8C_216/2012 (f) du 05.04.2013 – Représentation – 37 LPGA / Notification de la décision à l’assuré et non au mandataire – 49 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_216/2012 (f) du 05.04.2013

 

Consultable ici : http://bit.ly/20F2BRP

 

Représentation – 37 LPGA

Notification de la décision à l’assuré et non au mandataire – 49 LPGA

 

Faits

Le 8 décembre 2008, une assurée a été victime d’une agression au moment de la fermeture du magasin dont elle était la gérante. L’assurance-accidents a pris en charge le cas.

Le 3 février 2009, l’assurée a conclu un mandat de représentation par lequel elle a chargé l’entreprise C., représentée par H., de la représenter et de défendre ses intérêts. Par courrier du 19 mai 2009, auquel était jointe cette procuration, le prénommé a demandé à L’assurance-accidents d’attester par écrit que les prestations allouées à sa mandante constituaient des indemnités versées en faveur d’une victime d’agression. Cette attestation avait pour but d’obtenir l’annulation de la saisie effectuée par l’Office des poursuites de Neuchâtel sur une partie des prestations allouées.

Après expertise pluridisciplinaire au Centre X., L’assurance-accidents a adressé à l’assurée personnellement un courrier intitulé « droit d’être entendu », par lequel elle a fixé la reprise du travail à 50% dès le 3 août 2009 et à 100% à partir du 1er septembre suivant. L’intéressée ne s’est pas déterminée sur ce mode de résolution du cas.

Par décision du 28 août 2009, adressée personnellement à l’assurée, l’assurance-accidents a supprimé son droit à l’indemnité journalière à compter du 1er octobre 2009.

Lors d’un entretien téléphonique, le 16 octobre 2009, l’assurée a fait part à l’assurance-accidents de son étonnement au sujet d’un courrier du 9 octobre précédent par lequel l’assureur-accidents avait indiqué que la décision du 28 août 2009 était devenue définitive et exécutoire.

Le 26 octobre 2009, H. a sollicité une nouvelle notification de la décision du 28 août 2009 en faisant valoir que sa mandate n’avait pas pu réagir à cette décision en raison d’un état psychologique désastreux et que, partant, la première notification était entachée d’un vice de forme. Par courrier du 29 octobre 2009, l’assurance-accidents a indiqué ne pas avoir été informée du fait que le mandat de représentation concernait également la procédure relative à l’assurance-accidents et que, partant, la décision avait été valablement notifiée à l’assurée personnellement.

 

Représentation – 37 LPGA

Lorsqu’il reçoit personnellement une communication de l’assureur social, l’assuré représenté est en droit de penser que celle-ci est aussi parvenue à son représentant et qu’il peut s’abstenir d’agir personnellement (UELI KIESER, ATSG-Kommentar, 2ème éd. 2009, n. 14 ad art. 37).

La notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé (art. 49 al. 3, 3ème phrase, LPGA). Cependant, la jurisprudence n’attache pas nécessairement la nullité à l’existence de vices dans la notification. La protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité. Il convient à cet égard de s’en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l’invocation du vice de forme. Ainsi l’intéressé doit agir dans un délai raisonnable dès qu’il a connaissance, de quelque manière que ce soit, de la décision qu’il entend contester (ATF 122 I 97 consid. 3a/aa p. 99; 111 V 149 consid. 4c p. 150 et les références; RAMA 1997 n°U 288 p. 442, U 263/96, consid. 2b/bb). Cela signifie notamment qu’une décision, fût-elle notifiée de manière irrégulière, peut entrer en force si elle n’est pas déférée au juge dans un délai raisonnable (SJ 2000 I p. 118, 1P.485/1999). En vertu de son devoir de diligence, il appartient à la partie à qui la décision a été directement notifiée de se renseigner auprès de son mandataire – dont l’existence est connue de l’autorité – de la suite donnée à son affaire, au plus tard le dernier jour du délai de recours. Aussi, la jurisprudence considère-t-elle qu’il y a lieu de faire courir dès cette date le délai dans lequel une partie est tenue d’attaquer une décision qui n’a pas été notifiée à son représentant (DTA 2002 n° 9 p. 65, C 196/00, consid. 3a et la référence).

Le mandat de représentation confié à C. était rédigé de manière très générale. C’est pourquoi le seul fait que par son courrier du 19 mai 2009 adressé à L’assurance-accidents, C. requérait une attestation écrite afin d’obtenir l’annulation de la saisie de salaire effectuée par l’office des poursuites ne permet pas d’interpréter de manière restrictive la portée de cette procuration. En particulier, il n’est pas conforme à la situation de fait de limiter cette portée à la procédure en matière de poursuite, cela d’autant moins que la lettre du 19 mai 2009 avisait L’assurance-accidents que le mandat de représentation s’étendait à diverses démarches administratives, termes qui englobent bien évidemment aussi une procédure en matière d’assurance-accidents obligatoire.

Par ailleurs, les premiers juges ont retenu qu’après la conclusion du mandat de représentation, l’intéressée avait toujours agi seule dans ses démarches avec L’assurance-accidents et ils semblent inférer de ce fait une révocation de la procuration. Ce point de vue ne saurait être partagé. La représentation dans la procédure en matière d’assurances sociales, au sens de l’art. 37 LPGA, ne s’oppose pas à ce que l’assuré représenté adresse personnellement des communications à l’assureur (UELI KIESER, op. cit., n. 14 ad art. 37). Aussi de telles communications ne sauraient-elles être assimilées à une révocation de la procuration au sens de l’art. 37 al. 3 LPGA.

L’assurance-accidents a donc adressé à tort à l’assurée personnellement sa décision du 28 août 2009. Aussi l’intéressée était-elle en droit de penser que ce prononcé était aussi parvenu à son représentant, de sorte qu’elle ne saurait subir un préjudice du fait qu’elle s’est abstenue d’agir personnellement. Comme son représentant a réagi à cette décision le 26 octobre 2009, soit dans le délai de 30 jours à compter du dernier jour du délai de recours, il y a lieu de considérer que l’assurée a satisfait à son devoir de diligence. C’est pourquoi l’assurance-accidents n’était pas en droit, par sa décision sur opposition du 22 mars 2010, de refuser d’entrer en matière sur les moyens soulevés le 26 octobre 2009 par le représentant de l’assurée contre la suppression de son droit à prestations.

La cause est renvoyée à l’assurance-accidents pour qu’elle entre en matière et statue sur l’opposition valablement formée à sa décision du 28 août 2009.

 

 

Arrêt 8C_216/2012 consultable ici : http://bit.ly/20F2BRP

 

 

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