Archives par mot-clé : Revenu sans invalidité

9C_847/2018 (f) du 02.04.2019 – Fixation du revenu sans invalidité – Indexation selon tableau T39 / Revenu d’invalide selon ESS – Obligation de réduire le dommage / Indexation du revenu d’invalide selon ESS / Taux d’abattement

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_847/2018 (f) du 02.04.2019

 

Consultable ici

 

Comparaison des revenus / 16 LPGA

Fixation du revenu sans invalidité – Indexation selon tableau T39

Revenu d’invalide selon ESS – Toutes branches économiques confondues et non pas un secteur particulier de la production et des services – Obligation de réduire le dommage

Indexation du revenu d’invalide selon ESS

Taux d’abattement – Baisse de rendement, absence d’expérience et de formation à ne pas prendre en compte

 

Procédure cantonale (arrêt AI 244/17 – 303/2018consultable ici)

Par jugement du 25.10.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité

Selon la jurisprudence, le revenu sans invalidité doit en effet être évalué de la manière la plus concrète possible, avec pour conséquence qu’il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par la personne assurée avant l’atteinte à la santé, en tenant compte de l’évolution des salaires jusqu’au moment de la naissance du droit à la rente (cf. ATF 139 V 592 consid. 2.3 p. 593; 129 V 222 consid. 4.3.1 p. 224 et les références).

En l’espèce, dans la mesure où l’assuré a cessé en 2008 son activité de chauffeur-livreur pour des raisons de santé et qu’il n’a jamais pu exercer l’activité de gestionnaire en logistique (pour laquelle il avait bénéficié d’un reclassement professionnel), c’est à juste titre qu’il allègue que cette dernière activité ne peut pas être considérée comme son activité habituelle.

En conséquence, le revenu sans invalidité doit être déterminé en fonction du salaire qu’il a réalisé en dernier lieu comme chauffeur-livreur, soit 67’811 fr. en 2008 conformément à ce qui est indiqué dans le questionnaire pour l’employeur rempli le 07.08.2008. Après adaptation de ce montant à l’évolution des salaires selon l’indice des salaires nominaux à l’année 2015 (+ 2,1% en 2009, + 0,8% en 2010, + 1% en 2011, + 0,8% en 2012, + 0,7% en 2013, + 0,8% en 2014, et + 0,4% en 2015; voir le tableau T 39 « Evolution des salaires nominaux, des prix à la consommation et des salaires réels », 1976-2009 et 2010-2017), le revenu sans invalidité du recourant doit être arrêté à 72’408 fr. 90 par an.

 

Revenu d’invalide

L’assuré reproche aux juges cantonaux de s’être fondés sur le salaire de référence auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives dans le secteur privé toutes branches économiques confondues de la production et des services pour déterminer son revenu d’invalide. Il soutient que la juridiction cantonale aurait dû se référer au salaire auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives dans le secteur uniquement du commerce de détail (selon le TA1, chiffre 47 commerce de détail, niveau de compétence 1 Hommes de l’ESS 2014), étant donné qu’« il a plus de chances de trouver un emploi adéquat à ses capacités au vu des limitations importantes pour le port des charges ».

Dans la mesure où il semble mettre en discussion l’exigibilité d’une activité de substitution, il convient de préciser qu’il s’agit d’une contestation en relation avec la capacité de travail résiduelle. Or les limitations fonctionnelles retenues ne permettent pas de retenir que seules des activités simples et répétitives issues d’un secteur particulier de la production et des services, en l’occurrence, le commerce de détail, seraient adaptées. La référence à toutes les branches des services et de la production opérée par le Tribunal cantonal permet au contraire à l’assuré d’élargir ses possibilités de réinsertion sur l’ensemble du marché du travail suisse, comme il y est tenu en vertu de son obligation de diminuer le dommage (arrêt 9C_297/2011 du 31 janvier 2012 consid. 4.2.3).

S’agissant de l’indexation : en cas de recours à des salaires statistiques, ceux-ci doivent être adaptés à l’évolution des salaires nominaux correspondant à l’année déterminante pour l’ouverture du droit à la rente, conformément aux indices établis par l’Office fédéral de la statistique (OFS; cf. ATF 139 V 592 consid. 2.3 p. 593; 129 V 222 consid. 4.3.1 p. 224 et les références).

En ce qui concerne le taux d’abattement, on rappellera que la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (cf. ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc p. 79 s.). Le point de savoir s’il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d’autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral; en revanche, l’étendue de l’abattement du salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit, soit si celle-ci a commis un excès positif (« Ermessensüberschreitung ») ou négatif (« Ermessensunterschreitung ») de son pouvoir d’appréciation ou a abusé (« Ermessensmissbrauch ») de celui-ci, notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 72; 132 V 393 consid. 3.3 p. 399; 130 III 176 consid. 1.2 p. 180).

En l’espèce, la juridiction cantonale a admis un abattement de 5% afin de tenir compte de l’âge de l’assuré (62 ans au moment de la décision litigieuse). En retenant une diminution de rendement de 25% en raison de la lenteur d’exécution du recourant, le Tribunal cantonal a déjà pris en considération les limitations fonctionnelles et les auto-limitations que l’assuré s’impose lors de l’évaluation de la capacité de travail du point de vue médical. Aussi ces auto-limitations ne doivent-elles pas être prises en compte une seconde fois, comme facteur d’abattement. Quant à l’absence d’expérience et de formation, elle ne joue pas de rôle en l’occurrence dès lors que le revenu d’invalide a été déterminé en référence au salaire statistique auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives (arrêt 9C_297/2011 du 31 janvier 2012 consid. 4.1.5). Partant, seul un abattement de 5% apparaît justifié.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_847/2018 consultable ici

 

 

Progression des salaires nominaux de 0,5% en 2018, baisse des salaires réels de –0,4%

Progression des salaires nominaux de 0,5% en 2018, baisse des salaires réels de –0,4%

 

Communiqué de presse de l’OFS du 30.04.2019 consultable ici

 

L’indice suisse des salaires nominaux a augmenté en moyenne de +0,5% en 2018 par rapport à 2017. Il s’est ainsi établi à 101,6 points (base 2015 = 100). Compte tenu d’un taux d’inflation annuel moyen de +0,9%, les salaires réels ont enregistré un recul de –0,4% (100,5 points base 2015=100), selon les calculs de l’Office fédéral de la statistique (OFS).

 

 

Communiqué de presse de l’OFS du 30.04.2019 consultable ici

Tableau « T1.15 Indice des salaires nominaux, 2016-2018 » disponible ici (format XLSX)

 

9C_689/2018 (f) du 08.02.2019 – Revenu sans invalidité – Eléments du salaire à prendre en compte – Revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires sur plusieurs années – 16 LPGA / Droit au reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_689/2018 (f) du 08.02.2019

 

Consultable ici

 

Revenu sans invalidité – Eléments du salaire à prendre en compte – Revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires sur plusieurs années / 16 LPGA

Droit au reclassement dans une nouvelle profession / 17 LAI

Perception d’un salaire élevé en raison de responsabilités « de chef d’équipe » ne justifie pas la prise en charge par l’AI d’une formation supérieure

 

Assuré, né en 1959, a travaillé comme étancheur depuis avril 2008. Le 15.10.2015, son employeur a résilié les rapports de service avec effet au 31.12.2015. Le 27.10.2015, l’assuré a chuté et tapé ses deux genoux contre le bord d’une dalle. Le cas a été pris en charge par l’assurance-accidents. Le 11.05.2016, l’assuré a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité.

Dans le cadre de l’instruction de la demande, l’office AI a notamment fait verser à son dossier celui de l’assurance-accidents. Les médecins de la Clinique romande de réadaptation (CRR) de Sion ont diagnostiqué – avec effet sur la capacité de travail – des gonalgies bilatérales, avec lésions dégénératives des ménisques et des lésions chondrales aux deux genoux (prédominant au compartiment fémoro-patellaire, de grade IV) ; l’assuré ne pouvait plus exercer son activité habituelle d’étancheur depuis le 27.10.2015. Selon les médecins, l’assuré pouvait en revanche travailler à 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles (accroupissements, activités contraignantes pour les genoux, équilibre et port de charge limité à un niveau moyen de 15-25 kg).

Par décision, l’office AI a, en se fondant sur un degré d’invalidité de 17%, nié le droit de l’assuré à des prestations de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 161/17 – 248/2018 – consultable ici)

Les juges cantonaux ont retenu, pour le revenu d’invalide, un montant de 63’636 fr. 50 correspondant au salaire réalisé en 2016 par un homme exerçant à plein temps des tâches physiques ou manuelles simples dans le secteur privé (ESS 2014, tableau TA1, niveau 1, horaire usuel de travail de 41,7 heures, puis adaptation à l’évolution des salaires jusqu’en 2016), avec un taux d’abattement de 5%. Ils ont comparé ce montant au revenu sans invalidité de 77’117 fr. 76, fondé sur la moyenne des revenus inscrits sur le compte individuel AVS de l’assuré durant les années 2009 à 2014 (après adaptation à l’évolution des salaires jusqu’en 2016) et qui correspondaient aux décomptes de salaire produits par l’assuré ; le degré d’invalidité s’élevait à 17% (17,48%). L’assuré n’avait dès lors pas droit à une rente d’invalidité ou à des mesures de réadaptation d’ordre professionnel. Qui plus est, de telles mesures n’avaient pas lieu d’être dès lors que l’exercice d’activités ne nécessitant pas de formation particulière était à la portée de l’assuré, sans qu’un préjudice économique important ne subsistât.

Par jugement du 13.08.2018, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité

Les différents revenus invoqués par l’assuré incluent, selon les décomptes de salaire produits, des prestations d’assurance en cas d’accident et de maladie ou d’invalidité, voire des allocations familiales. Or ces montants ne doivent pas être compris dans le revenu provenant d’une activité lucrative conformément à l’art. 6 al. 2 let. b et f RAVS, en lien avec les art. 28 al. 1 2ème phrase LAI et art. 25 al. 1 RAI. L’assuré ne peut dès lors rien tirer en sa faveur de sa lecture sélective des décomptes de salaire et du compte individuel AVS.

L’assuré ne s’en prend ensuite pas concrètement au raisonnement qui a conduit les premiers juges à retenir que les conditions posées par la jurisprudence pour fixer le revenu sans invalidité sur une moyenne de salaires étaient réunies (à ce sujet, voir arrêt 9C_771/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.6.1 et les références). En particulier, il ne conteste pas les constatations cantonales selon lesquelles sa rémunération des années 2009 à 2014 était soumise à des fluctuations importantes. Contrairement à ce que requiert l’assuré, on ne saurait dans ces circonstances se fonder pour le calcul de son revenu sans invalidité sur les salaires perçus les deux années qui ont précédé la survenance de son atteinte à la santé. Seule la prise en compte de ses salaires réalisés pendant une période plus longue – soit sur une valeur moyenne calculée sur plusieurs années – permet de pondérer les facteurs variables de la rétribution dans le temps et reflète ainsi sa situation économique concrète. Il n’y a dès lors pas lieu de s’écarter du montant de 77’117 fr. 76 retenu par la juridiction cantonale à titre de revenu sans invalidité.

 

Droit au reclassement dans une nouvelle profession – 17 LAI

Le litige porte exclusivement sur le droit de l’assuré à un reclassement au sens de l’art. 17 LAI.

Selon l’art. 17 al. 1 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée. Par reclassement, la jurisprudence entend l’ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle générale, l’assuré n’a droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas. En particulier, l’assuré ne peut prétendre une formation d’un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l’invalidité sont telles que seule une formation d’un niveau supérieur permet de mettre à profit d’une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé (ATF 139 V 399 consid. 5.4 p. 403). Le seuil minimum fixé par la jurisprudence pour ouvrir droit à une mesure de reclassement est une diminution de la capacité de gain de 20% environ (ATF 139 V 399 consid. 5.3 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références).

L’assuré ne peut prétendre une formation d’un niveau supérieur à celui de son activité habituelle d’étancheur, sauf circonstances qui ne sont pas réalisées en l’espèce. En particulier, s’il affirme avoir bénéficié d’une formation d’un niveau universitaire à l’étranger dans les années 1970, les organes de l’assurance-invalidité n’ont pas pour tâche de le placer dans une position économique et professionnelle plus favorable que celle qu’il occupait directement avant son atteinte à la santé. L’assuré n’a ainsi droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas (ATF 139 V 399 consid. 5.4 p. 403; 130 V 488 consid. 4.2 p. 489 et les références). On ne saurait dès lors suivre l’assuré lorsqu’il demande à ce que l’office AI prenne en charge une formation alors qu’il avait travaillé comme étancheur sans être au bénéfice d’un titre professionnel, tel un certificat fédéral de capacité. Le fait que son employeur lui avait versé un salaire élevé en raison de ses responsabilités « de chef d’équipe » ne justifie pas la prise en charge par l’assurance-invalidité d’une formation supérieure à celle mise en œuvre jusqu’alors. Qui plus est, il ne prétend pas qu’une telle mesure permettrait d’atteindre un succès durable et important, compte tenu de la durée probable de la vie professionnelle après la période de formation (art. 8 al. 1bis 2ème phrase LAI; ATF 132 V 215 consid. 4.5.3 p. 231 et 4.5.4 p. 232). Dans ces circonstances, un reclassement dans une nouvelle profession serait dépourvu de l’efficacité recherchée par le législateur (art. 8 et 17 al. 1 LAI; ATF 124 V 108 consid. 2a p. 109).

Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de se prononcer plus avant sur les critiques de l’assuré quant à l’abattement sur le revenu d’invalide fixé par la juridiction cantonale. Même si l’assuré présentait une invalidité de plus de 20%, cela ne suffirait pas à lui ouvrir le droit à un reclassement dans une nouvelle profession.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_689/2018 consultable ici

 

 

Arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention collective de travail du second-œuvre romand

Arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention collective de travail du second-œuvre romand

 

Paru in FF 2019 1329

 

Les nouveaux salaires minimaux sont mentionnés à l’annexe II (FF 2019 1349 ss) et l’augmentation des salaires effectifs à l’annexe VIII (FF 2019 1364).

L’arrêté entre en vigueur le 01.03.2019 et a effet jusqu’au 31.12.2023.

 

 

8C_310/2018 (f) du 18.12.2018 – Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité – 16 LPGA / Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT / Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité – 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_310/2018 (f) du 18.12.2018

 

Consultable ici

 

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité / 16 LPGA

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité / 5 al. 2 LAVS – 9 RAVS

 

Assuré, né en 1965, travaillant en qualité de peintre en bâtiment, a été victime d’une entorse de la cheville droite à la suite d’un accident survenu sur un chantier le 17.10.2014. Dans la déclaration de sinistre, l’employeur a précisé que le salaire de base contractuel (brut) de l’intéressé s’élevait à 26 fr. par heure, montant qui ne comprenait ni les indemnités pour vacances et jours fériés, ni d’autres suppléments éventuels (13ème salaire, gratification, etc.). Quant au taux d’occupation, il était irrégulier et s’élevait à quatre heures par semaine, ce qui correspondait à 10% d’un horaire de travail à plein temps (40 heures).

Le 06.11.2014, l’employeur a informé l’assurance-accidents que l’indemnité pour les jours fériés et le 13ème salaire s’élevait à 8,33%. Le 11.11.2014, l’assuré a informé l’assureur que le taux d’occupation et l’horaire de travail annoncés par l’employeur dans la déclaration d’accident étaient erronés. Il a joint à son envoi un décompte de salaire relatif au mois d’octobre 2014, lequel faisait état d’un revenu brut de 2’146 fr., montant qui correspondait à septante-six heures de travail à 26 fr. et dix indemnités forfaitaires à 17 fr. Quant au droit aux vacances brut, il s’élevait à 10,64% de 1’976 fr. Le 27.04.2015 l’assuré a fait parvenir à l’assureur LAA d’autres décomptes de salaire pour 2013 et 2014.

Par jugement du 19.12.2016, le Tribunal des Prud’hommes a condamné l’employeur à verser à l’assuré des arriérés de salaire pour la période du 03.10.2013 au 17.10.2014, soit un montant brut de 47’941 fr. 55 (436,80 h x 24 fr. 65 du 3 octobre au 31 décembre 2013 et 1’392,30 h x 26 fr. 70 du 1er janvier au 17 octobre 2014). S’y ajoutaient, pour la même période, le droit à cinq semaines de vacances annuelles (10,64% de 47’941 fr. 55), le droit à un treizième salaire (8,33% de 47’941 fr. 55), ainsi que des indemnités forfaitaires (234,5 jours à 17 fr.). Le tribunal a considéré que l’assuré n’était pas parvenu à prouver qu’il effectuait un travail à plein temps, son temps de travail devait être fixé à 39 heures hebdomadaires ou 7,8 heures par jour, ce qui correspondait à la durée minimale de travail qui pouvait être fixée par une entreprise au regard de la convention collective.

Par décision du 06.03.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a nié le droit de l’assuré à une indemnité pour atteinte à l’intégrité, ainsi qu’à une rente d’invalidité au motif que le taux d’incapacité de gain (8,4%) était insuffisant pour ouvrir droit à une telle prestation.

L’assureur LAA a déterminé le revenu sans invalidité selon la formule suivante : (26,7 + [8,33% x 26,7]) x 40 (heures) x 52 (semaines) : 12 (mois) = 5’013,51. Il a ensuite porté ce montant à 5’068 fr. 66 pour tenir compte de l’évolution nominale des salaires (1,1%). En ce qui concerne le montant du salaire horaire, l’assureur s’est référé à la classe salariale B de la Convention collective de travail du second œuvre romand 2011 (ci-après: CCT-SOR).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/178/2018 – consultable ici)

La cour cantonale a, dans un premier temps, considéré que le salaire horaire brut de 26 fr. payé par l’employeur en 2013 et en 2014, ne tenait pas compte des sommes nettes (non déclarées) que l’assuré indiquait avoir déjà reçues en parallèle et que le nombre d’heures de travail déclarées mensuellement ne correspondait pratiquement jamais à un 10%. En ce qui concerne le salaire horaire, la cour cantonale a considéré que l’assuré appartenait à la classe salariale B au plus tard à partir du 01.01.2014, ce qui correspondait, pour le canton de Genève, à un salaire horaire minimum de 26 fr. 70, montant augmenté de 30 centimes pour les travailleurs des classes CE, A, B et C à partir du 01.03.2016. La cour cantonale a tenu compte d’un salaire horaire de 27 fr., d’un treizième salaire (8,33%), d’une indemnité pour cinq semaines de vacances (10,64%), d’une indemnité pour neuf jours fériés (3,96%) et elle a fixé à 62’416 fr. le salaire annuel en 2016 selon la formule : (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 40 (heures) x (52 – 5 [semaines]).

Dans un second temps, la cour cantonale a procédé à une parallélisation du revenu de 62’416 fr. et du salaire statistique usuel de la branche, soit 69’982 fr. Constatant que ce revenu usuel de la branche dépassait de plus 5% le salaire qu’aurait réalisé l’assuré dans son dernier emploi en 2016 (62’416 fr.), les juges cantonaux ont parallélisé les revenus à comparer à concurrence de la part qui excédait le taux minimal déterminant de 5%, ce qui donne en l’occurrence un revenu sans invalidité de 66’483 fr. 20 (69’982 fr. 30 – [5% x 69’982 fr. 30]).

Par jugement du 06.03.2018, admission du recours par le tribunal cantonal, annulant la décision et reconnaissant le droit à une rente d’invalidité de 16% à partir du 01.01.2017.

 

TF

Calcul des jours fériés dans le revenu sans invalidité

Dans l’arrêt 8C_520/2016 du 14 août 2017 consid. 4.3.2, le taux de 3,58% correspondait bien à 9 jours fériés par année mais, à la différence de la présente affaire où l’assuré avait droit à 5 semaines de vacances, soit 25 jours, l’assuré bénéficiait de 7,3 semaines de vacances, soit 36,5 jours par année. Or, compte tenu de 5 semaines de vacances et sur la base de la méthode de calcul de la cour cantonale, 9 jours fériés par année correspondent bel et bien à un taux de 3,96%. Cela étant, le calcul du revenu sans invalidité doit néanmoins être rectifié afin de ne pas tenir compte deux fois des jours fériés et être porté à 60’116 fr. au lieu de 62’416 fr., selon la formule: (27 + [8,33% x 27] + [10,64% x 27] + [3,96% x 27]) x 8 (heures) x 226 jours ouvrés (52 [semaines] x 5 [jours ouvrés] – 25 [jours de vacances] – 9 [jours fériés]).

 

Parallélisme des revenus à comparer – Salaire minimum selon CCT

La jurisprudence n’exige pas que le revenu sans invalidité dépasse le minimum CN/CCT. Il suffit qu’il ne soit pas inférieur au salaire moyen tel que l’entend la jurisprudence en matière de parallélisation des revenus à comparer (cf. arrêts 8C_721/2017 du 26 septembre 2018 consid. 3.4.2; 8C_537/2016, déjà cité, consid. 5).

En l’espèce, le revenu sans invalidité de l’assuré (60’116 fr.) correspondant au salaire minimum selon la CCT-SOR, il n’y a pas lieu de paralléliser les revenus à comparer par une majoration du revenu sans invalidité. Il n’est pas décisif, au regard de la jurisprudence, que les salaires prévus dans une CCT peuvent être situés plus ou moins en-dessous des salaires moyens de la branche concernée.

 

Non-prise en compte d’indemnité forfaitaire dans le revenu sans invalidité

Le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s’ils représentent un élément important de la rémunération du travail (art. 5 al. 2 LAVS). Selon l’art. 9 RAVS, les frais généraux sont les dépenses résultant pour le salarié de l’exécution de ses travaux ; le dédommagement pour frais encourus n’est pas compris dans le salaire déterminant (al. 1) ; ne font pas partie des frais généraux les indemnités accordées régulièrement pour le déplacement du domicile au lieu de travail habituel et pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel ; ces indemnités font en principe partie du salaire déterminant (al. 2).

Selon l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR, dans sa teneur au 01.01.2017, les déplacements de l’atelier aux chantiers occasionnant des frais supplémentaires pour le travailleur donnent droit à différentes indemnités. Pour le canton de Genève uniquement, l’art. 23 al. 2 CCT-SOR dispose qu’une indemnité forfaitaire par jour de travail de 17 fr. 50, respectivement 18 fr. dès le 01.01.2018, de transport professionnel, de repas pris à l’extérieur et d’outillage est due à tous les travailleurs ; elle est destinée à couvrir totalement ou partiellement les frais subis par les travailleurs.

Il ressort de l’art. 23 al. 1 let. a CCT-SOR que les indemnités prévues servent à couvrir les frais supplémentaires subis par le travailleur en raison des déplacements de l’atelier aux chantiers et des repas pris en dehors du domicile. Elles ne constituent donc pas des indemnités allouées régulièrement au salarié pour ses déplacements de son domicile au lieu de son travail habituel, ni des indemnités pour les repas courants pris au domicile ou au lieu de travail habituel. C’est pourquoi elles représentent incontestablement des indemnités pour frais encourus non comprises dans le salaire déterminant (art. 9 RAVS). Le fait que dans le canton de Genève, le remboursement de ces frais supplémentaires est réglé de manière forfaitaire à l’art. 23 al. 2 CCT-SOR ne change rien. Sur ce point, les faits de la présente affaire sont ainsi comparables à la situation jugée dans l’arrêt 8C_964/2012, quoi qu’en pense l’assuré.

Il n’y a pas lieu d’ajouter au revenu sans invalidité, déterminant pour la comparaison des revenus, l’indemnité forfaitaire allouée en vertu de l’art. 23 ch. 2 CCT-SOR.

 

En conséquence, le TF retient, au titre du revenu sans invalidité, un salaire de 60’116 fr. Le revenu d’invalide de 55’704 fr. n’étant pas contesté, on obtient un taux d’invalidité de 7%, soit un taux insuffisant pour ouvrir droit à une rente.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents et annule le jugement cantonal.

 

 

Arrêt 8C_310/2018 consultable ici

 

 

Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2016 : Tableau TA1_skill-level disponible

Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2016 : Tableau TA1_skill-level disponible

 

Le tableau TA1_skill-level « Salaire mensuel brut selon les branches économiques, le niveau de compétences et le sexe – Secteur privé » de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) de l’année 2016 a été publié par l’Office fédéral de la statistique le 26.10.2018. Il est disponible ici.

Quant au tableau T1_skill-level « Secteur privé et secteur public ensemble », il est disponible ici.

Enfin, à noter également la publication du tableau T17 « Salaire mensuel brut selon les groupes de professions, l’âge et le sexe – Secteur privé et secteur public ensemble », utilisé dans des cas particuliers.

 

Pour les détails quant à l’utilisation de l’ESS dans la détermination du revenu d’invalide, nous vous renvoyons à l’article Fixation du revenu d’invalide selon l’ESS, in : Jusletter 22 octobre 2018.

 

 

9C_869/2017 (f) du 04.05.2018 – Comparaison des revenus – Revenu sans invalidité – 16 LPGA / Taux d’activité partielle dans une activité et pratique d’un sport en compétition au niveau international – Durée de la carrière d’un sportif de haut niveau

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 (f) du 04.05.2018

 

Consultable ici

 

Comparaison des revenus – Revenu sans invalidité / 16 LPGA

Taux d’activité partielle dans une activité et pratique d’un sport en compétition au niveau international / Durée de la carrière d’un sportif de haut niveau

 

Assuré, né en 1982, titulaire d’un CFC de mécanicien sur cycles et motos, travaillant depuis l’année 2005 en qualité de monteur de panneaux solaires au service de B.___ SA. Le 11.09.2010, il a été victime d’un accident lors d’une course motocycliste qui a entraîné notamment un TCC. Saisi d’une demande de prestations en mars 2011, l’office AI a pris en charge une mesure de réentraînement au travail dans une activité de magasinier auprès de l’employeur. Par contrat de travail du 11.01.2012, l’assuré a été engagé par C.___ SA en tant que mécanicien sur véhicules légers du 15.02.2012 au 15.10.2012; son activité consistait également à assister un pilote moto engagé par C.___ SA. Selon le neuropsychologue FSP, cette activité était adaptée et pouvait être exercée à plein temps. Dès lors que la réadaptation était terminée et que l’assuré ne subissait plus de perte économique ni de diminution de rendement, l’office AI a nié son droit à la rente, par décision du 03.04.2012. A compter du 01.01.2013, l’assuré a exercé une activité indépendante en qualité de mécanicien sur moto, sous la raison individuelle F.___.

Le 24.12.2014, l’assuré a demandé à l’office AI de rouvrir son dossier. Il a produit deux rapports médicaux, précisant que sa capacité de travail, initialement fixée à 100%, se révèle désormais inadéquate et est limitée à 60% dans toutes activités en raison d’un trouble léger à moyen de la fonction cérébrale, sans que sa capacité de gain puisse être augmentée par des mesures professionnelles. Dans un projet de décision du 07.09.2015, l’office Al a fixé le revenu sans invalidité de l’assuré à 54’390 fr. et le revenu d’invalide à 40’646 fr.; leur comparaison aboutissait à un taux d’invalidité de 25%. L’assuré s’est opposé à ce projet, faisant valoir qu’il subissait une invalidité de 45% découlant de la comparaison d’un revenu sans invalidité de 64’050 fr. avec un revenu d’invalide de 35’100 fr. Par décision du 3 novembre 2016, l’office AI a nié le droit à la rente.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a constaté que l’assuré n’avait pas travaillé à plein temps durant les années 2009 et 2010, au cours desquelles il avait réalisé un salaire de 51’800 fr., respectivement 51’000 fr. Il avait réduit son taux d’occupation afin de pouvoir se consacrer à son sport (le motocyclisme) qu’il pratiquait en compétition au niveau international. Après avoir rappelé que pour les travailleurs à temps partiel, le revenu sans invalidité correspondait alors au revenu effectivement obtenu et non à celui qui aurait été réalisé dans une activité à temps complet, les premiers juges ont considéré qu’aucune circonstance particulière ne justifiait que l’on s’écarte, en l’espèce, de cette règle dans la mesure où il apparaissait très vraisemblable que l’assuré aurait continué de travailler à un taux réduit pendant certaines périodes de l’année pour pouvoir pratiquer son sport favori. Dans ce contexte, ils ont aussi constaté que les recettes de sponsoring dont l’assuré avait disposé avaient été entièrement affectées au paiement des frais de la saison de compétition et qu’elles n’y suffisaient pas puisqu’il avait dû financer les frais en partie avec ses propres revenus. Comme l’assuré n’avait jamais pu bénéficier d’un quelconque salaire et que le sponsoring ne lui avait procuré aucun gain financier propre, il n’y avait pas lieu d’ajouter un montant à titre de revenu accessoire d’une activité indépendante. Aucun revenu lié au sponsoring ne figurait d’ailleurs sur son compte individuel AVS. Après indexation, le revenu sans invalidité s’élevait ainsi à 54’390 fr.

Par jugement du 25.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). Le revenu sans invalidité est celui que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas devenu invalide. Selon la jurisprudence, pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l’assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s’il n’était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 p. 30; 135 V 297 consid. 5.1 p. 300; 134 V 322 consid. 4.1 p. 325). Le revenu sans invalidité s’évalue, en règle générale, d’après le dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à la santé, en tenant compte de l’évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d’influencer ce droit survenues jusqu’au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1 p. 223).

Si le revenu sans invalidité qui doit être pris en considération est celui que l’assuré pourrait obtenir sans l’atteinte à la santé, c’est-à-dire d’abord celui établi sur la base des salaires qu’il percevait de l’entreprise B.___ SA à l’époque où il avait été victime de l’accident, le 11.09.2010, il convient toutefois de tenir compte de l’évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d’influencer ce droit survenues jusqu’au moment où la décision est rendue. En l’espèce, le moment de la naissance du droit à la rente se situe en novembre 2015, soit une année après que l’assuré eut présenté sans interruption une incapacité de travail de 40% (cf. art. 28 al. 1 let. b LAI).

Il ressort des rapports de l’office AI (que les premiers juges n’ont pas prises en considération, mais dont il sied de tenir compte d’office en vertu de l’art 105 al. 2 LTF) que l’assuré avait travaillé à plein temps jusqu’en 2007, qu’il avait réduit son horaire de travail depuis 2008 en raison de la compétition motocycliste, et qu’il percevait en 2010 le 78,5% du salaire dont il aurait bénéficié s’il avait poursuivi son activité lucrative à temps complet. L’assuré avait certes aussi allégué avoir reçu des offres pour le championnat mondial en 2011, de sorte qu’il aurait continué la compétition jusqu’à cette année.

Les renseignements pris par l’office AI auprès de la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) ont cependant mis en évidence que la carrière d’un sportif de haut niveau dans ce domaine est relativement courte et que l’assuré « n’aurait raisonnablement pas pu continuer pendant encore ‘longtemps’ la compétition au niveau mondial ou européen ». On doit donc retenir que l’assuré aurait dû se retirer de la compétition dans les années suivant 2011 en raison de son âge.

Or, comme avant de s’adonner à la compétition, l’assuré avait travaillé à plein temps et qu’il a repris une telle activité après avoir dû arrêter le sport, il apparaît selon le degré de vraisemblance prépondérante que sans l’atteinte à la santé il aurait exercé une activité lucrative à plein temps à tout le moins en 2015.

En définitive, le revenu sans invalidité correspond à ce que l’assuré aurait obtenu en 2015 pour une activité à plein temps auprès de B.___ SA, à savoir 68’900 fr., ainsi que l’office AI l’a retenu dans un rapport en se fondant sur les réponses que l’ancien employeur avait données à l’assureur-accidents.

 

Le TF admet le recours de l’assuré et annule le jugement cantonal et la décision de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_869/2017 consultable ici

 

 

8C_124/2018 (f) du 25.05.2018 – Comparaison des revenus – Revenu sans invalidité – 16 LPGA / Prise en compte du revenu effectif vs fixation selon l’ESS

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_124/2018 (f) du 25.05.2018

 

Consultable ici

 

Comparaison des revenus – Revenu sans invalidité / 16 LPGA

Prise en compte du revenu effectif vs fixation selon l’ESS

 

Assuré, né en 1958, travaillant en tant que carreleur à la tâche pour le compte de la société B.__ AG entre les 01.06.2012 et 31.12.2013, a été victime de deux accidents : le 23.07.2012, il s’est sectionné une partie de l’index droit en réparant le moteur de sa voiture ; le 12.09.2013, il a subi diverses lésions à l’épaule gauche en jetant des débris de construction dans un container.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a alloué à l’assuré une rente d’invalidité fondée sur un taux d’incapacité de gain de 24% à compter du 01.03.2016. Entre autres éléments de calcul, il a pris en compte un revenu sans invalidité de 74’962 fr. tiré des données statistiques de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS), l’assuré ayant été licencié pour des motifs étrangers à son invalidité.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 21.12.2017, admission du recours par le tribunal cantonal, fixant le revenu sans invalidité à 108’215 fr. 14 (108’000 fr. indexés à l’année 2016) selon les renseignements fournis par l’employeur.

 

TF

En règle générale, le revenu hypothétique de la personne valide se détermine en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce qu’elle aurait effectivement pu réaliser au moment déterminant si elle était en bonne santé. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible; c’est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par la personne assurée avant l’atteinte à la santé, en tenant compte de l’évolution des salaires jusqu’au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1 p. 224 et la référence).

 

Lorsque le salaire réalisé en dernier lieu par la personne assurée est supérieur à la moyenne (notamment en cas de rémunération à la tâche, comme en l’occurrence, cf. arrêts U 400/00 du 18 janvier 2001 consid. 2b; I 456/00 du 13 décembre 2000 consid. 3b et les références), il ne peut être pris en considération au titre de revenu sans invalidité que s’il est établi au degré de la vraisemblance prépondérante que la personne assurée aurait continué à le percevoir. Autrement dit, n’est pas déterminant pour la fixation du revenu hypothétique de la personne valide le salaire que la personne assurée réaliserait actuellement auprès de son ancien employeur mais bien plutôt celui qu’elle réaliserait si elle n’était pas devenue invalide (arrêt 9C_5/2009 du 16 juillet 2009 consid. 2.3, in SVR 2009 IV n° 58 p. 181; voir également arrêts 8C_592/2017 du 16 mars 2018 consid. 2.2; 9C_394/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.4; I 95/03 du 28 janvier 2004 consid. 4.2.2; MICHEL VALTERIO, Droit de l’assurance-vieillesse et survivants [AVS] et de l’assurance-invalidité [AI], 2011, n° 2082 p. 552; MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3e éd. 2014, nos 47 ss ad art. 28a).

La jurisprudence admet que le revenu sans invalidité puisse être déterminé en recourant à des données statistiques (cf., notamment, arrêts 9C_57/2017 du 21 avril 2017 consid. 5.2; 9C_376/2017 du 30 octobre 2017 consid. 5.3, 9C_212/2015 du 9 juin 2015 consid. 5.4 et les références).

En l’espèce, dans l’optique de la détermination du revenu sans invalidité la plus concrète possible, le tribunal cantonal a écarté le salaire statistique retenu par l’assureur-accidents au seul motif qu’il ne tenait pas suffisamment compte de la rémunération liée au rendement et s’est fondé sur les informations communiquées par l’ancien employeur. Il s’est attaché à déduire du contrat de travail signé le 19.05.2012 et d’autres éléments contextuels la durée indéterminée des relations de travail, relevant en outre que les critères de la formation et la langue n’avaient pas été un obstacle à l’engagement de l’assuré. Ce faisant, il n’a pas examiné le point essentiel de savoir si, dans le cas particulier, l’assuré en bonne santé aurait continué à percevoir son ancien salaire jusqu’au moment déterminant ou, en d’autres termes, si le contrat de travail se serait prolongé au-delà du 31.12.2013. Or l’assurance-accidents a relevé que les motifs ayant conduit au licenciement de l’assuré étaient de nature économique et non liés à l’invalidité, ce qui pourrait justifier de s’écarter des renseignements transmis par l’ancien employeur et de se référer à des données statistiques pour déterminer le revenu sans invalidité (cf. p. ex. arrêt 9C_212/2015 du 9 juin 2015 consid. 5.4 cité par l’assureur-accidents). A ce propos, des informations contradictoires ressortent du dossier. Ainsi, la lettre de licenciement pour la fin de l’année 2013 mentionne des raisons économiques alors que l’employeur atteste une très bonne situation économique 2014-2015 dans ses déclarations du 13.11.2015; la durée du contrat de travail (qui contient en soi des contradictions à cet égard) initialement décrite par l’employeur dans ses déclarations du 23.08.2012 comme étant déterminée (juin-août 2012) s’oppose au fait que des salaires ont été versés durant l’année 2013. Il n’est dès lors pas possible de déterminer si, sans atteinte à la santé, les relations contractuelles se seraient prolongées.

Dans ces circonstances, il convient d’annuler le jugement cantonal et de renvoyer la cause aux premiers juges afin qu’ils instruisent ce point, notamment par l’audition de l’employeur, et rendent un nouveau jugement.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, annule le jugement cantonal et renvoyant la cause à l’autorité judiciaire cantonale pour nouveau jugement.

 

 

Arrêt 8C_124/2018 consultable ici

 

 

8C_849/2017 (f) du 05.06.2018 – Revenu d’invalide selon l’ESS / Âge avancé / Activité professionnelle monomanuelle / Revenu sans invalidité – Vraisemblance de la poursuite de l’activité indépendante sans atteinte à la santé

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_849/2017 (f) du 05.06.2018

 

Consultable ici

 

Revenu d’invalide selon l’ESS pour une gérante d’un restaurant / 16 LPGA

Âge avancé d’un assuré en LAA – Activité professionnelle monomanuelle avec baisse de rendement de 20% – Abattement de 15%

Revenu sans invalidité – Vraisemblance de la poursuite de l’activité indépendante sans atteinte à la santé

 

Assurée, née en 1955, gérante d’un restaurant, subissant, le 20.01.2012, une fracture multifragmentaire de l’humérus proximal droit lors d’un séjour à l’étranger, qui a nécessité notamment l’implantation d’une prothèse céphalique en septembre 2012, puis anatomique en janvier 2014.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a mis fin aux prestations de l’assurance-accidents avec effet au 01.12.2015 et fixant l’indemnité pour atteinte à l’intégrité à 25%.

Parallèlement, l’office AI a, en se fondant sur un taux d’invalidité de 74%, octroyé une rente entière de l’assurance-invalidité dès le 01.05.2013.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 27.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal, retenant, en substance, que l’assurée pouvait exercer une activité professionnelle monomanuelle adaptée à ses limitations fonctionnelles à plein temps, avec une diminution de rendement de 20%, et obtenir par conséquent un revenu de 35’935 fr., après prise en compte d’un taux d’abattement de 15%. Comparé avec le revenu sans invalidité de 37’895 fr., fondé sur la moyenne des revenus réalisés par l’assurée durant les années 2002 à 2009 après renchérissements, le degré d’invalidité s’élevait à 5%, soit un taux n’ouvrant pas droit à une rente de l’assurance-accidents.

 

TF

Âge avancé d’un assuré en LAA

L’âge avancé d’un assuré comme facteur prépondérant à son empêchement de maintenir sa capacité de gain n’est pas pris en considération de la même manière en assurance-invalidité qu’en assurance-accidents, dans laquelle l’art. 28 al. 4 OLAA, en lien avec l’art. 18 al. 2 LAA, commande de faire abstraction du facteur de l’âge pour les deux termes de la comparaison des revenus (cf. ATF 134 V 392 consid. 6.2 p. 398; 122 V 418 consid. 3b p. 422).

L’évaluation de l’invalidité par l’assurance-invalidité, menée en fonction de la jurisprudence applicable dans ce domaine pour les assurés qui se trouvent proches de l’âge donnant droit à la rente de vieillesse (ATF 143 V 431 consid. 4.5 p. 433; 138 V 457 consid. 3.1 p. 460), n’avait dès lors pas de force contraignante pour l’assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3 p. 368). Au contraire, l’art. 28 al. 4 OLAA vise à empêcher l’octroi de rentes d’invalidité de l’assurance-accidents qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse (arrêt 8C_37/2017 du 15 septembre 2017 consid. 6.1 et les références).

Il n’y avait dès lors pas lieu de procéder à l’analyse globale applicable en matière d’assurance-invalidité.

 

Abattement

Le point de savoir si, dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire, le critère de l’âge constitue un critère d’abattement ou si, dans ce domaine, l’influence de l’âge sur la capacité de gain doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l’art. 28 al. 4 OLAA n’a pas encore été tranché par le Tribunal fédéral (voir, parmi d’autres, arrêts 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5 et 8C_754/2015 du 26 février 2016 consid. 4.3, in SVR 2016 UV n° 39 p. 131). Le Tribunal fédéral a, une nouvelle fois, laissé cette question indécise.

Selon les conclusions médicales, l’assurée présente une capacité de travail entière dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, avec une diminution de rendement de 20%. Aussi, parmi la palette d’activités simples et peu contraignantes existant sur un marché équilibré du travail (à ce sujet, voir arrêt 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2 et la référence), on ne saurait la suivre lorsqu’elle affirme que ses limitations fonctionnelles rendent illusoires ou irréalistes sa perspective de retrouver un emploi adapté de type mono-manuel.

Selon le Tribunal fédéral, la juridiction cantonale n’a pas excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant une déduction globale de 15%. Il n’y a dès lors pas lieu de s’écarter du revenu avec invalidité fixé par les premiers juges.

 

Revenu sans invalidité – Vraisemblance de la poursuite de l’activité indépendante sans atteinte à la santé

L’assurée se plaint que le bénéfice provenant de la liquidation de son activité indépendante (période fiscale 2013) n’a pas été pris en considération lors de la fixation de son revenu sans invalidité.

Néanmoins, l’assurée n’expose aucune circonstance exceptionnelle qui permettrait de s’écarter du salaire qu’elle réalisait en dernier lieu avant son accident du 20.01.2012 (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 p. 30; 135 V 297 consid. 5.1 p. 300; 134 V 322 consid. 4.1 p. 325). En particulier, elle ne prétend nullement qu’elle aurait déjà concrètement envisagé ou débuté la liquidation de son activité indépendante avant son accident (voir arrêts 8C_145/2012 du 9 novembre 2012 consid. 3.1, 8C_664/2007 du 14 avril 2008 consid. 6.1, U 222/97 du 23 juin 1999 consid. 5c, résumé in REAS 2003 p. 66, et les références).

Il y a dès lors lieu de retenir que l’assurée aurait vraisemblablement continué, à moyen terme tout au moins, à exploiter son restaurant sans atteinte à la santé.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_849/2017 consultable ici

 

 

8C_779/2017 (f) du 25.04.2018 – Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage / Revenu sans invalidité calculé sur la base de l’ESS (vs selon la CCT par l’assurance-accidents) – Possibilités théoriques de développement professionnel – 16 LPGA – 26 al. 2 RAI / Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_779/2017 (f) du 25.04.2018

 

Consultable ici

 

Accident chez un jeune assuré en cours d’apprentissage

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel / 16 LPGA – 26 al. 2 RAI

Revenu sans invalidité calculé sur la base de l’ESS (vs selon la CCT par l’assurance-accidents)

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

 

Assuré, né en 1990, a entrepris un apprentissage de maçon au mois de juillet 2006. Le 18.04.2008, au cours de sa deuxième année d’apprentissage, il a été victime d’un grave accident de la circulation à la suite duquel il a subi notamment un traumatisme cranio-cérébral et de nombreuses fractures. L’assuré a repris les cours théoriques de deuxième année d’apprentissage à partir du mois de septembre 2008, mais la reprise pratique au mois de mars 2009 a été perturbée en raison des limitations de l’intéressé. L’office AI a mis en œuvre un stage préparatoire à l’entrée en apprentissage d’agent d’exploitation au cours du printemps 2010. L’assuré a entrepris cette formation au mois de septembre suivant et a obtenu un CFC dans cette profession au mois de juin 2013.

Le Département de B.__ a engagé l’assuré à partir du 01.01.2015 en qualité de concierge auprès d’une école à un taux d’activité de 50%. Le salaire mensuel était de 2’267 fr. 40. Par ailleurs l’intéressé a été engagé à compter de la même date par la Ville de D.__ en qualité de concierge de la salle de sport de la même école à un taux d’activité de 18% environ, correspondant à 400 heures par année scolaire. Cette activité était rémunérée à raison de 32 fr. 10 par heure, treizième salaire, vacances et jours fériés compris. Pour cette activité un acompte mensuel de 1’000 fr. net était versé du mois de septembre au mois de mai à l’assuré, lequel devait établir au mois de juin le décompte effectif des heures de travail accomplies et percevoir le solde de la rémunération.

L’office AI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 01.12.2009 au 31.03.2015 (mais suspendue pendant la période durant laquelle l’intéressé a bénéficié d’indemnités journalières en raison de la mise en œuvre de mesures de réadaptation professionnelle). Dès le 01.04.2015, un quart de rente fondé sur un taux d’invalidité de 45% a été allouée.

Le revenu sans invalidité (76’766 fr. 95) a été calculé sur la base du salaire réalisable dans une activité de maçon selon l’ESS, motif pris que l’assuré aurait exercé cette profession s’il n’avait pas été victime de l’accident survenu au cours de sa deuxième année d’apprentissage. Le revenu d’invalide a été fixé à 42’316 fr. 20 (29’476 fr. 20 [part versée par l’Etat B.__: 2’267 fr. 40 x 13] + 12’840 fr. [part versée par la Ville de D.__ : 400h x 32 fr. 10 par heure]).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.10.2017, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Revenu sans invalidité – Possibilités théoriques de développement professionnel

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). L’art. 26 RAI est un cas particulier d’application de la méthode générale de la comparaison des revenus et permet de déterminer le revenu sans invalidité des assurés qui n’ont pas de formation professionnelle à cause de leur invalidité. Aux termes de l’al. 2 de cette norme d’exécution, lorsque l’assuré a été empêché par son invalidité d’achever sa formation professionnelle, le revenu qu’il pourrait obtenir s’il n’était pas invalide est le revenu moyen d’un travailleur de la profession à laquelle il se préparait.

Selon la jurisprudence, le revenu que pourrait réaliser l’assuré sans invalidité est en principe établi sans prendre en considération les possibilités théoriques de développement professionnel (lié en particulier à un complément de formation) ou d’avancement, à moins que des indices concrets rendent très vraisemblable qu’elles se seraient réalisées. Cela pourra être le cas lorsque l’employeur a laissé entrevoir une telle perspective d’avancement ou a donné des assurances dans ce sens. En revanche, de simples déclarations d’intention de l’assuré ne suffisent pas; l’intention de progresser sur le plan professionnel doit s’être manifestée par des étapes concrètes, telles que la fréquentation d’un cours, le début d’études ou la passation d’examens (arrêts 9C_221/2014 du 28 août 2014 consid. 3.2; 8C_380/2012 du 2 mai 2013 consid. 2; 8C_839/2010 du 22 décembre 2010 consid. 2.2.2.2). Ces principes s’appliquent aussi dans le cas de jeunes assurés (SVR 2010 UV n° 13 p. 52, 8C_550+677/2009, consid. 4.2). Le point de savoir si le salaire réel aurait augmenté grâce à un développement des capacités professionnelles individuelles, notamment un changement de profession, doit être établi au degré de la vraisemblance prépondérante (RAMA 2006 n° U 568 p. 67, U 87/05, consid. 2; 1993 n° U 168 p. 101, U 110/92, consid. 3b; arrêt 8C_380/2012, déjà cité, consid. 2).

L’assuré fait valoir que sans l’atteinte à la santé il aurait poursuivi sa formation après l’obtention de son CFC. Il avait en effet la ferme intention d’entreprendre une formation complémentaire de contremaître ou tout au moins de chef d’équipe. Les allégations de l’assuré ne sont toutefois pas étayées par des éléments concrets et pertinents établissant qu’il aurait poursuivi sa formation au-delà du CFC de maçon.

Certes il indique avoir fait part à plusieurs personnes de son intention de progresser sur le plan professionnel et d’avoir pris des renseignements à ce sujet. Cependant ces éléments permettent uniquement de déduire qu’il a manifesté son intérêt pour la poursuite de sa formation professionnelle. Il s’agit ainsi de simples déclarations d’intention, insuffisantes à elles seules pour que l’on puisse admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que leur auteur entendait progresser sur le plan professionnel et devenir contremaître ou chef d’équipe après avoir mené à chef sa formation de maçon. Quant au fait qu’il avait les capacités intellectuelles requises pour atteindre ses buts, il ne présage en rien quant à l’évolution effective de sa carrière professionnelle. Certes, on ne saurait exiger d’un apprenti en cours de formation initiale qu’il suive des cours de contremaître ou de technicien. Il n’en demeure pas moins qu’en dehors de ses simples déclarations d’intention l’intéressé ne se prévaut d’aucun indice concret rendant très vraisemblable que des possibilités théoriques de développement professionnel se seraient réalisées. La cour cantonale n’a dès lors pas violé le droit fédéral en confirmant le point de vue de l’office AI selon lequel le salaire réalisable dans l’activité de maçon est déterminant pour le calcul du revenu sans invalidité.

Les salaires fixés par la convention collective de travail de la construction (73’786 fr.) tiennent mieux compte des différentes catégories d’activités et, partant, sont mieux à même de respecter le principe selon lequel le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible (cf. arrêts 8C_643/2016 du 25 avril 2017 consid. 4.2; 9C_363/2016 du 12 décembre 2016 consid. 5.3.1; 8C_515/2013 du 14 avril 2014 consid. 3.2). Cependant, d’un montant inférieur au salaire statistique, ils ne sont d’aucune aide pour la thèse de l’assuré.

 

Existence d’un salaire social dans le calcul du revenu d’invalide

Selon la jurisprudence des éléments de salaire dont il est prouvé que l’assuré ne peut fournir la contrepartie, parce que sa capacité de travail limitée ne le lui permet pas, ne font pas partie du revenu déterminant pour l’évaluation de l’invalidité. La preuve de l’existence d’un salaire dit « social » est toutefois soumise à des exigences sévères, car on doit partir du principe que les salaires payés équivalent normalement à une prestation de travail correspondante (ATF 141 V 351 consid. 4.2 p. 353; 117 V 8 consid. 2c/aa p. 18). Des liens de parenté ou l’ancienneté des rapports de travail peuvent constituer des indices de la possibilité d’un salaire social (arrêt 9C_371/2013 du 22 août 2013 consid. 4.1 et la référence).

En l’espèce, il n’existe toutefois aucun élément concret permettant de penser que l’assuré n’est pas en mesure de fournir la contrepartie des salaires perçus. En particulier le fait qu’il « donne entièrement satisfaction grâce aux conditions de travail adaptées » (cf. rapport final sur les mesures professionnelles de l’office AI) ne permet pas d’inférer que les rémunérations perçues par l’assuré n’équivalent pas aux prestations de travail correspondantes, bien au contraire. L’existence d’un salaire dit « social » n’apparaît dès lors pas établie au degré de la vraisemblance prépondérante.

 

Revenu d’invalide – Obligation de diminuer le dommage

Le contrat de travail prévoit un taux d’activité de 18% environ, ce qui correspond à 400 heures par année scolaire. Avec un salaire horaire convenu de 32 fr. 10, l’assuré est ainsi en mesure de réaliser un gain annuel de 12’840 fr. par année. Il lui incombait dès lors, en vertu de son obligation de diminuer le dommage, d’accomplir le nombre d’heures de travail convenues et, le cas échéant, d’en établir le décompte effectif à l’attention de son employeur, conformément au contrat de travail.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_779/2017 consultable ici

 

 

Pour le volet AA : arrêt du TF 8C_778/2017 du 25.04.2018