9C_667/2020 (f) du 29.12.2020 – Libre appréciation des preuves de l’office AI – 40 PCF – 55 al. 1 LPGA – 19 PA / Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_667/2020 (f) du 29.12.2020

 

Consultable ici

 

Libre appréciation des preuves de l’office AI / 40 PCF – 55 al. 1 LPGA – 19 PA

Expertise médicale mise en œuvre par l’assurance perte de gain maladie

 

Assurée, née en 1955, professeur d’arts visuels à temps partiel, en arrêt de travail depuis le 17.11.2017. Dépôt demande AI le 27.04.2018.

L’office AI a recueilli l’avis du psychiatre traitant, puis versé à son dossier celui de l’assurance perte de gain en cas de maladie, qui contenait notamment un rapport d’expertise établi le 29.08.2018 par un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie. Celui-ci a diagnostiqué – sans répercussion sur la capacité de travail – un trouble affectif bipolaire, actuellement en rémission. Le psychiatre a indiqué que l’assurée disposait d’une capacité de travail entière dans son activité habituelle d’enseignante au taux d’activité courant ; dans une activité adaptée, elle pouvait travailler à plein temps. En application de la méthode mixte d’évaluation de l’invalidité, l’office AI a nié le droit de l’assurée à des prestations de l’assurance-invalidité.

 

Procédure cantonale (arrêt ATAS/783/2020 – consultable ici)

Par jugement du 09.09.2020, rejet du recours par le tribunal cantonal.

 

TF

L’assurée reproche, entre autres, à la juridiction cantonale d’avoir d’une part accordé une pleine valeur probante aux conclusions de l’expertise psychiatrique du 29.08.2018. Elle fait valoir pour l’essentiel que l’évaluation psychiatrique a été mise en œuvre par son assureur perte de gain en cas de maladie et qu’elle n’a pas été en mesure de faire usage des droits qui auraient été les siens si l’expert psychiatre s’était prononcé à la demande de l’office AI. Elle soutient qu’elle n’a en particulier pas pu faire usage de son droit de poser des questions complémentaires au psychiatre et de mettre l’accent sur certaines « lacunes criardes » de son évaluation, telles que l’admission d’une pleine capacité de travail alors qu’elle prend quotidiennement un « cocktail » de huit médicaments différents pour tenter de stabiliser ses troubles psychiques. En se référant à l’ATF 141 III 433, elle soutient qu’une expertise réalisée à la demande d’un assureur privé ne serait pas un moyen de preuve au sens des art. 168 ss CPC et que les faits qu’elle renferme seraient de simples allégations de partie.

 

Selon le Tribunal fédéral : Les critiques de l’assurée à l’égard de la valeur probante des conclusions médicales suivies par les premiers juges sont mal fondées. Lors du dépôt d’une demande de prestations, l’office AI n’intervient tout d’abord pas comme une partie à la procédure, mais en tant qu’organe administratif chargé d’exécuter la loi. Conformément au principe de la libre appréciation des preuves, applicable en vertu de l’art. 40 PCF, en lien avec les art. 55 al. 1 LPGA et 19 PA, l’office AI n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux (ATF 125 V 351 consid. 3 p. 352). Le code de procédure civile, singulièrement l’art. 168 CPC, ne réglemente par conséquent pas la manière dont l’office AI doit apprécier les conclusions d’un rapport médical dans une procédure relevant du droit des assurances sociales (arrêt 8C_240/2016 du 13 juillet 2016 consid. 5.2; cf. ATF 141 III 433 consid. 2.6 p. 437).

L’administration n’a ensuite pas elle-même mis en œuvre une expertise auprès d’un médecin externe à l’assurance-invalidité, ni n’est intervenue dans sa réalisation (à ce sujet, ATF 136 V 113 consid. 5.4 p. 116), mais a versé à son dossier le rapport médical initié par un tiers. Les droits procéduraux prévus par l’art. 44 LPGA n’ont pas trouvé application et le rapport de l’expert psychiatre ne saurait être qualifié d’expertise médicale (externe à l’assureur social) au sens de cette disposition. L’assurée a cependant eu connaissance de ce rapport, à l’encontre duquel elle a pu faire valoir ses critiques. Elle l’a du reste contesté en procédure administrative. A ce stade-là, elle aurait donc déjà pu invoquer les « lacunes criardes » dont elle se plaint en procédure fédérale.

Cela étant, dans le cadre de la procédure de l’assurance-invalidité, l’évaluation de ce psychiatre est un document médical parmi d’autres qu’il appartenait tant à l’office AI qu’à la juridiction cantonale d’inclure dans leur appréciation des preuves. Or, en tant qu’elle invoque à l’encontre de celle-ci uniquement les effets de sa médication sur sa capacité de travail, l’assurée ne met pas en évidence de doutes, mêmes faibles, quant à la fiabilité et à la pertinence des conclusions médicales suivies par les juges cantonaux, en présence desquels une expertise menée par un médecin externe à l’assurance aurait dû être mise en œuvre (art. 44 LPGA; ATF 135 V 465 consid. 4.4 p. 469). Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de s’écarter des constatations des premiers juges au sujet de la capacité de travail.

 

Le TF rejette le recours de l’assurée.

 

 

Arrêt 9C_667/2020 consultable ici

 

 

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