Guide Suva de l’assurance contre les accidents

Guide Suva de l’assurance contre les accidents

 

Le nouveau « Guide Suva de l’assurance contre les accidents », entièrement remanié à la suite de la révision de la LAA, est disponible. Ce document n’est disponible qu’en version électronique.

 

 

« Guide Suva de l’assurance contre les accidents » disponible ici : http://bit.ly/2krsGQQ

 

 

Le jugement sur les détectives des assurances est entré en force

Le jugement sur les détectives des assurances est entré en force

 

Paru in : Assurance Sociale Actualités 03/2017

 

La Suisse n’a pas déposé de recours contre un jugement de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) sur la surveillance d’une fraudeuse présumée à l’assurance. Les juges strasbourgeois avaient estimé que la filature d’une bénéficiaire zurichoise de l’AI par des détectives constituaient une violation de sa vie privée. En l’espèce, la Suisse n’a pas demandé le renvoi à la Grande Chambre de la CEDH. Les modifications législatives prévues ont joué un rôle déterminant dans la décision de ne pas aller plus loin. Les Commissions de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS) du Conseil national et du Conseil des Etats veulent en effet créer une base légale afin que les assureurs puissent employer des détectives en cas de soupçon de fraude à l’assurance sociale.

 

 

Voir également :

CSSS-N : Régler rapidement la question de la surveillance des assurés

Arrêt de la CrEDH Vukota-Bojić c. Suisse (en) du 18.10.2016 – Surveillance illicite d’une victime d’accident de la route par une compagnie d’assurances contraire à son droit à la vie privée

 

 

 

9C_633/2016 (f) du 28.12.2016 – Evaluation de l’invalidité – 16 LPGA / Revenu d’invalide selon ESS pour activités mono-manuelles légères / Abattement de 10% confirmé par le TF

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_633/2016 (f) du 28.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jE4Llv

 

Evaluation de l’invalidité – 16 LPGA

Revenu d’invalide selon ESS pour activités mono-manuelles légères

Abattement de 10% confirmé par le TF

 

TF

Evaluation de la capacité de travail exigible

L’avis de la coach professionnelle ne peut l’emporter sur l’évaluation des médecins: il ne constitue pas une appréciation objective de la capacité de travail de l’assuré, mais fait uniquement état d’éléments subjectifs liés au comportement de celui-ci (cf., par analogie, arrêts 8C_451/2012 du 28 mai 2013 consid. 4; 9C_631/2007 du 4 juillet 2008 consid. 4.1).

 

Revenu d’invalide

L’évaluation de l’invalidité s’effectue à l’aune d’un marché équilibré du travail (art. 16 LPGA). Cette notion présuppose un équilibre entre l’offre et la demande de main d’œuvre d’une part et un marché du travail structuré (permettant d’offrir un éventail d’emplois diversifiés, tant au regard des sollicitations intellectuelles que physiques) d’autre part (cf. ATF 110 V 273 consid. 4b p. 276). Il s’ensuit que pour évaluer l’invalidité, il n’y a pas lieu d’examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s’il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail si les places de travail disponibles correspondaient à l’offre de main d’œuvre (arrêt 9C_913/2012 du 9 avril 2013, consid. 5.2). Contrairement à ce qu’affirme l’assuré, l’administration n’avait donc pas à démontrer l’existence d’offres de travail concrètes disponibles et correspondant à ses limitations.

En l’espèce, pour fixer le revenu d’invalide exigible de l’assuré, l’office AI s’est fondé, conformément à la jurisprudence (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 p. 475), sur le salaire statistique auquel pouvaient prétendre en 2013 les hommes effectuant des activités simples et répétitives (niveau 4 de qualification). Celui-ci s’applique en principe à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité, parce qu’elle est physiquement trop astreignante, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail dans des travaux légers. Il est représentatif du revenu que ces assurés seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides, dès lors qu’il recouvre un large éventail d’activités variées et non qualifiées, n’impliquant pas de formation particulière et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (arrêt 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1). Le Tribunal fédéral a également confirmé à plusieurs reprises l’application de cette valeur pour déterminer le revenu exigible dans des activités mono-manuelles légères (cf. arrêt 8C_670/2015 du 12 février 2016 consid. 4.3 et les références citées). Compte tenu de cette jurisprudence, l’instance cantonale a déterminé le revenu d’invalide de manière correcte, d’autant plus que, comme il ressort de l’expertise de la CRR, l’assuré n’est pas dans la situation d’une personne entièrement privée de l’usage d’une main et devrait être en mesure d’utiliser son poignet et sa main gauche dans une activité légère ne sollicitant pas excessivement le poignet et la main en terme de force et de manutention de charges.

 

Abattement

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité et taux d’occupation). L’autorité ne doit pas procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération, mais à une évaluation globale des effets de ces facteurs sur le revenu d’invalide (ATF 126 V 75 consid. 5b/bb p. 80). La déduction globale ne peut excéder 25% du salaire statistique. L’étendue de l’abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d’appréciation de l’autorité cantonale. Le Tribunal fédéral revoit uniquement si l’instance précédente a abusé de celui-ci, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n’usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1 p. 73).

En l’espèce, l’assuré fait seulement valoir qu’il lui est plus difficile de trouver un travail du fait de l’usage limité de sa main. Cette argumentation ne suffit pas à établir que la déduction de 10% opérée par l’office AI et confirmée par l’autorité judiciaire cantonale constituerait un abus de leur pouvoir d’appréciation en la matière. En particulier, l’assuré ne démontre pas que la juridiction cantonale aurait ignoré d’autres facteurs pertinents, se serait fondée sur des considérations qui manquent de pertinence ou aurait violé le droit. Le grief doit donc également être rejeté.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_633/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jE4Llv

 

 

9C_746/2016 (f) du 11.01.2017 – Restitution de prestations indûment perçues – 25 LPGA / Bonne foi niée – délégation de la gestion de ses affaire à un tiers

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_746/2016 (f) du 11.01.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2l1IsU5

 

Restitution de prestations indûment perçues – 25 LPGA

Bonne foi niée – délégation de la gestion de ses affaire à un tiers

 

TF

Le fait de déléguer volontairement la gestion de ses affaires à un tiers alors qu’on n’a pas été officiellement reconnu comme étant totalement ou partiellement incapable de discernement ne permet pas de s’exonérer de toute responsabilité dans le non accomplissement de certaines obligations (cf. art. 101 CO).

Le TF confirme l’obligation de restituer le montant de 52’460 fr. indûment perçu.

 

 

 

Arrêt 9C_746/2016 consultable ici : http://bit.ly/2l1IsU5

 

 

9C_501/2016 (f) du 09.01.2017 – Droit aux indemnités journalières AI pendant des mesures de réadaptation / 22 al. 1 LAI – 8 al. 3 LAI

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_501/2016 (f) du 09.01.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2l3tFXQ

 

Droit aux indemnités journalières AI pendant des mesures de réadaptation / 22 al. 1 LAI – 8 al. 3 LAI

Cours effectués en dehors des heures usuelles de travail

 

TF

Aux termes de l’art. 22 al. 1 LAI, l’assuré a droit à une indemnité journalière pendant l’exécution des mesures de réadaptation prévues à l’art. 8 al. 3 LAI si ces mesures l’empêchent d’exercer une activité lucrative durant trois jours consécutifs au moins ou s’il présente, dans son activité habituelle, une incapacité de travail de 50% au moins. Selon la jurisprudence, les mesures de réadaptation doivent avoir lieu pendant trois jours consécutifs au moins même en relation avec la deuxième hypothèse de l’art. 22 al. 1 LAI (ATF 112 V 16 consid. 2c p. 17; 139 V 407 consid. 7 p. 406). L’art. 22 al. 6 LAI charge le Conseil fédéral de fixer les conditions auxquelles des indemnités journalières peuvent être allouées pour des jours isolés. L’art. 17 bis RAI, adopté sur la base de cette délégation de compétence, prévoit que l’assuré qui se soumet à une mesure de réadaptation durant trois jours isolés au moins au cours d’un mois a droit à une indemnité journalière: a. pour chaque jour de réadaptation durant lequel il est toute la journée empêché d’exercer une activité lucrative par la mesure de réadaptation; b. pour chaque jour de réadaptation et pour les jours se situant dans l’intervalle s’il présente, dans son activité habituelle, une incapacité de travail de 50% au moins.

En l’espèce, les cours de français correspondant à la mesure de réadaptation avaient eu lieu pendant une heure et demie (de 12h00 à 13h30) deux fois par semaine. Leur durée ne correspondait pas à trois jours consécutifs au moins, de telle sorte que les conditions de l’art 22 al. 1 LAI ne sont pas réunies.

L’octroi d’indemnités journalières ne peut pas non plus être fondé sur l’art. 17 bis RAI, qui exige que l’assuré se soumette à une mesure de réadaptation durant au moins trois jours isolés au cours d’un mois. Cette durée n’est pas atteinte au regard des heures quotidiennes de cours suivis par l’assuré, qui s’élevaient à bien moins qu’une demi-journée (cf. arrêt 9C_631/2015 du 21 mars 2016, consid. 4.4). En outre, la jurisprudence retient que l’assuré n’a pas le droit au paiement d’indemnités journalières lorsque la mesure de reclassement est prévue sous la forme de cours effectués en dehors des heures usuelles de travail (ATF 139 V 399 consid. 7.2 p. 406). La formation en cause, organisée entre 12h00 et 13h30, ne peut par conséquent donner lieu à l’octroi d’indemnités journalières.

 

Le TF admet le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_501/2016 consultable ici : http://bit.ly/2l3tFXQ

 

 

9C_363/2016 (f) du 12.12.2016 – Révision d’office d’une rente pour un associé-gérant d’une Sàrl / Comparaison des revenus – Aucun abattement sur le salaire statistique (ESS)

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_363/2016 (f) du 12.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2k2c0A5

 

Révision d’office d’une rente pour un associé-gérant d’une Sàrl

Choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité – Comparaison des revenus – Revenu d’invalide – 16 LPGA

Aucun abattement sur le salaire statistique (ESS)

 

Assuré travaillant en qualité d’installateur sanitaire et de chauffages au service d’une Sàrl (inscrite au Registre du commerce le 06.10.1999) est à la fois fondateur, associé-gérant et salarié de cette Sàrl, dont il détient 19 des 20 parts sociales. Incapacité d’exercer sa profession d’installateur à 100% depuis le 26.10.2001, puis à 80% à compter du 01.05.2002. Annonce à l’AI le 21.08.2002, où il indique un revenu mensuel de 8’000 fr. Après réadaptation (modification du cahier des charges dans son entreprise), octroi d’une rente entière d’invalidité à compter du 01.11.2002. Le droit à cette prestation a été confirmé en 2007 et en 2010.

Nouvelle révision d’office de la rente en 2013. Lors d’un examen au Service médical régional (SMR), l’assuré a déclaré au médecin qu’il travaillait à raison de deux à trois heures par jour, plutôt le matin, depuis mars 2006. Son activité consistait à superviser l’activité de l’entreprise et de la clientèle, représenter l’entreprise auprès des clients, établir des mandats, suivre des chantiers, organiser le travail et à contrôler le travail effectué par les ouvriers ; il s’occupait également des finances. Le médecin du SMR a constaté une amélioration de l’état de santé, compatible avec une activité d’administrateur à 80%, sans perte de rendement. Dans un projet de décision, l’office AI a fait savoir à l’assuré qu’il envisageait de supprimer la rente, les conditions du droit au versement de cette prestation n’étant plus réalisées. L’assuré a manifesté son opposition, indiquant qu’il travaillerait trois fois plus sans l’atteinte à la santé. L’office AI a supprimé la rente par décision, constatant par ailleurs que le chiffre d’affaires de la Sàrl avait plus que décuplé en dix ans. L’office AI a également retenu que le salaire annuel de 39’000 fr. que l’assuré percevait en 2013 (3’250 fr. par mois) ne correspondait pas à la réalité et qu’il avait été maintenu volontairement bas au profit de la Sàrl.

 

Procédure cantonale

Le tribunal cantonal ne s’est pas prononcé sur la méthode applicable à l’évaluation de l’invalidité. Pour cette autorité, l’assuré ne saurait toutefois déplorer l’absence d’une évaluation de son taux d’invalidité par comparaison des revenus, dans le cadre de la méthode ordinaire ou de la méthode spécifique. Il devait à tout le moins s’octroyer un salaire d’administrateur décent, en rapport avec le développement de sa société, d’autant que son épouse, salariée à mi-temps dans l’entreprise, gagnait 7’000 fr. par mois. On ne se trouvait donc plus dans un cas de sinistre à charge de l’assurance-invalidité.

Par jugement du 19.04.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

 

Choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité

Le choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité est une question de droit sur laquelle le Tribunal fédéral se prononce librement (arrêts 9C_385/2016 du 17 octobre 2016 consid. 2, 9C_926/2015 du 17 octobre 2016 consid. 1.2, 9C_237/2016 du 24 août 2016 consid. 2.2). Toutefois, la constatation du statut (comme personne sans invalidité), c’est-à-dire le point de savoir si et dans quelle mesure l’assuré aurait exercé une activité lucrative, relève d’une question de fait (arrêt 9C_3/2016 du 10 octobre 2016 consid. 1.2).

Chez les assurés actifs, le degré d’invalidité doit en principe être déterminé sur la base d’une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s’effectue, en règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité qui doit s’élever à un taux minimum de 40% pour ouvrir un droit à la rente (art. 28 al. 1 let. b LAI).

En l’espèce, les mesures d’ordre professionnel que l’assurance-invalidité a financées ont permis à l’assuré d’opérer une reconversion professionnelle et de modifier son cahier des charges dans l’entreprise où il exerce actuellement des tâches compatibles avec son état de santé. Ces mesures ont été couronnées de succès puisque postérieurement à sa réadaptation, l’assuré a pu continuer à travailler au service de la Sàrl, toujours en qualité de salarié mais en exerçant des tâches compatibles avec ses problèmes de santé. On se trouve ainsi dans la situation où le taux d’invalidité doit être fixé en application de la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 1 LAI).

 

Comparaison des revenus

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d’influencer le droit à la rente survenues jusqu’au moment où la décision est rendue être prises en compte (cf. ATF 129 V 222 consid. 4.1 et 4.2).

 

Revenu sans invalidité

Selon la jurisprudence, le revenu hypothétique de la personne valide se détermine, en règle générale, en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce qu’elle aurait effectivement pu réaliser au moment déterminant si elle était en bonne santé. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible, raison pour laquelle il se déduit, en principe, du salaire réalisé par l’assuré avant l’atteinte à la santé, en tenant compte de l’évolution des salaires jusqu’au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1 p. 224 et la référence).

Dans le cas d’espèce, l’assuré disposait d’un revenu mensuel de 8’000 fr. jusqu’en 2002. Pour la comparaison, ce revenu sans invalidité doit être adapté à l’évolution des salaires nominaux jusqu’au moment déterminant pour l’adaptation de la rente (en 2015). De 2002 à 2010, cet indice est passé de 111,5 à 124,5 points (1993: 100), puis à 103,7 points en 2015 (2010: 100). Le revenu de 8’000 fr. doit ainsi être adapté à 9’263 fr. pour la comparaison, soit à 111’159 fr. par an.

 

Revenu d’invalide

Le revenu d’invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de la personne assurée. Lorsque l’activité exercée après la survenance de l’atteinte à la santé repose sur des rapports de travail particulièrement stables, qu’elle met pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle exigible et que le gain obtenu correspond au travail effectivement fourni et ne contient pas d’éléments de salaire social, c’est le revenu effectivement réalisé qui doit être pris en compte pour fixer le revenu d’invalide. En l’absence d’un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l’atteinte à la santé, n’a pas repris d’activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible -, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) (ATF 135 V 297 consid. 5.2 p. 301; 129 V 472 consid. 4.2.1 p. 475).

Ainsi, lorsqu’un assuré ne met pas à profit sa capacité de travail restante après l’atteinte à la santé, son revenu d’invalide doit être calculé sur une base théorique et abstraite. Ce faisant, on ne saurait se fonder sur une seule activité déterminée ou sur un tout petit nombre seulement – quand bien même cette activité serait parfaitement adaptée aux limitations en cause – dès lors que rien ne permet de penser que ce revenu serait représentatif de celui que l’assuré pourrait obtenir sur le marché du travail équilibré entrant en considération pour lui (cf. ATF 129 V 472 consid. 4.2.2 p. 480). Pour que le revenu d’invalide corresponde aussi exactement que possible à celui que l’assuré pourrait réaliser en exerçant l’activité que l’on peut raisonnablement attendre de lui (cf. ATF 128 V 29 consid. 1 p. 30), l’évaluation dudit revenu doit nécessairement reposer sur un choix large et représentatif d’activités adaptées au handicap de la personne assurée.

En l’occurrence, le revenu mensuel de 3’250 fr. ne peut être retenu à titre de gain d’invalide, car il ne correspond pas à ce qui est exigible de la part du recourant qui dispose d’une capacité de travail de 80%. En outre, la prise en compte de cet unique revenu serait inconciliable avec le principe général de l’obligation de l’assuré de réduire le dommage (cf. ATF 138 I 205 consid. 3 p. 208), dès lors qu’il correspond à une durée quotidienne de travail de deux à trois heures, selon les dires de l’assuré. En l’absence d’une mise en valeur de toute l’étendue de la capacité de travail disponible, il y a lieu de s’appuyer sur les statistiques salariales comme le prévoit la jurisprudence précitée. Les nouvelles tables de l’ESS 2012 sont applicables puisque le taux d’invalidité n’avait pas été fixé sur la base de données statistiques lors de l’octroi de la rente et que la révision de cette prestation ne résulte pas exclusivement du recours à ces tables (à ce sujet, voir ATF 142 V 178 consid. 2.5.8.1 p. 189 sv.) mais d’une modification des circonstances personnelles du recourant (changement d’activité dans l’entreprise). Dans ce contexte, les qualifications professionnelles du recourant et les tâches de direction qu’il accomplit actuellement justifient de retenir le niveau de compétences 3 de l’ESS 2012, table TA1_skill_level (p. 34), pour un homme.

Il faut ainsi partir d’un gain déterminant de 7’204 fr. (valeur standardisée), qui doit être adapté à 7’338 fr. pour l’année 2015, compte tenu de l’évolution des salaires nominaux (103,7 points en 2015, 101,8 en 2012). Comme ce gain est basé sur une durée hebdomadaire de travail de 40 heures, inférieure à la moyenne annuelle dans les entreprises, il y a lieu de l’ajuster à 41,7 heures par semaine, ce qui donne un salaire mensuel de 7’650 fr., ou annuel de 91’804 fr. Compte tenu d’une capacité de travail de 80%, le gain annuel est de 73’443 fr.

Il convient ensuite d’examiner si un facteur de réduction au gain annuel statistique de 73’443 fr. doit être appliqué (cf. ATF 126 V 75). Comme la mise en œuvre de la capacité résiduelle de travail du recourant sur le marché équilibré du travail ne dépend pas d’activités légères, simples et répétitives (au regard desquelles la jurisprudence sur la réduction du salaire d’invalide déterminé selon les ESS a été développée [ATF 126 V 75]) et que l’assuré est en mesure d’exercer des activités requérant des connaissances professionnelles spécialisées avec une limitation temporelle peu importante, il n’y a pas lieu de prendre en considération une réduction du salaire statistique, résultant d’un large éventail d’activités à portée du recourant, en fonction également de son expérience professionnelle (arrêts 9C_607/2015 du 20 avril 2016 consid. 5.3.2, I 16/98 du 15 février 1999 consid. 3b in SVR 2000 IV n° 1 p. 2).

Le taux d’invalidité étant de 34%, la rente d’invalidité est supprimée.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_363/2016 consultable ici : http://bit.ly/2k2c0A5

 

 

8C_80/2016 (f) du 16.01.2017 – Rente d’invalidité LAA – Evaluation de l’invalidité – 16 LPGA / Capacité de travail réduite de manière durable avant l’accident par suite d’une atteinte à la santé non assurée – 28 al. 3 OLAA

Arrêt du Tribunal fédéral 8C_80/2016 (f) du 16.01.2017

 

Consultable ici : http://bit.ly/2jJA5KW

 

Rente d’invalidité LAA – Evaluation de l’invalidité – 16 LPGA

Capacité de travail réduite de manière durable avant l’accident par suite d’une atteinte à la santé non assurée – 28 al. 3 OLAA

 

Assuré au bénéficie d’une rente entière de l’AI, fondée sur un taux d’invalidité de 81%, depuis le 01.11.1996 en raison d’une affection cardiaque. Victime d’un accident de la circulation le 05.07.2010, l’assuré a subi une fracture instable de C5-C6 avec lésion incomplète disco-ligamentaire en C3-C4, ainsi qu’une fracture du scaphoïde gauche. Par décision, confirmée sur opposition, l’assurance-accidents a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité fondée sur un taux de 20% mais lui a dénié le droit à une rente d’invalidité au motif que les séquelles de l’accident du 05.07.2010 ne limitaient pas sa capacité de gain.

 

TF

Si l’assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d’invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA).

Le Conseil fédéral règle l’évaluation du degré de l’invalidité dans des cas spéciaux. Il peut à cette occasion déroger à l’art. 16 LPGA (art. 18 al. 2 LAA). Faisant usage de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a adopté l’art. 28 al. 3 OLAA. Aux termes de cette disposition, si la capacité de travail de l’assuré était déjà réduite de manière durable avant l’accident par suite d’une atteinte à la santé non assurée, il y a lieu, pour évaluer l’invalidité, de comparer le revenu que l’assuré aurait pu réaliser compte tenu de la diminution de sa capacité de travail initiale avec celui qu’il pourrait encore obtenir en dépit des suites de l’accident et de l’atteinte préexistante. Sont visées ici des atteintes à la santé dissociables. Dans ce cas, il n’y a pas matière à réduction selon l’art. 36 al. 2 LAA parce qu’est déterminant pour l’évaluation du degré d’invalidité le revenu réduit perçu avant l’accident (cf. JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L’assurance-accidents obligatoire in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd., 2016, n. 251 p. 983).

En l’espèce, il est incontestable que selon les experts de la PMU, l’activité de chauffeur-livreur auxiliaire est encore tout à fait exigible en dépit des séquelles de l’accident. En revanche, sur le vu des conclusions de l’expert orthopédiste, l’assuré n’est plus apte à exercer cette profession dans la même mesure qu’auparavant à raison de 40%, consistant à effectuer deux jours de travail de huit heures consécutives. C’est pourquoi l’expert propose d’aménager l’activité en ce sens que l’intéressé travaille à raison de demi-journées seulement, « soit deux fois deux demi-journées, avec un jour de repos complet entre deux demi-journées consécutives », et il infère de cela que la capacité de travail exigible est désormais de 20%. Ce taux est par ailleurs confirmé par les experts dans leur appréciation du cas, ainsi que leurs réponses aux questions de la cour cantonale.

Cela étant, si, selon l’expert orthopédiste, l’assuré est apte à travailler deux fois deux demi-journées de quatre heures, avec un jour de repos complet entre deux demi-journées consécutives, force est de constater que la durée d’activité hebdomadaire est comparable à celle que l’intéressé exerçait avant l’accident, à savoir deux jours de travail de huit heures consécutives. Dans ces conditions, on ne comprend donc pas pourquoi les experts concluent à un taux de capacité de travail de 20% au lieu de 40%, laissant ainsi apparaître une contradiction ou, à tout le moins une divergence, entre la motivation et les conclusions de l’expertise. Comme le soutient l’assurance-accidents, les réserves entachant la force probante du rapport d’expertise de la PMU constituaient dès lors un motif sérieux pour que la cour cantonale ordonnât un complément d’expertise.

 

Le TF admet le recours de l’assurance-accidents et renvoie la cause à la juridiction cantonale pour nouveau jugement après complément d’instruction sous la forme d’une demande d’éclaircissement adressée aux experts.

 

 

Arrêt 8C_80/2016 consultable ici : http://bit.ly/2jJA5KW

 

 

9C_570/2016 (f) du 05.12.2016 – Révision d’office d’une rente d’invalidité – Date d’effet de l’augmentation de la rente AI – 88bis RAI / « Journal des révisions » de l’office AI – Gestion des documents – 46 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_570/2016 (f) du 05.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2j8ajUZ

 

Révision d’office d’une rente d’invalidité – Date d’effet de l’augmentation de la rente AI – 88bis RAI

« Journal des révisions » de l’office AI – Gestion des documents – 46 LPGA

 

Assurée au bénéfice d’un quart de rente depuis le mois de novembre 1997 ainsi qu’une demi-rente à partir du mois de février 1998. Lors de deux procédures de révision, le droit à une demi-rente a été maintenu à la fin de la première (décision du 01.09.2011) et il a été provisoirement augmenté à une rente entière pour la période allant du 01.02.2012 au 31.01.2014, puis rétabli à une demi-rente au terme de la seconde (décision du 24.07.2014).

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.07.2016, admission partielle du recours. Reconnaissance du droit de l’assurée à la rente entière pour la période limitée comprise entre les 01.01.2012 et 30.04.2014

 

TF

Dans l’éventualité où une révision du droit à la rente à lieu d’office, l’augmentation des rentes de l’assurance-invalidité prend effet au plus tôt à compter du mois pour lequel la révision était prévue (cf. art. 88bis al. 1 let. b RAI).

L’office recourant reproche à l’autorité judiciaire cantonale d’avoir violé l’art. 88bis al. 1 let. b RAI en fixant au 01.01.2012 la date à partir de laquelle la demi-rente octroyée à l’assurée dès le 01.02.1998 devait être augmentée à une rente entière dans la mesure où il avait arrêté la date de la dernière révision d’office au 01.02.2012 dans le « journal des révisions » qu’il tenait.

Selon le TF, le raisonnement tenu par l’administration est fondé : l’augmentation de la rente ne peut prendre effet qu’à compter du mois pour lequel la révision était prévue puisqu’il s’agit d’une procédure de révision entreprise d’office (art. 88bis al. 1 let. b RAI).

En ce qui concerne la date à laquelle la révision d’office a été prévue, l’administration fait reposer son argumentation sur un seul extrait de son « journal des révisions ». Or, comme la date qu’il est censé constater est déterminante pour trancher le litige, un tel document doit figurer au dossier (sur la gestion des documents, cf. art. 46 LPGA) et pas seulement être déposé pour la première fois au cours de l’instance fédérale, comme une preuve nouvelle au sens de l’art. 99 al. 1 LTF, sans même que ne soit exposé en quoi il résulterait de l’acte attaqué (ATF 133 III 393 consid. 3 p. 395), ni pourquoi il n’a pas pu être produit en instance cantonale. Le document évoqué est donc irrecevable.

La date du 01.02.2012 a toutefois été mentionnée par l’office recourant en relation avec l’art. 88bis al. 1 RAI dans le projet de décision du 10.02.2014 ainsi que dans la décision du 14.07.2014, sans qu’elle n’ait jamais été remise en question par l’assurée. En instance fédérale, cette dernière indique expressément ne pas mettre en doute la véracité des indications de l’administration à ce sujet.

En conséquence, on constate que la révision avait été prévue au 01.02.2012, ce qui justifie l’augmentation de la rente à partir de cette date. L’argumentation contraire de l’assurée n’est pas pertinente puisque le droit à la rente a régulièrement fait l’objet de révisions, de sorte qu’on ne saurait reprocher « une lenteur administrative » à l’office recourant.

 

Le TF admet le recours de l’office AI.

 

 

Arrêt 9C_570/2016 consultable ici : http://bit.ly/2j8ajUZ

 

 

4A_234/2016 (f) du 19.12.2016 – proposé à la publication – Responsabilité de l’avocat d’office / Avocat d’office n’est pas un agent public au sens de l’art. 61 al. 1 CO

Arrêt du Tribunal fédéral 4A_234/2016 (f) du 19.12.2016, proposé à la publication

 

Consultable ici : http://bit.ly/2kvXd43

 

Responsabilité de l’avocat d’office

Avocat d’office n’est pas un agent public au sens de l’art. 61 al. 1 CO

 

 

TF

Entre l’avocat d’office auquel il est donné un mandat d’assistance judiciaire, d’une part, et la collectivité publique qui lui confie ce mandat, d’autre part, il existe un rapport juridique soumis au droit public, lequel régit notamment l’obligation d’accepter le mandat, les motifs de libération du mandat ainsi que la rétribution due pour l’activité exercée; de ce fait, l’avocat d’office accomplit une tâche étatique (ATF 132 I 201 consid. 7.1 p. 205; 122 I 322 consid. 3b p. 325; 117 Ia 22 consid. 4a p. 23; 113 Ia 69 consid. 6 p. 71; cf. également ATF 131 I 217 consid. 2.4 p. 220; Vincent Spira, L’avocat au bénéfice de l’assistance juridique, in Mélanges en l’honneur de Dominique Burger, 2008, p. 330; Pierre Christe, Rôle et fonction de l’avocat dans la protection des droits, RDS 107/1988 II p. 497). Ce lien de droit public entre l’avocat d’office et la collectivité publique n’implique pas nécessairement que le droit public régisse également les rapports entre l’avocat d’office et la personne qu’il assiste sur mandat de la collectivité publique (cf. ATF 60 I 12 consid. 1 p. 17; ROLAND Brehm, Berner Kommentar, 4e éd. 2013, n° 21 ad art. 61 CO). Il faut admettre au contraire que ces rapports-ci sont soumis au droit privé (Walter Fellmann, Berner Kommentar, 1992, n° 146 ad art. 394 CO et n° 56 ad art. 395 CO; Georg Gautschi, Berner Kommentar, 3e éd. 1971, n° 30b ad art. 394 CO; cf. pour le droit actuel, Michel Valticos, in Commentaire romand – loi sur les avocats, 2010, n° 252 ad art. 12 LLCA; contra apparemment: Spira, op. cit., p. 330). Il s’ensuit qu’envers la personne qu’il assiste, l’avocat d’office répond d’un éventuel défaut de diligence sur la base du droit privé. Ainsi, dans un arrêt se rapportant à une cause civile où l’avocat d’office d’un enfant né hors mariage et de sa mère avait laissé passer le délai pour ouvrir action en paternité, le Tribunal fédéral a jugé que l’avocat d’office ne contestait plus, à bon droit, répondre du dommage causé à l’enfant et à la mère sur la base des règles de droit privé sur le mandat (ATF 87 II 364 consid. 1 p. 368 s.).

En l’espèce, la question est de savoir si le droit cantonal peut déroger à ce régime et prévoir une responsabilité exclusive de l’État en cas de mauvaise exécution du mandat par l’avocat d’office (cf. ATF 127 III 248 consid. 1b p. 251 s.). D’aucuns ont répondu par l’affirmative, estimant que le canton peut notamment renvoyer à la législation cantonale en matière de responsabilité des agents publics envers les administrés. Leur opinion se fonde principalement sur le fait que le Tribunal fédéral a admis un tel renvoi pour le notaire; ces auteurs relèvent en outre que la notion de fonctionnaires et employés publics est interprétée très largement dans la jurisprudence (Piermarco Zen-Ruffinen, Assistance judiciaire et administrative: les règles minima imposées par l’article 4 de la Constitution fédérale, JT 1989 I p. 53; Pierre Wessner, La responsabilité professionnelle de l’avocat au regard de son devoir général de diligence, RJN 1986 p. 15 s.).

La législation cantonale peut déroger aux dispositions de droit privé fédéral en ce qui concerne la responsabilité encourue par des fonctionnaires et employés publics pour le dommage et le tort moral qu’ils causent dans l’exercice de leur charge (art. 61 al. 1 CO; cf. ATF 111 II 149 consid. 2a p. 151). Le but de cette disposition est de permettre au canton de protéger ses employés face à des prétentions injustifiées de tiers (Brehm, op. cit., n° 5b ad art. 61 CO). Est concernée toute personne qui, même sans être au service de l’État, est investie d’attributions de droit public (ATF 96 II 45; 127 III 538 consid. 4a p. 539).

L’avocat d’office, au même titre que l’avocat de choix, exerce une activité d’avocat, à savoir celle de défendre en toute indépendance les intérêts d’un justiciable dans le cadre d’une procédure devant les autorités judiciaires; comme l’avocat choisi, il est mandaté pour sauvegarder les intérêts particuliers d’un justiciable déterminé et pour rien d’autre. Certes, le mandat d’office est donné par la collectivité publique afin de garantir l’égalité des parties dans le procès, ce qui est non seulement dans l’intérêt du bénéficiaire de l’assistance judiciaire, mais aussi dans l’intérêt public; cela ne signifie pas pour autant que l’avocat d’office, souvent proposé par la partie qui entend requérir l’assistance judiciaire, ait par rapport à cette partie un autre rôle que s’il était avocat de choix. On peut d’ailleurs se demander si l’égalité des parties ne commande pas la représentation par un avocat personnellement responsable tant pour la partie au bénéfice de l’assistance judiciaire que pour la partie économiquement en mesure de mandater elle-même un avocat, afin d’éviter le sentiment chez la première d’avoir un défenseur éventuellement moins intéressé à faire preuve de toute la diligence nécessaire. Quoi qu’il en soit, l’avocat commis d’office a un mandat public en faveur d’un tiers, le bénéficiaire de l’assistance judiciaire, mais ne se trouve pas dans un rapport de subordination quelconque face à la collectivité publique qui l’a mandaté, laquelle ne saurait lui donner d’instructions sur la manière d’exercer le mandat confié. Il n’est pas non plus soumis à une surveillance différente de celle à laquelle il serait soumis en tant qu’avocat de choix. Le fait qu’il reçoive, le cas échéant, des honoraires réduits est sans pertinence pour la question à trancher, ces honoraires devant au demeurant être fixés de façon à couvrir tous ses frais généraux, dont font partie les coûts de l’assurance responsabilité civile professionnelle (cf. ATF 137 III 185 consid. 5.4 p. 190).

Par ailleurs, le rôle de l’avocat d’office se différencie fondamentalement de celui du notaire. Ce dernier accomplit des actes de puissance publique, par exemple lorsqu’il établit un acte authentique. Il est alors un officier public dont les relations avec ses clients relèvent du droit public. Certes, le notaire exerce également d’autres activités, par exemple de conseil, qui ressortissent au droit privé. Distinguer les unes des autres peut toutefois se révéler difficile; ainsi, l’instrumentation d’un acte authentique est souvent liée à une activité de conseil juridique fournie aux parties à l’acte. Un régime de responsabilité uniforme du notaire peut alors être souhaitable. C’est pourquoi le Tribunal fédéral a admis que les cantons étaient habilités, en vertu de l’art. 6 CC, à régler la responsabilité des notaires pour l’ensemble de leurs activités, tant celles relevant du droit public que celles relevant du droit privé (cf. ATF 126 III 370 consid. 7 p. 372 ss). A la différence du notaire qui est en premier lieu un officier public, l’avocat, le plus souvent, agit principalement dans le cadre de mandats privés. Et lorsqu’il est commis d’office, il ne devient pas un officier public; certes, il a une qualité officielle (obrigkeitliche Bestellung, cf. art. 395 CO) et remplit une tâche d’intérêt public, mais il n’est pas une personne investie d’attributions de droit public (hoheitliche Amtsverrichtung).

En conséquence, il faut admettre que sous le droit antérieur à l’entrée en vigueur de la LLCA, les cantons ne pouvaient pas exclure la responsabilité civile de l’avocat d’office. Autre est la question, non pertinente en l’espèce, de la compétence pour introduire, par le biais du droit cantonal, une responsabilité du canton en sus de celle de l’avocat d’office découlant du droit privé fédéral.

La LLCA n’a rien changé à cet égard. Cette loi fixe les principes applicables à l’exercice de la profession d’avocat (art. 1 LLCA) par une réglementation exhaustive des règles professionnelles de l’avocat en Suisse (Message du 28 avril 1999 concernant la loi fédérale sur la libre circulation des avocats, FF 1999 5368 ch. 233.2; Bohnet/Othenin-Girard/Schweizer, in Commentaire romand – loi sur les avocats, 2010, n° 52 ad art. 1 LLCA). La seule réserve en faveur des cantons est la possibilité de fixer, dans le cadre de la LLCA, les exigences pour l’obtention du brevet d’avocat et le droit d’autoriser les titulaires des brevets d’avocat qu’ils délivrent à représenter les parties devant leurs propres autorités judiciaires (art. 3 LLCA). Pour être inscrit au barreau, condition nécessaire pour pratiquer la représentation en justice, l’avocat doit être en mesure de pratiquer en toute indépendance et il ne peut être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal des avocats (art. 4 et art. 8 al. 1 let. d LLCA). A teneur de l’art. 12 let. b LLCA, l’avocat inscrit au barreau exerce son activité professionnelle non seulement en toute indépendance et en son nom personnel, mais également sous sa propre responsabilité; ces exigences s’appliquent sans restriction aux causes dans lesquelles l’avocat a été commis d’office (cf. art. 12 let. g LLCA). Le caractère exhaustif de l’art. 12 LLCA s’oppose ainsi à toute réglementation cantonale excluant la responsabilité de l’avocat d’office pour les dommages dus à un défaut de diligence lors de l’exécution du mandat d’office. Au demeurant, une réglementation différente de la responsabilité de l’avocat d’office selon les cantons n’est guère conciliable avec l’unification de la réglementation professionnelle de l’avocat voulue par la LLCA.

En résumé, l’avocat d’office, même s’il exerce une tâche d’intérêt public, n’est pas un agent public au sens de l’art. 61 al. 1 CO. Conformément à l’art. 49 Cst., le droit cantonal ne peut donc pas déroger au droit privé fédéral, en excluant la responsabilité civile personnelle de l’avocat d’office.

C’est dès lors en violation du droit fédéral que la cour cantonale a nié la légitimation passive de l’avocat d’office.

 

 

Arrêt 4A_234/2016 consultable ici : http://bit.ly/2kvXd43

 

 

9C_587/2016 (f) du 12.12.2016 – Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie reprise par l’office AI et le tribunal cantonal – 44 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_587/2016 (f) du 12.12.2016

 

Consultable ici : http://bit.ly/2j8lgpO

 

Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie reprise par l’office AI et le tribunal cantonal / 44 LPGA

 

Première demande AI en raison d’une tumeur osseuse bénigne du doigt. Par décision du 16.08.2012, l’office AI a rejeté la demande de l’assurée, fondant sa décision en particulier sur le rapport d’examen rhumatologique du Service médical régional de l’AI.

Nouvelle demande AI le 10.04.2013, en raison d’une dépression depuis septembre 2012. L’office AI a procédé aux investigations habituelles. L’administration a également obtenu copie du rapport de l’expertise réalisée sur mandat de l’assureur perte de gain, daté du 21.03.2014. Le médecin-expert, spécialiste en psychiatrie, avait retenu que les troubles étaient sans incidence sur la capacité de travail de l’assurée. En se fondant sur ces informations, l’administration a décidé de rejeter la demande de l’assurée.

 

Procédure cantonale

La juridiction cantonale a constaté que l’assurée ne présentait pas de nouvelle atteinte de nature somatique, mais souffrait de troubles psychiques, diagnostiqués tant par son médecin traitant que par l’expert mandaté par l’assureur perte de gain. Se fondant sur le rapport de cet expert, le tribunal cantonal a cependant retenu que ces affections étaient sans incidence sur la capacité de travail de l’assurée à partir du 01.07.2013.

Par jugement du 05.07.2016, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assurée fait valoir que la juridiction cantonale aurait violé l’art. 44 LPGA, dès lors que les droits procéduraux de l’assurée n’auraient pas été respectés lors la mise en œuvre de l’expertise [réalisée sur demande de l’assurance maladie perte de gain].

Selon l’art. 44 LPGA, si l’assureur recourt aux services d’un expert indépendant pour élucider les faits, il donne connaissance du nom de celui-ci aux parties; celles-ci peuvent récuser l’expert pour des raisons pertinentes et présenter des contre-propositions.

En l’occurrence, l’office AI n’a pas lui-même mis en œuvre une expertise auprès d’un médecin externe à l’assurance-invalidité, mais a recueilli un rapport médical initié par un tiers. L’assurée a eu connaissance de l’expertise au moment où l’office AI lui a transmis son projet de décision et a pu se prononcer à son égard, son médecin traitant ayant du reste fait parvenir son appréciation y relative à l’office AI.

Dans ces circonstances, les droits procéduraux prévus par l’art. 44 LPGA ne trouvent pas application : l’administration n’a pas elle-même recouru aux services de l’expert indépendant, ni n’est intervenue dans la mise en œuvre de l’expertise, par exemple en posant des questions au spécialiste, ce dont elle aurait alors dû informer l’assurée pour lui donner l’occasion d’en faire de même (arrêt 8C_254/2010 du 15 septembre 2010 consid. 4.2).

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_587/2016 consultable ici : http://bit.ly/2j8lgpO