Le Protocole n° 15 à la Convention européenne des droits de l’homme entre en vigueur

Le Protocole n° 15 à la Convention européenne des droits de l’homme entre en vigueur

 

Communiqué de presse de la CrEDH du 01.08.2021 consultable ici

Protocole n° 15 consultable ici

 

Le Protocole n° 15, amendant la Convention européenne des droits de l’homme, est entré en vigueur le dimanche 1er août 2021. Ce Protocole introduit dans le préambule de la Convention une référence au principe de subsidiarité et à la doctrine de la marge d’appréciation. Par ailleurs, le délai de 6 mois durant lequel la Cour peut être saisie après une décision nationale définitive sera ramené à 4 mois à compter du 1er février 2022.

Il apporte également à la Convention les modifications suivantes :

  • concernant le critère de recevabilité du «préjudice important», la seconde condition, empêchant le rejet d’une affaire n’ayant pas été dûment examinée par un tribunal interne, est supprimée ;
  • les parties à une affaire ne peuvent plus s’opposer au dessaisissement d’une Chambre au profit de la Grande Chambre ;
  • les candidats au poste de juge à la Cour doivent être âgés de moins de 65 ans à la date à laquelle la liste de trois candidats est attendue par l’Assemblée parlementaire.

Adopté en 2013, le Protocole 15 a été ratifié par tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.

 

En détail

Principe de subsidiarité et à la doctrine de la marge d’appréciation

Un nouveau considérant a été ajouté à la fin du préambule de la Convention contenant une référence au principe de subsidiarité et à la doctrine de la marge d’appréciation. Il est destiné à renforcer la transparence et l’accessibilité de ces caractéristiques du système de la Convention et à rester cohérent avec la doctrine de la marge d’appréciation telle que développée par la Cour dans sa jurisprudence. Les Etats Parties à la Convention sont tenus de reconnaître à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis dans la Convention et d’octroyer un recours effectif devant une instance nationale à toute personne dont les droits et libertés ont été violés. La Cour interprète de manière authentique la Convention. Elle offre également une protection aux personnes dont les droits et les libertés ne sont pas garantis au niveau national.

La jurisprudence de la Cour indique clairement que les Etats Parties disposent, quant à la façon dont ils appliquent et mettent en œuvre la Convention, d’une marge d’appréciation qui dépend des circonstances de l’affaire et des droits et libertés en cause. Cela reflète le fait que le système de la Convention est subsidiaire par rapport à la sauvegarde des droits de l’homme au niveau national et que les autorités nationales sont en principe mieux placées qu’une cour internationale pour évaluer les besoins et les conditions au niveau local. La marge d’appréciation va de pair avec le contrôle mis en place par le système de la Convention. A cet égard, le rôle de la Cour est d’examiner si les décisions prises par les autorités nationales sont compatibles avec la Convention, eu égard à la marge d’appréciation dont disposent les Etats.

Conformément à l’article 8, paragraphe 4, du Protocole, aucune disposition transitoire n’est applicable à cette modification, qui entrera en vigueur conformément à l’article 7 du Protocole.

 

Dessaisissement en faveur de la Grande Chambre

L’article 30 de la Convention a été amendé de manière à ce que les parties ne puissent plus s’opposer au dessaisissement d’une affaire par une chambre en faveur de la Grande Chambre. Cette mesure est destinée à contribuer à la cohérence de la jurisprudence de la Cour, qui a indiqué qu’elle envisageait de modifier son Règlement (article 72) de manière à ce que les chambres soient tenues de se dessaisir en faveur de la Grande Chambre lorsqu’elles envisagent de s’écarter d’une jurisprudence bien établie. La suppression du droit d’opposition des parties au dessaisissement renforcera ce développement.

La suppression de ce droit vise également à accélérer la procédure devant la Cour dans des affaires qui soulèvent une question grave relative à l’interprétation de la Convention ou de ses protocoles ou qui peuvent potentiellement conduire à s’écarter de la jurisprudence existante.

A cet égard, il est attendu de la chambre qu’elle consulte les parties sur ses intentions et il serait préférable que la chambre affine l’affaire dans toute la mesure du possible, y compris en déclarant irrecevable toute partie pertinente de l’affaire avant de s’en dessaisir.

Cette modification est apportée dans l’attente que la Grande Chambre donne à l’avenir des indications plus précises aux parties sur ce qui peut potentiellement conduire à s’écarter de la jurisprudence existante ou sur la question grave relative à l’interprétation de la Convention ou de ses protocoles.

Une règle transitoire est prévue à l’article 8, paragraphe 2, du Protocole. Dans un souci de sécurité juridique et de prévisibilité de la procédure, il a été jugé nécessaire de préciser que la suppression du droit d’opposition des parties au dessaisissement ne s’appliquera pas aux affaires pendantes dans lesquelles l’une des parties s’est déjà opposée, avant l’entrée en vigueur du Protocole, à une proposition de dessaisissement d’une chambre au profit de la Grande Chambre.

 

Délai pour le dépôt des requêtes

Les articles 4 et 5 du Protocole amendent l’article 35 de la Convention. Le paragraphe 1 de l’article 35 a été amendé pour réduire de six à quatre mois le délai suivant la date de la décision interne définitive dans lequel une requête doit être introduite devant la Cour. Le développement de technologies de communication plus rapides, d’une part, et des délais de recours en vigueur dans les Etats membres d’une durée équivalente, d’autre part, ont plaidé pour la réduction de ce délai.

Une disposition transitoire figure à l’article 8, paragraphe 3, du Protocole. Il a été jugé que la réduction du délai pour soumettre une requête à la Cour ne devrait s’appliquer qu’après une période de six mois après la date d’entrée en vigueur du Protocole, afin de permettre aux requérants potentiels de prendre pleinement connaissance du nouveau délai. Ce nouveau délai n’a, en outre, aucun caractère rétroactif puisqu’il est précisé au paragraphe 4, dernière phrase, qu’il ne s’applique pas aux requêtes au regard desquelles la décision définitive au sens de l’article 35, paragraphe 1, de la Convention a été prise avant la date d’entrée en vigueur de la nouvelle règle.

 

Préjudice important

L’article 35, paragraphe 3.b, de la Convention contenant le critère de recevabilité concernant le «préjudice important» a été amendé pour supprimer la condition que l’affaire ait été dûment examinée par un tribunal interne. L’exigence d’examiner le bien-fondé de la requête si le respect des droits de l’homme l’exige demeure. Cet amendement est destiné à donner un plus grand effet à la maxime de minimis no curat praetor.

S’agissant de la modification introduite en ce qui concerne le critère de recevabilité du «préjudice important», aucune disposition transitoire n’est prévue. Conformément à l’article 8, paragraphe 4, du Protocole, cette modification s’appliquera dès l’entrée en vigueur du Protocole, afin de ne pas retarder l’impact de l’efficacité accrue du système qui en est attendue. Elle s’appliquera par conséquent également aux requêtes pour lesquelles la décision sur la recevabilité est pendante à la date d’entrée en vigueur du Protocole.

 

 

Communiqué de presse de la CrEDH du 01.08.2021 consultable ici

Protocole n° 15 consultable ici

Rapport explicatif du Protocole n° 15 disponible ici

 

 

Print Friendly, PDF & Email

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.