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8C_284/2024 (f) du 15.10.2024 – Rappel du principe inquisitoire en cas de nouvelle demande AI / Aggravation plausible de l’état de santé depuis la dernière décision entrée en force, sur le plan somatique

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_284/2024 (f) du 15.10.2024

 

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Rappel du principe inquisitoire en cas de nouvelle demande AI / 43 LPGA – 87 al. 2 et 3 RAI

Aggravation plausible de l’état de santé depuis la dernière décision entrée en force, sur le plan somatique / 87 al. 2 et 3 RAI

Requête d’assistance judiciaire rejetée – Recours d’emblée dénué de chances de succès / 64 LTF

 

L’assuré, né en 1979, a déposé plusieurs demandes de prestations auprès de l’assurance-invalidité.

Première demande le 19.01.2016 en raison de douleurs, limitations dans les mouvements et diminution de la sensibilité de la main droite. Par décision du 06.10.2016, l’office AI a rejeté la demande de prestations, l’assuré ne présentant aucune incapacité de travail.

Nouvelle demande le 23.10.2016 basée sur le rapport médical du médecin traitant faisant état de douleurs persistantes aux doigts 2, 3 et 4 de la main droite et d’un syndrome lombo-radiculaire L3 droit depuis 2013. Une expertise pluridisciplinaire (médecine interne générale, rhumatologie, angiologie et psychiatrie) a été mise en œuvre. La nouvelle demande a été rejetée par décision du 25.07.2019.

En février 2020, l’assuré s’est annoncé pour une détection précoce, suivie du dépôt d’une nouvelle demande. Une expertise psychiatrique a été réalisée. Par décision du 30.09.2021, l’office AI a nié le droit de l’assuré à des prestations, faute d’aggravation de l’état de santé.

Le 04.10.2022, l’assuré a déposé une nouvelle demande, notamment pour des douleurs lombaires. L’office AI a refusé d’entrer en matière le 11.05.2023, considérant que la péjoration de l’état de santé n’était que temporaire, d’octobre 2022 à janvier 2023.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 10.04.2024, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 6.1
Dans un premier grief, l’assuré reproche à la juridiction précédente d’avoir établi les faits de manière arbitraire en ce qui concerne son état de santé au moment du dépôt de la nouvelle demande. Il invoque à cet égard avoir produit tous les certificats médicaux en sa possession, sans avoir caché que son état de santé n’était pas stabilisé. Il avait sollicité au demeurant la mise en œuvre d’une expertise et « [était] resté dans l’attente de la décision à venir de l’office AI ». Aussi, les juges cantonaux ne pouvaient écarter les pièces médicales déposées à l’appui de son recours.

Consid. 6.2
Selon la jurisprudence relative à une nouvelle demande de prestations de l’assurance-invalidité, le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d’office par l’autorité (art. 43 al. 1 LPGA), ne s’applique pas à cette procédure dans la mesure où, comme en l’espèce, la personne assurée a eu l’occasion de présenter des pièces médicales pour rendre plausible une modification de la situation. Dans ce cas, la juridiction de première instance examine le bien-fondé de la décision de non-entrée en matière de l’office AI en fonction uniquement des documents produits jusqu’à la date de celle-ci et n’a pas à prendre en compte les rapports médicaux déposés ultérieurement ni à ordonner une expertise complémentaire (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5; arrêt 9C_555/2023 du 15 avril 2024 consid. 4.2). Il s’ensuit que la juridiction cantonale n’avait pas à tenir compte, dans le cadre de son examen, des pièces produites postérieurement à la décision du 11 mai 2023.

Consid. 7.1
L’assuré reproche ensuite aux juges cantonaux d’avoir procédé à une application trop restrictive de l’art. 87 al. 3 RAI en examinant sa demande du 4 octobre 2022 à l’aune de la décision du 30 septembre 2021. Selon lui, c’est au regard de sa première demande du 19 janvier 2016, soit en tenant compte d’un laps de temps de plus de six ans, qu’il y avait lieu d’apprécier la modification de son invalidité.

Consid. 7.2
Contrairement à ce que prétend l’assuré, les juges cantonaux ont correctement appliqué l’art. 87 al. 2 et 3 RAI en examinant si les pièces déposées suffisaient à rendre plausible une aggravation de l’état de santé depuis la dernière décision entrée en force. Ils ont toutefois constaté qu’aucun élément médical objectif nouveau n’était à prendre en considération lors de la décision du 30.09.2021, l’état de santé de l’assuré ne s’étant pas aggravé depuis la décision du 25.07.2019. Partant, ils ont pris pour point de départ la situation telle qu’elle se présentait au moment de l’expertise pluridisciplinaire, laquelle a été mise en œuvre dans les suites de la deuxième demande de prestations qui évoquait un syndrome lombo-radiculaire. En effet, les douleurs lombaires dont se prévalait l’assuré à l’appui de sa nouvelle demande avaient été prises en compte par les médecins experts en 2019 et n’avaient pas fait l’objet d’un examen spécifique par l’office AI en 2021. L’assuré ne conteste pas les faits constatés par les juges cantonaux mais se limite à rappeler les circonstances qui ont entouré le dépôt de sa troisième demande, ce qui ne saurait suffire en l’occurrence. Il ne pouvait se limiter à contester l’approche des juges cantonaux sans exposer en quoi le fait de procéder à l’examen de la situation à l’aune de l’expertise pluridisciplinaire constituerait, en l’état, une violation de l’art. 87 al. 2 et 3 RAI. Son grief est mal fondé.

 

Consid. 8.1 [résumé]
L’assuré soutient que les rapports médicaux qu’il a fournis, en particulier celui du 11.01.2023 d’un spécialiste en chirurgie orthopédique, suffisent à démontrer une péjoration de son état de santé justifiant l’entrée en matière sur sa nouvelle demande. Ce rapport mentionne une « arthrose avancée symptomatique des lombaires » nécessitant des infiltrations et envisage une intervention chirurgicale, ce qui, selon l’assuré, attesterait d’une modification à long terme de son état de santé.

Consid. 8.2 [résumé]
Les arguments de l’assuré ne sont pas suffisants pour remettre en question l’appréciation des juges cantonaux. Bien que les rapports médicaux attestent d’une aggravation de l’état de santé en octobre 2022, celle-ci n’a été que temporaire, durant au plus d’octobre 2022 à janvier 2023. Les infiltrations ont permis une amélioration significative des symptômes. Les médecins n’ont pas suffisamment motivé l’incapacité de travail attestée ni décrit précisément les limitations fonctionnelles induites par les diagnostics. Ainsi, les éléments invoqués par l’assuré ne démontrent pas que l’appréciation des juges cantonaux serait erronée.

Consid. 8.3
Pour le surplus, en tant que l’assuré invoque le fait qu’il ne serait plus en mesure d’utiliser sa main droite, de travailler dans son activité habituelle de polisseur ni de conduire, on relèvera, à l’instar des juges cantonaux, que le médecin du SMR a indiqué que la situation au niveau de la main droite n’a pas évolué depuis la dernière décision entrée en force, comme le précisait le médecin traitant.

Consid. 10
L’assuré, qui succombe, a demandé à bénéficier de l’assistance judiciaire gratuite. Une partie ne remplit les conditions de l’assistance judiciaire que si elle ne dispose de ressources suffisantes et si ses conclusions ne paraissent pas vouées à l’échec (art. 64 al. 1 LTF; ATF 140 V 521 consid. 9.1). Au regard des motifs avancés dans le mémoire de recours, celui-ci apparaissait d’emblée dénué de chances de succès et la requête d’assistance judiciaire doit dès lors être rejetée. L’assuré doit par conséquent payer les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 LTF) et ne peut pas prétendre à la prise en charge des honoraires de son avocat.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_284/2024 consultable ici

 

Le Conseil fédéral élabore un contre-projet indirect à l’initiative pour l’inclusion

Le Conseil fédéral élabore un contre-projet indirect à l’initiative pour l’inclusion

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 23.12.2024 consultable ici

 

Le Conseil fédéral recommande de rejeter l’initiative populaire fédérale « Pour l’égalité des personnes handicapées (initiative pour l’inclusion) ». Il a pris cette décision lors de sa séance du 20 décembre 2024. Il entend soumettre au Parlement un contre-projet indirect plus concret et plus rapide à mettre en œuvre, qui tiendra mieux compte des demandes de l’initiative. Il a chargé le Département fédéral de l’intérieur (DFI) d’élaborer pour fin mai 2025 un projet pour consultation. En outre, il a chargé le DFI de présenter, avant l’automne 2025, les points à traiter dans une éventuelle prochaine révision de l’assurance-invalidité (AI).

L’initiative populaire fédérale « Pour l’égalité des personnes handicapées (initiative pour l’inclusion) » a été déposée le 5 septembre 2024. Elle entend promouvoir l’égalité de droit et de fait entre les personnes handicapées et les personnes non handicapées dans tous les domaines de la vie. Les personnes handicapées ont droit, dans le cadre de la proportionnalité, aux mesures de soutien et d’adaptation nécessaires. En particulier, elles doivent pouvoir choisir librement leur forme de logement et l’endroit où elles habitent.

L’initiative ne constitue pas un progrès par rapport à la Constitution actuellement en vigueur

Sur le fond, le Conseil fédéral soutient l’objet de l’initiative. Cependant, elle n’apporte à ses yeux aucune amélioration directe pour les personnes concernées. Elle adresse certes à la Confédération et aux cantons des prescriptions plus concrètes que celles de la Constitution actuellement en vigueur. Ces mêmes prescriptions pourraient néanmoins s’inscrire dans le cadre juridique existant. L’actuelle Constitution confère en effet déjà au législateur le mandat de lever les obstacles que rencontrent les personnes handicapées. La Confédération ne dispose elle-même que d’une compétence très limitée pour prescrire à l’échelle nationale des directives relatives à l’égalité. Ce sont les cantons qui sont en premier lieu responsables de la mise en œuvre concrète des dispositions de la Constitution, telles que les mesures de promotion du logement autonome et de participation à la vie sociale. Afin de répondre plus rapidement et plus concrètement aux demandes de l’initiative, le Conseil fédéral soumet au Parlement un contre-projet indirect. Il comporte deux volets : une loi-cadre sur l’inclusion ciblée sur le domaine du logement et une révision partielle de l’AI prévoyant des modifications dans les domaines des moyens auxiliaires et de la contribution d’assistance.

Loi-cadre sur l’inclusion

Le premier volet du contre-projet indirect consiste en une nouvelle loi-cadre nationale sur l’inclusion des personnes handicapées. Il s’agit de préparer un projet imposant à la Confédération et aux cantons une orientation commune et des lignes directrices en la matière. Le projet posera les fondements juridiques dans le domaine du logement. Les personnes handicapées au sens de l’art. 112b de la Constitution fédérale doivent pouvoir choisir aussi librement que possible la forme de leur logement et bénéficier de mesures de soutien en adéquation avec leurs besoins personnels. Le projet fixe également les principes disposant que les cantons prévoient une offre diversifiée de mesures de soutien adéquates, favorisent l’accès à une offre de logements aménagés abordables et proposent aux personnes concernées un conseil concernant le choix de leur forme de logement et de vie. En cas de besoin, la loi pourra, sur le moyen terme, être étendue aux autres domaines de la vie.

Mesures entrant dans le cadre de l’AI

Le second volet du contre-projet indirect se compose de mesures dans l’assurance-invalidité visant à améliorer l’accès des personnes handicapées aux moyens auxiliaires modernes de l’AI (comme dans le cas des appareils auditifs et des prothèses). Le Conseil fédéral entend mettre en œuvre les mesures dans le contre-projet qu’il a proposé dans un rapport en réponse au postulat 19.4380 fin juin 2024. Ces mesures visent à élargir la palette des moyens auxiliaires de technologie moderne proposés et ainsi à soutenir les assurés dans l’acquisition d’une plus grande autonomie.

En outre, il est prévu d’étendre le champ d’application de la contribution d’assistance de l’AI. La contribution d’assistance permet au bénéficiaire d’une allocation pour impotent qui nécessite une aide régulière et souhaite vivre à domicile d’engager une personne qui lui fournira l’aide dont il a besoin. Étendre la contribution d’assistance aux personnes dont la capacité d’exercice des droits civils est restreinte favorise l’autodétermination et répond à une demande récurrente des organisations d’aide aux personnes handicapées. Le Conseil fédéral a chargé le DFI d’élaborer pour fin mai 2025 un projet qui inclut l’avant-projet de loi sur l’inclusion et la modification de l’AI, en vue d’une consultation.

Dans le cadre d’une future révision de l’AI, il est également prévu de simplifier les différentes prestations qui encouragent l’autonomie des personnes handicapées en matière de logement. Le système actuel est le résultat de l’évolution historique d’un ensemble de prestations favorisant le logement autonome, dont l’allocation pour impotent, la contribution d’assistance et le supplément pour soins intenses. L’objectif de la révision serait de combiner cette variété de prestations complexes en une seule, qui aurait vocation de permettre de mener une vie autonome et, du même fait, de répondre à l’objet de l’initiative pour l’inclusion.

Message relatif à la révision partielle de la loi sur l’égalité pour les handicapés

Le 20 décembre 2024, le Conseil fédéral a également adopté le message sur la révision partielle de la loi sur l’égalité pour les personnes handicapées (LHand). D’un point de vue formel, cette révision ne fait pas partie du contre-projet indirect. Elle anticipe néanmoins sur un certain nombre d’aspects de l’initiative et constitue de fait un ensemble avec le contre-projet indirect. Le projet renforce les droits des personnes handicapées à participer à la vie publique, économique et sociale. Un des objectifs de cette révision est d’apporter des améliorations dans les domaines du travail et des services. De plus, elle vise à ancrer dans la loi la reconnaissance et la promotion de la langue des signes.

 

Remarques concernant une prochaine révision de l’AI
Lors de sa séance du 20 décembre 2024, le Conseil fédéral a chargé le DFI de lancer avant l’automne 2025 les travaux préparatoires à une prochaine révision de l’AI. L’objectif de la révision est d’avoir une vue d’ensemble des projets en cours et de les traiter de manière coordonnée, mais également de prendre en compte la détérioration récente des perspectives financières de l’AI. Au vu des incertitudes qui entourent actuellement la situation de l’AI, la conception de cette révision nécessite davantage d’analyses avant d’en fixer les lignes directrices. Ces analyses porteront sur quatre axes : des mesures en vue d’endiguer la croissance des nouvelles rentes, des mesures d’optimisation des prestations, des mesures relatives aux recettes ainsi qu’au désendettement de l’AI.

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 23.12.2024 consultable ici

Fiche d’information « La contribution d’assistance » du 23.12.2024 disponible ici

Fiche d’information « Remboursement des moyens auxiliaires par l’AI et l’AVS » du 23.12.2024 disponible ici

 

8C_104/2024 (d) du 22.10.2024, destiné à la publication – Prestations de l’assurance-invalidité en cas d’obésité : adaptation de la jurisprudence

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_104/2024 (d) du 22.10.2024, destiné à la publication

 

Arrêt 8C_104/2024 consultable ici

Communiqué de presse du TF du 21.11.2024 consultable ici

 

Prestations de l’assurance-invalidité en cas d’obésité : adaptation de la jurisprudence

 

Le Tribunal fédéral adapte sa jurisprudence concernant le droit aux prestations de l’assurance-invalidité en cas d’obésité. Le fait que l’obésité soit en principe accessible à un traitement ne s’oppose ainsi plus d’emblée au droit à une rente. Il peut toutefois être attendu des personnes concernées qu’elles suivent des traitements qui peuvent raisonnablement être exigés d’elles pour remédier à l’atteinte, tels qu’une thérapie diététique ou un programme d’activité physique.

Conformément à la jurisprudence antérieure, l’obésité (surpoids important) n’entraînait en principe pas d’invalidité donnant droit à une rente. Une obésité ne relevait de l’assurance-invalidité que s’il en résultait une atteinte à la santé physique ou psychique ou si de telles atteintes en étaient la cause. Cette jurisprudence considérait en fin de compte que le surpoids important pouvait être surmonté par un effort de volonté. Cette pratique s’était développée sur la base de celle concernant les addictions. Le Tribunal fédéral a par la suite cependant adapté (suite également à la modification de sa pratique concernant les troubles dépressifs légers ou moyens) sa jurisprudence en la matière (ATF 145 V 215, communiqué de presse du 5 août 2019). Selon dite jurisprudence, il faudrait à l’avenir déterminer dans chaque cas, dans le cadre d’une procédure probatoire structurée, dans quelle mesure l’atteinte influe sur la capacité de travail de la personne assurée.

On ne voit pas de raison de maintenir la jurisprudence spécifique rendue jusqu’ici en matière d’obésité. A cet égard, il convient de tenir compte du fait que l’obésité est une maladie somatique (physique) chronique et complexe. La jurisprudence doit par conséquent être modifiée en ce sens que le fait qu’un traitement de l’obésité soit en principe possible ne s’oppose pas per se à un droit à la rente. Il convient ainsi de se demander pour chaque cas particulier dans quelle mesure la maladie restreint la capacité de travail. Bien évidemment, l’obligation de diminuer le dommage s’applique aussi en cas d’obésité. Un droit à une rente d’invalidité suppose en ce sens que la personne concernée entreprenne les traitements qui peuvent raisonnablement être exigés d’elle, tels que des thérapies diététiques, médicamenteuses ou comportementales ou encore un programme d’activité physique.

Dans le cas concret, le Tribunal fédéral admet partiellement le recours d’une femme présentant une obésité de classe III et un indice de masse corporelle de 58, qui avait demandé sans succès une rente d’invalidité. Il va de soi que la recourante n’a en tous les cas pas la possibilité de retrouver immédiatement une capacité de travail à 100%. L’Office AI devra rendre une nouvelle décision ; à cet effet, des examens médicaux devront également être effectués au regard de l’obligation de réduire le dommage.

 

Arrêt 8C_104/2024 consultable ici

Communiqué de presse du TF du 21.11.2024 consultable ici

 

NB : le même jour que le communiqué de presse du TF, l’office fédéral de la statistique a publié les résultats de l’enquête suisse sur la santé (communiqué de presse de l’OFS du 21.11.2024).

En 2022, 31% des personnes de 15 ans ou plus vivant en Suisse étaient en surpoids et 12% étaient obèses. La proportion de personnes présentant ces affections variait toutefois selon le groupe de population. Les hommes étaient par exemple davantage touchés que les femmes. Les personnes obèses ou en surpoids souffraient plus fréquemment de maladies cardiovasculaires, de diabète ou d’autres maladies chroniques que les personnes de poids normal. L’obésité allait en outre plus souvent de pair avec des symptômes sévères de dépression. Ce sont là quelques-uns des résultats de la nouvelle publication de l’OFS consacrée au surpoids et à l’obésité.

Selon l’OFS, le surpoids et l’obésité peuvent favoriser l’apparition de maladies chroniques, provoquer des troubles physiques et détériorer la qualité de vie des personnes atteintes. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît l’obésité comme une maladie chronique complexe. Critère essentiel en la matière, le poids corporel est notamment influencé par le sexe, l’âge et le niveau de formation.

Les personnes sans formation post-obligatoire souffraient davantage de surpoids et d’obésité en 2022. Le gradient social s’est fait sentir davantage chez les femmes que chez les hommes : en tenant compte de l’âge, les hommes sans formation post-obligatoire avaient respectivement 2,4 et 1,4 fois plus de risques d’être obèses ou en surpoids que les hommes ayant achevé une formation du degré tertiaire. Les femmes sans formation post-obligatoire présentaient un risque 2,9 fois plus élevé d’être obèses et un risque 2,0 fois plus grand d’être en surpoids que les femmes titulaires d’un diplôme du degré tertiaire

Publication de l’OFS « Enquête suisse sur la santé 2022 – Surpoids et obésité » disponible ici

 

9C_236/2024 (f) du 23.10.2024 – Allocation pour impotent pour mineurs / 9 LPGA – 42 LAI – 37 RAI / Actes « se vêtir/se dévêtir » et « faire sa toilette » admis – Besoin de surveillance personnelle permanente nié

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_236/2024 (f) du 23.10.2024

 

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Allocation pour impotent pour mineurs / 9 LPGA – 42 LAI – 37 RAI

Actes « se vêtir/se dévêtir » et « faire sa toilette » admis – Besoin de surveillance personnelle permanente nié

 

Invoquant un besoin d’aide pour accomplir certains actes ordinaires de la vie en raison des différents troubles (trouble déficitaire de l’attention, dyspraxie, dysgraphie) dont il souffrait, l’assuré, né en 2013, a présenté le 11.05.2022 une demande d’allocation pour impotent à l’office AI. Ce dernier a recueilli l’avis de la médecin traitant, spécialiste en pédiatrie. Il a en outre mis en œuvre une enquête à domicile. Il a averti l’assuré que, compte tenu des informations récoltées, il entendait rejeter sa demande. En dépit des critiques de l’intéressé contre ce projet, soutenues par son spécialiste en psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents, l’office AI a entériné le refus d’octroyer des prestations (décision du 24.05.2023).

 

Procédure cantonale (arrêt AI 191/23 – 99/2024 – consultable ici)

Par jugement du 26.03.2024, admission du recours par le tribunal cantonal, réformant la décision entreprise en ce sens que l’assuré avait droit dès le 01.05.2021 à une allocation pour impotent de degré moyen.

 

TF

Consid. 4.2.1
À propos de l’acte « se vêtir/se dévêtir », la juridiction cantonale a relevé que, selon le rapport d’enquête et sous réserve d’injonctions, l’assuré était capable de s’habiller et se déshabiller tout seul, de lacer ses chaussures et de choisir ses habits en fonction de la météorologie, bien qu’il rencontrât des difficultés avec la fermeture de certains types de boutons. Elle a en revanche tiré de la demande du 11.05.2022 et des témoignages produits durant la procédure cantonale de recours que la présence d’un tiers était nécessaire pour éviter que l’habillage ne se prolongeât ou que des habits ne fussent enfilés dans un mauvais sens ou ne fussent choisis de façon inadéquate selon l’activité à entreprendre ou la météorologie. Elle a inféré de ces éléments que l’aide indirecte et régulière d’un tiers était requise, faute de quoi l’acte en question serait accompli imparfaitement et à contre-temps.

Consid. 4.2.2
Pour ce qui concerne l’acte « faire sa toilette », la cour cantonale a inféré du rapport d’enquête que l’assuré se montrait autonome pour se brosser les dents et se laver, sauf pour le réglage de la température de l’eau, même s’il fallait lui rappeler de se savonner. Par contre, elle a déduit des témoignages, rapports médicaux et photographies produits en première instance qu’une incitation permanente était impérative afin que les gestes utiles fussent concrètement réalisés. Elle a aussi retenu que l’intervention de tiers était indispensable pour que certaines zones du corps fussent lavées correctement. Elle a déduit de ces éléments que l’aide indirecte et régulière d’un tiers était requise pour la réalisation de l’acte en question.

Consid. 4.2.3
S’agissant de la surveillance personnelle permanente, le tribunal cantonal a constaté que, selon le rapport d’enquête, la mise en place de mesures de sécurité n’avait pas été jugée utile dès lors que l’assuré respectait les règles de la maison, qu’il pouvait jouer dans une pièce sans surveillance et être laissé un moment seul à domicile avec son petit frère, qu’il ne présentait pas de comportement auto ni hétéro-agressif et qu’il ne jetait ni ne cassait d’objets. Il a en revanche inféré des témoignages et rapports médicaux produits pendant la procédure cantonale de recours que l’assuré ne pouvait pas être laissé sans surveillance dans la mesure où, en raison de sa dyspraxie et de son trouble déficitaire de l’attention, il avait souvent été victime de blessures et en avait causé à son frère. Il a déduit de ces éléments que l’assuré nécessitait une surveillance personnelle permanente qui excédait celle devant être portée à un enfant du même âge.

Consid. 4.3
Compte tenu de ce qui précède, les juges cantonaux ont considéré que l’assuré avait besoin d’aide pour réaliser trois actes ordinaires de la vie et d’une surveillance personnelle permanente, de sorte que son droit à une allocation pour impotent de degré moyen devait être reconnu dès le 01.05.2021.

 

 

Consid. 6.1.1
S’agissant d’abord de l’acte « se vêtir/se dévêtir », on relèvera que la description faite par l’enquêtrice de l’administration de l’aide requise pour réaliser cet acte est foncièrement identique à celle décrite par les membres de la famille de l’assuré. Ce dernier était apte du point de vue fonctionnel à se vêtir et à se dévêtir tout seul. Il avait toutefois besoin de rappels ou d’injonctions pour que l’acte fût accompli correctement, de façon adéquate selon l’activité à entreprendre ou la météorologie et dans un laps de temps raisonnable. Les juges cantonaux ont considéré que ces rappels ou injonctions constituaient une aide indirecte et régulière de la part d’un tiers. Leur appréciation est conforme au droit dès lors que, selon la jurisprudence, un assuré qui doit être cadré quotidiennement dans le choix de ses vêtements en fonction du temps qu’il fait remplit les conditions de l’art. 37 RAI concernant l’aide requise (cf. arrêt 9C_138/2022 du 3 août 2022 consid. 4.2.1).

 

Consid. 6.1.2
En ce qui concerne l’acte « faire sa toilette », on relèvera que la juridiction cantonale s’est non seulement fondée sur les déclarations et les témoignages écrits des parents, mais également sur les déclarations du spécialiste en psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents traitant, qui confirment et complètent celles des parents. Dans la mesure où toutes ces observations concordent quant au besoin d’aide notamment pour régler la température de l’eau et accomplir certains gestes utiles ou quant au besoin d’incitations permanentes pour éviter que l’assuré ne se laisse distraire, on ne saurait valablement reprocher au tribunal cantonal d’avoir fait preuve d’arbitraire en admettant le besoin d’aide indirecte et régulière pour accomplir l’acte en question.

Consid. 6.1.3
S’agissant finalement du besoin de surveillance personnelle permanente, les juges cantonaux se sont contentés de se référer d’une manière générale aux témoignages ou aux rapports du Service des urgences de l’Hôpital de l’enfance (cinq rapports entre 2018 et 2023) pour en déduire un comportement dangereux de l’assuré envers lui-même ou autrui, sans expliquer pourquoi les éléments contraires retenus dans le rapport d’enquête à domicile – correspondant aux premières déclarations des parents de l’assuré – seraient manifestement erronés. On relèvera à cet égard que les blessures ayant amené l’assuré à consulter des services d’urgence (contusion nasale après s’être cogné le nez contre un bob; brûlure au deuxième degré après s’être versé du bouillon sur la jambe; plaie superficielle après s’être encoublé dans un fil de fer barbelé; traumatisme crânien mineur après une chute de trente centimètres) ne présentent pas un degré particulier de gravité, ne se sont heureusement pas produites à une fréquence singulièrement élevée et ne sont pas inhabituelles chez un enfant de moins de dix ans au point de justifier une surveillance constante par un tiers.

Consid. 6.2
Compte tenu de ce qui précède, les conditions d’une impotence de degré moyen au sens de l’art. 37 al. 2 let. b RAI ne sont pas réalisées, mais celles d’une impotence de degré faible au sens de l’art. 37 al. 3 let. a RAI le sont (trois actes ordinaires de la vie, à savoir « manger », « se vêtir/se dévêtir » et « faire sa toilette »). Il convient dès lors de réformer l’arrêt attaqué et la décision administrative litigieuse en ce sens que l’assuré a droit à une allocation pour impotent de degré léger dès le 01.05.2021.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’office AI.

 

Arrêt 9C_236/2024 consultable ici

 

9F_11/2024 (f) du 16.09.2024 – Demande de révision d’un arrêt du Tribunal fédéral / Nouvelle expertise – Appréciation différente insuffisante comme motif de révision

Arrêt du Tribunal fédéral 9F_11/2024 (f) du 16.09.2024

 

Consultable ici

 

Demande de révision d’un arrêt du Tribunal fédéral / 123 LTF – 124 LTF

Nouvelle expertise – Appréciation différente insuffisante comme motif de révision

 

Par décision du 12.04.2018, l’office AI a reconnu le droit de l’assuré à une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 30.06.2017. Saisi d’un recours du prénommé contre cette décision, le tribunal cantonal l’a rejeté. Statuant le 14.05.2019 sur le recours formé par l’assuré contre cet arrêt, le Tribunal fédéral l’a rejeté (arrêt 9C_146/2019).

Le 29.05.2024, l’assuré a présenté une demande de révision de l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_146/2019 du 14.05.2019 fondée sur l’art. 123 al. 2 let. a LTF. Sur le rescindant, il requiert l’annulation de cet arrêt (ainsi que celles de l’arrêt cantonal et de la décision administrative). Sur le rescisoire, il conclut principalement à l’octroi de trois quarts de rente d’invalidité à compter du 01.12.2016 et subsidiairement au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour complément d’instruction et nouvelle décision « tenant compte des faits pertinents découverts après coup invoqués à l’appui de la présente demande de révision ».

 

TF

Consid. 1
Le Tribunal fédéral n’ayant pas le droit de procéder à une reformatio in pejus (cf. art. 107 al. 1 LTF), il n’y a pas lieu de revenir sur le droit du requérant à une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 30.06.2017. Sa conclusion principale tendant à l’octroi de trois quarts de rente d’invalidité à compter du 01.12.2016 doit dès lors être interprétée en ce sens qu’il requiert la reconnaissance du droit à trois quarts de rente à partir du 01.07.2017.

Consid. 2
En vertu de l’art. 123 al. 2 let. a LTF, la révision peut être demandée dans les affaires civiles et les affaires de droit public, si le requérant découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu’il n’avait pas pu invoquer dans la procédure précédente, à l’exclusion des faits ou moyens de preuve postérieurs à l’arrêt.

Selon la jurisprudence, ne peuvent justifier une révision que les faits qui se sont produits jusqu’au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables, mais qui n’étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence; en outre, ces faits doivent être pertinents, c’est-à-dire qu’ils doivent être de nature à modifier l’état de fait qui est à la base de l’arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d’une appréciation juridique correcte (ATF 134 III 669 consid. 2.2 et les références). Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n’avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu’il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu’il faut admettre qu’elle aurait conduit le juge à statuer autrement s’il en avait eu connaissance dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c’est que le moyen de preuve ne serve pas à l’appréciation des faits seulement, mais à l’établissement de ces derniers. Ainsi, il ne suffit pas qu’une nouvelle expertise donne une appréciation différente des faits; il faut bien plutôt des éléments de fait nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs. Pour justifier la révision d’une décision, il ne suffit pas que l’expert tire ultérieurement, des faits connus au moment du jugement principal, d’autres conclusions que le tribunal. Il n’y a pas non plus motif à révision du seul fait que le tribunal paraît avoir mal interprété des faits connus déjà lors de la procédure principale. L’appréciation inexacte doit être, bien plutôt, la conséquence de l’ignorance ou de l’absence de preuve de faits essentiels pour le jugement (cf. ATF 127 V 353 consid. 5b et les références; cf. également arrêt 8F_2/2016 du 27 juin 2016 consid. 1).

Consid. 3
Aux termes de l’art. 124 al. 1 let. d LTF, une demande de révision fondée sur l’art. 123 al. 2 let. a LTF doit être déposée devant le Tribunal fédéral dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision, mais au plus tôt dès la notification de l’expédition complète de l’arrêt. En l’espèce, le requérant n’a eu connaissance du motif de révision invoqué qu’à réception du projet de décision daté du 29.02.2024. L’office AI lui indiquait qu’il entendait rejeter la nouvelle demande de prestations qu’il avait présentée en avril 2020, en l’informant qu’il ressortait de l’expertise rhumatologique diligentée auprès de la Dre B.__, spécialiste en médecine physique et réadaptation et en rhumatologie (rapport du 15.12.2023 et complément du 07.02.2024), qu’il existait potentiellement des faits nouveaux en relation avec la demande de prestations qu’il avait déposée en mai 2016. Agissant par acte du 29.05.2024, l’assuré a donc respecté le délai légal de 90 jours.

Consid. 4.1
À l’appui de sa demande de révision, le requérant invoque l’existence d’un moyen de preuve nouveau, à savoir le rapport d’expertise de la Dre B.__. Il expose que le médecin y a indiqué qu’un examen supplémentaire de scintigraphie osseuse SPECT-CT avait été effectué le 24.10.2023 et qu’il avait mis en évidence qu’il présentait une instabilité L5-S1 et une pseudarthrose de la cage depuis l’intervention de spondylodèse dorsale L5-S5 et fusion intercorporelle avec cage (TLIF) qu’il avait subie le 09.06.2016, dont le Dr C.__, spécialiste en médecine interne générale et en rhumatologie et médecin au SMR, n’avait pas eu connaissance lors de l’examen clinique rhumatologique qu’il avait réalisé le 06.09.2017. En se référant à l’avis de la Dre B.__, qui a été confirmé par le Dr D.__, médecin au SMR (rapport du 12.02.2024), le requérant affirme que ce nouveau diagnostic justifie de retenir une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, avec une diminution de rendement de 10% depuis juin 2016, en lieu et place de la capacité de travail de 75% retenue à l’époque par le Dr C.__ depuis le 10.03.2017, tant dans l’activité habituelle de polisseur que dans une activité adaptée. Le requérant soutient que les faits mis en évidence par la Dre B.__ sont des faits nouveaux pertinents, de nature à modifier l’état de fait sur lequel il y a lieu de se fonder afin d’évaluer son taux d’invalidité. Il en déduit que si le Tribunal fédéral avait disposé d’un « état de fait complet » au moment de rendre l’arrêt 9C_146/2019 du 14.05.2019, le droit à « trois quarts de rente » lui eût été reconnu, avec pour conséquence qu’il eût admis le recours qu’il avait déposé contre l’arrêt du 21.01.2019.

Consid. 4.2 [résumé]
L’argumentation du requérant est mal fondée. Quoi qu’il en dise, le rapport d’expertise de la Dre B.__ et son complément ne sont pas un motif de révision de l’arrêt 9C_146/2019 du 14.05.2019, conformément à la jurisprudence précédemment rappelée (consid. 2 supra). En effet, selon celle-ci, il ne suffit pas, pour justifier la révision d’une décision, que l’expert tire ultérieurement, des faits connus au moment du jugement principal, d’autres conclusions que le tribunal. Autrement dit, la seule éventualité que les troubles de la personne assurée – connus et dont les conséquences ont été soigneusement examinées – soient qualifiés différemment ne constitue pas un fait pertinent au sens de la jurisprudence (cf. arrêt 9F_5/2014 du 8 mai 2014).

En l’espèce, l’état de santé de l’assuré était connu au moment où le Tribunal fédéral avait rendu l’arrêt 9C_146/2019 du 14.05.2019 et les conséquences de ses atteintes à la santé avaient été examinées. Un examen rhumatologique réalisé par le Dr C.__ avait diagnostiqué des lombosciatalgies chroniques et des discopathies, concluant à une capacité de travail totale avec une diminution de rendement de 25%. L’assuré avait également produit des rapports de ses médecins traitants mentionnant un « failed back surgery syndrome » et une incapacité totale de travail. Dans l’arrêt initial, le Tribunal avait noté que le Dr C.__ avait relativisé ce diagnostic, ses conclusions étant corroborées par celles du Dr E.__, neurologue.

Le rapport d’expertise de la Dre B.__, présenté comme motif de révision, ne concernait que l’appréciation des faits déjà établis et non l’établissement de nouveaux faits déterminants. Par conséquent, ce rapport ne constitue pas un motif de révision au sens de l’art. 123 al. 2 let. a LTF. La demande de révision est par conséquent mal fondée.

 

Le TF rejette la demande de révision de l’assuré.

 

Arrêt 9F_11/2024 consultable ici

 

9C_100/2024 (f) du 12.08.2024 – Nouvelle demande AI après un précédent refus / Pas de révision procédurale ni de reconsidération

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_100/2024 (f) du 12.08.2024

 

Consultable ici

 

Nouvelle demande AI après un précédent refus / 17 LPGA – 87 al. 2 et 3 RAI

Pas de révision procédurale ni de reconsidération / 53 al. 1 LPGA – 53 al. 2 LPGA

 

Assuré, né en 1982, a bénéficié d’une demi-rente de l’assurance-invalidité du 01.09.2016 au 30.11.2017 (décision du 21.05.mai 2019, confirmée par arrêt du tribunal cantonal du 19.06.2020). L’administration a ensuite rejeté une nouvelle demande de prestations présentée par le prénommé en relation avec une aggravation de son état de santé qu’il avait annoncée en novembre 2021 (décision du 19.07.2022). Saisi d’une nouvelle demande de l’assuré en novembre 2022, l’office AI a refusé d’entrer en matière sur celle-ci (décision du 20.02.2023).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 08.01.2024, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Le litige porte sur le droit de l’assuré à une rente de l’assurance-invalidité, dans le cadre de la nouvelle demande de prestations qu’il a déposée en novembre 2022, en relation avec une aggravation de son état de santé (cf. art. 17 al. 1 LPGA, applicable par analogie, en lien avec l’art. 87 al. 2 et 3 RAI; voir aussi ATF 147 V 167 consid. 4.1; 133 V 108 consid. 5 et les arrêts cités). Il s’agit de trancher le point de savoir si la juridiction cantonale était en droit de confirmer le refus de l’office AI d’entrer en matière sur cette demande, au motif que l’intéressé n’avait pas rendu plausible une modification de son état de santé susceptible d’influencer ses droits depuis la dernière décision entrée en force reposant sur un examen matériel du droit à la rente (soit la décision du 19.07.2022).

Consid. 3.3
On rappellera qu’en vertu de l’art. 87 al. 2 et 3 RAI, lorsque la rente a été refusée parce que le taux d’invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l’assuré rend plausible que son invalidité s’est modifiée de manière à influencer ses droits. Cette exigence doit permettre à l’administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force d’écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l’assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 133 V 108 consid. 5.2 et 5.3; 130 V 64 consid. 5.2.3; 117 V 198 consid. 4b et les références). Lorsqu’elle est saisie d’une nouvelle demande, l’administration doit commencer par examiner si les allégations de l’assuré sont, d’une manière générale, plausibles. Si tel n’est pas le cas, l’affaire est liquidée d’entrée de cause et sans autres investigations par un refus d’entrer en matière (ATF 117 V 198 consid. 3a).

Consid. 5.1
À l’appui de son recours, l’assuré se prévaut d’une violation du droit suisse, en particulier des art. 17 et 53 al. 1 et 2 LPGA, ainsi que de l’art. 87 al. 2 et 3 RAI. D’une part, il reproche à la juridiction cantonale d’avoir considéré qu’il n’avait pas rendu plausible une aggravation de son état de santé. D’autre part, l’assuré invoque l’existence d’un motif de révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA), en affirmant aussi que les conditions d’une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) sont remplies.

Consid. 5.2 [résumé]
L’assuré invoque une violation de l’art. 17 LPGA, soutenant que le rapport de son médecin traitant, spécialiste en médecine physique et réhabilitation, indiquerait une aggravation de son état de santé, avec une incapacité totale de travailler dans toute activité. Cet argument est mal fondé, car le même médecin avait déjà attesté d’une capacité de travail nulle dans ses rapports précédents de février et avril 2022, où il avait mentionné que la situation physique de l’assuré était « très limitante » et ne permettait pas d’envisager une activité adaptée à ses handicaps. De plus, l’assuré ne conteste pas que le dernier rapport du médecin ne signale aucune nouvelle atteinte à la santé. L’appréciation de l’instance cantonale n’apparaît donc ni arbitraire ni contraire au droit. Il n’y a dès lors pas lieu de s’écarter de son appréciation. Le recours est mal fondé sur ce point.

Consid. 5.3.1
En ce qu’il allègue que le rapport de son médecin traitant du 24.10.2022 constitue un moyen de preuve nouveau propre à apporter la preuve de son incapacité totale de travailler, l’assuré méconnaît les conditions de la révision procédurale selon l’art. 53 al. 1 LPGA (sur ces conditions, cf. arrêt 9C_64/2023 du 6 décembre 2023 consid. 2.2 et les références). En effet, la révision procédurale permet de corriger une constatation inexacte des faits (inexactitude initiale sur les faits). Or dans la mesure où l’assuré se prévaut d’un rapport médical qui porte sur des faits survenus postérieurement à la décision du 19.07.2022, il ne fait pas état de faits nouveaux importants au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA, c’est-à-dire de faits de nature à modifier l’état de fait qui est à la base de la décision (du 19.07.2022) et à conduire à un jugement différent en fonction d’une appréciation juridique correcte. Dans son rapport du 24.10.2022, le médecin traitant a en effet indiqué que son patient est « [a]ctuellement » incapable de travailler à 100%.

Consid. 5.3.2
Sous l’angle ensuite de la reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), l’assuré soutient que la décision du 19.07.2022 serait manifestement erronée, « en particulier s’agissant de l’évaluation incorrecte de [son] invalidité ». Il reproche à la juridiction cantonale de n’avoir pas examiné si les conditions de l’art. 53 al. 2 LPGA étaient réalisées. Ce faisant, l’assuré omet qu’avec sa décision du 20.02.2023, l’office AI s’est prononcé uniquement sur la non-entrée en matière sur la nouvelle demande de prestations, sans examiner l’éventualité d’une reconsidération de sa décision précédente du 19.07.2022. Or, de jurisprudence constante, l’administration n’est pas tenue de reconsidérer ses décisions: l’art. 53 al. 2 LPGA lui en donne simplement la faculté et ni l’assuré ni le juge ne peuvent l’y contraindre (ATF 133 V 50 consid. 4.1; 119 V 475 consid. 1b/cc; arrêt 9C_229/2024 du 27 juin 2024 consid. 5). À défaut d’une décision de reconsidération de l’office AI, les juges cantonaux n’avaient pas à examiner la contestation sous cet angle, étant précisé que l’éventualité d’un raisonnement par substitution de motifs n’entrait pas en ligne de compte en l’occurrence, étant donné la décision administrative litigieuse de non-entrée en matière (sur les conditions d’une substitution de motifs dans ce contexte, arrêt 8C_634/2017 du 20 février 2018 consid. 5.4 et les références). Le grief de l’assuré tiré de la violation de l’art. 53 al. 2 LPGA est également mal fondé.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_100/2024 consultable ici

 

8C_697/2023 (f) du 17.09.2024 – Examen par des médecins du SMR – Pas d’enregistrement sonore de l’examen / Valeur probante des rapports des SMR

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_697/2023 (f) du 17.09.2024

 

Consultable ici

 

Examen par des médecins du SMR – Pas d’enregistrement sonore de l’examen / 44 al. 6 LPGA – 49 al. 2 RAI

Valeur probante des rapports des SMR / 49 al. 2 RAI

 

Assurée, née en 1971, sans formation, a perçu une rente entière d’invalidité du 01.07.2016 au 30.11.2016. En 2018, elle a trouvé un emploi à plein temps dans l’horlogerie, mais a présenté une incapacité de travail totale dès le 05.09.2018 à la suite d’un changement de poste.

Le 06.03.2019, elle a déposé une nouvelle demande de prestations AI. Le SMR a confié un examen à des médecins (rhumatologie et psychiatrie), réalisé le 23.02.2022. Les experts ont diagnostiqué un trouble anxieux et conclu à l’incapacité de travail suivante : 100% du 05.09.2018 au 24.02.2019 ; 50% du 25.02.2019 au 10.03.2019 ; à partir du 11.03.2019 : 70% dans l’activité habituelle, 100% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles (moindre résistance au stress, fatigabilité en fin de journée, difficultés à soutenir une attention et concentration sur un travail routinier et monotone nécessitant un rendement important). Sur le plan rhumatologique, une capacité de travail totale a été reconnue dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles.

Par projet de décision du 10.03.2022, l’office AI a informé l’assurée de son intention de lui refuser l’octroi d’une rente d’invalidité, au motif qu’elle ne présentait pas d’incapacité de gain suffisante pour ouvrir le droit à une telle prestation. Après examen d’objections et d’un nouveau rapport médical de la psychiatre traitante, le SMR a maintenu les conclusions de l’expertise malgré une divergence d’appréciation portant sur les diagnostics incapacitants et sur la capacité de travail de l’assurée. Il a néanmoins retenu l’impartialité de l’expert psychiatre et le fait qu’aucun nouvel élément médical probant ne pouvait le faire départir de ses précédentes conclusions. Par décision du 22.06.2022, l’office AI a confirmé son projet de refus de rente.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 27.09.2023, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.2.1
L’assurée fait valoir divers griefs à l’encontre du spécialiste en psychiatrie, de son examen et de son rapport. Elle se plaint d’abord de l’absence d’un enregistrement sonore, en invoquant la violation de l’art. 44 al. 6 LPGA. Elle en déduit l’impossibilité d’établir certains vices graves. L’assurée invoque également le manque d’indépendance de ce médecin à l’égard du SMR et, par là, une violation de l’art. 44 al. 2 LPGA. Le spécialiste en psychiatrie ne serait par ailleurs pas certifié en médecine d’assurance suisse et le dossier ne permettrait pas de connaître son champ de compétences. Enfin, l’assurée évoque la brève durée de l’expertise (1h30), effectuée dans des circonstances selon elle objectivement indéfinissables.

Consid. 3.2.2
Les éléments avancés par l’assurée et ses griefs de violation de l’art. 44 LPGA sont mal fondés. En effet, l’art. 44 LPGA (« Expertise »), qui prévoit notamment un enregistrement sonore des entretiens (al. 6), ne s’applique pas aux examens médicaux réalisés par les SMR comme celui pratiqué par le spécialiste en psychiatrie, médecin exerçant précisément pour le compte du SMR. Un tel examen est soumis aux exigences de l’art. 49 al. 2 RAI, aux termes duquel les SMR peuvent au besoin procéder eux-mêmes à des examens médicaux sur la personne des assurés; ils consignent les résultats de ces examens par écrit. Quant au fait que le spécialiste en psychiatrie ne serait pas certifié en médecine d’assurance suisse, il ne permet pas en soi de remettre en cause ses conclusions, alors qu’il s’agit d’un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, comme cela ressort tant du rapport d’examen que de la convocation à celui-ci. Enfin, la durée de l’examen ne permet de tirer aucune conclusion, en l’espèce, sur la valeur du travail de l’expert, dont le rôle consiste notamment à se prononcer sur l’état de santé psychique de l’assuré dans un délai relativement bref (cf. arrêts 9C_457/2021 du 13 avril 2022 consid. 6.2; 9C_133/2012 du 29 août 2012 consid. 3.2.1; 9C_443/2008 du 28 avril 2009 consid. 4.4.2 et les arrêts cités).

Consid. 3.3.2
S’agissant de la valeur probante des rapports des SMR selon l’art. 49 al. 2 RAI, le Tribunal fédéral considère qu’elle est comparable à celle des expertises médicales externes, lorsque ces rapports satisfont aux exigences développées par la jurisprudence en matière d’expertise médicale. Toutefois, les offices AI devraient toujours ordonner des expertises externes lorsque le caractère interdisciplinaire d’une situation médicale problématique l’exige, lorsque le SMR ne dispose pas des ressources professionnelles nécessaires pour pouvoir répondre à une question qui se pose ou lorsqu’il existe une divergence entre le rapport du SMR et la teneur générale du dossier médical, divergence qui ne reposerait pas sur des prémisses différentes dues à la conception bio-psycho-sociale de la maladie, répandue en médecine et qui est plus large que la notion d’atteinte à la santé en droit des assurances sociales (cf. ATF 137 V 210 consid. 1.2.1; arrêt I 738/05 du 1er mars 2007 consid. 5.2, in SVR IV 33 n° 117).

Lorsqu’une décision administrative s’appuie exclusivement sur l’appréciation d’un médecin interne à l’assureur social et que l’avis d’un médecin traitant ou d’un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l’un ou sur l’autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4.6 et 4.7; arrêt 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 3.2 et l’arrêt cité).

Consid. 3.3.3
En l’espèce, les juges cantonaux ont privilégié les conclusions du spécialiste en psychiatrie, du fait que son rapport satisfaisait aux exigences jurisprudentielles en matière d’expertise médicale. Ils ont considéré en particulier que ce médecin n’avait pas ignoré les éléments invoqués par l’assurée – qualifiés pour certains d’anecdotiques – mais avait un avis différent ou que celle-ci se limitait à opposer l’appréciation de sa médecin traitante à celui du spécialiste en psychiatrie.

Cela dit, il ressort de l’arrêt attaqué que la psychiatre traitante et le spécialiste en psychiatrie ne s’accordent ni sur les diagnostics, ni sur la capacité de travail de l’assurée. En particulier, la médecin traitante a reproché à l’expert d’avoir écarté les troubles de l’attention et de la concentration sans expliquer son évaluation ni avoir procédé à un test. Elle lui a également opposé d’avoir fondé son analyse de l’évolution de la capacité de travail de l’assurée sur la base d’un rapport d’expertise mis en œuvre par l’assurance perte de gain, alors que le médecin consultant était par la suite revenu sur son évaluation. A cela s’ajoute d’autres éléments, contribuant à susciter un doute à tout le moins minime sur la fiabilité ou la pertinence du rapport du SMR. Ainsi, le spécialiste en psychiatrie retient notamment la capacité de l’assurée à prendre des décisions importantes et une indépendance dans l’organisation de sa vie quotidienne, sans circonstancier son appréciation par rapport au fait que l’assurée est sous curatelle de représentation (art. 394 s. CC) (ce qui n’est pas précisé dans le rapport d’examen). Si le curateur n’est pas médecin, comme l’ont relevé les juges cantonaux en niant la pertinence de ses observations, on ne saurait nier sa légitimité à s’exprimer sur les capacités de l’assurée à se gérer sur le plan administratif, compte tenu de la mission qui lui est confiée.

Sans préjuger du fond du litige, il apparaît ainsi que les circonstances du cas d’espèce justifiaient une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA. En conséquence, les juges cantonaux ont procédé à une appréciation (anticipée) des preuves manifestement erronée en refusant la mise en œuvre d’une telle expertise médicale.

Consid. 4
Il s’ensuit que le recours doit être partiellement admis au sens des considérants, avec pour conséquence l’annulation de l’arrêt cantonal et de la décision. La cause sera renvoyée à l’office intimé pour qu’elle mette en œuvre une expertise médicale, dont la discipline peut se limiter au domaine psychiatrique, et rende une nouvelle décision.

Consid. 5
En ce qui concerne la répartition des frais judiciaires et des dépens, le renvoi de la cause pour nouvelle décision revient à obtenir gain de cause au sens des art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF, indépendamment du fait qu’une conclusion ait ou non été formulée à cet égard, à titre principal ou subsidiaire (ATF 146 V 28 consid. 7; 141 V 281 consid. 11.1). Les frais judiciaires ainsi que les dépens auxquels peut prétendre l’assurée seront dès lors mis à la charge de l’office intimé, qui succombe, ce qui rend la demande d’assistance judiciaire sans objet. L’assurée a produit une note d’honoraires pour un montant de 6’470 fr. (18 heures 52 au tarif horaire de 290 fr.). Ce montant apparaît toutefois excessif compte tenu de l’ampleur de la cause et de ses difficultés, ainsi que du fait que les arguments soulevés ont déjà été amplement discutés par l’assurée dans la procédure précédente. Il convient dès lors d’allouer à l’assurée le montant forfaitaire habituel de 2’800 fr.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assurée.

 

Arrêt 8C_697/2023 consultable ici

 

8C_520/2023 (f) du 28.02.2024 – Valeur probante de l’expertise médicale – Contradiction entre les experts dans l’évaluation consensuelle – 44 LPGA / Vraisemblance d’un diagnostic somatique

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_520/2023 (f) du 28.02.2024

 

Consultable ici

 

Valeur probante de l’expertise médicale – Contradiction entre les experts dans l’évaluation consensuelle / 44 LPGA

Vraisemblance d’un diagnostic somatique

 

L’assurée, née en 1970 et domiciliée en France, a travaillé en Suisse dans la gestion de projets. Elle a subi deux accidents : une blessure à la main gauche le 28.03.2015 et une collision frontale en voiture le 02.03.2017, causant diverses contusions.

L’office AI a mis en œuvre une expertise pluridisciplinaire (médecine interne, psychiatrie, neurologie et orthopédie). Dans leur rapport du 30.10.2018, les experts n’ont diagnostiqué aucune atteinte ayant un impact sur sa capacité de travail, estimant celle-ci complète sauf pour de courtes périodes après les accidents et lors d’hospitalisations.

Dans un avis du 05.02.2019, la médecin du SMR, s’écartant des conclusions des médecins experts, a retenu que l’assurée avait présenté une incapacité de travail totale du 02.03.2017 au 31.10.2018, en raison d’un probable syndrome douloureux régional complexe (SDRC) à la main gauche, la capacité de travail étant entière à compter de cette dernière date.

Par décisions du 18.01.2021, l’Office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger (OAIE) a alloué à l’assurée un quart de rente d’invalidité pour la période du 01.10.2016 au 21.05.2017, une rente entière du 01.06.2017 au 31.01.2019, ainsi que les rentes pour enfants liées à ces prestations.

 

Procédure cantonale (arrêt C-884/2021 – consultable ici)

Par jugement du 08.06.2023, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 7.1 [résumé]
L’assurée conteste la décision de la juridiction de première instance, arguant d’un établissement inexact des faits et d’une appréciation arbitraire des preuves. Elle critique la primauté accordée aux conclusions des médecins experts sur les autres documents médicaux. Elle met en avant un rapport du Dr C.__, spécialiste en chirurgie thoracique, daté du 29.03.2019, qui pose un nouveau diagnostic : un syndrome du défilé thoracique à compensation neurogène et veineuse. Ce diagnostic, établi après un examen approfondi et des consultations avec d’autres spécialistes, expliquerait ses symptômes et remettrait en question le diagnostic d’entorse chondro-sternale. L’assurée souligne que ce nouveau diagnostic, ainsi que la proposition de prise en charge chirurgicale, démontreraient l’existence d’une pathologie somatique réelle, contrairement aux conclusions des experts. Elle argue que de nombreux documents médicaux confirment son incapacité de travail et ses limitations fonctionnelles. Elle estime que les experts, n’ayant pas eu connaissance de cette nouvelle appréciation, n’auraient pas dû être suivis dans leurs conclusions. Elle critique également le fait que les juges aient écarté les limitations fonctionnelles liées aux effets secondaires de sa médication.

 

Consid. 7.2.1
Selon les faits constatés par les premiers juges – qui lient le Tribunal fédéral – une IRM de la cage thoracique pratiquée le 05.07.2017 a mis en évidence une disjonction (ou entorse) chondro-sternale au niveau du premier arc à droite, associée à une importante réaction inflammatoire. Par la suite, ce diagnostic a été repris par plusieurs médecins, notamment ceux de la Clinique de réadaptation dans un rapport de sortie du 03.07.2018, certains, comme ceux de l’hôpital D.__, le qualifiant ou le mettant en lien avec une pseudarthrose.

Consid. 7.2.2
Il ressort en outre des constatations de la cour cantonale que les médecins experts ont fait état d’une douleur thoracique antérieure irradiant dans le membre supérieur droit, avec douleur non systématisée de la main droite depuis mars 2017 (pseudarthrose costale). Ils n’en ont toutefois déduit aucune incapacité de travail. Certaines de leurs explications – exposées dans l’arrêt entrepris – en lien avec la pathologie observée s’avèrent toutefois discordantes et donc peu convaincantes. Dans leur évaluation consensuelle, ils ont tout d’abord relevé, au plan orthopédique, que « la douleur costale droite séquellaire de l’accident de la circulation, avec pseudarthrose ostéo-chondrale de la première côte, et les douleurs de la main droite, [n’avaient] pas de substrat organique, la pseudarthrose [pouvant] provoquer une gêne mais pas [la] douleur ressentie par la personne assurée » (p. 8 du rapport). Ils ont ensuite indiqué, sur le plan neurologique, que « la douleur parfaitement crédible et objectivée radiologiquement d’une atteinte articulaire costo-sternale de l’articulation entre la première côte et le sternum, dans les suites du choc important que la personne assurée a subi, n'[était] pas discutable », en précisant que les conséquences fonctionnelles (impossibilité d’usage normal du membre supérieur droit) de cette atteinte n’étaient pas explicables par la simple douleur costo-sternale, qui restait aussi importante après une année d’évolution (p. 9 du rapport). Les experts semblent donc se contredire, en excluant d’abord que la pseudarthrose chondro-sternale puisse être à l’origine des douleurs de l’assurée, puis en imputant ces mêmes douleurs à cette atteinte costo-sternale objectivée par IRM. On peut se demander si les experts ont voulu distinguer l’existence ou non de douleurs dues à un substrat organique selon le point de vue orthopédique d’une part, et neurologique d’autre part; cela ne paraît toutefois pas être le cas, dès lors que même au plan neurologique, il est fait référence à une atteinte douloureuse articulaire. Quoi qu’il en soit, les experts ont ensuite exclu tout trouble sur le plan neurologique (p. 10 du rapport).

Consid. 7.2.3 [résumé]
Contrairement aux conclusions de l’expertise, plusieurs médecins ont rapporté des troubles neurologiques chez l’assurée. Le Dr E.__, anesthésiologue, a noté des douleurs sternales et des douleurs neurogènes au membre supérieur droit, avec une asymétrie de température et une tuméfaction de la main droite. La Dre F.__, neurologue, a mentionné des thoracodynies et brachialgies, évoquant une névralgie du nerf inter-costo-brachial, bien que l’examen électroneuromyographique, techniquement difficile, n’ait pu confirmer la pathologie.

Les médecins de l’hôpital D.__ ont diagnostiqué un déconditionnement sur douleur probablement neuropathique au membre supérieur droit, lié à une pseudarthrose chondro-sternale. Plusieurs médecins, dont la Dre F.__ et le Dr G.__, ont souligné la nécessité d’un traitement antalgique important, incluant une médication morphinique.

Consid. 7.2.4 [résumé]
C’est dans ce contexte que le Dr C.__ a émis deux avis sur le cas de l’assurée. Dans son premier avis du 20.03.2019, il a conclu à une entorse chondro-sternale du premier arc droit, sans lien apparent avec les brachialgies et troubles sensitifs décrits. Le 29.03.2019, après une analyse plus approfondie incluant la littérature médicale, la relecture de l’IRM et des discussions avec des collègues de différentes spécialités, il a proposé un nouveau diagnostic : un syndrome du défilé thoracique à composante neurogène et veineuse. Selon le Dr C.__, ce diagnostic expliquerait mieux l’ensemble des symptômes de l’assurée que la seule disjonction chondro-sternale. Il proposait, malgré le contexte psychologique et assécurologique défavorable, une résection de la première côte par voie transaxillaire droite, qui permettrait possiblement de soulager une partie des symptômes.

Les premiers juges ne pouvaient donc manifestement pas constater que le docteur C.__ ne faisait pas état d’éléments objectifs expliquant les plaintes de l’assurée. Quand bien même le syndrome du défilé thoracique n’est cité qu’à titre hypothétique et le rapport du 29.03.2019 est assez sommaire, l’avis du docteur C.__ fait naître, compte tenu des lacunes de l’expertise pluridisciplinaire (cf. consid. 7.2.2 supra) et des rapports faisant état d’une composante neurogène (cf. consid. 7.2.3 supra), de très sérieux doutes sur la pertinence des conclusions de l’expertise concernant l’origine et l’ampleur des atteintes thoraciques et au membre supérieur droit, ainsi que la capacité de travail qui en découle. On ajoutera que les médecine experts n’ont pas été confrontés aux avis postérieurs à leur expertise, en particulier à l’appréciation du docteur C.__.

En vue de lever ces doutes, un complément d’instruction est nécessaire, sous la forme d’une expertise judiciaire, compte tenu par ailleurs des discordances de l’expertise pluridisciplinaire mises en évidences au consid. 7.2.2. Etant donné la nature de l’affection évoquée par le docteur C.__ (syndrome du défilé thoracique à composante neurogène et veineuse), l’expertise devra comprendre un volet neurologique et un volet angiologique.

 

Le TF admet partiellement le recours de l’assurée.

 

Arrêt 8C_520/2023 consultable ici

 

8C_291/2024 (f) du 02.09.2024 – Notion d’invalidité – Décision rendue par les autorités françaises relative au degré d’invalidité ne lie pas les autorités suisses / 7 LPGA – 8 LPGA – ALCP

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_291/2024 (f) du 02.09.2024

 

Consultable ici

 

Capacité de travail exigible – Valeur probante de l’expertise pluridisciplinaire / 16 LPGA – 44 LPGA

Notion d’invalidité – Décision rendue par les autorités françaises relative au degré d’invalidité ne lie pas les autorités suisses / 7 LPGA – 8 LPGA – ALCP

 

Assuré, né en 1979, de nationalité française et domicilié en France, a été victime d’un accident de la circulation le 17.02.2016. Le 29.12.2016, dépôt d’une demande AI. Après avoir recueilli le dossier médical de l’assuré auprès de l’assurance-accidents et de l’assureur perte de gain, a mis en œuvre une expertise pluridisciplinaire (rhumatologie, médecine générale, psychiatrie, neurologie et neuropsychologie ; rapport du 06.09.2019). Les experts ont conclu à l’absence de limitations fonctionnelles et à une capacité de travail de 100 % dans l’activité habituelle dès le 17.05.2016.

Par projet de décision du 13.09.2019, l’office AI a informé l’assuré qu’il entendait rejeter sa demande de prestations AI. L’assuré ayant contesté ce projet de décision, l’Office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger (ci-après: OAIE) a confirmé, par décision du 07.11.2019, le projet de décision du 13.09.2019.

 

Procédure cantonale (arrêt C-6396/2019 – consultable ici)

Par jugement du 08.04.2024, rejet du recours par le Tribunal administratif fédéral.

 

TF

Consid. 5.1
L’expertise pluridisciplinaire du 06.09.2019 a conclu à l’absence de diagnostics et de limitations fonctionnelles ayant un impact sur la capacité de travail de l’assuré. Plusieurs diagnostics sans incidence sur la capacité de travail ont été retenus, notamment des troubles de personnalité, des céphalées, et divers problèmes physiques. L’expertise a établi que la capacité de travail de l’assuré était de 100% dans son activité habituelle et adaptée, sur les plans psychiatrique, neurologique et de médecine interne. En rhumatologie, la capacité de travail était de 100% dès le 17.05.2016, soit trois mois après l’accident. La cour cantonale a jugé que l’expertise pluridisciplinaire avait pleine valeur probante, les experts ayant examiné toutes les atteintes alléguées par l’assuré, motivé leurs conclusions de manière claire et circonstanciée, et pris en compte les rapports médicaux antérieurs pertinents. Les conclusions de l’expertise ont été confirmées par le médecin du SMR.

Consid. 5.3
Compte tenu de son pouvoir d’examen restreint, il n’appartient pas au Tribunal fédéral de procéder une nouvelle fois à l’appréciation des preuves administrées, mais à la partie recourante d’établir en quoi celle opérée par l’autorité cantonale serait manifestement inexacte ou incomplète, ou en quoi les faits constatés auraient été établis au mépris des règles essentielles de procédure. En l’occurrence, la juridiction cantonale a rappelé que le rapport d’expertise pluridisciplinaire du 06.09.2019 avait pleine valeur probante et que les experts s’étaient prononcés sur l’ensemble de la documentation médicale pertinente ainsi que sur les atteintes alléguées par l’assuré. En se limitant à arguer qu’il y aurait lieu de réévaluer objectivement son taux invalidité en tenant compte des nombreux diagnostics retenus par ses médecins français, à savoir un syndrome cervico-céphalique avec raideur cervicale, un syndrome de stress post-traumatique sévère et une névrose post-traumatique sévère sans perspective évolutive, l’assuré ne tente nullement d’établir, au moyen d’une argumentation précise et étayée, le caractère insoutenable de la constatation des faits opérée par les premiers juges et de l’appréciation juridique qu’ils ont faite de la situation.

Consid. 5.4
C’est par ailleurs en vain que l’assuré se réfère à des décisions rendues par la caisse d’assurance maladie (CPAM) et la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) lui reconnaissant un état d’invalidité « réduisant des deux-tiers au moins ses capacités de travail et de gain » ainsi qu’une invalidité « Catégorie 2 » reconnaissant son incapacité d’exercer une quelconque profession à compter du 8 octobre 2019. Ces pièces ne sont en effet pas pertinentes pour l’issue du présent litige, parce que la reconnaissance par les autorités françaises compétentes d’une incapacité totale de travail n’aurait pas d’influence sur l’examen du droit à une rente de l’assurance-invalidité suisse. En effet, le degré d’invalidité d’un assuré qui prétend une telle prestation est déterminé exclusivement d’après le droit suisse, même lorsque, comme en l’espèce, les dispositions de l’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681) sont applicables à la contestation devant les autorités suisses (ATF 130 V 253 consid. 2.4; arrêts 9C_315/2018 du 5 mars 2019 consid. 2.2, 9C_486/2022 du 17 août 2023 consid. 2.2). Contrairement à ce que soutient l’assuré, la décision rendue par les autorités françaises relative à son degré d’invalidité ne lie pas les autorités suisses en application de l’art. 46 par. 3 du Règlement CE n° 883/2004, dès lors que la concordance des conditions relatives au degré d’invalidité entre les législations suisse et française n’est pas reconnue à l’annexe VII.

Enfin les premiers juges ont dûment pris en considération les documents médicaux établis en France, dont ils ont apprécié la valeur probante comme ils l’ont fait pour les documents médicaux établis en Suisse.

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_291/2024 consultable ici

 

Le Conseil national approuve une motion pour renforcer la sécurité financière des demandeurs de l’AI – Vers une indemnité journalière durant le délai d’attente

Le Conseil national approuve une motion pour renforcer la sécurité financière des demandeurs de l’AI – Vers une indemnité journalière durant le délai d’attente

 

Communiqué de presse du Parlement du 25.09.2024 consultable ici

 

La sécurité financière des personnes qui doivent demander des prestations à l’assurance invalidité doit être garantie durant le traitement de leur demande. Le Conseil national a soutenu mercredi par 125 voix contre 64 une motion de Patricia von Falkenstein (PLD/BS) en ce sens.

La conseillère nationale bâloise propose de passer par une indemnité journalière durant le délai d’attente. Cette indemnité serait versée entre la fin des mesures de réadaptation professionnelle et la décision relative au droit à la rente AI.

Selon Mme von Falkenstein, les assurés dont l’incapacité de travail est due à une maladie peuvent se retrouver dans des situations financières précaires. Les procédures d’examen du droit à la rente durent en effet souvent plusieurs années.

Ces personnes finissent par s’endetter et sont obligées de recourir à l’aide sociale. Les soucis financiers et le fait que le recours à l’aide sociale soit moins bien accepté par rapport à la perception d’une rente AI entraînent dans de nombreux cas une détérioration de l’état de santé.

 

Déjà des mesures

Le Conseil fédéral reconnaît que des procédures courtes sont essentielles. Il a déjà introduit diverses mesures visant à simplifier et à raccourcir les procédures des assurances sociales.

En principe, l’examen du droit à la rente doit être effectué en parallèle des mesures de réadaptation, de sorte qu’une fois la réadaptation terminée, le délai jusqu’à la décision relative à l’octroi de la rente soit le plus court possible.

Le gouvernement rappelle également que ce n’est pas à l’AI d’assurer la sécurité financière des assurés. D’autres prestations priment sur celles de l’assurance invalidité. En vain.

 

Communiqué de presse du Parlement du 25.09.2024 consultable ici

Motion von Falkenstein 23.3808 « Accélérer la procédure AI et garantir la sécurité financière des assurés durant celle-ci » consultable ici