9C_603/2015 (f) du 25.04.2016 – Evaluation de l’invalidité – marché équilibré du travail – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_603/2015 (f) du 25.04.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Ok0b5s

 

Evaluation de l’invalidité – marché équilibré du travail – 16 LPGA

Observations lors d’un stage COPAI vs constatations cliniques par lors d’une expertise pluridisciplinaire

 

Capacité de travail exigible

Le TF rappelle que l’évaluation de l’invalidité s’effectue à l’aune d’un marché équilibré du travail. Cette notion, théorique et abstraite, sert de critère de distinction entre les cas relevant de l’assurance-chômage ou de l’assurance-invalidité. Elle présuppose un équilibre entre l’offre et la demande de main d’œuvre d’une part et un marché du travail structuré (permettant d’offrir un éventail d’emplois diversifiés, tant au regard des sollicitations intellectuelles que physiques) d’autre part (ATF 110 V 273 consid. 4b p. 276). Le caractère irréaliste des possibilités de travail doit alors découler de l’atteinte à la santé – puisqu’une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance de l’invalidité (art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (arrêt 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et les références).

S’agissant des facteurs étrangers à l’invalidité (observés lors du stage au COPAI dans le cas d’espèce), telles les difficultés d’expression et de compréhension de la langue française, la scolarité, la formation professionnelle, la structuration spatiale en 2 et 3 dimensions et les connaissances informatiques limitées de l’assuré, il n’y a pas lieu d’en tenir compte.

Les doutes quant aux effets des limitations physiques supplémentaires observées par les maîtres socioprofessionnels ont été levés par les médecins-experts. Ces derniers ont souligné que les éléments mis en avant par le COPAI n’étaient pas appréciés lors d’un examen médical (hormis les limitations de la mobilité des membres supérieurs qui avaient déjà été notées dans l’expertise) et qu’ils n’étaient donc pas étonnés que le résultat du stage puisse être différent des conclusions de l’expertise. Sur un plan médico-théorique, ils ne partageaient cependant pas l’appréciation des auteurs du rapport du COPAI.

Au contraire, les médecins ont relevé que l’insuffisance des capacités d’apprentissage observée lors du stage n’était pas en relation avec le diagnostic psychiatrique, que la diminution du tonus intellectuel était surprenante et que l’état psychique observé en 2010 n’expliquait pas le fait que l’assuré ne pouvait être qu’un simple exécutant de consignes élémentaires. La presbytie ne saurait constituer un élément significatif dans l’examen de son droit à une rente de l’assurance-invalidité.

En justifiant son point de vue, selon lequel l’assuré était totalement incapable de travailler, quelle que soit l’activité envisagée, essentiellement par les constatations des maîtres socioprofessionnels du COPAI, lesquelles étaient dépourvues d’une assise suffisante sur un plan médico-théorique et reposaient en partie sur des limitations remises en cause par les médecins-experts, et en s’écartant de la pleine capacité de travail (avec une baisse de rendement de 20%) attestée par les experts, la juridiction cantonale a violé le droit fédéral.

Dans la mesure où il en va de l’évaluation de l’exigibilité d’une activité professionnelle adaptée sur le marché équilibré du travail, il y a cependant lieu de s’écarter d’une appréciation qui nierait une telle exigibilité avant tout par des facteurs psychosociaux ou socioculturels, qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (art. 16 LPGA). Si les limitations fonctionnelles de l’assuré sont certes importantes, elles représentent des mesures relativement classiques d’épargne en vue d’éviter des douleurs à la nuque. Des tâches simples de surveillance derrière un écran ou de contrôle apparaissent concrètement exigibles à condition que l’assuré puisse interrompre régulièrement son activité et marcher pendant deux à trois minutes afin de soulager ses douleurs cervicales ou des points de tension. La diminution de rendement de 20% arrêtée d’un point de vue médico-théorique apparaît conforme à la situation.

 

Revenu d’invalide

Pour fixer le revenu d’invalide de l’assuré, il convient de se fonder, conformément à la jurisprudence (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 p. 475), sur les données économiques statistiques. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé, la jurisprudence admet la référence au groupe des tableaux « A », correspondant aux salaires bruts standardisés, de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (arrêt I 194/06 du 28 septembre 2006 consid. 2.1 et la référence). La valeur statistique – médiane – s’applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu’ils seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides dès lors qu’il recouvre un large éventail d’activités variées et non qualifiées (branche d’activités), n’impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêt 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3).

Eu égard à l’activité de substitution que l’assuré pourrait exercer dans une activité légère et adaptée, le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives (niveau de qualification 4) dans le secteur privé, en 2010, soit 4’901 fr. par mois (Enquête suisse sur la structure des salaires 2010, p. 26, TA1, ligne totale, niveau de qualification 4). Comme les salaires bruts standardisés tiennent compte d’un horaire de travail de quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2010 (41,6 heures; La Vie économique, 11/2011, p. 94, B 9.2), ce montant doit être porté à 5’097 fr. par mois ou 61’164 fr. par an. Compte tenu d’une diminution de rendement de 20%, laquelle ne justifie pas d’appliquer un abattement au salaire statistique (arrêt 9C_359/2014 du 5 septembre 2014 consid. 5.4 et les références), et d’un abattement de 10% sur le salaire statistique (cf. arrêt de la Cour de justice du 4 juin 2013), on obtient un revenu d’invalide de 44’038 fr. par an.

  

Arrêt 9C_603/2015 consultable ici : http://bit.ly/1Ok0b5s

 

 

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