9C_690/2015 (f) du 12.02.2016 – Méthode mixte d’évaluation de l’invalidité vs méthode générale de la comparaison des revenus / 28a al. 2 er 3 LAI – 27 et 27bis RAI – 16 LPGA – 8 al. 3 LPGA / Choix de la méthode pour un assuré n’ayant pas travaillé à 100%

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_690/2015 (f) du 12.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Yaicnu

 

Méthode mixte d’évaluation de l’invalidité vs méthode générale de la comparaison des revenus / 28a al. 2 et 3 LAI – 27 et 27bis RAI – 8 al. 3 LPGA – 16 LPGA

Choix de la méthode pour un assuré n’ayant pas travaillé à 100%

 

Assuré, né en 1954, célibataire, sans formation professionnelle, a travaillé en dernier lieu, à raison de six à sept heures par semaine, comme ouvrier aide main-d’œuvre jusqu’au 30.04.2010, puis a perçu ensuite des indemnités journalières de l’assurance-chômage, puis a accompli en contrepartie du revenu minimum cantonal d’aide sociale une activité compensatoire.

Dépôt demande AI le 25.09.2013. Reconnaissance d’une incapacité de travail totale depuis le 13.12.2012. Enquête économique sur le ménage mettant en évidence un empêchement de 12,75% dans la sphère ménagère. Décision du 06.11.2014, octroyant une demi-rente de l’assurance-invalidité à compter du 01.03.2014 (empêchement de 100% dans la sphère professionnelle pris en compte pour 50% et de 12,75% dans la sphère ménagère pour l’autre 50%, soit un degré d’invalidité de 56%).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/594/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1TYagF8)

La cour cantonale a, en application de la méthode générale de comparaison des revenus, octroyé une rente entière de l’assurance-invalidité (empêchement de 100% dans la sphère professionnelle). Il n’avait jamais déclaré avoir travaillé à temps partiel ou envisagé de le faire pour s’occuper le reste du temps de son ménage ou pour vaquer à des travaux habituels et rien dans le dossier ne permettait de conclure en ce sens. Si l’assuré n’avait quasiment jamais travaillé à plein temps, c’était essentiellement pour des raisons psycho-sociales. Cela était toutefois sans influence sur la méthode d’évaluation de son degré d’invalidité, car du point de vue strictement médical, on pouvait raisonnablement exiger de lui qu’il exerçât une activité lucrative.

Par jugement du 18.08.2015, admission du recours et annulation de la décision.

 

TF

Selon la jurisprudence, pour déterminer la méthode d’évaluation du degré d’invalidité applicable au cas particulier, il faut non pas, malgré la teneur de l’art. 8 al. 3 LPGA, chercher à savoir dans quelle mesure l’exercice d’une activité lucrative aurait été exigible de la part de l’assuré, mais se demander ce que l’assuré aurait fait si l’atteinte à la santé n’était pas survenue (ATF 133 V 504 consid. 3.3 p. 507; 133 V 477 consid. 6.3 p. 486). Selon la pratique, cette question doit être tranchée sur la base de l’évolution de la situation jusqu’au prononcé de la décision administrative litigieuse, encore que, pour admettre l’éventualité de l’exercice d’une activité lucrative partielle ou complète, il faut que la force probatoire reconnue habituellement en droit des assurances sociales atteigne le degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 137 V 334 consid. 3.2 p. 338 et les références).

Le Tribunal fédéral a rappelé que la jurisprudence publiée aux ATF 131 V 51 excluait de cette définition les activités de loisirs (ATF 141 V 15 consid. 4.4 p. 22).

L’office AI admet que l’assuré n’effectuait pas des travaux habituels tant avant qu’après l’atteinte à la santé. Dans ces circonstances, le taux d’invalidité de l’intimé doit être évalué selon la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 3 LAI en corrélation avec l’art. 16 LPGA; ATF 141 V 15 consid. 4.4 p. 22 et le renvoi à l’ATF 131 V 51).

 

Le TF rejette le recours de l’Office AI.

 

 

Arrêt 9C_690/2015 consultable ici : http://bit.ly/1Yaicnu

 

 

1C_539/2015 (f) du 05.02.2016 – Retrait de sécurité du permis de conduire – 16c al. 1 let. f LCR / Erreur sur l’illicéité – 21 CP

Arrêt du Tribunal fédéral 1C_539/2015 (f) du 05.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1QvIwqk

 

Retrait de sécurité du permis de conduire – 16c al. 1 let. f LCR

Erreur sur l’illicéité – 21 CP

 

Ressortissante française née en 1946, domiciliée à Genève et titulaire du permis de conduire des catégories A1, B, B1, F, G et M.

Un premier retrait du permis de conduire, pour une durée de trois mois, a été prononcé à la suite d’une opposition à un prélèvement de sang et dont l’exécution a pris fin le 18.03.2010. Par décision du 22.04.2014, retrait du permis de conduire pour une durée de douze mois, pour avoir provoqué un accident en état d’ébriété. Cette décision précisait que l’intéressée pouvait conduire « des véhicules des catégories spéciales G et M et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n’est pas nécessaire pendant la durée du retrait ».

Le 26.11.2014, alors qu’elle se rendait en France, où elle exerce son activité professionnelle, A.__ a été interpellée à la douane de Fossard. Elle circulait au volant d’un véhicule à moteur immatriculé en France (ci-après: la voiturette), dont la conduite ne nécessite pas, dans ce pays, de permis de conduire pour les personnes nées avant le 01.01.1988. Selon les documents d’immatriculation, cette voiturette doit être qualifiée, selon la nomenclature française, de quadricycle léger à moteur.

Par décision du 12.01.2015, retrait du permis de conduire pour une durée indéterminée, mais pour deux ans au minimum, pour avoir circulé au volant d’un véhicule automobile non homologué en Suisse, alors qu’elle se trouvait sous l’effet d’un précédent retrait.

 

TF

En France, la conduite d’une voiturette n’exige pas de permis de conduire pour les personnes nées avant le 01.01.1988; en revanche, sur le territoire suisse, l’utilisation de ce type de véhicule requiert un permis de conduire de la catégorie spéciale F.

Conformément à l’art. 16c al. 1 let. f LCR, commet une infraction grave la personne qui conduit un véhicule automobile alors que le permis de conduire lui a été retiré. Après une infraction grave, le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée, mais pour deux ans au minimum, si, au cours des dix années précédentes, le permis lui a été retiré à deux reprises en raison d’infractions graves (cf. art. 16c al. 2 let. d 1 ère phrase LCR).

L’art. 16c al. 1 let. f LCR présente les traits d’une mesure répressive destinée à faire respecter une précédente décision de retrait du permis de conduire (André Bussy et al., Code suisse de la circulation routière commenté, 4 e éd. 2015, n. 6 ad. art. 16c LCR et l’arrêt cité 6A.113/2006 du 30 avril 2007 consid. 6.2.3). Quant au retrait du permis de conduire fondé sur l’art. 16c al. 2 let. d LCR, il doit, selon la jurisprudence, être considéré comme un retrait de sécurité, dont le but est d’exclure de la circulation routière le conducteur multirécidiviste (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.2 p. 104). Néanmoins, à l’instar du retrait d’admonestation, la problématique pertinente dans l’application de cette disposition et celle de savoir si une nouvelle infraction a été commise et non de déterminer concrètement si la personne concernée est toujours apte à conduire un véhicule automobile (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.3 p. 104). Il s’ensuit que, tout comme en droit des mesures administratives d’admonestation (cf. Cédric Mizel, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, p. 303 n. 49.1), l’application de l’art. 16c al. 2 let. d LCR commande d’examiner la faute, respectivement la culpabilité de l’auteur, sur lesquelles influe notamment l’erreur sur l’illicéité (Message du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse et du code pénal militaire ainsi qu’une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, FF 1999 1787 1814). Le régime prévu par la loi en matière de mesures administratives étant muet sur les conséquences d’une erreur, il convient de se référer par analogie au droit pénal (cf. art. 102 ch. 1 LCR par analogie; cf. Moor/Poltier, Droit administratif, vol. II, 3 e éd. 2011, p. 134 n. 1.4.3.1; pour deux cas d’application de l’erreur de droit, voir arrêts 1C_333/2014 du 23 septembre 2014 consid. 4.2 et 4.3; 6A.54/2006 du 13 février 2007 consid. 5.5.2 s.; pour une application par analogie du concours d’infraction [art. 68 ch. 2 aCP], cf. ATF 113 Ib 53 consid. 3 p. 56).

L’erreur sur l’illicéité n’est pas réalisée au seul motif que l’auteur tient faussement son comportement pour non punissable, encore faut-il qu’il ne sache pas ou ne puisse pas savoir qu’il se comporte de manière illicite. Cette dernière condition n’est pas réalisée lorsqu’au regard des circonstances l’auteur aurait dû avoir des doutes quant à la licéité de son comportement (cf. arrêt 1C_333/2014 du 23 septembre 2014 consid. 4.2).

Si l’on peut – dans une certaine mesure – reconnaître que les dispositions en matière d’admission des véhicules à la circulation présentent une certaine complexité, celle-ci ne saurait en l’occurrence constituer une raison suffisante permettant à la conductrice de se croire autorisée à conduire; cette complexité exigeait au contraire de celle-ci qu’elle fasse preuve d’une attention particulière. Il y a en effet lieu de se montrer sévère lorsqu’il s’agit d’appliquer, comme en l’espèce, l’erreur sur l’illicéité dans des domaines techniques ou soumis à un régime d’autorisation (cf. Martin Killias et al., Précis de droit pénal général, 3e éd. 2008, p. 43 n. 312 et les arrêts cités) et que l’auteur sait qu’une réglementation juridique existe (cf. ATF 120 IV 208 consid. 5b p. 215). Il en découle qu’il ne suffisait pas à la conductrice de se croire en droit d’agir; il lui incombait en outre de se renseigner avant de prendre le volant (cf. Martin Killias et al., op. cit., p. 43 n. 312). Cela est d’autant plus vrai que la décision du 22.04.2014 précise expressément quelles catégories de véhicules la conductrice pouvait conduire en dépit du retrait de son permis; il lui était ainsi aisé d’obtenir les informations relatives aux types de véhicules concernés en prenant contact avec l’autorité ayant prononcé cette décision (ou encore en consultant, par exemple, le site Internet de la République et canton de Genève [http://ge.ch/vehicules/permis-de-conduire-et-permis-deleve]). De plus, compte tenu du but clair poursuivi par l’art. 16c al. 2 let. d LCR, à savoir écarter les conducteurs multirécidivistes de la circulation, la conductrice aurait à l’évidence dû nourrir des doutes quant à son droit de conduire un véhicule automobile en Suisse malgré la mesure prononcée à son encontre. Il est par ailleurs sans pertinence que la conductrice soit de nationalité française, qu’elle travaille en France, et que ce type de véhicule peut être conduit sans permis dans ce pays. Il n’y a en effet rien de surprenant à ce que les législations de deux Etats souverains divergent dans un domaine donné, ce que la conductrice ne pouvait ignorer; ainsi même si le doute était permis, il ne lui incombait pas moins de s’informer préalablement.

 

Le TF admet le recours du Département de l’environnement, des transports et de l’agriculture de la République et canton de Genève, réforme l’arrêt de l’instance inférieur en ce sens que le recours de la conductrice est rejeté.

 

 

Arrêt 1C_539/2015 consultable ici : http://bit.ly/1QvIwqk

 

 

8C_311/2015 (f) du 22.01.2016 – Revenu sans invalidité – Abattement sur le salaire statistique – 16 LPGA / Assistance judiciaire – contestation du taux d’abattement vouée à l’échec – 64 al. 1 LTF

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_311/2015 (f) du 22.01.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1TYhIjG

 

Revenu sans invalidité – Abattement sur le salaire statistique – 16 LPGA

Assistance judiciaire – contestation du taux d’abattement vouée à l’échec – 64 al. 1 LTF

 

Assuré, né en 1959, travaillant en dernier lieu en qualité de chauffeur-logisticien à plein temps. Il a été victime de plusieurs accidents, dès 2003, touchant le genou droit. Le 28.09.2011, alors qu’il déchargeait des palettes, l’assuré a glissé d’un camion-grue et s’est rattrapé à la ridelle de celui-ci. Le 25.01.2012, il a subi une acromioplastie et une réinsertion transosseuse du sus-épineux.

Examen final, le 27.06.2013, par le médecin d’arrondissement, qui a retenu les limitations fonctionnelles suivantes : pas de port de charges répété du membre supérieur droit (MSD) au corps de plus de 10 kilos, pas de port de charges répété de plus de 5 kilos du MSD éloigné du corps et sans mouvement répétitif de rotations interne et externe contre résistance de plus de 5 kilos et sans mouvement au-dessus du niveau des épaules. Les limitations fonctionnelles découlant des séquelles au niveau du genou droit consistaient en l’absence de longs déplacements en terrain régulier, pas de fréquents déplacements en terrain irrégulier, pas d’escaliers de manière fréquente, pas de travaux à genoux ou accroupis, pas de travaux nécessitant la marche avec des charges de plus de 15 kilos. Dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assuré, l’exigibilité était totale.

Décision, confirmée sur opposition le 28.05.2014 : octroi, dès le 01.01.2014, d’une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 19% et une indemnité pour atteinte à l’intégrité calculée sur la base d’un taux de 20%.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 65/14 – 22/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1oUVALb)

Par jugement du 23.03.2015, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Abattement sur le salaire statistique

Les premiers juges ont considéré que le taux de 10% retenu par l’intimée tenait suffisamment compte de l’âge de l’assuré (près de 55 ans au moment de la comparaison des revenus) et de ses limitations fonctionnelles. Un abattement plus élevé n’était pas indiqué dès lors qu’il n’y avait pas lieu de retenir des problèmes particuliers d’adaptation. L’assuré avait été en mesure de changer d’entreprise et de se plier à de nouvelles contraintes émanant d’employeurs différents. Par ailleurs, on ne pouvait prendre en compte des difficultés linguistiques dans le cas d’un assuré arrivé en Suisse en 1981 et y ayant vécu de nombreuses années. Quant à l’absence de formation professionnelle certifiée et à la scolarité limitée, les premiers juges ont rappelé que ce défaut n’avait pas entravé l’assuré dans ses recherches d’emploi avant d’être atteint dans sa santé. Ces motifs sont pertinents. En l’espèce, l’assuré ne démontre pas à satisfaction de droit en quoi la cour cantonale aurait exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit.

 

Assistance judiciaire

L’assuré a présenté une demande d’assistance judiciaire. Au vu de la jurisprudence et des motifs énoncés par les premiers juges pour justifier un taux d’abattement maximum de 10%, les conclusions du recours apparaissaient d’emblée vouées à l’échec, de sorte que la demande d’assistance judiciaire est rejetée (art. 64 al. 1 LTF a contrario).

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_311/2015 consultable ici : http://bit.ly/1TYhIjG

 

 

ARTICLES ET OUVRAGES – SELECTION FEVRIER 2016

Voici une sélection (personnelle et subjective) des divers articles, contributions et ouvrages parus récemment :

  • Patrick Robert-Nicoud, Le juge ignorant: réflexions sur les connaissances non juridiques [Ressource électronique] : il y a peu de différence entre un juge méchant et un juge ignorant, In: Justice – Justiz – Giustizia, Bern, 2015/4

 

  • Soziale Sicherheit = Sécurité sociale (Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht (SBVR) ; Bd. 14), Ulrich Meyer (Hrsg.), 3e éd., 2016, 2640 S.

 

  • Michael Liebrenz, Ursula Uttinger, Gerhard Ebner, Sind Abhängigkeitserkrankungen aus höchstrichterlicher Sicht (weiterhin) nicht mit anderen psychischen Störungen (z.B. somatoformen Störungen) vergleichbar? : eine Urteilsbesprechung von BGE 8C_582/2015 im Lichte der theoretischen Anwendbarkeit des ergebnisoffenen, strukturierten Beweisverfahrens, in: Schweizerische Zeitschrift für Sozialversicherung und berufliche Vorsorge, Jg. 60(2016), H. 1, S. 96-101

 

  • Volker Pribnow, Privatrechtlicher Blick auf die geänderte sozialversicherungsrechtliche Schmerzrechtsprechung, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 445-447. – Forum:Unklare Beschwerdebilder – das Bundesgericht stellt Wegweiser auf = Les tableaux cliniques d’étiologie peu claire – le Tribunal fédéral élabore un guide

 

  • Patrick Suter, Die Preisgabe der Überwindbarkeitsvermutung : einige Gedanken aus haftpflichtrechtlicher Sicht, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 447-451. Forum:Unklare Beschwerdebilder – das Bundesgericht stellt Wegweiser auf = Les tableaux cliniques d’étiologie peu claire – le Tribunal fédéral élabore un guide

 

  • Michael Liebrenz … [et al.], Das Suchtleiden bzw. die Abhängigkeitserkrankungen : Möglichkeiten der Begutachtung nach BGE 141 V 281 (= 9C_492/2014), in: Schweizerische Zeitschrift für Sozialversicherung und berufliche Vorsorge, Jg. 60(2016), H. 1, S. 12-44

 

  • Kurt Häcki, Alles ist, mit Ausnahmen, zumutbar : Arbeitslosenversicherung und zumutbare Arbeit = Tout est convenable, avec des exceptions : assurance-chômage et travail convenable, in: Schweizer Sozialversicherung, Jg. 4(2016), Nr. 1, S. 18-19 ; in: Assurance sociale suisse, Vol. 4(2016), no 1, p. 20-21

 

  • Carmela Wyler-Schmelzer, Das hypothetische Arbeitspensum einer invaliden Person : Statuswechsel = Le taux d’occupation hypothétique d’une personne invalide : changement de statut, in: Schweizer Personalvorsorge, Bd. 29(2016), H. 1, S. 84-85 ; in: Prévoyance professionnelle suisse, Vol. 29(2016), no 1, p. 86-87

 

  • Jacques-André Schneider, Jurisprudence 2015 du Tribunal fédéral en matière de prévoyance professionnelle, in: Revue suisse des assurances sociales et de la prévoyance professionnelle, Vol. 60(2016), no 1, p. 57-93

 

  • Jean-Pierre Laborde, Lumières et ombres sur la réparation des risques professionnels en droit français de la sécurité sociale, in: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, Cahier no 51(2015), p. 23-31

 

  • Stéphanie Perrenoud, Les allocations familiales en Suisse, in: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, Cahier no 51(2015), p. 149-200

 

  • Jacques-André Schneider, Jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de prévoyance professionnelle : juin 2013 – mai 2014, in: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, Cahier no 51(2015), p. 201-253

 

  • Jean-Louis Duc, Des infirmités congénitales dans la LAMal : à propos de la jurisprudence, in: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, Cahier no 51(2015), p. 255-263

 

  • Jean-Louis Duc, Des soins ambulatoires et de l’hospitalisation dans l’assurance-accidents obligatoire : sur la prise en charge des frais de traitement, en particulier d’hospitalisation chez les rentiers LAA, in: Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, Cahier no 51(2015), p. 283-296

 

  • Régis Otasevic, Exposition professionnelle et cancer, in: Revue médicale suisse, Vol. 12(2016), no 503, p. 200-201

 

  • Kurt Pärli, Julia Hug, Andreas Petrik, Arbeit, Krankheit, Invalidität : arbeits- und sozialversicherungsrechtliche Aspekte, 2015

 

  • Schweizerisches Haftpflichtrecht, Walter Fellmann, Andrea Kottmann ; unter Mitarb. von Pamela Küttel … [et al.], 2012-2015, 3 Bde, (Stämpflis juristische Lehrbücher) Literatur und Judikatur wurden im Wesentlichen bis zum 1. Oktober 2011 (Bd. 1), bis zum 1. September 2013 (Bd. 2) und bis zum 1. August 2015 (Bd. 3) berücksichtigt

 

  • Melinda Florina Lohmann, Arnold Rusch, Fahrassistenzsysteme und selbstfahrende Fahrzeuge im Lichte von Haftpflicht und Versicherung, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 349-355

 

  • Basil D. Kupferschmied, Autonome Fahrzeuge : die Haftung im Strassenverkehr der Zukunft, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 356-366

 

  • Ignacio Moreno, Das Regressprivileg des Arbeitgebers : für eine einheitliche Handhabung im faktischen Arbeitsumfeld, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 367-374

 

  • Marcel Süsskind, Anpassung der Regeln zur Versicherungsaufsicht, in: HAVE, 2015, H. 4, S. 375-381

 

  • Paul-Henri Steinauer, A propos des révisions du Code civil, in: Mehr oder weniger Staat? : Festschrift für Peter Hänni zum 65. Geburtstag, p. 121-129

 

  • Pascal Pichonnaz, L’intervention de l’Etat en matière de lutte contre les conditions générales abusives : trop ou trop peu ?, in: Mehr oder weniger Staat? : Festschrift für Peter Hänni zum 65. Geburtstag, 2015, p. 373-385

 

  • Adriano Previtali, Plus ou moins d’Etat dans le domaine des retraites, in: Mehr oder weniger Staat? : Festschrift für Peter Hänni zum 65. Geburtstag, p. 505-516

 

  • Ueli Kieser, Anpassung – Revision – Wiedererwägung : eine Einordnung, in: Die Anpassung der laufenden Sozialversicherungsleistungen, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 9-37

 

  • Isabelle Vetter-Schreiber, Anpassung der Leistungen in der beruflichen Vorsorge, in: Die Anpassung der laufenden Sozialversicherungsleistungen, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 61-93

 

  • Sylvia Läubli Ziegler, Die lebenslängliche UV-Invalidenrente: Entwicklungen im Rahmen der 1. UVG-Revision, in: HAVE, 2015, H. 1, S. 100-105 ; in: Die Anpassung der laufenden Sozialversicherungsleistungen, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 95-112

 

  • Marc Hürzeler, Raffaella Biaggi, Die Anpassung laufender Alters- und Hinterlassenenrenten an Gesetzesänderungen, in: Die Anpassung der laufenden Sozialversicherungsleistungen, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 113-138

 

  • Hans-Jakob Mosimann, Wiedererwägung, Meldepflichtverletzung und rückwirkende Anpassung von Renten, in: Die Anpassung der laufenden Sozialversicherungsleistungen, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 139-164

 

  • Ueli Kieser, Datenschutz im Sozialversicherungsrecht : eine Auslegeordnung, in: Datenschutz – aktuelle Fragen auf dem Weg, Institut für Rechtswissenschaft und Rechtspraxis, 2015, p. 61-71

 

  • Thomas Gächter, Funktion und Kriterien der Adäquanz im Sozialversicherungsrecht : grundsätzliche Fragen an ein zentrales Konzept, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 13-49

 

  • Luciano R. Martelozzo, Die Validierung psychischer Störungen im Lichte der bundesgerichtlichen Rechtsprechung, in: Personen-Schaden-Forum 2016, p. 51-85

 

  • Jörg Jeger, Auswirkungen der neuen Rechtsprechung zu den psychosomatischen Krankheitsbildern auf die medizinische Begutachtung, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 87-118

 

  • Markus Schmid, Wegleitung zur Regulierung von Kinderschäden : Urteile des Bundesgerichts 4A_260/2014 vom 8. September 2014 und des Handelsgerichts Zürich HG 140240 vom 16. April 2015, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 119-126

 

  • Bruno Pasquier, Beweiserleichterung und Erfahrungssätze in der Berechnung des Personenschadens, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 147-162

 

  • Mark Schweizer, Methodische Aspekte der gerichtlichen Schätzung ziffernmässig nicht nachweisbarer Forderungen gemäss Art. 42 Abs. 2 OR, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 163-188

 

  • Stephan Fuhrer, Entwicklungen im Privatversicherungsrecht Schadenersatz, in: Personen-Schaden-Forum 2016, S. 239-271

 

  • Ueli Kieser, Entwicklungen im Sozialversicherungsrecht, in: Personen-Schaden-Forum 2016, p. 273-296

 

  • Anne-Sylvie Dupont, Le trouble somatoforme : un peu plus douloureux ?, in: Plaidoyer, Année 34(2016), no 1, p. 20-23

 

  • Erdem Buyuksagis, Et si Dr House évoquait le défaut potentiel de votre pacemaker…, in: PJA, Vol. 25(2016), no 1, p. 14-22

 

  • Andrea Eisner-Kiefer, Indizierende Umstände: Urteil des Bundesgerichts 4A_150/2015 vom 29. Oktober 2015, in: Jusletter [Ressource électronique], 8. Februar 2016

 

 

 

141 V 546 – 9C_65/2015 (f) du 29.09.2015 – Limitation du choix du fournisseur de prestations –41 al. 4 LAMal – 42 al. 2 LAMal / Système du tiers payant – reprise de la dette de l’assuré vis-à-vis du fournisseur de prestations

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_65/2015 (f) du 29.09.2015, publié ATF 141 V 546

 

ATF 141 V 546 consultable ici : http://bit.ly/21Nj0Ei

 

Limitation du choix du fournisseur de prestations –41 al. 4 LAMal – 42 al. 2 LAMal

Système du tiers payant – reprise de la dette de l’assuré vis-à-vis du fournisseur de prestations

 

Une assurance-maladie est une assurance autorisée à pratiquer l’assurance-maladie sociale. Parmi ses modèles d’assurance alternatifs à l’assurance obligatoire des soins, elle offre une assurance du médecin de famille et un modèle de télé-médecine. Lors de la conclusion du contrat d’assurance, la personne assurée choisit un médecin (médecin coordinateur) sur une liste fournie par l’assureur-maladie. La personne assurée s’engage à s’adresser au préalable à ce médecin avant qu’un traitement médical soit prodigué par un autre fournisseur de prestations; si elle ne respecte pas cette obligation, elle devra prendre en charge les frais du traitement. Des exceptions sont prévues en relation avec les traitements d’urgence, les traitements auprès de spécialistes, tels qu’ophtalmologues et gynécologues, et lors de l’absence du médecin coordinateur. La personne assurée s’engage à prendre contact avec le centre de télé-médecine mandaté par l’assureur-maladie avant de consulter un fournisseur de prestations ou de commencer un traitement médical et d’en suivre les recommandations. A défaut de respecter ces obligations, l’assureur-maladie ne prend pas en charge les frais des traitements. Comme pour le premier modèle, des exceptions sont prévues pour les cas d’urgence et la consultation de certains spécialistes.

L’assureur-maladie a adhéré à la Convention-cadre TARMED conclue entre santésuisse, d’une part, et H+ Les Hôpitaux suisses, d’autre part. L’assureur-maladie a en outre adhéré à la Convention relative à la valeur du point taxe TARMED conclue entre santésuisse, d’une part, et la Fédération des hôpitaux vaudois et le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), d’autre part. Ce dernier établissement est également lié par la Convention-cadre TARMED.

Entre le mois de mars 2011 et le mois de janvier 2013, le CHUV a adressé plusieurs factures à l’assureur-maladie pour les traitements (ambulatoires et stationnaires) dispensés à ses assurés. L’assureur a refusé d’en payer plusieurs pour le motif que ses assurés n’avaient pas contacté au préalable le médecin coordinateur ou n’avaient pas saisi le centre de télé-médecine.

 

Procédure cantonale (arrêt Tarb 12/13 – 5/2014 – consultable ici : http://bit.ly/1UHQA9e)

En application du système de tiers payant introduit par la Convention relative à la valeur du point taxe TARMED, l’assureur devient le débiteur direct de la facture du fournisseur de prestations en lieu et place de l’assuré. S’il devait s’avérer que l’assuré n’a pas respecté ses obligations contractuelles vis-à-vis de l’assureur, à savoir s’il n’a pas consulté au préalable le médecin coordinateur ou le centre de télé-médecine avant de s’adresser à un fournisseur de prestations, il appartiendrait à l’assureur dans un deuxième temps (une fois payé le fournisseur de prestations) de se retourner contre l’assuré. Par jugement du 10.11.2014, admission de la demande de l’Etat de Vaud et condamnation de l’assureur-maladie à payer les notes en souffrance, ainsi que les intérêts moratoires sur les 51 autres factures déjà payées.

 

TF

En principe, en cas de traitement ambulatoire, l’assuré a le libre choix entre les fournisseurs de prestations admis et aptes à traiter sa maladie (art. 41 al. 1 LAMal). En cas de traitement hospitalier, l’assuré a également le libre choix entre les hôpitaux aptes à traiter sa maladie et figurant sur la liste de son canton de résidence ou celle du canton où se situe l’hôpital (hôpital répertorié; art. 41 al. 1 bis LAMal). Toutefois, « l’assuré peut, en accord avec l’assureur, limiter son choix aux fournisseurs de prestations que l’assureur désigne en fonction de leurs prestations plus avantageuses (art. 62 al. 1 et 3 LAMal). L’assureur ne prend en charge que les coûts des prestations prodiguées ou ordonnées par ces fournisseurs; l’al. 2 est applicable par analogie. Les prestations que la loi rend obligatoires sont en tout cas garanties » (art. 41 al. 4 LAMal). Selon l’art. 41 al. 2 LAMal, si, pour des raisons médicales, l’assuré se soumet à un traitement ambulatoire administré par un autre fournisseur de prestations, l’assureur prend en charge les coûts correspondant au tarif applicable à cet autre fournisseur. L’assureur peut réduire les primes des assurances impliquant un choix limité du fournisseur de prestations d’après l’art. 41 al. 4 LAMal (art. 62 al. 1 LAMal).

L’art. 42 LAMal règle les modalités de facturation et définit le débiteur de la prestation. Ainsi, sauf convention contraire entre les assureurs et les fournisseurs de prestations, l’assuré est le débiteur de la rémunération envers le fournisseur de prestations. L’assuré a, dans ce cas, le droit d’être remboursé par son assureur (système du tiers garant). En dérogation à l’art. 22 al. 1 LPGA, ce droit peut être cédé au fournisseur de prestations (al. 1). Les assureurs et fournisseurs de prestations peuvent convenir que l’assureur est le débiteur de la rémunération (système du tiers payant). En cas de traitement hospitalier, l’assureur, en dérogation à l’al. 1, est le débiteur de sa part de rémunération (al. 2). Le fournisseur de prestations doit remettre au débiteur de la rémunération une facture détaillée et compréhensible. Il doit aussi lui transmettre toutes les indications nécessaires lui permettant de vérifier le calcul de la rémunération et le caractère économique de la prestation. Dans le système du tiers payant, l’assuré reçoit une copie de la facture qui a été adressée à l’assureur. En cas de traitement hospitalier, l’hôpital atteste la part du canton et celle de l’assureur de manière séparée. Le Conseil fédéral règle les détails (al. 3).

Lors d’un traitement hospitalier, le système du tiers payant s’impose de par la loi (art. 42 al. 2 LAMal). Pour les prestations ambulatoires, la loi laisse le soin aux parties de prévoir l’introduction de ce système. La Convention relative à la valeur du point taxe TARMED prévoit explicitement ce système dans son art. 7.

Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion d’exposer que le système du tiers payant est une forme de reprise de dette contractuelle de l’assureur vis-à-vis du fournisseur de prestations. Dans ce système, l’assuré envoie les factures à son assureur ou ce dernier les reçoit directement du fournisseur de prestations. L’assureur est alors tenu d’indemniser la personne qui fournit les prestations (ATF 132 V 18 consid. 5.2 p. 23). Comme dans le cas d’une reprise de dette au sens de l’art. 175 ss CO, le système du tiers payant suppose l’existence d’une reprise de dette interne et d’une reprise de dette externe (voir Gebhard Eugster, Krankenversicherung, in Soziale Sicherheit [SBVR], 2 ème éd., n° 986 s. p. 732, et Grégoire Geissbühler, Tiers garant, tiers payant (42 LAMal), Un point de vue du droit des obligations, in AJP/PJA 2015, p. 1012 ss, p. 1016). Ainsi, l’assureur s’engage à reprendre la dette de l’assuré (reprise de dette interne, art. 175 al. 1 CO), ce qui a pour effet de libérer l’assuré de ses obligations vis-à-vis du fournisseur de prestations, sous réserve de la franchise et de la quote-part qui ne sont pas pris en charge par l’assurance sociale. Par le choix du système de rémunération, le catalogue des prestations ne peut en effet ni être élargi (art. 34 LAMal) ni être restreint (cf. art. 41 al. 4, 3 e phrase LAMal). L’assureur remplace en outre l’assuré dans la relation contractuelle qui l’unit au fournisseur de prestations (reprise de dette externe, art. 176 al. 1 CO).

Il découle de ce système que le contrat passé entre l’assureur et l’assuré, soit la reprise de dette interne, constitue pour le créancier une res inter alios acta. Par conséquent, l’assureur ne peut pas opposer au fournisseur de prestations les exceptions qu’il aurait pu avoir à l’encontre de l’assuré (cf. par analogie Thomas Probst, in Commentaire romand du Code des obligations, 2ème éd. 2012, no 7 ad art. 175 CO et n° 7 ad art. 179 CO).

Il s’avère que le système du tiers payant, au contraire du système dit du tiers garant, oblige l’assureur à reprendre la dette de l’assuré vis-à-vis du fournisseur de prestations. L’assureur ne peut pas se libérer de son obligation en invoquant une éventuelle violation contractuelle de la part de l’assuré parce que les relations juridiques qui l’unissent à l’assuré constituent un acte qui juridiquement ne concerne pas le fournisseur de prestations. Ni la Convention-cadre TARMED ni la Convention relative à la valeur du point taxe TARMED ne prévoient une dérogation ou une réserve à l’application stricte du système du tiers payant. En ces circonstances, l’assureur-maladie est donc tenu de payer les factures concernant les traitements médicaux fournis par le CHUV et ceci même s’il devait s’avérer que la personne assurée ne s’est pas adressée préalablement au médecin coordinateur ou au centre de télé-médecine.

 

Le TF rejette le recours de l’assureur-maladie.

 

 

ATF 141 V 546 consultable ici : http://bit.ly/21Nj0Ei

Arrêt 9C_65/2015 consultable ici : http://bit.ly/1QsQFKV

 

 

4A_134/2015 (f) du 14.09.2015 – Assurance-vie mixte – Non-paiement de la prime – Sommation – Transformation de l’assurance – 20 s. LCA – 93 LCA

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_134/2015 (f) du 14.09.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1Qy0SHb

 

Assurance-vie mixte – Non-paiement de la prime – Sommation – Transformation de l’assurance – 20 s. LCA – 93 LCA

 

Exploitant, en tant qu’indépendant, d’un cabinet de physiothérapie et d’ostéopathie, conclut le 02.07.1992 une « police de prévoyance » comprenant diverses assurances, dont une « assurance mixte » conférant le droit à un capital de 300’000 fr. en cas de vie le 01.04.2021 ou en cas de décès avant cette date. Une assurance complémentaire devait en outre couvrir l’incapacité de gain.

Le 20.08.1997, le preneur d’assurance-assuré a été victime d’un accident de la circulation à la suite duquel il a présenté un syndrome cervical assorti d’un syndrome post-commotionnel avec troubles neurologiques et psychiatriques. Dès le 01.09.2002, l’assureur lui a versé des demi-rentes en vertu de l’assurance contre l’incapacité de gain. Elle l’a en outre dispensé de payer 50% de la prime convenue.

Concernant l’assurance-invalidité, toute rente d’invalidité ont été refusée par décision du 02.06.2005, confirmée sur opposition le 19.02.2007. Par jugement du 13.05.2008, le Tribunal cantonal a accordé à l’assuré une demi-rente d’invalidité entre mars 2001 et août 2002, puis une rente entière dès septembre 2002. Le Tribunal fédéral a confirmé ce jugement par arrêt du 23.03.2009 (9C_510/2008).

Dans le courant de l’année 2005, la compagnie d’assurance a adressé plusieurs sommations à l’assuré en raison du défaut de paiement des primes partielles. Le 18.09.2006, la compagnie d’assurance a écrit à l’avocat de l’assuré qu’il appartenait à ce dernier « de régler les primes réclamées au plus tôt pour éviter une libération de cette police par suite de non-paiement des primes ». Cette sommation n’indique pas le montant réclamé, ni le délai de paiement de 14 jours. Le 30.09.2006, la compagnie d’assurance a suspendu le versement des demi-rentes et n’a plus libéré l’assuré du devoir de payer les primes. Celui-ci a néanmoins cessé de payer ses primes à cette même époque.

Le 03.05.2007, la compagnie d’assurance s’est plainte du non-paiement des primes. Elle a accordé à l’assuré « un nouveau délai de 14 jours pour [lui] permettre d’éviter les conséquences du retard ». A cet égard, elle a précisé qu’à défaut de paiement dans le délai précité, l’assurance serait transformée, six mois après l’échéance de la prime, en une assurance libérée du paiement des primes avec réduction de la somme assurée, respectivement avec adaptation de la prestation assurée.

Le 04.09.2007, la compagnie d’assurance a confirmé à l’assuré qu’en raison du non-paiement ou du paiement partiel des primes dues entre les mois d’octobre 2006 et juillet 2007, son assurance avait été transformée avec effet au 01.04.2007.

 

TF

La loi sur le contrat d’assurance (LCA) contient une réglementation spéciale sur les conséquences du retard dans le paiement des primes. Si la prime n’est pas payée à l’échéance ou dans le délai de grâce accordé par le contrat, le débiteur doit être sommé par écrit, à ses frais, d’en effectuer le paiement dans les quatorze jours à partir de l’envoi de la sommation; celle-ci doit rappeler les conséquences du retard (art. 20 al. 1 LCA).

Le débiteur qui ne paie pas dans le délai imparti et entre en demeure encourt les effets suivants: dans un premier temps, l’obligation de l’assureur est suspendue (art. 20 al. 3 LCA). Si l’assureur ne poursuit pas le paiement de la prime en souffrance dans les deux mois après l’expiration du délai de quatorze jours, il est censé s’être départi du contrat et avoir renoncé au paiement de la prime arriérée (art. 21 al. 1 LCA); s’il poursuit le paiement de la prime ou l’accepte ultérieurement, son obligation reprend effet à partir du moment où la prime arriérée a été acquittée avec les intérêts et les frais (art. 21 al. 2 LCA).

Les assurances-vies qui ont été en vigueur pendant trois ans au moins connaissent un autre sort. Dès l’entrée en demeure, ce type d’assurance est automatiquement transformée en assurance avec prestation réduite et libération du paiement des primes (art. 93 LCA en liaison avec l’art. 20 al. 4 LCA; Thomas Karl Aebi, in Basler Kommentar, n° 5 ad art. 93 LCA; Alfred Maurer, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 3 e éd. 1995, p. 445; Carl Jaeger, Kommentar zum Schweizerischen Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, 1933, n° s 7 et 10 ad art. 93 LCA).

Le régime des art. 20 s. et 93 LCA est semi-impératif, en ce sens qu’il ne peut pas être modifié au détriment du preneur d’assurance ou de l’ayant droit (art. 98 al. 1 LCA). L’on admet que l’assureur n’est pas tenu d’attendre les deux mois prévus par l’art. 21 LCA pour se départir du contrat; il peut le faire dès que le débiteur est en demeure (ATF 138 III 2 consid. 4.1 i.f.). Selon la doctrine, l’assureur peut annoncer ce choix au stade de la sommation déjà, dans la mesure où la position du débiteur ne s’en trouve pas aggravée; les conditions générales peuvent aussi prévoir la résiliation du contrat dès l’entrée en demeure du débiteur (Franz Hasenböhler, in Basler Kommentar, n° 83 ad art. 20 LCA et n° 9 ad art. 21 LCA, et les auteurs cités; Andrea Kiefer, Prämienzahlungsverzug nach VVG, 2000, p. 107 s.; Thierry De Mestral, La prime et son paiement, 2000, p. 140; cf. aussi arrêt TF du 25 février 1943 in RBA IX n° 56 p. 143).

Selon la jurisprudence, la sommation doit indiquer le montant de la ou des primes dont le paiement est exigé, ainsi que le délai de paiement de 14 jours. Elle doit en outre annoncer les conséquences de la demeure de manière explicite, claire et complète. L’assureur ne peut pas se contenter de mentionner la suspension de la couverture d’assurance (art. 20 al. 3 LCA); il doit notamment aussi évoquer la possibilité de se départir du contrat et la présomption découlant de l’art. 21 al. 1 LCA. Un simple renvoi aux art. 20 s. LCA est insuffisant, tout comme le renvoi aux règles correspondantes des conditions générales d’assurance (ATF 138 III 2 consid. 4.2; 128 III 186 consid. 2e). Peu importe que l’assureur ait annexé à la sommation les dispositions de la LCA et que l’assuré soit représenté par un avocat. En effet, l’art. 20 LCA exige que l’assureur lui-même expose à l’assuré toutes les conséquences de la demeure; il ne peut donc pas partir du principe que l’avocat de l’assuré va faire cette tâche à sa place (arrêt 4A_397/2010 du 28 septembre 2010 consid. 4.4).

La sommation qui n’informe pas correctement le débiteur des conséquences de la demeure est irrégulière; elle ne saurait déployer les effets qu’elle omet de mentionner (ATF 138 III 2 consid. 4.2 i.f. p. 7; 128 III 186 consid. 2b et 2f).

Dans un arrêt non publié de 2001, le Tribunal fédéral a précisé que les art. 20 et 93 LCA règlent les conséquences de la demeure et présupposent donc que le preneur soit débiteur de la prime réclamée. Si l’assureur procède conformément aux art. 20 et 93 LCA, mais qu’il apparaît ensuite que la prime n’était pas due, notamment parce que le preneur devait en être exonéré en vertu d’une clause contractuelle, ces démarches sont dénuées d’effet juridique; la police initiale demeure en vigueur dans toute son étendue. Ceci dit, tant que le droit d’être libéré du paiement des primes n’a pas été documenté conformément au devoir prévu par l’art. 39 LCA, les primes restent dues, avec les conséquences rattachées à la demeure (arrêt 5C.130/2000 du 4 janvier 2001 consid. 3a et b).

En bref, l’assureur peut se prévaloir des conséquences de la demeure et résilier l’assurance ou la transformer pour autant qu’il ait valablement sommé le débiteur de payer des primes qui étaient dues et exigibles, et que celui-ci n’ait pas agi dans le délai imparti.

La sommation ne mentionne pas le risque de résiliation, alors que l’on est en présence d’une police comprenant plusieurs types d’assurance, dont certaines sont sujettes à la résiliation et d’autres à la transformation avec prestation réduite. Il faut admettre que l’assureur doit clairement exposer les conséquences prévues pour chacune. Peu importe que ces conséquences figurent dans les conditions générales d’assurance. De même, est sans pertinence le fait que l’assuré était assisté d’un avocat.

Il faut admettre que la sommation du 03.05.2007 est aussi irrégulière. L’assureur ne peut donc pas se prévaloir des conséquences de la demeure; il n’a ainsi pas valablement transformé la police du 02.07.1992, et en particulier pas valablement résilié l’assurance en cas d’incapacité de gain.

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et renvoie la cause à l’instance inférieure pour suite de la procédure.

 

 

Arrêt 4A_134/2015 consultable ici : http://bit.ly/1Qy0SHb

 

 

8C_307/2015 (f) du 08.10.2015 – Incapacité de travail totale préexistante pour maladie et accident avec nouvelle incapacité de travail – Droit à l’indemnité journalière – 16 LAA / Causalité outrepassante

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_307/2015 (f) du 08.10.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/21dvOOK

 

Incapacité de travail totale préexistante pour maladie et accident avec nouvelle incapacité de travail – Droit à l’indemnité journalière – 16 LAA

Causalité outrepassante

 

Assurée, née en 1956, travaillant en qualité d’aide de cuisine depuis le 15.08.2001, est en incapacité de travail à 100% pour cause de maladie à partir du 01.05.2007. Elle a perçu des indemnités journalières de l’assurance perte de gain maladie jusqu’au 31.03.2008, date de la résiliation du contrat de travail.

Le 08.10.2007, l’assurée a été victime d’une chute dans un trolleybus, à la suite d’un freinage brusque. Par déclaration d’accident-bagatelle LAA du 10.06.2008, l’ex-employeur de l’assurée a informé l’assureur-accidents que le 12.12.2007, l’assurée avait été victime d’une chute, en glissant sur la chaussée.

Par des décisions séparées du 02.06.2009, l’assureur-accidents a mis fin, d’une part, au droit de l’assurée à des « prestations à court terme (traitement médical) » pour les suites de l’accident du 08.10.2007 et, d’autre part, a nié le droit de celle-ci à des prestations pour les suites de l’accident du 12.12.2007. Se fondant sur l’avis de son médecin-consultant, spécialiste en chirurgie orthopédique, elle a considéré que dans les deux cas il n’existait pas de lien de causalité naturelle entre les événements accidentels et les troubles actuels de l’assurée.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 1/13 – 21/2015 – consultable ici : http://bit.ly/1QZx4pe)

Par jugement du 23.03.2015, rejet du recours en tant qu’il portait sur le droit à des indemnités journalières et à une rente d’invalidité et renvoi de la cause à l’assurance-accidents pour complément d’instruction et nouvelle décision sur le droit éventuel de l’assurée à la prise en charge des frais de traitement et à une indemnité pour atteinte à l’intégrité.

 

TF

On parle de causalité outrepassante, lorsqu’après un événement dommageable se produisent de nouveaux faits, qui auraient entraîné le même dommage si celui-ci n’était pas déjà survenu. Dans ce cas, la cause subséquente ne peut plus avoir d’incidence ni sur la survenance ni sur l’étendue du dommage (voir Franz Werro, La responsabilité civile, 2 e éd. 2011, p. 63 s.; Thomas Probst, La causalité aujourd’hui, in Les causes du dommages, 2007, p. 20 s.).

La juridiction cantonale n’a pas nié le lien de causalité entre les accidents et les troubles de l’assurée. Se référant à la notion de causalité outrepassante, elle a toutefois considéré qu’un accident ne pouvait pas entraîner une incapacité de travail auprès d’une personne déjà dépourvue de toute capacité de travail. Aussi bien a-t-elle nié le droit de l’assurée aux indemnités journalières. Ces considérations sont pertinentes. En effet, depuis le mois de mai 2007, l’assurée était en incapacité de travail entière et durable dans son activité habituelle, en raison notamment de lombo-pseudo-sciatalgies chroniques et de troubles dégénératifs du rachis lombaire, ce qu’elle ne conteste pas. Dans ces conditions, force est de constater que les accidents des 08.10.2007 et 12.12.2007 n’ont pas provoqué une incapacité de travail supérieure à celle résultant des affections préexistantes. A cet égard, le fait que l’assurée a reçu des indemnités pour perte de gain en cas de maladie d’une assurance privée n’est pas décisif.

 

Le TF est rejeté.

 

 

Arrêt 8C_307/2015 consultable ici : http://bit.ly/21dvOOK

 

 

Remarque : la recommandation de la Commission ad hoc n° 13/85 (révision totale du 17 novembre 2008) et son annexe reprennent ce principe. L’annexe permet d’expliquer de manière compréhensible cette notion par un schéma.

 

6B_237/2015 (f) du 16.02.2016 – In dubio pro reo – 10 CPP – 32 al. 1 Cst. / Excès de vitesse filmé par le conducteur et posté sur YouTube / Contestations quant au détenteur du véhicule et conducteur au moment des faits balayées par le TF

Arrêt du Tribunal fédéral 6B_237/2015 (f) du 16.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2188v8N

 

In dubio pro reo / 10 CPP – 32 al. 1 Cst.

Excès de vitesse filmé par le conducteur et posté sur YouTube

Contestations quant au détenteur du véhicule et conducteur au moment des faits balayées par le TF

 

 

Entre le 23.06.2010 et le 21.01.2011, X.__ a circulé à 220 km/h à bord de son véhicule VW Golf R 300 HP, alors que la vitesse était limitée à 80 km/h. Tout en roulant à cette vive allure, le prévenu avait filmé son exploit et posté la vidéo sur internet. Ensuite de la découverte de cette vidéo, la gendarmerie fribourgeoise avait dénoncé X__ le 21.12.2011.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 01.04.2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l’Est vaudois a condamné X.__, pour infraction grave aux règles de la circulation routière, à une peine de quinze mois d’emprisonnement avec sursis durant cinq ans.

La Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté son appel et admis partiellement l’appel du ministère public (jugement du 24.09.2014)

 

TF

Détenteur du véhicule filmé

Les instances inférieurs ont admis que la voiture filmée était celle du recourant en se fondant sur les éléments suivants: le véhicule figurant dans la présentation vidéo était celui du recourant; le montage vidéo avait été fait par ses soins; le recourant avait reconnu que le compte Youtube dont l’identifiant était « Z.__ », sur lequel la vidéo avait été postée, était le sien; il avait fait des déclarations confuses; le titre de la vidéo postée sur Youtube correspondait exactement au modèle de sa voiture, une Golf R 300 HP; le compteur filmé était identique à celui équipant son véhicule; le recourant était un usager de la route de Berne, là où l’on savait que l’excès de vitesse avait eu lieu; au moment où l’excès de vitesse le plus significatif passait à l’écran, s’inscrivait une phrase en portugais, langue maternelle du recourant; le recourant avait répondu aux critiques et remarques des internautes concernant la vidéo en utilisant le « je »; il vouait un culte à son véhicule (il l’avait présenté sous tous les angles lors du montage vidéo, il avait racheté le leasing de cette voiture pour un montant de 25’000 fr., afin de l’amener au Portugal comme véhicule de vacances alors que son salaire était modeste et qu’il avait une famille à charge).

 

Conducteur du véhicule incriminé

Selon la jurisprudence, le conducteur d’un véhicule automobile ne saurait se voir condamner à une infraction de la loi fédérale sur la circulation routière que s’il est établi à satisfaction de droit qu’il est bien l’auteur de cette infraction. Autrement dit, le juge ne peut prononcer une telle condamnation que s’il a acquis la conviction que c’est bien l’intéressé qui a enfreint les règles de la circulation. Lorsqu’une infraction a été dûment constatée, sans cependant que son auteur puisse être identifié, l’autorité ne saurait se borner à présumer que le véhicule était piloté par son détenteur (ATF 106 IV 142 consid. 3 p. 143; ATF 105 Ib 114 consid. 1a p. 117 en matière de retrait du permis de conduire).

Lorsque l’auteur d’une infraction constatée ne peut être identifié sur-le-champ, le juge peut certes, dans un premier temps, partir de l’idée que le détenteur du véhicule en question en était aussi le conducteur au moment critique. Mais dès lors que cette version est contestée par l’intéressé, il lui appartient d’établir sa culpabilité sur la base de l’ensemble des circonstances, sans franchir les limites de l’arbitraire. S’il arrive à la conclusion que le détenteur, malgré ses dénégations, est bien le conducteur fautif, la condamnation est fondée (ATF 106 IV 142 consid. 3 p. 143). Il ne suffit pas au détenteur d’invoquer le droit au silence ou le droit de ne pas s’auto-incriminer pour échapper à une sanction lorsque sa culpabilité n’est pas douteuse. Lorsque le prévenu fait des déclarations contradictoires, il ne peut invoquer la présomption d’innocence pour contester les conclusions défavorables que le juge a, le cas échéant, tirées de ses déclarations (arrêt 6B_316/2014 du 23 juillet 2014 consid. 2.2; 6B_562/2010 du 28 octobre 2010 consid. 2.1.2).

La cour cantonale a retenu que c’était le véhicule du recourant que l’on voyait au début du film et que c’était le même type de véhicule à qui l’on faisait franchir des vitesses massivement excessives. Le recourant avait un devoir de s’expliquer, mais pour toute réponse il s’était limité à fournir des explications confuses et contradictoires. Le recourant était coutumier de la vitesse; il avait utilisé sa langue maternelle lors de l’excès de vitesse le plus caractérisé; il avait répondu aux commentaires postés sur Youtube en s’appropriant les faits; il vouait une véritable fascination pour son véhicule et dans cette logique seule sa voiture pouvait être mise en scène, car il ne s’agissait pas de faire de la publicité pour la marque VW mais bien de faire envie aux autres en se mettant en avant; le recourant habitait à Y.__ et restait un habitué de la route de Berne.

La cour cantonale s’est fondée sur une série d’indices pour établir qu’il était l’auteur de l’infraction. Elle n’a en conséquence pas violé les règles régissant le fardeau de la preuve en confirmant la culpabilité du recourant, en se fondant d’une part sur la présomption de fait qui identifie le conducteur au détenteur et d’autre part sur l’ensemble des circonstances.

 

Le TF rejette le recours.

 

 

Arrêt 6B_237/2015 consultable ici : http://bit.ly/2188v8N

 

 

9F_1/2016 (f) du 19.02.2016 – Restitution du délai – 50 LTF / Défaillances informatiques entre avocat et mandant – pas un motif d’empêchement non fautif

Arrêt du Tribunal fédéral 9F_1/2016 (f) du 19.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1LxfOVY

 

Restitution du délai – 50 LTF

Défaillances informatiques entre avocat et mandant – pas un motif d’empêchement non fautif

 

Par arrêt du 19.01.2016 (9C_914/2015), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours d’un assuré, au motif que le recourant n’avait pas produit de procuration signée, nonobstant l’avertissement contenu dans l’ordonnance du 09.12.2015. Par écriture postée le 01.02.2016, le recourant demande la restitution du délai imparti dans l’ordonnance, ainsi que la reprise de la cause 9C_914/2015, joignant la procuration signée. A l’appui de sa demande de restitution du délai, le conseil du requérant allègue qu’il n’a pas été en mesure de faire signer la procuration à son client en raison de défaillances informatiques qui ont court-circuité les courriels électroniques échangés entre son mandant et lui-même.

En vertu de l’art. 50 al. 1 LTF, si, pour un autre motif qu’une notification irrégulière, la partie ou son mandataire a été empêché d’agir dans le délai fixé sans avoir commis de faute, le délai est restitué pour autant que la partie en fasse la demande, avec indication du motif, dans les 30 jours à compter de celui où l’empêchement a cessé; l’acte omis doit être exécuté dans ce délai. D’après l’art. 50 al. 2 LTF, la restitution peut aussi être accordée après la notification de l’arrêt, qui est alors annulé. Même si elle a des effets comparables, la restitution après la notification de l’arrêt ne relève pas de la révision mais vise à procéder à la correction d’une omission (Jean-Maurice Frésard, in Commentaire de la LTF, 2ème éd., 2014, n° 20 ad art. 50 LTF),

De manière générale, une défaillance dans l’organisation interne de l’avocat telle que des problèmes informatiques ne constitue pas un empêchement non fautif justifiant une restitution du délai (arrêt 6B_1074/2015 du 19 novembre 2015 consid. 3.1.2), dans la mesure où il appartient au mandataire de faire preuve de toute la diligence nécessaire pour s’assurer que les actes procéduraux requis – en l’occurrence une procuration signée – soient dûment produits auprès de la juridiction concernée.

S’il est possible qu’une panne informatique a interrompu le contact avec son client, le mandataire avait toutefois la possibilité d’y remédier en utilisant d’autres moyens de communication, tels que l’appel téléphonique ou le courrier postal, d’autant qu’il disposait du temps nécessaire pour s’exécuter puisqu’un délai supplémentaire jusqu’au 05.01.2016 lui avait été accordé par ordonnance du 09.12.2015,

 

Le TF rejette la demande de restitution du délai.

 

 

Arrêt 9F_1/2016 consultable ici : http://bit.ly/1LxfOVY

 

 

8C_55/2015 (f) du 12.02.2016 – Droit au traitement médical – 10 LAA – 21 LAA / Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA / Usage « hors étiquette » d’un médicament / Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_55/2015 (f) du 12.02.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/1pnGf6s

 

Droit au traitement médical / 10 LAA – 21 LAA

Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA

Usage « hors étiquette » d’un médicament

Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

 

Assuré, mécanicien sur machines textiles, victime, le 27.08.2007, d’une chute du haut d’une machine et d’une blessure à la main droite. L’évolution a été défavorable, marquée par une algodystrophie du 5ème rayon de la main droite et d’une capsulite rétractile de l’épaule gauche.

A partir d’avril 2009, l’assuré a bénéficié, à intervalles réguliers de trois mois, un traitement médical sous la forme de perfusions de médicaments antalgiques, en particulier de kétamine (médicament Ketalar®), visant à élever le seuil douloureux. Ce traitement a eu un bénéfice certain.

Par décision du 11.02.2011, l’assureur-accidents a octroyé à l’assuré une rente fondée sur un degré d’invalidité de 22% dès le 01.01.2010 ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité d’un taux de 6%. L’assuré s’est opposé à cette décision, demandant entre autre la continuation de la prise en charge du traitement à la kétamine. Dans une nouvelle décision du 23.10.2012, l’assurance-accidents a partiellement admis l’opposition en ce sens qu’elle a prolongé le versement de l’indemnité journalière jusqu’au 31.10.2010 et fixé la naissance du droit à la rente au 01.11.2010.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 25.11.2014, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Contestation du début du droit à la rente et traitement médical selon 21 LAA

En se référant à l’arrêt U 252/01 de l’ancien Tribunal fédéral des assurances, la cour cantonale a considéré que le droit éventuel de l’assuré à la prise en charge du traitement litigieux devait être examiné à l’aune de l’art. 10 al. 1 LAA. Dans cet arrêt, l’ancien TFA avait été saisi d’un recours interjeté par un assuré contre le refus de l’assureur-accidents (confirmé en dernière instance cantonale) de prendre en charge une opération chirurgicale au titre de l’art. 21 al. 1 LAA, à un moment où une procédure parallèle sur le droit à la rente de cet assuré était encore pendante devant le tribunal cantonal. La cour fédérale a retenu que tant que la décision de rente n’était pas entrée en force, la rente ne pouvait être considérée comme fixée au sens de l’art. 21 al. 1 LAA. En effet, le juge appelé à se prononcer sur la décision de rente pourrait retenir que la poursuite du traitement médical était susceptible d’apporter une amélioration sensible de l’état de santé de l’assuré, ce qui aurait pour effet de différer la fixation de la rente au sens de l’art. 19 al. 1 LAA. C’est pourquoi, l’assureur-accidents – et le juge en cas de recours – devait examiner le bien-fondé de la demande de prise en charge de l’opération chirurgicale selon les conditions de l’art. 10 al. 1 LAA.

En l’espèce, ce sont les mêmes juges dans la même procédure qui avaient à traiter de tous les aspects du droit aux prestations de l’assuré. Dès lors que la cour cantonale a confirmé la stabilisation de l’état de santé de celui-ci au 01.11.2010 ainsi que le passage à la rente à cette date – ce qui n’était au demeurant pas contesté par l’assuré -, on ne voit pas d’obstacle à considérer que la rente est fixée au sens de l’art. 21 al. 1 LAA même si la décision de rente n’est pas encore formellement entrée en force parce que l’intéressé a conclu à la reconnaissance d’un degré d’invalidité supérieur à celui fixé par cette décision.

 

Droit au traitement médical – 10 LAA – 21 LAA

L’assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l’accident, à savoir notamment au traitement ambulatoire dispensé par le médecin, ainsi qu’aux médicaments et analyses ordonnés par celui-ci (art. 10 al. 1 let. a et b LAA). Le traitement médical n’est alloué qu’aussi longtemps que sa continuation est susceptible d’apporter une sensible amélioration de l’état de santé de l’assuré. Il cesse dès la naissance du droit à la rente (art. 19 al. 1, 2ème phrase, LAA). Lorsque la rente a été fixée, les prestations pour soins et remboursement de frais (art. 10 à 13 LAA) sont accordées à son bénéficiaire aux conditions énumérées à l’art. 21 al. 1 LAA, soit notamment lorsqu’il a besoin de manière durable d’un traitement et de soins pour conserver sa capacité résiduelle de gain (let. c). Ainsi, les conditions du droit à la prise en charge des frais de traitement médical diffèrent selon que l’assuré est ou n’est pas au bénéfice d’une rente (ATF 116 V 41 consid. 3b p. 45).

La cour cantonale a retenu que le traitement à la kétamine permettait de soulager passagèrement les douleurs chroniques de l’assuré sans toutefois apporter d’amélioration sensible de son état de santé. Partant, l’assurance-accidents n’avait pas à en assumer la prise en charge au titre de l’art. 10 al. 1 LAA postérieurement au 31.12.2010. A cela s’ajoutait que l’injection, à faibles doses, du médicament Ketalar® pour élever le seuil douloureux en cas de syndrome douloureux chronique correspondait à un usage « hors étiquette » de ce médicament dont l’indication autorisée est l’induction d’une anesthésie générale. Or une telle utilisation du médicament ne donnait pas lieu à un remboursement dans l’assurance-maladie obligatoire et il devait en aller de même dans l’assurance-accidents. Enfin, de l’aveu même de la Doctoresse F.__, il ne s’agissait pas d’une thérapie scientifiquement reconnue, ce qui justifiait également que l’assurance-accidents ne la prenne pas en charge.

 

Traitement de la douleur par injection de kétamine non reconnu scientifiquement

Il est admis en jurisprudence comme en doctrine que le traitement médical doit être scientifiquement reconnu pour être pris en charge par l’assurance-accidents: l’assuré n’a pas droit à la prise en charge de traitements expérimentaux, pas plus que l’assureur ne saurait lui imposer de tels traitements (voir ATF 123 V 53 consid. 2b/bb p. 59; RAMA 2000 n° U 395 p. 317 consid. 5a, U 160/98; Jean-Maurice Frésard/Margit Moser-Szeless, L’assurance-accidents obligatoire (avec des aspects de l’assurance-militaire), in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd. 2016, p. 969 n° 198; Alexandra Rumo-Jungo, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, 4ème éd. 2012, ad. art. 54 LAA, p. 244; Alfred Maurer, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2ème éd. 1989, p. 291). A cet égard, l’assureur-accidents s’inspire en principe de la jurisprudence relative à l’assurance-maladie (critère de l’efficacité posé par l’art. 32 al. 2 LAMal). Une méthode de traitement est considérée comme éprouvée par la science médicale, c’est-à-dire réputée scientifiquement reconnue, si elle est largement admise par les chercheurs et les praticiens (ATF 123 V 53 consid. 2b/aa p. 58). Quant à la prise en charge des médicaments, l’art. 71 al. 2 OLAA (RS 832.202) prévoit qu’ils sont remboursés par les assureurs d’après les listes qui ont été établies conformément à l’art. 52 al. 1 de la LAMal.

En l’espèce, le médicament Ketalar® et le spray nasal à la kétamine ne figurent pas sur la liste des spécialités établie par l’Office fédéral de la santé publique. D’autre part, il ressort des articles scientifiques produits que l’injection intraveineuse de kétamine à faibles doses pour combattre la douleur en est encore à un stade expérimental même si quelques études ont montré une certaine efficacité dans le traitement des douleurs à prédominance neuropathique grâce à la propriété de la kétamine de bloquer les récepteurs NMDA (acide-N-méthyl-D-aspartique). Il y est également relevé que la kétamine a des effets secondaires et qu’il subsiste de nombreuses interrogations liés à l’utilisation de cet agent analgésique puissant en dehors de son usage médical premier qui est l’induction d’une anesthésie générale. On ne peut donc considérer qu’il s’agit d’un traitement scientifiquement éprouvé et reconnu.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_55/2015 consultable ici : http://bit.ly/1pnGf6s