9C_365/2021 (d) du 19.01.2022 – Moyens auxiliaires à l’âge AVS – Chaussures orthopédiques / Capacité à se tenir debout de façon autonome – Notion de déplacement

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_365/2021 (d) du 19.01.2022

 

Consultable ici

NB : traduction personnelle ; seul l’arrêt fait foi

 

Moyens auxiliaires à l’âge AVS – Chaussures orthopédiques / 43quater LAVS – 66ter RAVS – OMAV

Capacité à se tenir debout de façon autonome – Notion de déplacement

 

Assurée, née le 07.12.1954, perçoit une rente vieillesse depuis janvier 2019. Le 31.07.2019, elle a demandé à l’office AI de prolonger la garantie de prise en charge des frais pour des chaussures orthopédiques sur mesure, en joignant un devis du 30.07.2019 d’un montant de CHF 5’513.15. Décision de refus de la caisse cantonale de compensation.

 

Procédure cantonale

Par jugement du 28.04.2021, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

Consid. 3.1
Selon l’art. 43quater LAVS, le Conseil fédéral fixe les conditions auxquelles les bénéficiaires de rentes de vieillesse ou de prestations complémentaires qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse et qui ont besoin d’appareils coûteux pour se déplacer, établir des contacts avec leur entourage ou assurer leur indépendance ont droit à des moyens auxiliaires (al. 1). Il désigne les moyens auxiliaires que l’assurance remet et ceux pour lesquels elle alloue des contributions à titre de participation aux frais; il règle la remise de ces moyens auxiliaires ainsi que la procédure et détermine quelles dispositions de la LAI sont applicables (al. 3).

Consid. 3.2
Le Département fédéral de l’intérieur fixe les conditions du droit à la remise de moyens auxiliaires aux bénéficiaires d’une rente de vieillesse, prescrit le genre des moyens auxiliaires à re­mettre et règle la procédure de remise (art. 66ter al. 1 RAVS). Les art. 14bis et 14ter RAI sont applicables par analogie (al. 2).

Consid. 3.3
L’art. 2 al. 1 OMAV (concernant la remise de moyens auxiliaires par l’assurance‑vieillesse; RS 831.135.1) prévoit que les bénéficiaires d’une rente de vieillesse qui sont domiciliés en Suisse et ont besoin de moyens auxiliaires pour accomplir leurs travaux habituels, se déplacer, établir des contacts avec leur entourage ou développer leur autonomie personnelle, ont droit à des prestations de l’assurance, selon la liste annexée. Cette liste définit exhaustivement le genre et l’ampleur des prestations afférentes à chaque moyen auxiliaire.

Le ch. 4.51 de la liste des moyens auxiliaires annexée à l’OMAV, relatif aux chaussures orthopédiques sur mesure et chaussures orthopédiques de série, frais de fabrication inclus, mentionne la prise en charge pour autant qu’elles soient adaptées individuellement à une forme ou à une fonction pathologique du pied ou qu’elles remplacent un appareil orthopédique. La prestation de l’assurance peut être revendiquée au maximum tous les deux ans, à moins que des raisons médicales ne justifient un nouvel achat de chaussures orthopédiques sur mesure avant l’expiration de ce délai.

Consid. 3.4
Conformément à l’art. 4 OMAV, les bénéficiaires d’une rente de vieillesse domiciliés en Suisse qui bénéficient de moyens auxiliaires ou de contributions aux frais au sens des art. 21 et 21bis LAI au moment où ils peuvent prétendre une rente AVS, continuent d’avoir droit à ces prestations dans la même mesure, tant que les conditions qui présidaient à leur octroi sont remplies et autant que la présente ordonnance n’en dispose pas autrement. Pour le reste, les dispositions de l’assurance-invalidité relatives aux moyens auxiliaires sont applicables par analogie.

Consid. 4
Le tribunal cantonal a rejeté le recours de l’assurée au motif que les chaussures orthopédiques sur mesure ne servaient pas se déplacer, pas plus qu’à établir des contacts avec son entourage ou développer son autonomie personnelle. L’assurée ne serait plus capable de marcher et ne pourrait pas non plus marcher avec les chaussures orthopédiques sur mesure demandées. En outre, elle ne serait plus en mesure de se tenir debout toute seule. Elle ne peut pas effectuer elle-même les transferts depuis ou vers le fauteuil roulant électrique. Pour cela, elle a besoin de l’aide de deux soignants; l’un stabilise le « Eulenburg » et l’autre positionne les pieds. Un transfert effectué de cette manière par des tiers ne constitue pas un déplacement au sens de l’art. 43quater al. 1 LAVS ou de l’art. 21 al. 2 LAI.

Consid. 5
Il n’est pas contesté que l’assurée ne peut plus marcher seule, ni même faire quelques pas. Le tribunal cantonal a toutefois constaté de manière manifestement erronée qu’elle ne pouvait même plus se tenir debout seule. Les médecins de la clinique universitaire E.__ ont rapporté que des chaussures orthopédiques sur mesure permettraient de rétablir la capacité de se tenir debout pour le transfert entre le lit et le fauteuil roulant, capacité qui n’est plus donnée en raison de la déformation du pied, de l’instabilité qui en résulte et des douleurs.

La constatation de fait de l’instance cantonale, critiquée dans le recours, doit donc être corrigée en ce sens que l’assurée est en mesure de se tenir debout de manière autonome grâce aux chaussures orthopédiques sur mesure, même si ce n’est que pour une courte durée.

Consid. 6.1
Dans le cadre des listes annexées à l’OMAI et l’OMAV, il existe un droit à des moyens auxiliaires dans la mesure où ils sont nécessaires pour se déplacer, établir des contacts avec l’entourage ou développer l’autonomie personnelle. Cette condition est remplie si l’on ne peut exiger de la personne assurée qu’elle se déplace, reste en contact avec l’entourage ou prenne soin d’elle-même sans l’objet revendiqué et si la personne assurée a la volonté et la capacité d’atteindre l’un de ces buts à l’aide de l’objet revendiqué (arrêts 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 consid. 3.2 et 8C_531/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4.2, chacun avec référence au ATFA 1968 p. 2018 consid. 3d).

Consid. 6.3
L’arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 26 septembre 1984, publié dans RCC 1985 p. 168 ss, cité par l’assurée, se basait sur le cas d’un assuré qui avait demandé des attelles en matière synthétique (pour ménager son appareil de marche en métal et en cuir utilisé au quotidien). Celles-ci lui permettaient de se rendre de la douche à la piscine de manière autonome et lui permettaient ainsi de se déplacer, ce qui correspondait à l’objectif de l’art. 21 al. 2 LAI. Toutefois, étant donné que l’assurée ne peut plus marcher même avec les chaussures orthopédiques sur mesure et qu’elle n’est notamment pas en mesure de parcourir sans aide extérieure le court trajet entre le lit et le fauteuil roulant, il ne résulte rien en sa faveur de ce jugement.

Consid. 6.4
Le Tribunal fédéral a déjà eu à juger deux cas similaires à celui dont il s’agit ici (la similitude des faits n’apparaissant que si l’on se réfère aux décisions des instances inférieures sur lesquelles se fondent les arrêts du Tribunal fédéral correspondants). Ceux-ci ne concernaient certes pas des chaussures orthopédiques, mais des orthèses de jambe, mais les principes énoncés à l’époque sont valables pour les deux catégories de moyens auxiliaires.

Dans l’arrêt 8C_531/2009 du 23 octobre 2009, il s’agissait d’une assurée qui ne pouvait pas marcher elle-même avec les orthèses de la cuisse et de la jambe demandées comme moyens auxiliaires, mais qui pouvait se tenir debout. La capacité de se tenir debout, rétablie au moyen d’orthèses, a eu un effet positif sur la locomotion (selon les constatations de la décision cantonale à l’origine de l’affaire), notamment dans la mesure où l’assurée ne devait plus être soulevée pour passer du lit au fauteuil roulant. L’arrêt 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 s’est penché sur le cas d’un assuré pour lequel les orthèses de la jambe inférieure sollicitées n’entraînaient certes ni la capacité de marcher ni celle de se tenir debout, mais permettaient un positionnement stable des pieds déformés dans le fauteuil roulant (selon les constatations de la décision cantonale à l’origine de l’arrêt) et ne permettaient donc que la locomotion en fauteuil roulant ou la facilitaient considérablement.

Dans les deux cas, le Tribunal fédéral a nié le droit aux prestations. Il a motivé sa décision par le fait que les moyens auxiliaires demandés ne permettaient pas aux personnes assurées d’atteindre l’un des objectifs légaux. Il a ainsi rejeté la position défendue dans les décisions attaquées (fondée sur un passage non pertinent du message du 27 février 1967 relatif à la 1re révision de l’AI [FF 1967 I 653, 676 s.]). ), selon lequel il aurait suffi que le moyen auxiliaire apporte une certaine autonomie dans le cadre du transfert entre le lit et le fauteuil roulant (arrêt 8C_531/2009 du 23 octobre 2009 consid. 4) ou qu’il permette ou facilite le déplacement en fauteuil roulant (arrêt 9C_70/2013 du 30 décembre 2013 consid. 3).

Consid. 6.5
Les chaussures orthopédiques sur mesure demandées à titre de moyens auxiliaires permettent uniquement à l’assurée de se tenir debout sur une courte période, notamment pour le transfert entre le lit et le fauteuil roulant, qui doit être effectué par deux personnes auxiliaires. Ils confèrent certes à l’assurée une certaine autonomie ou lui permettent voire facilitent ses déplacements en fauteuil roulant ; en revanche elles ne lui permettent pas d’atteindre l’un des buts prévus par la loi. La situation n’est donc pas différente des deux arrêts cités.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_365/2021 consultable ici

 

 

Proposition de citation : 9C_365/2021 (d) du 19.01.2022, in assurances-sociales.info – ionta (https://assurances-sociales.info/2022/03/9c_365-2021)

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