Arrêt du Tribunal fédéral 8C_560/2015 (f) du 29.04.2016
Consultable ici : http://bit.ly/1XEyPsU
Troubles psychiques – Causalité adéquate selon Garcia 115 V 133 – 6 LAA
Accident de la circulation – sortie de route avec plusieurs tonneaux – accident de gravité moyenne / Caractère particulièrement impressionnant de l’accident nié
Assuré, ouvrier, est victime le 04.07.2012 d’un accident de la circulation. Il s’est endormi au volant de sa voiture, laquelle a heurté la barrière du côté droit de la chaussée, avant de faire plusieurs tonneaux et de sortir de la route. Constatations médicales initiales : plaie de 5 cm à la tête, sans autre signe de lésion crânienne, blessure sur le dos de la main droite avec une excoriation de 1 x 1 cm. Absence de symptômes ou de signes de commotion ; pas de traumatisme osseux objectivé par les radiographies.
A son retour en Suisse, diagnostics posés par son médecin généraliste : suites de TCC (avec perte de conscience), avec amnésie et céphalées persistantes, ainsi que réaction dépressive. Diagnostics par une neurologue consultée : syndrome de stress post-traumatique associé à une réaction dépressive, de TCC modéré, de céphalées de type tensionnel chroniques quotidiennes, probablement post-TCC et dans le cadre de la réaction dépressive, de suspicion de syndrome d’apnées du sommeil et d’obésité.
Le 13.12.2012, le médecin généraliste a rapporté une évolution favorable sur le plan somatique, avec disparition presque complète des plaintes et limitations fonctionnelles, mais il a attesté la persistance de l’état dépressif. Reprise du travail à 50% dès le 01.02.2013.
Examen par le psychiatre conseil de l’assurance-accidents. Rapport du 05.04.2013 : diagnostics d’état de stress post-traumatique (F43.1), de trouble de l’adaptation, réaction dépressive prolongée (F43.21) ; lien de causalité naturelle entre ces troubles et l’accident survenu le 04.07.2012 retenu.
Décision de l’assureur-accidents le 30.07.2013, confirmée sur opposition le 23.09.2013 : suppression du droit à des prestations dès le 11.08.2013 pour l’accident survenu le 04.07.2012.
Procédure cantonale (arrêt A 103/13 – 54/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1YIuK5u)
Par jugement du 01.06.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.
TF
Examen de la causalité adéquate – principe applicable (arrêt Garcia 115 V 133 in casu)
L’état de santé de l’assuré du recourant a été de manière précoce et durablement affecté par des troubles psychiques qui constituent une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique caractéristique habituellement associé à un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale, un traumatisme analogue à la colonne cervicale ou un traumatisme cranio-cérébral (cf. ATF 134 V 109 consid. 9.5 p. 125 s.).
Il convient de trancher le cas à la lumière des principes applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb p. 103 et les références), comme l’a fait la cour cantonale. Il y a lieu d’examiner le caractère adéquat du lien de causalité en excluant les aspects psychiques de l’état de santé (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140 et 403 consid. 5c/aa p. 409).
Classification de l’accident – accident de gravité moyenne
Il convient, aux fins de procéder à une classification des accidents entraînant des troubles psychiques, non pas de s’attacher à la manière dont l’assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder, d’un point de vue objectif, sur l’événement accidentel lui-même (ATF 115 V 133 consid. 6 p. 139, 403 consid. 5 p. 407 s.). Aussi faut-il faire abstraction des circonstances dénuées d’impact sur les forces biomécaniques, qui sont de nature à exercer exclusivement une influence sur le ressenti de la victime
In casu, l’assuré s’est endormi au volant, ce qui a provoqué chez lui un sentiment de culpabilité envers son épouse qui l’accompagnait mais qui n’a pas été blessée. L’assuré a subi une plaie de 5 cm à la tête, sans autre signe de lésion crânienne, ainsi qu’une blessure sur le dos de la main droite avec une excoriation de 1 x 1 cm. Dans cette mesure et compte tenu du fait que la passagère du véhicule n’a pas été blessée, les forces en jeu lors de l’accident (cf. arrêts 8C_77/2009 du 4 juin 2009 consid. 4.1.1; SVR 2008 UV N° 8 p. 26, U 2, 3 et 4/07, consid. 5.3.1) n’apparaissent pas telles que l’on puisse admettre que l’événement du 04.07.2012, qui doit effectivement être qualifié d’accident de gravité moyenne, se situe à la limite de la catégorie des accidents graves.
Caractère particulièrement impressionnant de l’accident nié
Le critère relatif aux circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou au caractère particulièrement impressionnant de l’accident doit être examiné d’une manière objective et non pas en fonction du ressenti subjectif de l’assuré, en particulier de son sentiment d’angoisse. Il faut en effet observer qu’à tout accident de gravité moyenne est associé un certain caractère impressionnant, lequel ne suffit pas pour admettre l’existence du critère en question (RAMA 1999 n° U 335 p. 207, U 287/97, consid. 3b/cc; arrêts 8C_440/2015 du 14 avril 2016 consid. 5.2; 8C_1020/2008 du 8 avril 2009 consid. 5.2).
En l’occurrence, le fait qu’il s’est endormi au volant et que son véhicule a fait plusieurs tonneaux ne permettent pas de considérer que les circonstances concomitantes étaient particulièrement dramatiques ni que l’accident était particulièrement impressionnant (cf. p. ex. arrêt 8C_363/2012 du 27 juin 2012 consid. 4.3.1).
Critère du degré et de la durée de l’incapacité de travail
Ce critère n’est pas retenu, du moment qu’il se rapporte aux lésions physiques (cf. ATF 115 V 133 consid. 6c/aa p. 140 et 403 consid. 5c/aa p. 409). Or, en l’occurrence, le médecin traitant a attesté la disparition presque complète des plaintes et des limitations fonctionnelles après moins de six mois (rapport du 13.12.2012). Il apparaît ainsi que dès ce moment-là, la capacité de travail a été influencée par les troubles psychiques.
Critères de la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, de la durée anormalement longue du traitement médical et des douleurs physiques persistantes
Il ressort en effet des nombreux avis médicaux versés au dossier que les lésions physiques n’étaient pas graves ni de nature à occasionner des douleurs physiques persistantes ou un traitement médical anormalement long.
Le TF rejette le recours de l’assuré.
Arrêt 8C_560/2015 consultable ici : http://bit.ly/1XEyPsU