9C_325/2021 (f) du 21.12.2021 – Méthode extraordinaire de l’évaluation de l’invalidité / 16 LPGA

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_325/2021 (f) du 21.12.2021

 

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Méthode extraordinaire de l’évaluation de l’invalidité / 28a LAI – 16 LPGA

 

Assuré, né en 1962, exploite en tant qu’indépendant une entreprise de menuiserie-charpenterie depuis 1988. Dépôt de la demande AI le 22.04.2016, en raison d’une incapacité de travail depuis octobre 2015 (opérations aux épaules consécutives à des accidents).

Eléments médicaux : l’assuré présentait une pleine capacité de travail dans son activité habituelle, avec toutefois une diminution de rendement de 75%, ainsi qu’une pleine capacité de travail dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles (port de charges limité à 5 kg, pas d’activités lourdes ni de travaux en élévation des bras).

1e enquête économique : l’enquêteur a fixé le taux d’invalidité à 44%, sur la base de la méthode extraordinaire d’évaluation.

Par projet de décision du 23.07.2018, l’office AI a informé l’assuré qu’il envisageait de lui reconnaître un droit à un quart de rente d’invalidité dès le 01.10.2016. L’intéressé a contesté le calcul de la rente et a conclu à l’octroi de trois quarts de rente, entraînant un nouveau complément du rapport de l’enquêteur économique, lequel a réévalué le taux d’invalidité à 35,46% (rapport du 27.09.2018).

Dans un nouveau projet de décision du 3 octobre 2018, l’office AI a informé l’assuré de son intention de lui dénier tout droit à une rente d’invalidité. Par décision du 28.01.2018, il a rejeté la demande de prestations de l’assuré, motif pris que le degré d’invalidité (35,46%) – déterminé selon la méthode extraordinaire d’évaluation – était insuffisant pour ouvrir le droit à une rente d’invalidité.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 04.05.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Le choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité est une question de droit sur laquelle le Tribunal fédéral se prononce librement (arrêt 9C_337/2020 du 25 novembre 2020 consid. 3 et la référence).

 

Dans son écriture adressée à l’office AI le 28.02.2018, l’assuré a indiqué avoir adapté ses tâches professionnelles dans le but de réduire sa perte de gain, ensuite de l’apparition de ses problèmes de santé. Il a relevé avoir diminué ses activités de charpente ainsi que les travaux lourds et accomplir en contrepartie davantage de travaux de menuiserie, ce dont l’enquêteur économique a tenu compte dans son rapport complémentaire du 27.09.2018 pour réévaluer à la baisse la perte de gain. Il résulte en outre des faits constatés par la cour cantonale que l’assuré fait appel à du personnel temporaire en fonction des besoins, de sorte que les résultats d’exploitation de son entreprise dépendent d’au moins un facteur étranger à l’invalidité. Ainsi, les circonstances justifient le choix de l’office AI et de l’autorité précédente d’appliquer la méthode extraordinaire pour déterminer le taux d’invalidité, comme d’ailleurs requis par l’assuré dans son écriture du 28.02.2018.

Le fait que celui-ci invoque dorénavant l’application d’une autre méthode d’évaluation ne saurait suffire à admettre le bien-fondé de son grief. Rien n’interdisait par ailleurs à l’enquêteur économique de compléter son analyse dans son rapport complémentaire du 27.09.2018 pour aboutir à de nouvelles conclusions, ni à l’office AI de se fonder sur cette nouvelle évaluation pour rendre une décision qui s’écartait du premier projet de décision du 23.07.2018. Enfin, on ne voit pas en quoi l’office AI ou la juridiction cantonale auraient, en appliquant la méthode extraordinaire d’évaluation de l’invalidité, confondu la situation personnelle de l’assuré avec celle de son entreprise, comme le soutient l’assuré en se référant à la jurisprudence prohibant une telle confusion (cf. notamment arrêt 9C_236/2010 du 7 octobre 2009 consid. 3.4).

 

Les critiques de l’assuré concernant sa reconversion imposée dans une nouvelle activité salariée tombent à faux, dès lors que tant l’office AI que l’instance cantonale ont évalué le taux d’invalidité en tenant compte de son choix de poursuivre son activité habituelle moyennant certains aménagements. L’assuré ayant clairement exprimé ce choix et librement réorganisé son entreprise pour assurer la viabilité de celle-ci malgré les atteintes à sa santé, on ne voit pas que la cour cantonale aurait violé sa liberté économique.

 

Par ailleurs, les juges cantonaux n’ont pas retenu que son entreprise était tenue de renoncer à tout travail de charpente pour réduire le dommage; le rapport complémentaire de l’enquêteur économique du 27.09.2018, qui fonde le taux d’invalidité retenu de 35,46%, mentionne que l’on peut exiger de l’assuré qu’il accomplisse des travaux de menuiserie, avec une baisse de rendement, et qu’il renonce à accomplir lui-même les travaux de charpente pour les confier, sous sa surveillance et sa direction, à son ouvrier ou à des travailleurs temporaires. Par rapport à la première évaluation du taux d’invalidité ressortant du rapport complémentaire du 17.07.2018, le nouveau calcul présenté dans le rapport subséquent du 27.09.2018 prend mieux en compte les aménagements effectués dans l’entreprise ensuite de l’apparition des problèmes de santé de l’assuré, ainsi que ses limitations fonctionnelles, qui le handicapent plus lourdement dans des travaux de charpente que dans ceux en principe plus légers de menuiserie. La nouvelle évaluation du taux d’invalidité, arrêté à 35,46%, reflète davantage les activités encore exigibles de la part de l’assuré, dont il a fait état dans son courrier du 28.02.2018, que l’évaluation précédente ayant abouti à un taux d’invalidité de 44%. Il convient de s’y tenir. Dès lors, par ailleurs, que l’assuré a voulu maintenir son activité habituelle sans envisager une reconversion professionnelle, il devait s’attendre à devoir aménager certains champs d’activité en fonction des limitations mises en évidence par les médecins. A cet égard, c’est en vain qu’il soutient que les travaux de charpente ne pourraient pas être effectués sans lui, alors qu’il avait l’habitude – déjà avant la survenance de l’atteinte à la santé – de recourir à l’aide d’auxiliaires temporaires en cas de besoin.

 

Le TF rejette le recours de l’assuré.

 

 

Arrêt 9C_325/2021 consultable ici

 

 

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