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Lettre d’information LAMal de l’OFSP – Nouveautés au 01.01.2024

Lettre d’information LAMal de l’OFSP – Nouveautés au 01.01.2024

 

Lettre d’information du 15.12.2023 de l’OFSP aux assureurs LAMal, à leurs réassureurs et à l’Institution commune LAMal consultable ici

 

  1. Modifications d’ordonnance
  • Contribution de LR sur la modification d’ordonnances du 22.9.23 (modification OAMal/OPAS : mesures relatives aux médicaments, y compris remboursement dans des cas particuliers)

Le 22 septembre 2023, le Conseil fédéral a adopté le train d’ordonnances «Mesures relatives aux médicaments, modification de l’OAMal et de l’OPAS». Les nouvelles dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2024.

En ce qui concerne la prise en charge dans des cas particuliers, les modifications améliorent l’égalité de traitement entre assurés tout en allégeant la charge administrative des assureurs. Cette amélioration est obtenue par l’obligation d’utiliser un outil uniforme pour évaluer le bénéfice avec des catégories de bénéfices définies. De plus, la possibilité d’une évaluation commune du bénéfice par les assureurs-maladie est prévue. Le recours à des experts lors du développement de l’outil d’évaluation constitue un élément important du projet. Des experts doivent également être consultés lorsqu’un refus de prise en charge est envisagé pour des maladies rares. En outre, la transparence est accrue concernant la prise en charge des cas particuliers. D’une part, les évaluations communes du bénéfice seront publiées à l’intention des assureurs et des sociétés de discipline. D’autre part, en cas de refus de prise en charge, la décision devra être motivée auprès des médecins et des patients au moyen de l’évaluation du bénéfice réalisée. Enfin, l’introduction d’écarts de prix fixes par rapport aux prix pratiqués à l’étranger ou au prix défini dans la liste des spécialités (LS) garantira une évaluation plus uniforme du critère d’économicité. Ce changement devrait aussi rendre l’admission dans la LS plus intéressante.

Un relèvement de la quote-part de 20 à 40% pour les médicaments trop chers en comparaison des produits contenant le même principe actif a également été décidé. De plus, les dispositions relatives à la quote-part s’appliqueront désormais aussi aux substances actives biologiques (préparations de référence et biosimilaires). Cette mesure doit servir de frein pour éviter que les patients se procurent des préparations originales onéreuses lorsqu’il existe des génériques moins chers et que ce choix ne se justifie pas médicalement. Dans ce contexte, les modifications accroissent aussi la pression sur les fournisseurs de prestations afin qu’ils ne prescrivent pas des préparations plus chères. Désormais, toute nécessité médicale imposant l’utilisation d’une préparation originale plus chère sans majoration de la participation aux coûts devra être prouvée et documentée dans le dossier de la personne assurée [les raisons médicales possibles sont présentées dans le commentaire des modifications (p. 10 ss)]. Les assureurs pourront vérifier le bien-fondé de telles prescriptions par des contrôles aléatoires.

Enfin, la révision comprend d’autres mesures visant notamment à optimiser le processus d’admission des médicaments dans la LS. Ainsi, pour les médicaments importants, les entreprises pharmaceutiques pourront solliciter un entretien préalable («Early Dialogue») avec l’OFSP, ce qui devrait accélérer l’admission et, partant, le remboursement de ces médicaments

 

  1. Volet 1b de mesures visant à freiner la hausse des coûts

Les Chambres fédérales ont adopté le 30 septembre 2022 la modification de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) concernant les mesures visant à freiner la hausse des coûts (volet 1b). Le 25 octobre 2023 le Conseil fédéral a fixé l’entrée en vigueur des mesures au 1er janvier 2024. Le volet 1b  comprend quatre mesures qui contribuent à limiter la hausse des coûts à ce qui est justifié médicalement:

  • Les partenaires tarifaires seront tenus de convenir de mesures visant à surveiller les coûts. Pour ce faire, ils doivent, dans les domaines dans lesquels ils concluent des contrats tarifaires, convenir d’un monitorage commun de l’évolution des quantités, des volumes et des coûts ainsi que des mesures correctives correspondantes en cas d’évolution non explicable des quantités, des volumes et des coûts.
  • Un droit de recours sera introduit pour les fédérations d’assureurs contre les décisions des gouvernements cantonaux concernant la planification des hôpitaux et d’autres institutions. Ce droit garantit que les cantons tiennent compte de manière équilibrée des demandes émanant non seulement des fournisseurs de prestations, mais aussi des assureurs – qui représentent les intérêts des assurés – dans le cadre de la planification.
  • La loi sur les produits thérapeutiques (LPTh) sera modifiée de sorte à simplifier l’étiquetage et l’information sur les médicaments dans le cas des importations parallèles.
  • La LAMal précise que les pharmaciens peuvent remettre un médicament meilleur marché lorsque plusieurs produits pharmaceutiques contenant la même substance active figurent dans la liste des spécialités. À l’avenir, ce droit de substitution impliquera une «même adéquation du point de vue médical» pour la personne assurée et sera étendu aux biosimilaires.

Outre LAMal et LPTh, les mesures concernent la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI), la loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA) et la loi fédérale sur l’assurance militaire (LAM).

 

  1. Conventions de sécurité sociale
  • Nouvelle convention internationale de sécurité sociale avec l’Albanie

La Convention de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République d’Albanie (RS 0.831.109.123.1) est entrée en vigueur le 1er octobre 2023. Elle concerne l’AVS et l’AI et n’a qu’un effet indirect sur l’assurance-maladie. Conformément à l’art. 4 al. 4 OAMal, les travailleurs détachés de Suisse en Albanie et les membres de leur famille sans activité lucrative qui les accompagnent restent soumis à l’obligation de s’assurer en Suisse, et cela pour toute la durée du détachement (deux ans au maximum). Si ces personnes sont assujetties obligatoirement assurées contre la maladie en Albanie, elles peuvent, sur demande, être exemptées de l’obligation de s’assurer en Suisse (art. 2 al. 2 OAMal). Les travailleurs détachés d’Albanie en Suisse et les membres de leur famille sans activité lucrative qui les accompagnent sont soumis à l’obligation de s’assurer en Suisse. Ils peuvent être exemptés de cette obligation en vertu de l’art. 2 al. 5 OAMal.

 

  • Nouvelle convention internationale de sécurité sociale avec le Royaume-Uni

La Convention de sécurité sociale entre la Suisse et le Royaume-Uni (RS 0.831.109.367.2) est entrée en vigueur le 1er octobre 2023. Ce nouvel accord, qui coordonne les systèmes de sécurité sociale des deux États après le Brexit, est appliqué à titre provisoire depuis le 1er novembre 2021. C’est pourquoi, depuis cette date, les dispositions de la LAMal et de la LSAMal qui concernent les assurés de l’UE s’appliquent également au Royaume-Uni. Les révisions de ces lois doivent par conséquent entrer en vigueur avec effet rétroactif au 1er novembre 2021, ce qui relève de la compétence du Conseil fédéral. Les dispositions de l’OAMal ont déjà été adaptées au 1er janvier 2023.

La convention reprend dans les grandes lignes les dispositions qui étaient applicables en vertu de l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP). En ce qui concerne l’obligation de s’assurer, le principe du lieu de travail s’applique. La règle spécifique selon laquelle les membres de la famille d’une personne assurée en Suisse qui résident au Royaume-Uni doivent s’assurer dans le pays de résidence a toutefois été maintenue. Comme la convention avec le Royaume-Uni ne prévoit pas l’exportation des prestations de chômage, l’art. 2 al. 1 let. d OAMal n’est plus applicable aux ressortissants du Royaume-Uni. Les chômeurs qui quittent leur ancien État de travail pour s’installer dans l’autre État et les frontaliers au chômage doivent s’assurer dans leur pays de résidence.

Les attestations de droit aux prestations médicales dans l’autre État sont les mêmes que dans les relations avec l’UE/AELE (CEAM, attestations S1 et S2). Pour les traitements dont ils ont besoin en Suisse, les assurés du service national de santé (National Health Service, NHS) présentent la UK Global Health Insurance Card (GHIC), dont un modèle est disponible sur le site Internet de l’Institution commune LAMal : www.kvg.org/fr >> Fournisseurs de prestations >> Attestation de droit. L’échange de données se fait en principe, comme avec les États de l’UE, via le système EESSI (Electronic Exchange of Social Security Information).

 

  1. Questions de mise en œuvre

 

  • Sans-papiers

La circulaire 02/10 du 19 décembre 2002 de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), compétent à l’époque, sur les conditions d’affiliation des sans-papiers à l’assurance-maladie obligatoire est, en partie, devenue obsolète.

Règles à respecter concernant l’affiliation des sans-papiers :

L’art. 3 LAMal définit l’ensemble des personnes tenues de s’assurer. Toute personne domiciliée en Suisse au sens des art. 23 à 26 du Code civil (CC) est tenue de s’assurer (art. 1 al. 1 OAMal ; art. 13 LPGA). Les personnes en provenance de l’étranger sont tenues de s’assurer dans les trois mois qui suivent leur prise de domicile en Suisse. L’obligation de s’assurer s’applique en principe, avec des exceptions spécifiques définies par le Conseil fédéral dans l’OAMal, à toutes les personnes qui séjournent plus de trois mois en Suisse, indépendamment de leur nationalité ou de leur statut de séjour légal. Les personnes sans permis de séjour sont elles aussi soumises à cette obligation, pour autant qu’elles prennent domicile en Suisse conformément aux art. 23 à 26 CC, et doivent conclure une assurance-maladie. L’obligation de s’assurer s’applique donc aussi aux sans-papiers, de même qu’aux requérants d’asile qui ont l’obligation de quitter le territoire et qui ne s’y conforment pas.

De leur côté, les assureurs-maladie sont tenus d’accepter sans réserve les demandes d’assurance de ces personnes. Dans un arrêt du 24 décembre 2002 (ATF 129 V 77), le Tribunal fédéral des assurances a confirmé l’obligation d’assurance des sans-papiers. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une personne assurée ne peut pas être exclue de l’assurance-maladie pour non-paiement des primes (ATF 126 V 265). Aux termes de l’art. 5 al. 3 LAMal, la couverture d’assurance prend fin lorsque l’assuré cesse d’être soumis à l’obligation de s’assurer. L’art. 7 al. 3bis et 5 OAMal fixe cette échéance – selon le statut de la personne – à la date de l’arrêt de l’activité lucrative en Suisse, du départ effectif de la Suisse ou du décès.

Les assurés de condition économique modeste ont droit, en vertu de l’art. 65 al. 1 LAMal, à la réduction des primes. Cela peut aussi concerner les sans-papiers. La définition des conditions d’octroi et le versement de la réduction des primes relèvent de la compétence des cantons. L’art. 92d OAMal règle les primes des bénéficiaires de l’aide d’urgence.

Les assureurs sont tenus de garder le secret à l’égard des tiers (art. 33 LPGA en relation avec les art. 84 ss LAMal). Ils ne sont pas autorisés à dénoncer des personnes qui séjournent en Suisse sans statut de séjour valable. L’assureur qui viole cette obligation peut, en vertu de l’art. 54 al. 1 let. d LSAMal, être puni d’une amende.

 

  • Droit à l’entraide en matière de prestations en Suisse des personnes assurées de l’UE, de l’AELE et du Royaume-Uni

Lors d’un séjour temporaire en Suisse, les personnes assurées de l’UE, de l’AELE et du Royaume-Uni (ci-après UK) ont droit aux prestations en nature qui s’avèrent médicalement nécessaires, compte tenu de la nature de la prestation et de la durée prévue de leur séjour en Suisse (article 19, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004).

Pour faire valoir leur droit à l’entraide en matière de prestations, les personnes assurées présentent au fournisseur de prestations un document attestant leur droit aux prestations en nature [article 25, paragraphe 1, première phrase, du règlement (CE) n° 987/2009]. En règle générale, les personnes assurées resp. les patients portent sur eux une carte européenne d’assurance maladie ou un certificat provisoire de remplacement qu’ils présentent au fournisseur de prestations au début du traitement.

Si les patients ne disposent pas d’une attestation de droit ou si celle-ci n’est plus valable, ils s’adressent à l’Institution commune LAMal (IC LAMal) en sa qualité d’institution d’entraide en Suisse. Ils transmettent les informations nécessaires pour que l’IC LAMal puisse demander une attestation de remplacement à l’assurance-maladie sociale de l’État de l’UE/AELE concerné ou de l’UK [article 25, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement (CE) n° 987/2009]. Jusqu’à présent, les fournisseurs de prestations demandaient souvent eux-mêmes les certificats de remplacement à l’assurance-maladie compétente à l’étranger. Cette procédure pragmatique n’est pas conforme aux dispositions des règlements (CE) n° 883/2004 et n° 987/2009 relatifs à l’entraide internationale en matière de prestations et ne peut pas être maintenue. C’est la raison pour laquelle les fournisseurs de prestations en Suisse reçoivent de plus en plus de refus de la part de l’assurance-maladie compétente à l’étranger, avec l’indication que seule l’IC LAMal peut demander l’attestation de droit.

L’IC LAMal demande l’attestation de droit à l’assurance-maladie à l’étranger via la plateforme EESSI et transmet en même temps les informations obligatoires. Cette procédure est prédéfinie et doit être respectée. La personne assurée fait la demande de délivrance d’un certificat de remplacement au moyen de l’application «GE KVG Check-In» et transmet ainsi les informations obligatoires à l’IC LAMal. Tant la personne assurée que le fournisseur de prestations sont informés du résultat de la demande auprès de l’assurance-maladie compétente. Afin de pouvoir satisfaire aux exigences légales ainsi qu’à la transparence, la personne assurée doit impérativement faire la demande via l’application «GE KVG Check-In».

Tant les fournisseurs de prestations que les patients profitent de l’examen direct du droit aux prestations et de la communication immédiate du résultat, à savoir si les coûts de traitement peuvent être réglés en Suisse par l’entraide internationale en matière de prestations ou non. La plateforme est mise gratuitement à la disposition de tous les fournisseurs de prestations. L’application est proposée dans toutes les langues officielles de l’UE/AELE/de l’UK.

Si vous avez d’autres questions, vous pouvez vous adresser directement à l’Institution commune LAMal (Institution commune LAMal, Industriestrasse 78, CH-4600 Olten, www.kvg.org).

 

Lettre d’information du 15.12.2023 de l’OFSP aux assureurs LAMal, à leurs réassureurs et à l’Institution commune LAMal consultable ici

 

8C_419/2022 (f) du 06.04.2023 – Violation lors de la conclusion du contrat d’assurance LAA du devoir de conseil de l’assurance-accidents et de son conseiller – 27 LPGA / Principe de la protection de la bonne foi – 9 Cst.

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_419/2022 (f) du 06.04.2023

 

Consultable ici

 

Couverture d’assurance d’une métairie / 1a LAA – 1 OLAA

Obligation d’assurance / 59 al. 2 LAA – 68 LAA

Portée du devoir de conseils de l’assureur social lors de la conclusion du contrat d’assurance LAA – Principe de la protection de la bonne foi / 27 al. 2 LPGA – 9 Cst.

Violation du devoir de conseil de l’assurance-accidents et de son conseiller / 27 LPGA

 

Madame A.__, titulaire d’une autorisation de tenir un établissement public, a exploité depuis le 01.05.2017, avec son époux Monsieur B.A.__, la Métairie. Le 28.06.2017, Madame A.__ a rempli et signé, avec l’aide de E.__, collaborateur de l’assurance-accidents divers documents (proposition pour la conclusion d’une assurance-accidents LAA, demande d’adhésion de raison individuelle/d’indépendant auprès de GastroSocial pour l’exploitation de la Métairie). Le 19.10.2017, l’assurance-accidents a adressé à Madame A.__ la police relative à l’assurance-accidents obligatoire LAA et complémentaire LAA, correspondant à la proposition d’assurance signée le 28.06.2017.

Le 23.08.2018, vers 14h30, Monsieur B.A.__ a été victime d’un accident mortel alors qu’il avait quitté la Métairie au volant d’un tracteur agricole prêté par un entrepreneur forestier de la région afin de couper un arbre. Il ressort des témoignages du chef cuisinier de la Métairie, et de G.__, berger, que feu Monsieur B.A.__ avait aidé pour le service d’un banquet le jour même jusqu’à 14h30 au restaurant de la Métairie, avant d’aller couper du bois pour une manifestation qu’il organisait le week-end suivant au restaurant. Par déclaration d’accident Madame A.__ a annoncé l’accident et le décès de son époux à l’assurance-accidents. Sous les rubriques « profession exercée » et « place de travail habituelle », il était indiqué « berger », respectivement « pâturage – forêt ». Le formulaire mentionnait en outre que la victime était engagée par contrat de durée déterminée depuis le 01.05.2017 par Madame A.__, Métairie de C.__, au taux de 100% à raison de 43,5 heures par semaine.

Par décision du 08.02.2021, l’assurance-accidents a refusé de prendre en charge l’événement du 23.08.2018. Madame A.__ a formé opposition contre cette décision, tout comme la Caisse supplétive. Par décision sur oppositions du 11.06.2021, l’assurance-accidents a rejeté les oppositions, considérant en substance que Monsieur B.A.__ exerçait la profession de berger à titre indépendant et que le fait qu’il ait aidé au restaurant le jour de l’accident ne constituait qu’un simple coup de main insuffisant pour créer une relation de travail. Si l’on devait considérer que le défunt exerçait une activité dépendante, il n’était pas couvert par la police d’assurance conclue avec l’assurance-accidents qui, selon la proposition d’assurance signée le 28.06.2017, assurait uniquement le personnel d’un hôtel-restaurant à la campagne et non l’activité de berger ou de bûcheron. L’assurance-accidents a également contesté le défaut de renseignement de son conseiller E.__.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 87/21 – 55/2022 – consultable ici)

Par jugement du 19.05.2022, admission des recours de Madame A.__ et de la Caisse supplétive par le tribunal cantonal, les conséquences de l’accident du 23.08.2018 devant être pris en charge par l’assurance-accidents.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 1a al. 1 let. a LAA, sont assurés à titre obligatoire contre les accidents les travailleurs occupés en Suisse. Aux termes de l’art. 1 OLAA, est réputé travailleur selon l’art. 1a al. 1 LAA quiconque exerce une activité lucrative dépendante au sens de la législation fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants. De manière générale, la jurisprudence considère comme tel la personne qui, dans un but lucratif ou de formation et sans devoir supporter de risque économique propre, exécute durablement ou provisoirement un travail pour un employeur, auquel il est plus ou moins subordonné (ATF 144 V 411 consid. 4.2; 115 V 55). Ce sont donc avant tout les personnes au bénéfice d’un contrat de travail au sens des art. 319 ss CO ou qui sont soumises à des rapports de service de droit public qui sont ici visées. Dans le doute, la qualité de travailleur doit être déterminée, de cas en cas, à la lumière de l’ensemble des circonstances de l’espèce, notamment au regard de l’existence d’une prestation de travail, d’un lien de subordination et d’un droit au salaire sous quelque forme que ce soit (arrêts 8C_611/2019 du 11 mai 2020 consid. 3.1 et les références; 8C_538/2019 du 24 janvier 2020 consid. 2.3 et les références, in SVR 2020 UV n° 22 p. 85).

En cas d’accident professionnel, il incombe à l’assureur auprès duquel le travailleur était assuré au moment où est survenu l’accident d’allouer les prestations (art. 77 al. 1, première phrase, LAA).

Consid. 3.2.1
L’assurance-accidents est gérée, selon les catégories d’assurés, par la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (CNA) ou par d’autres assureurs autorisés et par une caisse supplétive gérée par ceux-ci (art. 58 LAA). Selon l’art. 68 al. 1 LAA, les personnes que la CNA n’a pas la compétence d’assurer doivent être assurées contre les accidents par une entreprise d’assurance privée soumise à la loi fédérale sur la surveillance des assurances (LSA), par une caisse publique d’assurance-accidents ou par une caisse-maladie au sens de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal). L’employeur doit veiller à ce que les travailleurs qu’il emploie soient assurés auprès d’un des assureurs désignés à l’art. 68 LAA (art. 69 al. 1, première phrase, LAA). Si un travailleur soumis à l’assurance obligatoire n’est pas assuré au moment où survient un accident, la caisse supplétive lui alloue les prestations légales d’assurance (art. 59 al. 3 LAA; cf. art. 73 al. 1 LAA).

Consid. 3.2.2
Alors que, dans l’assurance obligatoire, le rapport d’assurance avec la CNA est fondé sur la loi (art. 59 al. 1 LAA), le rapport d’assurance avec les autres assureurs est fondé sur un contrat passé entre l’employeur et l’assureur ou sur l’appartenance à une caisse résultant des rapports de travail (art. 59 al. 2 LAA). Aussi bien les entreprises d’assurance que les caisses maladies autorisées à pratiquer l’assurance-accidents au sens de l’art. 68 LAA agissent comme détentrices de la puissance publique, puisque la loi leur donne la compétence de rendre des décisions. Un tel pouvoir leur confère la possibilité de conclure des contrats d’assurance avec des employeurs et de réglementer des questions qui relèvent du droit public. Ces contrats peuvent être librement qualifiés de contrats spéciaux de droit public selon la LAA, qui ne sont liés ni aux règles de la LCA ni à celles de la LAMal. Dans la mesure où la LAA et son ordonnance d’exécution règlent l’assurance-accidents obligatoire de manière très détaillée, il ne reste que peu de place à l’autonomie contractuelle des parties. Les assureurs désignés à l’art. 68 LAA sont ainsi tenus d’établir conjointement un contrat-type – soumis à l’approbation du Conseil fédéral – contenant les clauses qui doivent obligatoirement figurer dans tout contrat d’assurance (art. 59a al. 1 et 3 LAA; sur le tout: arrêt 8C_44/2019 du 19 mai 2020 consid. 3.3).

Consid. 3.2.3
Selon l’art. 92 LAA, les assureurs fixent les primes en pour-mille du gain assuré (al. 1, première phrase). En vue de la fixation des primes pour l’assurance des accidents professionnels, les entreprises sont classées dans l’une des classes du tarif des primes et, à l’intérieur de ces classes, dans l’un des degrés prévus; le classement tient compte de la nature des entreprises et de leurs conditions propres, notamment du risque d’accidents et de l’état des mesures de prévention; les travailleurs d’une entreprise peuvent être classés par groupe, dans des classes et degrés différents (al. 2). Il n’y a pas de nécessité légale d’établir des polices distinctes pour des établissements exploités par le même employeur, puisque l’art. 92 LAA permet de classer les travailleurs d’une entreprise par groupe, dans des classes et degrés différents, de manière à appliquer des taux de primes nets différents en fonction des différentes classes de risque (arrêt 8C_44/2019 précité, consid. 3.4 et 4.2.2).

 

Consid. 4.1
L’art. 27 LPGA prévoit que dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1) et que chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations (al. 2, première phrase).

Consid. 4.2
Le devoir de conseils de l’assureur social au sens de l’art. 27 al. 2 LPGA comprend l’obligation d’attirer l’attention de la personne intéressée sur le fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l’une des conditions du droit aux prestations (ATF 139 V 524 consid. 2.2; 135 V 339; 131 V 472 consid. 4.3). Les conseils ou renseignements portent sur les faits que la personne qui a besoin de conseils doit connaître pour pouvoir correctement user de ses droits et obligations dans une situation concrète face à l’assureur. Le devoir de conseils s’étend non seulement aux circonstances de fait déterminantes, mais également aux circonstances de nature juridique. Son contenu dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l’assuré, telle qu’elle est reconnaissable pour l’administration (arrêt 9C_145/2019 du 29 mai 2019 consid. 4.3.1 et les références).

Consid. 4.3
Selon la jurisprudence, le défaut de renseignement dans une situation où une obligation de renseigner est prévue par la loi, ou lorsque les circonstances concrètes du cas particulier auraient commandé une information de l’assureur, est assimilé à une déclaration erronée de sa part qui peut, à certaines conditions, obliger l’autorité à consentir à un administré un avantage auquel il n’aurait pas pu prétendre, en vertu du principe de la protection de la bonne foi découlant de l’art. 9 Cst. Un renseignement ou une décision erronés de l’administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (a) l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard de personnes déterminées, (b) qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (c) que l’administré n’ait pas pu se rendre compte immédiatement (« ohne weiteres ») de l’inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu’il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (e) que la réglementation n’ait pas changé depuis le moment où l’assurance a été donnée. Ces principes s’appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante: que l’administré n’ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu’il n’avait pas à s’attendre à une autre information (ATF 143 V 341 consid. 5.2.1; 131 V 472 consid. 5).

 

Consid. 6.2.1
L’assurance-accidents reproche aux juges cantonaux d’avoir violé l’art. 1a al. 1 LAA en retenant que feu Monsieur B.A.__, qui exerçait une activité indépendante, était assuré à titre obligatoire auprès d’elle.

Consid. 6.2.2
Il est vrai que la cour cantonale a considéré qu’il était vraisemblable que les époux A.__ fussent tous les deux indépendants mais elle a laissé la question du statut de feu Monsieur B.A.__ ouverte, dès lors qu’il eût incombé à l’assurance-accidents d’instruire cette question avant de conclure le contrat d’assurance-accidents avec son employeur et de percevoir des primes. Cela étant, il appert que soit Monsieur B.A.__ avait un statut de salarié et la question de savoir si l’art. 1a al. 1 LAA a été violé ne se pose pas, soit il avait une activité indépendante et dans ce cas, il eût incombé à l’assurance-accidents de déterminer le statut de ce dernier et de renseigner correctement Madame A.__ à ce propos avant de signer la proposition d’assurance. Or l’assurance-accidents n’a non seulement pas renseigné Madame A.__, admettant implicitement que feu Monsieur B.A.__ avait un statut de salarié, mais elle n’a pas non plus réagi lorsque Madame A.__ lui avait indiqué qu’elle-même, en tant qu’indépendante, était la seule à ne pas être couverte par l’assurance, confortant ainsi cette dernière dans le fait que son mari était assuré en tant que salarié. Dès lors que c’est en vertu du principe de la bonne foi que la cour cantonale a considéré que feu Monsieur B.A.__ était assuré à titre obligatoire auprès de l’assurance-accidents au moment de son accident, elle n’a pas violé l’art. 1a LAA en parvenant à cette conclusion.

 

Consid. 6.3.3
L’assurance-accidents ne démontre pas en quoi l’appréciation juridique des faits par la cour cantonale serait erronée. En particulier, elle ne discute pas le fait que l’information selon laquelle la couverture d’assurance ne concernait que le personnel de la restauration n’avait pas été donnée à Madame A.__, se contentant d’exposer sa propre appréciation de la situation en affirmant que son conseiller informait toujours (de manière générale) les employeurs qu’une activité agricole devait être assurée de manière séparée. Outre le fait que le témoignage de son conseiller sur ce point n’est corroboré par aucune pièce au dossier, on notera qu’il est en contradiction avec le fait que l’assurance-accidents prétend – à tort comme on le verra ci-après – ne pas avoir eu connaissance du fait que feu Monsieur B.A.__ exerçait aussi une activité agricole. En outre, l’assurance-accidents ne discute pas le fait que son conseiller aurait dû renseigner correctement Madame A.__, non pas de manière générale, mais dans le cas concret, au sujet de la couverture d’assurance. Elle ne peut pas se dédouaner de ses responsabilités en se référant simplement aux termes de la proposition pour la conclusion d’une assurance signée par les parties le 28.06.2017, laquelle est très sommaire. Dès lors qu’il est venu sur les lieux et qu’il n’y avait que trois employés, le conseiller de l’assurance-accidents aurait pu s’enquérir du cahier des charges de ces trois employés s’il entendait d’emblée exclure certaines activités de la couverture d’assurance. L’assurance-accidents a cependant encaissé des primes pour trois employés dont deux au moins exerçaient des activités de type « agricole ». Même si elle n’entendait assurer que la partie « restauration », l’assurance-accidents savait que l’employeur était une métairie – ce qui figure même sur la police d’affiliation -, soit, dans le Jura suisse, une ferme de montagne offrant un service de restauration à côté de l’exploitation agricole. Elle ne pouvait ainsi pas ignorer que Madame A.__ souhaitait assurer son personnel pour toutes les activités de la Métairie et devait dès lors attirer son attention sur la limitation de la couverture d’assurance en mentionnant expressément que les activités de type « agricole » étaient exclues et/ou en lui proposant une assurance complémentaire ou dans une autre classe de risque.

Consid. 6.3.4
Quant à la comparaison avec l’arrêt 8C_44/2019, elle est tout à fait pertinente dans le cas d’espèce, quoi qu’en dise l’assurance-accidents. En effet, le Tribunal fédéral y constate qu’il n’y a pas de nécessité légale d’établir des polices distinctes pour des établissements exploités par le même employeur, puisque l’art. 92 LAA permet de classer les travailleurs d’une entreprise par groupe, dans des classes et degrés différents, de manière à appliquer des taux de primes nets différents en fonction des différentes classes de risque. A plus forte raison n’y avait-il aucune nécessité d’établir des polices distinctes pour chaque groupe de risque en l’espèce, dès lors qu’il n’était question que d’un seul établissement et que celui-ci ne comptait que trois employés au total. Par ailleurs, il appartenait à l’assurance-accidents et non à Madame A.__ d’identifier les différents types de risques propres à une entreprise telle qu’une métairie. Certes, c’est le terme « auberge » qui figurait sur la proposition pour la conclusion d’une assurance-accidents LAA et/ou assurance-accidents complémentaire à la LAA de GastroSocial, mais la demande d’adhésion de raison individuelle/d’indépendant auprès de GastroSocial indiquait « gestion d’une métairie » sous la description de l’activité et les polices d’assurance-accidents obligatoire LAA correspondant aux propositions d’assurance signées entre Madame A.__ et l’assurance-accidents le 28.06.2017 mentionnaient que l’employeur était une métairie. Il ne pouvait dès lors pas échapper à l’assurance-accidents, respectivement à son conseiller, que le contrat d’assurance-accidents obligatoire couvrait la Métairie et que si l’assurance-accidents entendait limiter sa couverture aux seules activités de restauration et d’hôtellerie, il lui appartenait d’attirer expressément l’attention de Madame A.__ à ce sujet, comme le commandait son obligation de renseigner découlant de l’art. 27 LPGA. Comme on l’a vu ci-dessus, le contenu de l’obligation de renseigner dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l’assuré, telle qu’elle est reconnaissable pour l’administration. Or au moment de la proposition d’assurance, le conseiller de l’assurance-accidents disposait de suffisamment d’éléments (visite des lieux, pièces au dossier) qui auraient dû le conduire à reconnaître que Madame A.__ se trouvait dans une situation dans laquelle ses employés risquaient de perdre un droit aux prestations.

 

Consid. 6.4.2
Selon les constatations de fait de l’arrêt attaqué, Madame A.__ avait indiqué lors d’un entretien téléphonique du 12.11.2018 avec l’assurance-accidents que feu son époux avait une activité de berger mais également de cuisinier. Par courrier du 19.02.2019 adressé à l’assurance-accidents, Madame A.__ avait indiqué que son époux était assuré en qualité de restaurateur, activité qu’il exerçait en premier lieu à 90%, l’activité de berger ne représentant que 10% de son temps de travail, précisant que la (seule) mention de berger dans la déclaration d’accident était une erreur, due au choc émotionnel après sa disparition et que G.__ avait été engagé dans le but d’accomplir les tâches relatives à l’activité de berger; elle a en outre mentionné que le fait d’aller chercher du bois entrait dans le cahier des charges usuel d’un tenancier de métairie afin de pourvoir au chauffage et à l’eau chaude du bâtiment dans lequel étaient reçus les clients.

Consid. 6.4.3
Contrairement à ce qu’affirme l’assurance-accidents, les déclarations de Madame A.__ ne sont pas contradictoires entre elles puisque l’exploitation d’une métairie impliquait précisément de s’occuper à la fois des animaux, de l’entretien du bâtiment, du nettoyage du terrain autour de la bâtisse ainsi que de la restauration et de l’hébergement et que Madame A.__ s’était entourée de trois employés pour la seconder dans ces diverses activités, soit d’un cuisinier, d’un berger et de feu son mari, lequel était à la fois berger et tenancier de restaurant. C’est donc à juste titre que la cour cantonale a retenu que feu Monsieur B.A.__ exerçait – pas seulement mais aussi – l’activité de restaurateur.

 

Consid. 6.5.2
La question de savoir si une personne doit être considérée comme étant de condition salariée ou indépendante et, partant, si elle est couverte par l’assurance-accidents contractée par son employeur ne se pose pas seulement au moment de la survenance d’un cas d’assurance, mais déjà lorsqu’il s’agit de déterminer quel organisme d’assurance est compétent pour percevoir des primes. Comme le montre précisément le présent cas, les assureurs-accidents ne peuvent pas compter sur le fait que la couverture des travailleurs au service d’un employeur peut toujours être vérifiée dans le cadre d’un accident concret. Une clarification précoce de la couverture d’assurance n’est pas seulement dans l’intérêt du bon fonctionnement de la sécurité sociale, elle est également nécessaire pour garantir aux employeurs et aux travailleurs concernés une sécurité juridique aussi optimale que possible (cf. arrêt 8C_475/2009 du 22 février 2010 consid. 5.2).

Consid. 6.5.3
En l’espèce, il ressort des constatations de fait de la juridiction cantonale que dans une demande d’adhésion de raison individuelle/d’indépendant au 2e pilier auprès de GastroSocial signée par Madame A.__ le 28.06.2017 et dont copie a été reçue par l’assurance-accidents le 04.07.2017, il était mentionné sous « Décrivez brièvement votre activité »: « gestion d’une métairie »; il y était également indiqué que feu Monsieur B.A.__ était le partenaire de l’employeuse et qu’il travaillait dans l’exploitation de sa conjointe. L’assurance-accidents ne saurait dès lors prétendre qu’elle ne savait pas que l’époux de Madame A.__ travaillait dans l’entreprise et qu’il faisait ainsi partie des trois employés de la Métairie. Si l’assureur avait eu le moindre doute quant au statut d’employé de ce dernier, il aurait dû en informer l’employeuse qui aurait pu prendre d’autres dispositions pour assurer son mari contre le risque d’accident, comme elle avait dû le faire pour elle-même.

Étant donné que l’assurance-accidents avait connaissance, sur la base des documents en sa possession et de la visite des lieux par l’un de ses conseillers, du champ d’activités de l’entreprise qui lui était assujettie, on pouvait exiger d’elle qu’elle renseigne l’employeuse sur le fait que la couverture d’assurance-accidents était limitée à la seule activité de restauration, à l’exclusion de toute activité agricole. Cela était d’autant plus exigible de sa part que dans le cas d’espèce, l’entreprise n’employait que trois personnes et qu’il était aisé de s’enquérir précisément de leurs activités respectives. Ne l’ayant pas fait, elle a violé son devoir de conseil. En raison du comportement de l’assurance-accidents, Madame A.__ a pu croire qu’il existait une couverture d’assurance auprès de l’assurance-accidents en ce qui concernait feu son époux, et elle n’avait aucune raison de supposer que ce dernier était en réalité exclu de cette assurance pour la partie « agricole » de son activité. La disposition préjudiciable de Madame A.__ consiste dans le fait qu’elle a employé feu Monsieur B.A.__ dans la Métairie sans avoir la garantie d’une couverture d’assurance. Aucun élément fiable du dossier ne permet de conclure qu’elle aurait fait preuve de négligence en matière d’assurance et n’aurait pas cherché une solution d’assurance auprès d’un autre assureur ou demandé une assurance facultative, comme elle l’avait fait pour elle-même, si elle ne s’était pas fiée à la compétence du conseiller de l’assurance-accidents. En résumé, il apparaît donc que les conditions d’une invocation de la protection de la bonne foi sont remplies.

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_419/2022 consultable ici

 

Primes de l’assurance-accidents : le Conseil fédéral souhaite décharger le sport amateur

Primes de l’assurance-accidents : le Conseil fédéral souhaite décharger le sport amateur

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 16.11.2022 consultable ici

 

Le Conseil fédéral souhaite alléger la charge financière des associations sportives non professionnelles. Elles ne seront plus toutes tenues d’assurer leurs sportifs et leurs entraîneurs contre les accidents. Cette obligation est supprimée dès lors que l’association leur verse moins de 9560 francs de salaire annuel. Lors de sa séance du 16.11.2022, le Conseil fédéral a mis en consultation une modification correspondante de l’ordonnance sur l’assurance-accidents (OLAA).

Tous les employés doivent être assurés contre les accidents. Cette obligation concerne aussi les personnes percevant un faible revenu ou, par exemple, des primes à points. Partant, la plupart des associations sportives doivent assurer leurs sportifs et leurs entraîneurs contre les accidents.

Les primes d’assurance-accidents doivent être fixées en fonction des risques. Partant, les risques de blessure et les coûts élevés en cas d’accident les font fortement augmenter. Elles pèsent donc lourd sur le budget de nombreuses associations sportives.

Pour décharger financièrement les associations sportives non professionnelles, celles-ci doivent être libérées de l’obligation d’assurance lorsque les salaires ne dépassent pas une certaine limite. La franchise de cotisation correspond aux deux tiers du montant minimal d’une rente de vieillesse annuelle complète de l’AVS, soit 9560 francs. Si un sportif ou un entraîneur reçoit plus, tous les membres de l’association endossant l’une de ces deux fonctions doivent être assurés contre les accidents. Les autres, comme le personnel administratif et les équipes de nettoyage, doivent continuer à être assurés sans exception.

 

 

Communiqué de presse de l’OFSP du 16.11.2022 consultable ici

Rapport explicatif de l’OFSP d’octobre 2022 disponible ici

Projet mis en consultation disponible ici

Il Consiglio federale intende sgravare lo sport amatoriale dai premi dell’assicurazione infortuni, comunicato stampa dell’UFSP, 16.11.2022, disponibile qui

Bundesrat will Breitensport bei den Prämien der Unfallversicherung entlasten, Medienmitteilung, BAG, 16.11.2022, hier verfügbar

 

9C_689/2020 (f) du 01.03.2022 – Conditions d’affiliation à l’assurance obligatoire des soins – Domicile en Suisse / Convention de sécurité sociale entre la Suisse et les Etats-Unis / Qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_689/2020 (f) du 01.03.2022

 

Consultable ici

 

Conditions d’affiliation à l’assurance obligatoire des soins – Domicile en Suisse / 3 LAMal – 1 al. 1 OAMal – 13 LPGA – 23 ss CC

Statut de travailleur détaché et attestation de détachement – Qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché

Convention de sécurité sociale entre la Suisse et les Etats-Unis

 

Madame A.A.__ et Monsieur C.A.__, ressortissants suisses, sont les parents de B.A.__ (née aux USA en janvier 2013). Madame A.A.__ et sa fille sont assurées auprès de la caisse-maladie pour l’assurance obligatoire des soins depuis respectivement janvier 2010 et janvier 2013.

Le 17.06.2016, C.A.__ a annoncé à la caisse-maladie que son épouse et leur fille avaient eu un accident de voiture le 14.05.2016 à l’étranger. Il a ensuite remis à l’assureur-maladie différentes factures d’un montant total de 406’873,17 dollars pour les soins médicaux reçus par son épouse et sa fille dans un hôpital aux USA. Après avoir pris des renseignements sur le domicile des assurées, la caisse-maladie a, par décision du 10.11.2016, annulé la couverture d’assurance de Madame A.A.__ au 31.12.2012, considérant que l’intéressée avait élu domicile aux Etats-Unis depuis plusieurs années, vraisemblablement depuis décembre 2012. Elle a également annulé la couverture d’assurance de leur fille au 30.01.2013, considérant que l’enfant n’avait jamais été soumis à l’assurance-maladie obligatoire suisse. Par ailleurs, elle a refusé la prise en charge des frais conformément aux factures remises pour des soins prodigués aux Etats-Unis à Madame A.A.__ et B.A.__ ensuite de l’accident du 14.05.2016; elle a encore décidé que les primes payées seront remboursées et s’est réservée le droit de demander le remboursement des prestations déjà versées.

Par décision sur opposition du 14.07.2017, la caisse-maladie a modifié la décision du 10.11.2016 en ce sens que Madame A.A.__ n’est plus soumise à l’assurance-maladie obligatoire suisse au-delà du 30.11.2013 et que la couverture d’assurance est annulée au 30.11.2013. Elle a confirmé pour le reste la décision précitée.

 

Procédure cantonale (arrêt AM 51/17 – 28/2020 – consultable ici)

La juridiction cantonale a retenu que l’enfant B.A.__ ne s’était jamais constituée de domicile en Suisse, faute d’avoir été annoncée par ses parents dans une commune suisse de sa naissance (en janvier 2013) au 21.06.2016. En ce qui concerne Madame A.A.__, elle a constaté que le dossier contenait de nombreux indices plaidant en faveur d’un déplacement du centre des intérêts personnels de l’intéressée de la Suisse aux Etats-Unis de décembre 2013 à septembre 2016.

En ce qui concerne la qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché, les juges cantonaux ont retenu que si les conditions d’un tel détachement sont remplies, la caisse de compensation concernée établit une attestation de détachement et la remet à l’employeur (qui la transmet ensuite à la personne détachée). La caisse de compensation concernée confirme par cette attestation que la législation suisse continue d’être appliquée au travailleur détaché pendant qu’il travaille dans l’autre Etat. En l’absence d’attestation de détachement, les recourantes ne pouvaient par conséquent pas se prévaloir du fait que les membres de la famille qui accompagnent un salarié détaché depuis la Suisse vers les Etats-Unis restent soumis à la législation suisse de sécurité sociale.

En ce qui concerne la qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché, les juges cantonaux ont retenu que si les conditions d’un tel détachement sont remplies, la caisse de compensation concernée établit une attestation de détachement et la remet à l’employeur (qui la transmet ensuite à la personne détachée). La caisse de compensation concernée confirme par cette attestation que la législation suisse continue d’être appliquée au travailleur détaché pendant qu’il travaille dans l’autre Etat. En l’absence d’attestation de détachement, Madame A.A.__ et sa fille ne pouvaient par conséquent pas se prévaloir du fait que les membres de la famille qui accompagnent un salarié détaché depuis la Suisse vers les Etats-Unis restent soumis à la législation suisse de sécurité sociale.

Par jugement du 22.09.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 5.2
Selon l’art. 1 al. 1 OAMal, les personnes domiciliées en Suisse au sens des art. 23 à 26 CC sont tenues de s’assurer, conformément à l’art. 3 LAMal. A l’inverse de ce que la juridiction cantonale a retenu, Madame A.A.__ a établi en instance cantonale avoir annoncé la naissance de sa fille à la Direction de l’Etat civil du canton de Vaud et s’être vu remettre un certificat de famille en avril 2013. Indépendamment des circonstances de l’inscription postérieure dans les registres de l’état civil de la commune de C.__, Madame A.A.__ a pris soin de son enfant à sa naissance et le domicile de celui-ci est donc intrinsèquement lié à celui de sa mère. Dans la mesure où la juridiction cantonale a constaté, de manière à lier le Tribunal fédéral, que le domicile de A.A.__ était à C.__ jusqu’au 30.11.2013, il convient de modifier le jugement attaqué. En ce qui concerne le droit des assurances sociales, il est constaté que la fille B.A.__ partageait le domicile de sa mère et était donc domiciliée à C.__ jusqu’au 30.11.2013 et assurée auprès de la caisse-maladie jusqu’à cette date.

 

Consid. 6
Les recourantes demandent à pouvoir se prévaloir d’un assujettissement à l’AOS fondé sur les art. 3 al. 3 LAMal et 4 al. 1 OAMal, relatifs aux travailleurs détachés et aux membres de leur famille. Elles font valoir que les attestations de détachement mentionnées par la juridiction cantonale et délivrées par la caisse de compensation concernée ne possèdent qu’un caractère constatatoire, dès lors qu’elles ont essentiellement pour but de permettre au travailleur détaché de prouver, en cas de besoin, dans le pays étranger qu’il existe un assujettissement aux assurances sociales en Suisse. L’assujettissement à l’AOS devrait dès lors s’effectuer à l’aune de l’art. 4 OAMal.

 

Consid. 7.1
Selon l’art. 3 al. 1 LAMal, toute personne domiciliée en Suisse doit s’assurer pour les soins en cas de maladie, ou être assurée par son représentant légal, dans les trois mois qui suivent sa prise de domicile ou sa naissance en Suisse. En vertu de l’art. 3 al. 3 let. b LAMal, le Conseil fédéral peut étendre l’obligation de s’assurer à des personnes qui n’ont pas de domicile en Suisse, en particulier celles qui sont occupées à l’étranger par une entreprise ayant un siège en Suisse.

Faisant usage de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l’art. 4 OAMal (« Travailleurs détachés »). Aux termes de cette disposition, demeurent soumis à l’assurance obligatoire suisse les travailleurs détachés à l’étranger, ainsi que les membres de leur famille au sens de l’art. 3 al. 2 OAMal qui les accompagnent, lorsque: le travailleur était assuré obligatoirement en Suisse immédiatement avant le détachement (al. 1 let. a) et qu’il travaille pour le compte d’un employeur dont le domicile ou le siège est en Suisse (al. 1 let. b). Les membres de la famille ne sont pas soumis à l’assurance obligatoire suisse s’ils exercent à l’étranger une activité lucrative impliquant l’assujettissement à une assurance-maladie obligatoire (al. 2). L’assurance obligatoire est prolongée de deux ans. Sur requête, l’assureur la prolonge jusqu’à six ans en tout (al. 3). Pour les personnes considérées comme détachées au sens d’une convention internationale de sécurité sociale, la prolongation de l’assurance correspond à la durée de détachement autorisée par cette convention. La même règle s’applique aux autres personnes qui, en raison d’une telle convention, sont soumises à la législation suisse pendant un séjour temporaire à l’étranger (al. 4).

Consid. 7.2
Le Conseil fédéral ne définit pas à l’art. 4 OAMal la notion de personnes « occupées à l’étranger par une entreprise ayant un siège en Suisse » (art. 3 al. 3 let. b LAMal), mais renvoie aux conventions internationales de sécurité sociale. Pour les personnes considérées comme détachées au sens d’une telle convention, il précise à l’art. 4 al. 4 OAMal que la prolongation de l’assurance correspond à la durée de détachement autorisée par cette convention.

Consid. 8.1
La Suisse et les Etats-Unis d’Amérique ont souhaité, par le biais d’une convention internationale de sécurité sociale, permettre aux entreprises établies dans l’un des deux Etats de détacher leurs employés sur le territoire de l’autre Etat tout en les maintenant assurés dans leur pays d’origine (Message concernant l’approbation de la convention de sécurité sociale révisée entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d’Amérique du 15 mai 2013, FF 2013 2961, 2963). A cet effet, ils ont conclu une première convention de sécurité sociale le 18 juillet 1979 (ci-après: la Convention 1979), en vigueur du 1er novembre 1980 (RO 1980 1671) au 31 juillet 2014 (RO 2014 2269), puis une nouvelle convention le 3 décembre 2012 (ci-après: la Convention), en vigueur depuis le 1er août 2014 (RS 0.831.109.336.1). Le champ d’application ratione materiae de ces deux conventions englobe l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité, mais pas l’assurance-maladie.

Consid. 8.2
Aux termes de l’art. 6 par. 2 de la Convention 1979, modifié par l’avenant du 1er juin 1988 (RO 1989 2251), une personne exerçant une activité lucrative salariée, détachée, pour une durée prévisible de cinq ans au maximum, sur le territoire de l’un des Etats contractants, par une entreprise ayant un établissement sur le territoire de l’autre Etat, demeure soumise, quelle que soit sa nationalité, uniquement aux dispositions légales concernant l’assurance obligatoire de ce dernier Etat comme si elle exerçait son activité sur le territoire de cet Etat. Si, avant l’échéance des cinq ans, l’entreprise qui a requis le statut de détaché pour la personne désire obtenir une prolongation de ce statut en sa faveur, cette prolongation peut exceptionnellement être accordée si l’autorité compétente de l’Etat du territoire duquel la personne est détachée, ayant considéré cette demande de prolongation comme étant justifiée, l’a présentée à l’autorité compétente de l’autre Etat contractant et a obtenu l’accord de celle-ci. Le conjoint et les enfants accompagnant une personne détachée au sens des deux phrases précédentes du présent paragraphe demeurent soumis uniquement aux dispositions légales concernant l’assurance obligatoire de l’Etat d’où est détaché le travailleur à condition qu’ils n’exercent pas d’activité lucrative salariée ou indépendante sur le territoire de l’autre Etat.

Selon l’art. 3 par. 1 de l’arrangement administratif du 20 décembre 1979 concernant les modalités d’application de la Convention 1979, dans les cas visés à l’art. 6 par. 2 de la Convention 1979, l’organisme de l’Etat contractant dont la législation est applicable établit sur requête de l’employeur un certificat attestant que le travailleur intéressé demeure soumis à cette législation. Le certificat établit la preuve que le travailleur n’est pas assuré obligatoirement selon la législation de l’autre Etat contractant.

Consid. 8.3
Aux termes de l’art. 7 par. 2, 1ère phrase, de la Convention, une personne exerçant une activité lucrative salariée pour un employeur ayant un établissement sur le territoire d’un Etat contractant, et qui est détachée par cet employeur, pour une durée prévisible de cinq ans au maximum, sur le territoire de l’autre Etat contractant, demeure soumise, quelle que soit sa nationalité, uniquement à la législation concernant l’assurance obligatoire du premier Etat comme si elle exerçait son activité sur le territoire de cet Etat.

Lorsque, en application du titre III, une personne, quelle que soit sa nationalité, reste soumise à la législation d’un des Etats contractants alors qu’elle travaille sur le territoire de l’autre Etat contractant, cela vaut également pour son conjoint et ses enfants, quelle que soit leur nationalité, qui résident avec la personne sur le territoire du second Etat contractant, à condition qu’ils n’exercent pas eux-mêmes d’activité lucrative sur le territoire de cet Etat (art. 11 par. 1 de la Convention). Lorsque, en application du par. 1, la législation suisse est applicable au conjoint et aux enfants, ils sont assurés dans l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (art. 11 par. 2 de la Convention).

Selon l’art. 3 par. 1 et 3 de l’arrangement administratif du 3 décembre 2012 concernant les modalités d’application de la Convention, lorsque la législation d’un Etat contractant est applicable conformément à l’une des dispositions du titre III de la Convention, l’organisme de cet Etat contractant établit sur requête de l’employeur ou du travailleur indépendant un certificat attestant que l’employé ou le travailleur indépendant est soumis à sa législation et indiquant la durée de validité du certificat. Ce certificat sert de preuve pour exempter le travailleur de l’assujettissement obligatoire selon la législation de l’autre Etat contractant (par. 1). Les requêtes en vue d’une prolongation de la période de détachement ou d’une exception à l’art. 12 de la Convention doivent être présentées à l’autorité compétente de l’Etat contractant auquel on demande le maintien de l’assujettissement (par. 3).

Consid. 9
En ce qui concerne les formalités en cas de détachement d’un travailleur salarié, l’art. 3 respectivement de l’arrangement administratif du 20 décembre 1979 et de l’arrangement administratif du 3 décembre 2012 prévoit une réglementation traditionnelle calquée sur le modèle d’autres conventions bilatérales conclues par la Suisse. Les formalités en cas de détachement correspondent donc aux standards de coordination prévus par le droit européen et international des assurances sociales.

A cet égard, en relation avec le droit de l’Union européenne, le Tribunal fédéral a déjà rappelé que l’attestation concernant la législation de sécurité sociale applicable aux travailleurs détachés a un effet déclaratif et non pas constitutif (ATF 134 V 428 consid. 4, en relation avec l’art. 11 du règlement [CEE] n° 574/72 [RO 2005 3909]; arrêt 8C_475/2009 du 22 février 2010 consid. 5.1). En délivrant une telle attestation, la caisse de compensation compétente se borne à déclarer que le travailleur demeure soumis à la législation de sécurité sociale suisse tout au long d’une période donnée au cours de laquelle il effectue un travail sur le territoire de l’Etat d’accueil.

Ces principes doivent également être appliqués en l’occurrence, étant donné que les formalités en cas de détachement dans les relations entre la Suisse et les Etats-Unis sont similaires à celles prévalant dans les rapports entre la Suisse et l’Union européenne. En conséquence, l’absence d’attestation de détachement ne suffit pas à nier le statut de travailleur détaché. Aussi, en retenant que Madame A.A.__ et sa fille ne pouvaient se voir reconnaître le bénéfice de la qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché du simple fait qu’elles n’avaient pas produit une telle attestation, les juges cantonaux ont violé le droit fédéral. Si le document n’a pas été requis, le maintien de la législation de sécurité sociale suisse durant l’exercice temporaire d’une activité professionnelle à l’étranger doit être examiné librement par l’autorité saisie d’un litige en matière de sécurité sociale. Les juges cantonaux devaient donc examiner librement si Monsieur C.A.__ remplissait les conditions pour se voir reconnaître la qualité de travailleur détaché pendant la période litigieuse. En cas de réponse positive, ils devaient ensuite examiner si l’épouse et la fille pouvaient prétendre le statut de membres de la famille d’un travailleur détaché et si elles demeuraient pour ce motif soumises aux dispositions légales concernant l’assurance obligatoire de l’Etat d’où est détaché le travailleur, en l’occurrence la Suisse selon l’argumentation des recourantes.

Consid. 10
Faute pour la juridiction cantonale d’avoir procédé à un examen matériel de la qualité de membres de la famille d’un travailleur détaché invoquée par les recourantes, le Tribunal fédéral n’est pas en mesure de se prononcer sur ce point en l’état. Il convient dès lors de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour qu’elle examine les conditions des art. 3 LAMal et 4 OAMal, à la lumière du renvoi aux conventions de sécurité sociale entre la Suisse et les Etats-Unis, et, le cas échéant, procède à des mesures d’instruction complémentaires.

 

Le TF admet le recours de Madame A.A.__ et sa fille, annule le jugement cantonal, renvoyant la cause au tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

 

 

Arrêt 9C_689/2020 consultable ici

 

 

9C_445/2021 (f) du 30.12.2021 – Exception à l’obligation de s’assurer auprès d’une caisse-maladie / Comportement de l’administration de manière contraire aux règles de la bonne foi nié / 5 al. 3 Cst.

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_445/2021 (f) du 30.12.2021

 

Consultable ici

 

Exception à l’obligation de s’assurer auprès d’une caisse-maladie / 3 LAMal – 2 ss OAMal

Affiliation d’office à une caisse-maladie / 6 LAMal

Comportement de l’administration de manière contraire aux règles de la bonne foi nié / 5 al. 3 Cst.

 

Les époux (Madame B.__, née en 1969, et Monsieur A.__, né en 1965) sont domiciliés dans le canton de Genève. Monsieur A.__, binational suisse et américain, est membre du personnel administratif d’une mission permanente auprès de l’Office des Nations Unies à Genève depuis décembre 2013. Il est titulaire d’une carte de légitimation de type « R » (personnel local de nationalité suisse).

Le 10.01.2020, le Service de l’assurance-maladie de la République et canton de Genève (ci-après: le SAM) a constaté que les époux n’étaient plus affiliés au système de l’assurance-maladie obligatoire suisse depuis le 01.12.2014 et les a invités à déposer une demande d’affiliation, à défaut de quoi il serait procédé à leur affiliation d’office. Par décisions des 08.06.2020 et 03.07.2020, confirmées sur opposition, le SAM a procédé à l’affiliation d’office des époux à l’assurance obligatoire des soins auprès d’une caisse-maladie avec effet respectivement au 01.06.2020 (pour Madame) et au 01.07.2020 (pour Monsieur).

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/657/2021 – consultable ici)

Le tribunal cantonal a joint les causes et a retenu que le SAM avait procédé à bon droit à l’affiliation d’office des époux auprès d’un assureur autorisé à pratiquer l’assurance-maladie sociale en Suisse. Il n’était en particulier pas établi que le SAM avait été informé de la résiliation par les époux de leur contrat d’assurance-maladie obligatoire fin 2014. On ignorait en outre comment cette résiliation avait été obtenue. Aussi, faute d’avoir informé le SAM de la résiliation de leur contrat d’assurance, les époux ne pouvaient conclure du silence du SAM que celui-ci était au courant de leur situation et qu’il l’avait acceptée. Quant à l’acceptation de la résiliation par l’assurance-maladie de l’époque, les juges cantonaux ont retenu qu’elle n’était pas déterminante. Les époux avaient en effet produit une lettre type de résiliation du contrat d’assurance qui mentionnait expressément qu’ils devaient produire une dispense de l’obligation de s’assurer en Suisse à leur caisse-maladie. Ils savaient donc qu’ils devaient obtenir une décision d’exemption de l’obligation de s’assurer en Suisse.

Par jugement du 23.06.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Les époux ne contestent pas le fait que, domiciliés en Suisse, ils devaient s’assurer pour les soins en cas de maladie (art. 3 al. 1 LAMal). Est seul litigieux le point de savoir s’ils peuvent se prévaloir d’une exception à l’obligation de s’assurer auprès d’une caisse-maladie autorisée à pratiquer l’assurance-maladie sociale en vertu de la LSAMal (RS 832.12). A cet égard, l’arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales applicables concernant l’obligation d’assurance pour toute personne domiciliée en Suisse et ses exceptions (art. 3 LAMal, en lien avec les art. 2 ss OAMal). Il suffit d’y renvoyer.

On ajoutera aux considérations cantonales que selon l’art. 6 LAMal, les cantons veillent au respect de l’obligation de s’assurer (al. 1); l’autorité désignée par le canton affilie d’office toute personne tenue de s’assurer qui n’a pas donné suite à cette obligation en temps utile (al. 2). Dans le canton de Genève, le Service de l’assurance-maladie (SAM) contrôle l’affiliation des assujettis (art. 4 al. 1 de la loi genevoise du 29 mai 1997 d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie [LaLAMal/GE; rs/GE J 3 05]).

Selon l’art. 10 al. 2 OAMal, l’autorité cantonale compétente statue en outre sur les requêtes prévues aux art. 2 al. 2 à 5 OAMal (exceptions à l’obligation de l’assurer) et 6 al. 3 OAMal (personnes jouissant de privilèges en vertu du droit international).

 

Se prévalant du principe de la bonne foi, les époux reprochent à la juridiction cantonale d’avoir omis le fait que le contrôle des conditions d’exemption de l’obligation de s’assurer à l’assurance-maladie suisse appartenait aux caisses d’assurance-maladie. Ils font valoir qu’ils ne pouvaient en particulier pas savoir que les assureurs-maladie – qui sont « quasiment des administrations publics/privées » en charge de l’application de la LAMal – n’appliquaient pas correctement la LAMal. Ils s’étaient dès lors affiliés de bonne foi à un assureur maladie étranger et encourraient un dommage financier très important s’ils devaient s’affilier à une caisse-maladie suisse.

Aux termes de l’art. 5 al. 3 Cst., les organes de l’État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. De ce principe général découle notamment le droit fondamental du particulier à la protection de sa bonne foi dans ses relations avec l’État, consacré à l’art. 9 Cst., dont le Tribunal fédéral contrôle librement le respect (ATF 147 IV 274 consid. 1.10.1 et la référence). Le principe de la bonne foi protège le justiciable, à certaines conditions, dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2; 131 II 627 consid. 6.1). Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erroné de l’administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard de personnes déterminées, (2) qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l’administré n’ait pas pu se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu’il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, (5) que la réglementation n’ait pas changé depuis le moment où l’assurance a été donnée et (6) que l’intérêt à l’application du droit n’apparaisse pas prépondérant (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2; 137 I 69 consid. 2.5.1).

A l’inverse de ce que soutiennent les époux, il n’appartient pas aux caisses-maladie de statuer sur les exceptions à l’obligation de s’assurer à l’assurance obligatoire des soins. Cette tâche incombe à l’organe cantonal de contrôle de l’assurance-maladie (art. 10 al. 2 OAMal), soit à Genève au SAM. Dans la mesure où la juridiction cantonale a constaté que les époux savaient en 2014 qu’ils devaient obtenir une telle décision et qu’ils n’ont pas établi l’avoir requise auprès du SAM à l’époque, ils ne sauraient rien tirer en leur faveur du fait que la caisse-maladie à laquelle ils avaient été affiliés jusqu’en novembre 2014 a omis d’informer le SAM de la résiliation de leur contrat d’assurance. L’organe cantonal de contrôle de l’assurance-maladie est en effet intervenu pour veiller à leur affiliation à l’assurance obligatoire des soins dès qu’il a eu connaissance, en décembre 2019, de cette résiliation et constaté que les conditions d’une exemption n’étaient pas réalisées.

On cherche en outre en vain dans le recours en quoi le SAM – respectivement une caisse-maladie – se serait comportée de manière contraire aux règles de la bonne foi ou de manière propre à créer des attentes légitimes. En particulier, les époux n’établissent pas qu’ils se seraient fondés sur des indications concrètes de leur caisse-maladie de l’époque pour prendre des dispositions auxquelles ils ne sauraient renoncer aujourd’hui sans subir de préjudice. Ils n’indiquent enfin pas ce qu’une nouvelle interpellation de leur caisse-maladie de l’époque apporterait de plus aux informations déjà communiquées par celle-ci au SAM le 19.10.2020. Leur argumentation, selon laquelle les assureurs-maladie concernés n’auraient pas dû procéder à une résiliation de leur contrat d’assurance n’a pas d’influence sur le bien-fondé de leur affiliation d’office. Dans ces conditions, le grief de violation des règles de la bonne foi ne résiste pas à l’examen.

 

Le TF rejette le recours des assurés.

 

 

Arrêt 9C_445/2021 consultable ici

 

 

9C_388/2019+9C_389/2019 (f) du 21.04.2020 – Extension de l’obligation d’assurance aux demandeurs d’asile / Exceptions à l’obligation de s’assurer – Personnes séjournant en Suisse dans le seul but de suivre un traitement médical ou une cure – Examen des délégations de compétences et de l’art. 2 al. 1 let. b OAMal

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_388/2019+9C_389/2019 (f) du 21.04.2020

 

NB : arrêt à 5 juges ; non destiné à la publication

 

Consultable ici

 

Assujettissement à l’assurance obligatoire des soins – Extension de l’obligation d’assurance aux demandeurs d’asile / 3 LAMal – 1 al. 2 let. c OAMal

Exceptions à l’obligation de s’assurer – Personnes séjournant en Suisse dans le seul but de suivre un traitement médical ou une cure – Examen des délégations de compétences et de l’art. 2 al. 1 let. b OAMal

 

A.__, de nationalité russe, est entré en Suisse le 17.03.2018. Il était accompagné de son épouse, B.__, ressortissante arménienne. Ils ont déposé leurs demandes d’asile respectivement les 26.03.2018 et 19.03.2018. Tous deux ont été affiliés à une caisse-maladie pour l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie. Leur couverture d’assurance a pris effet aux respectivement 17.03.2018 et 26.03.2018.

L’assureur-maladie a reçu une demande de garantie datée du 28.05.2018 portant sur la prise en charge financière d’une évaluation multidisciplinaire d’A.__ dans une clinique de réadaptation. Il y était notamment indiqué que celui-ci était hospitalisé depuis le 17.03.2018. La caisse-maladie a requis du Secrétariat d’Etat aux Migrations (SEM) des informations concernant les motifs des demandes d’asile. Sur la base des renseignements obtenus, dont il déduisait que le couple était venu en Suisse essentiellement pour que l’époux puisse se faire soigner, l’assureur-maladie a annulé les polices d’assurance avec effet rétroactif aux respectivement 17.03.2018 et 26.03.2018.

 

Procédure cantonale (arrêt AM 52/18 – 17/2019  /  AM 53/18 – 18/2019)

A.__, B.__ et l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM) ont déféré les décisions sur opposition à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Ils ont en substance conclu au maintien sans interruption depuis le 17.03.2018 de la couverture d’assurance. Ils ont entre autres pièces déposé une prise de position du 19.09.2018 de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) relative aux décisions sur opposition et établie en réponse à un courrier du 09.08.2018 du chef du Département vaudois de la santé et de l’action sociale.

Par jugements du 29.04.2019, rejet des recours par le tribunal cantonal.

 

TF

En matière d’assurance-maladie, le législateur a prévu l’obligation de s’assurer pour toutes les personnes qui sont domiciliées en Suisse (art. 3 al. 1 LAMal). Il a délégué au Conseil fédéral la compétence de prévoir des exceptions à cette obligation ou d’étendre cette obligation à des personnes qui n’ont pas leur domicile en Suisse. D’une part, sur la base de l’art. 3 al. 2 LAMal, le Conseil fédéral a édicté l’art. 2 OAMal qui prévoit des exceptions à l’obligation d’assurance, parmi lesquelles figurent notamment les personnes qui séjournent en Suisse dans le seul but de suivre un traitement médical ou une cure (al. 1 let. b). Une personne qui se trouve en Suisse uniquement pour se faire soigner ne doit pas être affiliée à l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie (cf. arrêt 9C_217/2007 du 8 avril 2008 consid. 5, in SVR 2008 KV n° 13 p. 50). D’autre part, sur la base de l’art. 3 al. 3 LAMal, le Conseil fédéral a édicté l’art. 1 OAMal qui étend l’obligation d’assurance à des personnes qui n’ont pas leur domicile en Suisse, parmi lesquelles figurent notamment les personnes qui ont déposé une demande d’asile en Suisse conformément à l’art. 18 LAsi (art. 1 al. 2 let. c OAMal), c’est-à-dire les personnes qui demandent à la Suisse de les protéger contre des persécutions (art. 18 LAsi). Il découle de ce qui précède qu’une personne qui dépose formellement une demande d’asile mais qui n’invoque comme fondement à sa demande que des motifs de santé ne devrait pas être affiliée à l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie.

Une loi fédérale peut par le biais d’une clause de délégation législative autoriser le pouvoir exécutif à édicter des règles de droit (art. 164 al. 2 Cst.). Une telle délégation de compétences ne doit pas être interdite par le droit constitutionnel. Elle doit figurer dans une loi au sens formel. Le cadre de la délégation doit être clairement défini et ne doit pas être dépassé (cf. notamment ATF 132 I 7 consid. 2.2 p. 9; 128 I 113 consid. 3c p. 122). La jurisprudence ne définit pas une fois pour toute quelle réglementation est si importante qu’elle devrait figurer dans une loi formelle ou quel degré de précision devrait revêtir une délégation de compétences. Cela dépend toujours des circonstances du cas particulier. Il existe néanmoins divers critères qui se dégagent de la jurisprudence. Ainsi, une réglementation devrait plutôt être contenue dans une loi au sens formel lorsque, notamment, elle exerce une influence considérable sur les droits et les libertés fondamentales des particuliers, elle concerne un grand cercle de personnes, elle crée des obligations de droit public, elle est susceptible d’engendrer une grande résistance de la part des personnes concernées ou porte sur des questions politiques importantes (cf. ATF 133 II 331 consid. 7.2.1 p. 347; 128 I 113 consid. 3c p. 122).

Les délégations de compétences, prévues à l’art. 3 al. 2 et 3 de la LAMal, qui est une loi au sens formel soumise à référendum, sont ensuite clairement délimitées. Elles s’inscrivent toutes deux dans le cadre des objectifs principaux de la loi qui sont de garantir aux personnes assurées des soins de haute qualité aux prix les plus bas (cf. p. ex. Message du 6 novembre 1991 concernant la révision de l’assurance-maladie, FF 1992 I 77, p. 116 et 150) et de renforcer le principe de solidarité (cf. p. ex. Message du 6 novembre 1991 concernant la révision de l’assurance-maladie, FF 1992 I 77, p. 117). La première concerne la possibilité de prévoir des exceptions à l’obligation de s’assurer (notamment pour les personnes bénéficiant de l’immunité diplomatique) et la seconde la possibilité d’étendre cette obligation à des personnes qui n’ont pas de domicile en Suisse (en particulier celles qui exercent une activité en Suisse ou y séjournent habituellement ainsi que celles qui travaillent à l’étranger pour une entreprise suisse). Le Conseil fédéral n’a pas dépassé ce cadre en édictant les art. 1 et 2 OAMal.

Les conséquences de la réglementation déléguée (en relation avec le degré de précision que doit revêtir une délégation de compétences) ne sont finalement pas si importantes que veulent le faire accroire les recourants. S’il est indéniable que, compte tenu du contexte migratoire actuel, la question des réfugiés est d’une importance politique considérable, l’enjeu découlant de l’application de l’art. 2 al. 1 let. b OAMal aux requérants d’asile en Suisse ne saurait se voir accorder la même importance politique. Cette question est certes sensible mais ne concerne qu’un cercle de personnes somme toute limité. Au regard du nombre de personnes visées par l’obligation d’assurance de l’art. 3 al. 1 LAMal (soit toutes celles domiciliées en Suisse, c’est-à-dire plus de huit millions d’individus), le nombre de requérants d’asile soumis à l’obligation d’assurance en vertu de l’art. 1 al. 2 let. c OAMal doit être qualifié de faible (15’255 en 2018; 14’269 en 2019 selon des communiqués du SEM des 1er février 2019 et 31 janvier 2020 consulté sur le site internet du SEM [ www.sem.admin.ch]) et celui de requérants d’asile venant en Suisse essentiellement pour se faire soigner encore plus faible. La réglementation litigieuse n’empêche de surcroît aucunement une bonne application de la LAsi dans la mesure où cette loi concerne toute personne qui demande à la Suisse de la protéger contre des persécutions (art. 18 LAsi). On ne peut en outre pas parler d’ouverture d’une brèche importante dans le système suisse de sécurité sociale dès lors que, d’une part, il serait contraire au principe de la solidarité de permettre à quiconque de bénéficier d’un système de santé financé en grande partie par les personnes visées à l’art. 3 al. 1 LAMal sans jamais avoir cotisé et que, d’autre part, il est toujours possible à une personne atteinte dans sa santé d’obtenir un permis humanitaire de courte durée afin de se faire soigner.

Ces considérations permettent donc de conclure que l’art. 2 al. 1 let. b OAMal a été édicté sur la base de délégations de compétences valables.

 

L’art. 7 al. 5 OAMal figure dans la section 2 de l’OAMal qui traite du début et de la fin de l’assurance des personnes tenues de s’assurer conformément à la section 1 de l’OAMal. Il détermine concrètement le moment où interviennent l’affiliation à l’assurance obligatoire des soins ainsi que le début et la fin de la couverture d’assurance des personnes visées par l’art. 1 al. 2 let. c OAMal. Il ne fait pas explicitement allusion à une interdiction de procéder à un examen préjudiciel d’une demande d’asile. Il est par ailleurs peu vraisemblable que l’on puisse en déduire implicitement une telle interdiction. La jurisprudence déjà mentionnée conditionne en effet la possibilité d’analyser à titre préjudiciel certaines questions ressortissant à d’autres domaines du droit à l’absence de « règles spéciales contraires ». Or, pour justifier la restriction d’une telle possibilité, il paraît indispensable que la règle spéciale soit édictée de manière claire et univoque. Tel n’est de toute évidence pas le cas en l’espèce. Certes, la disposition réglementaire invoquée prévoit un système d’annonce qui intervient temporellement bien avant la fin de la procédure d’asile. Dans la mesure où le législateur a toutefois voulu permettre au Conseil fédéral d’étendre l’obligation d’assurance à certaines catégories de personnes non domiciliées en Suisse et d’exclure de cette obligation certaines catégories de personnes domiciliées en Suisse, il paraît raisonnable de penser que le Conseil fédéral n’a pas pu vouloir déterminer quand une personne devait être assurée avant même de savoir si elle devait être assurée. Outre le fait qu’un tel système institutionnaliserait les abus de droit (sur cette notion, cf. notamment ATF 143 III 279 consid. 3.1 p. 281 et les références), il contreviendrait aux objectifs principaux de la LAMal que sont la garantie de soins de haute qualité aux prix les plus bas et le renforcement du principe de la solidarité (cf. consid. 7.4 supra). Il apparaît ainsi que l’interprétation que veulent faire les recourants de l’art. 7 al. 5 OAMal ne remet pas véritablement en cause celle de la juridiction cantonale selon laquelle l’exclusion de l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie prévue à l’art. 2 al. 1 let. b OAMal s’applique aussi aux personnes visées par l’art. 1 al. 2 let. c OAMal et, par conséquent, autorise un examen préjudiciel des motifs de la demande d’asile. Elle n’est en tout cas pas décisive.

 

Sur la base de l’art. 3 al. 2 LAMal, le Conseil fédéral a étendu l’obligation d’assurance aux personnes qui ont déposé une demande d’asile en Suisse conformément à l’art. 18 LAsi. Selon l’art. 82a LAsi, les cantons qui se sont vu attribuer des requérants d’asile en vertu de l’art. 27 LAsi peuvent directement ou par le biais d’un tiers leur fournir l’assistance sociale nécessaire pour ce qui concerne les soins de santé par la souscription d’une assurance-maladie. Ils peuvent aussi limiter le choix des assureurs et des fournisseurs de prestations. Le canton de Vaud a concrétisé ces délégations de compétences dans la loi du 7 mars 2006 sur l’aide aux requérants d’asile et à certaines catégories d’étrangers (LARA; RS VD 142.21). L’art. 35 LARA désigne l’EVAM pour représenter les demandeurs d’asile dans le système d’affiliation de l’assurance-maladie obligatoire. Il ressort donc de ce qui précède que la marge de manœuvre accordée aux cantons par le législateur fédéral se limite à des mesures d’ordre organisationnel visant à une meilleure maîtrise des coûts. Le seul fait que le contrat d’assurance soit conclu par le canton ou par l’autorité désignée par lui ne saurait faire obstacle au fait que la personne visée par ce contrat doit impérativement remplir les conditions d’affiliation pour pouvoir bénéficier de la couverture d’assurance prévue par ledit contrat. Ainsi, si le système mis en place par le droit fédéral et le droit cantonal vaudois en l’occurrence peut certes être qualifié de spécifique aux requérants d’asile (et à d’autres personnes à protéger), il ne permet toutefois pas de conclure que le seul fait d’avoir formellement déposé une demande d’asile suffit pour ne pas appliquer l’exception de l’art. 2 al. 1 let. b OAMal.

 

L’assujettissement – en l’occurrence au sens de l’art. 3 LAMal qui vise à définir le cercle des personnes assurées obligatoirement à un système de santé déterminé – a forcément des répercussions sur les coûts engendrés par ce système (dans le sens où plus le nombre de bénéficiaires est élevé, plus les coûts le seront également) sans pour autant avoir pour but d’en assurer la maîtrise. La réciproque n’est toutefois pas nécessairement vraie. Une règle qui vise spécifiquement la maîtrise des coûts n’a pas automatiquement pour objectif de définir le cercle des bénéficiaires. Tel est le cas en l’espèce comme l’a dûment relevé la juridiction cantonale. Il ressort clairement du Message du 4 septembre 2002 concernant la modification de la loi sur l’asile, de la loi fédérale sur l’assurance-maladie et de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants que les propositions du Conseil fédéral (concrétisées à l’art. 82a LAsi) visant à permettre aux cantons de limiter les personnes désignées à l’art. 1 al. 2 let. c OAMal dans le choix de leur assureur ou de leurs fournisseurs de prestations avaient pour but exclusif de maîtriser les coûts de la santé dans le domaine de l’asile (FF 2002 I 6359, n° 2.5 p. 6431), c’est-à-dire d’élaborer dans le cadre de la tradition humanitaire de la Suisse des solutions adaptées qui ne constituent pas une charge financière et administrative démesurée pour les cantons et les assureurs (FF 2002 I 6359, n° 2.5.1 p. 6431). L’objectif n’était pas de modifier d’une quelconque manière le cercle des personnes assujetties à l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie. Il ne saurait donc être déduit de la seule absence de mention, dans les travaux préparatoires, de la possibilité d’exclure les demandeurs d’asile de l’assurance-maladie la volonté du législateur de constituer un régime spécifique à cette catégorie de personnes contraire à celui mis en place sur la base de l’art. 3 LAMal.

 

L’obligation d’assurance a été introduite pour garantir la solidarité entre les personnes malades et celles qui sont en bonne santé et que, dans cette optique, il était logique que les exceptions à l’obligation d’assurance et, par conséquent, à l’appartenance à une communauté solidaire devaient être définies de manière restrictive (ATF 132 V 310 consid. 4.3 p. 313 s.; 129 V 77 consid. 4.2 p. 78). Le fait que la liste d’exception figurant à l’art. 2 al. 1 OAMal ne mentionne pas expressément les demandeurs d’asile ne signifie pas pour autant qu’une personne ayant formellement requis l’asile en Suisse mais dont la demande repose uniquement sur des motifs de santé ne puisse tomber sous le coup de l’art. 2 al. 1 let. b OAMal. Le caractère restrictif de la définition des exceptions au regard du principe de la solidarité ne signifie effectivement pas que la liste de ces dernières doit être exhaustive mais seulement qu’une exception ne doit pas porter atteinte à la communauté solidaire des personnes obligatoirement assurées (soit toutes celles domiciliées en Suisse), en exceptant toute une catégorie de personnes en bonne santé au détriment des malades et inversement. Faire une exception à l’obligation d’assurance pour les personnes ayant formellement requis l’asile en Suisse mais dont la demande repose uniquement sur des motifs de santé ne lèse pas le principe de la solidarité dès lors qu’un requérant d’asile n’a pas de domicile en Suisse et qu’une telle exception ne touche qu’un nombre relativement peu élevé de personnes qui ne bénéficieraient ainsi pas de tous les avantages d’un système de santé pour lesquels elles se verraient exemptées de l’obligation de cotiser.

 

Le TF rejette les recours de A.__ et B.__.

 

 

Arrêt 9C_388/2019+9C_389/2019 consultable ici

 

 

9C_659/2018 (d) du 09.04.2019 – Conditions d’exemption de l’obligation de s’assurer pour les salariés qui exercent leur activité professionnelle principale à l’étranger – 2 al. 4 LPP – 1j al. 2 OPP 2

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_659/2018 (d) du 09.04.2019

 

Consultable ici

Résumé du Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 151

 

Conditions d’exemption de l’obligation de s’assurer pour les salariés qui exercent leur activité professionnelle principale à l’étranger / 2 al. 4 LPP – 1j al. 2 OPP 2

 

Les salariés dont l’activité professionnelle principale se situe à l’étranger et qui ne réalisent un revenu soumis à l’AVS en Suisse que de façon temporaire ne sont exemptés de l’assurance obligatoire LPP qu’à la condition fixée par l’art. 1j al. 2 OPP 2, à savoir qu’ils en fassent la demande à l’institution de prévoyance compétente.

Le TF devait définir à quelles conditions les salariés qui ne réalisent un revenu soumis à l’AVS en Suisse que de façon temporaire et qui bénéficient d’une couverture d’assurance suffisante dans le cadre de leur activité professionnelle principale à l’étranger sont exemptés de l’assurance obligatoire LPP. Dans le cas de deux personnes qui exercent à titre accessoire un mandat d’administrateur en Suisse et qui bénéficient d’une couverture d’assurance suffisante dans le cadre de leur activité professionnelle principale à l’étranger, l’instance précédente avait jugé que, sur la base de l’art. 1j al. 1 let. c OPP 2, ces personnes n’étaient pas soumises à l’assurance obligatoire LPP.

Le TF n’a pas été de cet avis, estimant que l’art. 1j al. 1 let. c OPP 2, ne s’appliquait pas dans le cas présent. Les salariés dont l’activité professionnelle principale se situe à l’étranger ne peuvent être exemptés de l’assurance obligatoire LPP qu’à la condition fixée par l’art. 1j al. 2 OPP 2, à savoir qu’ils en fassent la demande à l’institution de prévoyance compétente. En l’absence d’une telle demande, les institutions de prévoyance ne peuvent pas décider si le salarié peut être exempté de l’assurance obligatoire ou non. Le TF estime que cette exigence est justifiée, notamment parce que, pour les assurés, il est important de savoir avant le début des rapports de travail s’ils bénéficient ou non d’une couverture d’assurance LPP en cas d’événement assuré.

 

 

Arrêt 9C_659/2018 consultable ici

 

 

C-6120/2017 (d) du 20.08.2019 – Entreprises de taxi : affiliation à la Suva obligatoire

Arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6120/2017 (d) du 20.08.2019

 

Arrêt du TAF consultable ici

Communiqué de presse du TAF du 04.09.2019 disponible ici

 

Une entreprise de taxi basée à Zurich, qui propose aussi bien un service de taxi ordinaire que le transport de personnes, est tenue d’assurer tous ses employés auprès de la Suva. Telle est la décision du Tribunal administratif fédéral.

En septembre 2017, la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (Suva) a décidé que les employés d’une entreprise de taxi sise à Zurich devaient être assurés auprès de l’institution dès le 01.01.2018. Selon la Suva, l’entreprise en question s’apparente à une entreprise de communications et de transports au sens de la loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA), puisqu’elle transporte elle-même ses clients, ainsi que par le biais des taxis qui lui sont rattachés. L’entreprise concernée a fait recours contre cette décision au Tribunal administratif fédéral (TAF) en octobre 2017. Elle considère que dans la mesure où elle se contente de mettre en relation ses clients avec un taxi, elle offre principalement un service d’intermédiaire. Elle soutient également qu’elle ne dispose pas de sa propre flotte de véhicules et que les chauffeurs de taxi qui lui sont liés doivent être considérés comme des travailleurs indépendants. Seul le service de navette qu’elle assure pour une clinique privée pourrait constituer une activité de transport ; le chauffeur de cette navette serait toutefois assuré dans les règles auprès de la Suva.

 

Décision du Tribunal administratif fédéral

Conformément à la LAA, les employés des entreprises de communications et de transports et ceux des entreprises en relation directe avec l’industrie des transports doivent être obligatoirement assurés auprès de la Suva. Dans le cas présent, le TAF se réfère à un arrêt du Tribunal fédéral (arrêt 8C_357/2014 du 17.06.2014), dans lequel la Haute Cour a qualifié les chauffeurs de taxi de travailleurs dépendants de la centrale à laquelle ils étaient rattachés, dans la mesure où le transport de personnes faisait partie des activités opérationnelles de cette centrale. Or en l’espèce, outre le service de commande et d’organisation de courses en taxi, l’entreprise recourante offre également des prestations relevant du transport de personnes et de marchandises, qu’elle assure soit via son service de taxi, soit dans le cadre de courses spéciales telles que le service de navette précité ou le service de limousines. Ces transports sont, en partie du moins, réalisés par ses employés. Selon la jurisprudence du TF, la part que représente l’activité de transport par rapport à l’ensemble des activités de l’entreprise n’est pas un élément déterminant. Il convient donc d’admettre sans conteste que l’activité déployée par la recourante correspond à la notion de transport au sens de la LAA. Le TAF en conclut que la recourante doit obligatoirement assurer tous ses employés auprès de la Suva, et rejette le recours.

Cet arrêt est susceptible de recours au Tribunal fédéral.

 

 

Arrêt C-6120/2017 consultable ici

 

 

8C_324/2018 (f) du 04.12.2018 – destiné à la publication – Couverture d’assurance-accidents d’un assuré placé à l’essai par l’office AI – 1a al. 1 LAA – 18a LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_324/2018 (f) du 04.12.2018, destiné à la publication

 

Consultable ici

 

Couverture d’assurance-accidents d’un assuré placé à l’essai par l’office AI – 1a al. 1 LAA – 18a LAI

 

A.__, né en 1961, chauffeur-livreur, a présenté une incapacité totale de travail depuis le 21.11.2013 en raison de lombosciatalgies. Suite au dépôt d’une demande de prestations de l’assurance-invalidité, l’office AI lui a accordé le 09.02.2016 une mesure d’orientation professionnelle du 01.03.2016 au 31.05.2016 sous la forme d’un stage d’aide-magasinier auprès de B.__ SA (devenue par la suite C.__ SA). Par décision datée du 09.06.2016, l’office AI a accordé à l’assuré un placement à l’essai de l’assuré dans cette société en qualité d’aide-magasinier du 01.06.2016 au 31.08.2016, assorti des indemnités journalières correspondantes pour la même période. La mesure a été reconduite pour trois mois supplémentaires.

Le 18.10.2016, l’assuré, alors qu’il était à son travail, est tombé d’une échelle d’une hauteur d’environ trois mètres. Il a subi une fracture de la vertèbre D11. L’assurance-invalidité a interrompu le versement des indemnités journalières au 18.10.2016.

Par décision du 26.01.2017, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents de la société C.__ SA a refusé de prendre en charge le cas. Elle a retenu que l’intéressé avait bénéficié de la couverture d’assurance LAA du 01.03.2016 au 31.05.2016 (soit durant la mesure d’orientation professionnelle) et que l’assurance avait cessé de déployer ses effets trente jours après la fin de cette mesure. Quant au placement à l’essai, il n’ouvrait pas un droit à la couverture d’assurance étant donné que A.__ n’était ni salarié de C.__ SA ni en stage auprès de celle-ci.

 

Procédure cantonale (arrêt AA 97/17 – 24/2018 – consultable ici)

Par jugement du 15.03.2018, admission du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

La question est de savoir si A.__ bénéficiait d’une couverture d’assurance LAA au moment où il a été victime d’un accident dans l’entreprise au sein de laquelle il était placé (placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI).

 

Assurés à titre obligatoire

Selon l’art. 1a al. 1 LAA, sont assurés à titre obligatoire conformément à la présente loi, les travailleurs occupés en Suisse, y compris les travailleurs à domicile, les apprentis, les stagiaires, les volontaires, ainsi que les personnes travaillant dans des écoles de métiers ou des ateliers protégés (let. a). Conformément à la délégation que lui confère l’art. 1a al. 2 LAA, le Conseil fédéral a étendu l’assurance obligatoire à certaines catégories de personnes (art. 1a OLAA), par exemple les personnes appartenant à une communauté religieuse ou les personnes détenues (sous certaines conditions) ou encore les personnes exerçant une activité chez un employeur aux fins de se préparer au choix d’une profession (voir à ce dernier propos : ATF 124 V 301).

Selon la jurisprudence, est réputé travailleur au sens de l’art. 1a al. 1 LAA celui qui, dans un but lucratif ou de formation et sans devoir supporter de risque économique propre, exécute durablement ou provisoirement un travail pour un employeur, auquel il est plus ou moins subordonné. Sont ainsi visées avant tout les personnes au bénéfice d’un contrat de travail au sens des art. 319 ss CO ou qui sont soumises à des rapports de service de droit public (ATF 141 V 313 consid. 2.1 p. 314; 115 V 55 consid. 2d p. 58 s.). Cependant, l’existence d’un contrat de travail ne constitue pas une condition pour la reconnaissance de la qualité de travailleur au sens de l’art. 1a al. 1 LAA. En l’absence d’un contrat de travail ou de rapports de service de droit public, la qualité de travailleur doit être déterminée à la lumière de l’ensemble des circonstances économiques du cas d’espèce. Dans cette appréciation, il convient de ne pas perdre de vue que la LAA, dans la perspective d’une couverture d’assurance la plus globale possible, inclut également des personnes qui, en l’absence de rémunération, ne peuvent pas être qualifiées de travailleurs tels que les volontaires ou les stagiaires. La notion de travailleur au sens de l’art. 1a LAA est par conséquent plus large que celle que l’on rencontre en droit du travail (ATF 141 V 313 consid. 2.1 p. 315 et les références; RIEMER-KAFKA/KADERLI, Kommentar zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, Bundesgesetz über die Unfallversicherung, [Hürzeler/Kieser éd.], 2018, n. 28 ss).

En application de ces principes, le Tribunal fédéral a jugé, par exemple, qu’une étudiante en médecine qui effectue un stage (« Einzeltutoriat ») dans un cabinet médical est obligatoirement assurée contre les accidents (ATF 141 V 313). Il en est allé de même d’une bénéficiaire de l’aide sociale qui était placée à l’essai et sans être rémunérée dans une entreprise de nettoyage (arrêt 8C_302/2017 du 18 août 2017 consid. 4.5). Est également assurée une personne occupée sur la base d’un volontariat dans une université pour un projet de recherche en Afrique, sans être au bénéfice d’un contrat de travail et sans qu’un salaire n’ait été convenu (arrêt 8C_183/2014 du 22 septembre 2014). Plus généralement, le Tribunal fédéral a également jugé que les personnes qui travaillent à l’essai sans recevoir de salaire chez un employeur sont assurées par ce dernier, dès lors que celui-ci a un intérêt économique à la prestation accomplie (SVR 2012 UV n° 9 p. 32 [8C_503/2011] consid. 3.5). Il a enfin été jugé qu’une adolescente de 15 ans, qui travaillait pendant ses loisirs dans un centre équestre et qui, pour seule contrepartie, avait le droit de monter à cheval, était obligatoirement assurée contre les accidents (ATF 115 V 55).

 

Placement à l’essai

Le placement à l’essai vise essentiellement à évaluer la capacité de travail réelle de l’assuré sur le marché primaire de l’emploi. Cette mesure vise à augmenter les chances de réinsertion pour de nombreux assurés. Elle concerne ceux d’entre eux qui sont aptes à la réadaptation et dont les capacités sont réduites pour raison de santé. Le placement s’inscrit dans un processus global de réadaptation sur le marché primaire de l’emploi. S’il débouche sur un contrat de travail, une allocation d’initiation au travail (art. 18b LAI) peut être accordée à l’entreprise (voir Michel Valterio, Commentaire de la Loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, p. 256 s.; voir aussi MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 3ème éd. 2014, n. 1 ad art. 18b LAI).

Il n’y a pas de raison de traiter différemment, sous l’angle de l’assujettissement à l’assurance-accidents obligatoire, une mesure de placement à l’essai d’un stage ou d’un volontariat. Sous ce même angle, on ne voit pas ce qui justifierait une différence entre une orientation professionnelle (art. 15 LAI) sous la forme d’un essai au travail (durant lequel l’assuré est soumis à la LAA) et un placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI qui en était en l’espèce la continuation. Il existe d’autant moins de raison d’opérer une distinction que la mesure de placement à l’essai présente bon nombre de caractéristiques qui sont propres au contrat individuel de travail, comme cela ressort de l’énumération figurant à l’art. 18a al. 3 LAI. Si cette disposition ne mentionne pas les art. 324a à 324b CO comme applicables par analogie, c’est que le placement à l’essai est une mesure de réadaptation de l’assurance-invalidité régie par le droit public (cf. MEYER/REICHMUTH, op. cit., n. 1 ad art. 18a LAI). En outre, A.__ n’exerçait pas durant l’exécution de la mesure de placement une simple activité de complaisance. L’activité qu’il déployait constituait un véritable engagement pour lequel C.__ SA y trouvait un intérêt économique. Il participait au processus d’exploitation de cette société et était de ce fait soumis – preuve en est l’accident dont il a été victime – aux mêmes risques professionnels que les autres travailleurs de l’entreprise. Dans ces conditions, on doit admettre qu’il était obligatoirement assuré contre les accidents auprès de l’assurance-accidents de C.__ SA.

 

On ne peut pas déduire du message du Conseil fédéral relatif à la 6ème révision de l’assurance-invalidité, premier volet (FF 2010 1647, 1717), ainsi que la réponse du Conseil fédéral du 23 octobre 2017 à une interpellation (n o 14.3730) du conseiller national Pezzatti déposée le 17 septembre 2014 que le législateur entendait exclure de l’assurance les personnes au bénéfice d’un placement à l’essai. Bien au contraire, le Conseil fédéral a clairement indiqué dans son message que celles-ci seraient obligatoirement assurées pendant le placement à l’essai. Le fait que les modalités de cette obligation (prise en charge des primes) n’ont pas été concrétisées à ce jour par voie d’ordonnance ne saurait être décisif. En effet, toute autorité appelée à appliquer le droit se doit de respecter les principes de la primauté de la loi et de la hiérarchie des normes. Dans le cas particulier, c’est donc en premier lieu au regard de la loi et de la jurisprudence qui s’y rapporte qu’il convient de décider si une personne est ou non assurée. Or, comme on l’a vu, au regard de l’art. 1a LAA et de la jurisprudence susmentionnée, on doit admettre que A.__ était obligatoirement assuré contre les accidents. Une mention spéciale à l’art. 1a OLAA du placement à l’essai aurait eu pour seule conséquence de confirmer une situation juridique existante, sans valeur constitutive d’un assujettissement obligatoire. Enfin, une prise en charge des primes par l’assurance-invalidité n’est pas une condition de cet assujettissement.

 

Dans sa décision sur opposition, l’assurance-accidents a également invoqué la recommandation n o 01/2007 du 12 mars 2007 (révisée le 9 février 2009) de la Commission ad hoc des sinistres LAA. Selon cette recommandation, une intervention temporaire auprès d’un employeur sur le marché du travail primaire avec salaire AVS ou indemnités AI bénéficie d’une couverture LAA, à l’exception des essais de travail selon l’art. 18a LAI. Cette exclusion n’est visiblement que l’expression de l’avis exprimé par le Conseil fédéral dans son message précité sur la nécessité de prévoir une couverture d’assurance spécifique pour les personnes bénéficiant d’un placement à l’essai au sens de l’art. 18a LAI. Mais, comme on l’a vu, cette couverture existe déjà en vertu de la loi. Au demeurant, de telles recommandations n’ont pas valeur d’ordonnances administratives ni de directives d’une autorité de surveillance aux autorités d’exécution de la loi. Il s’agit de simples recommandations qui ne lient pas le juge (ATF 114 V 315 consid. 5c p. 318).

 

Le TF rejette le recours de l’assurance-accidents.

 

 

Arrêt 8C_324/2018 consultable ici

 

 

8C_116/2015 (d) du 05.05.2015 – Couverture d’accidents pour les stagiaires (tutorat) – Personnes assurées obligatoirement en LAA / 1a al. 1 LAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_116/2015 (d) du 05.05.2015

 

Consultable ici : http://bit.ly/1JQ4iTA

 

Couverture d’accidents pour les stagiaires (tutorat) / 1a al. 1 LAA

Personnes assurées obligatoirement en LAA

 

Le Tribunal fédéral a rejeté un recours formé par Visana Assurances. L’assureur ne voulait pas prendre en charge les coûts d’un accident de vélo subi par une étudiante en médecine qui se rendait au cabinet médical où elle effectuait un tutorat. En tombant, la jeune femme a été victime d’un grave traumatisme crânien. Visana, en sa qualité d’assureur-accidents obligatoire du cabinet médical, a estimé que l’étudiante n’était pas affiliée à l’assurance-accidents obligatoire pendant son tutorat. Dans son arrêt de principe, le Tribunal fédéral explique pourquoi l’assurance doit prendre en charge les frais liés à l’accident. Il renvoie à la loi sur l’assurance-accidents qui stipule explicitement que les apprentis, les stagiaires et les volontaires sont également couverts par l’assurance obligatoire. Ils le sont aussi même s’il n’existe pas de contrat écrit et qu’aucun salaire n’est versé. Le Tribunal fédéral assimile l’activité de l’étudiante à un apprentissage, un volontariat ou un stage.

 

 

Résumé paru in Assurance Sociale Actualités 13/15 (22.06.2015)

 

Arrêt 8C_116/2015 consultable ici : http://bit.ly/1JQ4iTA