Archives par mot-clé : Indemnité pour atteinte à l’intégrité – IPAI

8C_238/2020 (f) du 07.10.2020 – Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) – 24 LAA – 36 OLAA / Non pris en compte d’une aggravation prévisible de l’atteinte à l’intégrité en raison de l’impossibilité de quantifier l’importance d’une telle aggravation

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_238/2020 (f) du 07.10.2020

 

Consultable ici

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) / 24 LAA – 36 OLAA

Non pris en compte d’une aggravation prévisible de l’atteinte à l’intégrité en raison de l’impossibilité de quantifier l’importance d’une telle aggravation

 

Assuré, engagé comme aide menuisier pour une durée déterminée allant du 15.06.2016 au 15.09.2016, est tombé d’un tracteur dont le conducteur avait perdu la maîtrise le 17.06.2016. La chute a entraîné une fracture distale du fémur droit et a nécessité le jour même une intervention chirurgicale, sous la forme d’une réduction ouverte et d’une fixation interne.

Par décision du 17.08.2018, confirmée sur opposition le 05.10.2018, l’assurance-accidents a alloué à l’assuré une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 10%. Elle a par ailleurs nié le droit de celui-ci à une rente d’invalidité par décision du 08.10.2018, confirmée sur opposition le 10.12.2018.

 

Procédure cantonale

L’assuré a déféré les deux décisions sur opposition au tribunal cantonal compétent, lequel a joint les causes.

En l’espèce, la juridiction cantonale a confirmé le taux de 10% retenu par l’assurance-accidents sur la base de l’appréciation de son médecin d’arrondissement, spécialiste en chirurgie. En ce qui concernait l’aggravation future de l’arthrose évoquée par le médecin-conseil dans son rapport du 16.08.2018, la cour cantonal a jugé que son importance n’était pas quantifiable, de sorte qu’elle ne pouvait pas déjà être prise en compte dans l’évaluation de l’atteinte.

Par jugement du 04.03.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Selon l’art. 24 al. 1 LAA, l’assuré qui souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique par suite d’un accident a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité. Aux termes de l’art. 36 al. 1 OLAA, une atteinte à l’intégrité est réputée durable lorsqu’il est prévisible qu’elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie ; elle est réputée importante lorsque l’intégrité physique, mentale ou psychique subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave. L’indemnité pour atteinte à l’intégrité est calculée selon les directives figurant à l’annexe 3 à l’OLAA (art. 36 al. 2 OLAA). Cette annexe comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b p. 32, 209 consid. 4a/bb p. 210 ; arrêt 8C_451/2009 du 18 août 2010 consid. 3.2) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent. Pour les atteintes à l’intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, compte tenu de la gravité de l’atteinte (ch. 1 al. 2 annexe 3 OLAA). En cas de concours de plusieurs atteintes à l’intégrité, dues à un ou plusieurs accidents, l’indemnité est fixée d’après l’ensemble du dommage (art. 36 al. 3, première phrase, OLAA). Enfin, aux termes de l’art. 36 al. 4 OLAA, il est équitablement tenu compte des aggravations prévisibles de l’atteinte à l’intégrité ; une révision n’est possible qu’en cas exceptionnel, si l’aggravation est importante et n’était pas prévisible. S’il y a lieu de tenir équitablement compte d’une aggravation prévisible de l’atteinte lors de la fixation du taux de l’indemnité, cette règle ne vise toutefois que les aggravations dont la survenance est vraisemblable et – cumulativement (arrêt du TFA U 173/00 du 22 septembre 2000 consid. 2 et la référence) – l’importance quantifiable (arrêt 8C_494/2014 du 11 décembre 2014 consid. 6.2, non publié in ATF 141 V 1). Le taux d’une atteinte à l’intégrité dont l’aggravation est prévisible au sens de l’art. 36 al. 4 OLAA doit être fixé sur la base de constatations médicales (arrêt 8C_459/2008 du 4 février 2009 consid. 2.3, in SVR 2009 UV n° 27 p. 97).

 

Dans l’arrêt 8C_459/2008 du 4 février 2009 cité par l’assuré, le Tribunal fédéral n’a pas considéré de manière générale que l’évolution d’une arthrose serait toujours défavorable de sorte qu’en présence d’une telle atteinte, il conviendrait d’emblée d’admettre la condition du caractère prévisible d’une aggravation future ; il s’est limité dans ce contexte à citer l’avis d’un expert s’étant prononcé dans le cas particulier.

En l’espèce, même en admettant la vraisemblance d’une future aggravation de l’arthrose dont souffre l’assuré, le médecin-conseil n’a pas été en mesure de se prononcer sur son importance, qui doit être fixée sur la base de constatations médicales (arrêt 8C_459/2008 précité consid. 2.3). En effet, interrogé à ce propos, il a répondu que l’évolution et la gravité de l’arthrose post-traumatique ne pouvaient pas être quantifiées. L’assuré ne cite aucune pièce médicale susceptible de mettre en cause l’impossibilité, à ce stade, de quantifier l’importance d’une aggravation. On ajoutera au demeurant qu’à la lecture d’un compte-rendu de consultation orthopédique du 02.10.2017 à la Clinique romande de réadaptation, la prévisibilité d’une aggravation n’apparaît pas forcément vraisemblable. Quoi qu’il en soit, si l’arthrose dont souffre l’assuré fait effectivement l’objet d’une aggravation future d’une certaine ampleur, il lui sera loisible de requérir exceptionnellement la révision du taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité.

Pour le reste, l’assuré ne démontre pas en quoi les douleurs qu’il allègue mettraient en doute le taux de l’atteinte à l’intégrité de 10% fixé par le médecin d’arrondissement, lequel a retenu le taux maximum prévu pour les cas d’arthrose fémoro-patellaire moyenne selon la table 5.2 « Taux d’atteinte à l’intégrité résultant d’arthroses » publiée par les médecins de la CNA. Dans ces conditions, les juges cantonaux n’avaient pas à instruire davantage la question en demandant une nouvelle évaluation à un médecin externe à l’assurance-accidents.

 

Selon le Tribunal fédéral, au regard des motifs avancés dans le mémoire de recours, celui-ci était d’emblée dénué de chances de succès. L’assistance judiciaire gratuite est refusée ; l’assuré doit par conséquent payer les frais judiciaires et ne peut pas prétendre à la prise en charge des honoraires de son avocat.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_238/2020 consultable ici

 

 

8C_808/2019 (f) du 17.06.2020 – Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) – 24 LAA – 25 LAA –36 OLAA / Réduction en cas de concours de diverses causes de dommages – 36 LAA – 47 OLAA / Situation personnelle et économique de l’assuré – 47 in fine OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_808/2019 (f) du 17.06.2020

Jugement à 5 juges – non publié

 

Consultable ici

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) / 24 LAA – 25 LAA –36 OLAA

Réduction en cas de concours de diverses causes de dommages / 36 LAA – 47 OLAA

Situation personnelle et économique de l’assuré / 47 in fine OLAA

 

Assuré, né en 1955, victime d’un accident le 09.04.2011 alors qu’il circulait à moto.

L’assurance-accidents a, par deux fois (les 10.08.2015 et 22.06.2016), versé à l’assuré un montant de 12’600 fr. à titre d’avance sur l’IPAI.

Le médecin-conseil de l’assurance-accidents a, en juin 2015, initialement estimé le taux de l’IPAI à 20% (à savoir 10% pour le pouce droit, 7,5% pour le pouce gauche et 2,5% pour la bilatéralité des lésions). Lors de son examen final en mars 2017, il a estimé qu’il était justifié d’augmenter le taux de 2,5% compte tenu d’une arthrodèse à gauche et d’une arthrose grave de la trapézo-métacarpienne à droite. Ayant par la suite eu connaissance de radiographies d’octobre 2011 faisant état d’une atteinte arthrosique préexistante du pouce gauche, il a proposé en juillet 2017 de réduire le taux correspondant au pouce gauche pour aboutir à un taux global de 17,5% au lieu de 22,5%.

Par décision du 13.07.2017, l’assurance-accidents a refusé d’octroyer à l’assuré une rente d’invalidité et lui a reconnu le droit à une IPAI d’un montant de 22’050 fr. correspondant à un taux de 17,5%. Par une autre décision du même jour, elle a demandé à l’intéressé la restitution d’un montant de 3150 fr. versé à tort au titre d’avance sur l’IPAI. Ces deux décisions ont été confirmées sur opposition.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 50/18 – 143/2019 – consultable ici)

Les juges cantonaux ont constaté que le montant des avances sur l’IPAI perçues par l’assuré en août 2015 et en juin 2016 correspondait au montant de l’indemnité calculé selon un taux de 20%, tel qu’évalué par le médecin-conseil en juin 2015. Ils ont également retenu que l’assuré avait requis ces avances en raison d’une situation financière délicate. En outre, celui-ci ne pouvait pas être tenu pour responsable du fait que le médecin-conseil n’avait pas eu connaissance de l’atteinte arthrosique du pouce gauche antérieure à l’accident. Par conséquent, il était justifié de limiter la réduction du taux de l’IPAI à 20%, ce qui conduisait à l’annulation de la demande de restitution.

Par jugement du 31.10.2019, admission partielle du recours par le tribunal cantonal. Le refus de la rente d’invalidité a été confirmé, la décision a été réformée s’agissant de l’IPAI (taux fixé à 20% et annulation de la restitution).

 

TF

Réduction en cas de concours de diverses causes de dommages – 36 LAA – 47 OLAA

Selon l’art. 36 al. 2 LAA, les rentes d’invalidité, les indemnités pour atteinte à l’intégrité ainsi que les rentes de survivants sont réduites de manière équitable lorsque l’atteinte à la santé ou le décès ne sont que partiellement imputables à l’accident (première phrase). Toutefois, en réduisant les rentes, on ne tiendra pas compte des états antérieurs qui ne portaient pas atteinte à la capacité de gain (seconde phrase). Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser que la seconde phrase de l’art. 36 al. 2 LAA n’est pas applicable aux indemnités pour atteinte à l’intégrité (arrêts 8C_192/2015 du 1 er mars 2016 consid. 5.2 et U 374/06 du 29 juin 2007 consid. 2 publié in SVR 2008 UV n° 6 p. 19). Il s’ensuit que cette prestation peut être réduite en raison d’un état préexistant, même si cet état n’avait aucune incidence sur la capacité de gain de la personne assurée avant l’accident.

En vertu de l’art. 47 OLAA, l’ampleur de la réduction des indemnités pour atteinte à l’intégrité qui est opérée en raison de causes étrangères à l’accident est déterminée en fonction du rôle de celles-ci dans l’atteinte à la santé ; la situation personnelle et économique de l’ayant droit peut également être prise en considération.

Le litige ne porte pas à proprement parler sur la fixation de l’IPAI au sens des art. 24 et 25 LAA et 36 OLAA, mais sur l’ampleur de la réduction de l’indemnité en raison de l’existence d’une atteinte préexistante à l’accident, en application des art. 36 al. 2 LAA et 47 OLAA. Or cette dernière disposition prévoit expressément que la situation personnelle et économique de l’assuré peut être prise en compte dans ce calcul.

Par ailleurs, l’argument selon lequel le Tribunal fédéral ne se serait jamais intéressé aux circonstances personnelles et économiques d’un assuré pour examiner le bien-fondé d’une IPAI allouée par un assureur-accidents tombe à faux ; pour autant que cette allégation soit exacte, la juridiction cantonale n’en était pas moins fondée à tenir compte de tels critères dans le cadre de la réduction de l’indemnité, dès lors que l’art. 47 OLAA l’y autorisait expressément.

Pour le reste, l’assurance-accidents déplore que l’art. 47 in fine OLAA constitue une brèche dans le principe de l’assurance causale caractérisant l’assurance-accidents. Elle ne prétend toutefois pas, et on ne voit pas, que cette norme serait contraire à la constitution ou à la loi.

 

Situation personnelle et économique de l’assuré – 47 in fine OLAA

L’art. 47 OLAA est de nature potestative et relève par conséquent du pouvoir d’appréciation de l’administration et du juge. Par situation personnelle et économique, on entend les charges familiales, la situation financière (revenus et fortune), ainsi que les dettes (VOLLENWEIDER/BRUNNER, in Basler Kommentar zum Unfallversicherungsgesetz, 2019, n° 36 ad art. 36 LAA et les références citées).

En l’espèce, la prise en compte de la situation personnelle et économique de l’assuré a conduit les premiers juges à réduire l’IPAI au taux de 20% plutôt qu’à celui de 17,5% qui correspondait strictement aux causes étrangères à l’accident, soit une différence de 2,5% seulement.

L’assuré a exposé n’avoir dégagé aucun revenu de deux premiers exercices comptables (2012 et 2013) de sa nouvelle société créée en juillet 2012 et s’être octroyé un salaire mensuel d’environ 1500 fr. en 2014. Il a en outre fait état, en juillet 2012, d’un burn-out provoqué par une procédure de divorce, du versement d’une contribution d’entretien de plus de 4000 fr. y afférente et du loyer d’un ancien domicile, ainsi que d’un cancer dont il aurait souffert. En juillet 2015, il a sollicité l’octroi d’une avance sur l’IPAI, en arguant d’une future intervention chirurgicale devant entraîner une incapacité de travail de deux mois, avec pour conséquence des difficultés pour s’acquitter de ses charges professionnelles. L’assurance-accidents lui a d’ailleurs accordé l’avance requise en août 2015, puis une nouvelle fois en juin 2016. Le fait que l’assuré aurait, selon l’assurance-accidents, agi de manière déraisonnable en fondant une nouvelle entreprise dans le domaine de la mécanique postérieurement à son accident et malgré l’apparition de limitations fonctionnelles ne s’avère enfin pas pertinent ; au vu de l’art. 47 OLAA, la prise en compte de la situation personnelle et économique de l’assuré n’est pas conditionnée à un comportement non fautif de celui-ci.

 

Au vu de ce qui précède, on ne saurait faire grief à la cour cantonale d’avoir abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant que la situation personnelle et économique de l’assuré justifiait de fixer le taux de l’IPAI à 20% et non à 17,5%.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_808/2019 consultable ici

 

 

8C_122/2019 (f) du 10.09.2019 – Revenu d’invalide / Pas d’abattement pour des travaux légers ne nécessitant pas le port régulier de charges excédant les 3 à 4,5 kg ou de mouvement répétitif de flexion-extension du coude droit / Critère de l’âge en LAA / Evaluation de l’IPAI / Frais d’expertise privée à la charge de l’assurance-accidents

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_122/2019 (f) du 10.09.2019

 

Consultable ici

 

Revenu d’invalide / 16 LPGA

Pas d’abattement sur le salaire statistique pour des travaux légers ne nécessitant pas le port régulier de charges excédant les 3 à 4,5 kg ou de mouvement répétitif de flexion-extension du coude droit

Critère de l’âge en assurance-accidents – Question encore laissée indécise

Evaluation de l’IPAI / 24 LAA – 25 LAA – Annexe 3 OLAA

Frais d’expertise privée à la charge de l’assurance-accidents

 

Assuré, né en 1966, travaillait comme maçon, lorsque le 08.07.2015, alors qu’il était occupé à des travaux d’aménagement d’une villa, la toiture d’une véranda, sous laquelle il se trouvait, s’est effondrée. Admis en urgence à l’hôpital, il a subi deux interventions chirurgicales les 08.07.2015 et 10.07.2015 en raison de multiples plaies et coupures au niveau des membres supérieurs, principalement du membre droit (avant-bras droit: sections 100% du long extenseur radial et 70% du court extenseur radial du carpe, section 10% du nerf musculo-cutané; bras droit: section du muscle brachio radialis biceps et brachial, section d’un fascicule du nerf radial, section 100% du nerf musculo-cutané; main gauche: section 100% extenseur D3 zone 4 avec arthrotomie, section moins de 50% en zone 4 au niveau de D2 et de D4).

L’assuré, en incapacité totale de travail depuis l’accident, a repris son activité à titre thérapeutique à 50% à compter du 01.02.2016.

Par décision, l’assurance-accidents a reconnu le droit de l’assuré à une rente d’invalidité fondée sur une incapacité de gain de 20% à partir du 01.10.2016 et lui a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 5%. A l’appui de son opposition, l’assuré a produit un rapport d’expertise privée d’un spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur. L’assurance-accidents a soumis cet avis médical à sa spécialiste en chirurgie générale et traumatologie. Sur la base du rapport de cette dernière, l’assurance-accidents a admis partiellement l’opposition et a porté le taux d’invalidité à 21% et celui de l’atteinte à l’intégrité à 7,5%.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/13/2019 – consultable ici)

La cour cantonale a considéré que la question de la pertinence des DPT choisies par l’assurance-accidents pouvait rester ouverte. En effet, en se référant au calcul du revenu d’invalide opéré par l’assuré dans son recours au moyen de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS), elle obtenait un taux d’invalidité inférieur à celui fixé par l’assurance-accidents dans sa décision sur opposition. Au sujet de l’abattement, de l’avis de la cour cantonale, les limitations fonctionnelles étaient en effet déjà prises en compte dans le salaire d’invalide et les autres facteurs de réduction que l’assuré proposait de retenir (âge, nationalité et manque de formation) n’entraient pas en ligne de compte.

Par jugement du 14.01.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu d’invalide – Abattement

Le point de savoir s’il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d’autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral (ATF 142 V 178 consid. 2.5.9 p. 191; 137 V 71 consid. 5.1 p. 72).

Dans le rapport d’expertise privée, le spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur indique que l’assuré ne peut plus fléchir complètement son coude droit ; cela provoque des douleurs, des décharges électriques et un manque de force au niveau du biceps brachial. Il considère que l’assuré peut exercer une activité où son membre supérieur droit ne porte pas de charges plus lourdes que 3 kg « dans moins de 10% du temps », sans travail répétitif de ce membre et sans exercice de motricité relativement fine avec la main droite. Il précise ensuite que la force du biceps est mesurée à environ 6-7 kg au test de force maximale et que cette charge ne peut donc pas être répétée plusieurs fois par jour. Pour un travail répétitif, la charge devrait être plutôt aux alentours de 4,5 kg. Quant à la médecin-conseil, elle indique rejoindre partiellement l’avis de l’expert privé quant à l’exigibilité. Elle soutient que, dans l’ancienne activité de l’assuré, il conviendrait de tenir compte d’une perte de rendement de 25%, puisque le port de charges supérieures à 7 kg et les mouvements répétitifs de flexion-extension du coude doivent être évités. Dans ce cas de figure, il serait judicieux, selon elle, que l’assuré alterne les tâches administratives en sa qualité de chef d’entreprise avec les tâches sur le terrain, afin de soulager son membre supérieur droit. Par contre, dans une activité respectant les limitations fonctionnelles précitées, la capacité de travail est totale.

Aussi, les appréciations des deux médecins ne divergent-elles que légèrement sur l’étendue des limitations et ne sont en tout cas pas contradictoires. L’on peut retenir sur la base de ces avis médicaux que les limitations fonctionnelles portent sur les mouvements répétitifs au niveau du coude droit et sur le port de charges de plus de 7 kg et qu’il s’agit là d’une valeur maximale en ce sens que le port de charges, même inférieures à ce seuil, doit être alterné avec des périodes de repos du membre supérieur droit. Cela dit, au regard des activités physiques ou manuelles simples que recouvrent les secteurs de la production et des services (tableau TA1_skill_level ESS), un nombre suffisant d’entre elles correspondent à des travaux légers ne nécessitant pas le port régulier de charges excédant les 3 à 4,5 kg (admis par l’expert privé) ou de mouvement répétitif de flexion-extension du coude droit, comme en particulier les activités de contrôle et de surveillance. Une déduction supplémentaire sur le salaire statistique ne se justifie donc pas pour tenir compte des circonstances liées au handicap de l’assuré. En effet, un abattement n’entre en considération que si, dans un marché du travail équilibré, il n’y a plus un éventail suffisamment large d’activités accessibles à l’assuré (cf. en dernier lieu arrêt 8C_174/2019 du 9 juillet 2019 consid. 5.2.2 et et les arrêts cités).

En ce qui concerne le critère de l’âge, le Tribunal fédéral n’a pas encore tranché le point de savoir si, dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire, il constitue un critère d’abattement ou si l’influence de l’âge sur la capacité de gain doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l’art. 28 al. 4 OLAA (voir les arrêts 8C_878/2018 du 21 août 2019 consid. 5.3.1; 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5, in SVR 2018 UV n° 40 p. 145; 8C_439/2017 du 6 octobre 2017 consid. 5.6.4, in SVR 2018 UV n° 15 p. 50). Cette question peut encore demeurer indécise en l’espèce dans la mesure où l’assuré n’expose pas en quoi ses perspectives salariales seraient concrètement réduites sur un marché du travail équilibré à raison de son âge. En outre, il était âgé de 50 ans au moment de la naissance du droit à la rente, soit un âge relativement éloigné de celui de la retraite. Quant à l’absence d’expérience et de formation, elle ne joue pas de rôle lorsque le revenu d’invalide est déterminé en référence au salaire statistique auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives de niveau de compétence 1. En effet, ce niveau de compétence de l’ESS concerne une catégorie d’emplois ne nécessitant ni formation ni expérience professionnelle spécifique (arrêt 8C_103/2018 du 25 juillet 2018 consid. 5.2). Au demeurant, si l’assuré allègue être de langue maternelle espagnole et n’avoir suivi aucune autre formation que celle de maçon, il n’en demeure pas moins qu’il admet bien parler le français, étant arrivé en Suisse à l’âge de 17 ans, et qu’après un apprentissage de maçon et une expérience auprès d’un second employeur, il est parvenu à fonder sa propre entreprise au service de laquelle il a travaillé pendant presque vingt ans (cf. à ce sujet le rappel anamnestique du rapport d’expertise).

Compte tenu de ce qui précède, les juges cantonaux étaient fondés à refuser de procéder à un abattement sur le revenu d’invalide.

 

IPAI

La fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité dépend uniquement de facteurs médicaux objectifs valables pour tous les assurés, sans égard à des considérations d’ordre subjectif ou personnel ; elle n’est d’aucune manière liée à l’importance de l’incapacité de gain qu’elle est susceptible ou non d’entraîner (ATF 143 V 231 consid. 4.4.5 p. 238; 113 V 218 consid. 4b p. 221 s.). La médecin-conseil explique de manière circonstanciée pour quels motifs elle s’écarte de de l’évaluation de l’expert privé. Elle indique en particulier que la perte de force et le déficit en supination de 20° du coude droit ne peuvent pas être comparés à la perte même partielle d’un membre supérieur. En outre, le coude de l’assuré ne présente pas de blocage ou de déficit en flexion ou extension mais uniquement un déficit de supination, pour lequel pourrait être retenu un taux de 2,5%. Considérant que l’état du coude est plutôt similaire à une arthrose moyenne, laquelle implique une diminution de la force due aux douleurs avec ou sans diminution des amplitudes articulaires, la médecin-conseil s’est référée à la table 5 relative aux atteintes à l’intégrité résultant d’arthroses, laquelle prévoit un taux situé entre 5% et 10% en cas d’arthrose moyenne, et a retenu un taux global de 7,5%. Ces considérations n’apparaissent pas critiquables et ne sont pas d’ailleurs pas critiquées par l’assuré. Il y a lieu de s’y rallier.

 

Frais d’expertise privée à la charge de l’assurance-accidents

Aux termes de l’art. 45 al. 1 LPGA, les frais de l’instruction sont pris en charge par l’assureur qui a ordonné les mesures; à défaut, l’assureur rembourse les frais occasionnés par les mesures indispensables à l’appréciation du cas ou comprises dans les prestations accordées ultérieurement. Selon la jurisprudence, les frais d’expertise font partie des frais de procédure (arrêt 8C_61/2016 du 19 décembre 2016 consid. 6.1 et les arrêts cités, in SVR 2017 n° 19 p. 63). Les frais d’expertise privée peuvent être inclus dans les dépens mis à la charge de l’assureur social lorsque cette expertise était nécessaire à la résolution du litige (ATF 115 V 62 consid. 5c p. 63; arrêts 8C_61/2016 précité consid. 6.1 in fine; 8C_354/2015 du 13 octobre 2015 consid. 6.1 et les arrêt cités, in SVR UV n° 24 p. 75).

En l’espèce, même si la cour cantonale a préféré les conclusions de la médecin-conseil à celles de l’expert privé, il n’en reste pas moins que le rapport d’expertise privée a joué un rôle déterminant dans la résolution du litige. En effet, le rapport de la médecin-conseil consiste essentiellement en une prise de position sur le rapport d’expertise privée et ne peut pas être lu indépendamment de celui-ci. En outre, la médecin-conseil s’est partiellement ralliée aux conclusions de ce médecin, ce qui a conduit l’assurance-accidents à admettre l’opposition de l’assuré. Il y a donc lieu de retenir que l’expertise a été utile à la prise de décision et qu’elle a constitué une mesure indispensable à l’appréciation du cas au sens de l’art. 45 al. 1 LPGA. Dans ces conditions, on ne peut pas partager le point de vue des juges cantonaux en tant qu’ils considèrent la question de la prise en charge des frais d’expertise comme étant exorbitante de l’objet du litige. Compte tenu de la jurisprudence, on ne saurait d’ailleurs reprocher à l’assuré d’avoir attendu l’issue de la procédure d’opposition pour réclamer le remboursement de ces frais (sur le sujet voir ANNE-SYLVIE DUPONT, in Commentaire Romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n° 14 ad art. 45 LPGA; UELI KIESER, ATSG-Kommentar, 3 e éd. 2015, n os 19-21 LPGA). Partant, en refusant à l’assuré le remboursement par l’assurance-accidents des frais d’expertise privée, la juridiction cantonale a violé le droit fédéral. Sur ce point, le recours se révèle bien fondé.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assuré, reformant le jugement cantonal en ce sens que l’assuré a droit au remboursement par l’assurance-accidents des frais d’expertise privée.

 

 

Arrêt 8C_122/2019 consultable ici

 

 

8C_253/2019 (f) du 13.11.2019 – Lien de causalité naturelle – Accident de type « coup du lapin », traumatisme analogue ou de TCC sans preuve déficit fonctionnel organique – Durée de latence entre accident et apparition des douleurs dans la région de la nuque ou de la colonne cervicale / Pas d’IPAI pour les décompensations temporaires dues à l’accident

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_253/2019 (f) du 13.11.2019

 

Consultable ici

 

Lien de causalité naturelle – Accident de type « coup du lapin », de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral sans preuve d’un déficit fonctionnel organique / 6 LAA

Durée de latence entre l’accident et l’apparition des douleurs dans la région de la nuque ou de la colonne cervicale

IPAI / 24 s. LAA – 36 OLAA

Pas d’IPAI lorsque la perte d’une ou de plusieurs dents peut être compensée par des couronnes ou des ponts fixes

Pas d’IPAI pour les décompensations temporaires dues à l’accident

 

Assurée, née en 1981, au bénéfice d’une curatelle de portée générale (après avoir été placée sous tutelle en 2006), a travaillé d’août 2009 à septembre 2010 en tant qu’aide de maison à 75%. Dès le 01.10.2010, elle a perçu des indemnités journalières de l’assurance-chômage.

Le 20.10.2010, vers 5h15, alors qu’elle se trouvait sur la chaussée, l’assurée a été percutée par une voiture roulant entre 60 et 65 km/h. Elle a été héliportée à l’hôpital, où un examen sanguin a révélé une alcoolémie de 2,8 g/L. L’hospitalisation due au polytraumatisme subi a duré jusqu’au 20.01.2011, date de son retour à domicile.

Le traitement à la sortie de l’hôpital a consisté principalement en une médication et des séances d’ergothérapie et de physiothérapie. En raison de la persistance des douleurs et de la nécessité d’une rééducation complémentaire en milieu stationnaire, l’assurée a séjourné à la Clinique romande de réadaptation du 27.03.2012 au 25.04.2012. Sur le plan psychique, elle a dû être hospitalisée en 2011 à la suite de tentatives de suicide, puis en 2015 pour mise à l’abri d’un risque auto-agressif. Les pièces médicales recueillies au dossier ont montré par ailleurs que l’assurée avait fait l’objet d’hospitalisations en milieu psychiatrique antérieures à l’accident du 20.10.2010.

L’assurance-accidents a mis un terme au versement de l’indemnité journalière et à la prise en charge des frais médicaux au 31.08.2016, sous réserve des contrôles médicaux encore nécessaires. Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a nié le droit de l’assurée à une rente d’invalidité, compte tenu d’une incapacité de gain due aux lésions somatiques de 4%, soit un taux inférieur aux 10% ouvrant le droit à la prestation en cause. En ce qui concernait les troubles psychiques, elle a retenu que le statu quo sine avait été atteint au 20.06.2016 au plus tard. Enfin, elle a reconnu le droit de l’assurée à une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 15%.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 101/17-30/2019 – consultable ici)

Se prononçant sur l’étendue des séquelles de l’accident du 20.10.2010, les juges cantonaux ont constaté que seules persistaient des séquelles orthopédiques relativement modérées. Sur le plan psychique, la cour cantonale a retenu que la décompensation – due à l’accident – du trouble de la personnalité préexistant n’était plus observable lors de l’examen du psychiatre-conseil de l’assurance-accidents du 20.06.2016, de sorte que le statu quo sine était atteint à cette date.

Par jugement du 07.03.2019, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Causalité naturelle

En matière de lésions du rachis cervical par accident de type « coup du lapin », de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral sans preuve d’un déficit fonctionnel organique, l’existence d’un lien de causalité naturelle entre l’accident et l’incapacité de travail ou de gain doit en principe être reconnue en présence d’un tableau clinique typique présentant de multiples plaintes (maux de têtes diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc.). Il faut cependant que l’existence d’un tel traumatisme et de ses suites soit dûment attestée par des renseignements médicaux fiables (ATF 134 V 109 consid. 9.1 p. 122). Se fondant sur l’expérience médicale selon laquelle les troubles au niveau de la région cervicale apparaissent en principe dans un court laps de temps après l’accident, la jurisprudence prend parfois également en compte une certaine période de latence par rapport à l’apparition des symptômes du tableau clinique, sans toutefois établir une règle stricte quant à la durée au cours de laquelle ceux-ci doivent se manifester. Des durées de latence tels que 11 jours entre l’accident et l’apparition des douleurs dans la région de la nuque ou de la colonne cervicale, respectivement 7 mois ou plus de 5 ans, ont conduit à nier la survenance d’un traumatisme de type « coup du lapin » (FRÉSARD/MOSER-SZELESS, L’assurance-accidents obligatoire, in Soziale Sicherheit, SBVR vol XIV, 3 e éd. 2016, n. 112 p. 932, et les références citées).

En l’espèce, le spécialiste en neurologie consulté par l’assurée fait état de céphalées quotidiennes et de troubles de la mémoire occasionnels plus de quatre ans après la survenance de l’accident, sans que l’on sache quand ces troubles auraient débuté. En outre, selon ce médecin, les céphalées ont un caractère « tensionnel » et, dans le contexte global, sont plus probablement en relation avec les facteurs psychiques que de nature accidentelle, tout comme les troubles de la mémoire occasionnels. Dans ces conditions, on ne saurait admettre l’existence d’un lien de causalité naturelle entre les céphalées et troubles de la mémoire et l’accident du 20.10.2010, respectivement le traumatisme cranio-cérébral.

Quant aux décompensations psychiques survenues en 2011 et 2014, le psychiatre-conseil de l’assurance-accidents indique que, si elles étaient causées partiellement par les conséquences de l’accident de 2010, une décompensation du trouble de la personnalité préexistant n’était plus observable actuellement. Il conclut que le statu quo sine a été atteint et exclut tout lien de causalité naturelle entre l’accident et les troubles psychiques persistants.

Il s’ensuit qu’en l’absence de lien de causalité naturelle entre l’accident et les troubles allégués par l’assurée (céphalées, troubles de la mémoire et décompensations psychiques), il n’y a pas lieu d’examiner le cas à la lumière des critères jurisprudentiels en matière de causalité adéquate.

 

IPAI

Dans son rapport, le spécialiste en chirurgie et médecin-conseil de l’assurance-accidents a tenu compte du préjudice esthétique dans le calcul du taux de l’atteinte à l’intégrité (« A ces 10%, il convient d’ajouter 5% prenant en compte une légère dérotation et un petit raccourcissement du MIG [membre inférieur gauche] ainsi qu’un certain préjudice esthétique »).

En ce qui concerne les lésions dentaires, l’assurée ne se prévaut d’aucun avis médical pour étayer son droit à une indemnisation. En outre, rien au dossier n’indique qu’elle souffrirait d’une grave atteinte à la capacité de mastiquer, pour laquelle un taux de 25% est reconnu selon l’annexe 3 à l’OLAA. L’assurée ne soutient pas non plus que les conditions d’une indemnisation sur la base de la Table 15 (« Atteinte à l’intégrité en cas de dégâts dentaires dus à un accident ») publiée par la division médicale de la CNA seraient remplies, étant précisé que selon cette table, une indemnité n’est pas due lorsque la perte d’une ou de plusieurs dents peut être compensée par des couronnes ou des ponts fixes.

Quant aux décompensations temporaires dues à l’accident, elles ne peuvent pas non plus justifier l’octroi d’une indemnité dès lors que l’atteinte indemnisée doit être durable, ce qui est le cas lorsqu’il est prévisible que l’atteinte subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie (art. 36 al. 1, première phrase, OLAA).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_253/2019 consultable ici

 

 

8C_219/2018 (f) du 05.07.2018 – Taux d’IPAI pour coxarthrose / 24 LAA – 36 OLAA / Prévisibilité de l’évolution future – Pose d’une prothèse totale de hanche (PTH) probable mais à une échéance inconnue (court/moyen/long terme)

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_219/2018 (f) du 05.07.2018

 

Consultable ici

 

Taux d’IPAI pour coxarthrose / 24 LAA – 36 OLAA

Prévisibilité de l’évolution future – Pose d’une prothèse totale de hanche (PTH) probable mais à une échéance inconnue (court/moyen/long terme)

 

Assuré, maçon, a été victime d’un accident professionnel le 28.06.2013. Les médecins ont diagnostiqué une fracture du mur postérieur du cotyle gauche totalement incapacitante. La situation ayant dans un premier temps évolué favorablement, l’assuré a essayé de reprendre son travail à mi-temps. Toutefois, cette tentative s’est soldée par un échec en raison de la réapparition des douleurs en lien désormais avec le développement d’une coxarthrose post-traumatique d’après différents médecins traitants. L’exercice d’une activité adaptée étant encore exigible, l’assuré a tenté à nouveau de reprendre son emploi dans un cadre thérapeutique, mais en vain. Des mesures de réadaptation entreprises par l’office AI n’ont pas obtenu plus de succès. A défaut d’un traitement spécifique administré par ses médecins, l’assuré a été soumis à un examen médical. Le médecin d’arrondissement a considéré que la coxarthrose débutante justifiait l’octroi d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 10% et autorisait la reprise d’un travail adapté à plein temps.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a reconnu le droit de l’intéressé à une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 23% à compter du 01.10.2015 et à une indemnité correspondant à une diminution de l’intégrité de 10%.

 

Procédure cantonale

Les juges cantonaux ont constaté qu’en retenant le taux inférieur (10%) prévu pour les cas d’arthrose moyenne par la « Table 5: Taux d’atteinte à l’intégrité résultant d’arthroses » publiée par les médecins de la CNA, le médecin d’arrondissement avait pris en considération la péjoration prévisible de la coxarthrose qui était qualifiée de débutante. Ils se posaient cependant la question de savoir si l’implantation d’une prothèse totale de hanche pouvait être prise en compte au même titre. Le tribunal cantonal a déduit des divers éléments que l’évolution de la coxarthrose allait aboutir à la pose d’une prothèse totale de hanche et que la prévisibilité de cette intervention chirurgicale était acquise de sorte qu’il fallait en tenir compte dans la détermination du taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité.

Par jugement du 06.02.2018, admission partielle du recours par le tribunal cantonal. Il a annulé la décision sur opposition, uniquement en tant qu’elle portait sur le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, et a renvoyé la cause à l’assureur-accidents pour qu’il en complète l’instruction et rende une nouvelle décision qui tienne compte de l’évolution future de la coxarthrose. Il a confirmé la décision pour le surplus.

 

TF

Selon l’art. 24 al. 1 LAA, l’assuré qui souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique par suite de l’accident a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité. Aux termes de l’art. 36 al. 1 OLAA (RS 832.802), une atteinte à l’intégrité est réputée durable lorsqu’il est prévisible qu’elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie; elle est réputée importante lorsque l’intégrité physique, mentale ou psychique subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave.

D’après l’art. 25 al. 1 LAA, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est allouée sous forme de prestation en capital; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l’époque de l’accident et elle est échelonnée selon la gravité de l’atteinte à l’intégrité. Aux termes de l’art. 25 al. 2 LAA, le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l’indemnité. Il a fait usage de cette délégation de compétence à l’art. 36 OLAA. Selon l’al. 2 de cette disposition réglementaire, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est calculée selon les directives figurant à l’annexe 3 de l’OLAA. Cette annexe comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (cf. ATF 124 V 29 consid. 1b p. 32, 209 consid. 4a/bb p. 210; 113 V 218 consid. 2a p. 219) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent. L’indemnité allouée pour les atteintes à l’intégrité désignées à l’annexe 3 de l’OLAA s’élève, en règle générale, au pourcentage indiqué du montant maximum du gain assuré (ch. 1 al. 1). Pour les atteintes à l’intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, compte tenu de la gravité de l’atteinte (ch. 1 al. 2). La Division médicale de la CNA a établi des tables d’indemnisation en vue d’une évaluation plus affinée de certaines atteintes (Indemnisation des atteintes à l’intégrité selon la LAA). Ces tables n’ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s’agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l’égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l’annexe 3 de l’OLAA (cf. ATF 124 V 209 consid. 4a/cc p. 211; 116 V 156 consid. 3a p. 157; arrêt U 245/96 du 30 décembre 1997 consid. 2a in RAMA 1998 n o U 296 p. 235).

Aux termes de l’art. 36 al. 4 OLAA, il est équitablement tenu compte des aggravations prévisibles de l’atteinte à l’intégrité; une révision n’est possible qu’en cas exceptionnel si l’aggravation est importante et n’était pas prévisible. S’il y a lieu de tenir équitablement compte d’une aggravation prévisible de l’atteinte lors de la fixation du taux de l’indemnité, cette règle ne vise toutefois que les aggravations dont la survenance est vraisemblable et l’importance quantifiable (arrêt 8C_494/2014 du 11 décembre 2014 consid. 6.2 et la référence in SVR 2015 UV n° 3 p. 8).

 

Selon le Tribunal fédéral, le jugement cantonal n’est pas critiquable.

Compte tenu des documents médicaux disponibles, il est établi et admis de tous que la coxarthrose diagnostiquée, certes débutante, évolue et continuera d’évoluer négativement, raison pour laquelle une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 10% avait été octroyée à l’issue de la procédure administrative. Cependant, l’évolution continue de la pathologie peut déboucher à moyen ou long terme sur l’implantation d’une prothèse de hanche. Si cette éventualité n’est pas exclue par le médecin d’arrondissement, elle est pratiquement certaine pour les autres médecins consultés : le médecin adjoint de la clinique de chirurgie orthopédique de l’hôpital X.__ proposait l’opération de la hanche à titre de mesure thérapeutique alternative à un traitement conservateur ; le spécialiste en médecine interne générale affirmait la nécessité d’une telle opération mais la jugeait seulement prématurée ; le spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur partageait cette dernière opinion.

Or, dans un cas similaire (cf. arrêt 8C_459/2008 du 4 février 2009 consid. 2 in SVR 2009 UV n° 27 p. 97), le Tribunal fédéral avait admis la prévisibilité d’une aggravation de l’atteinte à l’intégrité dans la mesure où l’expert mandaté avait jugé « possible d’envisager la mise en place d’une prothèse du genou » compte tenu de « l’évolution toujours défavorable de l’arthrose » (cf. consid. 2.2). La juridiction cantonale pouvait dès lors légitimement annuler la décision sur opposition, en tant qu’elle portait sur le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité, et inviter l’assureur-accidents à tenir compte d’une aggravation prévisible de la situation plus importante que celle retenue.

On ajoutera que les rapports médicaux disponibles ne permettent pas de déterminer l’importance de l’aggravation. Or, selon la jurisprudence, le taux d’une atteinte à l’intégrité dont l’aggravation est prévisible au sens de l’art. 36 al. 4 OLAA doit être fixé sur la base de constatations médicales (cf. arrêt 8C_459/2008 du 4 février 2009 consid. 2.3 in SVR 2009 UV n° 27 p. 97). En l’absence de telles constatations, les premiers juges ont donc eu raison de ne pas fixer eux-mêmes le taux de l’indemnité et ont à juste titre renvoyé la cause à l’assureur-accidents pour qu’il complète l’instruction sur ce point et rende une nouvelle décision.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_219/2018 consultable ici

 

 

 

Commentaire :

Nous nous permettons de sortir de notre réserve habituelle. Nous peinons à comprendre et, surtout, à être convaincu par le raisonnement du Tribunal fédéral.

A la lecture du considérant 5.2, il apparaît que l’assureur-accidents a soulevé le fait que le médecin-conseil a intégré à son raisonnement l’évolution de la maladie dont souffre l’assuré puisque ce médecin a évalué à 10% la diminution de l’intégrité – valeur équivalant au taux minimum prévu par la table d’indemnisation pour les arthroses moyennes – alors que la coxarthrose reconnue de tous n’était qualifiée que de débutante. Par ailleurs, l’assurance-accidents a précisé que tous les médecins interrogés en l’occurrence ont mentionné le caractère débutant et évolutif de la pathologie, sans pour autant retenir des signes justifiant une intervention chirurgicale et que dans l’hypothèse d’une endoprothèse secondaire (implantée en raison d’une situation évolutive et pas directement après l’accident), le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité dépendrait selon la jurisprudence constante de la gravité de l’arthrose avant l’implant.

Comme l’a fait valoir l’assureur-accidents, la gravité de l’arthrose avant l’implant ne saurait être quantifiée actuellement. En outre, la pose d’une prothèse de la hanche en raison d’une aggravation significative de la situation pourrait justifier le cas échéant une demande de révision.

Le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à l’assureur-accidents pour déterminer derechef le taux de l’IPAI. La question qui demeure est de savoir comment déterminer actuellement la gravité de l’arthrose au moment où l’éventuelle PTH sera posée. Sans être médecin ni devin, nous ne voyons pas comment le taux d’IPAI peut être évalué, au degré de la vraisemblance prépondérante. Il est également fort à parier que si le taux retenu n’est pas le maximum selon la table IPAI n°5, le cas finira à nouveau devant les juges.

Se pose aussi la question des cas de fractures articulaires (en particulier au niveau du genou et de la hanche) avec un début d’arthrose ou d’état après rupture ligamentaire (au niveau du genou) engendrant une arthrose. L’arthrose ne pouvant être tout au plus ralentie par le traitement conservateur – sauf erreur de notre part –, comment les assureurs-accidents devront-ils procéder ? Et comment devront être sollicités, par les assurés ou leur défenseur, les médecins traitant par des questions très précises ?

Il serait intéressant de voir si, ultérieurement, notre Haute Cour confirmera ou pas cet arrêt.

 

8C_472/2016+8C_621/2016 (f) du 06.06.2017, publié ATF 143 V 231 – Détermination de la rente pour atteinte à l’intégrité dans le cas d’un assuré présentant une schizophrénie résiduelle (CIM-10 F20.5) / 48 LAM – 49 LAM

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_472/2016+8C_621/2016 (f) du 06.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2ACC9ya

Publié aux ATF 143 V 231

 

Détermination de la rente pour atteinte à l’intégrité dans le cas d’un assuré présentant une schizophrénie résiduelle (CIM-10 F20.5) l’empêchant d’entretenir une relation intime avec une femme / 48 LAM – 49 LAM

 

Assuré entré à l’école de recrues le 16.07.1979, prématurément licencié le 01.08.1979 pour des troubles qui ont été qualifiés par le médecin de troupe de dermatomycose et de névrose d’angoisse consécutive à une panique aux premiers tirs. A partir de 1988, l’assuré a suivi un traitement de psychothérapie. Son médecin traitant de l’époque a posé le diagnostic de schizophrénie paranoïde. Le cas a été annoncé à l’assurance militaire, le 15.05.1990. Après expertise judiciaire, la Cour de justice a condamné l’assurance à prendre en charge les suites de la schizophrénie paranoïde dont souffrait l’assuré. Ce faisant, l’Office fédéral de l’assurance militaire (OFAM) a octroyé à l’assuré une rente d’invalidité avec effet au 01.08.1985. Cette prestation était fondée sur une responsabilité totale de la Confédération, un taux d’indemnisation de 95% et un degré d’invalidité de 100% (depuis 1987), confirmé en instance cantonale puis fédérale (arrêt du 14.01.1999; cause M 2/98).

L’OFAM a alloué à l’assuré une rente pour une atteinte à l’intégrité de 20% dès le 01.01.1990, rachetée d’office et capitalisée au 01.11.1997, correspondait à 129’683 fr. 30. L’assuré ayant recouru contre cette décision, l’ancien Tribunal administratif a partiellement admis le recours, renvoyant la cause à l’OFAM, chargé, en particulier, de mettre en œuvre une expertise afin de déterminer si l’atteinte assurée entraînait, de façon certaine, vraisemblable ou seulement possible, « une incapacité à entretenir des relations sexuelles (impotentia coeundi), ou à entretenir des relations sexuelles stables avec une personne de l’autre sexe (impotentia generandi) ».

Après moult péripéties procédurales, la CNA, division Assurance militaire, qui était devenue entretemps l’organe d’exécution de l’assurance militaire (ci-après: la CNA) a informé l’assuré qu’elle refusait de lui accorder une rente supplémentaire au titre d’atteinte à l’intégrité (lettre du 16.07.2012). Le recours de l’assuré a été déclaré irrecevable au niveau cantonal et a été rejeté au niveau fédéral (cause 8C_77/2013). Entretemps, en date du 03.04.2013, l’assurance militaire a rendu une décision formelle par laquelle elle a confirmé son refus, confirmée sur opposition.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 25.05.2016, admission partielle du recours par le tribunal cantonal (arrêt ATAS/421/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2j0q69S). Elle a réformé la décision « en ce sens que le taux de la rente pour atteinte à l’intégrité est porté de 20% à 25% dès le 01.01.1990 pour une durée indéterminée ». Elle a dit que « le montant de la rente capitalisée correspondant portera intérêts moratoires de 5% l’an dès le 17.12.2013 ».

Le 22.06.2016, l’assurance militaire a requis de la Chambre des assurances sociales d’interpréter son arrêt du 25.05.2016 en ce sens que seul le montant correspondant au solde qui restait à payer à l’ayant droit portera intérêts moratoires de 5% l’an dès le 17.12.2013 et non pas le montant global de la rente capitalisée de 129’683 fr. 30 au 01.11.1997. Cette écriture a été transmise à l’assuré le 23.06.2016. Par courrier mis à la poste le 14.07.2016, l’assuré a également déposé une requête en interprétation de l’arrêt du 25.05.2016.

Statuant par la voie de l’interprétation le 27.07.2016 (arrêt ATAS/607/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2kqJmgN), la Chambre des assurances sociales a déclaré irrecevable la demande en interprétation présentée par l’assuré. Elle a admis la demande de l’assurance militaire et a précisé : « Dit que le montant de la rente capitalisée correspondant à cette augmentation portera intérêts moratoires de 5% l’an dès le 17.12.2013 ».

 

TF

La cause 8C_621/2016 a trait au jugement en interprétation du 27.07.2016. La cour cantonale a considéré la demande d’interprétation du recourant comme tardive au motif qu’elle n’avait pas été formée dans le délai de trente jours prévu à cet effet (art. 84 al. 2 LPA en corrélation avec l’art. 62 LPA). Le TF considère que le recours de l’assuré, si tant est qu’il soit recevable, est mal fondé.

 

Cause 8C_472/2016

Aux termes de l’art. 48 al. 1 LAM, si l’assuré souffre d’une atteinte notable et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une rente pour atteinte à l’intégrité. La rente pour atteinte à l’intégrité est fixée en pour-cent du montant annuel qui sert de base au calcul des rentes selon l’al. 4 et compte tenu de la gravité de l’atteinte à l’intégrité (art. 49 al. 2, première phrase, LAM).

Contrairement à l’ancienne pratique (ATF 117 V 71 consid. 3 a/bb/aaa p. 77), la loi ne limite pas le droit à une prestation à la seule atteinte des fonctions dites primaires de l’existence (comme la vue, l’ouïe, la faculté de marcher, etc.). Pour fixer le taux de l’indemnité il faut également prendre en considération des atteintes non fonctionnelles (comme des altérations visibles) qui représentent des entraves ou des limitations dans le mode de vie en général ou dans la jouissance de la vie. Par mode de vie en général on entend notamment l’environnement personnel et social de l’assuré. En font partie les activités sociales comme la participation à la vie associative ou culturelle ainsi que les loisirs, notamment les activités sportives, artisanales ou musicales (JÜRG MAESCHI, Kommentar zum Militärversicherungsgesetz, 2000, n° 12 s. ad art. 49 LAM). En font naturellement aussi partie les troubles de la fonction sexuelle, qu’ils soient d’origine somatique ou psychique.

Pour évaluer le préjudice résultant d’une atteinte à l’intégrité, l’OFAM a élaboré des directives internes, des tables, des échelles, etc., destinées à garantir l’égalité de traitement entre les assurés. Selon une jurisprudence constante, une telle pratique n’est en principe pas critiquable. Ces valeurs de référence fixent les grandes lignes d’évaluation, qui permettent de situer le dommage à l’intégrité. Mais, dans le cas concret, il faut examiner en tenant compte de toutes les circonstances si l’atteinte à l’intégrité correspond à cette valeur ou si elle lui est supérieure ou inférieure. On s’en écartera par exemple en présence de conséquences extraordinaires de l’événement assuré (arrêts 8C_481/2015 du 22 mars 2016 consid. 3.2; M 7/00 du 22 octobre 2001 consid. 4a; SVR 1998 MV n° 2 p. 6 consid. 3b).

En retenant un taux d’atteinte à l’intégrité de 20%, l’assurance militaire s’est fondée sur des conclusions formulées par un expert urologue et par un expert-psychiatre. Sur la base de leurs conclusions, elle a considéré que le recourant ne souffrait ni d’impotentia coeundi ni d’impotentia generandi, mais d’une problématique d’évitements relationnels d’ordre psychique.

De son côté, la juridiction cantonale s’est pour l’essentiel fondée sur les conclusions de l’expertise privée d’une spécialiste FMH en psychiatrie en retenant que la schizophrénie dont est atteint le recourant l’empêche d’entretenir une relation intime avec une femme. Elle considère, en revanche, qu’il n’y a pas de lien de causalité entre la schizophrénie et le fait de ne pas pouvoir procréer. Pour évaluer le taux de l’atteinte à l’intégrité, elle s’est inspirée des valeurs indicatives établies par l’assurance militaire en matière de lésions organiques des fonctions cérébrales (de 20% à 35% en fonction de la gravité de la lésion). Elle a estimé qu’un taux de 30% ne pouvait être retenu qu’en cas de schizophrénie sévère, alors que la schizophrénie dont souffre l’intéressé était de gravité moyenne et que celui-ci demeurait capable de mener une existence autonome. Il apparaissait en conséquence équitable de fixer à 25% le taux global de l’atteinte à l’intégrité du recourant.

Le TF considère que l’évaluation faite par la juridiction cantonale doit être confirmée. La pratique dans le domaine de l’assurance militaire retient un taux d’atteinte à l’intégrité de 20% pour la perte des fonctions sexuelles et un taux variant entre 10% et 30% pour la schizophrénie (MAESCHI, op. cit., n° 26 ad art. 49; FRANZ SCHLAURI, Die Militärversicherung, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2e éd., 2007, n° 167 p. 1126). En cas d’atteintes multiples, le dédommagement de l’atteinte à l’intégrité ne résulte toutefois pas de la simple addition des taux afférents à chacune des atteintes. Il faut, bien plutôt, procéder à une appréciation globale de la diminution de la qualité de vie qui en résulte (MAESCHI, op. cit., n° 27 ad art. 49). Cela vaut tout particulièrement lorsque les atteintes interfèrent les unes avec les autres et ne sont de ce fait pas clairement séparables (REINHARD PERREN, MV-Leistungen, in: Recht der Sozialen Sicherheit, Sozialversicherungen, Opferhilfe, Sozialhilfe, 2014, p. 838 n. 23.116).

Contrairement aux souhaits de l’assuré dans son recours, le TF rappelle que les règles d’évaluation, ainsi que la forme du dédommagement de l’atteinte à l’intégrité prévus par l’assurance militaire diffèrent de ceux de l’assurance-accidents obligatoire. Ainsi, dans l’assurance-accidents, l’atteinte à l’intégrité est évaluée de manière abstraite et égale pour tous les assurés (ATF 113 V 218 consid. 4b p. 221). On ne peut pas transposer en l’espèce – que ce soit dans l’assurance militaire ou l’assurance-accidents – les taux applicables en cas de perte des organes génitaux (ou de leur fonction) ou de la capacité de reproduction. Le recourant ne peut donc rien déduire en sa faveur du taux de 40% reconnu dans l’assurance-accidents obligatoire en cas de perte de la fonction reproductive.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_472/2016+8C_621/2016 consultable ici : http://bit.ly/2ACC9ya

 

 

8C_505/2016 (f) du 17.03.2017 – Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) – 24-25 LAA / Intérêt moratoire – 26 al. 2 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_505/2016 (f) du 17.03.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2stcOkU

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) / 24-25 LAA

Intérêt moratoire / 26 al. 2 LPGA

 

Assuré, apprenti monteur-sanitaire, s’est tordu le genou le 27.06.2012. L’IRM réalisée le 05.07.2012 a notamment mis en évidence un œdème osseux sur le versant interne de la rotule, une dysplasie grade III de la trochlée, une lésion de l’aileron rotulien interne et un œdème osseux en miroir du condyle fémoral externe. Dans un rapport d’examen final du 31.03.2014, le spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement a considéré la situation comme stabilisée et a fixé l’atteinte à l’intégrité à 7,5%, soit le taux moyen attribué à une luxation de rotule (récidivante ou habituelle) d’intensité grave (5-10%), selon la table 6, page 6.2, des barèmes d’indemnisation pour atteinte à l’intégrité selon la LAA.

Une rechute est annoncée le 03.12.2014, en raison d’une exacerbation des douleurs au genou gauche depuis le 19.11.2014. Le médecin d’arrondissement a considéré qu’il n’y avait pas d’élément objectif permettant de retenir une aggravation de la situation médicale.

Par décision du 17.03.2015, l’assurance-accidents a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) de 7,5%. L’assuré s’est opposé à cette décision en demandant que le taux de l’IPAI soit augmenté à 10% ainsi que le versement d’un intérêt moratoire, subsidiairement compensatoire de 5% dès le 27.06.2013. L’assurance-accidents a rejeté l’opposition.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 12.07.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Taux d’IPAI

En ce qui concerne le taux de l’atteinte à l’intégrité, on ne voit pas de motif de s’écarter de l’appréciation du médecin d’arrondissement, qui retient le taux moyen (entre 5 et 10%) attribué à une luxation de rotule (récidivante ou habituelle) d’intensité grave. Le diagnostic de luxation de la rotule gauche ne saurait guère être remis en cause.

 

Intérêt moratoire

Aux termes de l’art. 26 al. 2 LPGA, des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d’assurances sociales à l’échéance d’un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l’assuré fait valoir ce droit, pour autant qu’il se soit entièrement conformé à l’obligation de collaborer qui lui incombe. Selon l’art. 24 al. 2 LAA, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est fixée en même temps que la rente d’invalidité ou, si l’assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé.

In casu, dans son rapport d’examen final du 31.03.2014, le médecin d’arrondissement a considéré la situation de l’assuré comme stabilisée dès lors qu’après de multiples investigations et une prise en charge au long cours, il n’y avait plus lieu d’attendre de bénéfice de la poursuite à long terme de mesures de physiothérapie.

Le traitement médical de l’assuré devait être considéré comme terminé au plus tôt le 31.03.2014. Entre ce moment et la décision de l’assurance-accidents du 17.03.2015 fixant le taux de l’atteinte à l’intégrité à 7,5%, moins de douze mois se sont écoulés. C’est dès lors à juste titre que les premiers juges ont nié le droit du recourant à un intérêt moratoire, respectivement compensatoire sur le montant de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité perçue.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_505/2016 consultable ici : http://bit.ly/2stcOkU

 

 

8C_929/2015 (f) du 05.12.2016 – Troubles psychiques et causalité adéquate / Casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route / Accident de gravité moyenne à la limite des cas grave / IPAI pour séquelles psychiques et état antérieur

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_929/2015 (f) du 05.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jeT54s

 

Troubles psychiques et causalité adéquate – 6 LAA

Casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route

Accident de gravité moyenne à la limite des cas grave – Choc auto-vélo – Assurée projetée à 22 mètres

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) pour séquelles psychiques et état antérieur – 24 LAA – 25 LAA

 

Assurée qui a été victime d’un accident de la circulation le 17.09.2002 : alors qu’elle circulait à bicyclette, l’intéressée, qui circulait entre deux voies de direction, s’est déplacée sur la droite pour une raison inconnue et l’automobile qui la suivait a heurté l’arrière du vélo. Le point de chute de l’assurée se situait à 22 mètres environ du lieu de l’impact. Les médecins du service des urgences ont diagnostiqué une large plaie de type dégantage située au niveau de la partie postéro-latérale du mollet gauche, associée à une fracture du péroné. Dans un rapport du 17.02.2003, un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie a indiqué l’existence d’un état dépressif consécutif à l’accident.

L’assurance-accidents supprimé le droit de l’assurée à des prestations d’assurance (frais de traitement et indemnité journalière) à compter du 31.01.2010. En outre, elle a nié le droit de l’intéressée à une rente d’invalidité et lui a alloué une IPAI fondée sur un taux de 20% en raison des séquelles au membre inférieur gauche. Elle a nié l’existence d’un lien de causalité adéquate entre l’accident et les troubles psychiques présentés. Quant aux séquelles physiques de l’accident, elles n’entraînaient pas de limitation dans l’activité professionnelle exercée par l’intéressée avant son chômage.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/850/2015 – consultable ici : http://bit.ly/2jvpZi6)

Par jugement du 11.11.2015, admission du recours par le tribunal cantonal. La cour a reconnu le droit de l’assurée à une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 100% à compter du 01.02.2010, ainsi qu’à une IPAI fondée sur un taux de 93%, sous déduction de l’indemnité d’un taux de 20% déjà allouée.

 

TF

 

Classification de l’accident – Accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves

Pour procéder à la classification de l’accident dans l’une des trois catégories prévues par la jurisprudence, il faut uniquement se fonder, d’un point de vue objectif, sur l’événement accidentel lui-même. Sont déterminantes les forces générées par l’accident et non pas les conséquences qui en résultent. La gravité des lésions subies – qui constitue l’un des critères objectifs pour juger du caractère adéquat du lien de causalité – ne doit être prise en considération à ce stade de l’examen que dans la mesure où elle donne une indication sur les forces en jeu lors de l’accident (SVR 2013 UV n° 3 p. 7, 8C_398/2012, consid. 5.2; SVR 2012 UV n° 23 p. 83, 8C_435/2011, consid. 4.2; arrêt 8C_818/2015 du 15 novembre 2016 consid. 5.1).

Si l’on se réfère à la casuistique des accidents concernant des cyclistes renversés par un autre usager de la route (véhicule automobile ou cyclomoteur), les cas classés dans la catégorie des accidents de gravité moyenne ont en commun le fait que la collision s’est produite alors que le véhicule impliqué circulait à une vitesse plutôt modérée (voir par exemple les arrêts 8C_62/2013 du 11 septembre 2013 consid. 7.3; 8C_816/2012 du 4 septembre 2013; 8C_530/2007 du 10 juin 2008). En revanche, l’accident subi par un cycliste violemment percuté par une voiture à une intersection et projeté à 30 mètres de la zone de choc a été classé dans la catégorie des accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves (arrêt 8C_818/2015, déjà cité, consid. 5.3).

En l’espèce, les éléments recueillis par la gendarmerie permettent de retenir que le heurt a été très violent. Il est en effet établi que la conductrice du véhicule circulait à une vitesse de 60 à 70 km/h au moment où elle a heurté l’arrière du vélo de l’assurée. En outre, celle-ci a été projetée à 22 mètres environ de la zone de choc. A cet égard, il y a lieu de dénier toute pertinence pour l’appréciation de la gravité de l’accident à l’argument de l’assurance-accidents, selon lequel une telle distance est une réaction physique habituelle en cas d’impact entre une voiture et un cycliste lorsque celui-ci ne rencontre aucun obstacle susceptible de le stopper. Quant aux lésions physiques provoquées par l’accident, elle ne permettent pas de nier que les forces en jeu lors de la collision étaient importantes.

Au regard de la violence du choc, c’est donc à bon droit que les juges cantonaux ont rangé l’événement du 17.09.2002 parmi les accidents de gravité moyenne à la limite des cas graves.

 

Caractère particulièrement impressionnant de l’accident laissé indécis

En présence d’un événement accidentel à la limite des cas graves, un seul critère parmi ceux déterminants peut être suffisant pour conclure à l’existence d’un lien de causalité adéquate entre des troubles psychiques et un accident (ATF 115 V 133 consid. 6 c/bb p. 140; 403 consid. 5 c/bb p. 409). C’est pourquoi, en l’espèce, on peut laisser indécis le point de savoir si, au regard de la jurisprudence précitée et compte tenu de l’amnésie présentée par l’assurée, le critère du caractère impressionnant de l’accident est réalisé.

 

Critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques

Les lésions subies par l’assurée ne se limitent pas à l’état cicatriciel, d’ailleurs important, qui subsiste dans la partie postérieure de la jambe gauche. Il subsiste en outre des séquelles neurologiques avec troubles de la sensibilité affectant plusieurs nerfs, à savoir le nerf sural, le musculo-cutané et le nerf saphène interne gauche. Ces séquelles ont pour effet de diminuer la résistance de la jambe gauche à l’effort et d’entraîner de multiples limitations. Qui plus est, les experts ont mis en évidence une hyposmie partielle gauche en lien avec l’accident. Cela étant, il n’y a pas lieu de mettre en cause le point de vue des premiers juges selon lequel le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques est en l’occurrence réalisé. En présence d’un accident à la limite des cas graves, cela suffit pour reconnaître le caractère adéquat du lien de causalité en ce qui concerne les troubles psychiques de l’assurée.

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) pour séquelles psychiques et état antérieur

Selon l’art. 24 LAA, l’assuré qui souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique par suite de l’accident a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité (al. 1). L’indemnité est fixée en même temps que la rente d’invalidité ou, si l’assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2).

Aux termes de l’art. 25 al. 2 LAA, le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l’indemnité. Il a fait usage de cette délégation de compétence à l’art. 36 OLAA (RS 832.802). Selon l’al. 2 de cette disposition réglementaire, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est calculée selon les directives figurant à l’annexe 3 à l’OLAA. Cette annexe comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b p. 32, 209 consid. 4a/bb p. 210; 113 V 218 consid. 2a p. 219) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent. Pour les atteintes à l’intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, compte tenu de la gravité de l’atteinte (ch. 1 al. 2). La Division médicale de la CNA a établi des tables d’indemnisation en vue d’une évaluation plus affinée de certaines atteintes (Indemnisation des atteintes à l’intégrité selon la LAA). Ces tables n’ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s’agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l’égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l’annexe 3 à l’OLAA (ATF 124 V 209 consid. 4a/cc p. 211; 116 V 156 consid. 3a p. 157; RAMA 1998 n° U 296 p. 235, U 245/96 consid. 2a).

En l’espèce, les experts ont fixé à 23% le taux de l’atteinte à l’intégrité en relation avec les séquelles somatiques de l’accident. Ils ont indiqué que les séquelles psychiques, qualifiées de modérées à sévères, ouvrent droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 70%. Cependant, étant donné que l’atteinte psychique est influencée par un état antérieur, à savoir un trouble de la personnalité émotionnellement labile, type borderline, décompensé, les experts ont pondéré ce taux à raison de 50% pour conclure à un taux de 35% en ce qui concerne les séquelles psychiques et à un taux global de 58% (23% + 35%). De son côté, la cour cantonale a considéré que la réduction de 50% opérée sur le taux d’atteinte psychique de 70% en raison du trouble de la personnalité préexistant n’était pas justifiée.

Selon la table 19 des indemnisations des atteintes à l’intégrité selon la LAA, il n’est pas toujours aisé d’opérer une césure entre troubles somatiques et psychiques. Si, à la suite d’un polytraumatisme, des troubles fonctionnels d’étiologie somatique et des douleurs chroniques persistent, les troubles psychiques que celles-ci ont induits sont pris en compte globalement dans l’évaluation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité. Toutefois, dans les éventualités où des troubles psychiques de nature différente sont constatés, une évaluation psychiatrique est nécessaire pour déterminer si une atteinte à l’intégrité psychique supplémentaire est présente qui n’a pas été prise en compte dans l’estimation de base. Si les symptômes psychiques ne sont, en soi, pas spécifiques, certains diagnostics, comme l’état de stress post-traumatique séquellaires à un accident, sont considérés comme tels.

En l’occurrence, on ne saurait dès lors critiquer le point de vue des premiers juges en tant qu’ils ont additionné les atteintes en relation avec les troubles somatiques, d’une part, et psychiques, d’autre part. En revanche, dans la mesure où elle a nié – à juste titre – l’existence d’un lien de causalité entre l’accident et le trouble de la personnalité émotionnellement labile, type borderline, décompensé, la juridiction précédente n’était pas fondée à s’écarter du taux de 35% attesté par les experts en relation avec les séquelles psychiques de l’accident. Le taux global de l’atteinte à l’intégrité doit dès lors être fixé à 58% (23% + 35%) au lieu de 93%. Dans cette mesure, le recours se révèle partiellement bien fondé.

 

Le TF accepte partiellement le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_929/2015 consultable ici : http://bit.ly/2jeT54s

 

 

8C_192/2015 (f) du 01.03.2016 – Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) et état antérieur / 24 LAA – 36 al. 2 LAA – 47 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_192/2015 (f) du 01.03.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1OXrAW2

 

Indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) et état antérieur / 24 LAA – 36 al. 2 LAA – 47 OLAA

 

TF

La fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité dépend exclusivement de facteurs médicaux objectifs et n’est d’aucune manière liée à l’importance de l’incapacité de gain que l’atteinte en cause est susceptible ou non d’entraîner (ATF 113 V 218 consid. 4a p. 221).

L’expert privé et un des médecins de la division de médecine des assurances de l’assurance-accidents admettent l’existence d’un état antérieur auparavant asymptomatique à l’épaule droite, même si leurs avis respectifs s’opposent sur l’importance de cet état antérieur.

Selon l’art. 36 al. 2 LAA, les rentes d’invalidité, les indemnités pour atteinte à l’intégrité ainsi que les rentes de survivants sont réduites de manière équitable lorsque l’atteinte à la santé ou le décès ne sont que partiellement imputables à l’accident (première phrase). Toutefois, en réduisant les rentes, on ne tiendra pas compte des états antérieurs qui ne portaient pas atteinte à la capacité de gain (seconde phrase).

Partant du principe que l’assurance-accidents n’intervient que pour les conséquences des accidents, l’art. 36 al. 2, première phrase, LAA prévoit donc une réduction possible des indemnités pour atteinte à l’intégrité en cas de lésions causées par des facteurs extérieurs à l’accident (comme un état maladif antérieur). L’application de cette disposition suppose néanmoins que l’accident et l’événement non assuré aient causé conjointement une atteinte à la santé et que les troubles résultant des facteurs assurés et non assurés coïncident. Par ailleurs, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser que la seconde phrase de l’art. 36 al. 2 LAA n’est pas applicable aux indemnités pour atteinte à l’intégrité (arrêt U 376/07 du 29 juin 2007 consid. 2 publié in SVR 2008 UV n° 6 p. 19). Il s’ensuit que cette prestation peut être réduite en raison d’un état préexistant, même si cet état n’avait aucune incidence sur la capacité de gain de la personne assurée avant l’accident. En vertu de l’art. 47 OLAA, l’ampleur de la réduction des indemnités pour atteinte à l’intégrité, qui est opérée en raison de causes étrangères à l’accident, est déterminée en fonction du rôle de celles-ci dans l’atteinte à la santé; la situation personnelle et économique de l’ayant droit peut également être prise en considération.

En raison de la divergence d’opinions quant au rôle joué par l’accident, respectivement par l’état antérieur, dans la survenance de l’atteinte à la santé constatée chez l’assuré (correspondant à une périarthrite scapulo-humérale grave), il n’est pas possible de trancher la question de la réduction éventuelle de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assuré et retourne la cause à la juridiction cantonale pour qu’elle procède à une instruction complémentaire sur ce point sous la forme d’une expertise judiciaire.

 

 

Arrêt 8C_192/2015 consultable ici : http://bit.ly/1OXrAW2