Archives de catégorie : Assurance-invalidité AI

Développement continu de l’AI : ordonnances mises en consultation

Développement continu de l’AI : ordonnances mises en consultation

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 04.12.2020 consultable ici

 

Le développement continu de l’assurance-invalidité (AI) apporte des améliorations en faveur des enfants et des jeunes ainsi que des personnes souffrant de troubles psychiques. L’objectif de la réforme est de mieux soutenir les personnes concernées afin de prévenir l’invalidité et de renforcer la réadaptation. Le Parlement a adopté la révision de la loi à l’été 2020 et son entrée en vigueur est prévue pour 2022. La mise en œuvre nécessite de nombreuses adaptations dans diverses ordonnances. Lors de sa séance du 04.12.2020, le Conseil fédéral a ouvert la procédure de consultation, qui durera jusqu’au 19.03.2021.

 

Les dispositions d’ordonnance concernent notamment les principales nouveautés exposées ci-après.

Renforcement des mesures de réadaptation professionnelle

Le développement continu de l’AI vise en particulier à soutenir de façon encore plus ciblée les enfants et les jeunes en situation de handicap ainsi que les personnes atteintes dans leur santé psychique, ceci afin de renforcer leur potentiel de réadaptation et d’améliorer leur aptitude au placement. A cette fin, un renforcement de la collaboration entre l’AI et les acteurs impliqués, en particulier les médecins traitants et les employeurs, sera notamment inscrit au niveau réglementaire. En outre, les mesures existantes et nouvelles en faveur des jeunes seront coordonnées et davantage orientées vers le marché primaire du travail.

 

Mise à jour de la liste des infirmités congénitales

La réforme inscrit dans la loi des critères clairs pour déterminer si une maladie est considérée comme une infirmité congénitale, et donc si l’AI prend en charge les coûts de son traitement. La liste des infirmités congénitales sera mise à jour. Les maladies qui peuvent aujourd’hui être traitées facilement seront à l’avenir prises en charge par l’assurance-maladie. À l’inverse, de nouvelles maladies, surtout des maladies rares, seront ajoutées à la liste et leurs frais de traitement seront remboursés par l’AI.

La tenue de la liste des infirmités congénitales sera désormais du ressort du Département fédéral de l’intérieur (DFI). L’ordonnance actuelle du Conseil fédéral sera donc remplacée par une ordonnance du département (OIC-DFI), ce qui facilitera la mise à jour régulière de la liste. Les critères d’admission des infirmités congénitales dans la liste seront définis en détail dans le règlement sur l’assurance-invalidité (RAI).

 

Remboursement de médicaments : création d’un centre de compétences

Pour les infirmités congénitales reconnues, l’AI prend aussi en charge les coûts des médicaments. Afin de simplifier la procédure et de concentrer les compétences techniques, une liste des spécialités sera créée pour l’AI (liste des spécialités en matière d’infirmités congénitales, LS IC). Elle recensera les médicaments remboursés par l’AI ainsi que leur prix maximal. Pour être admis sur la liste, les médicaments devront faire l’objet d’un examen basé sur les critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité. La nouvelle liste des spécialités de l’AI remplacera l’actuelle liste des médicaments destinés au traitement des infirmités congénitales (LMIC). Lorsqu’une personne assurée atteint l’âge de 20 ans, les médicaments remboursés par l’AI seront pris en charge dans la même mesure par l’assurance obligatoire des soins.

Un centre de compétences sera créé à l’Office fédéral de la santé publique pour la procédure d’admission et la tenue de la LS IC. En effet, l’office étant responsable de la liste des spécialités de l’assurance-maladie, il dispose déjà de l’expérience nécessaire en la matière.

 

Des mesures pour garantir la qualité et la transparence des expertises médicales

Dans le cadre du développement continu de l’AI, les mesures d’instruction et la procédure liée aux expertises médicales seront uniformisées pour toutes les assurances sociales. Lors de l’attribution de mandats d’expertise, l’assurance et la personne assurée devront se mettre d’accord sur un mandataire. En outre, les expertises deviendront plus transparentes : les entretiens entre experts et assurés feront désormais l’objet d’un enregistrement sonore, qui sera joint au dossier. En ce qui concerne l’AI en particulier, les offices AI tiendront une liste publique contenant des informations sur les experts auxquels ils font appel (nombre d’expertises effectuées, remboursements, incapacités de travail attestées, appréciations des expertises dans le cadre de décisions de justice).

Par ailleurs, les expertises bidisciplinaires seront désormais attribuées de manière aléatoire et uniquement à des centres d’expertises accrédités, comme c’est le cas aujourd’hui pour les expertises pluridisciplinaires. Afin de garantir la qualité des expertises, une commission extraparlementaire indépendante sera mise en place. Ses compétences et ses tâches seront définies au niveau réglementaire, tout comme les exigences relatives aux qualifications professionnelles des experts médicaux.

Plusieurs de ces mesures correspondent aux recommandations du rapport d’experts publié en octobre 2020 sur les expertises médicales dans l’assurance-invalidité.

 

Evaluation du taux d’invalidité : une réglementation plus claire

Avec l’introduction d’un système de rentes linéaire, l’exactitude du taux d’invalidité revêtira une plus grande importance. En effet, dans ce nouveau système, chaque point de pourcentage sera déterminant pour le calcul du montant de la rente. Afin d’accroître la sécurité juridique et l’uniformité, les principes essentiels de l’évaluation du taux d’invalidité seront désormais définis au niveau réglementaire et non plus par voie de directive. La réforme prévoit de nouvelles dispositions concernant les personnes travaillant à temps partiel, la comparaison du revenu réalisé avant la survenance de l’invalidité avec celui réalisable après, les personnes sans diplôme professionnel, les invalides précoces ou de naissance ainsi que les revenus particulièrement bas avant la survenance de l’invalidité. Ces nouveautés devraient profiter aux personnes assurées à différents égards.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 04.12.2020 consultable ici

Rapport explicatif pour la procédure de consultation du 04.12.2020 disponible ici

Modification du RAI consultable ici

Modification de l’OIC-DFI consultable ici

 

 

La contribution d’assistance encourage l’autonomie : le rapport final confirme les résultats précédents

La contribution d’assistance encourage l’autonomie : le rapport final confirme les résultats précédents

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 19.11.2020 consultable ici

 

La contribution d’assistance encourage la vie autonome et responsable ainsi que la participation sociale : c’est ce que révèle le rapport final sur cet instrument introduit en 2012. Les personnes en situation de handicap qui ont régulièrement besoin d’aide pour gérer le quotidien peuvent ainsi continuer à vivre à domicile de manière indépendante.

Le rapport final confirme les résultats des autres rapports publiés jusqu’ici. Près de 81% des bénéficiaires adultes de la contribution d’assistance ayant participé à l’enquête sont satisfaits, voire très satisfaits de cette prestation. Selon trois-quarts d’entre eux, la contribution d’assistance a amélioré leur qualité de vie et leur a permis d’accroître leur autonomie. 70% des adultes interrogés déclarent en outre que la charge incombant aux proches a diminué depuis qu’ils perçoivent une contribution d’assistance. Le rapport final fournit également un éclairage sur l’évolution de la demande et des coûts, sur le montant et l’utilisation de la contribution d’assistance ainsi que sur les caractéristiques du groupe cible. Ce travail de recherche a été réalisé en collaboration étroite avec des représentants des offices AI et de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS).

 

Évolution de la demande et des coûts

Depuis l’introduction de la contribution d’assistance, le nombre de bénéficiaires a augmenté de façon constante. En 2019, 2612 adultes et 696 mineurs ont perçu une contribution d’assistance de l’assurance-invalidité, un résultat légèrement inférieur aux prévisions, qui tablaient sur 3000 adultes. Les coûts annuels d’environ 47 millions de francs avancés dans le message concernant les bénéficiaires adultes étaient par contre déjà dépassés en 2017 et n’ont cessé d’augmenter depuis lors. En 2019, le coût des prestations a atteint 63 millions de francs.

 

Réalisation des objectifs et taux de satisfaction

Selon la plupart des bénéficiaires de la contribution d’assistance, les objectifs de la mesure sont atteints. Ils estiment qu’elle encourage l’autonomie, la responsabilité et la participation sociale, et qu’elle leur offre la possibilité de vivre à domicile malgré un handicap. De plus, elle permet de décharger les proches. Une claire majorité des 1906 bénéficiaires adultes ayant participé à l’enquête sont satisfaits, voire très satisfaits de la contribution d’assistance. Les propositions d’amélioration ont trait principalement à la réduction de la charge administrative liée à la prestation.

 

Quelles sont les prochaines étapes ?

Le présent rapport final marque la fin de l’évaluation globale qui a porté sur plusieurs années. Un monitoring interne à l’OFAS permettra à l’avenir d’observer et d’analyser les paramètres centraux de la prestation. Des indicateurs relatifs à la mesure seront en outre repris dans la statistique standard de l’OFAS.

Diverses propositions d’amélioration, notamment dans le domaine du conseil et des montants du forfait de nuit, seront également reprises dans les travaux de mise en œuvre du Développement continu de l’AI.

 

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Introduite le 01.01.2012 à l’entrée en vigueur de la 6e révision de la loi sur l’assurance-invalidité, la contribution d’assistance a depuis lors fait l’objet d’évaluations approfondies. Durant cette période, 3466 adultes ont perçu au moins une fois une contribution d’assistance.

Depuis mai 2013, un questionnaire a été envoyé à 3876 bénéficiaires, dont 3056 adultes et 820 mineurs, pour s’enquérir de leurs expériences en la matière. Le taux de participation des adultes s’est élevé à 62% (1906 réponses), celui des mineurs à 67% (553 réponses).

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Communiqué de presse de l’OFAS du 19.11.2020 consultable ici

Rapport de recherche de l’OFAS no 16/20 « Evaluation Assistenzbeitrag 2012-2019 » (en allemand, avec résumés en français, en italien et en anglais) disponible ici

 

 

9C_153/2020 (f) du 09.10.2020 – Taux d’invalidité – Assuré plâtrier indépendant – 16 LPGA / Revenu sans invalidité d’une personne de condition indépendante – Activité d’indépendant de 7 mois avant l’accident / Revenu sans invalidité déterminé selon l’ESS (T17)

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_153/2020 (f) du 09.10.2020

 

Consultable ici

 

Taux d’invalidité – Assuré plâtrier indépendant / 16 LPGA

Revenu sans invalidité d’une personne de condition indépendante – Activité d’indépendant de 7 mois avant l’accident

Revenu sans invalidité déterminé selon l’ESS (T17)

 

Assuré, né en 1971, a d’abord travaillé comme salarié jusqu’en mai 2014, puis en qualité de plâtrier indépendant dès juin 2014. Le 15.01.2015, il s’est blessé à la main droite et a subi une incapacité totale de travail dans sa profession de plâtrier.

Dépôt d’une demande de prestations AI en juin 2016. L’office AI alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 31.05.2017. L’administration a retenu que si l’incapacité de travail restait totale dans l’activité habituelle de plâtrier, la capacité de travail était en revanche entière à compter du 07.02.2017 dans une activité adaptée. Comparant un revenu sans invalidité de 73’744 fr. 92 en 2017, établi selon l’ESS (table T17, ligne 71, métiers qualifiés du bâtiment et assimilés, sauf électriciens, niveau de compétences 2), avec un revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, également calculé selon l’ESS (table TA1, niveau de compétences 1), l’office AI a fixé le taux d’invalidité à 11%.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 117/18 – 21/2020 – consultable ici)

La juridiction cantonale a constaté qu’un revenu de 85’300 fr. afférent à la période de juin à décembre 2014 avait été inscrit sur le compte individuel de l’assuré en tant que personne de condition indépendante, tandis que l’autorité fiscale avait retenu un revenu de 77’188 fr. pour l’année 2014 provenant de l’activité indépendante. Pour les juges cantonaux, cette activité avait débuté à un rythme très soutenu, offrant à l’assuré une rémunération équivalant à un peu plus du double de ce qu’il avait obtenu comme salarié durant les années précédentes. Comme le succès aurait perduré sans atteinte à la santé, il se justifiait d’annualiser les revenus d’une activité qui n’avait été que partielle et qui aurait procuré des revenus supérieurs si l’exercice 2014 avait été complet. Le Tribunal cantonal a dès lors admis qu’il n’y avait pas lieu de s’écarter de la règle de principe selon laquelle les revenus effectivement réalisés sont à prendre en compte. Dans le cas d’espèce, sur la base de six mois entiers d’activité indépendante (de juin à décembre 2014) qui ont procuré une rémunération brute de 85’375 fr. (soumise aux cotisations dues en tant qu’indépendant), les juges cantonaux ont extrapolé ce montant sur l’année entière et fixé la rétribution à 170’749 fr. 99 pour 2014. Comparant ce revenu sans invalidité au revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, ils ont fixé le taux d’invalidité à 62%, ce qui ouvrait le droit à trois quarts de rente à partir du 01.06.2016.

Par jugement du 27.01.2020, admission du recours par le tribunal cantonal et octroi d’une rente entière d’invalidité du 01.12.2016 au 31.05.2017 puis de trois quarts de rente à compter du 01.06.2017.

 

TF

Pour déterminer le revenu sans invalidité, on rappellera qu’il faut établir ce que l’assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s’il n’était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. C’est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l’assuré avant l’atteinte à la santé en posant la présomption qu’il aurait continué d’exercer son activité sans la survenance de son invalidité. Pour les personnes de condition indépendante, on peut se référer aux revenus figurant dans l’extrait du compte individuel de l’AVS (arrêts 8C_661/2018 du 28 octobre 2019 consid. 3.2.2, 9C_771/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.6). En effet, l’art. 25 al. 1 RAI établit un parallèle entre le revenu soumis à cotisation à l’AVS et le revenu à prendre en considération pour l’évaluation de l’invalidité ; le parallèle n’a toutefois pas valeur absolue (arrêt 8C_748/2008 du 10 juin 2009 consid. 5.2.1).

A ce sujet, on rappellera que le revenu réalisé avant l’atteinte à la santé ne pourra pas être considéré comme une donnée fiable, notamment lorsque l’activité antérieure était si courte qu’elle ne saurait constituer une base suffisante pour la détermination du revenu sans invalidité (cf. ATF 135 V 59 consid. 3.4.6 p. 64; arrêt 9C_658/2015 du 9 mai 2016 consid. 5.1.1). Le cas échéant, on pourra se fonder sur le revenu moyen d’entreprises similaires (cf. arrêt 9C_474/2016 du 8 février 2017 consid. 4), ou sur les statistiques de l’ESS (cf. arrêt 9C_111/2009 du 21 juillet 2009 consid. 3.1).

 

En se référant à l’arrêt I 22/06 du 19 janvier 2007, l’office AI soutient que lorsqu’un assuré est atteint dans sa santé peu de temps après le début de son activité indépendante, il convient de se référer à des données statistiques afin d’établir le revenu sans invalidité, car dans un tel cas de figure, les résultats d’exploitation obtenus sur une durée de quelques mois ne permettent pas de fixer de manière fiable le revenu qui aurait pu être réalisé sans atteinte à la santé. A cet égard, les considérants de l’instance cantonale sur le potentiel de développement du marché et de l’entreprise de l’assuré lui paraissent insoutenables et relèveraient de simples affirmations dont il ignore sur quoi elles reposent. Les taxations fiscales, les décisions de cotisations personnelles, le compte individuel ainsi que la comptabilité de l’entreprise ne permettraient pas d’aboutir à de telles conclusions, ni de déterminer le revenu correspondant à l’activité indépendante sans la survenance de l’atteinte à la santé. L’office AI est aussi d’avis qu’il est arbitraire de transformer le revenu global en revenu mensuel puis de le multiplier par douze (pour obtenir le revenu annuel de 170’749 fr. 99), car cette méthode méconnaît le fonctionnement d’une entreprise du bâtiment ; en outre, l’activité indépendante n’a pas été exercée durant seulement six mois, mais sept mois en 2014 selon le compte individuel, voire huit mois d’après les documents émanant de l’assureur-accidents.

 

Les constatations de l’autorité précédente relatives aux revenus inscrits sur le compte individuel de l’assuré pour l’année 2014 sont manifestement inexactes et doivent être rectifiées et complétées d’office. En effet, s’il ressort de l’extrait du compte individuel que des revenus de 85’300 fr. (60’000 + 25’300) afférents à l’activité indépendante ont été portés en compte pour la période courant de juin à décembre 2014, il apparaît aussi qu’un montant de 49’643 fr. a été extourné pour cette activité indépendante en 2014 (cf. ch. 2403 des Directives de l’OFAS concernant le certificat d’assurance et le compte individuel). La soustraction aboutit à un revenu de l’activité indépendante de 35’657 fr. (85’300 – 49’643) pour cette année-là. En comparant ce revenu de 35’657 fr. avec le revenu d’invalide non contesté de 65’699 fr. 56, le droit à la rente serait ainsi d’emblée exclu, même si l’on extrapolait le montant de 35’657 fr. (correspondant à une période de sept mois) sur toute l’année 2014 et que l’on tienne compte ainsi d’un revenu de 61’126 fr. 30 (pour autant que ce procédé fût admissible).

Par ailleurs, aucune donnée fiable ne ressort des comptes d’exploitation et de pertes et profits de l’entreprise de l’assuré qui ont été versés au dossier. Au demeurant, l’assuré avait fait valoir, dans son recours cantonal, que pour pouvoir faire le calcul de son invalidité, « le montant de CHF 14’229.00 déclaré en tant que revenu brut en tant qu’indépendant vaut pour les mois de juin 2014 à janvier 2015. Partant, c’est une moyenne de CHF 1’778.60 par mois ». En pareilles circonstances et compte tenu de la brièveté de cette activité, celle-ci ne saurait constituer une base suffisante pour la détermination du revenu sans invalidité. C’est ainsi à juste titre que l’office AI l’a établi sur la base de données statistiques dont le bien-fondé n’est pas remis en cause en tant que tel.

A cet égard, on remarquera que le revenu sans invalidité de 73’744 fr. 92 retenu par l’office AI est légèrement inférieur à la moyenne des revenus qui ressortent du compte individuel de l’assuré pour les cinq années précédant l’atteinte à la santé (2010: 80’352 fr.; 2011: 83’999 fr.; 2012: 77’094 fr.; 2013: 75’563 fr.; 2014: 60’074 fr.), soit 75’416 fr. 40. Si l’on comparait ce revenu avec le revenu d’invalide de 65’699 fr. 56, le taux d’invalidité serait alors de 13%, de sorte que l’issue du litige serait inchangée.

Vu ce qui précède, le taux d’invalidité de 11% retenu par l’office AI apparaît conforme au droit, de sorte qu’il a nié à juste titre le droit à la rente postérieurement au 31.05.2017.

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annule le jugement cantonal et confirme la décision de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_153/2020 consultable ici

 

 

Analyse des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale

Analyse des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 17.11.2020 consultable ici

 

D’un côté, la priorité accordée par l’AI à la réadaptation a eu l’effet souhaité : 58% des assurés ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI en 2014 exerçaient une activité lucrative et ne touchaient pas de rente AI quatre ans plus tard ; cette proportion n’était que de 50% parmi les personnes qui avaient déposé une telle demande en 2005. D’un autre côté, la proportion de personnes tributaires de l’aide sociale après que l’AI a refusé de leur octroyer une rente est passée de 11,6 à 14,5%. C’est ce que montre une nouvelle étude de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Le développement continu de l’AI renforcera encore le travail de l’AI en faveur de la réadaptation, ce qui devrait réduire le nombre de transferts vers l’aide sociale. La réforme entrera vraisemblablement en vigueur en 2022.

Le travail de réadaptation fourni par l’AI a été considérablement renforcé à l’occasion de la 4e et surtout de la 5e révision de l’AI en 2004 et en 2008, mais aussi lors de la révision 6a en 2012. Un nombre plus élevé d’assurés ont ainsi bénéficié d’un soutien leur permettant de rester à leur poste ou assurant leur nouvelle réadaptation. Jusqu’à présent, il n’était pas possible de déterminer clairement si cet effort avait permis de maintenir durablement la capacité de gain de ces personnes ou s’il avait provoqué un transfert vers d’autres institutions de la sécurité sociale, en particulier vers l’aide sociale.

Afin de pouvoir répondre à ces questions, l’OFAS a constitué au cours des dix dernières années la base de données AS-AI-AC, qui permet d’analyser les passages entre l’aide sociale (AS), l’assurance-invalidité (AI) et l’assurance-chômage (AC). Cette base de données, actuellement gérée par l’Office fédéral de la statistique (OFS), couvre l’ensemble des personnes ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI entre 2005 et 2017. Elle s’étend désormais sur une période suffisamment longue pour rendre possibles des analyses de parcours. Le rapport de recherche « Évolution des passages de l’assurance-invalidité vers l’aide sociale », publié par l’OFAS, représente l’analyse la plus pertinente réalisée à ce jour sur cette base.

 

Davantage de demandes et de modifications de prestations de l’AI

L’étude met d’abord en évidence que le nombre de demandes de prestations déposées auprès de l’AI a augmenté d’environ un tiers entre 2005 et 2017, passant de 43 000 à 57 000. Environ un tiers des personnes ayant déposé une demande se sont vu octroyer des prestations de l’AI dans les quatre années suivantes. La nature des prestations accordées a fondamentalement changé : alors que le nombre de mesures externes de réadaptation a quasiment triplé, passant de 8% des assurés ayant déposé une demande en 2005 à 23% des assurés l’ayant fait en 2014, la part des rentes AI est quant à elle tombée, sur la même période, de 26 à 15%.

 

Davantage de personnes financièrement indépendantes

La part des personnes qui exerçaient une activité lucrative et ne touchaient pas de rente AI quatre ans après avoir déposé une demande de prestations à l’AI est passée de 50 à 58% au cours de la période considérée. Quant à la proportion de personnes tirant d’une activité lucrative un revenu supérieur à 3000 francs leur permettant de subvenir à leurs besoins, elle a progressé de 31 à 38% sur la même période. Davantage de personnes étaient ainsi financièrement indépendantes après avoir déposé une demande de prestations auprès de l’AI. Dans le même temps, la proportion de personnes ne touchant ni rente de l’AI, ni revenu d’une activité lucrative couvrant le minimum vital quatre ans après le dépôt d’une demande a, elle aussi, augmenté. De 40% parmi les assurés ayant déposé leur demande en 2006, elle a légèrement progressé pour atteindre 43% des demandes de prestations déposées en 2013.

 

Augmentation des transferts vers l’aide sociale

Dans de nombreux cas, les mesures de réadaptation de l’AI permettent aux assurés de maintenir ou de retrouver leur capacité de gain. Mais si ces assurés ne remplissent pas les conditions d’octroi d’une rente de l’AI, cela ne veut toutefois pas dire qu’ils retrouveront effectivement une place sur le marché du travail et qu’ils n’auront plus besoin d’aide. L’analyse des données AS-AI-AC met en évidence que de telles situations sont devenues plus fréquentes ces dernières années. Alors que 11,6% des assurés qui avaient déposé une demande AI en 2006 étaient tributaires de l’aide sociale quatre ans plus tard, cette proportion s’élevait à 14,5% en 2017, c’est-à-dire parmi les assurés ayant déposé une telle demande en 2013. Sur la base d’un modèle d’estimation qui élimine les facteurs externes à l’AI, on peut supposer que 5450 personnes touchaient l’aide sociale en 2017 parce qu’elles ne remplissaient plus les conditions d’octroi d’une rente AI, ceci en raison du recentrage sur la réadaptation opéré par les révisions de loi des dernières années. Ce chiffre représente environ 3% des cas d’aide sociale en 2017 ou 1,5% des 360 000 assurés ayant déposé une demande de prestations auprès de l’AI entre 2006 et 2013.

Par ailleurs, quelque 2000 personnes sont devenues tributaires de l’aide sociale au cours de la période considérée après que leur rente a été supprimée par l’AI. Cette situation pourrait toutefois s’expliquer par l’application d’une disposition de la révision 6a de l’AI qui a conduit à la révision de nombreuses rentes AI entre 2012 et 2014. Si c’est le cas, ces transferts de l’AI vers l’aide sociale représentent un phénomène uniquement temporaire. Une future analyse s’appuyant sur un ensemble encore plus large de données AS-AI-AC pourrait clarifier ce point.

 

Importance de l’évolution pour l’AI

Pour l’AI, les résultats de l’analyse montrent deux choses. Tout d’abord, la stratégie consistant à enregistrer le plus tôt possible les assurés confrontés à des problèmes de santé et à mettre en place des mesures ciblées pour maintenir leur poste de travail et leur capacité de gain s’avère juste et efficace. Ensuite, le soutien et les offres de réadaptation doivent être encore mieux conçus et mis en œuvre de façon ciblée pour réinsérer dans la vie active les assurés qui n’exercent pas (ou plus) d’activité lucrative. C’est précisément l’orientation générale adoptée pour le projet de développement continu de l’AI. Ce dernier propose de renforcer et d’étendre les mesures de réadaptation, en accordant une attention particulière aux jeunes assurés et aux assurés souffrant de troubles psychiques.

 

 

Interprétation des résultats et conclusion [extrait du Rapport de recherche OFAS 8/20]

Le nombre de personnes ayant déposé une première demande de prestations AI qui touchent l’aide sociale quatre ans plus tard a augmenté entre 2006 et 2013, tant en chiffres relatifs qu’en chiffres absolus. Du point de vue statistique, cette hausse ne s’explique ni par les changements intervenus dans la composition des demandeurs de prestations AI, ni par l’évolution des taux de chômage cantonaux. Toutes cohortes cumulées (2006-2013), quelque 36 520 personnes touchent l’aide sociale quatre ans après le dépôt de leur demande à l’AI ; on compte entre 3620 (2006) et 5720 (2013) personnes par cohorte. D’après les estimations proposées, environ un cinquième de ces bénéficiaires de l’aide sociale (21,2%, soit 7730 personnes) ne l’auraient pas perçue quatre ans après le dépôt de leur demande de prestations auprès de l’AI si le taux consolidé des rentes octroyées était resté le même qu’en 2006. Le pourcentage (maximal) de transfert calculé sur la base de ces estimations a augmenté au fil du temps : à partir de la cohorte 2009, le nombre estimé de cas de transfert par année est passé de 920 (2009 ; 20,3% de 4530) à 1650 (2013 ; 28,9% de 5720).

Le nombre de passages à l’aide sociale après une suppression de rente a également augmenté entre 2008 et 2015, donc au moins en partie avant l’entrée en vigueur, en 2012, de la 6e révision de l’AI. Statistiquement, cette hausse n’est pas liée aux changements intervenus dans la composition des personnes dont la rente a été supprimée ni à l’évolution du taux de chômage. Parmi les personnes dont la rente AI a été supprimée entre 2008 et 2015, quelque 2700 perçoivent l’aide sociale deux ans plus tard. Ici aussi, on observe une tendance à la hausse au fil des années, avec 240 cas en 2009 et environ 410 en 2015.

Une partie de ces transferts s’explique par le fait que la proportion de personnes qui se voient octroyer une rente AI et n’ont ainsi plus besoin de l’aide sociale est en diminution depuis 2010, comme l’ont montré les analyses réalisées à ce sujet. Faute de données suffisantes sur l’aide sociale datant d’avant 2010, de telles analyses ne sont possibles qu’à partir de cette année-là. L’autre partie du transfert s’explique par la hausse du nombre de nouveaux bénéficiaires de l’aide sociale au terme d’une procédure AI, qui ne peut également être observée qu’à partir de 2010.

Des calculs plus approfondis montrent en outre qu’une part proportionnellement élevée de personnes bénéficiant de l’aide sociale au terme d’une procédure AI continuent à la toucher pendant une longue période. Sur tous les nouveaux demandeurs de prestations AI de la cohorte 2006 qui perçoivent l’aide sociale en 2010, 59% en sont encore bénéficiaires pendant les quatre années suivantes, c’est-à-dire jusqu’en 2014. Pour les cohortes 2007, 2008 et 2009, cette proportion augmente légèrement, jusqu’à 61%. En comparaison, selon les indicateurs de l’aide sociale dans les villes suisses (Initiative des villes 2019, données de 14 villes), 40 à 50% des personnes dont le cas a été clôturé en 2018 ont touché l’aide sociale pendant moins d’un an, et 20 à 30% d’entre elles pendant trois ans ou plus, ces chiffres variant d’une ville à l’autre.

Pour conclure, changeons à présent de perspective pour pouvoir mieux classer les chiffres présentés selon leur signification pour l’aide sociale. Quittons le niveau des cohortes AI et passons à une vue transversale, en considérant les 175 240 unités d’assistance qui ont eu recours à l’aide sociale en 2017 selon la statistique de l’aide sociale. La question examinée est celle de savoir dans combien d’unités d’assistance pour lesquelles l’aide sociale a été perçue en 2017 se trouvent des personnes qui ont déposé une demande de prestations à l’AI entre 2006 et 2013 ou dont la rente a été supprimée entre 2008 et 2015. Du côté de l’AI, l’analyse prend en compte les quelque 279 000 personnes ayant déposé une demande entre 2006 et 2013. Environ 27 710 d’entre elles ont bénéficié de l’aide sociale en 2017, parmi lesquelles 2000 couples en ménage commun dont les deux membres ont déposé une demande auprès de l’AI. Comme l’unité d’assistance constitue l’unité de base de l’aide sociale, ces couples ne doivent être comptés qu’une seule fois ; en supprimant le double comptage des couples, il reste ainsi environ 25 710 bénéficiaires de l’aide sociale ayant déposé une demande auprès de l’AI par le passé. Près de 14,7% des 175 240 unités d’assistance qui ont touché l’aide sociale en 2017 incluaient par conséquent des personnes ayant déposé une demande auprès de l’AI entre 2006 et 2013. Outre ces personnes, on dénombre en 2017 plus de 2000 bénéficiaires de l’aide sociale dont la rente a été supprimée entre 2008 et 2015. Ce chiffre correspond à 1,1% des 175 240 unités d’assistance. Près d’une de ces unités d’assistance sur six (15,8%) correspond ainsi à des personnes soit qui ont déposé une demande de prestations auprès de l’AI auparavant (14,7%), soit dont la rente a été supprimée pendant la période mentionnée (1,1%).

En appliquant le pourcentage moyen de transfert de 21,2%, obtenu par une estimation statistique, aux 25 710 personnes qui, en 2017, touchaient l’aide sociale alors qu’elles avaient précédemment déposé une demande de prestations auprès de l’AI (en comptant les couples comme une seule personne), on arrive à 5450 personnes, soit 3,1% de l’ensemble des dossiers d’aide sociale de l’année 2017. Par ailleurs, si les suppressions de rentes intervenues entre 2008 et 2015 ayant débouché sur une perception de l’aide sociale en 2017 sont toutes assimilées à des transferts de l’AI vers l’aide sociale, soit 1,1% supplémentaires, cela représente, avec le nombre estimé de cas de transfert, un total de 4,2% des dossiers d’aide sociale pour l’année 2017.

 

Développement d’un système d’indicateurs AS-AI-AC

Sur la base des résultats des analyses mettant l’accent sur l’AI et des conclusions qui en ont été tirées, des recommandations générales sont formulées dans un rapport distinct concernant le développement du système AS-AI-AC et la création d’un système d’indicateurs destiné à surveiller la situation dans ce domaine. Ce rapport est disponible en allemand sous forme électronique sur le site de l’Office fédéral des assurances sociales :

https://www.bsv.admin.ch/bsv/home.webcode.html?webcode=D353.E059.de

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 17.11.2020 consultable ici

Rapport de recherche OFAS 8/20 « Empfehlungen zur Weiterentwicklung Indikatorensystem « SHIVALV » mit Fokus auf Entwicklung von Übertritten zwischen IV, ALV und Sozialhilfe » consultable ici (rapport en allemand, avec résumé en français, en italien et en anglais).

 

 

Publication du rapport de recherche : « Evaluation des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle »

Publication du rapport de recherche : « Evaluation des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle »

Rapport « Evaluation der Integrationsmassnahmen zur Vorbereitung auf die berufliche Eingliederung » consultable ici

 

Les mesures de réinsertion ont été introduites avec la 5e révision de l’AI et visent à préparer l’assuré à suivre des mesures d’ordre professionnel ou à réintégrer le monde du travail. L’évaluation analyse l’évolution des mesures de réinsertion depuis 2012 ainsi que celle des groupes cibles, de la mise en œuvre, des coûts et des résultats visés.

 

Avant-propos de l’Office fédéral des assurances sociales

Entrée en vigueur le 1er janvier 2008, la 5e révision de la loi sur l’assurance-invalidité a introduit, conformément au principe selon lequel la réadaptation prime la rente, deux nouveaux instruments de réadaptation professionnelle : les mesures d’intervention précoce et les mesures de réinsertion. Alors que les évaluations réalisées ces dernières années ont mis l’accent sur l’analyse de la mise en œuvre et de l’efficacité des diverses mesures de réadaptation professionnelle, le présent rapport est consacré exclusivement, et ce pour la première fois, aux mesures de réinsertion. Il analyse en détail la demande, les coûts, les caractéristiques des bénéficiaires de mesures, les contextes dans lesquels elles sont adoptées et, naturellement, les effets des mesures de réinsertion, ainsi que les facteurs de succès et les obstacles.

Comme on pouvait s’y attendre, le nombre de mesures octroyées a fortement augmenté depuis l’introduction de ces mesures et les coûts ont suivi une tendance similaire. Les résultats montrent également que le taux de succès a nettement augmenté ces dernières années. Alors qu’en 2012, quelque 52% des assurés ont achevé leur mesure de réinsertion avec succès, atteignant une capacité de travail d’au moins 50%, ce taux est passé à 65% en 2017. Ce résultat réjouissant pourra certainement encore s’améliorer grâce à l’optimisation constante des mesures de réinsertion. L’examen des effets à long terme des mesures de réinsertion montre enfin que près de 40% des assurés exercent une activité professionnelle trois ans après avoir achevé la mesure de réinsertion, la plupart réalisant un revenu qui couvre le minimum vital.

Quant aux facteurs de succès d’une réadaptation professionnelle durable, le présent rapport de recherche dresse le même tableau que nombre d’évaluations de la réadaptation professionnelle : moins il s’est écoulé de temps depuis la dernière activité professionnelle d’une personne, plus ses chances sont grandes de retrouver un emploi à l’achèvement d’une mesure de réinsertion. Les résultats montrent également que les mesures de réinsertion sont plus efficaces si au moins une partie de la mesure se déroule sur le marché primaire du travail.

Les résultats, les enseignements et les recommandations de l’étude renforcent l’orientation du Développement continu de l’assurance-invalidité et valident l’élargissement prévu des mesures telles que l’extension des mesures de réinsertion aux jeunes, l’abandon de l’impossibilité de renouveler les mesures de réinsertion au-delà d’un an ou de deux ans durant toute la vie de l’assuré et le soutien financier à de nouveaux employeurs pour des mesures de réinsertion. Les résultats du présent rapport seront repris dans les travaux en cours dans le cadre du Développement continu de l’assurance-invalidité.

 

Résumé [extraits]

La 5e révision de l’AI, en 2008, a introduit le principe des mesures de réinsertion, qui visent avant tout à préparer les personnes présentant des troubles psychiques à la réadaptation professionnelle. Les personnes assurées sont préparées petit à petit aux exigences du marché et retrouvent une capacité de travail équivalant à 50% au moins d’un temps plein. La présente évaluation analyse l’évolution des mesures de réinsertion depuis 2012 ainsi que celle des groupes cibles, de la mise en œuvre, des coûts et des résultats visés.

En 2018, 4172 assurés ont bénéficié d’une nouvelle mesure de réinsertion visant à les préparer à la réadaptation professionnelle, soit une augmentation de 68,8% par rapport à 2012. Par ailleurs, il s’agit maintenant plus fréquemment de « mesures de réinsertion proche de l’économie avec soutien sur le lieu de travail » (REST).

 

Utilisation et évolution différenciées des mesures de réinsertion en fonction des offices AI

Après une phase introductive de quatre ans, les mesures de réinsertion ont été appliquées dans l’ensemble des offices AI à partir de 2012. On constate toutefois des différences sur les plans de l’évolution et de l’utilisation des mesures : certains offices essaient de délivrer une décision de principe aussi rapidement que possible et utilisent activement les mesures de réinsertion afin d’identifier et d’accompagner les assurés assez tôt dans le processus de maladie. D’autres ont une interprétation très stricte des mesures de réinsertion et les proposent en premier lieu aux assurés ayant quitté le marché du travail depuis plus longtemps. Ils utilisent ces mesures pour déterminer le degré d’endurance et la capacité de travail des assurés et ont ensuite recours à d’autres types de mesures, notamment des mesures d’ordre professionnel, afin de réinsérer les assurés sur le marché du travail.

Par rapport à l’ensemble des nouvelles demandes à l’AI, plus de la moitié des offices AI (14) ont recours plus fréquemment que la moyenne aux mesures de réinsertion. Dans neuf offices, ce taux a fortement augmenté depuis 2012. Ces offices se distinguent par les points suivants :

  • Une part relativement élevée des mesures de réinsertion se déroulent sur le marché ordinaire du travail (>= 25%).
  • Les taux de succès sont largement supérieurs à la moyenne : plus de 70% des assurés bénéficiant de ces mesures atteignent une capacité de réadaptation professionnelle équivalant à 50% au moins d’un temps complet.
  • Depuis 2012, les coûts ont soit diminué, soit très légèrement augmenté.
  • En outre, les offices AI présentant une hausse de mesures de réinsertion nouvellement octroyées plus élevée que la moyenne (hausse de 100% ou plus) ont partiellement modifié leur pratique d’octroi et/ou introduit des mesures de promotion en la matière.

 

Mise en œuvre des mesures de réinsertion

En moyenne (médiane), il s’écoule 10 mois entre la (nouvelle) demande à l’AI et le premier recours à une mesure de réinsertion (hors bénéficiaires de rentes AI). Les assurés qui avaient encore une activité professionnelle ou étaient inscrits au chômage un an avant l’octroi des mesures de réinsertion reçoivent une décision de l’office AI après huit ou neuf mois. Cette procédure se comprend, puisque les mesures sont d’autant plus efficaces que l’intervalle de temps par rapport à la dernière activité professionnelle est court. Par contre, les personnes sans activité professionnelle, percevant des indemnités journalières de l’assurance-maladie ou l’aide sociale doivent attendre en moyenne six mois de plus entre la demande d’AI et le début des mesures de réinsertion. Or, chaque semestre supplémentaire divise par deux la probabilité de succès de ces mesures, compte tenu des autres facteurs d’influence.2 Il semble que les offices AI aient reconnu l’importance d’allouer aussi rapidement que possible, dans le cours de la maladie, des mesures de réinsertion aux assurés. La part des assurés bénéficiant déjà de ces mesures lors de la phase d’intervention précoce (IP) a nettement augmenté depuis 2016. Dans le même temps, la part des rentiers bénéficiant de mesures de réinsertion diminue sans cesse. Cependant, ces tendances varient en fonction des offices AI.

Depuis 2016, les offices AI tendent à allouer davantage de mesures de réinsertion. En moyenne, ils octroient deux mesures (sans prolongation) par assuré. Jusqu’à trois mesures, chaque mesure supplémentaire augmente la probabilité de succès, mais à partir de quatre, la hausse n’est plus significative. Combiner des mesures de réinsertion, dont la dernière sur le marché ordinaire du travail, et faire accompagner l’assuré par un coach en milieu de travail jusqu’à son retour sur ce marché offre les meilleures chances de succès.

La durée passée dans les mesures de réinsertion augmente proportionnellement au nombre de mesures. La combinaison « classique » d’entraînement à l’endurance suivi d’un entraînement progressif dure en moyenne plus de neuf mois. Lorsque les mesures de réinsertion débutent durant la phase d’IP, les assurés ont en général recours aux mesures pendant près d’un an. Chaque mois supplémentaire augmente les chances de succès d’un facteur de 1,01. Toutefois, cette progression se stabilise ou ralentit après douze mois.

 

Les interruptions surviennent principalement durant l’entraînement à l’endurance

Près d’un cinquième des mesures de réinsertion sont interrompues. En général, les assurés abandonnent déjà au cours de l’entraînement à l’endurance. Ce type de mesure est le plus fréquent à se terminer sur un échec, à savoir le fait qu’il n’est suivi par aucune autre mesure de réadaptation. L’abandon est nettement plus rare lorsque la mesure prend la forme d’une réinsertion proche de l’économie avec un soutien sur le lieu de travail. L’écart parfois important des taux d’interruption constaté entre les cinq offices AI analysés dépend notamment de la composition des groupes cibles. Les offices AI présentant une part plus élevée d’assurés ayant cessé toute activité professionnelle depuis un certain temps ont des taux plus hauts. Les mesures de réinsertion sont avant tout interrompues en raison d’une dégradation de l’état de santé, d’une absence de progrès ou d’un manque de coopération et de motivation des assurés.

 

Les mesures de réinsertion sont plus fructueuses lorsqu’elles se déroulent sur le marché ordinaire du travail

La possibilité de mettre en œuvre les mesures de réinsertion dans l’économie libre a gagné en importance ces dernières années dans les offices AI. On observe que ces derniers exercent une certaine pression sur les prestataires afin de permettre l’embauche dans l’économie libre et de soutenir les personnes bénéficiant de mesures de réinsertion dans leur recherche d’une place de travail adaptée. Mais pour réussir ce passage sur le marché ordinaire du travail, les assurés doivent d’abord être suffisamment stabilisés. Cette stabilité est atteinte en développant progressivement leur endurance dans un cadre institutionnel. Ceci fait, il semble important pour les assurés de se confronter à la réalité. Les chances de succès du retour au travail sont donc optimales lorsque les mesures de réinsertion sont mises en œuvre au plus proche de l’économie. Comme le montrent les analyses approfondies réalisées sur les cinq études de cas, l’approche des offices AI est très variable. Ces écarts s’expliquent par une interprétation plus ou moins stricte de l’objectif des mesures. Par ailleurs, la taille du territoire ou la topographie d’un canton jouent un rôle dans le fait que les mesures de réinsertion soient mises en œuvre dans une institution ou sur le marché ordinaire du travail. Les cantons plutôt urbains ou ceux présentant un taux de chômage relativement élevé privilégient les institutions ou le marché secondaire du travail. La diversité des conditions-cadres n’est toutefois pas la seule explication. Au cours des dernières années, certains offices AI ont intensifié leurs contacts avec les employeurs et développé leur réseau.

 

Hausse des dépenses corrélée à la hausse du nombre de cas

Les dépenses des mesures de réinsertion augmentent sans cesse depuis 2012, ce qui s’explique avant tout par le fait que le nombre d’assurés bénéficiant de ces mesures augmente au même rythme. Toutefois, cette corrélation linéaire n’est pas vraie pour tous les offices AI. Malgré l’augmentation du nombre de cas constatée jusqu’en 2018, certains ont réduit leurs dépenses. Il s’avère qu’ils ont recours aux mesures de réinsertion plus rapidement dans le cours de la maladie et que ces mesures se déroulent plus fréquemment sur le marché ordinaire du travail, sous la forme d’une REST.

L’augmentation des coûts varie également en fonction des offices AI. Ces coûts englobent l’ensemble des prestations spécifiques octroyées tout au long des mesures de réinsertion. Leur montant est étroitement lié à la durée et au nombre de mesures effectuées. Les offices AI où la durée moyenne des mesures a nettement augmenté au cours des dernières années présentent en général aussi une augmentation des coûts supérieure à la moyenne. Le passage des forfaits journaliers aux forfaits mensuels n’a aucune influence significative, en termes statistiques, sur la variance de l’évolution des coûts, même si, avec les forfaits mensuels, les offices AI assument un certain risque d’absence. Les forfaits journaliers, de par leur flexibilité, sont surtout utilisés dans les cas complexes comportant de nombreuses absences. Selon les gestionnaires de contrat interrogés, la hausse des coûts s’explique également par l’absence d’alternative à l’entraînement progressif, qui pourrait remplacer les mesures de réinsertion lorsque la personne a atteint une capacité de travail de 50% mais que sa performance doit être encore renforcée.

 

Solutions transitoires et passage sur le marché ordinaire de l’emploi

Depuis 2013, le taux de succès des mesures de réinsertion a augmenté de 9 points de pourcentage pour s’établir à 65% en 2017. Après avoir achevé une mesure de réinsertion, 46% des assurés atteignant une capacité de réadaptation professionnelle d’au moins 50% passent ensuite à une mesure d’ordre professionnel, et 1% à un travail de transition. Depuis 2013, la part des personnes trouvant un emploi, au moins à temps partiel, à l’issue d’une mesure de réinsertion est restée stable. Toutefois, la part des assurés s’inscrivant à l’AC après avoir complété une mesure de réinsertion (24%) a augmenté de 7%. Dans le même temps, la part des assurés percevant une rente AI entière ou partielle (sans activité professionnelle) par rapport à tous les assurés en mesure de réinsertion a diminué de 6% en 2017 pour s’établir à 12%.

Le nombre d’assurés bénéficiant d’une mesure d’ordre professionnel à l’issue d’une mesure de réinsertion est nettement plus élevé dans les cantons présentant un taux de chômage supérieur à la moyenne. La manière dont les offices AI conçoivent les mesures de réinsertion influence également le choix de la solution transitoire. Les offices utilisant ces mesures pour déterminer l’endurance et développer la capacité de travail (jusqu’à 50%) passent ensuite aux mesures d’ordre professionnel dans l’optique de renforcer cette capacité.

Le succès du retour en emploi dans l’économie libre dépend avant tout de deux facteurs : d’une part, les personnes sans activité professionnelle pendant moins d’un an avant l’octroi des mesures de réinsertion se réinsèrent plus facilement. D’autre part, les personnes ayant effectué leur dernière mesure de réinsertion sur le marché ordinaire du travail ont plus de chances de retrouver un poste.

 

Solution transitoire de la rente AI

Parmi les cohortes 2012-2017 étudiées, en moyenne 17,7% des assurés percevaient encore une rente AI au cours de l’année pendant laquelle ils ont complété une mesure de réinsertion. Pour près de 70% d’entre eux, il s’agissait d’une rente complète. En outre, environ 40% étaient des nouvelles rentes (allouées pour la première fois). La part des nouvelles rentes AI par rapport à tous les rentiers percevant encore une rente au cours de l’année de complétion d’une mesure de réinsertion a nettement augmenté ces dernières années. Cette évolution s’explique en premier lieu par le recul du nombre de rentiers bénéficiant d’une mesure de réadaptation. Il faut donc en conclure que, s’agissant des mesures de réinsertion, les offices AI privilégient de plus en plus les personnes récemment inscrites au détriment des rentiers.

 

Efficacité à moyen terme des mesures de réinsertion

Un regard sur la question de la durabilité de l’intégration au marché du travail des personnes ayant effectué une mesure de réinsertion montre que trois ans après la dernière mesure, 37% sont sur le marché du travail. La plupart disposent d’un revenu mensuel de 3000 francs ou plus. Un quart des assurés ayant complété ou interrompu une mesure trois ans auparavant perçoivent une rente AI entière, et 16% une rente partielle. En outre, 2% sont inscrits au chômage et 9% perçoivent l’aide sociale. Trois ans après avoir effectué une mesure de réinsertion, une personne sur dix n’a pas de revenu provenant d’une activité professionnelle ou des contributions du système de sécurité sociale.

 

Facteurs de succès et recommandations

Le taux de succès de la préparation des assurés à un objectif de réadaptation de 50% de la capacité de travail dépend du profil des assurés et des modalités de mise en œuvre. De plus, le type de mise en œuvre influence dans une large mesure les coûts des mesures de réinsertion. Toutefois, des facteurs « mous » tels que la collaboration des acteurs, la formulation des objectifs, le choix de la mesure de réinsertion, le suivi des assurés et l’aspect social (milieu familial, etc.) jouent également un grand rôle dans le déroulement des mesures. Les recommandations d’amélioration se fondent sur les résultats de l’évaluation et les bases légales en vigueur au moment de la rédaction du rapport. Les conditions de succès et les recommandations qui en sont issues sont résumées ci-après.

 

Profil des assurés

Les caractéristiques sociodémographiques, l’état de santé et la situation professionnelle avant l’octroi des mesures de réinsertion ont une influence déterminante sur le succès de ces dernières. Dans le même temps, les mesures devraient débuter aussi vite que possible après la (première) demande d’AI. En effet, lorsqu’il s’écoule plus de six mois entre cette demande et le début des mesures, les chances de succès sont divisées par deux. De plus, la stabilité de l’état de santé est cruciale à chaque étape des mesures de réinsertion.

Recommandation :

  1. Mettre en œuvre les mesures de réinsertion aussi rapidement que possible, en tenant compte de la stabilité de l’état de santé et des informations correspondantes (d’entente avec le médecin traitant, par ex.), avant que la personne n’ait pris trop de distance avec la vie professionnelle.
  2. Si des mesures de réinsertion sont mises en œuvre dans le cadre de la réadaptation de rentiers AI, il convient au préalable d’établir rigoureusement s’il existe réellement une chance pour ces derniers de retourner sur le marché ordinaire du travail. On utilisera pour ce faire d’autres instruments d’évaluation que les mesures de réinsertion.
  3. Les spécialistes de la réadaptation définiront les objectifs en collaboration avec les prestataires, les assurés et, si nécessaire, avec les médecins traitants, dans l’optique d’une gestion de cas globale et coordonnée. Les spécialistes de la réadaptation sont responsables de déterminer les objectifs des diverses mesures. Les objectifs sont adaptés aux besoins et à la situation des personnes concernées.

 

Modalités de mise en œuvre et durée des mesures de réinsertion

Les mesures ont les meilleures chances d’aboutir lorsqu’au moins une partie d’entre elles se déroulent sur le marché ordinaire du travail et que l’assuré est suivi par un coach en milieu de travail. La durée des mesures joue également un rôle : jusqu’à un an, chaque mois supplémentaire augmente les chances de succès de 1%. Ensuite, ces chances se stabilisent ou ralentissent nettement. De plus, il est important de préparer les assurés de manière ciblée à leur retour sur le marché du travail dès que leur état de santé est suffisamment stable. Recommandation :

  1. La préparation à la réadaptation professionnelle dans le cadre d’une mesure de réinsertion se fera par étapes, à savoir que le travail est découpé en phases et que les divers types de mesures de réinsertion sont combinés de manière réfléchie. Une partie au moins des mesures de réinsertion se dérouleront sur le marché ordinaire du travail.
  2. Les mesures de réinsertion seront organisées selon des modèles flexibles permettant aussi d’alterner entre institutions et marché du travail ou promouvant des formes intermédiaires entre institution et employeurs du marché ordinaire, et garantissant un suivi étroit des assurés et des employeurs.
  3. Si l’objectif est d’atteindre une capacité de travail de 100%, les mesures permettant de renforcer la capacité de travail à l’issue de la mesure de réinsertion font actuellement défaut. Il convient donc de les mettre sur pied, dans le cadre des mesures de réinsertion ou d’occupation.

 

Contact avec les employeurs

Les contacts personnels s’avèrent précieux quand il s’agit de présenter les possibilités de l’AI aux employeurs, d’expliquer le processus et de réduire les freins à l’embauche de personnes atteintes de maladies psychiques. Ces dernières années, quelques offices AI, notamment dans les cantons ruraux, ont pris contact avec les employeurs et développé un réseau.

Recommandation :

  1. Intensifier le contact avec les employeurs et le soutien proactif de ces derniers (échanges réguliers, information transparente ou manifestations de réseautage, etc.). Les offices AI des cantons ruraux peuvent servir de modèles de bonnes pratiques.

 

Prise en compte des facteurs non liés à l’AI

Le succès ou l’échec d’une mesure de réinsertion ne dépend pas exclusivement de la gestion du spécialiste de la réadaptation ou du prestataire : l’environnement social et la situation économique des assurés ont aussi un rôle prépondérant. Certains offices AI engagent un spécialiste du coaching en milieu de travail pour s’occuper des facteurs « non liés à l’AI ». À l’avenir, la complexité des cas continuera de croître. La nécessité d’une collaboration interinstitutionnelle augmentera donc en conséquence.

Recommandation :

  1. Les offices AI renforceront la clarification globale de la situation et tiendront compte des facteurs non liés à l’AI ou se coordonneront et entretiendront des contacts réguliers avec les services compétents pour ces problèmes.

 

Passage sur le marché ordinaire de l’emploi

Lorsque les mesures de réinsertion se déroulent en institution, le choix du prestataire est crucial ; il est, par exemple, important que les places d’entraînement au travail soient proches du marché primaire du travail. De plus, le prestataire devrait faire montre d’un certain engagement à soutenir les assurés dans leur recherche d’un poste. Les offices AI peuvent obliger les institutions à davantage axer leur offre sur le passage au marché ordinaire de l’emploi. Il est donc important que l’institution collabore avec un spécialiste de la réadaptation qui sera présent sur place. Mais garder le même interlocuteur s’avère également crucial pour un retour réussi sur le marché du travail.

Recommandation :

  1. S’agissant de la gestion des cas, il faudra s’efforcer de conserver le même interlocuteur, y compris après les mesures de réinsertion. En outre, on veillera particulièrement à proposer des places de travail adaptées aux besoins qui correspondent aux capacités ou possibilités des assurés.
  2. Il convient également de réfléchir à la meilleure manière, pour l’AI, de soutenir et d’accompagner l’assuré sur le marché ordinaire du travail à l’issue des mesures de réinsertion, par exemple pendant le temps d’essai.

 

 

Rapport n° 17/20 « Evaluation der Integrationsmassnahmen zur Vorbereitung auf die berufliche Eingliederung » consultable ici (rapport en allemand avec des résumés en français, italien et anglais)

 

 

9C_599/2019 (f) du 24.08.2020 – Valeur probante d’un rapport établi suite à un examen psychiatrique au SMR / Amélioration notable de l’état de santé psychique malgré des plaintes similaires – 17 LPGA / Effets d’une dysthymie sur la capacité de travail [et de gain] exigible – 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_599/2019 (f) du 24.08.2020

 

Consultable ici

 

Valeur probante d’un rapport établi suite à un examen psychiatrique au SMR

Amélioration notable de l’état de santé psychique malgré des plaintes similaires / 17 LPGA

Effets d’une dysthymie sur la capacité de travail [et de gain] exigible / 16 LPGA

 

Assurée, née en 1972, a travaillé pour la société B.__ du 01.01.2000 au 29.11.2011, en dernier lieu à 100% comme caissière. Après avoir bénéficié d’indemnités de l’assurance-chômage, elle a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité le 03.12.2013.

L’office AI a procédé aux investigations auprès des médecins traitants, puis soumis l’assurée à une évaluation psychiatrique auprès de son SMR les 17.08.2016 et 30.11.2016. Dans un rapport établi le 05.12.2016, la spécialiste en psychiatrie et psychothérapie du SMR a diagnostiqué – avec répercussion sur la capacité de travail – un épisode dépressif moyen avec syndrome somatique en rémission complète, ainsi que – sans répercussion sur la capacité de travail – une dysthymie et des difficultés dans les rapports avec le conjoint. Selon la psychiatre du SMR, l’assurée disposait d’une capacité de travail complète dès le 17.08.2016, tant dans son activité habituelle que dans une activité adaptée.

L’assurée a déposé un avis complémentaire de la médecin traitante et de la psychiatre traitante. Les 31.03.2017 et 06.12.2017, la spécialiste en médecine interne générale et médecin auprès du SMR a recommandé à l’office AI de suivre en l’absence d’autres éléments les conclusions de la psychiatre traitante jusqu’au 17.08.2016, puis celles de la psychiatre du SMR à compter de cette date. Par décision, l’office AI a octroyé à l’assurée une rente entière d’invalidité du 01.10.2014 au 30.11.2016, soit trois mois après l’amélioration de l’état de santé constatée par la psychiatre du SMR.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/652/2019 – consultable ici)

La cour cantonale a constaté que l’assurée présentait selon le médecin du SMR des périodes où elle se sentait un peu mieux, mais la plupart du temps, elle se décrivait comme fatiguée et déprimée, tout lui coûtait et rien ne lui était agréable. Elle ruminait et se plaignait, dormait mal, perdait confiance en elle-même, pleurait sur son sort et se positionnait dans un rôle de victime. Si l’assurée ne souffrait pas de fatigue, elle se plaignait que tout la fatiguait. Les juges cantonaux se sont étonnés que ces constatations pussent conduire le médecin du SMR à conclure à une rémission de l’état de santé de l’assurée, sans même les commenter. Ils ont jugé que ces éléments étaient suffisants pour faire douter sérieusement des conclusions du médecin du SMR et, partant, de leur valeur probante. Aussi, ils ne pouvaient affirmer qu’il y avait eu amélioration de l’état de santé de l’assurée dès août 2016.

Au contraire, selon les juges cantonaux, les conclusions du médecin du SMR constituaient une nouvelle appréciation de la capacité de travail résiduelle de l’assurée, alors que l’état de fait était resté inchangé. En effet, l’état de l’assurée décrit par le médecin du SMR correspondait plus ou moins à celui figurant dans les rapports établis par la psychiatre traitante dès 2014. Une simple appréciation différente d’un état de fait, qui, pour l’essentiel, était demeuré inchangé ne permettait dès lors pas de réviser le droit de l’assurée à une rente d’invalidité. Pour le surplus, le médecin du SMR ne pouvait sérieusement considérer que la capacité de travail de l’assurée était pleine et entière au motif que sa famille lui apportait toute l’aide dont elle avait besoin. Les conclusions de l’évaluation psychiatrique du SMR ne pouvaient par conséquent pas motiver valablement une révision du droit de l’assurée à une rente entière d’invalidité.

Par jugement du 09.07.2019, admission du recours par le tribunal cantonal et maintien de la rente entière d’invalidité au-delà du 30.11.2016.

 

TF

En l’espèce, la juridiction cantonale a retenu que la psychiatre du SMR avait procédé à des examens cliniques approfondis les 17.08.2016 et 30.11.2016. L’évaluation de la psychiatre du SMR contient de plus une description détaillée de ses observations cliniques, une présentation des diagnostics retenus, ainsi qu’une discussion sur le fonctionnement de la personnalité et l’influence de celle-ci sur la capacité de travail de l’assurée. A l’inverse de ce que la juridiction cantonale a considéré, la psychiatre du SMR expose en outre de manière claire les motifs pour lesquels elle a retenu une rémission durable de l’épisode dépressif moyen avec syndrome somatique. Elle a tout d’abord recherché les symptômes dépressifs mentionnés dans les avis de la psychiatre traitante. Puis, au terme de son évaluation, elle a nié la persistance de troubles de la mémoire, de la concentration et de l’attention, d’un ralentissement psychomoteur, d’une anhédonie, d’une fatigue, d’une augmentation de la fatigabilité (durant les entretiens), de troubles cognitifs, d’idées de culpabilité ou de persécution, d’une agoraphobie ou d’une phobie sociale. Aussi, la psychiatre du SMR a exclu de manière convaincante que l’assurée souffrit encore de signes florides de la lignée dépressive au 17.08.2016.

Quant aux reproches formulés par l’assurée à l’encontre des conclusions du psychiatre du SMR, ils se fondent exclusivement sur la manière dont elle ressent et assume elle-même sa situation. En particulier, on ne saurait reprocher à la psychiatre du SMR d’avoir tout d’abord reproduit fidèlement les plaintes de l’assurée, qui sont pour l’essentiel demeurées les mêmes depuis la perte de son emploi, puis d’évaluer objectivement leur portée pour établir la mesure de ce qui était raisonnablement exigible au sens de l’art. 7 al. 2 LPGA. En se limitant à mentionner les différences entre ses plaintes (« rien ne lui est agréable », « se sent inutile », etc.) et les constatations objectives de l’évaluation psychiatrique (absence d’anhédonie, de dévalorisation, etc.), l’assurée n’établit dès lors nullement que la psychiatre du SMR aurait ignoré des éléments cliniques ou diagnostiques essentiels, ni n’explique en quoi le point de vue de sa psychiatre traitante justifierait la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique indépendante.

Il s’ensuit que l’office AI a recueilli une évaluation psychique qui expose un changement clairement objectivé de la situation clinique de l’assurée sur le plan psychique (rémission) et, donc, une amélioration notable de sa capacité de travail dès le 17.08.2016 (au sens de l’art. 17 LPGA).

 

Il reste à examiner les effets d’une dysthymie sur la capacité de travail de l’assurée.

Selon la jurisprudence, une dysthymie est susceptible d’entraîner une diminution de la capacité de travail lorsqu’elle se présente avec d’autres affections, à l’instar d’un grave trouble de la personnalité (arrêt 9C_585/2019 du 3 juin 2020 consid. 4.1 et les références). Pour en évaluer les éventuels effets limitatifs, ces atteintes doivent en principe faire l’objet d’une procédure probatoire structurée selon l’ATF 141 V 281.

A l’issue des examens cliniques, la psychiatre du SMR a exclu l’existence d’une atteinte à la santé présentant une certaine gravité, notamment un trouble de la personnalité morbide. Elle a constaté que l’assurée disposait de plus de ressources personnelles d’adaptation au changement, de ressources mobilisables (notamment le soutien des membres de sa famille) et qu’elle adhérait à sa thérapie. Elle a retenu en outre à juste titre que l’assurée semblait tirer avantage de ses autolimitations (ménage réalisé par sa sœur ou sa fille, emplettes réalisées par sa sœur ou son mari, etc.). Contrairement à ce que la juridiction cantonale a retenu, la psychiatre du SMR n’a par ailleurs pas indiqué que l’assurée pouvait travailler parce que sa famille lui apportait de l’aide, mais qu’on pouvait attendre de l’assurée qu’elle mît à profit ses ressources personnelles afin de surmonter les autolimitations primaires et secondaires. Compte tenu de ces éléments, la juridiction cantonale s’est écartée de manière arbitraire des conclusions de l’évaluation psychiatrique du SMR. Dans la mesure où la psychiatre traitante s’est fondée dans ses différents avis médicaux sur les seules plaintes de l’assurée, sans aucune distanciation objective et sans apporter de critiques fondées quant aux constatations du SMR, l’office AI n’avait pour le surplus pas à mettre en œuvre une expertise psychiatrique indépendante (cf. ATF 143 V 409 consid. 4.5 p. 415). Aussi, avec l’aide des médecins de son SMR, l’office AI a tiré dans sa décision les conséquences qui s’imposaient des conclusions de l’évaluation psychiatrique du médecin du SMR.

Ensuite des éléments qui précèdent, il convient de retenir que l’assurée présentait une capacité de travail de 100% dans son activité habituelle à compter du 17.08.2016. La juridiction cantonale a dès lors violé le droit fédéral en maintenant le droit de l’assurée à une rente entière d’invalidité au-delà du 30.11.2016 (art. 17 LPGA et art. 88a al. 1 RAI).

 

Le TF admet le recours de l’office AI, annule le jugement cantonal et confirme la décision de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_599/2019 consultable ici

 

 

Étude sur les appareils auditifs : une fourniture toujours de bonne qualité, mais à des prix qui restent élevés

Étude sur les appareils auditifs : une fourniture toujours de bonne qualité, mais à des prix qui restent élevés

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 22.10.2020 consultable ici

 

La fourniture d’appareils auditifs remboursés par l’AI et l’AVS au moyen de forfaits est de très bonne qualité. Elle est même encore meilleure que dans le système tarifaire, qui avait cours jusqu’en 2011. Par contre, les coûts de la fourniture d’appareils auditifs dans l’AI, après un bref recul à la suite du passage au système forfaitaire, sont remontés à leur niveau antérieur. Les résultats de l’étude qui vient d’être publiée laissent à penser que l’absence de transparence sur le marché persiste. Les personnes porteuses d’un appareil auditif sont trop peu informées et pas assez sensibles aux prix. Des changements dans le domaine des moyens auxiliaires dans son ensemble, incluant une évaluation de la fourniture d’appareils auditifs, sont actuellement à l’étude dans le cadre de la réponse à un postulat. Le Conseil fédéral décidera des prochaines étapes sur la base du rapport correspondant.

L’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a publié le rapport de recherche « Analyse der Preise und der Qualität in der Hörgeräteversorgung » (analyse des prix et de la qualité de la fourniture d’appareils auditifs). Cette étude examine l’évolution des prix de la fourniture d’appareils auditifs (appareils et services) depuis 2011, année qui marque le passage à un système de remboursement forfaitaire dans l’AI et l’AVS. Avant cela, les appareils étaient remboursés selon un système tarifaire plus généreux, qui était critiqué pour ses prix bien trop élevés en comparaison avec d’autres pays européens.

L’OFAS s’attendait à ce que le nouveau système renforce la concurrence sur le marché des appareils auditifs en suscitant l’intérêt croissant des personnes assurées pour des appareils meilleur marché grâce aux nouveaux forfaits. Cela aurait permis de baisser les prix des appareils et des services et de décharger financièrement les assurances sociales sans que la qualité de la fourniture en pâtisse. Le nouveau système devait aussi accroître la possibilité d’autodétermination des personnes porteuses d’un appareil auditif en tant que consommatrices.

 

Une qualité de fourniture encore meilleure

Deux études ont été réalisées peu après le changement de système. Elles ont montré qu’à l’époque, la qualité de la fourniture d’appareils auditifs était restée élevée. La nouvelle étude constate à présent que la qualité s’est encore améliorée grâce aux progrès techniques, ce qui se traduit par un plus grand taux d’utilisation, une satisfaction encore plus élevée vis-à-vis des appareils et des services ainsi qu’une meilleure intégration ressentie dans le quotidien personnel et professionnel. Les appareils bas de gamme sont eux aussi de meilleure qualité qu’il y a dix ans. On peut aujourd’hui partir du principe que les forfaits de l’AI et de l’AVS permettent toujours de financer une fourniture adaptée aux besoins.

 

Les bénéficiaires de l’AI continuent d’acheter des appareils très chers

Il est d’autant plus étonnant que les coûts des fournitures dans l’AI reviennent aujourd’hui au niveau qu’ils avaient dans le système tarifaire. D’après les premières études, ces coûts avaient diminué de près de 6% avec le changement de système. Manifestement, les adultes assurés à l’AI continuent de choisir des appareils chers, voire encore plus chers : seuls 5% environ adoptent une fourniture sans supplément de prix.

Dans l’ensemble (AVS et AI, coûts des appareils et des services), on constate certes une baisse des coûts d’environ 9%, mais celle-ci est due à la diminution des prix des fournitures dans l’AVS et dans l’appareillage des enfants. En l’occurrence, c’est ici surtout l’étendue des prestations qui a baissé, la fourniture étant malgré tout encore plus adaptée aux besoins que dans le système tarifaire.

 

Les fournisseurs d’appareils auditifs ont encore une grande marge de manœuvre dans la fixation des prix

La présente étude a également porté sur les réparations, les cas de rigueur et l’appareillage des enfants. Le fait que les marges demandées soient plus élevées sur les appareils auditifs remis dans des cas de rigueur que sur les appareils identiques destinés à un appareillage standard indique que les centres de remise ont une grande marge de manœuvre dans la fixation des prix, et qu’il existe donc toujours des incitations négatives à pratiquer des prix trop élevés. Étonnamment, pour ce qui est de l’appareillage des enfants, 10% seulement des cas nécessitent plus de cinq séances d’adaptation, alors que ce secteur revendique une charge nettement plus élevée que pour les adultes.

 

Les assurances sociales et le milieu politique doivent contrôler plus fermement le marché des moyens auxiliaires

Les résultats de l’étude montrent qu’il est nécessaire d’agir au niveau de la fourniture d’appareils auditifs, en particulier du fait de l’absence de transparence du marché et des suppléments de prix élevés payés par les personnes assurées. Dans le cadre du postulat 19.4380 « Personnes atteintes d’un handicap. Garantir l’accès aux moyens auxiliaires modernes » de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États, des changements dans le domaine des moyens auxiliaires incluant une évaluation de la fourniture d’appareils auditifs sont actuellement étudiés. Sur la base du rapport en réponse au postulat, le Conseil fédéral décidera de la direction à prendre en matière de moyens auxiliaires.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 22.10.2020 consultable ici

Rapport de recherche 15/20 « Analyse der Preise und der Qualität in der Hörgeräteversorgung » (en allemand, résumé en français) consultable ici

 

 

Majoration de 10 francs de la rente minimale AVS/AI – Adaptation des montants limites dans la prévoyance professionnelle

Majoration de 10 francs de la rente minimale AVS/AI – Adaptation des montants limites dans la prévoyance professionnelle

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 14.10.2020 consultable ici

 

Les rentes AVS/AI seront adaptées à l’évolution des salaires et des prix au 01.01.2021. Le Conseil fédéral a pris cette décision lors de sa séance du 14.10.2020. La rente minimale AVS/AI se montera désormais à 1195 francs par mois. Parallèlement, des adaptations seront apportées dans le domaine des cotisations, pour les prestations complémentaires et dans la prévoyance professionnelle obligatoire.

Le montant de la rente minimale AVS/AI passera de 1185 à 1195 francs par mois et celui de la rente maximale, de 2370 à 2390 francs (pour une durée de cotisation complète). Les montants annuels des prestations complémentaires, destinées à couvrir les besoins vitaux, passeront de 19’450 à 19’610 francs pour les personnes seules et de 29’175 à 29’415 francs pour les couples, à 10’260 francs pour les enfants âgés de plus de 11 ans et à 7200 francs pour les enfants de moins de 11 ans.

Le montant de la cotisation minimale AVS/AI/APG pour les indépendants et les personnes sans activité lucrative passera de 496 à 500 francs par an, et celui de la cotisation minimale dans l’AVS/AI facultative de 950 à 958 francs.

En principe, le Conseil fédéral examine tous les deux ans la nécessité d’adapter les rentes de l’AVS et de l’AI. Il s’appuie, pour sa décision, sur la recommandation de la Commission fédérale AVS/AI ainsi que sur l’indice mixte, qui correspond à la moyenne arithmétique de l’indice des salaires et de l’indice des prix. La dernière adaptation des rentes par le Conseil fédéral date de 2019. Il avait alors fixé le montant de la rente minimale AVS/AI à 1185 francs.

 

Coûts de l’adaptation des rentes

Le relèvement des rentes engendrera des dépenses supplémentaires d’environ 441 millions de francs. L’AVS supportera des coûts supplémentaires à hauteur de 390 millions de francs, dont 79 millions à la charge de la Confédération (qui finance 20,20% des dépenses de l’assurance). L’AI assumera des dépenses supplémentaires de 51 millions de francs ; la Confédération ne devra supporter ici aucune charge supplémentaire, sa contribution à l’AI n’étant pas calculée en pourcentage des dépenses. L’adaptation des prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI induit, quant à elle, des dépenses supplémentaires de 1,4 million de francs pour la Confédération et de 0,8 million pour les cantons.

 

Adaptation des montants limites dans la prévoyance professionnelle

Le montant de la déduction de coordination dans le régime obligatoire de la prévoyance professionnelle passera de 24’885 à 25’095 francs, et le seuil d’entrée de 21’330 à 21’510 francs. La déduction fiscale maximale autorisée dans le cadre de la prévoyance individuelle liée (pilier 3a) passera à 6883 francs (contre 6826 aujourd’hui) pour les personnes possédant un 2e pilier et à 34’416 francs (contre 34’128) pour celles qui n’en ont pas. Ces adaptations entreront elles aussi en vigueur le 01.01.2021.

 

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 14.10.2020 consultable ici

Fiche d’information « Montants valables à partir du 01.01.2021 » disponible ici

Textes d’ordonnances (projet) et commentaires disponibles ici

 

 

«Pas assez de bons experts»: le principe aléatoire doit être introduit rapidement

«Pas assez de bons experts»: le principe aléatoire doit être introduit rapidement

 

Communiqué de presse de Inclusion Handicap du 13.10.2020 consultable ici

 

Inclusion Handicap a pris connaissance de l’enquête externe publiée aujourd’hui par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) sur les expertises de l’AI. Selon l’évaluation, qui ne tient pas suffisamment compte des avis des assurés, il existe tendanciellement un nombre insuffisant de bons experts et d’expertes. Pour Inclusion Handicap, les mesures ne vont clairement pas assez loin. Notamment le problème de la dépendance économique n’est guère résolu. C’est pourquoi il faudrait que toutes les expertises soient attribuées selon le principe aléatoire.

L’OFAS a publié deux rapports : une évaluation externe qui analyse le niveau qualitatif des expertises de l’AI, d’une part, et une analyse interne concernant la surveillance des offices AI par l’OFAS, d’autre part. Diverses mesures proposées n’apporteraient que des améliorations mineures, raison pour laquelle Inclusion Handicap les juge nettement insuffisantes.

 

Une enquête dont les assurés sont pratiquement exclus

L’analyse mentionne quelques «brebis galeuses» parmi les experts qui exploitent le système. Or, cela revient à sous-estimer l’ampleur du problème – notamment si l’on songe à l’énorme chiffre d’affaires que génèrent les experts grâce aux mandats de l’AI. S’ajoute à cela le caractère douteux du choix des expertes et experts. On ne tient de toute évidence pas suffisamment compte des voix des assurés.

Pour Inclusion Handicap, le constat suivant est clair : comme l’a montré le rapport intermédiaire concernant son Centre de déclaration, le nombre de mauvaises expertises ne relève pas simplement de quelques cas isolés. Un remède de poids visant à contrer l’arbitraire de l’AI consiste à faire appel au principe aléatoire également pour les expertises monodisciplinaires, qui représentent la majeure partie des expertises. Le statu quo ne permet pas de résoudre la problématique de la dépendance économique des experts. Inclusion Handicap demande que le principe aléatoire soit rapidement introduit pour toutes les expertises.

 

Reprise de certains cas à partir de zéro

L’évaluation en arrive à la conclusion «qu’il existe tendanciellement un nombre insuffisant de bons experts et expertes». C’est pourquoi l’OFAS propose d’améliorer l’attrait du travail des experts. A contrario, cela signifie également que par le passé, des assurés ont été victimes de «mauvais» experts. Les cas où les expertises se sont avérées de mauvaise qualité doivent être repris à partir de zéro et les «brebis galeuses» sont à retirer de la circulation.

 

Plus de conventions d’objectifs

Parallèlement, l’OFAS a publié une analyse interne sur son rôle d’autorité de surveillance des offices AI. Il renoncera désormais, à juste titre, à la pratique inacceptable qui consistait à imposer aux offices AI des objectifs quantitatifs concernant le maintien ou la réduction du nombre de rentes AI. C’est aussi un aveu qu’il s’agissait de fausses incitations qui sont préjudiciables à des procédures sans parti pris. Cette mesure fait suite, entre autres, à l’interpellation de Maya Graf, coprésidente d’Inclusion Handicap.

 

La mise en œuvre doit être suivie de près

Inclusion Handicap est néanmoins soulagée que l’on tire enfin les enseignements justes du scandale lié aux expertises. La faîtière des organisations de personnes handicapées continuera d’accompagner étroitement ce dossier. Le Centre de déclaration auquel les victimes de l’arbitraire de l’AI peuvent s’adresser reste opérationnel pour permettre le suivi de la problématique.

 

 

Communiqué de presse de Inclusion Handicap du 13.10.2020 consultable ici

 

 

AI : amélioration ciblée de la surveillance et des expertises médicales

AI : amélioration ciblée de la surveillance et des expertises médicales

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 13.10.2020 consultable ici

 

L’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) va améliorer la surveillance et la qualité des expertises médicales dans l’assurance-invalidité (AI). Il prévoit notamment de remanier les conventions d’objectifs avec les offices AI, de prendre en compte la perspective des assurés, d’exiger des expertises-test et d’améliorer le retour d’information aux experts. Ces mesures se fondent sur deux rapports portant respectivement sur la surveillance des offices AI et sur l’assurance-qualité et l’attribution des expertises médicales.

L’activité de surveillance ne doit pas être fondamentalement modifiée, conclut une analyse menée par l’OFAS sur mandat du Département fédéral de l’intérieur (DFI). Introduit en 2008 lors de la 5e révision de l’AI, le système actuel met à disposition des instruments et des procédures adaptés afin de garantir une exécution de l’AI uniforme et conforme à la loi. Toutefois, l’analyse révèle que ces instruments pourraient faire l’objet d’améliorations ciblées.

L’activité de surveillance ne doit pas être fondamentalement modifiée, conclut une analyse menée par l’OFAS sur mandat du Département fédéral de l’intérieur (DFI). Introduit en 2008 lors de la 5e révision de l’AI, le système actuel met à disposition des instruments et des procédures adaptés afin de garantir une exécution de l’AI uniforme et conforme à la loi. Toutefois, l’analyse révèle que ces instruments pourraient faire l’objet d’améliorations ciblées.

 

Conventions d’objectifs et système d’indicateurs

Cette amélioration concerne principalement les conventions d’objectifs avec les offices AI. Aujourd’hui, celles-ci portent avant tout sur des aspects quantitatifs, tels que le taux de nouvelles rentes ou l’évolution de l’effectif des rentes. À l’avenir, elles seront davantage axées sur le pilotage et le contrôle de la qualité de l’exécution : des aspects tels que la qualité des examens médico-assurantiels ou le point de vue des assurés sur les services fournis par les offices AI seront notamment pris en compte.

Les indicateurs utilisés actuellement par l’OFAS pour analyser l’évolution de l’AI et en tirer des objectifs seront également revus et développés. En effet, ils ne permettent pas, par exemple, d’obtenir des données précises sur l’efficacité des mesures de réadaptation d’un office AI ou sur la durée totale de la procédure AI. Actuellement, il n’existe pas d’indicateurs pour évaluer l’appréciation des assurés ou la gestion des réclamations. Désormais, des enquêtes régulières seront menées auprès des assurés pour s’enquérir de leur point de vue. En outre, l’impact de la jurisprudence sur l’exécution de l’AI sera analysé de manière plus systématique.

 

Qualité du travail des offices AI (ch. 4.2, 4.2.2 et 4.2.3 du rapport « Analyse de la surveillance des offices AI » du 13.10.2020)

La qualité du travail des offices AI est décisive pour le bon déroulement de l’instruction, le succès de la réadaptation des assurés et la prise de décisions conformes à la loi. Afin de répondre à ces exigences de qualité, des prescriptions étendues existent d’ores et déjà. Elles sont spécifiées dans les directives et les circulaires à l’intention des offices AI et leur application est garantie par les SMQ et SCI de ces mêmes offices. Le respect de ces prescriptions est régulièrement contrôlé dans les audits.

Désormais, une plus grande attention est portée à trois aspects :

  • la qualité des mesures d’instruction médico-assurantielle,
  • la perspective des assurés concernés, et
  • l’analyse systématique des décisions de justice en vue d’identifier les améliorations requises dans les procédures des offices AI.

Le point de vue des assurés (perspective des assurés) doit être davantage pris en compte lorsqu’il s’agit d’évaluer la qualité du travail des offices AI. Cela passe d’une part par un recensement et une analyse systématiques des réclamations et de leur traitement par les différents offices AI. En parallèle, l’OFAS enregistre aussi systématiquement les réclamations qui lui parviennent. D’autre part, une enquête régulière doit être menée auprès des assurés concernés afin de s’enquérir de leur satisfaction à l’égard des services des offices AI. Dans ces deux domaines, il convient de définir des objectifs et des valeurs cibles, qui peuvent être intégrés dans les conventions d’objectifs avec les offices AI.

Les décisions de justice sont d’ores et déjà systématiquement enregistrées et font l’objet de comparaisons intercantonales réalisées par l’OFAS. À l’heure actuelle, ce monitoring n’est toutefois pas utilisé pour analyser la qualité du travail des offices AI et initier des mesures d’amélioration. En règle générale, chaque office AI dispose en outre d’un monitoring interne. Le monitoring et l’analyse systématique des jugements cantonaux et des arrêts du Tribunal fédéral concernant les divers types de prestations et la qualité du travail des offices AI (de l’évaluation médicale notamment) doivent par conséquent être développés et mieux coordonnés entre l’OFAS et les offices AI.

 

Assurance-qualité des expertises médicales [cf. également ch. 4.2.1 du rapport « Analyse de la surveillance des offices AI » du 13.10.2020]

Pour déterminer si une personne a droit à des prestations de l’AI, une expertise médicale est souvent nécessaire. Afin de garantir une qualité élevée, le DFI a chargé au printemps l’institut Interface, en collaboration avec le service de psychiatrie forensique de l’Université de Berne, d’évaluer le système des expertises et l’attribution des mandats.

Cette évaluation avait pour objectif de clarifier les rôles et les responsabilités des différents acteurs dans le domaine des expertises. Il s’agissait en premier lieu d’analyser par quelles mesures les offices AI et l’OFAS pourraient améliorer la qualité et le mode d’attribution des expertises. Les chercheurs ont formulé plusieurs recommandations en vue d’améliorer la qualité du travail des offices AI et les mesures d’instruction médico-assurantielle.

  • Créer une commission indépendante chargée de l’assurance-qualité et de l’habilitation des experts dans le cadre du développement continu de l’AI
  • Mettre en place une commission indépendante chargée de l’assurance-qualité et de l’habilitation
  • Définir des critères pour l’habilitation
  • Optimiser les principes d’attribution et garantir la transparence (améliorer le principe d’attribution aléatoire et procédure d’accord pour les expertises monodisciplinaires)
  • Optimiser l’attribution aléatoire des expertises pluridisciplinaires
  • Assurer la transparence sur l’attribution : liste relative à l’attribution d’expertises aux experts par les offices AI
  • Demander obligatoirement des expertises test
  • Accroître la transparence des expertises à l’aide d’enregistrements sonores
  • Examiner des mesures permettant de réduire le recours à des expertises externes
  • Développer les exigences matérielles et juridiques applicables à la qualité des expertises au moyen de cercles de qualité
  • Renforcer encore le développement de la qualité au travail

Par le biais d’instructions, l’OFAS impose aux offices AI d’appliquer les recommandations proposées lors de l’attribution d’expertises et du contrôle de la qualité dans la procédure probatoire structurée.

Les autres recommandations formulées par les chercheurs se recoupent avec les mesures adoptées entre-temps par le Parlement dans le cadre de la réforme « Développement continu de l’AI », qui seront mises en œuvre à partir de 2022. Une commission indépendante sera notamment constituée pour assurer la qualité des expertises médicales et accréditer les experts, l’attribution des expertises deviendra transparente et l’entretien d’expertise fera l’objet d’un enregistrement sonore.

En 2021, l’OFAS mettra en œuvre d’autres recommandations par le biais de directives à l’intention des offices AI. À l’avenir, ces derniers devront en particulier demander des expertises-test et améliorer les retours aux experts en les informant systématiquement des arrêts des tribunaux.

 

Examen du principe d’attribution aléatoire pour les expertises monodisciplinaires

Par ailleurs, l’OFAS souhaite continuer d’améliorer le système d’attribution des mandats pour les expertises médicales monodisciplinaires. Pour ce faire, il mettra en place un monitoring trimestriel de la pratique d’attribution et examinera, en collaboration avec les offices AI, comment ces mandats pourraient être répartis de manière aléatoire, comme c’est déjà le cas pour les expertises pluridisciplinaires. Pour les expertises bidisciplinaires, le principe de l’attribution aléatoire sera introduit dans le cadre du Développement continu de l’AI.

 

Information du public (ch. 4.2 et 4.2.3 du rapport « Analyse de la surveillance des offices AI » du 13.10.2020)

Le fonctionnement du système de l’AI, notamment en termes de surveillance et de pilotage, ainsi que les activités de l’assurance-invalidité doivent faire l’objet d’une communication plus active et détaillée qu’aujourd’hui. Dans ce cadre, il est envisageable de souligner les tâches accomplies par l’OFAS en sa qualité d’organe de surveillance afin de garantir que les assurés bénéficient des prestations auxquelles ils ont droit. Une telle communication fondée sur un concept ad hoc devrait être développée en étroite collaboration avec le secteur « Communication » du DFI et de l’OFAS ainsi qu’avec le concours des organes d’exécution. Les informations statistiques, uniformisées et centralisées (OFAS, OAI), constituent l’instrument principal de mise en œuvre de la mesure. L’OFAS en finalise la synthèse et procède à l’analyse de la situation annuellement.

Le reporting actif est en outre conforme à l’orientation générale adoptée dans le cadre de la modernisation de la surveillance dans le 1er pilier, selon laquelle il convient de consolider et de renforcer les rapports rédigés par le Conseil fédéral sur la base de l’art. 76 LPGA. À l’avenir, le Conseil fédéral entend présenter de manière explicite dans ces rapports les risques systémiques des différentes assurances sociales et commenter son pilotage stratégique des assurances sociales.

 

Communiqué de presse de l’OFAS du 13.10.2020 consultable ici

Rapport « Analyse de la surveillance des offices AI » du 13.10.2020 disponible ici

Fiche d’information « Amélioration ciblée de la surveillance des offices AI » du 13.10.2020 disponible ici

Fiche d’information « Amélioration ciblée de la qualité des expertises médicales » du 13.10.2020 disponible ici

Rapport de l’institut Interface et du service de psychiatrie forensique de l’Université de Berne « Evaluation der medizinischen Begutachtung in der Invalidenversicherung » (Expertenbericht vom 10.8.2020 / rapport d’experts, seulement en allemand) disponible ici