d’un accident de moto le 26.06.2007 et a subi un polytraumatisme avec de multiples lésions à l’extrémité inférieure gauche et une contusion à l’épaule gauche.

Par décision du 17.06.2013, l’assurance-accidents a accordé, outre une rente d’invalidité fondée sur un taux de 39% et une IPAI, la prise en charge du traitement médical au sens de l’art. 21 LAA. La décision précise que, selon l’avis des experts, des contrôles médicaux réguliers annuels ou bisannuels ainsi qu’un traitement régulier de physiothérapie ambulatoire (actuellement trois séances hebdomadaires) sont nécessaires.

Début janvier 2017, l’assurance-accidents a mis en œuvre une expertise médicale. Par décision du 27.03.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a limité la prise en charge du traitement médical, se référant aux mesures recommandées par le centre d’expertise, à savoir : trois séries de neuf séances de physiothérapie par an ainsi que des traitements ostéopathiques, initialement une à deux par semaine, au maximum une par mois.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 15.12.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assuré a droit à un traitement médical aussi longtemps que l’on peut s’attendre à ce que la poursuite du traitement médical améliore sensiblement son état de santé.

Le droit aux prestations temporaires sous forme de traitement médical et d’indemnités journalières cesse lorsque le dossier est clos et le droit à la rente doit être examiné (cf. art. 19 al. 1 LAA ; ATF 134 V 109 consid. 4.1 p. 114).

Lorsque la rente a été fixée, les prestations pour soins et remboursement de frais (art. 10 à 13) sont accordées à son bénéficiaire que dans les cas déterminés au sens de l’art. 21 al. 1 LAA, à savoir en cas de maladie professionnelle (lit. a), de rechutes ou de séquelles tardives et que des mesures médicales amélioreraient notablement la capacité de gain ou empêcheraient une notable diminution de celle-ci (lit. b), si l’assuré a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (lit. c) ou pour améliorer notablement ou prévenir une notable détérioration de son état de santé en cas d’incapacité de gain (lit. d). Dans les autres cas, si, d’une part, la poursuite d’un traitement médical ne peut plus entraîner une amélioration significative au sens de l’art. 19 al. 1 LAA et, d’autre part, les conditions de l’art. 21 al. 1 LAA ne sont pas remplies, l’assureur accidents ne doit plus fournir de traitement médical ; il est remplacé par l’assurance-maladie obligatoire (ATF 140 V 130 consid. 2.2 p. 132 ; 134 V 109 consid. 4.2 p. 115).

 

Après analyse de la situation, le Tribunal fédéral arrive à la conclusion qu’en ce qui concerne les prestations de soins fondées sur l’art. 21 al. 1 lit. c et d LAA, LAA, quel que soit le type de prestation en question, une relation de prestations durables doit être présumée [consid. 3.3.2].

En conséquence, si les prestations de soins et les remboursements de frais accordés en vertu de l’art. 21 al. 1 lit. c LAA sont également considérées comme des prestations durable, de même que ceux accordés en vertu de l’art. 21 al. 1 lit. d LAA, leur annulation ou leur adaptation nécessite un motif de révision conformément à l’art. 17 al. 2 LPGA [consid. 3.4].

En l’espèce, le tribunal cantonal a considéré que l’assurance-accidents n’était pas revenu sur sa décision du 17.06.2013 de continuer à prendre les mesures nécessaires pour maintenir la capacité de gain. La prétention au titre de l’art. 21 al. 1 lit. c LAA n’a pas changé, mais uniquement des prestations de soins nécessaires ont été adaptées. Le droit au traitement médical accordé à l’assuré, bien qu’il n’ait pas été révoqué, est considérablement réduit par rapport à la mesure expressément reconnue dans la décision d’octroi de prestations du 17.06.2013, sans la preuve d’une modification substantielle des faits par rapport à l’octroi de prestations [consid. 4].

Selon les constatations du tribunal cantonal, l’assuré a besoin de diverses mesures pour maintenir sa capacité de gain. Ni l’assurance-accidents, ni le tribunal cantonal n’ont toutefois tranché la question de savoir si la différence entre les prestations de soins médicaux accordées par la décision du 17.06.2013 et le besoin nettement moins important constaté aujourd’hui est due à une modification notable des faits de l’affaire examinée ou à une simple appréciation différente d’un fait resté essentiellement le même (qui ne donnerait pas lieu à un motif de révision : ATF 131 V 84 consid. 3 p. 89 ; arrêt 8C_481/2013 consid. 2.2, non publié in ATF 139 V 585, mais in : SVR 2014 UV Nr. 7 p. 21 ; arrêt 8C_248/2017 du 28 mai 2018 consid. 3.2) [consid. 5].

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et la décision de l’assurance-accidents et renvoie l’affaire à cette dernière pour nouvelle décision au sens des considérants.

 

 

Arrêt 8C_62/2018 consultable ici

 

 

8C_50/2018 (d) du 20.07.2018 – Traitement médical après fixation de la rente d’invalidité – 21 al. 1 lit. c LAA / Fin de la prise en charge des séances hebdomadaires de physiothérapie après 27 ans

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_50/2018 (d) du 20.07.2018

 

NB : traduction personnelle de l’arrêt

Consultable ici

 

Traitement médical après fixation de la rente d’invalidité / 21 al. 1 lit. c LAA

Arrêt de la prise en charge de séances hebdomadaires de physiothérapie après 27 ans

 

Assuré, né en 1964, vendeur depuis le 01.12.1985 au sein d’un magasin, a été victime d’un accident de la circulation le 24.09.1987. Il a subi un polytraumatisme avec traumatisme thoracique, fracture de la diaphyse fémorale à droite, luxation du coude droit, commotion cérébrale, rupture aortique traumatique et contusion de l’œil droit. Par décision du 01.06.1994, l’assurance-accidents a octroyé une rente d’invalidité à partir du 01.03.1994 pour un taux d’invalidité de 33,33%. Par la suite, l’assurance-accidents a porté le taux d’invalidité d’abord à 50% (décision du 09.09.1994), puis à 70% (décision du 05.10.2004, confirmée sur opposition le 10.02.2005).

En plus de la rente d’invalidité, l’assurance-accidents prenait en charge les frais pour les traitements physiothérapeutiques hebdomadaires. Le médecin d’arrondissement a nié la nécessité médicale d’autres traitements physiothérapeutiques réguliers sur la base de son examen du 23.09.2015 et a déclaré que la personne assurée pouvait effectuer les exercices nécessaires de manière autonome à domicile afin de maintenir son état antérieur, et qu’elle devrait être familiarisée avec ces exercices après 27 ans de physiothérapie.

Sur la base de ce rapport, l’assurance-accidents a, par décision du 20.01.2016 confirmée sur opposition, refusé la prise en charge des frais de traitement physiothérapeutique régulier à partir du 01.01.2016, les conditions de l’art. 21 LAA n’étant plus remplies. L’assurance-accidents a toutefois accepté de prendre en charge une série de neuf séances de physiothérapie par an afin que le programme à domicile puisse être revu et adapté si nécessaire.

 

Procédure cantonale (UV.2016.00140 consultable ici)

Le tribunal cantonal s’est essentiellement fondé sur l’évaluation du médecin d’arrondissement. L’assuré peut faire activement les exercices correspondants à la maison tous les jours afin de maintenir l’état antérieur. Ceux-ci devraient lui être familiers après plus de 27 ans de physiothérapie. D’un point de vue médical, il n’y a plus d’indication pour la physiothérapie dirigée.

Le tribunal cantonal a en outre estimé que l’argument de l’assuré selon lequel il ne pouvait effectuer les exercices que sous surveillance et contrôle constants n’était pas convaincant compte tenu de la durée de la thérapie, d’autant que, d’après ses propres déclarations et celles du personnel médical concerné, il pouvait également exercer diverses activités (notamment sportives) en dehors des séances thérapeutiques.

L’objection du médecin traitant, spécialiste en rhumatologie et médecine interne, selon laquelle seules des mesures manuelles aideraient à lutter contre les fortes tensions musculaires, a une certaine justification, puisque l’assuré ne peut se masser lui-même. Toutefois, pour des considérations juridiques, cette circonstance n’est pas pertinente. En effet, bien que le traitement soit incontestablement bénéfique pour l’assuré et améliore son bien-être, il n’a pas été démontré que ces mesures sont nécessaires pour maintenir sa capacité de gain restante. Le fait que l’assuré ait besoin d’un traitement et de soins permanents pour maintenir sa capacité de gain n’a été invoqué par aucun médecin spécialiste et ne découle ni des autres dossiers ni des conclusions de l’assuré. Au contraire, lui-même ne parlait que du maintien du bien-être (ou autre). Le tribunal de première instance a donc considéré que les conditions d’exécution de l’art. 21 al. 1 let. c LAA n’étaient pas remplies.

Par jugement du 29.11.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assuré a droit à un traitement médical aussi longtemps que l’on peut s’attendre à ce que la poursuite du traitement médical améliore sensiblement son état de santé.

Le droit aux prestations temporaires sous forme de traitement médical et d’indemnités journalières cesse lorsque le dossier est clos et le droit à la rente doit être examiné (cf. art. 19 al. 1 LAA ; ATF 134 V 109 consid. 4.1 p. 114).

Lorsque la rente a été fixée, les prestations pour soins et remboursement de frais (art. 10 à 13) sont accordées à son bénéficiaire que dans les cas déterminés au sens de l’art. 21 al. 1 LAA, à savoir en cas de maladie professionnelle (lit. a), de rechutes ou de séquelles tardives et que des mesures médicales amélioreraient notablement la capacité de gain ou empêcheraient une notable diminution de celle-ci (lit. b), si l’assuré a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (lit. c) ou pour améliorer notablement ou prévenir une notable détérioration de son état de santé en cas d’incapacité de gain (lit. d). Dans les autres cas, si, d’une part, la poursuite d’un traitement médical ne peut plus entraîner une amélioration significative au sens de l’art. 19 al. 1 LAA et, d’autre part, les conditions de l’art. 21 al. 1 LAA ne sont pas remplies, l’assureur accidents ne doit plus fournir de traitement médical ; il est remplacé par l’assurance-maladie obligatoire (ATF 140 V 130 consid. 2.2 p. 132 ; 134 V 109 consid. 4.2 p. 115).

 

L’assuré objecte que l’assurance-accidents a pris en charge les traitements hebdomadaires de physiothérapie pendant 27 ans.

Selon le TF, il ne peut être déduit des seuls remboursements de frais antérieurs que l’assurance-accidents soit obligé de le faire à l’avenir. D’autre part, la situation de l’assuré n’entre pas dans le champ d’application de l’art. 17 al. 2 LPGA. Il n’y a en effet pas de prestations de longue durée, au titre de cette disposition, même s’il a été versé sur de longues années (voir ATF 133 V 57 consid. 6, p. 61 ss ; arrêt 8C_179/2014 du 16 mars 2015 consid. 4.3). En outre, les garanties de prise en charge pour les traitements hebdomadaires avaient été accordés pour une période limitée, la dernière fois pour la période allant du 23.07.2014 au 31.07.2015, ce qui donnait à l’assurance-accidents la possibilité de revoir les bases des demandes avant le renouvellement de la garantie de prise en charge et d’ajuster ou de cesser les prestations si nécessaire.

La conclusion de la juridiction cantonale selon laquelle un programme à domicile (accompagné thérapeutiquement) est suffisant pour maintenir l’état antérieur et donc aussi la capacité de gain restante et qu’un traitement physiothérapeutique hebdomadaire n’est plus nécessaire à cette fin n’est donc pas contraire au droit fédéral. Elle a donc nié à juste titre l’obligation de l’assureur-accidents de prendre en charge les traitements physiothérapeutiques hebdomadaires réclamés.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_50/2018 consultable ici

 

 

Lettre circulaire AI n° 384 : Nouveau tarif de l’aide et des soins à domicile le 1er janvier 2019

Lettre circulaire AI n° 384 : Nouveau tarif de l’aide et des soins à domicile le 1er janvier 2019

 

LCAI 384 du 09.01.2019 consultable ici

 

L’assurance-accidents, l’assurance militaire et l’assurance-invalidité ont conclu avec l’association Aide et soins à domicile Suisse et l’Association Spitex privée Suisse (ASPS) une convention tarifaire sur l’aide et les soins à domicile, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2019. Vous trouverez la convention et ses annexes, le tarif et la liste des organisations d’aide et de soins à domicile signataires sur le site Internet de la Commission des tarifs médicaux LAA (CTM : https://www.mtk-ctm.ch/fr/tarifs/tarif-aide-et-soins-a-domicile/). Il s’agit d’un tarif horaire pour l’évaluation en francs suisses des prestations individuelles qui sont imputées sur le code tarifaire 533. Il remplace le tarif AI de 98 francs par heure pour les prestations d’évaluation et de conseil et de 93 francs par heure pour les prestations d’examen et de traitement, qui est valable jusqu’au 31 décembre 2018.

 

Étendue des prestations

La liste des prestations qui figure dans la lettre circulaire AI no 362 reste valable, à une exception près. Pour la prestation « Détermination et documentation des soins nécessaires et de l’environnement du patient (de l’assuré), et planification des mesures nécessaires (= diagnostic et objectifs des soins) en accord avec le médecin, l’assuré et d’autres services éventuellement impliqués (y compris détermination ultérieure des besoins et consultations médicales par téléphone) », le temps maximal pouvant être pris en charge s’élève désormais à huit heures (au lieu de cinq). Les « explications concernant le tableau » et la « délimitation d’avec l’assurance-maladie, API / SSI / surveillance » contenues dans la lettre circulaire AI no 362 restent également valables.

Le tarif comprend dorénavant des indemnités forfaitaires de dérangement, mais celles-ci ne peuvent être facturées que si une intervention d’aide et de soins à domicile déjà planifiée ne peut être effectuée en raison d’une hospitalisation imprévue ou urgente de l’assuré. Les organisations d’aide et de soins à domicile n’ont pas droit à une indemnisation de la part des assureurs pour les interventions qui n’avaient pas été planifiées ou qui sont annulées pour d’autres raisons.

 

Parties à la convention

Le nouveau tarif de l’aide et des soins à domicile ne peut être appliqué que par les organisations signataires. Il ne s’applique pas aux infirmières et infirmiers indépendants. C’est la convention tarifaire conclue avec l’Association suisse des infirmières et infirmiers (ASI) qui reste valable dans ce cas. Cette convention peut également être consultée sur le site Internet de la CTM : https://www.mtk-ctm.ch/fr/tarifs/tarif-des-soins-infirmiers-sbk-asi/). Veuillez prendre note que tous les membres actifs des associations cantonales Aide et soins à domicile et de l’ASPS ont automatiquement le statut d’organisation contractuelle (art. 3 de la convention tarifaire). Les dispositions de l’art. 24, al. 3, du règlement sur l’assurance-invalidité (RAI) s’appliquent aux organisations d’aide et de soins à domicile qui n’adhèrent pas à la convention tarifaire (organisations non contractuelles).

 

Facturation

Sur la facture, l’organisation d’aide et de soins à domicile indiquera pour chaque prestation le numéro GLN de l’infirmière ou de l’infirmier qui a fourni la prestation ou, dans certains cas, qui a supervisé le travail d’une infirmière ou d’un infirmier en formation. Cette personne doit toujours être titulaire d’un diplôme de niveau tertiaire tel qu’indiqué à l’annexe 1 des dispositions d’exécution. Les professionnels titulaires d’un diplôme de niveau tertiaire sont inscrits au Registre national des professions de la santé (NAREG ; https://www.nareg.ch/). Les offices AI peuvent ainsi vérifier leurs qualifications, le cas échéant de façon manuelle. En outre, une interface automatisée entre le registre NAREG et la suite Sumex sera mise en place afin que la Centrale de compensation puisse, à l’avenir, vérifier automatiquement que les prestations sont fournies par des personnes autorisées à travailler à la charge de l’AI.

 

Réglementation transitoire du 1er janvier au 30 juin 2019

En raison de difficultés techniques apparues lors de la mise en place, la facturation électronique n’est pas encore possible au 1er janvier 2019 ; on continuera donc pour un temps à établir des factures papier. Toutes les organisations d’aide et de soins à domicile ne seront pas non plus en mesure d’indiquer sur la facture le numéro GLN avant le 30 juin 2019. Il est néanmoins impératif que les prestations fournies à partir du 1er janvier 2019 soient facturées conformément au nouveau tarif (y c. indication des positions tarifaires) et soient fournies par du personnel qualifié au sens de l’art. 2 de la convention tarifaire et de l’art. 2 des dispositions d’application. En cas de doute, dans un cas particulier, sur la qualification du personnel, il est possible d’exiger de l’organisation d’aide et de soins à domicile qu’elle fournisse la preuve de celle-ci. À partir du 1er juillet 2019, la facturation devra se faire exclusivement par voie électronique, avec indication du numéros GLN.

 

 

LCAI 384 du 09.01.2019 consultable ici

 

 

8C_324/2018 (f) du 04.12.2018 – destiné à la publication – Couverture d’assurance-accidents d’un assuré placé à l’essai par l’office AI – 1a al. 1 LAA – 18a LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_324/2018 (f) du 04.12.2018, destiné à la publication

 

Consultable ici

 

Couverture d’assurance-accidents d’un assuré placé à l’essai par l’office AI – 1a al. 1 LAA – 18a LAI

 

A.__, né en 1961, chauffeur-livreur, a présenté une incapacité totale de travail depuis le 21.11.2013 en raison de lombosciatalgies. Suite au dépôt d’une demande de prestations de l’assurance-invalidité, l’office AI lui a accordé le 09.02.2016 une mesure d’orientation professionnelle du 01.03.2016 au 31.05.2016 sous la forme d’un stage d’aide-magasinier auprès de B.__ SA (devenue par la suite C.__ SA). Par décision datée du 09.06.2016, l’office AI a accordé à l’assuré un placement à l’essai de l’assuré dans cette société en qualité d’aide-magasinier du 01.06.2016 au 31.08.2016, assorti des indemnités journalières correspondantes pour la même période. La mesure a été reconduite pour trois mois supplémentaires.

Le 18.10.2016, l’assuré, alors qu’il était à son travail, est tombé d’une échelle d’une hauteur d’environ trois mètres. Il a subi une fracture de la vertèbre D11. L’assurance-invalidité a interrompu le versement des indemnités journalières au 18.10.2016.

Par décision du 26.01.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents de la société C.__ SA a refusé de prendre en charge le cas. Elle a retenu que l’intéressé avait bénéficié de la couverture d’assurance LAA du 01.03.2016 au 31.05.2016 (soit durant la mesure d’orientation professionnelle) et que l’assurance avait cessé de déployer ses effets trente jours après la fin de cette mesure. Quant au placement à l’essai, il n’ouvrait pas un droit à la couverture d’assurance étant donné que A.__ n’était ni salarié de C.__ SA ni en stage auprès de celle-ci.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 97/17 – 24/2018 – consultable ici)

Par jugement du 15.03.2018, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

La question est de savoir si A.__ bénéficiait d’une couverture d’assurance LAA au moment où il a été victime d’un accident dans l’entreprise au sein de laquelle il était placé (placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI).

 

Assurés à titre obligatoire

Selon l’art. 1a al. 1 LAA, sont assurés à titre obligatoire conformément à la présente loi, les travailleurs occupés en Suisse, y compris les travailleurs à domicile, les apprentis, les stagiaires, les volontaires, ainsi que les personnes travaillant dans des écoles de métiers ou des ateliers protégés (let. a). Conformément à la délégation que lui confère l’art. 1a al. 2 LAA, le Conseil fédéral a étendu l’assurance obligatoire à certaines catégories de personnes (art. 1a OLAA), par exemple les personnes appartenant à une communauté religieuse ou les personnes détenues (sous certaines conditions) ou encore les personnes exerçant une activité chez un employeur aux fins de se préparer au choix d’une profession (voir à ce dernier propos : ATF 124 V 301).

Selon la jurisprudence, est réputé travailleur au sens de l’art. 1a al. 1 LAA celui qui, dans un but lucratif ou de formation et sans devoir supporter de risque économique propre, exécute durablement ou provisoirement un travail pour un employeur, auquel il est plus ou moins subordonné. Sont ainsi visées avant tout les personnes au bénéfice d’un contrat de travail au sens des art. 319 ss CO ou qui sont soumises à des rapports de service de droit public (ATF 141 V 313 consid. 2.1 p. 314; 115 V 55 consid. 2d p. 58 s.). Cependant, l’existence d’un contrat de travail ne constitue pas une condition pour la reconnaissance de la qualité de travailleur au sens de l’art. 1a al. 1 LAA. En l’absence d’un contrat de travail ou de rapports de service de droit public, la qualité de travailleur doit être déterminée à la lumière de l’ensemble des circonstances économiques du cas d’espèce. Dans cette appréciation, il convient de ne pas perdre de vue que la LAA, dans la perspective d’une couverture d’assurance la plus globale possible, inclut également des personnes qui, en l’absence de rémunération, ne peuvent pas être qualifiées de travailleurs tels que les volontaires ou les stagiaires. La notion de travailleur au sens de l’art. 1a LAA est par conséquent plus large que celle que l’on rencontre en droit du travail (ATF 141 V 313 consid. 2.1 p. 315 et les références; RIEMER-KAFKA/KADERLI, Kommentar zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, [Hürzeler/Kieser éd.], 2018, n. 28 ss).

En application de ces principes, le Tribunal fédéral a jugé, par exemple, qu’une étudiante en médecine qui effectue un stage (« Einzeltutoriat ») dans un cabinet médical est obligatoirement assurée contre les accidents (ATF 141 V 313). Il en est allé de même d’une bénéficiaire de l’aide sociale qui était placée à l’essai et sans être rémunérée dans une entreprise de nettoyage (arrêt 8C_302/2017 du 18 août 2017 consid. 4.5). Est également assurée une personne occupée sur la base d’un volontariat dans une université pour un projet de recherche en Afrique, sans être au bénéfice d’un contrat de travail et sans qu’un salaire n’ait été convenu (arrêt 8C_183/2014 du 22 septembre 2014). Plus généralement, le Tribunal fédéral a également jugé que les personnes qui travaillent à l’essai sans recevoir de salaire chez un employeur sont assurées par ce dernier, dès lors que celui-ci a un intérêt économique à la prestation accomplie (SVR 2012 UV n° 9 p. 32 [8C_503/2011] consid. 3.5). Il a enfin été jugé qu’une adolescente de 15 ans, qui travaillait pendant ses loisirs dans un centre équestre et qui, pour seule contrepartie, avait le droit de monter à cheval, était obligatoirement assurée contre les accidents (ATF 115 V 55).

 

Placement à l’essai

Le placement à l’essai vise essentiellement à évaluer la capacité de travail réelle de l’assuré sur le marché primaire de l’emploi. Cette mesure vise à augmenter les chances de réinsertion pour de nombreux assurés. Elle concerne ceux d’entre eux qui sont aptes à la réadaptation et dont les capacités sont réduites pour raison de santé. Le placement s’inscrit dans un processus global de réadaptation sur le marché primaire de l’emploi. S’il débouche sur un contrat de travail, une allocation d’initiation au travail (art. 18b LAI) peut être accordée à l’entreprise (voir Michel Valterio, Commentaire de la Loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, p. 256 s.; voir aussi MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3ème éd. 2014, n. 1 ad art. 18b LAI).

Il n’y a pas de raison de traiter différemment, sous l’angle de l’assujettissement à l’assurance-accidents obligatoire, une mesure de placement à l’essai d’un stage ou d’un volontariat. Sous ce même angle, on ne voit pas ce qui justifierait une différence entre une orientation professionnelle (art. 15 LAI) sous la forme d’un essai au travail (durant lequel l’assuré est soumis à la LAA) et un placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI qui en était en l’espèce la continuation. Il existe d’autant moins de raison d’opérer une distinction que la mesure de placement à l’essai présente bon nombre de caractéristiques qui sont propres au contrat individuel de travail, comme cela ressort de l’énumération figurant à l’art. 18a al. 3 LAI. Si cette disposition ne mentionne pas les art. 324a à 324b CO comme applicables par analogie, c’est que le placement à l’essai est une mesure de réadaptation de l’assurance-invalidité régie par le droit public (cf. MEYER/REICHMUTH, op. cit., n. 1 ad art. 18a LAI). En outre, A.__ n’exerçait pas durant l’exécution de la mesure de placement une simple activité de complaisance. L’activité qu’il déployait constituait un véritable engagement pour lequel C.__ SA y trouvait un intérêt économique. Il participait au processus d’exploitation de cette société et était de ce fait soumis – preuve en est l’accident dont il a été victime – aux mêmes risques professionnels que les autres travailleurs de l’entreprise. Dans ces conditions, on doit admettre qu’il était obligatoirement assuré contre les accidents auprès de l’assurance-accidents de C.__ SA.

 

On ne peut pas déduire du message du Conseil fédéral relatif à la 6ème révision de l’assurance-invalidité, premier volet (FF 2010 1647, 1717), ainsi que la réponse du Conseil fédéral du 23 octobre 2017 à une interpellation (n o 14.3730) du conseiller national Pezzatti déposée le 17 septembre 2014 que le législateur entendait exclure de l’assurance les personnes au bénéfice d’un placement à l’essai. Bien au contraire, le Conseil fédéral a clairement indiqué dans son message que celles-ci seraient obligatoirement assurées pendant le placement à l’essai. Le fait que les modalités de cette obligation (prise en charge des primes) n’ont pas été concrétisées à ce jour par voie d’ordonnance ne saurait être décisif. En effet, toute autorité appelée à appliquer le droit se doit de respecter les principes de la primauté de la loi et de la hiérarchie des normes. Dans le cas particulier, c’est donc en premier lieu au regard de la loi et de la jurisprudence qui s’y rapporte qu’il convient de décider si une personne est ou non assurée. Or, comme on l’a vu, au regard de l’art. 1a LAA et de la jurisprudence susmentionnée, on doit admettre que A.__ était obligatoirement assuré contre les accidents. Une mention spéciale à l’art. 1a OLAA du placement à l’essai aurait eu pour seule conséquence de confirmer une situation juridique existante, sans valeur constitutive d’un assujettissement obligatoire. Enfin, une prise en charge des primes par l’assurance-invalidité n’est pas une condition de cet assujettissement.

 

Dans sa décision sur opposition, l’assurance-accidents a également invoqué la recommandation n o 01/2007 du 12 mars 2007 (révisée le 9 février 2009) de la Commission ad hoc des sinistres LAA. Selon cette recommandation, une intervention temporaire auprès d’un employeur sur le marché du travail primaire avec salaire AVS ou indemnités AI bénéficie d’une couverture LAA, à l’exception des essais de travail selon l’art. 18a LAI. Cette exclusion n’est visiblement que l’expression de l’avis exprimé par le Conseil fédéral dans son message précité sur la nécessité de prévoir une couverture d’assurance spécifique pour les personnes bénéficiant d’un placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI. Mais, comme on l’a vu, cette couverture existe déjà en vertu de la loi. Au demeurant, de telles recommandations n’ont pas valeur d’ordonnances administratives ni de directives d’une autorité de surveillance aux autorités d’exécution de la loi. Il s’agit de simples recommandations qui ne lient pas le juge (ATF 114 V 315 consid. 5c p. 318).

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_324/2018 consultable ici

 

 

8C_150/2018 (f) du 08.11.2018 – Lésion assimilée à un accident – Lésion de la coiffe des rotateurs – 9 al. 2 OLAA / Mouvement lors d’un exercice de musculation – Pas de potentiel de danger accru

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_150/2018 (f) du 08.11.2018

 

Consultable ici

 

Lésion assimilée à un accident – Lésion de la coiffe des rotateurs / 9 al. 2 OLAA

Mouvement lors d’un exercice de musculation – Pas de potentiel de danger accru

 

Assuré, né en 1968, s’est blessé le 09.09.2014 au niveau de l’épaule droite en faisant du « lifting » (déclaration d’accident du 26.05.2015). Le médecin consulté le 24.09.2014 a retenu une déchirure partielle du tendon sous-scapulaire droit. Une échographie de l’épaule droite réalisée le 06.10.2014 montrait une très probable désinsertion de la partie supérieure du tendon subscapulaire associée à une subluxation interne du tendon long chef du biceps, la présence d’une calcification pré-insertionnelle du tendon supra-spinatus et une arthrose acromio-claviculaire liée probablement aux surcharges mécaniques. Il n’existait pas de signe de déchirure ni même de fissuration du tendon. Dans un questionnaire du 16.06.2015, l’assuré a fait la description suivante de l’événement survenu le 09.09.2014 : « Je faisais des exercices de musculation à la maison et j’ai senti une douleur dans mon épaule d’un coup ». A la question de savoir s’il s’était produit quelque chose de particulier tel que coup, chute ou glissade, le prénommé a répondu par la négative.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a nié le droit de l’assuré à des prestations LAA pour l’événement du 09.09.2014, au motif qu’il ne remplissait pas les critères d’un accident et que ses suites ne constituaient pas non plus une lésion corporelle assimilée à un accident.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1123/2017 – consultable ici)

Selon la juridiction cantonale, les efforts qu’a fournis l’assuré le 09.09.2014 étaient volontaires et sans perte de maîtrise, de sorte qu’ils ne pouvaient être considérés comme manifestement excessifs pour un homme habitué à ce type d’exercices. Ce dernier ne prétendait par ailleurs pas avoir fait un faux mouvement ou un mouvement non coordonné par exemple. Selon les premiers juges, les efforts exercés sur les tendons ne constituent pas, à eux seuls, une cause dommageable extérieure en l’absence d’un risque pour le moins accru – absent en l’occurrence – en regard d’une sollicitation normale de l’organisme. Aussi, en l’absence d’une cause extérieure externe au corps humain d’une certaine importance, les troubles constatés ne pouvaient être mis à la charge de l’assureur-accidents.

Par jugement du 07.12.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

En l’espèce, il n’est pas contesté que l’événement survenu le 09.09.2014 ne constitue pas un accident au sens de l’art. 4 LPGA, faute de facteur extérieur extraordinaire. Par conséquent, pour que l’assurance-accidents soit tenue de prendre en charge les suites qui en découlent, il faut que l’on se trouve en présence d’une lésion assimilée à un accident (art. 9 al. 2 OLAA en lien avec l’art. 6 al. 2 LAA, teneur en vigueur jusqu’au 31.12.2016).

Il n’est pas non plus contesté que l’atteinte au niveau de l’épaule présentée par l’assuré constitue une déchirure de tendon tombant sous le coup de l’art. 9 al. 2 let. f OLAA. La jurisprudence (ATF 143 V 285; 139 V 327; 129 V 466) a précisé les conditions d’octroi des prestations en cas de lésion corporelle assimilée à un accident. C’est ainsi qu’à l’exception du caractère « extraordinaire » de la cause extérieure, toutes les autres conditions constitutives de la notion d’accident doivent être réalisées (cf. art. 4 LPGA). En particulier, en l’absence d’une cause extérieure – soit d’un événement similaire à un accident, externe au corps humain, susceptible d’être constaté de manière objective et qui présente une certaine importance -, fût-ce comme simple facteur déclenchant des lésions corporelles énumérées à l’art. 9 al. 2 OLAA, les troubles constatés sont à la charge de l’assurance-maladie. L’existence d’une lésion corporelle assimilée à un accident doit ainsi être niée dans tous les cas où le facteur dommageable extérieur se confond avec l’apparition (pour la première fois) de douleurs identifiées comme étant les symptômes des lésions corporelles énumérées à l’art. 9 al. 2 let. a à h OLAA (ATF 129 V 466 consid. 4.2.1 p. 469).

L’exigence d’un facteur dommageable extérieur n’est pas non plus donnée lorsque l’assuré fait état de douleurs apparues pour la première fois après avoir accompli un geste de la vie courante. La notion de cause extérieure présuppose qu’un événement générant un risque de lésion accru survienne. Tel est le cas lorsque l’exercice de l’activité à la suite de laquelle l’assuré a éprouvé des douleurs incite à une prise de risque accrue, à l’instar de la pratique de nombreux sports. L’existence d’un facteur extérieur comportant un risque de lésion accru doit être admise lorsque le geste quotidien en cause équivaut à une sollicitation du corps, en particulier des membres, qui est physiologiquement plus élevée que la normale et dépasse ce qui est normalement maîtrisé du point de vue psychologique (ATF 143 V 285 consid. 2.3 p. 288; 139 V 327 consid. 3.3.1 p. 329). C’est la raison pour laquelle les douleurs identifiées comme étant les symptômes de lésions corporelles au sens de celles énumérées à l’art. 9 al. 2 OLAA ne sont pas prises en considération lorsqu’elles surviennent à la suite de gestes quotidiens accomplis sans qu’interfère un phénomène extérieur reconnaissable. A eux seuls, les efforts exercés sur le squelette, les articulations, les muscles, les tendons et les ligaments ne constituent pas une cause dommageable extérieure en tant qu’elle présuppose un risque de lésion non pas extraordinaire mais à tout le moins accru en regard d’une sollicitation normale de l’organisme (ATF 129 V 466 consid. 4.2.2 p. 470).

Il est vrai, comme l’admet l’assuré lui-même, qu’on ne saurait se fonder sur la seule pratique d’une activité sportive pour justifier un potentiel de danger accru (cf. arrêt 8C_147/2014 du 16 juillet 2014, consid. 3.3). Admettre le contraire signifierait que la même séquence de mouvements devrait être jugée différemment selon qu’elle aurait eu lieu au cours d’une randonnée pédestre par exemple, ou pendant un match de boxe. Néanmoins, les circonstances spécifiques de l’activité à l’origine de la douleur doivent également être prises en compte, car dans certains cas il n’est guère possible de déterminer avec précision quel mouvement effectif a réellement déclenché la lésion. Même s’il y a lieu d’admettre une situation de risque généralement plus élevé dans de nombreuses activités sportives, un facteur externe avec un potentiel de danger accru n’est présent que si l’activité en question est associée à une sollicitation physiologiquement plus élevée que la normale et dépasse ce qui est normalement maîtrisé du point de vue psychologique.

Dans l’arrêt 8C_40/2014 du 8 mai 2014, le Tribunal fédéral a admis l’obligation de prise en charge par l’assureur-accidents d’une lésion assimilée à un accident survenue lors d’un saut depuis la position accroupie (« Squat-Jumpig »), en raison de l’effort déployé et du changement permanent et rapide de charge lors des séquences de mouvements dans leur ensemble. Dans l’arrêt 8C_295/2015 du 8 septembre 2015, la personne assurée a subi une rupture du ménisque lors d’un entraînement au cours duquel elle sautait sur une jambe et donnait des coups de genou avec l’autre jambe dans le but de frapper un adversaire, en l’occurrence son entraîneur de fitness, qui se protégeait avec des gants. Selon le Tribunal fédéral, le procédé était comparable à celui d’un exercice d’auto-défense avec un partenaire ou de la pratique dite du « Squat-Jumping » (cf. SVR 2014 UV n° 30 p. 100, 8C_147/2014 du 16 juillet 2014, consid. 3.5).

En l’occurrence, que ce soit dans la déclaration d’accident du 26.05.2015 ou dans le questionnaire détaillé rempli 16.06.2015, l’assuré n’a signalé aucun mouvement incontrôlé, trébuchement, faux pas, faux mouvement, etc. Il a indiqué avoir ressenti une vive douleur, d’un coup, en faisant de la musculation chez lui. L’apparition de la douleur en tant que telle n’est pas un facteur extérieur dommageable. Contrairement aux exemples cités plus haut, la musculation ne comporte pas de mouvements brusques, saccadés et incontrôlés, mais plutôt une séquence de mouvements réguliers dans le cadre d’une sollicitation du corps physiologiquement normale et maîtrisée du point de vue psychologique.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_150/2018 consultable ici

 

 

8C_548/2018 (f) du 07.11.2018 – Morsure de tique – Causalité naturelle / 4 LPGA – 6 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_548/2018 (f) du 07.11.2018

 

Consultable ici

 

Morsure de tique – Causalité naturelle / 4 LPGA – 6 LAA

 

Assurée, née en 1973, greffière, a été victime le 27.06.2014 d’une morsure de tique. Le 04.07.2014, elle a consulté son médecin de famille, spécialiste en médecine interne générale, lequel a constaté un érythème migrant et un méningisme clinique, et a prescrit un traitement antibiotique. Par la suite, divers examens médicaux ont été pratiqués afin de déterminer la nature et l’origine des troubles de l’assurée. Un spécialiste en neurologie a écarté la possibilité d’une neuroborréliose et évoqué une éventuelle maladie démyélinisante. Un second spécialiste en neurologie a exclu également une neuroborréliose, du fait de la négativité des tests sérologiques, sans que cela ne mette en doute la probabilité d’un tableau méningitique après morsure de tique sur un autre agent non identifié à ce stade. Une spécialiste en radiologie et neuroradiologie diagnostique a expliqué qu’il n’y avait pas d’arguments de laboratoire pour une maladie de Lyme. Après avoir soumis le cas à sa division de médecine du travail, l’assurance-accidents a refusé de prendre en charge les suites de l’accident du 27.06.2014, au motif qu’un lien de causalité entre celui-ci et les troubles annoncés n’était pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 65/16 – 68/2018 – consultable ici)

Le dossier de l’AI a été versée à la procédure. Y figurait en particulier un rapport d’expertise pluridisciplinaire du Centre d’Expertises Médicales (CEMed), concluant à un « status après probable méningoencéphalite d’origine indéterminée (juin 2014) avec un tableau post-infectieux persistant ».

Par jugement du 06.06.2018, admission partielle du recours par le tribunal cantonal. Les juges cantonaux ont considéré que le traitement antibiotique administré en raison de la présence d’un érythème migrant et l’incapacité de travail liée au méningisme primaire devaient être pris en charge par l’assurance-accidents. En revanche, l’assureur n’était pas tenu de verser des prestations en raison des symptômes chroniques qui ont persisté à la fin du traitement antibiotique.

 

TF

Dans le rapport du second spécialiste en neurologie, le médecin indique certes que le tableau actuel est compatible avec un syndrome post-infectieux mais il n’est pas en mesure d’en identifier l’agent.

En outre, il n’apparaît pas en soi contradictoire (de la part des médecins du CEMed) de constater l’existence de troubles sur le plan somatique et de considérer qu’il n’incombe pas à l’assurance-accidents de les prendre en charge. Le caractère objectivable d’une atteinte ne signifie pas pour autant qu’il existe assurément un lien de causalité naturelle et adéquate avec un événement accidentel antérieur.

Enfin, même en tenant compte des difficultés liées à l’établissement diagnostique d’une infection par morsure de tique, il n’en reste pas moins qu’aucun des médecins consultés n’a identifié l’agent pathogène à l’origine des troubles de l’assurée malgré les tests et examens pratiqués. Le seul fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu’après la survenance d’un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc »; cf. ATF 119 V 335 consid. 2b/bb p. 341 s.; arrêt 8C_331/2015 du 21 août 2015 consid. 2.2.3.1, in SVR 2016 UV n° 18 p. 55). Dans ces conditions, on ne saurait d’emblée rattacher les symptômes chroniques de l’assurée à une cause accidentelle, en l’espèce la morsure de tique, d’autant moins que le médecin de famille de l’assurée a mentionné une amélioration spectaculaire à la suite du traitement antibiotique initial.

Il n’y a pas non plus lieu d’ordonner une expertise complémentaire. En effet, dans la procédure d’octroi de prestations d’assurance sociale, il existe un droit formel à une expertise médicale qu’en cas de doutes quant à la fiabilité et la pertinence des constatations des médecins internes à l’assurance (cf. ATF 135 V 465 consid. 4 p. 467 ss). En outre, on voit mal quelles autres mesures médicales, qui n’auraient pas déjà été mises en œuvre par les médecins consultés, permettraient d’établir le lien de causalité invoqué par l’assurée.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_548/2018 consultable ici

 

 

8C_687/2017 (f) du 24.10.2018 – Révision procédurale – Fait nouveau pertinent / 53 al. 1 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_687/2017 (f) du 24.10.2018

 

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Révision procédurale / 53 al. 1 LPGA

Fait nouveau pertinent

 

Assurée, née en 1977, travaillant à 75 %, a été victime d’un accident le 05.05.2011 (chute en arrière sur les fesses d’une hauteur environ de 2 mètres). Elle a subi une fracture du sacrum S4 légèrement déplacée ainsi qu’une discrète fracture tassement du plateau supérieur de D12 ; par la suite, une hernie discale médiane à légèrement paramédiane gauche en L5-S1 a également été mise en relation avec l’accident.

A l’issue d’un examen final de l’assurée du 04.11.2013, le médecin de l’assurance-accidents, spécialiste en médecine physique et réhabilitation et rhumatologie, a constaté qu’il n’y avait pas de syndrome déficitaire sur le plan neurologique, mais qu’il persistait un syndrome algo-fonctionnel au niveau dorso-lombaire et fessier sans base organique objectivable. Il a retenu une évolution vers un syndrome somatoforme douloureux chronique. Sur le plan de la capacité de travail, en l’absence de lésion structurelle, l’assurée devait pouvoir reprendre son ancienne activité. Cependant, une activité industrielle légère respectant certaines limitations paraissait mieux indiquée compte tenu de ses douleurs résiduelles.

L’assurance-accidents a mis fin au versement des indemnités journalières au 31.12.2013 et n’a allouer ni rente d’invalidité ni indemnité pour atteinte à l’intégrité (décision du 19.12.2013). Après s’être opposée, l’assurée a retiré son opposition. Elle a repris son travail mais dans une activité plus légère (avec peu de travaux de nettoyage) et à un taux diminué de moitié (37,5 %).

L’assurée a annoncé une rechute le 26.06.2014 (incapacité de travail de 100% dès le 13.06.2014). Par décision du 27.08.2014, l’assurance-accidents a refusé de prendre en charge la rechute. L’assuré a formé opposition contre cette décision. Entre-temps, l’office AI ainsi que l’assureur-maladie de l’assurée ont confié une expertise rhumatologique et psychiatrique à la Clinique X.__. Sur le vu des conclusions de cette expertise datée du 12.01.2015, l’assurée a informé l’assurance-accidents qu’elle retirait son opposition (lettre du 29.04.2015).

Le 18.12.2015, un spécialiste en anesthésiologie a transmis à l’assurance-accidents une copie de sa lettre du même jour adressée à un confrère. Dans ce courrier, le médecin constatait chez l’assurée un status neurologique pathologique avec une diminution de la sensibilité pour les quatre qualités testées (froid, chaud, toucher, piquer) dans le territoire des segments D12-L1 et S4 à G. Il en concluait que sa patiente présentait des lésions des fibres fines en relation parfaite avec les fractures constatées après l’accident. Sur cette base, l’assurée a demandé la réouverture de son dossier. L’assurance-accidents a rejeté la requête, traitée comme demande de révision de sa première décision du 19.12.2013, considérant qu’il n’existait pas d’éléments médicaux nouveaux permettant de tirer d’autres conclusions médicales que celles qui avaient conduit à la fin des prestations. L’assurance-accidents a maintenu sa décision après opposition formée par l’assurée.

 

Procédure cantonale (arrêt 605 2016 271 – consultable ici)

Par jugement du 23.08.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant.

Sont « nouveaux » au sens de cette disposition, les faits qui se sont produits jusqu’au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables, mais qui n’étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence. En outre, les faits nouveaux doivent être importants, c’est-à-dire qu’ils doivent être de nature à modifier l’état de fait qui est à la base de la décision dont la révision est demandée et conduire à une solution différente en fonction d’une appréciation juridique correcte.

Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants, qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n’avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Ce qui est décisif, c’est que le moyen de preuve ne serve pas à l’appréciation des faits seulement, mais à l’établissement de ces derniers. Ainsi, il ne suffit pas qu’un nouveau rapport médical donne une appréciation différente des faits ; il faut bien plutôt des éléments de fait nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs. Pour justifier la révision d’une décision, il ne suffit pas que le médecin ou l’expert tire ultérieurement, des faits connus au moment de la décision principale, d’autres conclusions que l’administration ou le tribunal. Il n’y a pas non plus motif à révision du seul fait que l’administration ou le tribunal paraît avoir mal interprété des faits connus déjà lors de la décision principale. L’appréciation inexacte doit être, bien plutôt, la conséquence de l’ignorance ou de l’absence de preuve de faits essentiels pour la décision (ATF 127 V 353 consid. 5b p. 358 et les références ; arrêts 9C_589/2013 du 2 mai 2014 consid. 4.2 et 9C_371/2008 du 2 février 2009 consid. 2.3).

 

On peut admettre que les troubles sensitifs mis en évidence par le spécialiste en anesthésiologie constituent un élément médical nouveau dès lors qu’ils reposent sur un test de sensibilité (tactile, froid, chaud et piqué) qui n’avait pas été réalisé jusque-là. Le fait nouveau pertinent qui fonde la demande de révision ne réside toutefois pas dans l’existence de ces troubles sensitifs mais dans le diagnostic d’une atteinte des fibres fines au niveau des racines L1 et S4 que le spécialiste en anesthésiologie a posé à raison de ceux-ci.

Dans son dernier rapport, ce spécialiste concède que l’unique examen pour objectiver une atteinte des fibres fines consiste en une méthode appelée thermo-test développée par le neurologue suédois Ulf Lindblom et qu’à ce jour, il n’a pas trouvé une telle machine en Suisse. Cela étant, il reconnaît lui-même que les constatations nouvelles dont il fait état sur la base du test de sensibilité qu’il a effectué constituent tout au plus un indice allant dans le sens du diagnostic posé. Cela est toutefois insuffisant pour considérer que les éléments de preuve invoqués établissent le fait nouveau pertinent. Par ailleurs, le spécialiste en anesthésiologie s’est abstenu de dire en quoi une atteinte des fibres fines dans les racines L1 et S4 entraînerait chez l’assurée une incapacité de travail ou des limitations fonctionnelles plus importantes que celles retenues à l’époque par le médecin de l’assurance-accidents. Si ce dernier a certes nié que la symptomatologie de l’assurée avait encore une base organique en lien avec l’accident, il n’en a pas moins évalué l’exigibilité d’une reprise d’activité professionnelle en tenant compte de la présence de douleurs résiduelles au niveau dorso-lombaire et fessier. Ainsi, il a estimé que l’ancienne activité de l’assurée exigeait d’elle des efforts qui allaient peut-être au-delà de ses capacités, et qu’elle devrait exercer une activité industrielle légère sans ports de charges lourdes, en position alternée avec la possibilité de se dégourdir les jambes, ne nécessitant que peu d’accroupissements ou de travail à genoux, aucun travail sur des échafaudages ou des échelles, et pas de montée ou descente répétitive d’escaliers. On précisera que c’est en fonction de descriptions de poste de travail (DPT) compatibles avec ces limitations fonctionnelles que l’assurance-accidents a déterminé le revenu d’invalide de l’assurée.

Il s’ensuit que les rapports du spécialiste en anesthésiologie ne permettent pas d’établir un élément de fait nouveau, déterminant sur le plan juridique, dont il résulterait que les bases de la décision du 19.12.2013 comportait des défauts objectifs. Partant, les conditions de l’art. 53 al. 1 LPGA ne sont pas réalisées.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 8C_687/2017 consultable ici

 

 

Uber & Co : Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » – Avis du Conseil fédéral

Uber & Co : Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » – Avis du Conseil fédéral

 

Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » consultable ici

Avis du Conseil fédéral du 21.11.2018 consultable ici

 

Texte déposé

Le Conseil fédéral est chargé d’adapter les ordonnances pertinentes du droit des assurances sociales afin que les déclarations de parties concordantes soient prises en compte dans la qualification d’une activité lucrative comme activité salariée ou comme activité indépendante.

 

Développement

Les autorités d’exécution du domaine des assurances sociales qualifient souvent les prestataires de services de salariés, contre leur gré. Les actifs travaillant sur des plateformes numériques aussi bien que les prestataires de l’économie traditionnelle tels que les chauffeurs de taxi ou les psychologues sont souvent rangés dans ce cadre juridique contraignant.

L’absurde, dans cette situation, c’est que cette pratique conduit les personnes concernées à bénéficier d’une plus mauvaise protection sociale en Suisse qu’à l’étranger. Plusieurs entreprises ne proposent pas de formations continues ou d’assurances contre certains risques sociaux en Suisse parce que le risque est trop grand au regard du droit des assurances sociales, et donc au regard du droit du travail.

Je charge donc le Conseil fédéral de prendre les dispositions nécessaires, par voie de modification d’ordonnances, afin que les institutions d’assurances sociales prennent dorénavant en compte, outre les critères actuels (intégration organisationnelle et risque entrepreneurial), le critère consistant à déterminer s’il existe une concordance de vues entre les parties sur la nature indépendante de l’activité. Comme les autres critères continueraient de s’appliquer, la volonté des parties ne serait déterminante que dans les cas limites.

Dans son rapport « Conséquences de la numérisation sur l’emploi et les conditions de travail : risques et opportunités » du 8 novembre 2017 (p. 65), le Conseil fédéral a déjà présenté les grandes lignes de cette mesure et souligné qu’elle mérite d’être examinée.

Une telle mesure améliorerait la sécurité du droit, renforcerait l’autonomie des parties et augmenterait en définitive la protection des personnes concernées.

 

Avis du Conseil fédéral du 21.11.2018

Le 8 novembre 2017, le Conseil fédéral a adopté le rapport « Conséquences de la numérisation sur l’emploi et les conditions de travail : opportunités et risques » en réponse aux postulats Reynard (15.3854 « Automatisation. Risques et opportunités ») et Derder (17.3222 « Economie numérique. Identifier les emplois de demain et la manière de stimuler leur émergence en Suisse »), et il a chargé le DFI, au vu des progrès de la numérisation, d’examiner conjointement avec le DEFR, le DFJP et le DFF la nécessité ainsi que les avantages et les inconvénients d’un assouplissement dans le domaine des assurances sociales, et de présenter dans un rapport des solutions possibles d’ici fin 2019. Ce rapport montrera s’il y a lieu de développer encore le cadre juridique et, le cas échéant, de quelle manière. Il s’agirait alors de conserver les points forts de la pratique actuelle de qualification en tant qu’activité lucrative indépendante ou salariée, tout en améliorant les conditions générales permettant l’apparition de modèles commerciaux innovants. Dans le même temps, il faudra examiner les moyens d’empêcher qu’une protection sociale insuffisante des personnes employées ne se traduise par des risques de précarisation et de transfert des charges sur la collectivité.

Dans le cadre des options à examiner, le rapport étudiera diverses propositions, par exemple la possibilité de laisser, à certaines conditions, le choix de la qualification juridique de l’activité à la personne qui l’exerce, ou de tenir compte de la déclaration commune des parties dans la qualification de l’activité lucrative en tant qu’indépendante ou salariée. Par ailleurs, en raison de l’adoption du postulat du groupe libéral-radical (17.4087 « Société numérique. Etudier la création d’un nouveau statut de travailleur ») par le Conseil national le 19 septembre 2018, il s’agira d’examiner aussi s’il est nécessaire de créer un nouveau statut d’indépendant pour les « travailleurs de plateforme », en en exposant les avantages et les inconvénients.

L’examen des options et l’élaboration du rapport sont en cours. Seule une analyse approfondie des besoins des intéressés ainsi que du cadre juridique montrera s’il y a lieu de prendre des mesures et, si oui, lesquelles. Au vu des discussions en cours, il n’est pour le moment pas judicieux de demander au Conseil fédéral d’adopter une réglementation spécifique.

 

Proposition du Conseil fédéral du 21.11.2018

Le Conseil fédéral propose de rejeter la motion.

 

 

Motion Caroni 18.4080 « Pour une plus grande autonomie des parties dans les assurances sociales » consultable ici