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4A_137/2015 (d) du 19.08.2015 – RC médicale – Etendue de l’obligation du médecin d’établir une documentation

Etendue de l’obligation du médecin d’établir une documentation

 

Arrêt du TF du 19.08.2015 (4A_137/2015 ; http://bit.ly/1g54PnA)

Les médecins ne doivent consigner les données relatives au traitement des patients que dans la mesure nécessaire et usuelle du point de vue médical. S’il n’existe pas de raisons médicales leur imposant un tel devoir, l’absence de documentation ne peut pas être considérée, dans un procès en responsabilité civile dirigé contre un médecin, comme la preuve que celui-ci a omis d’appliquer le traitement litigieux.

 

En 1993, lorsqu’elle avait accouché de sa fille, une femme avait été victime d’une déchirure périnéale qui avait entraîné une incontinence fécale. Elle a ouvert action, en 2005, contre son gynécologue de l’époque, pour violation du devoir de diligence. Le Tribunal supérieur du canton de Zurich a confirmé, en 2015, le jugement du Tribunal du district de Zurich en allouant à la demanderesse une indemnité pour tort moral de 60’000 francs. A l’appui de son arrêt, le Tribunal supérieur a estimé, entre autres motifs, que le médecin aurait dû pratiquer un examen rectal de la patiente après l’accouchement. Or, un tel examen n’avait pas été consigné dans un document. Il fallait donc en déduire qu’il n’avait pas effectué l’examen rectal en violation du devoir de diligence incombant aux médecins.

Le Tribunal fédéral admet le recours du médecin. Selon sa jurisprudence, c’est au patient qu’il appartient, en principe, d’établir une erreur de traitement. Des allégements lui sont consentis relativement à cette preuve si le médecin n’a pas consigné le traitement de manière suffisante. Dans le présent arrêt, le Tribunal fédéral concrétise l’étendue de cette obligation du médecin d’établir une documentation. Comme celle-ci sert principalement à l’exécution du mandat de soins, l’enregistrement des données doit porter sur ce qui est nécessaire et usuel du point de vue médical. En revanche, on ne peut pas fonder sur le mandat du médecin un devoir de conserver les preuves qui irait au-delà de l’enregistrement des données nécessaires au traitement. Dans le cas de l’examen rectal litigieux, il s’agit, selon les expertises, d’un examen standard qu’il n’était pas absolument usuel ni requis de consigner dans un document en 1993. Par conséquent, le Tribunal supérieur ne pouvait pas tirer de la seule absence de documentation la conclusion que l’examen rectal n’avait pas été effectué. Pour ce motif, parmi d’autres, le Tribunal fédéral rejette l’action de la demanderesse.

 

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 07.09.2015 : http://bit.ly/1QjSb17

 

Arrêt du TF du 19.08.2015 (4A_137/2015 ; http://bit.ly/1g54PnA)

 

 

4A_113/2015 (f) du 12.05.2015 – Indemnité pour tort moral – Dommage esthétique au visage (post-morsure) chez une fille âgée de 4 ans et 2 mois – 47 CO

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_113/2015 (f) du 12.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1BYFSyZ

 

Indemnité pour tort moral / 47 CO

Dommage esthétique au visage (post-morsure) chez une fille âgée de 4 ans et 2 mois – Indemnité de CHF 12’000 confirmée par le TF

 

Le 30.04.2011, des parents se rendent avec leur fille, âgée de quatre ans et deux mois, à une fête d’anciens étudiants où plusieurs invités avaient amené leurs chiens. La fillette a joué avec un des chiens, un labrador âgé de douze ans. Ce chien a mordu au visage la fillette. La blessure a nécessité une opération urgente, suivie d’une hospitalisation qui a pris fin le 03.05.2011; il en subsiste une cicatrice entre la lèvre supérieure et la base du nez.

 

Précédente procédure au TF (arrêt 4A_366/2014 du 20.10.2014).

Le TF a annulé le jugement du 17.03.2014 de la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal et a renvoyé la cause à la Cour d’appel pour nouvelle décision. La Cour avait pris en considération les photographies nouvelles, à l’appui de son appréciation, sans avoir examiné leur recevabilité en appel et sans les avoir transmises à la défenderesse pour prise de position.

 

Procédure cantonale (arrêt HC / 2015 / 61 – consultable ici : http://bit.ly/1F89g64)

La Cour d’appel civile a constaté que la fillette demeure affectée d’une cicatrice au visage, située entre la lèvre supérieure, elle aussi atteinte, et la base du nez, sur le côté droit. En l’état de la médecine, il est impossible d’éliminer cette cicatrice. Son emplacement exclut également de la dissimuler. Elle provoque une dissymétrie au niveau de la lèvre. Elle grandira et évoluera avec la croissance de la lésée. Son aspect définitif n’est pas connu mais il est très vraisemblable que des corrections chirurgicales seront nécessaires. Il faut également envisager qu’à l’avenir, une atteinte fonctionnelle vienne s’ajouter à l’atteinte esthétique: la rétraction de la cicatrice pourrait gêner la fermeture complète de la bouche.

Par arrêt du 09.12.2014, la Cour d’appel civile a condamné la propriétaire de l’animal à payer 12’000 fr. avec intérêts au taux de 5% par an dès le 30.04.2011.

 

TF

Le TF mentionne le fait (consid. 4) que la Cour d’appel civile s’est basé sur diverses jurisprudences, à fin de comparaison. En particulier, la Cour d’appel civile a pris en considération un précédent de 1953 où une indemnité de 2’000 fr. a été allouée à une fillette qui avait elle aussi subi une morsure de chien. Agée de deux ans et demi lors de l’événement, la victime demeurait affectée d’une cicatrice importante, définitive et très laide, à la joue droite. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours de la partie condamnée en considérant que les juges de l’action eussent pu allouer entre 3’000 et 4’000 fr. sans abuser de leur pouvoir d’appréciation (ATF 81 II 512 consid. 5 p. 518). Actuellement, ces deux montants correspondraient approximativement à 13’400 et 17’800 francs. Le cas est tout à fait comparable à la présente espèce, à ceci près que la fillette souffre d’une cicatrice nettement moins grande.

La Cour a également mentionné plusieurs précédents issus de la jurisprudence cantonale. L’un d’eux concernait un enfant de neuf mois qu’un chien avait mordu à proximité de l’œil; les parties au procès se sont accordées sur une réparation de 16’000 fr., incluant toutefois le remboursement de frais d’avocat. En 2003 puis en 2010, pour de très importantes cicatrices au visage, deux femmes, semble-t-il adultes, ont reçu chacune 15’000 francs.

Par ailleurs, en 2004, 10’000 fr. ont été alloués à un homme de trente ans pour deux longues cicatrices résultant d’une agression avec un couteau, l’une à la joue et l’autre au cou, du côté gauche, qui restaient visibles nonobstant le port de la barbe (arrêt 6S.232/2003 du 17 mai 2004, consid. 2.4). En 2010, une femme d’environ quarante ans a obtenu le même montant – avant réduction pour faute concomitante – pour des taches sur les joues et le cou, des deux côtés, résultant de brûlures; ces séquelles pouvaient être dissimulées efficacement avec du maquillage (arrêt 4A_319/2010 du 4 octobre 2010, consid. 5). Ces cas de personnes adultes sont comparativement moins graves en ce sens que les victimes avaient achevé leur développement physique et psychique lors des atteintes à leur intégrité.

Selon le Tribunal fédéral, le montant de 12’000 fr. retenu par les juges d’appel est au raisonnable. Il importe peu que la victime eût peut-être pu différer son action en justice jusqu’à une époque où les séquelles de la blessure seraient davantage stabilisées et leurs conséquences esthétiques et fonctionnelles mieux connues.

Le TF rejette le recours de la propriétaire de l’animal.

 

 

Arrêt 4A_113/2015 consultable ici : http://bit.ly/1BYFSyZ

 

 

6B_256/2014 (d) du 08.04.2014 – Menace proférée envers des amis Facebook ne peut être sanctionnée au titre de « menaces alarmant la population »

« Post » Facebook: le cercle d’amis n’est pas une « population »

 

Arrêt du TF du 08.04.2015 (6B_256/2014 ; http://bit.ly/1H2Y6Fq)

Une menace proférée envers des amis Facebook ne peut être sanctionnée au titre de « menaces alarmant la population ». Le cercle d’amis et de connaissances dans la vie réelle ou virtuelle ne constitue pas une « population ». Forment en revanche une « population » les habitants d’une zone déterminée ou l’ensemble des personnes se trouvant au même moment dans un lieu déterminé. Le Tribunal fédéral annule la condamnation d’un homme par le Tribunal supérieur du canton de Zurich.

 

En mars 2012, l’intéressé avait posté sur sa page Facebook un texte qui pouvait être lu par environ 290 personnes ayant le statut d’ami. Il s’adressait dans ce texte à ceux qui ne lui avaient pas souhaité un bon anniversaire et indiquait entre autres : (…) je vous extermine tous, vous allez le regretter (…) maintenant plus personne ne peut vous protéger Pan!!!! Pan!!!! Pan!!!! (« post » original en dialecte suisse-allemand). En 2013, le Tribunal supérieur du canton de Zurich a condamné l’homme pour ces faits pour tentative de menaces alarmant la population au sens de l’art. 258 du Code pénal (CP) à une peine pécuniaire avec sursis partiel.

Le Tribunal fédéral admet le recours de l’intéressé et annule l’arrêt du Tribunal cantonal. L’art. 258 CP n’est applicable que lorsque « la population » est alarmée, respectivement lorsqu’il est tenté de l’alarmer. Par « population », on entend dans le langage commun en premier lieu l’ensemble des habitants d’une zone déterminée plus ou moins grande. Forme également une « population » l’ensemble des personnes qui se trouvent plutôt par hasard et pour un temps court au même moment dans un lieu déterminé, par exemple dans un magasin, dans un transport public ou dans un stade sportif. Ne peut en revanche être considéré comme une « population » le cercle des personnes, avec lesquelles quelqu’un est ami ou qu’il connaît dans la vie réelle ou virtuelle, ce d’autant plus qu’il manque là un lien avec un endroit déterminé. L’intéressé ne s’adresse ainsi pas à la « population » lorsqu’il communique les déclarations litigieuses à ses environs 290 amis Facebook et par là s’adresse en particulier à ceux qui ne lui ont pas souhaité un bon anniversaire.

Le Tribunal fédéral n’avait pas à trancher la question de savoir si une déclaration à des amis Facebook devait être considérée comme « publique » ou « privée ». La notion de « population » n’est pas équivalente à celle du « caractère public », déterminante notamment s’agissant de l’infraction de discrimination raciale.

Le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir si une déclaration faite dans un « post » était objectivement de nature à alarmer ses destinataires. Le Tribunal supérieur l’avait pourtant admis. Il n’avait toutefois vu aucun indice qu’un grand nombre de personnes aurait concrètement été apeuré et alarmé et avait pour cette raison admis une tentative.

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 29.04.2015 : http://bit.ly/1PWUO9g

 

Arrêt du TF du 08.04.2015 (6B_256/2014 ; http://bit.ly/1H2Y6Fq)

 

6B_768/2014 (d) du 24.03.2014 – 16 personnes contaminées avec le VIH: condamnation confirmée

16 personnes contaminées avec le VIH: condamnation confirmée

 

Arrêt du TF du 24 mars 2015 (6B_768/2014 ; http://bit.ly/1OcWg6k)

Le Tribunal fédéral confirme la condamnation d’un bernois qui, de 2001 à 2005, a infecté intentionnellement 16 personnes avec le VIH. La contamination des victimes par le virus de l’immunodéficience humaine a été, à juste titre, qualifiée de lésion corporelle grave par la Cour suprême du canton de Berne. Celle-ci doit se prononcer à nouveau sur le montant des indemnités pour tort moral dues aux personnes concernées.

 

De mai 2001 à mai 2005, l’homme avait transmis intentionnellement le virus du SIDA à seize personnes. Pour ce faire, il avait inoculé à ses victimes du sang contaminé ou un autre matériel biologique avec le VIH, au moyen d’aiguilles ou d’objets analogues. Les piqûres dans le dos ou dans la zone de la nuque survenaient, d’une part, dans le cadre de prétendus traitements d’acupuncture, d’autre part, par surprise ou pendant une perte de conscience des personnes concernées. Au mois d’avril 2014, la Cour suprême bernoise a confirmé la condamnation, prononcée en première instance, pour lésions corporelles graves et propagation d’une maladie de l’homme à réitérées reprises et infligé une peine de 15 ans de privation de liberté. Par ailleurs, l’homme a été condamné à verser 100’000 fr. à chaque lésé pour le tort moral, respectivement 90’000 fr. dans un cas.

Le Tribunal fédéral rejette le recours de l’intéressé contre sa condamnation mais l’admet quant aux indemnités pour tort moral. Pour l’essentiel, le recourant avait invoqué qu’il ne devait être condamné que pour lésions corporelles simples et que sa peine devait être fixée par le tribunal. Le Tribunal fédéral considère la qualification juridique opérée par la Cour suprême comme conforme au droit fédéral. Le jugement contesté n’est pas non plus en contradiction avec la jurisprudence du Tribunal fédéral. En 2013, ce dernier a certes modifié sa jurisprudence et jugé que de nos jours, compte tenu des possibilités de traitement médical, une infection VIH en tant que telle ne met plus, en général, la vie en danger et ne constitue donc pas une lésion corporelle grave. Il a cependant réservé la possibilité qu’une infection volontaire avec le VIH constitue une lésion corporelle grave au sens de la clause générale, qui suppose une atteinte grave à la santé physique ou mentale de la victime. En l’espèce, le Tribunal cantonal l’a admis à juste titre. Les preuves matérielles suffisent objectivement pour qualifier les faits de lésions corporelles graves. En particulier, il ressort du rapport de l’expertise médicale ordonnée, relative aux conséquences communes d’une infection VIH, que la contamination par ce virus, constitue aujourd’hui encore un fardeau physique et psychique très pesant pour les personnes concernées et que la maladie en tant que telle demeure lourdement stigmatisante. La thérapie antivirale doit être prise à vie. Des effets secondaires à long terme sont envisageables même avec les médicaments actuels. Les personnes qui ont été infectées par le VIH-1 dans les années 2001 à 2005 ont une espérance de vie estimée nettement raccourcie, de plusieurs années. Selon les explications de l’expert, tous les lésés subissent ces conséquences de manière comparable. Quant à l’indemnisation du tort moral, la Cour suprême doit rendre un nouveau jugement. Le Tribunal fédéral juge incomplète la motivation y relative de l’autorité précédente, respectivement qu’elle différencie insuffisamment les situations individuelles.

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 09.04.2015 : http://bit.ly/1CsDWhf

 

Arrêt du TF du 24 mars 2015 (6B_768/2014 ; http://bit.ly/1OcWg6k)

 

 

4F_15/2014 (d) du 25.03.2015 – Indemnisation des victimes de l’amiante: suspension de la procédure de révision

Indemnisation des victimes de l’amiante: suspension de la procédure de révision

Ordonnance du 25 mars 2015 (4F_15/2014 ; http://bit.ly/1G4W0oM)

Une procédure de révision est en cours concernant les prétentions en dommages-intérêts et indemnité des filles d’une victime de l’amiante; le Tribunal fédéral décide de la suspendre en attendant que le Parlement se prononce sur la motion demandant la création d’un fonds pour une indemnisation juste des victimes de l’amiante. Si les personnes concernées pouvaient être indemnisées par ce fonds ou dans le cadre d’une solution résultant de la «table ronde pour l’amiante», la révision de l’arrêt du Tribunal fédéral de 2010 ne serait peut-être plus nécessaire. L’an passé, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la Suisse en raison de la problématique de la prescription dans les cas d’amiante.

 

Le père de deux filles est mort en 2005 d’un cancer de la plèvre. Sa maladie pourrait être la conséquence d’une exposition à l’amiante, subie à son poste de travail et dans les années antérieures à 1995. Avant son décès, l’homme a entrepris de réclamer en justice 213’000 fr. de dommages-intérêts et indemnité à l’entreprise qui a succédé à son employeuse. Les deux filles lui ont succédé dans le procès. En 2009, le Tribunal de prud’hommes de Baden a rejeté l’action en raison de la prescription. La Cour suprême du canton d’Argovie et le Tribunal fédéral ont confirmé ce jugement en 2010. Par arrêt du 11 mars 2014, la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH) a constaté la violation du droit des personnes concernées d’obtenir une décision judiciaire conformément à l’art. 6 par. 1 CEDH. En substance, la Cour parvient à cette conclusion parce que selon le droit suisse, la prescription absolue arrive à échéance dix ans après l’événement dommageable alors que les maladies résultant de l’amiante peuvent ne sedéclarer que plusieurs dizaines d’années après l’exposition aux fibres d’amiante.

A la suite de cet arrêt, les filles de la victime ont introduit une demande de révision devant le Tribunal fédéral. Le 25 mars 2015, celui-ci a décidé de suspendre la procédure de révision. La révision d’un arrêt par suite d’une violation de la CEDH suppose notamment que la révision soit nécessaire pour remédier à la violation (art. 122 let. c LTF). La révision pourrait donc se révéler superflue si les personnes concernées obtenaient d’être indemnisées par une autre voie. Le Conseil National est actuellement saisi d’une motion demandant au Conseil fédéral la création d’un fonds pour une indemnisation juste des victimes de l’amiante. La motion n’est provisoirement pas traitée parce que le Conseil fédéral a réuni une table ronde consacrée à l’amiante, destinée à la recherche d’améliorations en faveur des personnes malades de l’amiante et de leurs proches. La table ronde est dirigée par l’ancien conseiller fédéral Moritz Leuenberger; elle comprend des représentants de l’économie, des syndicats, de l’association des victimes de l’amiante et des autorités. Cela montre que l’on reconnaît une grande importance au problème et que des solutions devraient être trouvées dans des délais convenables. Il est prévisible que le Conseil National se prononcera sur la motion dès que les résultats de la table ronde seront connus. La procédure de révision, devant le Tribunal fédéral, doit dès lors être suspendue jusqu’au moment où l’on saura clairement si la motion est transmise et comment le fonds et la procédure d’indemnisation doivent être mis en place.

 

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, 01.04.2015 : http://bit.ly/1IPSY5Y

 

Arrêt 4F_15/2014 (d) du 25.03.2015 : http://bit.ly/1G4W0oM

 

 

C-503/13 CJUE – Responsabilité du fait des produits – Produit médical posé dans le corps humain

Arrêt dans les affaires jointes C-503/13 et C-504/13

Boston Scientific Medizintechnik GmbH c/AOK Sachsen-Anhalt – Die Gesundheitskasse (C503/13) et Betriebskrankenkasse RWE (C-504/13).

 

Arrêt de la CJUE du 05.03.2015 consultable ici : http://bit.ly/1Hf45o6

Conclusions de l’avocat général, présentées le 21.10.2014, consultables ici : http://bit.ly/1GGXNQ0

 

Responsabilité du fait des produits défectueux / Produit médical posé dans le corps humain

 

La directive sur les produits défectueux [Directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, (JO L 210, p. 29)] prévoit que le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit.

Une entreprise commercialise en Allemagne des stimulateurs cardiaques ainsi que des défibrillateurs automatiques implantables. Des contrôles de qualité effectués ultérieurement par l’entreprise ont démontré que ces produits pouvaient être défectueux et constituer un danger pour la santé des patients. Face à cette situation, le producteur a recommandé aux médecins de remplacer les stimulateurs implantés dans le corps des patients par d’autres stimulateurs mis gratuitement à disposition. Parallèlement à cela, le fabricant a recommandé aux médecins traitants de désactiver un interrupteur dans les défibrillateurs.

Les assureurs des personnes dont le stimulateur ou le défibrillateur a été remplacé réclament au fabricant le remboursement des coûts liés aux interventions.

Saisi du litige entre les assureurs et l’entreprise commercialisant ces dispositifs médicaux et afin de pouvoir trancher le litige au principal, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale d’Allemagne) pose préalablement deux questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) : les stimulateurs cardiaques et le défibrillateur automatique qui ont remplacés et implantés dans l’organisme des assurés concernés, ne peuvent-ils pas être également considérés comme défectueux du fait que ces appareils appartiennent à un groupe de produits qui présentaient un risque de défaillance, alors qu’il n’a pas été constaté de défaut des appareils mais seulement un risque potentiel de défaillance ?

Si la réponse à cette question est oui, alors les coûts de l’opération de retrait du produit et de pose d’un appareil de remplacement constituent-ils un dommage causé par lésion corporelle ?

Dans son arrêt du 05.03.2015, la Cour constate que, eu égard à leur fonction et à la vulnérabilité des patients qui les utilisent, les dispositifs médicaux en cause sont soumis à des exigences de sécurité particulièrement élevées. À cet égard, la Cour souligne que le défaut potentiel de sécurité de ces produits, qui engage la responsabilité du producteur, réside dans la potentialité anormale du dommage qu’ils peuvent causer à la personne.

Dans ces conditions, la Cour juge que le constat d’un défaut potentiel d’un appareil médical permet de qualifier de défectueux tous les produits du même modèle, sans qu’il soit besoin de démontrer le défaut du produit dans chaque cas.

Par ailleurs, la Cour déclare que, s’agissant du remplacement des stimulateurs cardiaques effectué suite aux recommandations mêmes du producteur, les coûts liés à ce remplacement constituent un dommage dont le fabricant est responsable en vertu de la directive.

S’agissant des défibrillateurs automatiques implantables à l’égard desquels le producteur n’a recommandé que la désactivation d’un interrupteur, la Cour constate qu’il appartient à la juridiction allemande de vérifier si une telle désactivation est propre à éliminer le défaut des produits ou bien si leur remplacement est nécessaire à cette fin.

 

Décision de la CJUE :

1) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 85/374/CEE, doit être interprété en ce sens que le constat d’un défaut potentiel des produits appartenant au même groupe ou relevant de la même série de la production, tels que les stimulateurs cardiaques et les défibrillateurs automatiques implantables, permet de qualifier de défectueux un tel produit sans qu’il soit besoin de constater dans ce produit ledit défaut.

2) Les articles 1er et 9, premier alinéa, sous a), de la directive 85/374 doivent être interprétés en ce sens que le dommage causé par une opération chirurgicale de remplacement d’un produit défectueux, tel qu’un stimulateur cardiaque ou un défibrillateur automatique implantable, constitue un «dommage causé par la mort ou par des lésions corporelles», dont le producteur est responsable, lorsque cette opération est nécessaire pour éliminer le défaut du produit considéré. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si cette condition est remplie dans les affaires au principal.

 

 

Communiqué de presse n° 31/15 du 05.03.2015 : http://bit.ly/18nuIuX

 

Pour une analyse de l’arrêt de la CJUE, je renvoie le lecteur à l’article de Philippe Fuchs paru dans la jusletter du 30.03.2015 (« Erhöhtes Ausfallrisiko als Produktfehler ? », accessible ici : http://bit.ly/1NujfYy ; accessible aux abonnés). La contribution se penche sur cet arrêt et explique les conséquences éventuelles dans le domaine des dispositifs médicaux pour le droit suisse sur la responsabilité du fait des produits.

 

 

9C_189/2014 (d) du 12.02.2015 – L’AI peut conserver la prestation obtenue par voie de recours

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_189/2014 (d) du 12.02.2015 – proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/1FrOov1

 

Résumé paru in : Assurance Sociale Actualités 06/2015 – 16.03.2015

 

L’AI peut conserver la prestation obtenue par voie de recours

 

Selon le Tribunal fédéral, l’office AI de Bâle-Campagne ne s’est pas enrichi aux dépens d’une victime d’accident n’ayant plus droit à une rente. Il peut donc garder la rente capitalisée obtenue par voie de recours par l’assurance responsabilité civile de la personne responsable de l’accident. Toutes les rentes octroyées en raison d’un syndrome sans pathogenèse ni étiologie claires et sans constat de déficit organique ont dû être réexaminées dans le cadre de la révision de la loi AI en mars 2011. Ce réexamen a également eu lieu pour une victime d’accident dont la rente a ensuite été supprimée. Cet homme, qui n’a plus droit à une rente, a fait valoir au Tribunal que l’office AI avait gardé son droit à la rente capitalisée. Selon lui, l’office AI ne finançait donc pas lui-même sa rente mais gérait «pour ainsi dire à titre fiduciaire le capital transféré par l’assurance responsabilité civile ». Jusqu’alors, seule une partie de cette somme d’environ 230 000 francs aurait bénéficié à l’assuré. Le législateur a toutefois prévu ce cas dans la 6e révision de l’AI et créé une base légale à cet effet: la modification du droit à une rente AI dans le cadre des syndromes susmentionnés sans constat de déficit organique n’entraîne aucune modification des droits des assurés selon la loi sur l’assurance-accidents et ne donne lieu à aucune prétention en compensation de leur part.

 

Arrêt 9C_189/2014 consultable ici : http://bit.ly/1FrOov1

 

 

 

Projet de révision des règles sur la prescription civile

La commission est entrée en matière sans opposition sur le projet de révision des règles sur la prescription civile (13.100). Elle poursuivra ses travaux à l’une de ses prochaines séances. Elle souhaite attendre la décision du Conseil national sur la motion 14.3664 demandant la création d’un fonds pour les victimes de l’amiante. Elle a également l’intention d’organiser des auditions.

Le projet de révision des règles sur la prescription civile fait suite à une motion de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (07.3763) demandant un allongement des délais de prescription afin qu’une action en dommages-intérêts puisse être introduite même si un dommage se produit à long terme. Le besoin de révision du droit suisse de la prescription a été confirmé l’année passée par la Cour européenne des droits de l’homme (arrêt du 11 mars 2014 dans la cause Howald Moor et autres c. Suisse).

 

Berne, 11.02.2015 – http://bit.ly/1DjmTPz