Archives par mot-clé : Expertise médicale

9C_175/2017 (f) du 30.06.2017 – Mise en œuvre expertise judiciaire refusée par le tribunal cantonal – Jugement confirmé par le TF

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_175/2017 (f) du 30.06.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2DAAQkX

 

AI – Mise en œuvre expertise judiciaire refusée par le tribunal cantonal – Jugement confirmé par le TF

 

TF

L’existence d’avis médicaux contradictoires et le dépôt d’une requête d’expertise ne suffisent pas, en soi, à justifier la mise en œuvre d’une telle mesure d’instruction au sens de l’ATF 135 V 465, lorsque ces éléments ont été examinés au cours de l’appréciation des preuves et écartés à l’issue de celle-ci. Le recourant doit dans ces circonstances établir en quoi l’appréciation non arbitraire des preuves aurait dû mener les premiers juges à constater l’existence d’un doute quant à la fiabilité des rapports des médecins rattachés à l’assureur-accidents, ce qu’il ne fait manifestement pas.

La qualité de médecin traitant, ou pas, n’est pas déterminante, ni même pertinente en l’occurrence. Si la juridiction cantonale a bien évoqué la jurisprudence relative à la manière d’aborder l’avis des médecins traitants en raison du rapport de confiance les liant à leurs patients, c’est bien la pertinence de l’avis du praticien évoqué qui a conduit à sa mise à l’écart (jugement cantonal du 27.01.2017). Quoi qu’en dise l’assuré, cette appréciation n’est nullement entachée d’arbitraire au regard des explications convaincantes des premiers juges.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_175/2017 consultable ici : http://bit.ly/2DAAQkX

 

 

Lettre circulaire AI no 367 – Expertise médicale : Exigences professionnelles relatives à l’exercice de la neuropsychologie

Lettre circulaire AI no 367 – Expertise médicale : Exigences professionnelles relatives à l’exercice de la neuropsychologie

 

Lettre circulaire AI no 367 du 21.08.2017 consultable ici : http://bit.ly/2im83d7

 

Depuis le 1er juillet 2017, l’assurance obligatoire des soins (AOS) applique de nouvelles exigences professionnelles minimales pour la fourniture de prestations neuropsychologiques. En réponse à cette évolution dans l’assurance-maladie, l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) exige des spécialistes qui effectuent des expertises de neuropsychologie dans l’assurance-invalidité les mêmes qualifications que de ceux qui fournissent des prestations neuropsychologiques dans l’AOS.

Depuis le 1er juillet 2017, les exigences minimales pour effectuer des expertises neuropsychologiques dans l’AI sont les suivantes :

  • être titulaire d’un diplôme en psychologie reconnu par la Confédération et d’un titre de spécialisation en neuropsychologie de la Fédération suisse des psychologues (FSP), ou
  • avoir achevé une formation initiale et postgrade jugée équivalente selon la convention tarifaire du 31 décembre 2003 passée entre H+ Les hôpitaux de Suisse et l’Association suisse des neuropsychologues, d’une part, et l’OFAS (pour l’assurance-invalidité), la Commission des tarifs médicaux (pour l’assurance-accidents) et l’Office fédéral de l’assurance militaire (pour l’assurance-militaire), d’autre part, ou
  • être titulaire d’un diplôme en psychologie reconnu par la Confédération et d’un titre postgrade fédéral en neuropsychologie ou reconnu équivalent selon la loi sur les professions de la psychologie (l’obtention du titre fédéral de spécialisation ne sera possible qu’après accréditation de la filière de formation postgrade).

En février 2017, les centres d’expertises ont été informés du fait que tous les mandats concernant des expertises neuropsychologiques qui leur seront attribués par le biais de la plateforme informatique à partir du 1er juillet 2017 devront être effectués par des neuropsychologues qui satisfont aux exigences professionnelles susmentionnées.

Pour garantir la qualité des expertises, chaque centre doit contrôler que ces exigences professionnelles minimales sont respectées pour tous les mandats d’expertises neuropsychologiques qui lui sont attribués par le biais de SuisseMED@P. Si ces exigences ne sont pas remplies, le centre d’expertises doit désigner un autre expert disposant des qualifications professionnelles requises. S’il n’est pas en mesure de le faire, le mandat doit être annulé et réattribué. Dans ce cas, aucune indemnisation ne doit être versée pour d’éventuels travaux préparatoires (étude du dossier), car le centre d’expertises ne remplit pas les exigences professionnelles minimales pour l’expertise considérée.

 

 

Lettre circulaire AI no 367 du 21.08.2017 consultable ici : http://bit.ly/2im83d7

 

 

8C_312/2016 (f) du 13.03.2017 – Frais de l’expertise judiciaire mis à charge – à tort – de l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 (f) du 13.03.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2sS7ifr

 

Frais de l’expertise judiciaire mis à charge – à tort – de l’AI

 

Assurée, associée-gérante de deux Sàrl, exploite en cette qualité un magasin de sport et dispensait également des cours de plongée, entre autres activités, avant de subir plusieurs accidents au cours des années 2009 et 2010, pris en charge par l’assurance-accidents LAA. Dépôt d’une demande AI en raison d’une double hernie discale, opérée le 14.05.2010 selon Cloward avec exérèse des deux hernies et mise en place de deux cages. Dans la procédure opposant l’assurée à son assureur-accidents, une expertise pluridisciplinaire a été réalisée, où la capacité de travail a été considérée comme nulle en ce qui concernait les activités de plongée mais comme totale dans une activité adaptée.

L’office AI a nié le droit de l’assurée à des mesures professionnelles en raison d’un manque d’intérêt de sa part. En outre, il a refusé de lui allouer une rente d’invalidité, au motif que le taux d’invalidité (de 36% si des mesures de réorganisation de l’entreprise étaient exigibles et de 18% dans le cas contraire) n’était pas suffisant pour ouvrir droit à cette prestation.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/256/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2rSSbD8)

La cour cantonale a ordonné la mise en œuvre d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire. Les deux spécialistes en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur ont considéré que la capacité de travail était nulle dans toute activité. Le spécialiste en neurologie a, pour sa part, a retenu une capacité de travail de 25% dans une activité adaptée.

Par jugement du 24.03.2016, admission du recours par le tribunal cantonal qui a, en outre, mis les frais de l’expertise judiciaire à la charge de l’office AI.

 

TF

Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3 p. 501 s.), les frais qui découlent de la mise en œuvre d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d’observation médicale de l’assurance-invalidité (COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la charge de l’assurance-invalidité. En effet, lorsque l’autorité judiciaire de première instance décide de confier la réalisation d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire à un COMAI parce qu’elle estime que l’instruction menée par l’autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l’ATF 137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l’autorité administrative qui aurait dû, en principe, mettre en œuvre cette mesure d’instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces conditions, les frais de l’expertise ne constituent pas des frais de justice au sens de l’art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l’art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par l’assurance-invalidité.

Cette règle, qu’il convient également d’appliquer dans son principe aux expertises judiciaires mono- et bidisciplinaires (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4 p. 357), ne saurait entraîner la mise systématique des frais d’une expertise judiciaire à la charge de l’autorité administrative. Encore faut-il que l’autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l’expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d’instruction administrative. En d’autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l’instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2 p. 265 s.). Tel est notamment le cas lorsque l’autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu’elle a laissé ouverte une ou plusieurs questions nécessaires à l’appréciation de la situation médicale ou lorsqu’elle a pris en considération une expertise qui ne remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la valeur probante de ce genre de documents (voir par exemple arrêt 8C_71/2013 du 27 juin 2013 consid. 2). En revanche, lorsque l’autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d’une expertise qui répondait aux réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d’une expertise judiciaire ordonnée par l’autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d’une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 précité consid. 4.4 p. 502).

En l’espèce, l’office AI aurait dû procéder à des investigations complémentaires au niveau médical. En entreprenant aucune démarche dans ce sens, il a laissé ouverte une question nécessaire à l’appréciation de l’état de santé de l’assurée. Aussi, la cour cantonale pouvait-elle mettre à sa charge les frais de l’expertise judiciaire sans violer le droit fédéral.

 

 

Arrêt 8C_312/2016 consultable ici : http://bit.ly/2sS7ifr

 

 

8C_453/2016 (f) du 01.05.2017 – Suicide – 37 al. 1 LAA / Valeur probante de l’expertise psychiatrique post-mortem – 44 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_453/2016 (f) du 01.05.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2pOP5iA

 

Suicide – 37 al. 1 LAA

Valeur probante de l’expertise psychiatrique post-mortem – 44 LPGA

 

Assuré, responsable informatique, père de deux enfants, divorcé de son épouse depuis le 29.03.2011, consulte depuis 2011 plusieurs médecins en raison d’un état dépressif. Le 25.05.2012, vers 01h00, l’assuré a été retrouvé sans vie sur la voie publique, gisant au pied de son immeuble. Des premiers éléments de l’enquête policière, il ressort que le défunt était tombé du balcon de son domicile, au 4e étage. La porte de son appartement était fermée, mais pas verrouillée. Toutes les lumières de l’appartement étaient éteintes. Le défunt était probablement en train de manger un yaourt juste avant de chuter, ce yaourt et son contenu partiel ayant été retrouvés au sol à côté de lui. Aucune trace de lutte, de fouille ou de vol n’a été constatée dans l’appartement. Aucun message d’adieu n’a été trouvé. La présence de médicaments antidépresseurs et anxiolytiques a été constatée.

D’après le rapport d’expertise toxicologique, les analyses des échantillons biologiques indiquaient la présence dans le sang et l’urine d’antidépresseurs et de caféine. Toutefois les concentrations des antidépresseurs déterminées dans le sang se situaient en dessous de la fourchette des valeurs thérapeutiques. Les analyses n’avaient pas révélé la présence d’autres toxiques, stupéfiants ou médicaments courants en concentrations considérées comme significatives sur le plan toxicologique.

Le rapport d’autopsie revient plus précisément sur les constatations faites sur place. La porte-fenêtre de la cuisine était ouverte sur le balcon qui était bordé par une rambarde haute de 90 cm. Sur la droite de la rambarde, dans la direction du corps en contrebas qui se trouvait plusieurs mètres en avant de la rambarde, il a été observé une trace de ripage sous la forme d’un décollement de peinture. Au 1er étage, il y avait une marquise située juste en-dessous des balcons. Un skateboard se trouvait sur le sol juste à côté de la rambarde. Sur la table de nuit, il y avait des emballages de deux hypnotiques (Stilnox® et Zolpidem®) et d’une benzodiazépine (Temesta®), ainsi qu’une ordonnance pour du Cipralex® (antidépresseur). Dans la salle de bains, se trouvait du Tranxilium® (benzodiazépine). Les médecins légistes ont conclu à un décès consécutif à un polytraumatisme sévère. L’ensemble des lésions constatées était compatible avec une chute d’une hauteur du 4e étage.

Des investigations de l’assureur-accidents, il s’avère qu’un des psychiatres ayant suivi l’assuré a posé le diagnostic d’épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (F32.2).

L’assureur-accidents a confié un mandat d’expertise à un spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. L’expert s’est entretenu avec le psychiatre-traitant ainsi qu’avec la mère du défunt. La mère considérait comme hautement improbable que son fils se fût suicidé. Dans un rapport dûment motivé, l’expert retient un épisode dépressif sévère, sans symptômes psychotiques (F32.2). Au regard des circonstances du décès et de la nature de la pathologie psychiatrique, il considère que le suicide demeure l’hypothèse la plus probable et ce, avec une vraisemblance prépondérante (> 50 %). Il se déclare convaincu, pour le cas où le suicide serait retenu, que l’assuré n’était pas totalement incapable d’agir raisonnablement au moment de l’acte.

Par décision confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a statué qu’aucune prestation d’assurance ne pouvait être allouée, à l’exception de l’indemnité pour frais funéraires.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/437/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2pZRnGI)

Les premiers juges n’ont pas suivi les conclusions de l’expert et retiennent que les indices en faveur d’un suicide ne sont pas suffisamment convaincants pour exclure toute autre explication résultant des circonstances et renverser la présomption que la mort a été causée par un accident.

Par jugement du 01.06.2016, acceptation du recours par le tribunal cantonal et octroi de la rente d’orphelin dès le 01.06.2012.

 

TF

Selon l’art. 37 al. 1 LAA, si l’assuré a provoqué intentionnellement l’atteinte à la santé ou le décès, aucune prestation d’assurance n’est allouée, sauf l’indemnité pour frais funéraires. Même s’il est prouvé que l’assuré entendait se mutiler ou se donner la mort, l’art. 37 al. 1 LAA n’est pas applicable si, au moment où il a agi, l’assuré était, sans faute de sa part, totalement incapable de se comporter raisonnablement, ou si le suicide, la tentative de suicide ou l’automutilation est la conséquence évidente d’un accident couvert par l’assurance (art. 48 OLAA; voir à ce propos ATF 140 V 220 consid. 3 p. 222; 129 V 95).

Lorsqu’il y a doute sur le point de savoir si la mort est due à un accident ou à un suicide, il faut se fonder sur la force de l’instinct de conservation de l’être humain et poser comme règle générale la présomption naturelle du caractère involontaire de la mort, ce qui conduit à admettre la thèse de l’accident. Le fait que l’assuré s’est volontairement enlevé la vie ne sera considéré comme prouvé que s’il existe des indices sérieux excluant toute autre explication qui soit conforme aux circonstances. Il convient donc d’examiner dans de tels cas si les circonstances sont suffisamment convaincantes pour que soit renversée la présomption du caractère involontaire de la mort. Lorsque les indices parlant en faveur d’un suicide ne sont pas suffisamment convaincants pour renverser objectivement la présomption qu’il s’est agi d’un accident, c’est à l’assureur-accidents d’en supporter les conséquences (voir les arrêts 8C_773/2016 du 20 mars 2017 consid. 3.3; 8C_591/2015 du 19 janvier 2016 consid. 3.1; 8C_324/2010 du 16 mars 2011 consid. 3.2; 8C_550/2010 du 6 septembre 2010 consid. 2.3; RAMA 1996 n° U 247 p. 168 [U 21/95] consid. 2b).

Selon le TF

L’intervention d’une tierce personne est exclue, de même qu’une chute accidentelle sous l’emprise de médicaments ou de l’alcool.

En ce qui concerne le diagnostic, on ne saurait guère nier l’existence d’un état dépressif sévère clairement attesté par le psychiatre-traitant, lequel a encore vu son patient quelques heures avant son décès. Sur le plan personnel, l’assuré avait vécu et vivait une situation pénible. S’agissant des difficultés professionnelles, leur existence doit être considérée comme établie.

La présence d’un pot de yaourt et d’une cuillère au côté du cadavre était un fait connu de l’expert et discuté dans son rapport. Lors de son audition, l’expert psychiatre a précisé que l’on « ne pouvait rien en tirer ». La circonstance que le défunt avait préparé l’anniversaire de son fils n’apparaît pas non plus décisive. A ce propos l’expert a expliqué que l’assuré avait probablement des projets suicidaires « depuis pas mal de temps » et qu’il y a eu une conjonction d’événements qui ont fait qu’il a passé à l’acte « ce soir-là ». L’absence de signes de dépression ou de mal-être constatée par la mère la veille du drame, de même que l’absence d’un message d’adieu ou d’une lettre d’explications, ne sont pas des éléments de nature à exclure la thèse du suicide ni même à l’affaiblir. Il n’est pas rare qu’un suicide apparaisse aux yeux des membres de la famille ou des proches comme un événement totalement imprévisible et inexplicable (arrêt 8C_773/2016 du 20 mars 2017 consid. 4.2.3).

Les thèses retenues par la juridiction cantonale relèvent de la pure conjecture ou sont de simples suppositions. On peut penser qu’en cas de malaise, l’homme se serait affaissé et le corps, à supposer qu’il ait basculé par-dessus la rambarde, aurait vraisemblablement heurté la marquise en tombant. Le fait que le corps n’a pas heurté cet obstacle donne au contraire à penser que l’assuré s’est élancé de son propre mouvement dans le vide.

Il n’existe pas d’éléments suffisamment concrets en faveur d’un acte non intentionnel. Dans ces conditions, la juridiction cantonale n’avait pas de raison de s’écarter des conclusions de l’expert. Le fait que l’expertise contient certaines imprécisions, au demeurant sans importance pour l’appréciation du cas, n’est pas de nature à en amoindrir la valeur probante. De même, l’expert, qui n’avait pas une mission d’enquête, n’était pas tenu d’entendre les médecins qui ont successivement traité l’assuré. Le plus important était d’entendre le psychiatre qui avait soigné en dernier lieu le patient et qui l’avait vu en consultation peu de temps avant le décès. Enfin, le dossier contenait des renseignements qui étaient aussi de nature à permettre à l’expert d’éclairer l’assureur, respectivement le juge, sur des points pour lesquels le mandat d’expertise lui avait été confié. On notera, dans ce contexte, que le psychiatre-traitant n’a d’aucune manière infirmé les conclusions de l’expert.

A l’aune du degré de vraisemblance prépondérante qui est requis (cf. ATF 137 V 334 consid. 3.2 p. 338; 117 V 194 consid. 3b p. 194), la thèse du suicide doit être retenue.

On peut par ailleurs tenir pour établi, au vu des explications convaincantes fournies par l’expert que l’assuré n’était pas privé de sa capacité de discernement au moment de l’acte.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents, annule le jugement cantonal et confirme la décision sur opposition.

 

 

Arrêt 8C_453/2016 consultable ici : http://bit.ly/2pOP5iA

 

 

9C_639/2016 (f) du 06.04.2017 – Evaluation de l’invalidité – Capacité de travail exigible – 16 LPGA / Rapport d’expertise médicale de l’assureur perte de gain maladie pris en compte par l’AI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_639/2016 (f) du 06.04.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2qgaocw

 

Evaluation de l’invalidité – Capacité de travail exigible / 16 LPGA

Rapport d’expertise médicale de l’assureur perte de gain maladie pris en compte par l’AI

 

Assurée, titulaire d’un CFC de vendeuse, a travaillé auprès de la Coop du 05.04.1993 au 31.05.2012 (en dernier lieu à temps partiel, à 73%). Elle a subi l’implantation d’une prothèse totale de la hanche à droite le 01.04.2008, puis de multiples contusions consécutives à une chute sur son lieu de travail le 21.04.2009. Elle a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité, le 18.08.2011. Elle est en arrêt de travail depuis le 23.08.2011.

Divers rapports médicaux ont été demandés par l’office AI. Il a également versé au dossier le rapport du docteur F.__, spécialiste en rhumatologie, rédigé à la demande de l’assurance perte de gain en cas de maladie. L’instruction a encore été complétée par une enquête économique sur le ménage, laquelle a mis en évidence un empêchement de 15,70% dans l’accomplissement des travaux habituels.

Par décision du 12.03.2014, l’office AI a, en application de la méthode mixte de l’évaluation de l’invalidité, nié le droit de l’assurée à une rente. En substance, l’administration a retenu que l’assurée présentait une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée dès le 26.04.2012 et un empêchement de 15,70% dans son ménage, soit un degré global d’invalidité de 4,20%, insuffisant pour ouvrir le droit à des prestations d’invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt AI 74/14 – 205/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2qRktJ2)

Par jugement du 08.08.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Entre autres griefs, l’assurée conteste la valeur probante du rapport établi par le docteur F.__.

Dans un grief d’ordre formel qu’il convient d’examiner en premier, l’assurée reproche à la juridiction cantonale d’avoir accordé une valeur probante comparable à celle d’une expertise (au sens de l’art. 44 LPGA) aux conclusions du rapport du 26.04.2012. Elle relève que l’assurance perte de gain en cas de maladie ne lui a nullement donné l’occasion de s’exprimer préalablement à la désignation du docteur F.__, qui n’est à son avis pas expert des symptomatologies multiples dont elle souffre, et que ce mandat n’a pas été attribué de manière aléatoire.

Selon le TF, le fait que ce médecin a été mandaté par l’assurance perte de gain en cas de maladie et qu’il est qualifié d’expert par la juridiction cantonale ne change absolument rien au contenu de ses conclusions. Dans le cadre de la procédure de l’assurance-invalidité, le rapport de ce praticien est un document médical comme les autres auquel la juridiction cantonale a conféré une valeur probante prépondérante au terme de son appréciation des preuves. Toutes les critiques formelles soulevées par l’assurée contre les conclusions de ce rapport ne lui sont ainsi d’aucune utilité dans la mesure où l’administration n’a pas elle-même attribué un mandat à ce médecin, ni n’est intervenue dans sa mise en œuvre, par exemple en lui posant des questions complémentaires (ATF 136 V 113 consid. 5.4 p. 116). L’assurée n’expose pour le surplus pas précisément en quoi un spécialiste en rhumatologie ne pouvait pas s’exprimer sur sa capacité de travail.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_639/2016 consultable ici : http://bit.ly/2qgaocw

 

 

8C_249/2016 (f) du 01.03.2017 – Causalité naturelle et lésion assimilée à un accident – 6 LAA – 9 al. 2 OLAA / Fin avec effet ex nunc et pro futuro à son obligation de prester / Appréciation d’un rapport d’expertise

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_249/2016 (f) du 01.03.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2nQZmWd

 

Causalité naturelle et lésion assimilée à un accident / 6 LAA – 9 al. 2 OLAA

Fin avec effet ex nunc et pro futuro à son obligation de prester

Appréciation d’un rapport d’expertise

 

Assuré, serveur, glisse et tombe sur le sol le 25.10.2011 pendant son service. La chute a provoqué une contusion à l’épaule et l’hémithorax droits, nécessitant un traitement sous la forme de séances de physiothérapie. A partir du 13.02.2012, l’assuré a subi une incapacité totale de travail. Une IRM du 27.03.2012 a mis en évidence notamment une déchirure sans évidence d’un aspect transfixiant du tendon du sus-épineux.

L’assureur-accidents a mis un terme à son obligation de prester avec effet au 31.12.2011, date à laquelle elle a fixé le statu quo sine. Saisie d’une opposition, elle a ordonné la mise en œuvre d’une expertise médicale. Le médecin-expert a diagnostiqué un status après sévère contusion de l’épaule droite avec rupture du sus-épineux suturée en juillet 2012, « re-rupture » du sus-épineux et épaule partiellement gelée, et a conclu à une origine traumatique des lésions. L’assureur-accidents a annulé sa décision.

En 2014, l’assureur-accidents a mandaté un nouveau spécialiste en chirurgie orthopédique, pour une nouvelle expertise. Ce médecin a fixé le statu quo sine au 06.12.2011, soit à la fin du premier traitement physiothérapeutique de l’épaule, et indiqué que les lésions mises en évidence ultérieurement n’étaient pas en relation de causalité vraisemblable avec l’accident.

Par décision, confirmée sur opposition, l’assureur-accidents a supprimé le droit de l’assuré aux prestations d’assurance avec effet au 07.12.2011.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 25.02.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Fin avec effet ex nunc et pro futuro à son obligation de prester

L’assuré fait valoir que la lettre de l’assurance-accidents, par laquelle elle a annulé sa première décision et confirmé la prise en charge du cas, est une décision qui est entrée en force. Selon lui, l’assurance-accidents ne pouvait donc plus supprimer le droit aux prestations rétroactivement au 07.12.2011 par sa seconde décision.

En l’occurrence, l’assureur-accidents a la possibilité de mettre fin avec effet ex nunc et pro futuro à son obligation de prester, qu’il avait initialement reconnue en versant des indemnités journalières et en prenant en charge les frais de traitement, sans devoir se fonder sur un motif de révocation (reconsidération ou révision procédurale), c’est-à-dire liquider le cas en invoquant le fait qu’un événement assuré – selon une appréciation correcte de la situation – n’est jamais survenu (ATF 130 V 380). En l’espèce, il ressort de la seconde décision de l’assurance-accidents, confirmée sur opposition, que celle-ci a renoncé à réclamer au recourant la restitution des prestations versées au-delà du 06.12.2011. Elle avait ainsi la possibilité de supprimer le droit aux prestations sans devoir invoquer un motif de révocation.

 

Appréciation d’un rapport d’expertise

La cour cantonale s’est fondée sur l’appréciation du second médecin-expert pour nier le droit de l’assuré à des prestations d’assurance à compter du 7 décembre 2011. Elle s’est écartée des conclusions du rapport d’expertise du premier médecin-expert en invoquant les motifs suivants: Le premier médecin-expert avait retenu de manière erronée que l’assuré avait consulté son médecin de famille le lendemain de sa chute. En réalité, il ne l’avait rencontré que six jours plus tard, soit le 31.10.2011. Vu ce laps de temps et le fait que l’assuré avait continué à travailler, les premiers juges ont considéré que les douleurs ressenties n’apparaissaient pas particulièrement importantes et mis en doute que la déchirure du tendon soit la conséquence de la chute. Par ailleurs, le premier médecin-expert n’avait pas tenu compte du diabète de l’assuré et avait qualifié la chute de traumatisme à haute énergie, ce qui n’était pas soutenable de l’avis de la cour cantonale. Quant au rapport d’expertise du second méecin-expert, il était plus complet et en accord avec les connaissances et l’expérience médicales relatives aux lésions tendineuses.

Le TF retient, en accord avec les constatations du second médecin-expert et des premiers juges, que les conséquences de la chute n’avaient plus d’incidence sur l’état de santé de l’assuré en tout cas entre la fin de son premier traitement, à savoir le 06.12.2011, et le 13.02.2012, début de l’incapacité de travail.

Quant aux troubles dégénératifs, s’il est vrai qu’ils ne peuvent pas exclure en soi l’existence d’une lésion corporelle assimilée, ils constituaient autant d’indices plaidant dans le sens d’une origine maladive des troubles. En conclusion, les arguments de l’assuré ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’avis du second médecin-expert, selon lequel on ne pouvait rattacher les troubles diagnostiqués en 2012, en particulier la lésion du sus-épineux, à l’accident du 25.10.2011. On doit enfin admettre avec les premiers juges que le rapport d’expertise de ce médecin est plus complet que celui du premier médecin-expert et qu’il se fonde sur des considérations pertinentes et une version des faits plus proche de la réalité.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 8C_249/2016 consultable ici : http://bit.ly/2nQZmWd

 

 

9C_422/2016 (f) du 23.01.2017 – Trouble dissociatif moteur – Trouble somatoforme douloureux ou d’autres troubles psychosomatiques comparables / Exception quant à la nécessité de disposer préalablement d’une expertise psychiatrique

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_422/2016 (f) du 23.01.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2lQFwdN

 

Trouble dissociatif moteur – Trouble somatoforme douloureux ou d’autres troubles psychosomatiques comparables – 7 LPGA – 8 LPGA – 4 LAI

Exception quant à la nécessité de disposer préalablement d’une expertise psychiatrique

 

Assurée atteinte d’une possible érythromélalgie et d’un éventuel tremblement essentiel avec hystérisation ou symptômes de conversion. L’office AI a rejeté la demande.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/370/2016 – consultable ici : http://bit.ly/2lQTUTi)

Expertise judiciaire réalisées par deux spécialistes en neurologie. Les experts ont attesté un tremblement psychogène et un trouble moteur dissociatif, de nature psychologique probable. Ils ont conclu à une capacité résiduelle de travail de 60% dans une activité adaptée, en raison de l’impotence fonctionnelle du membre supérieur droit; toute activité nécessitant l’usage conjoint des deux membres supérieurs n’était plus adaptée. Pour les experts, qui n’ont décelé aucun problème orthopédique, un avis psychiatrique n’était pas nécessaire. L’office AI a proposé la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique.

Par jugement du 12.05.2016, admission partielle du recours, annulation de la décision et fixation de l’étendue de la capacité résiduelle de travail de l’assurée à 60% dans une activité adaptée. La cause est renvoyée à l’office AI pour investigations complémentaires au sens des considérants, calcul du degré d’invalidité, examen de l’octroi éventuel de mesures de réadaptation et nouvelle décision.

 

TF

Le trouble dissociatif moteur – tel que diagnostiqué en l’espèce par les experts judiciaires – figure au ch. F44.4 de la Classification internationale des maladies (CIM-10), selon lequel « dans les formes les plus fréquentes, il existe une perte de la capacité de bouger une partie ou la totalité d’un membre ou de plusieurs membres; les manifestations de ce trouble peuvent ressembler à celles de pratiquement toutes les formes d’ataxie, d’apraxie, d’akinésie, d’aphonie, de dysarthrie, de dyskinésie, de convulsions ou de paralysie ».

Selon la doctrine médicale, le trouble dissociatif, dont la clinique neurologique atypique implique une démarche diagnostique complexe à l’interface de la neurologie et de la psychiatrie, se présente sous forme d’un syndrome « pseudo-neurologique » pouvant mimer une atteinte motrice, sensitive ou sensorielle, des crises de type épileptique ou des mouvements anormaux, dont des troubles de la marche. Le diagnostic repose sur la présence de signes dits « positifs » qui, lorsqu’ils sont présents, suggèrent fortement le diagnostic de trouble dissociatif. Si certains de ces signes ont été validés, la plupart n’ont pas de spécificité ni de sensibilité établies. C’est donc l’ensemble du tableau clinique qui permet au neurologue d’établir le diagnostic, en évitant de restreindre ce dernier à un diagnostic d’exclusion. Le tremblement dissociatif (le plus fréquent des mouvements anormaux dissociatifs) est reconnu lorsqu’il est variable, qu’il change lorsque le sujet est distrait ou qu’il est entraîné par une autre fréquence (lors d’un mouvement rythmique de l’autre main, par exemple) (M. HUBSCHMID/S. AYBEK/F. VINGERHOETS/A. BERNEY, Trouble dissociatif: une clinique à l’interface de la neurologie et de la psychiatrie, in Revue médicale suisse 2008 p. 412-413).

Selon la jurisprudence, la reconnaissance d’une invalidité ouvrant le droit à une rente en raison d’un trouble somatoforme douloureux ou d’autres troubles psychosomatiques comparables, dont les troubles moteurs dissociatifs (cf. ATF 140 V 8 consid. 2.2.1.3 p. 14; arrêt 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4), suppose au préalable qu’un diagnostic psychiatrique relevant de ce champ pathologique ait été posé selon les règles de l’art (ATF 141 V 281 consid. 2 p. 285; arrêt 9C_905/2015 du 29 août 2016 consid. 5.3.1). En d’autres termes, l’avis d’un spécialiste, en l’occurrence d’un psychiatre, est en principe nécessaire lorsqu’il s’agit de se prononcer sur l’incapacité de travail que ce genre de troubles est susceptible d’entraîner chez l’assuré (cf. ATF 130 V 352 consid. 2.2.2 p. 353, 396 consid. 5.3.2 p. 398 ss).

Les constatations de la juridiction cantonale quant au diagnostic et aux répercussions de celui-ci sur la capacité de travail de l’assurée sont fondées sur une expertise réalisée par deux spécialistes en neurologie. Au regard des difficultés de délimitation du trouble dissociatif moteur quant à son origine neurologique ou psychiatrique, il convient de reconnaître aux experts judiciaires la compétence de poser le diagnostic de trouble dissociatif moteur et d’en évaluer les effets dans une certaine mesure, même s’ils ne sont pas spécialistes en psychiatrie. C’est le lieu de rappeler que la jurisprudence a déjà reconnu qu’un spécialiste en rhumatologie dispose d’une certaine compétence d’appréciation en relation avec un tableau clinique de troubles psychosomatiques. Il a ainsi la faculté de se prononcer sur le caractère invalidant des douleurs alléguées, mais il doit alors s’exprimer sur la nécessité de recueillir un avis psychiatrique (cf. arrêts 9C_621/2010 du 22 décembre 2010 consid. 2.2.2, résumé in RSAS 2011 p. 299, I 704/03 du 28 décembre 2004 consid. 4.1.1).

Le principe de la nécessité de disposer préalablement d’une expertise psychiatrique pour se prononcer sur le caractère invalidant d’un trouble somatoforme douloureux ou d’une affection psychosomatique comparable peut souffrir d’exceptions. Tel est le cas lorsque, comme en l’espèce, la manifestation du trouble moteur dissociatif – en l’occurrence, un tremblement du membre supérieur droit de repos, postural et d’action, asymétrique, dont la fréquence n’est pas identifiable, variable en amplitude et non inhibé sur la volonté – et ses conséquences sont mises en évidence de façon convaincante et motivée sur le plan médical, alors qu’une expertise complémentaire sur le plan psychiatrique ne changerait rien aux constatations médicales quant au caractère non surmontable, non maîtrisé et indépendant de la volonté de l’assurée de l’expression physique (tremblement) du trouble.

On rappellera à ce sujet que les constatations effectuées par le spécialiste en psychiatrie au regard des indicateurs définis par la jurisprudence (cf. ATF 141 V 281 consid. 4 p. 296) ont pour fonction d’apporter des indices afin de pallier le manque de preuves (directes) en relation avec l’évaluation de l’incapacité de travail des troubles somatoformes douloureux et d’autres troubles psychosomatiques semblables, lorsqu’il s’agit, en particulier, d’apprécier l’existence de douleurs et des ses effets, qui ne sont que très difficilement objectivables (ATF 141 V 281 consid. 4.1 in fine p. 298 en relation avec les consid. 3.4.1.2 et 3.7.2).

En l’occurrence, les constatations objectives des experts judiciaires suffisent à convaincre de l’existence des atteintes psychiques de l’assurée et surtout de leurs effets physiques, dûment mis en évidence et expliqués, sans qu’on distingue, dans l’argumentation de l’office recourant, quel indice supplémentaire admis par un psychiatre pourrait conduire à nier le tremblement du membre supérieur de l’assurée et ses effets incapacitants. Dans cette constellation particulière, la juridiction cantonale était en droit de renoncer (exceptionnellement) à l’administration de preuves requise par l’office AI, sans que son appréciation n’apparaisse insoutenable ou contraire à la jurisprudence en matière de troubles somatoformes douloureux. Par conséquent, il n’y a pas lieu de s’écarter des constatations des premiers juges quant à la capacité de travail résiduelle de l’assurée.

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_422/2016 consultable ici : http://bit.ly/2lQFwdN

 

 

9C_587/2016 (f) du 12.12.2016 – Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie reprise par l’office AI et le tribunal cantonal – 44 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_587/2016 (f) du 12.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2j8lgpO

 

Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie reprise par l’office AI et le tribunal cantonal / 44 LPGA

 

Première demande AI en raison d’une tumeur osseuse bénigne du doigt. Par décision du 16.08.2012, l’office AI a rejeté la demande de l’assurée, fondant sa décision en particulier sur le rapport d’examen rhumatologique du Service médical régional de l’AI.

Nouvelle demande AI le 10.04.2013, en raison d’une dépression depuis septembre 2012. L’office AI a procédé aux investigations habituelles. L’administration a également obtenu copie du rapport de l’expertise réalisée sur mandat de l’assureur perte de gain, daté du 21.03.2014. Le médecin-expert, spécialiste en psychiatrie, avait retenu que les troubles étaient sans incidence sur la capacité de travail de l’assurée. En se fondant sur ces informations, l’administration a décidé de rejeter la demande de l’assurée.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a constaté que l’assurée ne présentait pas de nouvelle atteinte de nature somatique, mais souffrait de troubles psychiques, diagnostiqués tant par son médecin traitant que par l’expert mandaté par l’assureur perte de gain. Se fondant sur le rapport de cet expert, le tribunal cantonal a cependant retenu que ces affections étaient sans incidence sur la capacité de travail de l’assurée à partir du 01.07.2013.

Par jugement du 05.07.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assurée fait valoir que la juridiction cantonale aurait violé l’art. 44 LPGA, dès lors que les droits procéduraux de l’assurée n’auraient pas été respectés lors la mise en œuvre de l’expertise [réalisée sur demande de l’assurance maladie perte de gain].

Selon l’art. 44 LPGA, si l’assureur recourt aux services d’un expert indépendant pour élucider les faits, il donne connaissance du nom de celui-ci aux parties; celles-ci peuvent récuser l’expert pour des raisons pertinentes et présenter des contre-propositions.

En l’occurrence, l’office AI n’a pas lui-même mis en œuvre une expertise auprès d’un médecin externe à l’assurance-invalidité, mais a recueilli un rapport médical initié par un tiers. L’assurée a eu connaissance de l’expertise au moment où l’office AI lui a transmis son projet de décision et a pu se prononcer à son égard, son médecin traitant ayant du reste fait parvenir son appréciation y relative à l’office AI.

Dans ces circonstances, les droits procéduraux prévus par l’art. 44 LPGA ne trouvent pas application : l’administration n’a pas elle-même recouru aux services de l’expert indépendant, ni n’est intervenue dans la mise en œuvre de l’expertise, par exemple en posant des questions au spécialiste, ce dont elle aurait alors dû informer l’assurée pour lui donner l’occasion d’en faire de même (arrêt 8C_254/2010 du 15 septembre 2010 consid. 4.2).

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_587/2016 consultable ici : http://bit.ly/2j8lgpO

 

 

9C_127/2016 (f) du 09.11.2016 – Expertise médicale judiciaire / Remise en cause par les parties et non par le juge du diagnostic retenu

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_127/2016 (f) du 09.11.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jTjfdA

 

Expertise médicale judiciaire

Remise en cause par les parties et non par le juge du diagnostic retenu

 

TF

Il n’appartient pas au juge de remettre en cause le diagnostic retenu par un médecin et de poser de son propre chef des conclusions qui relèvent de la science et des tâches du corps médical. Il convient bien plutôt pour la partie (en l’occurrence, l’office AI) qui entend remettre en cause le bien-fondé du point de vue médical sur lequel se sont fondées les autorités judiciaires de mettre en évidence des éléments objectivement vérifiables – de nature notamment clinique ou diagnostique – qui auraient été ignorés dans le cadre de l’appréciation et qui seraient suffisamment pertinents.

En ce qui concerne les critiques relatives à l’importance du trouble dépressif, l’office recourant fait grief aux premiers juges d’avoir attaché une importance trop grande à cette affection. L’appréciation de la sévérité du trouble admise par l’expert est toutefois un débat qui relève typiquement de la compétence du corps médical et dans lequel le juge ne saurait en principe s’immiscer. En l’absence d’autres explications médicales permettant d’éclairer sous un jour différent le point de l’expert, il n’y a pas lieu de s’écarter de son avis (cf. arrêt 9C_855/2015 du 2 mai 2016 consid. 4.3). Quoiqu’en dise par ailleurs l’office recourant, l’expert a retenu les diagnostics psychiques en se fondant sur ses propres observations et non pas seulement sur les plaintes rapportées par l’assuré. Il a en outre détaillé quels traitements étaient effectivement suivis régulièrement par l’assuré et mentionné que celui-ci prenait en tous cas les médicaments « véritablement nécessaires et indiqués ».

 

Le TF rejette le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_127/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jTjfdA

 

 

SuisseMED@P : comment parer au manque d’experts disponibles

SuisseMED@P : comment parer au manque d’experts disponibles

 

Article de Michela Messi et Ralph Leuenberger, paru in CHSS Sécurité sociale, 4/2016, consultable ici : http://bit.ly/2hhZb66

 

L’attribution aléatoire de mandats d’expertise pluridisciplinaire a fait ses preuves, surtout après la mise en place du principe first in, first out. Mais il n’y a toujours pas suffisamment d’experts pour répondre à la demande.

 

Depuis plus de quatre ans, les mandats d’expertise médicale pluridisciplinaire pour l’assurance-invalidité (AI) sont attribués de manière aléatoire au moyen de la plateforme informatique SuisseMED@P (Kocher 2014). La phase initiale s’étant heurtée au scepticisme et à la méfiance de beaucoup, SuisseMED@P a fait l’objet de nombre de procédures de recours, d’interventions parlementaires et d’articles dans les médias. L’AI est cependant parvenue à démontrer par ce moyen qu’il était possible d’attribuer, avec succès, des mandats d’expertise de manière aléatoire. Pour la bonne marche du système, il importe que les processus et le fonctionnement de Suisse­MED@P soient régulièrement contrôlés et améliorés. Les indications statistiques recueillies grâce à la plateforme, qui ont amené une grande transparence dans le domaine des expertises, sont ici d’un grand secours. Une répartition aussi rapide et équilibrée que possible des mandats dépend dans une mesure déterminante de l’effectif d’experts à disposition, qui reste limité en Suisse. Afin d’éviter aux assurés de longs délais d’attente, les offices AI doivent donc eux aussi tirer au clair rapidement, et à satisfaction de droit, les cas en question.

La demande d’expertises pluridisciplinaires reste importante dans l’AI (rapports 2014 et 2015). Cela s’explique en partie par les révisions portant sur des rentes octroyées en raison d’un syndrome sans pathogenèse ni étiologie claires et sans constat de déficit organique [Dispositions finales de la modification du 18.3.2011 (6e révision de l’AI, premier volet) : http://bit.ly/2fROy78]. Mais la jurisprudence du Tribunal fédéral joue aussi un rôle (ATF 139 V 349 consid. 3.2), puisqu’elle préconise que les premières expertises médicales approfondies requises par l’administration soient en principe pluridisciplinaires et attribuées de manière aléatoire (les exceptions n’étant possibles que dans des cas fondés). En outre, suite à l’ATF 141 V 281, plusieurs demandes d’expertise sont venues s’ajouter à la liste d’attente, car plusieurs expertises établies avant cet arrêt n’étaient pas conformes aux exigences de la nouvelle jurisprudence et nécessitaient un nouvel examen.

 

La demande dépasse les capacités

Les capacités pouvant être mises à disposition par les centres d’expertises habilités ne suffisent toujours pas à faire face à la demande d’expertises pluridisciplinaires. Cette tendance se dessinait déjà en 2014 – à la fin de l’année, SuisseMED@P comptait en tout 1648 mandats qui n’avaient pu être attribués, et l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) y a répondu en introduisant le principe first in, first out. C’est la Suisse romande qui était la plus touchée par cette situation de surcharge.

La réaction de l’OFAS visait à augmenter l’offre de centres d’expertises – surtout en Suisse romande – afin que les assurés n’aient pas à subir des temps d’attente disproportionnés. Sur le plan politique, le conseiller fédéral Alain Berset a abordé le thème lors d’entretiens avec des représentants des gouvernements cantonaux. Il s’agissait en particulier de convaincre des hôpitaux publics ou universitaires de fonctionner comme centres d’expertises, et aussi de garantir pour les médecins une offre appropriée de formation de base et de formation postgrade dans le domaine des expertises. Aussi le chef du Département fédéral de l’intérieur s’est-il adressé en juin 2015 aux cantons, de concert avec la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), pour les prier de demander aux hôpitaux éligibles de leur territoire de se proposer comme centres d’expertises pluridisciplinaires. Si les efforts déployés auprès des cantons et de leurs hôpitaux publics n’ont malheureusement pas encore rencontré le succès escompté, l’OFAS est parvenu de son côté à trouver au total douze nouveaux centres d’expertises organisés selon le droit privé. Ainsi, fin 2016, ce sont en tout 30 centres qui sont habilités à établir des expertises pluridisciplinaires pour l’AI.

En 2015, 5177 expertises en tout ont été attribuées aux 29 centres habilités, soit 1089 ou 25 % de plus que l’année précédente. En Suisse romande, les capacités ont permis de plus que doubler le nombre d’expertises attribuées, qui est passé de 330 à 702, tandis que la progression a été de quelque 20 % en Suisse alémanique (de 3440 à 4120). De ce fait, le nombre de mandats non encore attribués est descendu de 1648 en 2014 à 797 en 2015. Fin septembre 2016, SuisseMED@P en comptait encore 686, dont 175 en attente depuis plus de six mois (3 en Suisse italienne, 28 en Suisse alémanique et 144 en Suisse romande).

Par rapport à l’année précédente, les offices AI ont déposé quelque 1500 mandats de moins. Ce recul s’explique du fait que le réexamen des cas concernés par les dispositions finales de la révision 6a est presque arrivé à son terme, que l’ATF 141 V 281 (lettre circulaire AI 2015) a entraîné la suspension du dépôt de tout nouveau mandat pendant trois mois et que la désignation des disciplines médicales pour les expertises correspond mieux à la nature des cas à examiner. Sans oublier que les offices AI demandent aussi davantage d’expertises bidisciplinaires : le volume de celles-ci, à l’échelle suisse, a augmenté de 23 points de pourcentage.

 

Fonctionnement de SuisseMED@P

A l’origine, on supposait qu’en règle générale plusieurs centres d’expertises entreraient en ligne de compte pour un mandat donné et que les différents mandats leur seraient attribués de manière aléatoire. Cependant, l’expérience des dernières années a montré que la demande d’expertises dépasse fréquemment l’offre de centres d’expertises ayant des capacités dans les disciplines recherchées. Aussi l’attribution consiste-t-elle plus souvent à répartir les mandats entre les centres d’expertises que l’inverse.

L’application stricte de l’attribution aléatoire peut avoir pour conséquence qu’un mandat qui vient d’être déposé soit attribué avant d’autres mandats se trouvant déjà depuis un certain temps sur la plateforme et qui conviendraient aussi. En raison du manque de capacités dans les centres d’expertises, les délais d’attente moyens pour l’attribution d’un mandat n’ont cessé d’augmenter jusqu’à fin 2014. A titre de mesure d’urgence, l’OFAS a donc décidé d’introduire dans le système, le 1er janvier 2015, le principe first in, first out, qui veut qu’en fonction des capacités existantes dans les différentes disciplines médicales, le premier mandat attribué est celui qui est en attente depuis le plus longtemps. Cet aménagement a permis de réduire considérablement les délais d’attente.

 

Amélioration des processus

Malgré les mesures prises, le manque de capacités continue de causer une certaine lenteur dans l’attribution des mandats, surtout en Suisse romande. L’expérience montre que la priorité donnée aux cas les plus anciens se traduit parfois par une non-prise en compte des disciplines en situation d’offrir des services, du fait que l’offre ne coïncide pas avec les disciplines requises pour examiner le cas le plus ancien. Les mandats impliquant des disciplines rarement demandées et proposées (p. ex. urologie et gynécologie) continuent de connaître de longs délais d’attente liés au système lui-même. Afin d’accélérer aussi la procédure et de solliciter de façon plus efficiente les éventuelles capacités disponibles, l’OFAS a demandé aux offices AI de vérifier quelles étaient les cas accusant les délais d’attente les plus longs.

Cet examen visait à établir si les disciplines indiquées étaient vraiment nécessaires et à déterminer l’impact des disciplines rarement offertes sur le délai d’attente. S’il ressort de l’examen qu’il est possible de renoncer à une ou plusieurs disciplines, l’office AI est invité à adapter le mandat d’expertise déposé sur SuisseMED@P. Ainsi, ce dernier conservera sa date de dépôt initiale. Dans les cas où une discipline rare s’avère indispensable, l’office AI doit examiner la possibilité de confier une expertise monodisciplinaire. Le rapport d’expertise monodisciplinaire sera, si possible, ensuite mis à la disposition des experts qui établiront l’expertise pluridisciplinaire. Ces démarches doivent être communiquées à l’assuré et inscrites dans son dossier. Les droits procéduraux de l’assuré, qui devrait être d’accord avec la procédure, seront naturellement garantis. Par contre, lorsque, dans le cadre d’une procédure de recours, un tribunal cantonal a renvoyé un dossier à l’office AI pour expertise pluridisciplinaire en indiquant exactement les disciplines qui doivent la composer, l’office AI a les mains liées. Il est tenu d’exécuter cette décision et ne peut pas modifier la configuration de l’expertise.

En conclusion, il convient de relever que les offices AI s’efforcent constamment de confier des mandats d’expertises monodisciplinaires, bidisciplinaires ou pluridisciplinaires de la manière aussi rapide et équitable que possible. L’OFAS tâche donc, précisément pour les disciplines médicales rarement demandées ou proposées, d’obtenir la collaboration de nouveaux praticiens, en particulier dans le cadre des expertises pluridisciplinaires. Mais comme l’expérience montre que l’offre en experts médicaux qualifiés est très limitée en Suisse, il ne sera pas possible d’éviter totalement à l’avenir des délais d’attente relativement longs, selon la discipline requise ou la région linguistique considérée.

 

Bibliographie et documents

Rapports annuels de SuisseMED@P.

Lettre-circulaire AI n° 334 du 7 juillet 2015.

Ralf Kocher, « SuisseMED@P a deux ans : où en sommes-nous ? », in ­Sécurité sociale CHSS no 5, 2014.

 

 

Article de Michela Messi et Ralph Leuenberger, paru in CHSS Sécurité sociale, 4/2016, consultable ici : http://bit.ly/2hhZb66