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Assurances sociales : Sortie du Royaume-Uni de l’UE (Brexit)

Assurances sociales : Sortie du Royaume-Uni de l’UE (Brexit)

 

Bulletin à l’intention des caisses de compensation AVS et des organes d’exécution des PC No 378, 06.07.2016, consultable ici : AVS/PC Bulletin No 378

 

 

Le Royaume-Uni a décidé le 23 juin 2016, lors d’un référendum, de quitter l’Union européenne.

Le gouvernement britannique va à présent devoir décider comment mettre en œuvre la volonté exprimée par le peuple. Le retrait de l’UE fera l’objet de négociations entre le Royaume-Uni et l’UE qui prendront un certain temps. Le traité sur l’Union européenne prévoit une durée de deux ans pour ces négociations. Cette durée peut toutefois être prolongée avec le consentement du Royaume-Uni et de tous les Etats membres. La sortie du Royaume-Uni ne prendra effet sur le plan juridique qu’après l’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou à l’expiration du délai de négociation.

Malgré la décision de sortie du Royaume-Uni de l’UE, toutes les règles et accords actuellement en vigueur demeurent pour l’instant applicables aux ressortissant(e)s suisses (p.ex. l’accord sur la libre circulation des personnes et – sur le plan de la sécurité sociale – en particulier l’annexe II). Aucune modification n’intervient encore à ce stade.

Le Conseil fédéral suivra de près les négociations entre l’UE et le Royaume-Uni afin de pouvoir négocier une solution par la suite. Il s’agira de prendre en considération les intérêts des assurés concernés. Une perte des droits acquis n’est pas à craindre. L’accord sur la libre circulation des personnes prévoit explicitement qu’en cas de dénonciation ou de non reconduction de l’accord, les droits acquis ne sont pas touchés.

La convention bilatérale de sécurité sociale conclue entre la Suisse et le Royaume-Uni, suspendue suite à l’entrée en vigueur de l’accord sur la libre circulation des personnes, demeure valable. Si, contre toute attente, aucune nouvelle réglementation n’était adoptée et que les dispositions actuelles n’étaient plus applicables, cette convention bilatérale serait applicable aux domaines compris dans son champs d’application (AVS, AI, allocations familiales dans l’agriculture).

Le DFAE a mis sur pied une ligne d’appel d’urgence qui fournit des informations aux ressortissant(e)s suisses concernés :

https://www.eda.admin.ch/dea/fr/home/aktuell/medienmitteilungen.html/dea/fr/meta/news/2016/6/24/62381

 

 

Convention AELE – actualisation de la partie Sécurité sociale

Convention AELE – actualisation de la partie Sécurité sociale

 

Paru in Sécurité sociale [CHSS] 2-2016, consultable ici : Convention AELE – actualisation de la partie Sécurité sociale

 

La partie Sécurité sociale de la Convention AELE a été mise à jour au 1er janvier 2016, pour correspondre aux derniers développements de l’Accord sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’UE.

 

 

 

8C_53/2015 (f) du 09.12.2015 – proposé à la publication – Droit aux allocations familiales pour un ressortissant du Kosovo, sans activité lucrative en Suisse – 19 al. 1 LAFam / Interprétation de la Convention de sécurité sociale avec l’ex-Yougoslavie

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_53/2015 (f) du 09.12.2015, proposé à la publication

 

Consultable ici : bit.ly/1PlRaDo

 

Droit aux allocations familiales pour un ressortissant du Kosovo, sans activité lucrative en Suisse – 19 al. 1 LAFam

Interprétation de la Convention de sécurité sociale avec l’ex-Yougoslavie – Droit aux allocations familiales pour une personne sans activité lucrative niée

 

Assuré, né en 1968, ressortissant du Kosovo, vivant à Genève et bénéficiant de l’aide sociale, est père de trois enfants (nés resp. en 1994, 1996 et 1998). Son épouse vit au Kosovo.

En juillet 2012, il a présenté une demande d’allocations familiales pour l’enfant B. (né en 1994), qui était venu le rejoindre en Suisse en juillet 2011. Le 5 juillet 2013, la Caisse d’allocations familiales pour personnes sans activité lucrative (ci-après en abrégé: CAFNA) lui a reconnu le droit à des allocations familiales pour cet enfant avec effet au 01.08.2011.

Au mois de novembre 2013, l’assuré a demandé des prestations familiales, à partir de 2007, pour ses deux autres enfants restés au Kosovo. La CAFNA a rejeté, par décision, cette demande au motif principal que les allocations ne pouvaient être versées aux personnes sans activité lucrative qu’à la condition que les enfants fussent domiciliés en Suisse.

 

Procédure cantonale

Par arrêt du 19.12.2014, le tribunal cantonal a partiellement admis son recours, reconnaissant le droit aux allocations familiales pour ses trois enfants du 01.01.2009 au 31.03.2010.

 

TF

Allocations familiales pour les personnes obligatoirement assurée AVS sans activité lucrative

La loi fédérale du 24.03.2006 sur les allocations familiales (loi sur les allocations familiales [LAFam ; RS 836.2]) a organisé (à côté d’un régime pour les personnes exerçant une activité lucrative non agricole) un régime en faveur des personnes sans activité lucrative. Selon l’art. 19 al. 1 LAFam, les personnes obligatoirement assurées à l’AVS en tant que personnes sans activité lucrative sont considérées comme sans activité lucrative. Elles ont droit aux allocations familiales prévues aux art. 3 et 5. L’art. 7 al. 2 n’est pas applicable. Ces personnes relèvent du canton dans lequel elles sont domiciliées.

D’autre part, selon l’art. 4 al. 3 LAFam, le Conseil fédéral détermine les conditions d’octroi des allocations pour les enfants vivant à l’étranger (1ère phrase). En exécution de ce mandat, le Conseil fédéral a adopté l’art. 7 de l’ordonnance du 31.10.2007 sur les allocations familiales (OAFam ; RS 836.21). Dans sa version en vigueur depuis le 01.01.2012, le premier alinéa de cette disposition prévoit que pour les enfants ayant leur domicile à l’étranger, les allocations familiales ne sont versées que si une convention internationale le prévoit. La même condition figurait déjà dans la précédente version de cette disposition réglementaire (qui contenait toutefois d’autres limitations, non pertinentes en l’espèce). Le Tribunal fédéral a jugé que cette exigence restait dans les limites de l’art. 4 al. 3 LAFam et ne violait pas l’art. 8 al. 1 et 2 Cst. (ATF 141 V 43 consid. 2.1 p. 45; 138 V 392 consid. 4 p. 395; 136 I 297).

Conventions de sécurité sociale avec la Serbie, le Monténégro et la Bosnie-Herzégovine

La convention avec l’ex-Yougoslavie, qui continue à s’appliquer dans les relations avec la Serbie, le Monténégro et la Bosnie-Herzégovine, est restée applicable aux ressortissants du Kosovo jusqu’au 31 mars 2010 (RO 2010 p. 1203; ATF 139 V 263). Elle s’applique en Suisse, notamment, à la « législation fédérale sur les allocations familiales » (art. 1 er par. 1 let. a point iv de la convention). Elle s’applique aux actes législatifs et réglementaires couvrant une nouvelle branche d’assurance sociale et à ceux qui étendent les régimes existants à de nouvelles catégories de bénéficiaires (art. 1 er par. 2). Dès lors, même si la convention est entrée en vigueur bien avant la LAFam, il est admis que les allocations familiales visées par cette loi relèvent de la législation sur les allocations familiales au sens de la convention (KIESER / REICHMUTH, Bundesgesetz über die Familienzulagen, Praxiskommentar, 2010, n° 75 ad art. 4 LAFam; GÄCHTER/BURCH, § 1 Nationale und internationale Rechtsquellen, in Recht der Sozialen Sicherheit, vol. XI, 2014, p. 58 n. 1.168; cf. aussi ch. 322 DAFam). La convention traite du droit aux allocations familiales à ses art. 15 et 16, qui sont ainsi libellés:

Art. 15 : Les ressortissants des deux Parties contractantes bénéficient des allocations pour enfants prévues par les législations énumérées à l’article premier, quel que soit le lieu de résidence de leurs enfants.

Art. 16 : Si un enfant donne droit à des allocations pour enfants aussi bien en vertu de la législation suisse que de la législation yougoslave, les seules allocations dues sont celles de la législation du lieu de travail du père.

En règle ordinaire, les conventions bilatérales de sécurité sociale visent à assurer – sous réserve d’exceptions qui y sont expressément mentionnées – l’égalité de traitement entre les ressortissants des Parties contractantes quant aux droits et obligations découlant des dispositions des législations qu’elles énumèrent. Les conventions s’appliquent en priorité aux travailleurs migrants, ainsi qu’aux membres de leur famille, qui font généralement aussi partie du cercle des personnes protégées. S’agissant plus particulièrement de la convention avec l’ex-Yougoslavie, la limitation du champ d’application personnel se déduit de son art. 4. Selon cette disposition, en effet, la législation applicable est en principe celle de la Partie contractante sur le territoire de laquelle l’activité déterminante pour l’assurance est exercée. Cette règle exprime le principe de la lex loci laboris, à savoir l’assujettissement du travailleur au régime de sécurité sociale de l’Etat membre où il travaille. Il n’est pas prévu d’autres critères, subsidiaires, de rattachement, comme par exemple l’application de la législation de l’Etat du lieu de résidence. Interprété à la lumière de l’art. 4, l’art. 15 de la convention ne peut être compris qu’en ce sens que le droit aux allocations familiales est reconnu par la législation de l’une ou l’autre des Parties pour autant que le requérant soit soumis à la convention à raison de l’exercice d’une activité professionnelle sur son territoire.

Cette interprétation est confirmée par l’art. 16 précité de la convention, selon lequel la législation du lieu de travail du père est seule applicable en cas de concours de droits en vertu des deux législations. Contrairement à l’opinion des premiers juges, ce rattachement exclusif à la loi du lieu de travail présuppose, implicitement tout au moins, que les allocations soient dues de part et d’autre pendant l’exercice d’une occupation professionnelle et simultanée des deux parents sur le territoire de chacune des Parties contractantes.

Le contexte dans lequel la convention a été conclue ne permet pas une autre interprétation, bien au contraire. A l’époque, tant du côté de la Suisse que du côté de la Yougoslavie, les allocations familiales n’étaient pas liées à la personne de l’enfant. Elles n’étaient accordées qu’aux parents exerçant une activité professionnelle. En Suisse, ce n’est qu’à partir de la fin des années 1980 que certains cantons ont introduit successivement une réglementation pour les personnes sans activité lucrative (voir PASCAL MAHON, Les allocations familiales, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 2e éd. 2007, p. 1963 n. 35; voir aussi le rapport du 20 novembre 1998 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national sur l’initiative parlementaire « Prestations familiales (Fankhauser) « , FF 1999 2957). S’agissant de la Yougoslavie, le régime des allocations familiales s’appliquait à l’époque aux travailleurs non qualifiés après une période minimale d’activité. Pour les travailleurs qualifiés et pour les mères veuves, divorcées ou célibataires, qui subvenaient elles-mêmes à l’entretien des enfants, le droit naissait « dès le premier jour de leur emploi  » (Message du 4 mars 1963 concernant l’approbation d’une convention sur les assurances sociales conclue entre la Suisse et la Yougoslavie, FF 1963 I 687). L’exportation prévue par la convention n’était donc pas envisageable pour des parents sans activité lucrative.

On ne peut certes pas exclure d’emblée des situations où la cessation passagère ou momentanée d’activité ne devrait pas entraîner la perte de la qualité de travailleur au sens de la convention et, partant, la suppression du versement des allocations familiales pour des enfants résidant hors de Suisse. Il en irait ainsi, par exemple, d’une période d’incapacité de travail résultant d’une maladie ou d’un accident, d’un congé non payé ou encore d’un chômage involontaire. Dans le cas particulier, il ressort toutefois du jugement attaqué que, pour la période en cause, l’examen des comptes individuels AVS de l’assuré ne fait mention d’aucun employeur ni d’aucun revenu salarié. D’ailleurs, dans sa demande d’allocations familiales pour l’enfant B.__, l’assuré a signalé une activité de monteur en chauffage jusqu’en mai 2007 seulement. On ne saurait donc parler d’une cessation passagère d’activité.

 

Le TF admet le recours de la CAFNA et annule le jugement cantonal.

 

 

Arrêt 8C_53/2015 consultable ici : bit.ly/1PlRaDo