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9C_659/2024 (f) du 20.02.2025 – Assistance judiciaire – Droit à l’assistance d’un avocat – 61 let. f LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_659/2024 (f) du 20.02.2025

 

Consultable ici

 

Assistance judiciaire – Droit à l’assistance d’un avocat / 61 let. f LPGA

Le fait que la partie adverse est assistée d’un avocat ne suffit pas en tant que tel pour admettre la nécessité de l’assistance d’un avocat

 

Assuré, né en 1960, est assuré pour l’assurance obligatoire des soins auprès d’une caisse-maladie. Par décision du 18.03.2024, confirmée sur opposition, la caisse-maladie a prononcé la mainlevée définitive de l’opposition formée par l’assuré dans le cadre de la poursuite n° xxx, à concurrence de CHF 4’891.40, montant comprenant des primes et participations aux coûts d’assurance-maladie (CHF 4’817.40), ainsi que des frais de poursuite (CHF 74).

 

Procédure cantonale

L’assuré a déféré la décision sur opposition au tribunal cantonal et sollicité le bénéfice de l’assistance judiciaire. Par décision du 14.11.2024, la juridiction cantonale a mis l’assuré au bénéfice de l’assistance judiciaire partielle, limitée à la dispense des avances de frais et de sûretés ainsi que des émoluments de justice.

 

TF

Consid. 2.2
Le refus de l’assistance judiciaire et de la désignation d’un avocat d’office est susceptible de causer un préjudice irréparable lorsqu’une avance de frais doit être fournie dans un court délai (ATF 128 V 199 consid. 2b) ou lorsque le requérant est amené à devoir défendre ses intérêts sans l’assistance d’un mandataire (ATF 129 I 129 consid. 1.1; 129 I 281 consid. 1.1; arrêt 8C_480/2016 du 17 novembre 2016 consid. 1.4 ss). En l’espèce, la juridiction cantonale a mis l’assuré au bénéfice de l’assistance judiciaire partielle, limitée à la dispense des avances de frais et de sûretés ainsi que des émoluments de justice. La requête ne porte donc que sur le droit à l’assistance d’un avocat.

Consid. 3.2
La décision attaquée se fonde sur les art. 61 let. f LPGA et 2 de la loi valaisanne du 11 février 2009 sur l’assistance judiciaire (LAJ-VS; RS/VS 177.7), qui traitent des conditions du droit à l’assistance judiciaire, ainsi que sur les garanties minimales en la matière offertes par l’art. 29 al. 3 Cst. De manière générale, dans le domaine des assurances sociales, les conditions d’octroi du droit à l’assistance judiciaire en procédure cantonale sont réalisées si le requérant est indigent, si l’assistance d’un avocat est nécessaire ou du moins indiquée et si les conclusions du recours ne paraissent pas d’emblée vouées à l’échec (ATF 140 V 521 consid. 9.1 et les références; cf. aussi arrêt 9C_566/2020 du 16 juin 2021 consid. 6.2).

Si la juridiction cantonale a admis que l’assuré remplissait la condition d’indigence et que le recours formé contre la décision sur opposition du 23.07.2024 n’apparaissait pas d’emblée dénué de chances de succès, elle a toutefois nié que la désignation d’un avocat d’office fût nécessaire. Elle a justifié son point de vue en indiquant que ni la procédure applicable ni le litige qui lui était soumis ne soulevaient de difficultés particulières, sous l’angle des faits ou du droit.

Consid. 3.3
En ce que l’assuré se réfère à l’art. 118 CPC, soit à une disposition qui régit les conditions du droit à l’assistance judiciaire en matière civile, son argumentation est mal fondée. La question de l’assistance, nécessaire ou du moins indiquée, d’un avocat pour la procédure cantonale en matière d’assurance sociale, où la maxime inquisitoire s’applique (art. 61 let. c LPGA), doit être tranchée d’après les circonstances concrètes objectives et subjectives, en examinant si l’affaire soulève des difficultés en fait et en droit telles que la personne assurée n’est pas en mesure de les résoudre seule, comme l’a dûment rappelé l’instance précédente. Pratiquement, il faut se demander pour chaque cas particulier si, dans des circonstances semblables et dans l’hypothèse où le requérant ne serait pas dans le besoin, l’assistance d’un avocat serait judicieuse, compte tenu du fait que l’intéressé n’a pas lui-même des connaissances juridiques suffisantes et que l’intérêt au prononcé d’un jugement justifierait la charge des frais qui en découle (arrêt I 127/07 du 7 janvier 2008 consid. 4.2; cf. aussi ATF 125 V 32 consid. 4b; 103 V 46 consid. b, 98 V 115 consid. 3a et les références). Le fait que la partie adverse est assistée d’un avocat ne suffit dès lors pas en tant que tel pour admettre la nécessité de l’assistance d’un avocat.

Pour le surplus, en se limitant à affirmer que l’aide d’un avocat pourrait lui être précieuse, étant donné qu’il est étranger et qu’il ne maîtrise que partiellement les différentes lois suisses, l’assuré ne prend pas position sur les motifs qui ont conduit la juridiction cantonale à nier dans son cas la nécessité de l’aide d’un avocat, ni ne démontre en quoi celle-ci aurait fait une application arbitraire du droit cantonal ou violé l’art. 61 let. f LPGA ou l’art 29 al. 3 Cst. Il n’explique en particulier nullement en quoi sa cause soulèverait des difficultés particulières – sous l’angle des faits ou du droit – rendant nécessaire l’assistance d’un avocat. Partant, le recours ne répond pas aux exigences des art. 42 al. 1 et 2 et 106 al. 2 LTF sur ce point. Il est mal fondé pour le reste.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré dans la mesure où il est recevable.

 

Arrêt 9C_659/2024 consultable ici

 

9C_411/2024 (f) du 11.02.2025 – Notification de la décision à la personne assurée sans copie au mandataire – Tardiveté du recours

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_411/2024 (f) du 11.02.2025

 

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Notification de la décision à la personne assurée sans copie au mandataire – Tardiveté du recours / 37 LPGA – 49 al. 3 LPGA – 56 LPGA – 60 al. 1 LPGA

Versement par l’office AI de l’arrérage des rentes peu après l’envoi de la décision – Principe de la bonne foi

 

Invoquant les suites incapacitantes d’une chute survenue le 19 octobre 2012, l’assurée, née en 1976, infirmière à temps partiel, a sollicité l’octroi de prestations de l’assurance-invalidité le 13 mars 2014. Au terme de son instruction, l’office AI a informé l’assurée qu’il allait lui accorder trois quarts de rente pour la période limitée comprise entre le 01.09.2014 et le 31.01.2015 par projet de décision du 30.08.2021.

L’assurée a contesté ce projet et demandé plusieurs prolongations de délai pour compléter son argumentation. Si l’office AI a accepté la première demande, il a rejeté les suivantes et informé l’assurée le 31 janvier 2022 que la décision serait prochainement notifiée. Par décision du 18.02.2022, adressée directement à l’assurée (et non à son mandataire), l’office AI a confirmé l’octroi des trois quarts de rente pour la période limitée précitée. En réponse à des demandes – la première datée du 27.06.2022 – l’invitant à notifier sans délai la décision attendue, l’office AI a transmis une copie de cette décision au mandataire de l’assurée par lettre du 05.09.2022. Il a aussi admis l’irrégularité de la notification mais a nié la nécessité de procéder à une nouvelle notification par lettre du 29.09.2022.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 260/22 – 195/2024 – consultable ici)

Par jugement du 24.06.2024, le tribunal cantonal a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté.

 

TF

Consid. 4 [résumé]
Le tribunal cantonal a reconnu l’irrégularité de la notification de la décision administrative à l’assurée. Cependant, il a estimé que plusieurs éléments auraient dû alerter l’assurée et son mandataire. Premièrement, la décision avait été envoyée au domicile de l’assurée, qui avait également reçu un versement de CHF 7’225 dans les dix jours qui avaient suivi le prononcé de la décision. Le tribunal cantonal a jugé que l’assurée aurait dû en informer son mandataire dans un délai raisonnable. Deuxièmement, compte tenu de son expérience en matière de procédure et de pratique administrative, le mandataire n’aurait pas dû attendre jusqu’en juin 2022 pour s’enquérir de la notification, annoncée à trois reprises entre novembre 2021 et janvier 2022. La cour cantonale a considéré que cette attente n’était pas conforme à une bonne gestion du mandat. Par conséquent, la transmission d’une copie de la décision au mandataire le 05.09.2022 ne pouvait être considérée comme une nouvelle notification marquant le début du délai de recours. Le tribunal a donc conclu que le recours déposé le 06.10.2022 était tardif et, par conséquent, irrecevable.

Consid. 6
Manifestement infondé, au sens de l’art. 109 al. 2 let. a LTF, le recours de l’assurée doit être rejeté selon la procédure simplifiée prévue à l’art. 109 al. 3 LTF.

Il importe effectivement peu en l’occurrence de savoir si l’assurée a concrètement reçu – ou pas – la décision du 18.02.2022, comme elle le laisse entendre, ni d’examiner si la connaissance de la procédure et de la pratique administrative auraient dû faire réagir le mandataire bien avant la transmission de la copie de la décision, ou même du mois de juin 2022. En effet, le versement par l’office AI des CHF 7’225, correspondant aux trois quarts de rente d’invalidité accordés pour la période courant du 01.09.2014 au 31.01.2015, permet de trancher le litige.

Selon les constatations cantonales, l’assurée a reçu les CHF 7’225 dans les dix jours suivant le prononcé de la décision administrative. La cour cantonale a en l’espèce considéré que l’assurée aurait dû chercher à déterminer les raisons et la provenance de ce versement en se renseignant auprès de son représentant. L’assurée n’admet ni ne conteste avoir reçu le montant en question. Dans la mesure où l’assurée ne prend pas position sur ce qui s’apparente à une motivation alternative de la part de la juridiction cantonale, on pourrait se poser la question de la recevabilité du recours (cf. ATF 138 I 197 consid. 4.1.4 et les références). Cette question peut cependant rester ouverte parce qu’il est manifeste que le versement de l’office AI était un élément qui permettait de soupçonner l’existence de la décision dans la mesure où le projet de décision annonçait à l’assurée le versement de trois quarts de rente pour la période du 01.09.2014 au 31.01.2015. Or, selon la jurisprudence citée par les juges cantonaux (cf. ATF 139 IV 228 consid. 1.3 et les références), en vertu du principe de la bonne foi, qui limite l’invocation d’une notification irrégulière, l’intéressée est tenue de se renseigner sur l’existence et le contenu de la décision dès qu’elle peut en soupçonner l’existence sous peine de se voir opposer l’irrecevabilité d’un éventuel recours pour cause de tardiveté.

Dans ces circonstances, l’assurée ne peut pas invoquer la notification irrégulière pour justifier la date du dépôt de son recours. Dans la mesure où les CHF 7’225 ont été versés dans les dix jours qui ont suivi le 18.02.2022, le recours interjeté le 06.10.2022 était largement tardif car l’assurée aurait pu et dû réagir dès le mois de mars 2022.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée dans la mesure où il est recevable.

 

Arrêt 9C_411/2024 consultable ici

 

8C_290/2024 (f) du 31.01.2025 – Opposition par un mandataire – Procuration et représentation – Examen du formalisme excessif

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_290/2024 (f) du 31.01.2025

 

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Opposition par un mandataire – Procuration et représentation – Examen du formalisme excessif / 52 LPGA – 10 OPGA – 29 al. 1 Cst.

 

Le 10.11.2022, l’assurance-accidents a adressé à A.__ Sàrl une décision-facture après révision de 129’923 fr. 65. Ce montant correspondait aux primes d’assurance contre les accidents professionnels et non professionnels du personnel emprunté par A.__ Sàrl, que l’assurance-accidents considérait comme dépendant de cette société.

Le 25.11.2022, B., représentant A. Sàrl « dans les litiges », a rencontré deux collaborateurs de l’assurance-accidents pour obtenir des explications sur la décision-facture. Lors de cet entretien, il a été informé que la seule option était de faire opposition à la facture et de prouver les faits. B.__ a formé opposition le 28.11.2022, en joignant une procuration l’autorisant à « avoir accès à tout document officiel concernant leur comptabilité générale ainsi que tout document extra en prévoyance de l’expertise commerciale qui a été ordonnée par la société précitée ». Par courrier A Plus du 01.12.2022, l’assurance-accidents a imparti à B.__ un délai au 16.12.2022 pour attester ses pouvoirs au moyen d’une procuration impliquant expressément le pouvoir de former opposition, en précisant que, à défaut de production dans le délai imparti, l’opposition serait considérée comme irrecevable. Selon les informations de suivi des envois fournies par la poste, ledit courrier a été distribué le 02.12.2022 à 10 heures 11 (mention « zugestellt durch », sans autre précision).

Par décision sur opposition du 03.01.2023, l’assurance-accidents a déclaré irrecevable l’opposition du 28.11.2022 au motif que la procuration demandée n’avait pas été remise dans le délai imparti. Par courriers des 04.01.2023 et 16.01.2023, B.__ a produit la procuration requise et a demandé que l’opposition soit prise en considération, au motif qu’il n’avait jamais reçu le courrier du 01.12.2022.

 

Procédure cantonale (arrêt 605 2023 22 – consultable ici)

Le 02.02.2023, représentée par son avocat, A.__ Sàrl a déposé un recours contre la décision sur opposition du 03.01.2023 en concluant à son annulation. Par arrêt du 11.04.2024, le tribunal cantonal a admis le recours et renvoyé la cause à la l’assurance-accidents pour nouvelle décision.

 

TF

Consid. 4.1 [résumé]
Sans se prononcer sur la présence d’éventuels indices concrets d’une erreur de distribution du courrier A Plus, le tribunal cantonal a estimé que l’opposition du 28.11.2022 avait été déposée au nom de A.__ Sàrl, malgré l’absence de procuration spécifique. Cette conclusion se base sur plusieurs éléments : l’assurance-accidents avait adressé son courrier uniquement à B.__, reconnaissant implicitement sa qualité de représentant ; lors de l’entretien préalable, les collaborateurs de l’assurance-accidents n’avaient pas remis en question les pouvoirs de B.__ ; dans une procédure parallèle, la caisse de compensation avait également demandé une procuration spécifique à B.__, mais par pli recommandé et avec copie à A.__ Sàrl. La cour cantonale a souligné que l’assurance-accidents aurait pu se renseigner auprès de la caisse de compensation concernant la procuration avant de déclarer l’opposition irrecevable, étant donné la coordination entre les deux entités.

Consid. 4.2 [résumé]
Le tribunal cantonal a relevé que la volonté de A.__ Sàrl de faire opposition était évidente, comme en témoigne un entretien téléphonique du 07.12.2022 avec l’assurance-accidents, où la société avait demandé de suspendre la facture pendant la procédure d’opposition. Les juges cantonaux ont constaté un manque de communication interne à l’assurance-accidents entre les gestionnaires du dossier, qui n’avaient jamais remis en cause le pouvoir de représentation de B.__, et la juriste chargée de traiter l’opposition, qui avait constaté l’insuffisance de la procuration. Le tribunal cantonal a conclu que ce dysfonctionnement interne de l’assurance-accidents, considéré comme contraire à la bonne foi et constituant un formalisme excessif, ne devait pas être imputé à A.__ Sàrl.

Consid. 5.1
Il y a formalisme excessif (constitutif d’un déni de justice formel prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst.) lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l’accès aux tribunaux (ATF 149 IV 9 consid. 7.2; 149 III 12 consid. 3.3.1; 145 I 201 consid. 4.2.1; 142 V 152 consid. 4.2; 142 IV 299 consid. 1.3.2). Les limitations appliquées au droit d’accès à un tribunal, notamment en ce qui concerne les conditions de recevabilité d’un recours, ne doivent pas restreindre l’accès ouvert à l’individu d’une manière ou à un point tel que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même. En outre, les limitations considérées ne se concilient avec l’art. 6 par. 1 CEDH que si elles poursuivent un but légitime et s’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. En ce sens, si le droit d’exercer un recours est bien entendu soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter à la fois un excès de formalisme qui porterait atteinte à l’équité de la procédure et une souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédures établies par la loi (ATF 149 IV 9 consid. 7.2).

Consid. 5.3.1
 Contrairement à l’avis des juges cantonaux, l’assurance-accidents était en droit d’exiger une procuration écrite du mandataire de A.__ Sàrl, conformément à l’art. 37 al. 2 LPGA (cf. ATF 104 Ia 403 consid. 4e; arrêts 9C_533/2022 du 10 février 2023 consid. 5.2; 6B_388/2022 du 8 mai 2023 consid. 2.3; 2C_545/2021 du 10 août 2021 consid. 2.1; 5A_561/2016 du 22 septembre 2016 consid. 3.3; 2C_55/2014 du 6 juin 2014 consid. 5.3.1). Pour autant que cette exigence de procuration ait été valablement notifiée, l’assurance-accidents était également en droit de s’en tenir à cette exigence en dépit de l’appel téléphonique du 07.12.2022 lors duquel la procédure d’opposition a été directement évoquée avec A.__ Sàrl. Il n’y a pas lieu d’y voir un formalisme excessif. Par ailleurs, le fait que des collaborateurs de l’assurance-accidents se soient entretenus auparavant avec B.__ ou aient échangé avec A.__ Sàrl n’y change rien. Même en admettant que l’assurance-accidents avait connaissance de la volonté de A.__ Sàrl de former opposition, elle était tout de même en droit d’exiger une procuration écrite de son mandataire. Le recours doit être admis sur ce point.

Consid. 5.3.2
Les juges cantonaux ont laissé ouverte la question de savoir si la preuve de la notification de la demande de procuration écrite avait été rapportée. Il s’agissait toutefois d’une question décisive pour se prononcer sur le recours dont ils étaient saisis, étant donné qu’aucun formalisme excessif ne pouvait être reproché à l’assurance-accidents. En l’espèce, le Tribunal fédéral est tenu de statuer sur la base des faits établis par l’autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF; cf. consid. 2.1 supra), ce qui rend nécessaire un renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu’elle se prononce sur cet aspect.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents.

 

Arrêt 8C_290/2024 consultable ici

 

9C_533/2022 (f) du 10.02.2023 – Demande par le tribunal cantonal d’une procuration actualisée en faveur de l’avocat – Pas de formalisme excessif / 29 al. 1 Cst.

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_533/2022 (f) du 10.02.2023

 

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Demande par le tribunal cantonal d’une procuration actualisée en faveur de l’avocat – Pas de formalisme excessif / 29 al. 1 Cst.

 

Le 25.08.2022, l’office AI n’est pas entré en matière sur la nouvelle demande de prestations de l’assurance-invalidité déposée par l’assurée le 26.09.2019.

 

Procédure cantonale

Le 26.09.2022, l’avocat, déclarant agir pour l’assuré, a formé un recours contre cette décision devant le Tribunal administratif.

Par ordonnance du 27.09.2022, le juge instructeur du Tribunal administratif a constaté que le recours était accompagné d’une procuration datée du 22.11.2010 et a invité l’assuré à lui faire parvenir une nouvelle procuration actualisée et se référant au litige jusqu’au 11.10.2022. Il a attiré l’attention de l’intéressée que le recours serait déclaré irrecevable, sans réponse dans le délai imparti ou en cas de réponse ne satisfaisant pas aux exigences de l’art. 15 al. 1 et 3 de la loi bernoise du 23 mai 1989 sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA/BE; RSB 155.21).

Statuant le 14.10.2022, le juge unique du Tribunal administratif a déclaré le recours irrecevable, au motif que la procuration requise n’avait pas été produite jusqu’alors.

 

TF

Le litige porte sur le point de savoir si le Tribunal administratif pouvait déclarer le recours irrecevable au motif que l’avocat qui déclarait agir au nom de l’assurée n’avait pas produit de procuration écrite actualisée dans le délai imparti à cet effet par la cour cantonale.

Consid. 4
Invoquant une violation du principe de l’interdiction du formalisme excessif (art. 29 al. 1 Cst.), l’assurée fait valoir que son avocat la défendait « depuis des années » et que l’office AI avait adressé et notifié la décision de première instance à son avocat directement. Comme le Tribunal administratif n’avait pas exigé une nouvelle procuration ou une procuration « actuelle », mais seulement une « procuration actualisée », elle soutient que l’autorité précédente ne doutait pas que son avocat agissait pour son compte. L’absence de procuration « actualisée » ne pouvait dès lors pas entraîner l’irrecevabilité du recours. Qui plus est, l’avance des frais de procédure avait été versée en temps utile.

Consid. 5.1
Le formalisme excessif est un aspect particulier du déni de justice prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst. Il est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l’accès aux tribunaux (ATF 145 I 201 consid. 4.2.1 et les références). Selon la jurisprudence, commet un déni de justice formel et viole l’art. 29 al. 1 Cst. l’autorité qui n’entre pas en matière dans une cause qui lui est soumise dans les formes et délai prescrits, alors qu’elle devrait s’en saisir (ATF 142 II 154 consid. 4.2 et les références). Il peut en résulter une violation de la garantie de l’accès au juge ancrée à l’art. 29a Cst. Cette disposition donne en effet le droit d’accès à une autorité judiciaire exerçant un pouvoir d’examen complet sur les faits et le droit (arrêt 1C_515/2020 du 10 février 2021 consid. 2.1 et les références). Cette garantie ne s’oppose cependant pas aux conditions de recevabilité habituelles d’un recours ou d’une action (ATF 143 I 344 consid. 8.2 et les références). De manière générale, la seule application stricte des règles de forme n’est pas constitutive de formalisme excessif (arrêt 9C_354/2022 du 26 septembre 2022 consid. 3.1 et les références).

Consid. 5.2
De l’interdiction du formalisme excessif, la jurisprudence a déduit l’obligation pour l’autorité, en présence d’un mémoire signé d’un mandataire ne justifiant pas de ses pouvoirs, d’accorder un délai convenable pour réparer le vice; l’autorité ne saurait refuser d’emblée d’entrer en matière (ATF 104 Ia 403 consid. 4e; 94 I 523; 92 I 13 consid. 2; arrêts 2C_545/2021 du 10 août 2021 consid. 2.1; 1B_65/2021 du 12 mars 2021 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral considère en revanche qu’une autorité judiciaire ne tombe pas dans le formalisme excessif lorsqu’après avoir invité la partie recourante, par l’intermédiaire de son mandataire, à transmettre une procuration et l’avoir informée des conséquences du défaut de production sur l’issue de son recours, elle prononce une décision d’irrecevabilité (arrêts 2C_55/2014 du 6 juin 2014 consid. 5.3.1; 5A_812/2011 du 21 janvier 2013 consid. 3.2).

Consid. 5.3
En l’espèce, le juge instructeur du Tribunal administratif a avisé par écrit l’assurée le 27.09. 2022, par l’entremise de l’avocat qui avait formé recours à son nom, qu’il lui fallait déposer une procuration écrite actualisée d’ici au 11.10.2022, à défaut de quoi le recours serait déclaré irrecevable. Comme il le relève devant le Tribunal fédéral et à l’inverse de ce que soutient l’assurée, il pouvait requérir, s’il l’estimait nécessaire compte tenu de l’ancienneté de la procuration annexée au recours cantonal (datée du 22.11.2010), une telle procuration actualisée, sans pour autant que sa demande relève dans le cas présent du formalisme excessif (cf. arrêt 9C_793/2013 du 27 mars 2014 consid. 1.2 et les références). Le simple fait que l’avocat avait déjà produit un tel document devant cette autorité ne dispensait par ailleurs pas l’assurée de répondre à cette invitation expresse – conforme aux règles de la procédure cantonale (cf. art. 15 et 32 s. LPJA/BE) – dans le délai imparti (arrêt 1C_237/2019 du 17 mai 2019 consid. 2.2 et les références). Il n’appartient pas à la partie requise de ne pas obtempérer au motif que, de son point de vue, la requête serait trop formaliste parce que le pouvoir de représentation ne ferait pas de doute. Dans la mesure où l’assurée n’a pas donné suite à cette invitation, ni demandé une prolongation dudit délai, il y a lieu de considérer, sur le vu de la jurisprudence (consid. 5.2), que l’instance précédente n’a pas fait preuve de formalisme excessif en déclarant le recours irrecevable.

Quoi qu’en pense l’assurée, le fait qu’elle a payé à temps l’avance de frais ne permet enfin pas une autre appréciation. L’autorité précédente a en effet expressément exigé, par ordonnance du 27.09.2022, une procuration actualisée. Elle a ainsi clairement indiqué qu’elle n’accepterait pas d’autorisation de représentation implicite (à ce sujet, voir arrêt 5A_561/2016 du 22 septembre 2016 consid. 2). L’appréciation de l’autorité précédente ne prête par conséquent pas le flanc à la critique.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_533/2022 consultable ici

 

9C_239/2022 (f) du 14.09.2022 – Notification de la décision uniquement à l’assuré dûment représenté par un avocat / Notification irrégulière – 49 al. 3 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_239/2022 (f) du 14.09.2022

 

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Notification de la décision uniquement à l’assuré dûment représenté par un avocat

Protection des parties garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité / 49 al. 3 LPGA

 

Assuré, né en 1964, a déposé une nouvelle demande de prestations de l’assurance-invalidité le 23.12.2019. Le 28.06.2021, il a annoncé à l’office AI qu’il était représenté par un avocat, mandataire auprès de qui il a élu domicile. Par décision du 14.01.2022, adressée directement à l’assuré, l’office AI a nié le droit de l’intéressé à une rente de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 22.03.2022, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3
En instance fédérale, compte tenu des motifs et des conclusions du recours, il s’agit de savoir si la notification irrégulière de la décision du 14.01.2022 a entraîné un préjudice pour l’intéressé, ce qui devrait selon lui conduire à l’annulation du prononcé litigieux.

Consid. 4.1
La juridiction cantonale a constaté que l’office AI avait à tort notifié la décision du 14.01.2022 directement à l’assuré, alors qu’il avait valablement élu domicile en l’étude de son conseil. La notification irrégulière n’avait cependant pas empêché l’avocat de l’assuré de déposer un recours le 09.02.2022, soit environ une semaine avant l’échéance du délai de recours. Une copie de la décision du 14.01.2022 avait par ailleurs été annexée au recours cantonal. Aussi, comme l’assuré, par son avocat, s’était limité à invoquer un vice de forme, sans exposer de motifs contre le rejet de sa demande de prestations de l’assurance-invalidité, il n’y avait pas lieu d’examiner d’autres questions. En l’absence de toute argumentation sur le fond, le recours devait être rejeté et la décision du 14.01.2022 confirmée.

Consid. 4.2
Invoquant une violation des art. 37 et 49 al. 3 LPGA, en lien avec son droit d’être entendu et une appréciation arbitraire des preuves, l’assuré reproche à la juridiction cantonale d’avoir retenu que la notification de la décision du 14.01.2022 avait atteint son but malgré la notification irrégulière. Il soutient qu’il n’avait pas à subir le « raccourcissement » du délai de recours ensuite de la notification irrégulière.

Consid. 5.1
L’art. 49 al. 3 LPGA, à teneur duquel la notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé, consacre un principe général du droit qui concrétise la protection constitutionnelle de la bonne foi et les garanties conférées par l’art. 29 al. 1 et 2 Cst. (cf. ATF 145 IV 259 consid. 1.4.4; 144 II 401 consid. 3.1 et les références).

Cependant, la jurisprudence n’attache pas nécessairement la nullité à l’existence de vices dans la notification: la protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité (arrêts 2C_1010/2020 du 26 février 2021 consid. 4.3; 8C_130/2014 du 22 janvier 2015 consid. 2.3.2 publié in SJ 2015 I 293). Il y a lieu d’examiner, d’après les circonstances du cas concret, si la partie intéressée a réellement été induite en erreur par l’irrégularité de la notification et a, de ce fait, subi un préjudice. Il convient à cet égard de s’en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l’invocation du vice de forme (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa; arrêt 9C_863/2013 du 9 mai 2014 consid. 3.2). En vertu de ce principe, l’intéressé est tenu de se renseigner sur l’existence et le contenu de la décision dès qu’il peut en soupçonner l’existence, sous peine de se voir opposer l’irrecevabilité d’un éventuel moyen pour cause de tardiveté (ATF 139 IV 228 consid. 1.3 et les références).

Dans l’hypothèse particulière où la partie représentée par un avocat reçoit seule l’acte, il lui appartient de se renseigner auprès de son mandataire de la suite donnée à son affaire, au plus tard le dernier jour du délai de recours depuis la notification (irrégulière) de la décision litigieuse; le délai de recours lui-même court dès cette date (arrêts 9C_266/2020 du 24 novembre 2020 consid. 2.3; 2C_1021/2018 du 26 juillet 2019 consid. 4.2 et les références).

Consid. 5.2
En l’espèce, l’ancien mandataire de l’assuré a pu prendre connaissance de la décision du 14.01.2022 et interjeter un recours contre celle-ci, moyen que l’autorité cantonale a jugé recevable quant au délai à respecter. Il est donc manifeste que la protection juridique recherchée par les règles sur la notification d’une décision et le contenu de celle-ci a été atteinte malgré les vices dénoncés. Quoi qu’il en dise – en invoquant le dommage subi en raison du refus de prestations de l’assurance-invalidité -, l’assuré ne subit pas de préjudice en raison de l’irrégularité de la notification en question. Au demeurant, on peut attendre d’un avocat qu’il connaisse la jurisprudence selon laquelle le délai de recours court dès la connaissance par le mandataire de la décision irrégulièrement notifiée à la partie directement (ce qui peut conduire cas échéant à déposer valablement un recours plus de 30 jours après la notification irrégulière). Les arrêts auxquels l’assuré fait référence le rappellent du reste expressément (ATF 99 V 177 consid. 3; arrêt 9C_529/2013 du 2 décembre 2013 consid. 4; arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 14 mai 2019 consid. 1, RJN 2019 p. 662). Enfin, l’assuré ne prétend pas, du moins pas d’une manière conforme aux exigences de motivation (art. 42 al. 2 LTF), qu’il était formaliste à l’excès de retenir qu’il avait choisi de limiter ses griefs en instance cantonale au seul vice de notification. La juridiction cantonale n’a ainsi, pas violé le droit d’être entendu de l’assuré en traitant le seul point invoqué.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

Arrêt 9C_239/2022 consultable ici

 

9C_57/2020 (f) du 16.02.2021 – Notification de décisions de prestations complémentaires envoyées à l’assuré incapable de discernement, dépourvu de représentant légal / Vice de procédure particulièrement grave – Décisions entachées de nullité

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_57/2020 (f) du 16.02.2021

 

Consultable ici

 

Notification de décisions de prestations complémentaires envoyées à l’assuré incapable de discernement, dépourvu de représentant légal

Vice de procédure particulièrement grave – Décisions entachées de nullité

Pas de représentation de l’assuré par l’établissement où il séjourne, qui s’occupe de ses affaires, est autorisé à requérir les prestations complémentaires au nom de l’assuré et à les percevoir

 

Assuré, né en 1971, souffre d’un retard mental et réside au Village de D.__ depuis septembre 2001, où la Fondation D.__ (ci-après : la fondation) accueille des personnes en situation de handicap. A partir du 01.01.2001, il a bénéficié de prestations complémentaires fédérales et cantonales à sa rente de l’assurance-invalidité (décision du Service des prestations complémentaires [ci-après : le SPC] du 03.01.2001), puis, uniquement de prestations complémentaires fédérales, depuis le 01.01.2009 (décision du 12.12.2008). Dès son arrivée au Village de D.__, les décisions d’octroi de prestations complémentaires lui ont été envoyées à l’adresse de la fondation.

Entre le 04.12.2015 et le 22.02.2016, la fondation a informé à 3 reprises le SPC qu’elle avait constaté, en remplissant la dernière demande de révision périodique, que le prix de pension pris en compte à titre de dépenses reconnues dans toutes les décisions de prestations complémentaires rendues depuis le 01.01.2012 avait été fixé à 47’450 fr., alors que le prix de pension s’était en réalité élevé à un montant supérieur. Le SPC a expliqué qu’en raison d’une erreur de saisie informatique commise en 2001, le prix de pension n’avait pas été adapté depuis lors, et que la situation allait être corrigée pour le futur, à compter de janvier 2016, conformément aux principes régissant la reconsidération des décisions entrées en force. Après que la fondation a requis du SPC qu’il rendît une décision formelle, celui-ci a répondu que dans la mesure où la fondation n’était pas concernée par la prise en compte d’un prix de pension erroné, que l’assuré ou ses représentants légaux ne s’étaient pas manifestés auprès de lui et que les décisions erronées étaient entrées en force, il n’entrerait pas en matière sur la demande de reconsidération pour la période antérieure au 01.01.2016.

A la suite du décès de la mère de l’assuré, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant a instauré une curatelle de portée générale en faveur de l’intéressé (ordonnance du 30.09.2016). Par l’intermédiaire de l’avocate mandatée par ses co-curateurs, l’assuré a demandé au SPC de constater la nullité de toutes les décisions rendues à son égard de 2001 à 2015, au motif que celles-ci ne lui avaient pas été valablement notifiées. Le 19.06.2018, le SPC a confirmé son refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération pour la période antérieure à janvier 2016. Dans la mesure où le courrier du 19.06.2018 ne présentait pas les caractéristiques que doit revêtir une décision, la mandataire de l’assuré a prié le SPC de rendre une décision répondant aux exigences légales.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/1092/2019 – consultable ici)

Le 17.08.2018, l’assuré a formé « recours » contre la « décision » du 19.06.2018 devant le tribunal cantonal compétent.

Par jugement du 26.11.2019, la juridiction cantonale a rejeté la demande d’appel en cause de la fondation, déclaré irrecevable le recours en tant qu’il est dirigé contre un refus de reconsidération du SPC, et l’a rejeté pour le surplus.

 

TF

On constate que les décisions rendues par le SPC entre 2001 et 2015 ont bien été adressées à l’assuré, à son lieu de résidence à la fondation.

Il ressort des constatations des juges cantonaux que l’assuré était incapable de discernement et n’a jamais pu s’occuper de ses affaires administratives, ce que celui-ci fait précisément valoir, et que le SPC ne conteste pas (sur la capacité de discernement, cf. ATF 144 III 264 consid. 6 p. 271 ss; arrêt 8C_538/2017 du 30 novembre 2017 consid. 3). Il ne dispose dès lors pas de l’exercice des droits civils (art. 13 CC a contrario et 17 CC; ATF 77 II 7 consid. 2 p. 9; arrêt 5A_81/2015 du 28 mai 2015 consid. 4.1), et n’était donc pas en mesure de désigner un représentant volontaire (art. 32 CO), par exemple en la personne d’un de ses parents. L’assuré n’a pas non plus eu de représentants légaux une fois devenu majeur, avant que ne soit instaurée une curatelle en sa faveur à la suite du décès de sa mère survenu en juillet 2016. On ajoutera qu’il n’a apparemment pas fait l’objet d’une mesure maintenant l’autorité parentale au sens de l’art. 385 al. 3 aCC (dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2012, RO 1977 237; cf. aussi art. 14 al. 2 Tit. fin. CC).

A la lecture du jugement entrepris, on constate que si la cour cantonale a admis que les décisions avaient été valablement notifiées à l’assuré, à son adresse à la fondation, elle n’a pas abordé la question de la représentation de l’assuré.

En l’occurrence, le fait qu’en sa qualité d’établissement où séjourne l’assuré et qui s’occupe en permanence de ses affaires, la fondation soit autorisée à requérir les prestations complémentaires au nom de l’assuré (art. 20 al. 1 OPC-AVS/AI en relation avec l’art. 67 al. 1 RAVS), à percevoir directement ces prestations (art. 20 al. 1 LPGA, 1 al. 2 OPGA et 22 al. 1 LPCC) et à se voir notifier les décisions y relatives (art. 10 RPFC et 12 al. 3 RPCC-AVS/AI) n’implique pas qu’elle fût également habilitée à représenter l’assuré en ce qui concerne les prestations complémentaires. En l’absence de pouvoir de représentation, la fondation n’était pas autorisée à recevoir de façon valable, sur le plan juridique, des décisions de prestations complémentaires au nom et pour le compte de l’assuré. A cet égard, on rappellera que la légitimation du tiers de contester des décisions de manière indépendante et en son propre nom (cf. ATF 138 V 292 consid. 4.3.1 p. 297; 130 V 560 consid. 4.3 p. 568; arrêt 8C_338/2013 du 12 août 2013 consid. 3.2) n’entraîne pas un pouvoir de représentation.

On constate ainsi que les décisions de prestations complémentaires rendues par le SPC entre 2001 et 2015 et envoyées à l’assuré, à son adresse à la fondation, ont été notifiées à une personne incapable de discernement, qui était dépourvue de représentant légal. En conséquence, lesdites décisions ne sont pas parvenues valablement à l’assuré (cf., sur la condition de la capacité de discernement pour recevoir une déclaration de volonté entraînant des effets juridiques, voire un acte juridique, BUCHER/AEBI-MÜLLER, in Berner Kommentar, Zivilgesetzbuch, Art. 11-19d ZGB, 2e éd. 2017, n. 86 ad art. 12 CC). Or en présence d’un vice de procédure particulièrement grave, les décisions sont entachées de nullité. A cet égard, il n’y a lieu d’admettre la nullité, hormis les cas expressément prévus par la loi, qu’à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d’annulabilité n’offre manifestement pas la protection nécessaire; entrent principalement en considération comme motifs de nullité de graves vices de procédure ainsi que l’incompétence qualifiée de l’autorité qui a rendu la décision. La nullité d’un acte étatique doit être relevée d’office par toute autorité (ATF 130 III 430 consid. 3.3 p. 434; 122 I 97 consid. 3a/aa p. 98 s. et les références; arrêt 5A_364/2012 du 20 décembre 2012 consid. 5.2.1). Compte tenu de l’importance de la protection des personnes incapables de discernement, la nullité des décisions en cause doit être constatée (cf. arrêts U 485/06 du 19 juillet 2007 consid. 2; K 66/89 du 28 août 1990 consid. 3c/ee), également sous l’angle de la sécurité du droit (ATF 132 II 21 consid. 3.1 p. 27 et les arrêts cités).

Au vu de la nullité des décisions rendues entre 2001 et 2015 par le SPC à l’égard de l’assuré, la cause doit lui être renvoyée pour qu’il statue à nouveau sur le droit de celui-ci à des prestations complémentaires pour la période antérieure au 01.01.2016 conformément aux dispositions légales, notamment celles sur l’extinction du droit aux prestations.

 

 

Le TF admet le recours de l’assuré, annule le jugement cantonal et renvoie la cause au SPC pour qu’il statue à nouveau sur le droit aux prestations complémentaires de l’assuré pour la période antérieure à 2016.

 

 

Arrêt 9C_57/2020 consultable ici

 

 

9C_273/2016 (f) du 05.10.2016 – Recours tardif au Tribunal cantonal contre une décision notifiée à l’assuré et non à son représentant – 60 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_273/2016 (f) du 05.10.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2honBZC

 

Recours tardif au Tribunal cantonal contre une décision notifiée à l’assuré et non à son représentant – 60 LPGA

 

Par décision du 20.07.2015 2015, l’office AI a octroyé une rente entière d’invalidité du 01.12.2012 au 31.03.2014. Cette décision a été notifiée directement à l’assuré, lequel était représenté par Me Hervé Bovet.

 

Procédure cantonale

Le 22.03.2016, l’assuré a recouru contre cette décision. Par jugement du 05.04.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal, au motif qu’il était manifestement tardif.

 

TF

Le tribunal cantonal a considéré que le recours de l’assuré déposé le 22.03.2016 contre la décision du 20.07.2015 était manifestement tardif. Il a retenu que si la notification de la décision de l’office AI directement au recourant était certes irrégulière, elle n’était pas susceptible d’entraîner la nullité de la décision. En effet, l’assuré aurait dû faire preuve de la diligence requise et informer son représentant de l’existence de cette décision dans un délai de 30 jours (arrêt 9C_741/2012 du 12 décembre 2012 consid. 2). L’assuré n’a vraisemblablement transmis l’information à son représentant que durant le mois de février 2016. La juridiction cantonale a considéré que le fait que l’assuré ne lisait pas le français ne modifiait en rien son devoir de diligence ; il lui appartenait d’autant plus de se renseigner sans attendre sur le contenu des documents qu’il avait reçus et n’aurait pas compris.

En l’occurrence, les premiers juges n’ont pas fait preuve d’arbitraire en retenant que le devoir de diligence du recourant n’était pas diminué mais au contraire renforcé par le fait qu’il ne lisait pas le français. On peut effectivement supposer qu’en cas de réception d’un courrier rédigé dans une langue qu’il ne connaît pas, le destinataire cherche à en comprendre le contenu ou, à tout le moins, s’informe sur l’éventuelle suite à y donner. Aussi, dans la mesure où l’assuré avait requis des prestations (demande de rente déposée le 29 juin 2012) et avait reçu un projet de décision l’informant de l’octroi d’une rente limitée dans le temps (datée du 3 mars 2015) – ce qui l’a motivé à confier la défense de ses intérêts à un avocat – il devait s’attendre à ce qu’une décision relative à sa demande allait être rendue. Ainsi, même s’il n’était pas en mesure de lire et de comprendre le contenu de la décision, il était raisonnablement exigible de sa part qu’il s’informât auprès de son représentant, d’autant que le montant de la rente octroyée ainsi que les dates correspondantes – identiques à celles du projet de décision – figuraient sur le document. Conformément aux règles de la bonne foi, il ne pouvait pas simplement ignorer la décision et ne rien entreprendre pour la contester (arrêt 9C_85/2011 du 17 janvier 2012 consid. 6.2). Finalement, la juridiction cantonale ne s’est pas contentée de prétendre qu’un assuré devrait contacter son avocat à chaque courrier qu’il reçoit s’il n’en comprend pas le contenu. Elle a fait application des principes jurisprudentiels en la matière et constaté qu’en l’espèce, il pouvait raisonnablement être attendu de sa part qu’il informe son représentant.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_273/2016 consultable ici : http://bit.ly/2honBZC

 

 

8C_216/2012 (f) du 05.04.2013 – Représentation – 37 LPGA / Notification de la décision à l’assuré et non au mandataire – 49 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_216/2012 (f) du 05.04.2013

 

Consultable ici : http://bit.ly/20F2BRP

 

Représentation – 37 LPGA

Notification de la décision à l’assuré et non au mandataire – 49 LPGA

 

Faits

Le 8 décembre 2008, une assurée a été victime d’une agression au moment de la fermeture du magasin dont elle était la gérante. L’assurance-accidents a pris en charge le cas.

Le 3 février 2009, l’assurée a conclu un mandat de représentation par lequel elle a chargé l’entreprise C., représentée par H., de la représenter et de défendre ses intérêts. Par courrier du 19 mai 2009, auquel était jointe cette procuration, le prénommé a demandé à L’assurance-accidents d’attester par écrit que les prestations allouées à sa mandante constituaient des indemnités versées en faveur d’une victime d’agression. Cette attestation avait pour but d’obtenir l’annulation de la saisie effectuée par l’Office des poursuites de Neuchâtel sur une partie des prestations allouées.

Après expertise pluridisciplinaire au Centre X., L’assurance-accidents a adressé à l’assurée personnellement un courrier intitulé « droit d’être entendu », par lequel elle a fixé la reprise du travail à 50% dès le 3 août 2009 et à 100% à partir du 1er septembre suivant. L’intéressée ne s’est pas déterminée sur ce mode de résolution du cas.

Par décision du 28 août 2009, adressée personnellement à l’assurée, l’assurance-accidents a supprimé son droit à l’indemnité journalière à compter du 1er octobre 2009.

Lors d’un entretien téléphonique, le 16 octobre 2009, l’assurée a fait part à l’assurance-accidents de son étonnement au sujet d’un courrier du 9 octobre précédent par lequel l’assureur-accidents avait indiqué que la décision du 28 août 2009 était devenue définitive et exécutoire.

Le 26 octobre 2009, H. a sollicité une nouvelle notification de la décision du 28 août 2009 en faisant valoir que sa mandate n’avait pas pu réagir à cette décision en raison d’un état psychologique désastreux et que, partant, la première notification était entachée d’un vice de forme. Par courrier du 29 octobre 2009, l’assurance-accidents a indiqué ne pas avoir été informée du fait que le mandat de représentation concernait également la procédure relative à l’assurance-accidents et que, partant, la décision avait été valablement notifiée à l’assurée personnellement.

 

Représentation – 37 LPGA

Lorsqu’il reçoit personnellement une communication de l’assureur social, l’assuré représenté est en droit de penser que celle-ci est aussi parvenue à son représentant et qu’il peut s’abstenir d’agir personnellement (UELI KIESER, ATSG-Kommentar, 2ème éd. 2009, n. 14 ad art. 37).

La notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé (art. 49 al. 3, 3ème phrase, LPGA). Cependant, la jurisprudence n’attache pas nécessairement la nullité à l’existence de vices dans la notification. La protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité. Il convient à cet égard de s’en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l’invocation du vice de forme. Ainsi l’intéressé doit agir dans un délai raisonnable dès qu’il a connaissance, de quelque manière que ce soit, de la décision qu’il entend contester (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa p. 99; 111 V 149 consid. 4c p. 150 et les références; RAMA 1997 n°U 288 p. 442, U 263/96, consid. 2b/bb). Cela signifie notamment qu’une décision, fût-elle notifiée de manière irrégulière, peut entrer en force si elle n’est pas déférée au juge dans un délai raisonnable (SJ 2000 I p. 118, 1P.485/1999). En vertu de son devoir de diligence, il appartient à la partie à qui la décision a été directement notifiée de se renseigner auprès de son mandataire – dont l’existence est connue de l’autorité – de la suite donnée à son affaire, au plus tard le dernier jour du délai de recours. Aussi, la jurisprudence considère-t-elle qu’il y a lieu de faire courir dès cette date le délai dans lequel une partie est tenue d’attaquer une décision qui n’a pas été notifiée à son représentant (DTA 2002 n° 9 p. 65, C 196/00, consid. 3a et la référence).

Le mandat de représentation confié à C. était rédigé de manière très générale. C’est pourquoi le seul fait que par son courrier du 19 mai 2009 adressé à L’assurance-accidents, C. requérait une attestation écrite afin d’obtenir l’annulation de la saisie de salaire effectuée par l’office des poursuites ne permet pas d’interpréter de manière restrictive la portée de cette procuration. En particulier, il n’est pas conforme à la situation de fait de limiter cette portée à la procédure en matière de poursuite, cela d’autant moins que la lettre du 19 mai 2009 avisait L’assurance-accidents que le mandat de représentation s’étendait à diverses démarches administratives, termes qui englobent bien évidemment aussi une procédure en matière d’assurance-accidents obligatoire.

Par ailleurs, les premiers juges ont retenu qu’après la conclusion du mandat de représentation, l’intéressée avait toujours agi seule dans ses démarches avec L’assurance-accidents et ils semblent inférer de ce fait une révocation de la procuration. Ce point de vue ne saurait être partagé. La représentation dans la procédure en matière d’assurances sociales, au sens de l’art. 37 LPGA, ne s’oppose pas à ce que l’assuré représenté adresse personnellement des communications à l’assureur (UELI KIESER, op. cit., n. 14 ad art. 37). Aussi de telles communications ne sauraient-elles être assimilées à une révocation de la procuration au sens de l’art. 37 al. 3 LPGA.

L’assurance-accidents a donc adressé à tort à l’assurée personnellement sa décision du 28 août 2009. Aussi l’intéressée était-elle en droit de penser que ce prononcé était aussi parvenu à son représentant, de sorte qu’elle ne saurait subir un préjudice du fait qu’elle s’est abstenue d’agir personnellement. Comme son représentant a réagi à cette décision le 26 octobre 2009, soit dans le délai de 30 jours à compter du dernier jour du délai de recours, il y a lieu de considérer que l’assurée a satisfait à son devoir de diligence. C’est pourquoi l’assurance-accidents n’était pas en droit, par sa décision sur opposition du 22 mars 2010, de refuser d’entrer en matière sur les moyens soulevés le 26 octobre 2009 par le représentant de l’assurée contre la suppression de son droit à prestations.

La cause est renvoyée à l’assurance-accidents pour qu’elle entre en matière et statue sur l’opposition valablement formée à sa décision du 28 août 2009.

 

 

Arrêt 8C_216/2012 consultable ici : http://bit.ly/20F2BRP